N° 67
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 19 novembre 1998.
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires culturelles (1) sur le projet de loi de finances pour 1999 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
TOME V
ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
Par M. Jacques VALADE,
Sénateur.
(1)
Cette commission est composée de :
MM. Adrien Gouteyron,
président
; Jean Bernadaux, James Bordas, Jean-Louis
Carrère, Jean-Paul Hugot, Pierre Laffitte, Ivan Renar,
vice-présidents
; Alain Dufaut, Ambroise Dupont, André
Maman, Mme Danièle Pourtaud,
secrétaires
;
MM. François Abadie, Jean Arthuis, Jean-Paul Bataille, Jean
Bernard, André Bohl, Louis de Broissia, Jean-Claude Carle, Michel
Charzat, Xavier Darcos, Fernand Demilly, André Diligent, Michel
Dreyfus-Schmidt, Jean-Léonce Dupont, Daniel Eckenspieller, Jean-Pierre
Fourcade, Bernard Fournier, Jean-Noël Guérini, Marcel Henry, Roger
Hesling, Pierre Jeambrun, Serge Lagauche, Robert Laufoaulu, Jacques Legendre,
Serge Lepeltier, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc,
MM. Pierre Martin
,
Jean-Luc Miraux, Philippe Nachbar,
Jean-François Picheral, Guy Poirieux, Jack Ralite, Victor Reux,
Philippe Richert, Michel Rufin, Claude Saunier, Franck Sérusclat,
René-Pierre Signé, Jacques Valade, Albert Vecten, Marcel Vidal.
Voir les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
1078
,
1111
à
1116
et T.A.
193
.
Sénat
:
65
et
66
(annexe n°
16
)
(1998-1999).
Lois de finances
.
GLOSSAIRE DES SIGLES UTILISÉS
AES :
(Filière) administrative, économique et sociale des
universités
ALS : allocation de logement sociale
BTS : brevet de technicien supérieur
CNESER : conseil national de l'enseignement supérieur et de la
recherche
CPGE : classes préparatoires aux grandes écoles
CNOUS : centre national des oeuvres universitaires et scolaires
CROUS : centre régional des oeuvres universitaires et scolaires
DEUG : diplôme d'études universitaires générales
DUT : diplôme universitaire de technologie
ENA : Ecole nationale d'administration
ENS : Ecole normale supérieure
IATOS : (personnel) ingénieur, administratif, technique, ouvrier et
de service
IUFM : institut universitaire de formation des maîtres
IUP : institut universitaire professionnalisé
IUT : institut universitaire de technologie
LEA : (Filière) langue étrangère appliquée
MASS : (Filière) mathématiques appliquées aux sciences
sociales
MIAS : (Filière) mathématiques et informatique et application
aux sciences
MSG : maîtrise en sciences de gestion
MST : maîtrise de sciences et techniques
PhD : Philosophy Doctorat
U 2000 : Plan Université 2000
U3M : Programme Université pour le troisième millénaire
UFR : unité de formation et de recherche
X : Ecole polytechnique
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Les nombreuses propositions de réformes annoncées depuis
l'installation du gouvernement par le ministre chargé de
l'éducation nationale ont concerné principalement l'enseignement
scolaire, notamment l'école primaire et le lycée.
Par contre, l'enseignement supérieur ne semble pas jusqu'à
maintenant faire l'objet des préoccupations prioritaires du ministre,
même si des tables rondes ont été créées par
exemple sur l'emploi scientifique, les IUFM, les IUT et les personnels IATOS.
A l'exception du plan social étudiant et du programme
" Université du troisième millénaire " qui
connaissent leur première traduction budgétaire, ainsi que des
mesures annoncées pour développer la formation permanente
à l'université et ouvrir celle-ci sur l'extérieur,
l'observateur même averti ne discerne qu'avec difficulté les
lignes de force d'un projet " Allègre " pour l'enseignement
supérieur.
Force est de constater, par exemple, que la réorganisation des cursus
universitaires, qui s'impose à l'évidence dans une perspective
d'harmonisation européenne des diplômes, reste encore au stade des
études de faisabilité et n'a pas encore fait l'objet d'un
arbitrage ministériel.
Avant d'analyser les grands axes du projet de budget de l'enseignement
supérieur pour 1999, il conviendra donc de s'interroger sur les
intentions du gouvernement quant à l'avenir de cet enseignement,
essentiel tant au plan de la formation des élites que du devenir de la
recherche française.
I. L'ABSENCE D'UN PROJET CLAIREMENT IDENTIFIÉ POUR L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
Un an et demi après son installation, préoccupé sans doute davantage par la situation de l'enseignement scolaire, le gouvernement n'a pas encore présenté un projet global pour l'enseignement supérieur et l'université et ne fait, pour l'essentiel, que poursuivre l'action engagée par celui qui l'a précédé en négligeant cependant d'exploiter les propositions de réforme les plus pertinentes.
A. UNE SOUS-UTILISATION DES RÉFLEXIONS PROSPECTIVES EXISTANTES
Votre commission ne peut que regretter que certains travaux récents sur l'avenir de l'enseignement supérieur soient ignorés, comme l'excellent rapport de la commission Fauroux, ou restent sous-utilisés pour des raisons inexplicables, tel le rapport Attali et que les réflexions engagées par l'ancien gouvernement pour réformer l'université n'aient pas été poursuivies.
1. Les mesures du rapport Fauroux concernant l'aménagement de l'enseignement supérieur : des propositions ignorées
Chargé le 11 septembre 1995 par le Premier ministre et
le
ministre de l'éducation nationale de l'époque, de conduire une
consultation sur le système éducatif, M. Roger Fauroux a remis
son rapport le 20 juin 1996.
Celui-ci comporte vingt et une propositions, qui apparaissent d'une
actualité toute particulière pour contribuer à la lutte
contre l'échec scolaire et réduire la lourdeur administrative qui
caractérise la gestion de notre système éducatif
S'agissant de l'enseignement supérieur, le rapport préconise
d'abord une remise à niveau des universités, dont le coût
pour l'Etat est évalué à 15 milliards de francs sur
une période de dix ans.
Les principales mesures proposées s'ordonnent autour des six
priorités suivantes :
a) La recherche d'une simplification des diplômes professionnels
Cet objectif passe par une harmonisation des DUT, des BTS et des diplômes d'études universitaires technologiques et par une réduction (de 600 à une centaine) du nombre des diplômes agréés au niveau national qui permettraient d'engager une simplification des parcours professionnels.
b) Le développement d'une coéducation avec l'entreprise
Dans
cette perspective, les entreprises devraient accueillir par les deux voies de
l'alternance, un plus grand nombre d'étudiants à tous les niveaux
d'enseignement, à l'exception des premiers cycles généraux
et des classes préparatoires.
Les entreprises, les administrations et les services publics devraient ainsi
être en mesure d'accueillir à moyen terme dix fois plus de
stagiaires qu'actuellement, pendant des stages de longue durée, soit
chaque année deux millions de stagiaires.
La commission Fauroux préconise également un recrutement des
élèves des grandes écoles sur des critères
d'expérience comportant une validation des acquis professionnels des
candidats.
c) La réduction de l'échec universitaire dans les premiers cycles
Cet
objectif passerait par un renforcement de l'encadrement pédagogique des
étudiants et par un développement de diplômes
d'études universitaires technologiques préparés par
alternance et ouvrant la voie des spécialisations universitaires de haut
niveau.
Il est également proposé de simplifier et réduire le
nombre des spécialités des DEUG et d'organiser les études
en quadrimestres afin de faciliter les réorientations rapides.
d) Les conditions d'exercice des enseignants
Le
rapport de la commission Fauroux propose que les professeurs
agrégés du secondaire puissent enseigner dans les premiers cycles
universitaires pour une durée maximale de cinq ans, sous réserve
d'entreprendre une thèse qui leur permettrait d'accéder au statut
d'enseignant-chercheur, et soient incités à enseigner trois ans
en IUFM, ce qui leur permettrait d'acquérir une formation
pédagogique aujourd'hui insuffisante.
Par ailleurs, le rapport préconise un assouplissement des conditions de
recrutement des enseignants dans les universités, un accès plus
large de ces derniers aux établissements spécialisés pour
mener à terme des travaux de recherche et l'implantation dans les locaux
universitaires de bureaux qui leur seraient destinés.
e) L'amélioration des conditions d'accueil et de travail des étudiants
La
commission Fauroux propose un effort tout particulier pour les
bibliothèques universitaires, et notamment la construction de
900 000 m2 supplémentaires.
Elle suggère par ailleurs de transformer les premiers cycles en
unités de formation et de recherche autonomes, bénéficiant
d'une autonomie budgétaire, d'y renforcer les travaux dirigés, de
moins spécialiser les apprentissages initiaux et d'affecter des surfaces
pédagogiques spécifiques à ces étudiants.
f) Un développement de l'autonomie des universités
Une plus
grande autonomie des universités résulterait de l'octroi d'une
dotation financière globale, de la maîtrise du recrutement des
personnels non enseignants, de l'élargissement des prérogatives
des établissements pour le recrutement des enseignants-chercheurs, de la
création de diplômes décentralisés, d'un pouvoir de
décision plus large des présidents d'université.
Votre commission ne peut que regretter que le ministre ait
négligé d'exploiter les perspectives ouvertes par le rapport
Fauroux, et notamment celles qui tendent à améliorer la liaison
entre l'université et l'entreprise et à développer
l'autonomie des établissements.
2. Le rapport Attali : des propositions sous-utilisées
Chargé le 21 juillet 1997 par M. Claude Allègre, d'une mission visant à rapprocher les universités et les grandes écoles, M. Jacques Attali a remis le 7 mai 1998 au ministre, un rapport à l'intitulé élargi et proposant un modèle européen d'enseignement supérieur.
a) Un constat sans complaisance
Tout en
reconnaissant la qualité de notre système universitaire et
l'excellence des grandes écoles, le rapport considère d'abord que
notre enseignement supérieur est devenu " confus, bureaucratique et
inégalitaire ". Il qualifie notamment les grandes écoles de
" machines de reproduction des élites " et dénonce un
recrutement de plus en plus étroit et " socialement
extrêmement déséquilibré " : alors que
29 % des élèves des quatre plus grandes écoles (X,
ENA, ENS, Centrale) venaient des milieux populaires en 1950, ce taux est
tombé à 9 % aujourd'hui.
Le rapport constate aussi une orientation inexistante à
l'université, un échec considérable en premier cycle, une
absence de finalité professionnelle du DEUG, une insertion
professionnelle des diplômés universitaires lente et incertaine et
une qualité de l'enseignement dispensé " pas toujours
irréprochable ", les enseignants étant tentés de
privilégier leurs travaux de recherche dans leurs premières
années d'activité.
