III. LES AUTRES DOTATIONS : DES CRÉDITS EN DIMINUTION

À l'exception de la dotation, représentant la subvention de l'État, ou fonds national de garantie des calamités agricoles, reconduite pour 1996 à 295 millions de francs, la plupart des autres dotations sont en diminution. Ces évolutions peuvent résulter soit de la « baisse en régime » ou de l'achèvement de certains programmes, soit d'ajustements négatifs aux besoins, soit d'un désengagement de l'État.

A. LES PROGRAMMES EN VOIE D'ACHÈVEMENT

Comme le souligne le ministère, la baisse de certaines dotations s'explique par le déclin naturel ou l'arrivée à leur terme de certaines actions.

1. Les indemnités viagères de départ

Ainsi, les crédits destinés à l'indemnité viagère de départ (chapitre 44-11, article 11) ne représenteront, en 1996, que 778 millions de francs contre 830 millions de francs pour 1995. Rappelons que l'IVD n'est plus attribuée depuis que le droit à la retraite à 60 ans a été ouvert aux agriculteurs (en 1990). Les dépenses sont donc vouées à la diminution : il n'est plus accordée de nouvelle aide et les bénéficiaires de cette dernière sont en diminution.

2. L'extensification et le retrait des terres

La même évolution peut être constatée pour les actions d'extensification et de retrait des terres, dont les crédits passent de 215 millions de francs en loi de finances initiale pour 1995 à 117 millions de francs dans le projet de loi de finances pour 1996. Ces crédits couvrent, principalement, le solde des programmes de retrait volontaire des terres, quinquennal ou annuel, qui avaient été lancés avant la réforme de la PAC. Quant aux aides à l'extensification animale qui avaient été créées dans le même cadre, elles ont été suspendues sous cette forme, lors de la réforme de la PAC, pour être intégrées aux mesures agri-environnementales.

3. L'aide aux agriculteurs en difficulté

La diminution des crédits d'aide aux agriculteurs en difficulté (chapitre 44-54, article 80) -qui passent de 345 à 203 millions de francs (-41 %)- s'explique pour les mêmes raisons : l'arrivée à leur terme des programmes communautaires d'aide au revenu agricole (PARA).

Compte tenu des retours communautaires pour les PARA de 1995, les crédits du dispositif national d'aide aux agriculteurs en difficulté (analyse, plan de redressement, suivi, réinsertion) devraient mobiliser environ 245 millions de francs, soit un montant comparable à celui de 1995.

On notera, en outre, que les crédits destinés à l'étalement et à la prime en charge des cotisations sociales des agriculteurs en difficulté, sont reconduits, pour 1996, à 170 millions de francs (inscrits au BAPSA).

B. LES AJUSTEMENTS À DES BESOINS EN DIMINUTION

Un ensemble d'autres dotations enregistre une diminution des dotations, reflétant, selon le ministère, des « économies de constatation ».

1. La pré-retraite

Les dotations de l'article 12 du chapitre 44-41, qui rassemble les crédits dits « d'aide au départ », sont dotées de 670,5 millions de francs pour 1996, soit une baisse de 6,3 %. Ces dotations constituent la part nationale du régime de préretraite, cofinancé par le FEOGA.

La diminution des crédits représente un ajustement à des besoins en baisse, compte tenu, d'une part, de la « sortie » du système d'un certain nombre d'anciens exploitants, qui accèdent à l'âge de la retraite, d'autre part, de la réduction du nombre de personnes susceptibles d'entrer dans le nouveau dispositif.

Rappelons que le régime initial de la préretraite avait été mis en place au 1er janvier 1992, jusqu'au 31 décembre 1994, pour les exploitants âgés de 55 ans à 60 ans, agriculteurs à titre principal pendant au moins les quinze années précédant le dépôt de leur dossier. Ce dispositif a rencontré un réel succès, comme l'illustre le tableau ci-après.

Au total, près de 50.000 dossiers ont été déposés, 35.000 préretraites accordées, ce qui a permis la libération anticipée de près d'1,5 million d'hectares, contribuant d'ailleurs à l'accroissement du déséquilibre entre départs et installations.

Il était cependant apparu que si l'objectif social avait été atteint, celui de la restructuration n'avait pas profité à l'installation des jeunes : en effet, sur les 1.400.000 hectares libérés, 84 % sont allés à l'agrandissement.

Les repreneurs de terres libérées par les préretraités ont été au nombre de 63.000 (1,5 repreneur par préretraité). En moyenne, la superficie de l'exploitation de ces repreneurs s'est accrue de 17 hectares, soit 31 % de la surface agricole utile avant reprise (55 hectares). Ils atteignent, ainsi, une taille moyenne deux fois plus élevée que la moyenne nationale.

