III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES LOIS : FAVORISER LA SOUPLESSE DANS L'APPLICATION DE LA LOI

Comme votre rapporteur l'a exposé précédemment, les discriminations positives en faveur des femmes ne sont pas totalement bannies du droit de la fonction publique.

Il n'en demeure pas moins que, dans les cas où, au-delà de la seule égalité juridique, les pouvoirs publics estiment que les discriminations " compensatoires " sont nécessaires pour assurer une égalité de fait, ils devront les instituer par voie législative sous le contrôle éventuel du Conseil constitutionnel.

A. LES OBJECTIFS POURSUIVIS PAR LA PROPOSITION DE LOI RESTENT OBSCURS

On chercherait en vain dans les débats parlementaires ou l'exposé des motifs l'objectif poursuivi par les auteurs de la proposition de loi.

•  La féminisation des organismes consultatifs et des jurys est-elle proposée pour faciliter l'accès des femmes à des fonctions honorifiques, dans les corps où elles sont sous-représentées ? Cet objectif de promotion des femmes peut tout à fait justifier en soi une action volontariste des pouvoirs publics ; mais ceux-ci ont-ils besoin d'une loi pour s'appliquer cette règle à eux-mêmes si tant est qu'ils ne l'aient pas déjà fait 52 ( * ) .

Quand bien même la proposition de loi se limiterait à hâter la promotion des femmes, dans les corps où elles sont sous-représentées, aux fonctions honorifiques de membre de jury de concours, encore faudrait-il prouver qu'actuellement elles se trouvent dans une situation défavorable .

•  Au contraire, la féminisation des jurys de concours a-t-elle pour objectif d'améliorer le rang de classement des candidates reçues, dans les corps où les femmes sont sous-représentées ? Dans ce cas, le risque peut paraître grand d'accréditer l'idée selon laquelle les membres de jury se comporteraient différemment selon leur sexe, et de porter atteinte à l'impartialité du jury.

B. LA PROPOSITION DE LOI DOIT ÊTRE EXAMINÉE AU REGARD DES EXIGENCES CONSTITUTIONNELLES

1. Un débat distinct de la parité en politique

Seule la révision constitutionnelle a permis de concilier d'une part le principe du caractère indivisible et universel de la souveraineté nationale et le principe de la liberté de l'électeur, d'autre part l'objectif d'un égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives.

En effet, dans une décision de principe du 18 novembre 1982, le Conseil constitutionnel avait considéré que " la règle qui, pour l'établissement des listes soumises aux électeurs, comporte une distinction entre candidats en raison de leur sexe, (était) contraire aux principes constitutionnels ". Cette décision a été confirmée par la décision du 14 janvier 1999 portant sur la loi relative au mode d'élection des conseillers régionaux et des conseillers à l'Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux.

La loi constitutionnelle n° 99-569 du 8 juillet 1999 relative à l'égalité entre les femmes et les hommes a ainsi modifié l'article 3 de la Constitution du 4 octobre 1958 afin que " la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives " 53 ( * ) .

Si cette révision constitutionnelle autorise les discriminations positives en faveur des femmes, elle ne concerne que le domaine électoral et ne peut être interprétée comme applicable à l'accès des hommes et des femmes à la fonction publique en général ou à certaines responsabilités en particulier.

* 52 Ni les auteurs de la proposition de loi, ni le Gouvernement, ni le rapport Colmou n'avancent de données chiffrées significatives, c'est-à-dire portant sur l'ensemble des trois fonctions publiques et l'ensemble des jurys visés.

* 53 Voir le rapport n° 156 (Sénat, 1998-1999) de M. Guy Cabanel au nom de la commission des Lois.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page