Il en résulte que la réputation internationale de notre
enseignement supérieur s'affaiblit et que le nombre d'étudiants
étrangers non européens venant étudier en France se
réduit de façon inquiétante. Sauf à s'engager dans
une réforme urgente, tendant à revoir les objectifs et à
simplifier l'organisation de son enseignement supérieur, notre pays
" s'engagerait peu à peu sur la pente d'un irréversible
déclin ".
b) Le rapprochement des universités et des grandes écoles
Le
rapport suggère d'abord de rapprocher les universités et les
grandes écoles notamment en matière de recrutement de la haute
fonction publique et que les grandes écoles concernées
(Polytechnique et Ecole nationale d'administration) perdent le monopole de ces
recrutements.
S'agissant de l'Ecole Polytechnique, outre la dissociation du classement de
sortie et du recrutement des grands corps techniques de l'Etat, il envisage le
recrutement progressif d'une quarantaine d'élèves selon trois
concours spéciaux qui seraient réservés notamment aux
diplômés universitaires de premier cycle et aux titulaires de DUT.
S'agissant de l'ENA, le rapport propose d'une part d'élargir et de
diversifier son recrutement par la mise en place de centres de
préparation régionaux adossés aux universités, et
par un accès élargi ouverts aux élèves du cycle
international, et d'autre part, de réduire les promotions actuelles d'un
tiers en trois ans afin de les adapter aux besoins réels de l'Etat et de
réorienter les postes de sortie vers des fonctions territoriales.
Afin de rapprocher les universités et les grandes écoles
géographiquement voisines, le rapport suggère de créer des
campus d'enseignement supérieur avec équipements et
matériels communs et une mobilité des étudiants et des
enseignants, notamment dans trois sites (Saclay, Marne-la-Vallée,
Montagne Sainte-Geneviève).
c) La diversification des financements
Le rapport propose de favoriser, par toutes les mesures fiscales, législatives et réglementaires appropriées les financements privés de l'enseignement supérieur sans menacer l'indépendance des universités et leur mission de service public et d'inciter notamment les régions à financer ces établissements sans remettre en cause le caractère national des diplômes.
d) Une condition préalable : la définition des missions de l'enseignement supérieur
Le rapport suggère, avant toute réforme, de redéfinir les missions de l'enseignement supérieur : celui-ci doit préparer à la vie professionnelle, favoriser la formation permanente, faire progresser la justice sociale, s'ouvrir sur le monde, harmoniser les cursus des universités et des grandes écoles françaises avec ceux des universités européennes et homogénéiser les diplômes délivrés.
e) Une nouvelle organisation
Le
rapport propose d'établir une nouvelle carte universitaire divisant le
territoire en huit " provinces " d'où émergeront des
pôles universitaires provinciaux d'excellence.
En outre, un projet d'établissement et de contrats quadriennaux devrait
être établi entre l'Etat, les établissements et les grandes
écoles pour leur donner plus d'autonomie en matière
d'habilitation des cursus et de conception des contenus pédagogiques.
Enfin, une agence supérieure d'évaluation serait chargée
d'évaluer tous les cinq ans les établissements qui recevraient
des moyens financiers en rapport avec leurs mérites et leurs
résultats.
Le rapport Attali préconise enfin, une réorganisation des cycles
universitaires dans une perspective d'harmonisation européenne des
diplômes.
*
* *
Votre commission ne peut donc que souligner l'intérêt de ces propositions qui ont été encore peu exploitées par le ministre actuel, sous réserve d'une étude de faisabilité de nouveaux cursus universitaires dont la mise en place est loin d'être réalisée.
3. L'abandon des réformes universitaires annoncées par le précédent gouvernement
A
l'issue d'une concertation approfondie menée pendant le premier semestre
de 1996, dite " États généraux de
l'université ", avec toutes les composantes du monde universitaire,
le précédent gouvernement avait arrêté les grandes
lignes d'une réforme ambitieuse de l'enseignement supérieur.
A l'exception de la réorganisation des premiers cycles universitaires,
toutes les mesures de ce plan de réforme ont été
abandonnées et notamment, pour les plus importantes d'entre elles, la
mise en place d'un statut étudiant et la définition d'une
filière technologique supérieure.
Les principales mesures de réforme annoncées dans le plan Bayrou
peuvent être ainsi résumées :
- mise en place d'un statut étudiant prévoyant la création
d'une allocation sociale d'études se substituant aux aides sociales
existantes ;
- nouvelle architecture des études supérieures ;
- prise en compte de l'insertion professionnelle dans les contrats
passés avec les établissements ;
- mise en oeuvre progressive d'une véritable filière
technologique supérieure associant enseignement et recherche ;
- développement de l'autonomie et de la modernisation de la gestion des
universités autorisant la création de fondations, de conseils
d'orientation et d'une agence de modernisation des universités, ainsi
qu'un transfert de la propriété des locaux universitaires ;
- extension de la mobilité des enseignants-chercheurs et prise en compte
de l'ensemble de leurs activités dans le déroulement de leur
carrière ;
- accès des professeurs agrégés de l'enseignement
supérieur à la recherche ;
- harmonisation des statuts des personnels administratifs et techniques.
En dépit de leur intérêt, le gouvernement n'a donné
suite à aucune de ces propositions qui ont été
jugées selon les cas infondées, dépourvues de moyens de
financement, ou insuffisamment expertisées. Les travaux
effectués, la mobilisation qu'ils ont impliquée,
méritaient une analyse plus attentive et une meilleure
utilisation.
B. LES DEUX PRIORITÉS ASSIGNÉES PAR LE MINISTRE À L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
Le développement de la formation permanente à l'université et l'ouverture des établissements sur l'extérieur constituent les deux principales priorités assignées clairement par le ministre à l'enseignement supérieur.
1. Le développement de la formation continue dans l'enseignement supérieur
En présentant son projet de budget devant la commission, le ministre a indiqué que la formation permanente constituait la priorité de la politique menée en faveur des universités.
a) Un dispositif existant mais sous-utilisé
La
formation continue entre dans les missions de l'université au même
titre que la formation initiale et la recherche et s'inscrit à la fois
dans le cadre de la loi de 1984 (articles 4 et 5) relative à
l'enseignement supérieur et de celui du livre IX du Code du travail.
Si les établissements d'enseignement supérieur se sont
engagés dans la voie de la formation professionnelle continue dès
1971, cette formation ne représente aujourd'hui environ que 20 % de
l'ensemble de leurs activités pédagogiques, ce qui paraît
notoirement insuffisant.
Pour répondre aux attentes des divers publics, les services de formation
continue des universités s'efforcent pourtant de proposer des
démarches et des outils pédagogiques adaptés à
leurs besoins : accueil personnalisé, validation des acquis,
aménagement des cursus, recours aux nouvelles technologies
(multimédia, enseignement à distance, diplômes
délivrés en unités capitalisables).
En dépit de ses atouts, la formation continue universitaire n'occupe pas
la place qui devrait être la sienne, à la fois dans les
établissements et sur le marché de la formation.
En effet, en 1996, pour un volume financier global de 1,35 milliard de
francs, les universités ne sont intervenues que dans la formation de
340.000 stagiaires demandeurs d'emploi, salariés ou candidats
individuels en reprise d'études. L'année
précédente, elles n'assuraient par la voie de la formation
continue que 15 % des formations de niveau I et II et 8 % des
formations de niveau III.
Afin de donner un nouvel élan à la formation continue, le
gouvernement a engagé en 1997 un plan de développement de la
formation continue à l'université dans une logique de formation
tout au long de la vie.
b) L'organisation d'un concours national
Un appel
à projets a été lancé en octobre 1997 pour inciter
les établissements d'enseignement supérieur à mettre en
place des dispositifs destinés à faciliter le retour à
l'université et à permettre l'adaptation permanente des
connaissances.
Treize projets ont été sélectionnés par un jury
composé d'universitaires et de représentants d'entreprises afin
d'assurer l'adaptation de l'offre de formation aux besoins de l'environnement
économique et social et le développement d'un système de
formation flexible, aux contenus et méthodes adaptés aux publics
visés, en utilisant les technologies de l'information et la validation
d'acquis professionnels.
Un centaine d'emplois et 10 millions de francs ont été
répartis entre les projets sélectionnés, les actions
retenues devant être mises en place à la rentrée 1998.
Les autres universités ont été engagées à
faire de cet objectif une priorité dans leurs demandes de
créations d'emplois d'enseignants-chercheurs pour l'année
1999.
c) La relance de la validation des acquis
La
validation des acquis dans l'enseignement supérieur repose sur le
décret du 23 août 1985 qui permet d'accorder des dispenses de
titres ou de diplômes pour accéder aux différentes
formations post-bac en prenant en compte les études, expériences
professionnelles et acquis personnels et sur la loi du 20 juillet 1992 qui
permet d'attribuer une partie d'un diplôme, en prenant en compte les
activités professionnelles exercées pendant cinq ans au moins
dans un secteur en relation avec le diplôme visé.
Si le décret de 1985 est appliqué par un grand nombre
d'établissements, la loi de 1992 n'a connu qu'une application
limitée.
Un plan d'actions a donc été proposé aux
établissements en mai 1997 pour relancer la validation des acquis et une
réflexion vient d'être engagée sur ce thème avec la
conférence des présidents d'université et la
conférence des directeurs d'écoles et formations
d'ingénieurs.
d) Le renforcement de la place de la formation continue dans la politique contractuelle
Le
ministère a inscrit la formation continue parmi les thèmes
prioritaires dans le dialogue avec les universités pour
l'élaboration des contrats quadriennaux.
L'objectif est de conduire les universités à intégrer la
formation continue dans leur politique d'établissement et de sortir
d'une situation dans laquelle beaucoup d'universitaires considèrent que
la formation continue est une activité marginale qui doit être
entièrement financée sur des ressources
extérieures.
e) Les observations de la commission
Votre
commission ne peut qu'être favorable au développement de la
formation permanente à l'université, d'abord parce que la part
des formations initiales est nécessairement appelée à
diminuer du fait de l'évolution démographique et de la baisse
consécutive du nombre des étudiants, et qu'il convient de mieux
adapter les formations supérieures aux besoins des entreprises et de
l'économie.
Elle estime cependant que la formation continue ne devra pas prendre le pas sur
les activités traditionnelles de formation initiale et de recherche des
universités. Elle observe enfin que les universitaires manifestent une
certaine réticence pour prendre en charge la formation continue,
notamment parce que celle-ci n'est pas suffisamment prise en compte dans
l'évaluation de leurs diverses activités pour le
déroulement de leur carrière.