Ce constat -sur 7 hectares libéré, un seul aura servi à l'installation d'un jeune- a conduit à réorienter ce dispositif à l'occasion de sa prorogation.

La loi d'orientation de l'agriculture du 1er février 1995 a ainsi prorogé le dispositif jusqu'au 15 octobre 1997 en le réorientant en faveur de l'installation et de l'agrandissement des exploitations des agriculteurs installés depuis moins de dix ans. À cet effet, une modulation de la partie variable (prime à l'hectare libéré) a été instituée, représentant 850 francs par hectare mis à la disposition d'un agriculteur qui s'installe, 500 francs par hectare cédé à un agriculteur installé depuis moins de dix ans qui s'agrandit et 200 francs par hectare cédé aux agriculteurs âgés de moins de 55 ans qui s'agrandissent. Cette part variable s'ajoute à une part forfaitaire (30.000 francs par an). Globalement, ces nouvelles dispositions ne devraient entraîner qu'un surcoût budgétaire modeste : la moyenne par hectare de la part variable est proche du chiffre antérieur de 500 francs et la hausse, modérée, de la moyenne des préretraites sera compensée par la décroissance du nombre des bénéficiaires.

Au 31 août 1995, 5.885 déclarations d'intention de cessation d'activité ont été déposées auprès des ADASEA et 2.631 dans le cadre de ce nouveau dispositif.

2. La bonification

Les crédits de bonification (chapitre 44-42) s'inscrivent de nouveau en baisse : 2.418 millions de francs, soit - 11,4 % par rapport à 1995. Depuis 1991, le coût pour l'État a été réduit d'1,3 milliards de francs. En dix ans, la charge de bonification a été divisée par deux en francs courants.

Pour 1996, cette évolution s'explique par l'impact de la baisse des taux d'intérêts nominaux, qui diminue le coût de la concurrence bancaire, et par les conséquences du ralentissement de l'investissement au début des années 1990. Votre rapporteur pour avis ne peut que rappeler les observations formulées dans les avis des années passés : cette approche purement « statique » de l'évolution des crédits de bonification n'est pas suffisante. Alors que la bonification est un levier essentiel pour faciliter l'accès au crédit, il est indispensable d'accompagner la reprise de l'investissement qui se manifeste aujourd'hui, après un recul très marqué entre 1990 et 1993, en fixant les enveloppes des différents prêts à un niveau permettant de satisfaire la demande.

C. DES DOTATIONS EN REPLI : L'AMÉNAGEMENT RURAL ET LA FORÊT

1. L'aménagement rural

Les crédits spécifiques consacrés à l'aménagement rural sont en repli. Leur évolution est détaillée dans l'avis consacré par votre commission à l'aménagement rural.


• On constate ainsi une baisse des subventions d'investissement qui passent de 501,4 à 421 millions de francs en crédits de paiement.

PRINCIPALES SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENTS


• Les crédits d'intervention connaissent une évolution comparable.

Les crédits pour l'aménagement rural du chapitre 44.80, article 21, passent de 35,5 à 32 millions de francs (-9,8 %).

De même, les crédits du fonds de gestion de l'espace rural (chapitre 44.80) diminuent de 500 à 400 millions de francs.

Ce fonds créé par la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire a pour objet de soutenir les actions concourant à l'entretien et la réhabilitation d'espaces agricoles en voie d'abandon, d'éléments naturels du paysage et d'espaces où l'insuffisance d'entretien est de nature à aggraver les risques naturels.

La plupart des commissions départementales de gestion de l'espace (CODEGE) se sont réunies cet été, pour fixer les orientations générales pour l'utilisation du fonds et examiner une première série d'actions concrètes à financer : restauration du bocage, aménagement de bordures de cours d'eau, insertion paysagère des bâtiments agricoles.

2. La forêt

a) L'évolution générale

La forêt et la filière bois mobiliseront, en 1996, 1.262 millions de francs sur le budget de l'agriculture, soit une baisse de 15 % par rapport à 1995, et 419 millions de francs au titre du fonds forestier national (FFN) (contre 370 en 1995).

La diminution des crédits budgétaires s'explique principalement par la diminution du versement compensateur de l'État à l'Office national des forêts (ONF) qui passe de 876 à 681 millions de francs.

