LE PROGRAMME D'AVION DE TRANSPORT FUTUR (ATF)

1999 ANNÉE DU CHOIX POUR L'ATF

Pour l'aviation de transport militaire, 1999 sera l'année du choix pour le renouvellement de la flotte. Rappelons qu'il s'agit de définir l'avion de transport futur (ATF), successeur du Transall dont la première génération sera progressivement retirée du service à partir de 2004. Si l'on souhaite éviter toute perte de capacités opérationnelles en matière de projection de forces, les premières livraisons de l'ATF devront intervenir au plus tard en 2005.

Trois solutions sont en cours d'examen pour l'acquisition "sur étagères" de ATF.

La première consiste à développer, en coopération européenne à sept pays (France, Allemagne, Royaume-Uni, Italie, Espagne, Belgique, Turquie), un avion nouveau, le FLA (Future Large Aircraft) sous l'égide d'Airbus Industrie qui créera pour cela une filiale Airbus Military Company associant les industriels des pays participants.

La deuxième consiste à acheter sur étagères une flotte mixte d'avion américain Lockheed C130J et Boeing C17, 1 flotte de 5 C17 et 48 C130J paraissant le mieux adaptée.

La troisième consiste à adapter l'avion russo-ukrainien Antonov 70. Une occidentalisation de l'avion est nécessaire pour qu'il réponde mieux aux besoins occidentaux en termes opérationnels de sécurité et de soutien.

Il est important de ne pas se tromper à l'occasion de ce choix qui conditionnera les capacités opérationnelles des armées, pour les 30 années à venir, d'autant plus qu'un certain nombre d'arguments autres qu'opérationnels sont là pour influencer le choix. Les enjeux industriels par exemple, avec la restructuration de l'industrie aéronautique militaire en Europe, ou bien la prise en compte au plan politique de nos relations bilatérales avec la Russie et l'Ukraine.

Tout cela ne devra pas faire perdre de vue qu'il s'agit avant tout de satisfaire, au meilleur coût, un besoin opérationnel bien défini, tout en préservant dans la mesure du possible nos capacités industrielles.

Il semble bien, à l'examen des études déjà menées, que le choix du FLA doive s'imposer. Dans la mesure où il sera confirmé que le FLA est la réponse au besoin opérationnel, son choix possédera à nos yeux d'immenses vertus au plan de la solidarité européenne et de l'élan qui doit nous animer vers une défense européenne autonome.

LE BESOIN OPÉRATIONNEL

Le besoin opérationnel d'aéromobilité des armées se décline pour le transport aérien militaire en besoin de projection stratégique inter-théâtres, et en capacité de manoeuvre tactique intra-théâtre.

Le premier volet du besoin nécessite de déployer suffisamment vite et loin de la métropole des moyens pour stopper la dynamique initiale d'un adversaire potentiel, puis d'entretenir le flux de ravitaillement des forces projetées. Seuls des avions cargos possédant de bonnes capacités d'emport et un rayon d'action suffisant sont capables de remplir ces missions logistiques.

La manoeuvre tactique intra-théâtre quant à elle, ayant pour objet l'engagement au contact direct des troupes adverses par aéroportage ou aérolargage, suppose l'emploi d'appareils dotés de capacités spécifiques : parachutage, poser d'assaut, vol autonome et discret en très basse altitude, aptitude à pratiquer des terrains sommairement aménagés ou à survivre en zone de menace...

L'armée de l'air a exprimé, dès 1984, le besoin d'un avion de transport moderne qui conserverait les bonnes capacités tactiques du Transall. Ses capacités logistiques devront permettre de répondre à un besoin nouveau : la projection de matériels lourds et volumineux que la flotte actuelle est incapable d'emporter.

Ce besoin convergeant avec celui d'autres pays européens, un projet commun d'avion de transport futur a ainsi été étudié conjointement par les experts de huit nations: l'Allemagne, la Belgique, l'Espagne, la France, l'Italie, le Portugal, le Royaume-Uni et la Turquie. L'intérêt opérationnel de ce programme réside dans le choix délibéré des pays partenaires de réaliser un appareil polyvalent répondant à la fois aux besoins logistique de projection inter-théâtres et tactique d'opérations intra-théâtre.

Les huit pays concernés se sont mis d'accord sur une fiche de caractéristiques acceptable par tous mais où chacun a limité les spécifications opérationnelles à leur plus juste expression. Le résultat répond ainsi au besoin opérationnel commun tout en restant simple et réaliste. Le tableau suivant récapitule le besoin par pays.