2. L'ouverture de l'université sur l'extérieur
A diverses reprises, le ministre a réaffirmé la nécessité de valoriser notre enseignement supérieur en lui assurant une place plus satisfaisante sur le marché mondial de l'éducation, aussi bien en développant la coopération universitaire internationale qu'en ouvrant l'université sur l'extérieur.
a) Un meilleur accueil des étudiants et des scientifiques étrangers
Dans
cette perspective, la circulaire du 15 janvier 1998 autorise les
établissements à fournir aux étudiants étrangers un
certificat d'inscription provisoire qui leur permettra d'obtenir une carte de
séjour.
En outre, la loi du 11 mai 1998 relative à l'entrée et au
séjour des étrangers en France et au droit d'asile oblige
désormais les autorités diplomatiques ou consulaires à
motiver les décisions de refus de visa d'entrée aux
étudiants venant en France pour y suivre des études
supérieures.
Des dispositions devraient par ailleurs être prises pour proposer des
cours de soutien, de mise à niveau et de tutorat aux étudiants
étrangers.
La même loi institue un nouveau titre de séjour
" scientifique " pour les ressortissants étrangers venant en
France, à l'invitation d'organismes d'accueil, pour mener des travaux de
recherche ou dispenser un enseignement de niveau universitaire. L'octroi de la
carte de séjour " scientifique " dispense son titulaire de
l'obligation d'obtenir une autorisation de travail ou un contrat de travail,
son séjour étant validé par l'organisme d'accueil
lui-même.
b) La promotion des formations supérieures nationales
La
formation est devenue un marché concurrentiel et un enjeu d'influence.
Avec 130.000 étudiants étrangers
1(
*
)
sur son territoire, la France
apparaît en retrait par rapport au Royaume-Uni (200.000) et aux
États-Unis (560.000), alors que la formation des élites est
devenue l'enjeu d'un marché mondial évalué à
130 milliards de francs.
Le déclin de la langue française dans le monde, un système
universitaire qui n'est plus tourné vers l'extérieur et une
politique de visas limitative incitent en effet les étudiants
étrangers à délaisser notre université.
Afin d'inverser ce processus, les ambassades et les établissements
universitaires français ont engagé de nombreuses
opérations de promotion sur le terrain en direction des étudiants
étrangers, qui se sont traduites notamment par la participation à
plus de soixante salons éducatifs et la mise au point par les
établissements de produits de formation adaptés.
Pour répondre à cet objectif, les ministres chargés de
l'éducation nationale, et des affaires étrangères ont
décidé de créer une agence pour la promotion des
formations et des échanges éducatifs et scientifiques. Elle a
pour objet de promouvoir à l'étranger l'offre française de
formation, et de coordonner la réponse française aux appels
d'offres multilatéraux en s'appuyant sur notre réseau culturel et
scientifique à l'étranger.
L'agence " Edufrance " se présente sous la forme d'un
groupement d'intérêt public associant, outre les deux
ministères concernés, la conférence des présidents
d'université, la conférence des directeurs d'écoles et
formations d'ingénieurs et la conférence des grandes
écoles. Créée le 6 novembre dernier, elle devrait
être opérationnelle d'ici à la fin de l'année 1998.
Dotée d'un budget de 100 millions de francs pour quatre ans, elle
sera présidée par M. Georges Charpak et installée à
Nice-Sophia-Antipolis.
A la fois opérateur commercial et prestataire de services, elle sera
chargée de dynamiser notre système universitaire, de simplifier
ses procédures administratives et de prospecter les marchés
étrangers.
L'objectif annoncé par le ministre est d'attirer 500.000 à
600.000 étudiants étrangers dans quatre ans et, en
priorité, les étudiants solvables d'Asie et d'Amérique
latine qui se tournent aujourd'hui plus volontiers vers les universités
américaines, anglaises et australiennes.
Il est également prévu d'augmenter le nombre des bourses
accordés aux étudiants étrangers et de mettre en place des
programmes de formation cofinancés par les entreprises et les
gouvernements étrangers intéressés.
c) Les observations de la commission
La
commission tient d'abord à rappeler que la désaffection des
étudiants étrangers à l'égard de notre enseignement
supérieur ne s'explique pas par le niveau de nos formations et de nos
travaux universitaires dont la qualité ne peut être mise en cause.
Tout en approuvant le principe de la création de l'agence Edufrance qui
pourra constituer un outil supplémentaire pour le développement
de notre politique de la francophonie, elle estime cependant que l'objectif
annoncé par le ministre, consistant à accueillir à terme
autant d'étudiants étrangers que les Etats-Unis, qui se livrent
depuis plusieurs années, via leurs entreprises installées
à l'étranger, à une prospection systématique et
sélective des étudiants, est irréaliste.
Elle considère en effet que l'accueil et l'intégration,
même limitée pour quelques années, de 500 000 à
600 000 étudiants étrangers, qui représenteraient
ainsi le quart des effectifs étudiants actuellement inscrits dans
l'enseignement supérieur, poseraient des problèmes difficiles,
surtout si ces étudiants étrangers devaient
bénéficier de conditions d'accueil privilégiées,
notamment en matière de logement, de cours de soutien, d'actions de mise
à niveau, d'un tutorat spécifique ou de bourses adaptées.
Elle tient à souligner à cet égard que l'agence Edufrance
qui vient d'être opportunément créée n'a pas
vocation à prendre en charge financièrement ces étudiants,
et que ces derniers devront payer le juste prix des formations qui leur seront
dispensées, sauf à introduire une discrimination qui serait
choquante pour les étudiants nationaux.
C. LES INCERTITUDES PESANT SUR LA RÉORGANISATION DES CURSUS UNIVERSITAIRES : DES PROPOSITIONS ENCORE CONFUSES
Proposée par le rapport Attali et par les participants
au
colloque tenu à la Sorbonne les 24 et 25 mai 1998, dans un souci
d'harmonisation européenne des diplômes universitaires, la
réorganisation des cursus universitaires est sans doute le dossier le
plus complexe du moment dans le domaine de l'enseignement supérieur.
Celle-ci constitue à l'évidence une nécessité pour
améliorer la cohérence de notre système universitaire et
pour harmoniser nos diplômes au niveau européen ou international.
Dans l'attente d'un arbitrage ministériel, l'organisation des
études universitaires reste inchangée sous réserve d'une
mise en oeuvre inégale de la réforme pédagogique des
premiers et seconds cycles universitaires engagée par le
précédent gouvernement.
1. La réorganisation des cursus universitaires
a) Les propositions formulées dans le rapport Attali
Le
rapprochement des grandes écoles et des universités et
l'ouverture de la haute fonction publique à d'autres catégories
d'étudiants supposent que soit profondément
réformée l'organisation actuelle des cycles universitaires. Le
rapport de la mission Attali propose ainsi de modifier le découpage
traditionnel des études universitaires en trois cycles pour ne conserver
que deux niveaux de qualification, l'un à bac + 3 et l'autre à
bac + 5 ou + 8.
Le premier niveau conduirait à la licence qui deviendrait un
diplôme général et professionnel, le DEUG et les classes
préparatoires aux grandes écoles ne correspondant pas à un
réel niveau de sortie professionnel.
Le rapport n'envisage pas de supprimer les DUT et les BTS mais de faciliter
pour leurs titulaires l'accès aux autres cursus universitaires.
Les étudiants en licence bénéficieraient pendant les trois
années de leurs études de conditions d'encadrement et de travail
jusqu'alors réservées aux élèves des CPGE, tandis
que les classes préparatoires des écoles d'ingénieurs ne
seraient pas maintenues dans les lycées mais intégrées
avec leurs enseignants dans les universités.
A l'issue de la licence, les étudiants pourraient soit entrer en
nouvelle maîtrise, soit en doctorat. La nouvelle maîtrise serait
préparée en deux ans ventilés entre six mois
d'études, dix mois de stage et un an de recherches ou d'études
complémentaires. Le doctorat, d'une durée de cinq ans, à
la différence de la maîtrise serait réservé à
une fraction limitée des titulaires de la licence.
Parallèlement, les grandes écoles dont la durée de la
scolarité est en général de trois ans, après deux
années de classe préparatoire, conduiraient leurs
élèves au niveau de la licence un an après leur
entrée dans l'école et au niveau de la nouvelle maîtrise au
moment de leur sortie.
b) Vers une harmonisation européenne des cursus universitaires
A
l'occasion de la commémoration du 8e centenaire de l'université
de Paris et du colloque " Vers une université
européenne " qui a réuni les 24 et 25 mai 1998 les
ministres de l'éducation nationale de l'Allemagne, du Royaume-Uni, de
l'Italie et de la France, ces derniers ont adopté un texte commun qui
préconise, outre une reconnaissance internationale des diplômes
européens, une architecture harmonisée des cursus universitaires.
Celle-ci prévoit un système commun sur deux cycles principaux
-pré-licence et post-licence- et une organisation des cursus en
semestres.
Les étudiants seront encouragés à passer au moins un
semestre dans une université étrangère et la validation
des diplômes, d'une université à l'autre devrait permettre
de faciliter la mobilité des étudiants. Enfin, le texte
adopté prévoit la possibilité de suivre une
éducation en formation initiale et continue tout au long de la vie.
L'adoption d'un tel système (licence en trois ans après le
baccalauréat, puis mastère en deux ans ou doctorat en cinq ans)
serait de nature à modifier profondément l'architecture du
paysage universitaire français qui reste fondé sur une
multiplicité des diplômes et des cycles.
Une telle réforme permettrait de développer la mobilité
des étudiants français dans les universités
européennes qui n'est actuellement pratiquée que par 10 %
d'entre eux.
Force est de reconnaître pour l'instant que cet aménagement
novateur des cursus universitaires nationaux, qui a recueilli l'assentiment du
ministre, et qui a été également proposé par le
rapport Attali, n'a pas connu le moindre début de mise en
oeuvre.
c) Les réponses très générales fournies par le ministre
Prenant
connaissance des conclusions de M. Jacques Attali le 5 mai 1998, le ministre a
jugé son rapport " intéressant et astucieux " et a
estimé que ses propositions de rapprochement entre université et
grandes écoles étaient très positives.
Il a par ailleurs estimé que la nouvelle architecture des études
proposée, sans provoquer de bouleversements majeurs, introduirait des
changements notables et a indiqué qu'il ne toucherait pas aux DEUG et
aux filières courtes même si la nouvelle licence semblait
avantager les étudiants qui poursuivent leurs études après
le DEUG, ceux-ci bénéficiant alors de la capitalisation des
acquis.
Entendu par votre commission le 28 octobre dernier, le ministre a
indiqué que la mise en oeuvre du rapport Attali se traduirait par une
harmonisation, plutôt que par une modification des diplômes
existants et que ces mesures ne seraient pas imposées aux
universités et aux grandes écoles qui ne le souhaiteraient pas.
