B. L'ABONDEMENT DU PLAN ECOPHYTO 2030 À HAUTEUR DE 250 M€

Sur le plan budgétaire, est créée au sein du programme 206 une sous-action « Planification écologique - Stratégie de réduction de l'utilisation des produits », abondée à hauteur de 250 M€ en AE (150 M€ en CP). Ces moyens accompagnent la mise en place du plan Écophyto 2030, succédant aux avatars successifs du plan depuis 2008 qui, à l'instar de ceux des autres États membres, a pour l'heure des résultats mitigés.

Source : SGPE

En cours d'arbitrage au moment de la rédaction de cet avis, le plan Écophyto 2030 aura comme levier prioritaire les plans de filière pour anticiper le retrait de substances actives et rechercher des alternatives. La quasi-totalité de l'action en CP serait allouée à ces plans la première année, finançant surtout des projets de recherche et les instituts techniques.

Les rapporteurs s'interrogent sur l'efficience des moyens considérables consacrés à cette politique depuis plus de dix ans. Au-delà des 71 M€ du programme stricto sensu, financés par une fraction de RPD, les moyens contribuant au plan Écophyto étaient estimés à 643 M€ en 2019. Or, le nombre de doses-unités (NODU) n'a pas diminué depuis le lancement du plan. Les rapporteurs proposent, par conséquent, de changer de méthode.

1. Le financement du bulletin santé du végétal (BSV) par l'enveloppe nationale d'Écophyto n'apparaît pas justifié, son effet sur la réduction de l'utilisation des PPP n'étant pas démontré. Greffé au plan Écophyto au motif qu'en apportant une information fine et actualisée sur l'arrivée éventuelle de parasites, il permettrait de ne traiter qu'en cas de risque avéré, évitant un traitement préventif systématique, il semble avoir pu dans certains cas produire l'effet inverse, déclenchant des traitements par inquiétude.

Réseau de surveillance indispensable à la prise de décision des agriculteurs, le BSV ne devrait pas être assimilé aux projets ponctuels que finance le plan Écophyto, mais financé de façon pérenne sur les crédits du programme 206, comme l'étaient du reste les « avertissements agricoles » jusqu'en 2010. Ainsi sanctuarisé, le BSV pourrait parallèlement être renforcé sur le suivi des adventices et sur son accessibilité12(*).

Amendement n° 4 : augmenter de 7,58 M€ les crédits courants du programme 206 pour financer de façon pérenne le bulletin santé du végétal (BSV), libérant ainsi la même somme au sein de l'enveloppe nationale d'Ecophyto 2030.

2. Grâce au financement ad hoc du fonds hydraulique (amendement n° 2) et du BSV (amendement n° 3), l'équivalent du montant de la hausse de la RPD, soit environ 37 M€, pourrait abonder l'enveloppe nationale d'Ecophyto, passant de 41 à 78 M€ (et le total fléché de 71 à 108 M€). La moitié de la taxe serait directement allouée au plan sans passer par le budget courant des agences de l'eau, améliorant d'autant son acceptabilité.

Pour aller plus loin, les rapporteurs appellent à une utilisation pragmatique de ces fonds, au plus près des agriculteurs, dont ils rappellent qu'ils n'utilisent pas de PPP pour leur plaisir, en les payant directement pour leurs pratiques économes en PPP, indépendamment du respect du cahier des charges AB, dont tous les critères ne sont pas spécifiques aux PPP. Ces aides directes devraient respecter les principes de spécialité, d'agilité et d'additionnalité identifiés par la mission interministérielle de 202313(*).

En effet, le réseau de 3 000 fermes Dephy financé par Ecophyto donne des résultats probants avec en particulier une réduction de 15 à 40 % de l'indicateur de fréquence de traitements, sans dégradation significative des rendements agricoles14(*). Les solutions que la recherche et l'expérimentation ont fait émerger ne demandent qu'à être mieux diffusées et massifiées15(*), sans quoi elles resteront une vue de l'esprit.

Proposition n° 2 : grâce aux moyens libérés sur l'enveloppe nationale d'Ecophyto (amendements n° s 4 et 5), ouvrir à titre expérimental une nouvelle ligne d'Ecophyto de 37 M€, dédiée à des aides directes aux pratiques culturales faiblement utilisatrices de PPP.

Enfin, pour évaluer l'efficience de ces dépenses supplémentaires, il serait souhaitable de se doter d'indicateurs qui, au-delà de la quantité de substances actives (QSA), du nombre de doses unités (NODU) ou de l'indicateur de fréquence de traitements (IFT), évaluent les progrès directement en matière de santé publique, de biodiversité ou encore de protection intégrée des cultures.


* 12 La présentation des BSV gagnerait à être harmonisée d'une région à l'autre, et ces documents pourraient être directement accessibles sur une page dédiée plutôt que simplement recensés dans la base de données Écophytopic, peu intuitive, et qui nécessite plus de cinq clics pour accéder au BSV.

* 13 CGAAER-IGEDD-IGF, « Évaluation des actions financières du programme Écophyto », 2023.

* 14 « Fermes du réseau Dephy : 10 ans de résultats », 2023.

* 15 Voir cette brève de Contexte : « Les résultats obtenus par le réseau Dephy ont été sous-utilisés. »

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