PAYS

BESOIN

ECHEANCE

Allemagne

75

2008

Royaume-Uni

45

2004

France

50

2005

Italie

44

2008

Espagne

36

2008

Turquie

20 à 26

2007

Belgique

12

2010

Portugal 7( * )

6 à 9

2010

CARACTÉRISTIQUES TECHNIQUES ET PERFORMANCES

La solution commune correspond en fait aux caractéristiques et performances retenues pour le FLA, remises aux industriels européens dans le cadre des activités de pré-lancement. Le besoin militaire français est totalement satisfait par les performances retenues pour le FLA. Les dimensions de sa soute permettront notamment d'emporter tous les matériels de l'armée de terre, futurs ou existants, susceptibles d'être projetés en opération extérieure (hélicoptères SUPER-PUMA, NH 90 et TIGRE, système sol-air SAMP/T, véhicule blindé VBCI, camion TRM 10000, etc.)

PERFORMANCES DU FLA

MASSES

Charge offerte

25 T (*)

MOTORISATION

4 Turbo propulseurs

9000/10000 SHP

DIMENSIONS

Longueur

17 m 25

DE

Largeur

4 m

LA SOUTE

Hauteur

3 m 85

VITESSES

Vitesse de croisière

M = 0,68

NIVEAU DE

Normal

31000 A 35000 FT

CROISIERE

Plafond maximal

40000 FT

PERFORMANCES

Distance franchie avec 25 T

3700 Km/2000 Nm

 

Distance franchie avec 17 T

5500 Km/3000 Nm

(* Cette masse peut être portée à 32 T sous certaines conditions.)

La définition commune du besoin a permis de regrouper certains pays désireux de mettre en concurrence plusieurs solutions.

Quatre pays (Royaume-Uni, France, Espagne, Belgique) ont décidé de mettre en compétition la solution ATF avec celle de l'achat d'appareils américains disponibles sur étagères : le C130J de Lockheed et le C17 de Boeing- Mc Donell Douglas. Le premier est pénalisé par la taille de sa soute qui ne permettra pas l'emport des matériels futurs et le second a des capacités tactiques très inférieures à celles du FLA. Une flotte mixte de ces 2 appareils répond en grande partie au besoin commun. Un appel d'offres a été lancé auprès des constructeurs américains afin de recueillir leurs propositions pour le 31 janvier 1999.

A l'initiative de l'Allemagne, les pays participant au programme FLA ont accepté d'envisager la possibilité d'une coopération autour de l'Antonov 70, programme développé conjointement par la Russie et l'Ukraine.

Les travaux menés par Airbus Industrie et les experts étatiques (policy group) ont montré que, si l'AN 70 répond en partie au besoin opérationnel par ses performances, de nombreuses modifications sont nécessaires telles que la refonte complète du cockpit et de l'avionique pour permettre le pilotage à deux. En outre, de nombreuses incertitudes subsistent sur la certification aux normes de sécurité occidentales, l'interopérabilité avec les matériels occidentaux, la réalisation d'un soutien logistique moderne et la garantie de sa pérennité.

Airbus Industrie a donc renoncé à prendre la responsabilité de maître d'oeuvre contractant d'un AN 70 "occidentalisé", et le policy group du programme FLA a interrompu les discussions avec le consortium Antonov

Toutefois, nos partenaires allemands ont décidé de continuer à examiner cette solution, en confiant par contrat une étude à son industriel DASA sur les possibilités de coopération autour de l'AN 70. La France, l'Espagne et l'Italie sont associées à cette démarche par l'intermédiaire de leurs industriels. L'option pour l'armée de l'air d'une solution AN 70 sera définitivement examinée pour le 31 janvier 1999.



nota : aucune information fiable n'est réellement disponible sur les capacités de soute de l'AN 70, la soute serait d'une taille comparable à celle du FLA.



La somme des crédits déjà consommés pour ce programme s'établit à 85 millions de francs. Le projet de loi de finances pour 1999 prévoit des crédits de paiement à hauteur de 44 millions. Ces sommes correspondent en fait à 50% du financement des activités de pré-lancement menées par Aérospatiale.

Même si l'on peut estimer le prix unitaire de série du FLA à environ 600 MF, il est nécessaire d'attendre la fin janvier 99 pour connaître le coût global du programme ATF, dans l'option qui sera retenue. S'agissant d'un achat sur étagères, il faut d'ores et déjà envisager que la commande ne pourrait être que globale à une date qui ne saurait dépasser l'an 2000. Le montant correspondant en autorisation de programme devra donc être prévu dés le projet de budget 2000.

*

* *

Que l'on examine l'une ou l'autre des trois solutions, les avantages du FLA paraissent l'emporter lorsqu'on considère la réponse apportée au besoin militaire exprimé.

Votre rapporteur tient à rappeler également, une fois de plus, les enjeux européens que cette décision sous-tend, en particulier l'élan qu'une solution FLA apporterait à l'esprit de défense européen comme à la constitution d'une industrie autonome.

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