Il a précisé que la licence constituera le carrefour d'un nouveau
cursus universitaire qui s'ordonnera autour d'un mastère et d'un
parcours long aboutissant à une thèse.
d) La mission exploratoire confiée au recteur Monteil
Chargé d'une mission exploratoire sur la mise en oeuvre
du
rapport Attali pour la réorganisation des études universitaires,
et notamment du " principe 3, 5 ou 8 ", M. Jean-Luc Monteil, recteur
de l'académie de Bordeaux, a avancé plusieurs séries de
propositions centrées sur l'harmonisation des diplômes et la
recherche de leur cohérence avec les formations supérieures
étrangères.
Ses conclusions ne devraient pas faire l'objet d'un rapport public mais
certaines de ses propositions ont d'ores et déjà
été dévoilées par des publications syndicales ou
spécialisées.
•
Des diplômes à bac +2 maintenus mais
complétés
Si les DEUG, les DUT et les BTS sont conservés dans leur durée
actuelle, ils pourraient être complétés par de nouvelles
licences afin d'aligner ces formations courtes sur un niveau bac + 3.
En outre, une licence de préprofessionnalisation serait
créée pour les étudiants de DEUG se destinant aux concours
de la fonction publique et à l'enseignement : ce diplôme
s'adresserait notamment aux étudiants des filières
littéraires, scientifiques et de la filière administrative,
économique et sociale (AES).
•
La création d'une licence technologique
Le recteur Monteil préconiserait également la création
d'une licence technologique destinée aux diplômés d'IUT
mais aussi, sous des conditions qui n'ont pas été
précisées, aux titulaires de BTS, le problème du
rattachement de cette licence aux IUT ou à l'université n'ayant
pas encore été tranché.
•
La réorganisation des seconds cycles universitaires
Il est également envisagé de réorganiser les seconds
cycles afin de créer un " bloc 4-5 " débouchant sur des
mastères de niveau bac + 5 selon trois types de formation :
- une formation généraliste mêlant enseignements
académiques, initiation à la recherche et
professionnalisation ;
- une formation plus professionnalisée et
spécialisée ;
- une formation menant à la recherche de niveau bac + 8, et
privilégiant la recherche en entreprise.
Des passerelles permettraient de passer d'une formation à l'autre, ces
formations pouvant être soumises à un numerus clausus, à
l'exception de la filière généraliste.
•
Le sort incertain des formations existantes à bac +
4
Alors que les directeurs d'IUP souhaiteraient que ces études soient
prolongées d'un an, le sort des autres formations à bac + 4 n'est
pas tranché, qu'il s'agisse des maîtrises en sciences de gestion
(MSG) ou des maîtrises de sciences et techniques (MST).
Des incertitudes subsistent également sur le niveau d'entrée dans
les IUP selon le caractère industriel ou tertiaire de leurs formations.
Par ailleurs, la direction de la recherche a proposé de mettre en place
des écoles doctorales commençant à bac + 4 qui
dérogeraient ainsi au " principe du 3,5 ou 8 ".
Si ces formations devaient déboucher de manière prioritaire sur
l'entreprise, leurs contenus et les méthodes d'enseignement devraient
être profondément aménagés.
L'ensemble de ces projets ou propositions est intéressant, mérite
d'être soumis à la discussion et à la concertation et
surtout nécessite une prise de position claire de la part du
ministre.
e) Les observations de la commission
Votre
commission considère que de nombreuses incertitudes subsistent quant
à la configuration future des cursus universitaires qui appelle
nécessairement une étude de faisabilité
complémentaire et un arbitrage clair du ministre.
Elle remarque d'abord que le premier cycle en trois ans, au lieu de deux, aura
pour conséquence de remettre en cause l'ensemble du système
d'équivalence et plus largement l'organisation de notre système
universitaire.
Elle souhaiterait par ailleurs que le ministre précise sa conception des
classes préparatoires dont l'avenir semble aujourd'hui contesté
pour ne pas dire menacé.
La commission exprime également certaines réserves sur
l'allongement annoncé des cycles d'études initiaux, s'inspirant
de l'exemple des cursus européens, qui apparaît quelque peu
contradictoire avec le souci du ministre de développer la formation
permanente tout au long de la vie professionnelle, à l'université.
Il convient en effet de rappeler la vocation d'insertion professionnelle des
formations sélectives courtes, de type IUT ou BTS, alors que le DEUG est
destiné, comme son intitulé l'indique, à dispenser une
formation générale préparant à la poursuite
d'études ultérieures. Compléter les DEUG, comme semble le
souhaiter le ministre, par une année de préprofessionnalisation
conduirait nécessairement à inverser la finalité de ce
diplôme.
Elle estime enfin que l'alignement systématique de nos diplômes
sur ceux des grands pays universitaires ne constitue sans doute pas la
panacée et elle considère à cet égard, par exemple,
que les doctorats français n'ont rien à envier à leurs
équivalents américains dont le niveau est en fait
surestimé par rapport aux diplômes délivrés par
notre système universitaire.
Au total, l'ouverture de notre enseignement supérieur passe sans doute
par une certaine harmonisation des diplômes, notamment au niveau
européen mais pas nécessairement par un strict alignement et
suppose aussi un développement renforcé des échanges entre
les universités.
2. La réforme des premiers et seconds cycles universitaires : une mise en oeuvre très inégale et un avenir incertain
Engagée par M. François Bayrou, la réforme pédagogique définie par l'arrêté du 9 avril 1997 relative au DEUG, à la licence et à la maîtrise et par les arrêtés relatifs à chacun des grands secteurs disciplinaires du 30 avril 1997 et 23 mai 1997, s'inscrit en fait dans le prolongement des arrêtés du 26 mai 1992 et des arrêtés disciplinaires de 1993.
a) Le rappel des grandes lignes de la réforme
La
réforme de 1997 a substitué aux modules des
unités
d'enseignement
définies comme " un regroupement cohérent
d'enseignements et d'activités ". De plus, pour la première
année de DEUG, la répartition des différentes
unités d'enseignement en unités d'enseignements fondamentaux,
unité de découverte et unité de méthodologie est
fixée de manière très stricte.
L'arrêté du 9 avril 1997 systématise d'abord l'organisation
de l'année universitaire en
semestres
.
Les études de DEUG commencent par un semestre d'orientation ; ce
semestre permet à l'étudiant de découvrir
l'université et la discipline qu'il a choisie, mais aussi de
vérifier la pertinence de son choix et éventuellement de se
réorienter suffisamment tôt pour ne pas perdre une année.
Chaque semestre doit compter 3 ou 4 unités d'enseignement.
Les universités ont désormais l'obligation d'organiser pour les
nouveaux étudiants une
période d'accueil et d'information
sur l'organisation des études et de la vie universitaire et de fournir
des informations sur les débouchés universitaires et
professionnels des études envisagées.
De plus, l'organisation de chaque DEUG doit permettre l'exercice d'une
véritable
orientation
à la fin du premier semestre ;
le choix de la poursuite d'études ou de réorientation à
l'issue du semestre initial appartient à l'étudiant ; au
deuxième semestre l'étudiant peut choisir de poursuivre dans le
DEUG ou la mention de DEUG initialement choisi, de poursuivre dans un autre
DEUG ou mention de DEUG correspondant à l'unité de
découverte ou de demander à bénéficier d'une
réorientation dans une autre formation (STS, IUT, ...)
Les orientations en fin de premier semestre sont liées à
l'unité de découverte. Elles se font notamment dans le cadre de
conventions passées avec d'autres établissements.
L'arrêté du 9 avril 1997 fixe un certain nombre de principes
garantissant les droits des étudiants en matière de
contrôle des connaissances
et d'aptitudes.
Les principales modalités de contrôle des connaissances qui
doivent être respectées par les universités sont la
compensation, la capitalisation, l'absence de note éliminatoire,
l'anonymat des copies, les coefficients des unités d'enseignement, le
passage de plein droit en deuxième année des étudiants
ayant validé les unités d'enseignement représentant
70 % des coefficients de la première année de DEUG et
l'organisation de deux sessions.
Ces modalités doivent être portées à la connaissance
des étudiants au plus tard un mois après le début des
enseignements.
Pour chaque cursus une procédure d'évaluation des enseignements
et de la formation doit être mise en place, cette évaluation
devant prendre en compte l'appréciation des étudiants.
b) Une mise en oeuvre progressive
L'arrêté du 9 avril 1997 prévoit dans son
article 24 une mise en place progressive de la réforme.
L'ensemble des universités qui renouvellent leur contrat (six
universités de la région du Nord-Pas-de-Calais, huit
universités de la région parisienne, deux universités
d'outremer) et qui ont été habilitées à
délivrer leurs diplômes selon ces nouvelles dispositions
après examen de leurs dossiers par le CNESER, devaient appliquer
l'ensemble des mesures prévues par la réforme à la
rentrée 1998.
En outre, les cursus non rénovés selon l'arrêté du
26 mai 1992, essentiellement le secteur du droit, de l'économie et de la
gestion et de la filière AES, ont adapté leurs formations et
devraient donc délivrer des diplômes conformes à ces
nouvelles dispositions.
Enfin, l'ensemble des universités dont le contrat arrive à
mi-parcours en 1998, ont été invitées à mettre en
conformité leurs formations avec l'arrêté du 9 avril 1997.
Même si ces formations n'ont pas fait l'objet d'une nouvelle
habilitation, les universités ont dû rendre compte des adaptations
mises en oeuvre pour appliquer la réforme.
Pour les autres universités, celles-ci devront être
réhabilitées à délivrer leurs diplômes en
conformité avec l'arrêté de 1997 pour la rentrée
1999. Il conviendra donc que ces universités fassent connaître
leurs modalités de mise en oeuvre de la réforme.
Il faut rappeler en outre que, dès la rentrée 97, l'ensemble des
établissements devaient d'une part, mettre en place l'organisation de la
première année en deux semestres, de façon à
permettre une orientation à la fin du premier semestre et, d'autre part,
mettre en oeuvre les modalités de contrôle des connaissances,
notamment la compensation et la capitalisation et prévoir une
évaluation des enseignements.
c) Une application très inégale
Plus
d'un an et demi après l'entrée en vigueur de la réforme
pédagogique des premiers et seconds cycles universitaires, son
application apparaît très inégale.
Selon le bilan établi par le comité de suivi de la
réforme, les 44 universités qui devaient s'y conformer en
1997, l'ont fait en s'octroyant une grande liberté de manoeuvre, soit en
retenant seulement certaines mesures, soit en les appliquant de manière
restrictive.
Ainsi, la moitié seulement des universités concernées ont
autorisé leurs étudiants à capitaliser leurs unités
d'enseignement en cas de redoublement.
Par exemple, à Aix-Marseille-I, ce dispositif ne fonctionne que dans la
filière LEA, à Paris XIII en droit et à Toulon en sciences
de la matière ; pour sa part, l'université de
Versailles-Saint-Quentin n'autorise cette capitalisation qu'à partir
d'une note de 12/20.
