EXAMEN EN COMMISSION
Dans sa
séance du mercredi 25 novembre 1998, la commission a
procédé à l'examen du rapport pour avis de Mme Anne
Heinis sur les crédits consacrés à la mer dans le projet
de loi de finances pour 1999.
Mme Anne Heinis, rapporteur pour avis, a d'abord indiqué que le budget
de la mer, d'un montant de 6,3 milliards de francs dans le projet de loi
de finances pour 1999, finançait l'aide aux transports maritimes, les
mesures prises en faveur de la sécurité en mer, les
dépenses d'entretien des ports maritimes, ainsi que les moyens humains
affectés à la formation des hommes dans le secteur.
Puis, elle a relevé que l'Etablissement national des invalides de la
marine (ENIM) recevait 75 % de la dotation et qu'en conséquence le
budget de la mer, hors sécurité sociale des marins, ne
représentait qu'environ 1,5 milliard de francs. Elle a, d'autre
part, signalé que les aides à la construction navale
étaient gérées par le ministère chargé de
l'industrie tandis que les aides à la pêche l'étaient par
le ministère de l'agriculture.
Mme Anne Heinis, rapporteur pour avis, a ensuite déclaré que les
" moyens des services " du budget de la mer s'élèvaient
à 589,6 millions de francs, soit une augmentation de 5,1 % par
rapport à 1998.
Les principales dépenses concernent :
- la rémunération des personnels des services communs des
affaires maritimes,
- les moyens de fonctionnement des services déconcentrés,
- la signalisation maritime,
- l'entretien et l'exploitation des ports maritimes non autonomes en
métropole.
Les interventions publiques, a-t-elle ajouté,
bénéficieront d'une dotation de 5,419 milliards de francs,
en progression de 3,8 % par rapport à 1998.
En dehors de l'ENIM, les principales dépenses à signaler à
ce titre concernent l'enseignement maritime et les ports autonomes.
Mme Anne Heinis, rapporteur pour avis, a observé que les investissements
exécutés par l'Etat, d'un montant de 235 millions de francs,
seraient en hausse de 8 % par rapport à 1998, les autorisations de
programme enregistrant, quant à elles, une hausse de 6,8 %, avec
291,2 millions de francs.
En revanche, a-t-elle ajouté, les subventions d'investissement
n'atteindront que 17,2 millions de francs en raison de la disparition des
crédits du chapitre 63-35 " aide à l'investissement et aide
à la consolidation et à la modernisation de la flotte de
commerce ". Sur ce point, Mme Anne Heinis, rapporteur pour avis, a
précisé que les injonctions de la commission européenne
avaient conduit le Gouvernement à renoncer aux subventions directes et
à leur substituer un mécanisme de remboursement par l'Etat, des
contributions sociales patronales afférentes aux risques vieillesse,
maladie et accidents du travail, versées, par les entreprises qui
emploient des personnels navigants sur des navires de commerce battant pavillon
français, aux organismes chargés du recouvrement de ces
contributions.
Elle a ensuite relevé que le système des quirats, avait
été, sans doute, " victime de son succès " et
rappelé que le Gouvernement lui avait substitué un
mécanisme de groupement d'intérêt économique (GIE)
fiscal destiné à encourager le financement de notre flotte de
commerce.
Le rapporteur pour avis a souligné que le nombre des navires de commerce
sous pavillon français s'était réduit de 40 % depuis
dix ans, la flotte mondiale ayant, durant la même période,
enregistré une baisse de 5 % en nombre d'unités et une
hausse concomitante de 24 % en tonnage.
Il a encore relevé qu'en l'espace de dix ans, la part de la flotte
européenne dans la flotte mondiale était passée de
23 % à 14 %, la flotte française passant, quant
à elle, du 19ème au 28ème rang mondial en tonnage et
constituant la septième flotte européenne, derrière la
Grèce, la Grande-Bretagne, l'Italie, l'Allemagne, le Danemark et les
Pays-Bas.
Puis, Mme Anne Heinis, rapporteur pour avis, a fait observer que le pavillon
dit des " terres australes et antarctiques françaises "
(TAAF), représentait, au 1er janvier 1998, 44 %, en
unités, et 82 %, en capacité de transport, de la flotte de
commerce française.
Le rapporteur pour avis a encore relevé que le trafic global de la
flotte française s'était élevé en
1996 -dernière année statistique connue- à
88,9 millions de tonnes, dont 51,2 millions de tonnes sous pavillon
français et 37,7 millions de tonnes sur des navires
affrétés ou contrôlés. Il a ajouté que le
chiffre d'affaires de l'armement français, c'est-à-dire les
recettes maritimes et les recettes auxiliaires et annexes, s'était
établi à 22,3 milliards de francs en 1996, contre
21,3 milliards de francs en 1995.
Abordant le problème de la sécurité en mer, Mme Anne
Heinis, rapporteur pour avis, a indiqué qu'à la suite de
l'accident de " l'Estonia " en 1994, l'Organisation Maritime
Internationale (OMI) avait fait adopter de nombreuses mesures concernant la
stabilité, la protection de l'incendie, le sauvetage et les
radio-communications dans les navires construits à partir du
1er juillet 1997.