Si la plupart des autres lignes budgétaires sont-elles aussi en baisse (- 4,8 %), l'augmentation des moyens du FFN (+ 13,2 %) permet de porter à 990 millions de francs l'encours des crédits en faveur de la forêt, soit une augmentation de 2 %.

b) La diminution du versement compensatoire à l'ONF

La diminution du versement compensateur de l'État à l'ONF s'explique, d'une part, par l'augmentation attendue du rendement de la contribution des collectivités publiques aux frais de garderie, résultant de l'article 60 du projet de loi de finances pour 1996, d'autre part, du prélèvement envisagé sur le fond de roulement de l'ONF.

c) L'article 60 du projet de loi de finances pour 1996

L'article 60 du projet de loi de finances pour 1996, dont l'examen est rattaché à celui des crédits de l'agriculture, propose ainsi une modification des modalités de calcul des frais de garderie (qui, aux côtés de la contribution de l'État, financent les prestations de l'ONF), associant davantage les collectivités propriétaires de forêts aux charges financières de mise en oeuvre du régime forestier. Il est ainsi suggéré de porter pour ces collectivités à compter du 1er janvier 1996 le prélèvement effectué sur le produit des ventes de bois à 16% (14% en zone de montagne) au lieu de 10 et 8,5% actuellement. 210 millions de francs sont ainsi escomptés en 1996, contre 105 millions de francs en 1994.

Rappelons que la forêt communale, propriété des 11.000 communes forestières, soit une commune sur trois, représente 2,5 millions d'hectares. Convaincu, depuis un siècle et demi, de la nécessité d'en assurer la pérennité et la mise en valeur, l'État avait permis de placer la gestion de ces forêts dans un cadre juridique spécifique, le « régime forestier », mettant à la disposition des communes forestières un organisme de gestion de grande qualité, l'administration des eaux et forêts, puis l'ONF.

Les communes contribuent, pour partie, aux coûts de l'intervention de l'office par l'intermédiaire des frais de garderie (120 millions de francs au cours des dernières années), le solde étant constitué par le versement compensateur de l'État (environ 780 millions de francs).

La disposition proposée par l'article 60 entraînerait, par conséquent, une hausse de 60 % des frais de garderie, qui frapperait particulièrement la forêt communale. La Commission des Finances du Sénat a adopté un amendement prévoyant de porter les taux à 12 % et 10 %, soit une augmentation de seulement 20 %.

3. Les aides au boisement

La dotation consacrée aux aides au boisement et à l'entretien des terres agricoles ne représenteront qu'une dotation de 85 millions de francs en 1996.

Rappelons qu'en application du règlement communautaire n° 2080/92 instituant, en accompagnement de la réforme de la PAC, un régime d'aides aux mesures forestières en agriculture, la France s'est dotée d'un plan, approuvé en avril 1994 par la Commission.

Ce plan prévoit principalement deux mesures cumulables :

- une aide à l'investissement pour la plantation et les trois ou quatre premiers entretiens, qui prend généralement la forme d'une subvention, au taux de 40 %, du devis des travaux hors taxes ;

- une prime annuelle destinée à compenser la perte de revenu découlant du boisement de superficies agricoles. Alors que cette prime dans le système antérieur, était réservée aux seuls exploitants agricoles, elle a été étendue par le décret n° 94-1054 du 1er décembre 1994 aux autres personnes morales ou physiques de droit privé. Le montant de cette nouvelle prime, modulé par département et éventuellement par région agricole et nature de terre, est de 150 à 1.000 francs par hectare et par an pour les non exploitants, et de 700 à 2.000 francs, pour les exploitants à titre principal. Elle est versée pendant sept ans pour le peuplier, 10 ans pour les résineux et les feuillus divers, 15 ans pour le hêtre et le chêne.

Il apparaît, à cet égard, que les aides françaises ont été fixées très en deçà des maximum prévus par la réglementation communautaire, mais aussi des aides qu'y consacrent les autres États membres.

Il en résulte que les montants des engagements français éligibles au cofinancement communautaires, réalisés ou prévus, qui figurent dans le tableau ci-après, sont très inférieurs à ceux arrêtés par la plupart des autres États.

Alors que dans l'ensemble de l'Union, il est prévu de reboiser 1,4 million d'hectares, la France n'y contribuerait que pour 87.780 hectares, devant l'Allemagne 57.000 hectares, mais loin derrière l'Espagne (640.000 hectares), l'Italie (231.000 hectares), l'Irlande (120.000 hectares) ou la Grande-Bretagne (100.000 hectares).

Enfin, on peut constater un retard par rapport aux objectifs de boisement.

En 1994, la surface de terres agricoles boisées avec une aide de l'État a été d'environ 9.500 hectares (contre 12.100 prévus) ; en 1995, environ 10.700 hectares ont été boisés avec une aide de l'État, contre 19.000 prévus.

Pour 1996, 24 millions de francs ont été réservés au boisement des terres agricoles sur le fonds forestier national et 30 millions de francs devraient venir du budget de l'État. Il faut y ajouter les premiers retours communautaires, qui devraient être de l'ordre de 15 à 20 millions de francs. Au total, 11.500 hectares pourront être boisés avec l'aide de l'État l'année prochaine, 23.000 hectares auraient dû l'être dans le cadre du plan.

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