Par ailleurs, le passage conditionnel de 1ère en 2e année de
DEUG, prévu lorsque l'étudiant a réussi les
épreuves correspondant à 70 % des coefficients est
diversement mis en oeuvre : ce pourcentage a été porté
à 75 % à Aix-Marseille-I et Toulouse-II, à 80 %
à Nancy-II et à Caen pour les langues, tandis que
Montpellier-III, Nancy-II, Brest, Paris-VIII et Paris-X ont instauré des
modules bloquants.
La compensation entre unités d'enseignement, qui permet de rattraper une
mauvaise note dans une matière par une bonne note dans une autre n'est
pas pratiquée dans certains établissements comme Paris VIII,
Paris XIII ou Metz, tandis que d'autres ont imposé des notes minimales
pour en bénéficier. En outre, les unités de
découverte prévues dans le premier semestre de DEUG pour orienter
l'étudiant vers des disciplines proches de sa spécialité
sont souvent en nombre insuffisant, faute d'enseignants.
Enfin, la possibilité de réorientation à l'issue du
semestre initial de DEUG, qui avait été présentée
par le ministre de l'époque comme une mesure essentielle pour
réduire l'échec en premier cycle universitaire, est restée
quasiment inappliquée.
Indiquant devant la commission que 2 % seulement des étudiants en
avaient bénéficié, le ministre a souhaité renforcer
cette possibilité de réorientation en instituant des
contrôles plus précoces afin que les étudiants
concernés évaluent plus rapidement leur niveau.
d) Une réduction de l'échec dans les premiers cycles
Devant
la commission, le ministre a également indiqué que l'échec
dans les premiers cycles universitaires était en voie de
diminution : 64 % des étudiants de DEUG obtiennent
désormais leur diplôme en deux ou trois ans soit un taux de
réussite voisin de celui observé dans les classes
préparatoires aux grandes écoles (69 %).
Cette évolution positive avait déjà été
constatée il y a deux ans par la mission d'information de votre
commission sur l'orientation des étudiants des premiers cycles
universitaires.
Ce résultat, encourageant pour des filières courtes non
sélectives, résulte, selon le ministre de la continuité de
la politique universitaire, menée depuis plusieurs années, la
réforme d'avril 1997 s'inscrivant, selon lui, dans le prolongement
direct de celle de mai 1992.
e) Les observations de la commission
La
commission constate d'abord que la réforme pédagogique des
premiers cycles universitaires engagée par M. François
Bayrou est loin d'être généralisée et qu'elle n'est
pas appliquée de manière uniforme dans les établissements.
C'est, en particulier, le cas pour les semestres de réorientation qui
n'ont pas été mis en place dans toutes les universités.
Ce dispositif de réorientation précoce a eu en outre pour effet
pervers de réduire la durée de l'année universitaire, du
fait de l'organisation d'une session d'examen au mois de janvier.
Votre commission considère que le ministre doit lever les incertitudes
concernant le maintien ou le retrait de la réforme pédagogique
engagée dans les premiers cycles universitaires qui ne semble pas avoir
répondu à l'attente de ses initiateurs.
Une position nette du ministre, à cet égard, devrait à la
fois conforter les responsables universitaires et rassurer les étudiants
et leurs familles.
3. La réforme des DEUG scientifiques
a) Une réforme progressive
La
baisse préoccupante des effectifs d'étudiants en sciences a
conduit le gouvernement à engager une rénovation des DEUG
scientifiques.
Dès la rentrée de 1998, six universités (Bordeaux-I,
Grenoble-I, Lille-I, Paris-IX Orsay, Montpellier-I et Valenciennes) ont
expérimenté un DEUG comportant moins de cours magistraux et
davantage de travaux en petits groupes.
Ce travail en groupes restreints permet en effet d'adapter l'enseignement
scientifique au niveau de tous les étudiants, de les aider à
construire des projets scientifiques et à développer une approche
expérimentale.
Simultanément l'utilisation des nouvelles technologies devrait permettre
de développer l'auto-formation, la simulation et l'approfondissement. Un
bilan de ces expériences devrait être réalisé en fin
d'année universitaire.
Ces mesures sont destinées à réduire la
désaffection des étudiants à l'égard des
filières scientifiques et seront accompagnées d'une campagne
nationale de communication visant à promouvoir les études
scientifiques.
A la rentrée de 1999, la rénovation devrait être
généralisée à tous les DEUG de sciences et
expérimentée en droit.
b) Une désaffection à l'égard des sciences qu'il convient de nuancer
L'enquête effectuée par M. Jean-Pierre Borel,
président de la conférence des doyens d'UFR scientifiques conduit
cependant à nuancer la désaffection des étudiants à
l'égard des sciences.
Ses premières conclusions, tirées d'une enquête
menée à la rentrée 1998 auprès de vingt
établissements, révèlent que sur 20 000
étudiants inscrits en 1ère année à la
rentrée 1998, 14 337 sont de nouveaux bacheliers, 1 570 sont
des élèves de classes préparatoires en double inscription
et 3 600 sont des redoublants.
En 1997, 25 000 étudiants étaient inscrits en 1ère
année, dont 14 352 nouveaux bacheliers, 5 300 inscriptions
cumulatives et 5 700 redoublants.
La baisse constatée en 1998 ne provient donc pas des nouveaux bacheliers
mais des élèves de classes préparatoires et des
redoublants, qui ne sont pas nécessairement encore réinscrits
à l'université.
Cette enquête montre en outre que les inscriptions des nouveaux
bacheliers augmentent de 5 % en mathématiques et informatique et
application aux sciences (MIAS), et de 7 à 8 % en sciences de la
vie.
Si les effectifs en mathématiques appliquées aux sciences
sociales (MASS) sont stables, trois mentions sont affectées par une
baisse : - 11 % en sciences de la matière, - 12 % en
sciences de la terre et de l'univers, - 10 à 12 % en sciences
et technologies industrielles.
Les sciences " dures " seraient ainsi plus touchées que les
autres par ce phénomène de désaffection.
Il convient cependant de remarquer que de nombreux étudiants inscrits
dans la mention MIAS changent fréquemment de mention au bout d'un
semestre et se tournent vers les sciences de la matière.
Au total, la baisse des inscriptions en sciences est sensible depuis plusieurs
années et a été de l'ordre de 20 % en 1997.
Enfin, si les doyens d'UFR scientifiques n'ont pas été
associés à la rénovation du DEUG sciences de la
matière, qui est en cours d'expérimentation, les travaux en
petits groupes et la remise à l'honneur des travaux pratiques qui
avaient été réduits à la portion congrue du fait de
la montée des effectifs, ont fait l'objet de leur part d'une
appréciation positive.
c) Les observations de la commission
Votre
commission considère que la désaffection des étudiants, et
notamment des nouveaux bacheliers, à l'égard des filières
scientifiques est particulièrement préoccupante et qu'elle risque
à terme, si cette tendance se poursuivait, de remettre en cause un
nécessaire équilibre entre les formations supérieures et
de ne laisser subsister que les formations scientifiques assurées par
les grandes écoles, au détriment de l'université et de la
recherche universitaire.
Les raisons de cette baisse des inscriptions dans les filières
scientifiques semblent résulter d'abord de la difficulté
supposée des séries scientifiques qui nécessitent des
pré-requis solides, et sans doute d'une certaine inadaptation des
programmes de terminale : si ces programmes sont adaptés à la
poursuite d'études scientifiques à l'université,
l'apprentissage du raisonnement est en revanche négligé, en
particulier en mathématiques.
En fait, certains bacheliers découvrent à l'université que
les sciences induisent davantage d'interrogations que de certitudes et peuvent
être aussi porteuses de doutes, voire de dangers.
Outre ces raisons traditionnellement avancées, auxquelles il convient
d'ajouter sur un plan plus général le développement de
l'irrationnel au sein de notre société, votre commission estime
que la baisse des effectifs d'étudiants dans ces filières
s'explique aussi par la prolifération des formations
professionnalisées qualifiantes qui ont pour effet pervers de
détourner trop d'étudiants de leur vocation scientifique au
profit de filières en apparence plus sûres.
II. LES GRANDS AXES DU PROJET DE BUDGET DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR POUR 1999
Avec
51,11 milliards de francs en dépenses ordinaires et en
crédits de paiement, le projet de budget de l'enseignement
supérieur pour 1999 enregistre une progression de 5,4 % par rapport
à 1998 alors qu'il avait augmenté de 3,05 % en 1998 et de
5,45 % en 1997.
Hors plan social étudiant, sa progression atteint 3,9 %.
Cette évolution est présentée comme la traduction de la
priorité que le gouvernement entend accorder à l'enseignement
supérieur.
Si sa progression, plus forte que celle du budget de l'enseignement scolaire
(4,1 %), peut traduire un timide début d'esquisse de transfert des
moyens entre ces deux ordres d'enseignement, qui apparaît au demeurant
indispensable et qu'il convient d'amplifier, l'enseignement supérieur ne
représente cependant que moins de 15 % de l'ensemble du budget de
l'éducation nationale, et que 0,58 % du PIB, soit un pourcentage
sensiblement inférieur à celui observé chez la plupart de
nos voisins.
LES PRINCIPALES CARACTÉRISTIQUES DU PROJET DE BUDGET DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR POUR 1999
-
les
créations d'emplois
:
• ouverture d'un crédit de 74,7 millions de francs
destiné à la rémunération de 1 500 ATER
(attachés temporaires d'enseignement et de recherche) permettant de
libérer 1 500 emplois d'enseignants-chercheurs
antérieurement réservés à l'accueil d'ATER ;
• création de 800 emplois de personnels IATOS, dont 150
destinés à renforcer l'accueil dans les bibliothèques
universitaires, 40 emplois affectés au développement des
nouvelles technologies dans les IUFM, 15 emplois d'infirmiers et
infirmières, 15 emplois supplémentaires affectés aux
oeuvres universitaires et 8 emplois nouveaux pour le musée des sciences
et techniques ;
- les moyens accordés à la recherche universitaire
• Les crédits consacrés à la recherche
universitaire seront portés à 2,43 milliards de francs en
1999, soit une augmentation de 2,91 % contre 5,4 % en 1998 ; sur
ces crédits, les dépenses d'investissement atteindront
1,97 milliard de francs dont 1,83 milliard de francs consacré
à l'équipement mobilier et pédagogique et au soutien des
programmes de recherche ; les crédits de fonctionnement et
d'équipement des laboratoires de recherche universitaire augmenteront de
32 millions de francs en crédits de paiement ou en autorisations de
programme.
Les liens entre recherche et formation seront renforcés par la
création de 1 250 primes d'encadrement doctoral, soit une
augmentation de 20 % du nombre des primes distribuées.