Le rapporteur pour avis a ensuite insisté sur l'insuffisance des moyens
humains dont la France disposait pour effectuer les opérations de
contrôle de sécurité des navires étrangers, telles
qu'elles sont notamment prévues par le Mémorandum de Paris,
entré en vigueur en 1982, et liant 18 pays d'Europe et le Canada.
Cette situation, a-t-il ajouté, est d'autant plus paradoxale que l'OMI a
décidé de confier à la France la gestion du fichier
informatique " Equasis " qui rassemble toutes les informations
concernant les bateaux de commerce dans le monde.
Après avoir rappelé que le commerce extérieur de la France
s'était élevé, en 1997, à 3.457 milliards de
francs (en hausse de 12,6 % par rapport à 1996), le rapporteur pour
avis a souligné que près de la moitié du commerce
extérieur de la France, exprimé en tonnages (un cinquième
en valeur), était acheminé par les ports maritimes
français.
Puis, Mme Anne Heinis, rapporteur pour avis, a évoqué le
dispositif de formation géré par la direction des affaires
maritimes et des gens de mer : quatre écoles nationales de la
marine marchande, implantées à Marseille, Le Havre, Saint-Malo et
Nantes et douze écoles maritimes et aquacoles. Elle a souligné
que la direction des affaires maritimes procédait actuellement, pour les
quatre écoles de marine marchande, à une opération de
spécialisation (l'école de Nantes étant notamment
appelée à devenir une école de " formation des
formateurs "), mais aussi d'ouverture vers d'autres métiers
para-maritimes, tels que la plongée professionnelle, la navigation de
plaisance, la croisière...
Le rapporteur pour avis a encore relevé que l'OMI serait sur le point
d'habiliter au plan international les enseignements et les diplômes
dispensés par nos quatre écoles de marine marchande.
En conclusion, Mme Anne Heinis, rapporteur pour avis, a plaidé pour une
nouvelle vision prospective qui se substituerait à l'actuelle
" gestion du déclin " dans le domaine de la mer. Cette vision
devait s'appuyer sur les atouts de notre pays en la matière, tant sur le
plan de sa géographie que de la " matière grise "
susceptible d'être mobilisée à travers des outils de
formation adéquats.
M. Jean Huchon a estimé que les dispositifs sociaux existants dans le
secteur maritime pouvaient être démobilisateurs, notamment en ce
qui concerne la recherche d'emploi.
M. Charles Revet a rendu hommage à la qualité de l'enseignement
dispensé par les écoles maritimes et aquacoles. Il a
rappelé que la France constituait la troisième puissance maritime
dans le monde si l'on prenait en compte ses " zones
économiques ". Il s'est interrogé sur la proportion du
commerce extérieur français acheminée par des navires sous
pavillon français.
Après avoir évoqué les difficultés de l'entretien
du littoral, M. Charles Revet s'est inquiété de la
Société nationale de sauvetage en mer (SNSM).
M. Pierre-Yvon Trémel s'est d'abord interrogé sur l'effectif des
marins bénéficiant des dispositifs sociaux. Il s'est ensuite
demandé si les crédits " recherche " dans le domaine de
la mer figuraient dans le budget de la mer. Il a souhaité, enfin,
connaître lui aussi les moyens mis à la disposition de la SNSM.
M. André Ferrand s'est félicité, à son tour, du
travail des écoles maritimes avant de plaider pour une politique de
" reconquête commerciale " de la part de nos ports maritimes.
Il a souligné à cet égard que le port d'Anvers se
considérait comme le premier " port maritime français "
et insisté sur le développement nécessaire des
infrastructures.
M. Michel Teston a fait observer que la " santé " de nos ports
maritimes était liée à la qualité des dessertes
routières et ferroviaires. Il a ensuite rappelé que la SNCF avait
mis en place des " corridors de fret " européens entre les
ports de la côte normande et le Sud-Est.
En réponse aux intervenants, Mme Anne Heinis, rapporteur pour avis, a
notamment déclaré:
- que la qualité des services portuaires expliquait, en grande
partie, le succès des ports de Rotterdam et d'Anvers qui -a-t-elle
rappelé- accueillent chaque année 10 millions de
conteneurs (contre 1 million au Havre) ;
- que les dispositifs d'aide à la reconversion pouvaient parfois,
comme le signale M. Jean Huchon, avoir des effets pervers ;
- que l'amélioration de la desserte des ports était un
impératif majeur ;
- que la SNSM disposera, en 1999, de plus de 4 millions de francs au
titre de la subvention d'entretien et de 9,7 millions de francs au titre
de la subvention d'équipement, ces dotations étant, d'ailleurs,
stables depuis trois ans. Par ailleurs, a-t-elle ajouté, la SNSM est
venue en aide, en 1997, à 2.316 navires et à
7.498 personnes.
Enfin, sur proposition du rapporteur pour avis, la commission a
décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat sur
les crédits de la mer dans le projet de loi de finances pour 1999, les
représentants du groupe socialiste se déclarant favorables
à ce budget.