-
le contexte démographique
• ces moyens nouveaux doivent être appréciés dans un
contexte de baisse des effectifs étudiants constatée pour la
troisième rentrée consécutive (-19 000 en 1998,
-14 000 en 1999) ; le nombre d'enseignants est passé de
52 000 à 77 000 en dix ans, soit une augmentation de
près de 50 % ;
• ces moyens nouveaux permettent d'améliorer les taux
d'encadrement :
22,7 étudiants par enseignant à la rentrée 1995 ;
21,6 en 1996 ;
20,9 en 1997 ;
19,8 en 1998 ;
19,25 en 1999
-
l'amélioration des moyens de fonctionnement des
établissements
:
• augmentation de 125 millions de francs, dont 20 millions de
francs destinés au développement des nouvelles technologies ;
• progression de 15 millions de francs des crédits de
fonctionnement des bibliothèques universitaires :
• première tranche de 400 " emplois jeunes docteurs "
destinés au développement des nouvelles technologies dans les
IUFM ;
-
la mise en oeuvre du plan social étudiant
:
• son coût est évalué à plus de
7 milliards de francs sur quatre ans ;
• la refonte et l'extension des bourses permettront d'accorder une aide
directe à 30 % des étudiants, d'augmenter de 15 % le
niveau moyen des aides et de créer 200 bourses de mérite ;
• en 1999, une mesure nouvelle de 808 millions de francs permettra
de mettre en oeuvre les deux première tranches de ce plan et de financer
la contribution du ministère à la " carte orange "
étudiant ;
• dès la rentrée 1998, 25 000 étudiants
supplémentaires bénéficieront d'une aide ; le montant
moyen des bourses sera revalorisé de 4,2 % et de 6 % pour les
bourses accordées aux étudiants les plus
défavorisés.
-
la rénovation du patrimoine universitaire et la poursuite du plan
U3M
• les crédits immobiliers bénéficient de plus de
3 milliards de francs en autorisations de programme ;
• le plan U3M bénéficie d'une enveloppe d'un milliard de
francs en autorisations de programme, au-delà des crédits
nécessaires à l'exécution des contrats Etat-Régions
;
• cette enveloppe spécifique sera affectée notamment
à la mise en sécurité des bâtiments universitaires
(760 millions de francs) et aux premiers investissements du plan social
étudiant (150 millions de francs).
- l'amélioration de la situation des personnels
• revalorisation de la situation des assistants (2,9 millions
de francs) afin d'aligner leur rémunération sur celle des
professeurs certifiés ;
• revalorisation de la situation des personnels IATOS.
Le projet de budget de l'enseignement supérieur pour 1999 est construit
autour de deux priorités, le plan social étudiant et le programme
Université pour le troisième millénaire, dit
" U3M ".
Ces deux priorités doivent être appréciées dans un
mouvement sensible de réduction des effectifs à
l'université qui semble s'inscrire dans la durée.
A. LE PLAN SOCIAL ÉTUDIANT : UNE AUGMENTATION DES MOYENS SANS RÉFORME SUBSTANTIELLE DU DISPOSITIF EXISTANT
L'effort
annoncé en matière d'action sociale et d'aides aux études,
est justifié par le spectaculaire mouvement de démocratisation de
notre enseignement supérieur, qui s'est traduit, il convient de le
répéter, par un quadruplement du nombre d'étudiants depuis
quinze ans et par un doublement des flux d'entrée en dix ans.
Votre commission tient donc à souligner l'intérêt des
mesures proposées en matière sociale, même si le plan
social étudiant reste en retrait par rapport aux propositions
présentées par le gouvernement précédent, et qui
tendaient notamment à mettre en place un véritable " statut
étudiant " et une allocation sociale d'études globale se
substituant aux aides sociales existantes.
Elle rappelle aussi que cette idée n'est pas nouvelle puisque son
rapporteur avait tenté, il y a déjà quelques
années, lorsqu'il avait la charge de l'enseignement supérieur au
gouvernement, de faire prévaloir un concept de statut social
étudiant.
1. La croissance des crédits budgétaires consacrés à l'action sociale
Les
crédits d'action sociale représenteront 17,42 % du projet de
budget de l'enseignement supérieur, contre 16,98 % en 1998 et
passeront de 8,2 à 8,9 milliards de francs soit une progression de
8,21 % en 1999 qui succède à une quasi stabilité en
1998 :
• 638 millions de francs seront affectés au fonctionnement et
à la rémunération des personnels du CNOUS, des vingt-huit
CROUS, de la Cité internationale universitaire de Paris et de
l'Observatoire de la vie étudiante ;
• 7,15 milliards de francs seront affectés aux bourses
et aux aides d'études, soit une progression de 8,96 % ;
• 1,08 milliard de francs sera affecté au fonctionnement
des oeuvres sociales.
Cette croissance des crédits d'action sociale en faveur des
étudiants s'inscrit dans un mouvement de hausse qui a fait progresser
les crédits de près de 32 % depuis 1993.
La progression prévue pour 1999 résulte pour l'essentiel de la
mise en place du plan social étudiant.
Le chapitre 43.71 " Bourses et secours d'études " est en effet
abondé de 808,71 millions de francs :
• 507,2 millions de francs résultent de la majoration des
crédits de bourses à la rentrée de 1998 du fait de
l'augmentation des taux, de la progression du nombre des
bénéficiaires et de la création de 200 bourses dites
" de mérite " ;
• 226,07 millions de francs sont destinés à financer
ces mêmes majorations pour la rentrée de 1999 ;
• 75 millions de francs seront consacrés, à partir du
début de 1999, à la prise en charge d'une partie des frais de
transport des étudiants de la région parisienne.
2. Les aides directes et indirectes en faveur des étudiants
Les crédits d'action sociale bénéficient d'abord aux étudiants boursiers dont les effectifs ont évolué ainsi qu'il suit :
Effectifs |
1996/1997 |
1997/1998 |
Boursiers sur critères
sociaux
|
353 547
|
351 920
|
Total |
387 498 |
395 187 |
Ces
moyens permettent en outre de financer la restauration et l'hébergement
universitaires dont les capacités peuvent être ainsi
évaluées :
- 446 restaurants universitaires offrant 184 500 places et servant
78 millions de repas ;
- 480 résidences universitaires accueillant 150 000
étudiants pour une redevance mensuelle moyenne de
700 francs.
3. Les grandes lignes du plan social étudiant
Le plan
social étudiant a été annoncé par le Premier
ministre le 19 juin 1997, dans son discours de politique
générale, et ses principales dispositions ont été
présentées par le ministre chargé de l'enseignement
supérieur, le 1er juillet 1998, devant la commission des affaires
culturelles du Sénat.
Ce plan social vise à créer les conditions d'une meilleure
reconnaissance de la place des étudiants dans la société,
à leur apporter les bases d'une plus grande indépendance
matérielle, tout en leur permettant de participer aux institutions de la
vie étudiante.
Le plan doit ainsi permettre aux jeunes de poursuivre leurs études sans
être freinés par des obstacles de nature matérielle et
financière, de faire en sorte que le temps des études soit aussi
celui de l'exercice autonome de la citoyenneté et se traduire par une
amélioration des conditions de vie étudiante.
a) Des aides directes plus nombreuses et des montants de bourse revalorisés
Un plan
pluriannuel de progression devrait permettre d'augmenter de manière
significative le nombre des étudiants qui bénéficient
d'une aide.
Dès la rentrée universitaire 1998, les plafonds de ressources des
quatre derniers échelons des bourses sur critères sociaux ont
été revalorisés de 1,2 % et celui du premier
échelon de 6 %, ce qui a permis d'élargir le champ des
bénéficiaires.
Le montant de ces bourses augmente de 5 % pour le 5ème
échelon réservé aux étudiants des familles les plus
modestes et de 3 % pour les autres échelons.
Le montant des bourses sur critères universitaires (DEA, DESS,
agrégation, service public) augmente de 3 %.
Une allocation sera par ailleurs créée à la rentrée
universitaire 1999 afin de permettre à de nouveaux publics
étudiants de bénéficier de l'exonération des droits
d'inscription et de sécurité sociale étudiante.
b) Un dispositif d'aide à la réussite
La réglementation et les modalités d'attribution des aides nationales devraient être modifiées afin d'améliorer la gestion du système et d'accélérer les délais de versement, de mieux suivre les évolutions pédagogiques, de prendre en compte de manière plus satisfaisante la situation personnelle des étudiants et de favoriser la mobilité étudiante et l'internationalisation des cursus.
c) La relance de la promotion sociale républicaine
Un
certain nombre de hautes fonctions publiques sont aujourd'hui de moins en moins
ouvertes aux étudiants issus de milieux modestes.
Afin de remédier à cette ségrégation sociale, 200
" bourses de mérite " ont été attribuées
à compter de la rentrée universitaire 1998 aux bacheliers ayant
obtenu une mention très bien, et issus des familles les plus modestes,
qui se destinent aux études menant vers les concours de l'école
nationale d'administration ou de l'école nationale de la
magistrature.
d) La promotion de l'autonomie étudiante
L'université doit s'impliquer plus fortement dans l'aide
sociale et la vie étudiante. Les étudiants devront exercer plus
de responsabilités dans l'organisation, l'animation, l'évaluation
et le contrôle de la vie étudiante. Plusieurs aspects de cette
action (vie étudiante, culture, sports...) feront partie
intégrante du programme U3M.
Le sport universitaire doit en effet se développer par le biais des
associations sportives étudiantes et des installations sportives seront
construites dans le cadre de ce programme.
Les activités culturelles seront encouragées dans les contrats
d'établissement par la mise en place de politiques culturelles
d'établissement, la validation de modules artistiques dans les cursus de
toutes les disciplines et par l'amélioration de l'accès aux
équipements culturels dans les villes universitaires, en concertation
avec les collectivités territoriales.
Enfin, le développement d'une vie associative étudiante
diversifiée doit devenir une priorité de la vie étudiante,
notamment par la mise à disposition de locaux et de moyens
d'expression.
e) L'amélioration des conditions de vie étudiante
Des
logements sociaux étudiants seront construits dans les cinq prochaines
années, dont le tiers en province et les deux tiers en région
parisienne.
L'accès au logement pour tous les étudiants sera facilité,
notamment par la mise en place de structures de cautionnement mutualisé
pour l'accès au bail.
Dès la rentrée 1998, l'Etat a créé, en
collaboration avec la région Ile-de-France, une carte annuelle
étudiante qui permettra à ses bénéficiaires de
voyager avec plus de 40 % de réduction par rapport au tarif actuel.
En province, un état de la situation sera fait au niveau de chaque
collectivité territoriale, et des discussions seront ouvertes en vue
d'une harmonisation, notamment lors des contrats liés au plan U3M.
L'objectif général du plan social étudiant est, sur une
période de quatre ans, de revaloriser les taux de bourses de 15 %
et de parvenir à 30 % d'étudiants
bénéficiaires.
f) Les crédits prévus pour 1999
Les
moyens nouveaux prévus dans le projet de budget pour 1999 permettront de
financer les mesures suivantes :
- un accroissement du nombre de boursiers pour l'année universitaire
1998-1999 d'environ 25 000 étudiants, soit
10 000 boursiers supplémentaires au
premier échelon par relèvement des plafonds de ressources
correspondants et 15 000 maintiens de bourses à des redoublants ou
à des étudiants en situation de réorientation ;
- une augmentation différenciée des taux de bourses pour
l'année universitaire 1998-1999 (5 % pour le 5ème
échelon d'une bourse sur critères sociaux et 3 % pour les
autres échelons, les aides individualisées exceptionnelles et les
bourses sur critères universitaires) ;
- la création de 200 bourses de mérite à
40 000 francs pour l'année universitaire 1998-1999 ;
- la carte orange étudiant pour un coût prévisionnel annuel
de 75 millions de francs.
4. Les observations de la commission
a) Une mise en oeuvre laborieuse
Votre
commission observe d'abord, comme certains syndicats étudiants, que le
projet de budget pour 1999 ne prévoit le financement que de 10 000
bourses supplémentaires qui seront attribués à de nouveaux
étudiants.
Elle constate aussi que les conclusions des deux groupes de travail
constitués sur la réforme des aides directes et de la
citoyenneté étudiante sont quelque peu décevantes.
S'agissant des aides financières, si l'attribution des bourses pour une
durée de trois ans au début de chaque cycle universitaire semble
acquise, le redoublement ne faisant plus perdre à l'étudiant le
bénéfice de sa bourse, les autres mesures envisagées
restent lettre morte ou sont bloquées, comme la définition du
critère d'autonomie financière de l'étudiant pour le
calcul des aides.
A cet égard, la commission ne peut que regretter que l'attribution des
aides directes, c'est-à-dire les bourses universitaires, reste
subordonnée à des conditions de ressources des parents.
Enfin, le problème de la présidence étudiante du CNOUS et
des CROUS semble également dans une impasse puisqu'elle tendrait
à remettre en cause la gestion tripartite de ces organismes.
b) Le système des bourses de mérite
La
commission s'interroge sur le bien fondé du système des bourses
dites " de mérite ", d'un montant de 40 000 francs,
qui seront attribuées à 200 bacheliers les plus
méritants issus des familles les plus modestes et notamment sur les
critères d'attribution retenus -une mention très bien au
baccalauréat- qui risquent d'encourager la tendance à
l'élitisme et à aggraver le climat de compétition dont
souffrent trop souvent les élèves des lycées.
Elle se demande également pourquoi ces bourses de mérite ne
seraient réservées qu'aux bacheliers qui se destinent à la
magistrature et à la haute fonction publique et ne peut que souligner le
caractère quasi symbolique et le très faible investissement,
presque dérisoire, d'une telle mesure qui doit être
rapproché, par exemple, de l'effort que font les régions en
matière d'aides aux étudiants.
c) La portée limitée du plan social étudiant
La
commission rappelle d'abord, en s'appuyant sur les conclusions du rapport
Cieutat qui a dressé un état précis de l'effort de la
Nation en faveur des étudiants, que les aides attribuées par le
ministère en charge de l'enseignement supérieur (bourses
diverses, prêts d'honneur, financement des oeuvres universitaires, aides
aux associations étudiantes) ne représentent que 35 % du
total des aides accordées aux étudiants et à leur famille.
De plus, les prestations versées sous condition de ressources (bourses,
aide personnalisée au logement) ne représentent que 30 % de
l'ensemble tandis que les autres aides profitent soit à l'ensemble des
étudiants (ALS, oeuvres universitaires), soit aux foyers imposables et
donc davantage aux revenus élevés.
Elle remarque, certes, que le rapport Cieutat a inspiré la mesure du
plan social qui vise à étendre le champ des aides en direction
des classes moyennes, en relevant le plafond de ressources du premier
échelon des bourses attribuées sur critères sociaux.
S'agissant de la création envisagée d'une allocation
d'études généralisée pour tous les
étudiants, elle ne peut ignorer les arguments du ministre qui a
souligné le coût d'une telle mesure et la disparité qu'elle
introduirait à l'égard des jeunes qui sont à la recherche
d'un emploi.
Votre commission regrette cependant qu'aucun effort n'ait été
entrepris pour mieux cibler l'allocation de logement sociale (ALS), qui
bénéficiait à 529 000 étudiants en 1997, pour
un coût de 4,6 milliards de francs et pour réformer un
dispositif fiscal qui ne profite pas d'une manière prioritaire aux
familles moyennes et défavorisées, qu'il s'agisse des
possibilités de rattachement de l'étudiant au foyer fiscal de ses
parents, de la réduction d'impôt accordée au titre des
frais de scolarité et de la déduction des sommes versées
à titre de pension alimentaire en cas de non-rattachement au foyer
fiscal des parents.
B. UN NOUVEL EFFORT D'INVESTISSEMENT IMMOBILIER EN FAVEUR DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR PARTAGÉ AVEC LES RÉGIONS : LE PROGRAMME U3M
Annoncé à l'automne dernier par le ministre, le programme " Université pour le troisième millénaire " (U3M) devrait permettre de relancer l'investissement universitaire en matière d'amélioration des conditions de travail alors que le schéma " Université 2000 " a produit l'essentiel de ses effets en terme de capacité d'accueil.
1. Le bilan définitif du schéma U 2000 et de son prolongement
a) Le cadre général
Le
schéma Université 2000, arrêté en conseil des
ministres le 23 mai 1990, avait pour objectif de pallier, par un effort
important de construction, le déficit de locaux des
établissements d'enseignement supérieur dans un contexte de
croissance forte des effectifs étudiants.
Il correspondait initialement à un programme d'investissement de
32 milliards de francs sur cinq ans (1991-1995), co-financé
à parité par l'Etat et les collectivités locales.
Au terme de trois années d'exécution, ce plan a été
intégré dans les contrats Etat-régions prévus par
le XIe plan couvrant la période de 1994-1998. La
réinscription dans les contrats Etat-régions de toutes les
opérations non programmées avant 1994 n'a cependant pas
été systématique. Certaines ont été
abandonnées parce qu'elles se sont avérées à
l'expérience peu adaptées aux besoins, d'autres se sont vues
substituer des projets différents définis au niveau
régional.
Ainsi, 70 % des investissements actés dans les contrats de plan
(soit 15,7 milliards de francs sur 23 milliards de francs) sont des
opérations du schéma Université 2000 reprises dans le XIe
plan. Ces investissements sont par ailleurs complétés d'un volume
d'opérations nouvelles de 8 milliards de francs qui prolongent
l'effort de construction entrepris.
b) Les réalisations du schéma U 2000
Le
schéma U 2000, prolongé dans les contrats de plan, aura permis de
construire 3,5 millions de m2 de locaux neufs destinés à
l'enseignement et la recherche, et notamment 8 universités nouvelles,
dont 4 en Ile-de-France, 196 départements d'IUT, 24 IUT de plein
exercice et 7 pôles européens : 85 % des surfaces
nouvelles concernent des locaux d'enseignement et 15 % concernent plus
spécifiquement les bibliothèques, les restaurants universitaires
et les autres services inter-universitaires.
A un an du terme des contrats de plan Etat-régions, on peut
considérer que le schéma U2000 et son prolongement, ont permis
d'un point de vue quantitatif de résorber globalement le déficit
de surfaces que connaissaient les établissements au début des
années 1990, et de faire face à la forte augmentation des
effectifs de l'enseignement supérieur.
c) Les aspects financiers
En terme
de financement, les engagements cumulés de l'Etat sur le budget
U 2000 de 1991 à 1993, soit 6 milliards de francs, puis sur
les budgets des contrats Etat-régions de 1994 à 1999, soit
9,4 milliards de francs ont dépassé l'engagement
prévu dans le schéma initial. Le bilan d'U 2000 ne peut donc
être dissocié de celui des contrats de plan Etat-régions
actuels.
Le schéma U 2000, relayé par les contrats de plan, a donc
représenté une masse globale d'investissements de 40 milliards de
francs sur neuf ans, financés par l'Etat, les collectivités
locales, et dans une moindre mesure par les fonds européens.
d) La nécessité d'un effort supplémentaire
La
nécessité de consacrer l'essentiel des moyens à la
création de surfaces nouvelles pour l'enseignement n'a pas permis de
prendre en compte d'autres aspects, tels que les locaux de vie
étudiante, les locaux de recherche des universités nouvelles et
les bibliothèques.
Par ailleurs, l'augmentation importante des locaux nouveaux n'a pas
été accompagnée d'un effort portant sur la maintenance et
la mise aux normes du patrimoine existant.
A partir de 1995, l'état de dégradation d'une partie du
patrimoine ancien, mis en lumière par les exigences croissantes de
commissions de sécurité, a conduit le gouvernement à
lancer un plan d'urgence de 2 milliards de francs permettant d'engager un
certain nombre de travaux prioritaires de sécurité, en faisant
appel à une mobilisation des subventions de maintenance et à
l'autofinancement des établissements.
2. Le programme U3M
Si le schéma U 2000 a permis de faire face à la forte croissance du nombre d'étudiants constatée depuis la fin des années 1980, en résorbant en partie le déficit en locaux dans les établissements d'enseignement supérieur et en assurant un maillage du territoire par la création d'IUT, certains secteurs n'ont cependant pu être suffisamment pris en compte tels les besoins spécifiques des universités parisiennes.
a) Les grandes orientations du programme U3M
Le
programme U3M vise à prolonger les efforts précédemment
accomplis, s'inscrit dans un contexte démographique différent de
stabilisation globale des effectifs et doit prendre en compte l'ouverture de
l'université aux nouveaux publics, notamment en formation permanente.
Il a pour objectif d'améliorer la qualité des locaux existants de
faciliter les conditions de travail et de vie des étudiants, en
particulier dans le cadre de mesures prévues au titre du plan social, de
favoriser l'intégration de l'université dans la ville, d'inciter
à la constitution de véritables réseaux universitaires
grâce à l'utilisation des nouvelles technologies de l'information,
d'assurer enfin le renouvellement d'équipements obsolètes.
Le déploiement des activités d'enseignement et de recherche en
réseaux doit favoriser le rayonnement national et international des
métropoles universitaires et permettre à chaque région ou
groupement de régions de proposer une offre complète de
formations.
Le maillage du territoire par les départements d'IUT implantés
dans les bassins d'emploi devrait par ailleurs favoriser la synergie
université-entreprise et, par conséquent, l'innovation.
b) L'élaboration du programme
L'élaboration d'U3M s'inscrit dans le cadre de la
politique
d'aménagement du territoire et de préparation des contrats de
plan.
Elle s'appuie sur un comité stratégique national
présidé par M. Guy Aubert, ancien directeur
général du CNRS, associant le commissariat au Plan et la DATAR et
sur des groupes régionaux placés sous la responsabilité
des recteurs et des préfets, permettant d'organiser la concertation
à l'échelon des régions.
Un tel système suppose une interaction entre les travaux de la
commission nationale et ceux des groupes régionaux dont le travail devra
dans ses grandes lignes être terminé à la fin de
l'année 1998.
c) Les actions à engager
Ces
actions peuvent s'articuler autour de quatre priorités :
- la mise en sécurité et la restructuration des bâtiments :
si la poursuite du plan de mise en sécurité des bâtiments
universitaires demeure une priorité, l'urgence de cette action ne doit
pas conduire à négliger les opérations de maintenance
lourde. Les restructurations rendues indispensables par les évolutions
de la pédagogie et de la recherche devront également être
prises en compte ;
- le remembrement et l'extension de certains établissements : une
réflexion, sur la meilleure utilisation du patrimoine existant et sur
d'éventuels remembrements sera un préalable à tout projet
de construction nouvelle ;
- le renforcement du réseau des bibliothèques et des
réseaux d'équipements nationaux (informatique, équipement
de recherche, réseaux technologiques) ;
- l'aménagement de sites universitaires et l'amélioration des
services rendus aux étudiants conformément au plan social
étudiant : ce plan prévoit qu'un quart des constructions
d'U3M devrait être consacré aux étudiants (logements,
salles de sport, théâtres, salles de travail,
bibliothèques). Il devra également permettre l'accueil
d'étudiants européens dans des logements particuliers.
Un effort particulier devra être consacré aux
établissements parisiens et d'Ile-de-France dans ces différents
domaines.
d) Le calendrier de réalisation
Le
contenu du programme U3M a vocation à être intégré
dans les prochains contrats de plan Etat-régions du XIIe plan, qui
couvriront les années 2000 à 2006.
Le volet enseignement supérieur et recherche de ces contrats s'appuiera
sur le schéma de services collectifs prévu par le projet de loi
sur l'organisation et l'aménagement durable du territoire, qui sera
prochainement discuté au Parlement et qui devrait établir les
orientations du développement universitaire et de la recherche pour les
vingt prochaines années.
Les années 1998 et 1999 constituent deux années de lancement du
schéma pendant lesquelles seront engagées des opérations
prioritaires et techniquement prêtes ainsi que des études de
programmation des opérations ayant vocation à être
engagées dans le cadre des futurs contrats de plan Etat-régions.
Le ministère vient de demander aux établissements d'enseignement
supérieur leurs besoins pour les huit années à venir, afin
d'élaborer le schéma des services collectifs, ces
éléments étant appelés à servir de base de
réflexion pour la négociation des contrats de plan.
e) Les crédits concernés
La loi
de finances pour 1998 a ouvert un milliard de francs de mesures nouvelles en
autorisations de programme dont 415 millions de francs en crédits
de construction et 585 millions de francs en crédits de
sécurité.
Le projet de budget pour 1999 prévoit de nouveau une mesure d'un
milliard de francs en autorisations de programme au-delà des
crédits nécessaires à l'exécution des contrats
Etat-régions. Cette enveloppe spécifique sera affectée
pour 150 millions de francs aux premiers investissements du plan social
étudiant et pour 760 millions de francs à la mise en
sécurité des bâtiments universitaires, 560 millions de
francs étant affectés au désamiantage du campus de
Jussieu.
f) Une opération de sécurité coûteuse : le désamiantage du campus de Jussieu
Les
mesures d'urgence prises par les universités du campus de Jussieu, au
cours de l'été 1996, pour assurer la protection face au risque de
contamination par l'amiante assurent actuellement la sécurité des
usagers en confinant les fibres d'amiante. Cette situation provisoire impose
des protocoles de protections lourdes pour toute opération de
maintenance des locaux et une surveillance des dispositifs de protection.
Le chantier de désamiantage et de mise en sécurité
comporte pour chaque barre de bâtiments quatre types d'opérations
: recherche de sites extérieurs provisoires pour reloger les
équipes de recherche, dépoussiérage des objets et
relogement des personnels dans les sites d'accueil, travaux de
désamiantage, travaux de remise en sécurité et de
réaménagent des bâtiments.
Les travaux ont débuté en juin 1998 sur une première
barre, l'objectif étant de traiter huit barres par an et de terminer
l'opération en 2003 ou 2004.
Le budget d'investissement de l'établissement public du campus de
Jussieu a été arrêté à 230 millions de francs
et devrait être porté à 560 millions de francs en 1999.
Les études ont permis d'aboutir à une évaluation des
coûts des travaux qui sera confirmée par l'opération
réalisée sur la première barre.
Le traitement des 38 barres est estimé à 1,66 milliard de francs,
celui de la tour à 140 millions de francs et celui des deux
étages de sous-sol se situerait dans une fourchette de 450 à 600
millions de francs.
Si l'on intègre une mise aux normes des bâtiments, le coût
estimé de l'ensemble des travaux serait de 2,8 milliards de francs.
L'étude a aussi montré qu'une condition nécessaire
à la réalisation de l'opération prévue pour six
années environ, était de pouvoir disposer en 2001 de
30 000 m2 de locaux neufs permettant, d'une part d'accueillir des
laboratoires lourds qui ne peuvent déménager qu'une seule fois,
d'autre part de compenser la perte de surfaces entraînée par la
remise en sécurité, le déménagement de certains
laboratoires sur le site de Tolbiac s'imposant en conséquence.
3. Les observations de la commission : les régions appelées à pallier les carences de l'Etat
Votre
commission ne peut d'abord que constater, sur un plan général,
que les régions seront à nouveau mises à contribution pour
financer la moitié de ce nouveau programme de construction
universitaire, comme elles l'avaient déjà fait pour le
schéma U 2000 au mépris des principes de répartition
des compétences et comme elles s'apprêtent à nouveau
à le faire, cette fois dans leur domaine de compétences, pour
financer l'essentiel du plan d'urgence décidé le 21 octobre
dernier en faveur des lycées.
Sans contester le principe même de leur contribution qui a permis
à la fois d'améliorer les universités existantes et de
renforcer le maillage universitaire sur l'ensemble du territoire, la commission
exprime, cependant, la crainte que la mise en oeuvre d'U3M intervienne sans une
véritable concertation avec les régions mais aussi avec les
universitaires.
a) Une nécessaire concertation avec les régions et les universitaires
La
commission craint que la démarche prospective correspondant à
l'élaboration du schéma des services collectifs de l'enseignement
supérieur et de la recherche soit privilégiée par rapport
à la démarche de programmation correspondant à la
définition de la liste des actions à retenir dans les contrats de
plan Etat-régions.
Elle se demande si une conception quelque peu jacobine de l'aménagement
du territoire ne risque pas de réduire la marge de manoeuvre des
régions et l'autonomie des autorités universitaires, celles-ci et
celles-là ayant pourtant leur mot à dire dans la
définition des formations et de leur contenu, et les
collectivités territoriales n'ayant pas pour seule vocation, par la
contribution qui leur est demandée, à financer le logement,
l'aide au transport et l'amélioration des conditions de travail des
étudiants.
Votre commission souhaiterait, par ailleurs, que les contrats de plan
comportent un véritable mode d'emploi afin de définir les
priorités d'une politique de l'enseignement supérieur.
Les priorités devraient s'ordonner notamment autour d'un
développement des enseignements de proximité dans une perspective
d'aménagement du territoire, d'une prise en compte de
l'internationalisation des formations supérieures, d'une large
utilisation des nouvelles technologies de l'information et de la communication
et surtout d'un fort développement de pôles scientifiques qui
regrouperaient des établissements universitaires, des laboratoires de
recherche, des centres d'accueil pour étudiants étrangers et des
entreprises centrées sur les technologies nouvelles.
Enfin, il serait souhaitable qu'un responsable soit systématiquement
désigné pour coordonner le montage de projets complexes qui
intéressent nécessairement plusieurs
collectivités.
b) Le nécessaire maintien du tissu universitaire existant
La
commission tient à rappeler les efforts accomplis par les villes
moyennes pour implanter des antennes universitaires qui ont permis à de
nouvelles catégories d'étudiants d'accéder plus
aisément à l'enseignement supérieur ; elle ne peut que
s'inquiéter de l'avenir de ces réseaux universitaires encore
fragiles et d'une tentation éventuelle des
universités-mères à se recentrer sur leurs sites initiaux
au détriment des antennes délocalisées.
Cette inquiétude est d'autant plus fondée que la mise en oeuvre
du programme U3M dans l'hypothèse où celle-ci ne se
réaliserait pas avec la concertation nécessaire, risque de
bouleverser l'actuelle carte universitaire.
A cet égard, elle voudrait connaître les intentions du ministre
sur les suites éventuelles qui pourraient être données
à des projets peu réalistes consistant, par exemple, à
implanter une université de plein exercice par département ou
dans chaque bassin d'emploi.
Sur un plan général, la commission voudrait rappeler que les
délocalisations universitaires, qui ont emprunté la forme
d'antennes universitaires ou de départements d'IUT, ont d'abord
répondu à une demande des villes moyennes soucieuses de
bénéficier d'une répartition équitable de la
" matière grise " sur le territoire national, mais aussi
à un besoin de démocratisation de l'enseignement supérieur
et à la saturation des premiers cycles universitaires dans les
universités de plein exercice existantes.
Elle exprime donc la crainte qu'une conjoncture nouvelle de stabilisation ou de
réduction des effectifs étudiants, qui pourrait d'ailleurs
être interrompue par une démocratisation encore accrue de
l'enseignement supérieur et le développement de la formation
permanente à l'université, puisse conduire à s'interroger,
au moment de l'élaboration du programme U3M, sur la pérennisation
de l'actuel réseau universitaire.
La commission tient donc à souligner le bilan positif des
délocalisations universitaires effectuées dans le cadre du plan
Université 2000 qui ont permis en fait d'implanter, non pas comme
certains l'ont prétendu, des mini universités de plein exercice
qui auraient vocation à développer des activités de
recherche, mais des premiers cycles de proximité.
Ces premiers cycles universitaires délocalisés constituent
désormais un tissu universitaire et social permettant d'assurer une
continuité entre les baccalauréats et l'université et
permettent aux enfants de familles modestes d'accéder plus
aisément à l'enseignement supérieur.
La commission ne peut donc que souligner la nécessité de
pérenniser des délocalisations universitaires qui ont fait la
preuve de leur utilité et souhaiterait obtenir du ministre des
assurances à ce sujet.
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