N° 139 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021 |
Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2020 |
AVIS PRÉSENTÉ au nom de la commission des affaires économiques (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021 , |
TOME V OUTRE-MER |
Par Mme Micheline JACQUES, Sénatrice |
(1) Cette commission est composée de : Mme Sophie Primas, présidente ; M. Alain Chatillon, Mme Dominique Estrosi Sassone, M. Patrick Chaize, Mme Viviane Artigalas, M. Franck Montaugé, Mme Anne-Catherine Loisier, MM. Jean-Pierre Moga, Bernard Buis, Fabien Gay, Henri Cabanel, Franck Menonville, Joël Labbé, vice-présidents ; MM. Laurent Duplomb, Daniel Laurent, Mme Sylviane Noël, MM. Rémi Cardon, Pierre Louault, secrétaires ; M. Serge Babary, Mme Martine Berthet, M. Jean-Baptiste Blanc, Mme Florence Blatrix Contat, MM. Michel Bonnus, Denis Bouad, Yves Bouloux, Jean-Marc Boyer, Alain Cadec, Mme Anne Chain-Larché, M. Patrick Chauvet, Mme Marie-Christine Chauvin, M. Pierre Cuypers, Mmes Marie-Agnès Evrard, Françoise Férat, Catherine Fournier, M. Daniel Gremillet, Mme Micheline Jacques, M. Jean-Marie Janssens, Mmes Valérie Létard, Marie-Noëlle Lienemann, MM. Claude Malhuret, Serge Merillou, Jean-Jacques Michau, Sebastien Pla, Mme Guylène Pantel, M. Christian Redon-Sarrazy, Mme Évelyne Renaud-Garabedian, MM. Olivier Rietmann, Daniel Salmon, Mme Patricia Schillinger, MM. Laurent Somon, Jean-ClaudeTissot .. . |
Voir les numéros : Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 3360 , 3398 , 3399 , 3400 , 3403 , 3404 , 3459 , 3465 , 3488 et T.A. 500 Sénat : 137 et 138 à 144 (2020-2021) |
L'ESSENTIEL
Au cours des années précédentes, le Gouvernement et les acteurs de terrain ont été très attentifs aux analyses et aux propositions de notre commission des affaires économiques. En effet, nos travaux, ceux de la délégation sénatoriale aux outre-mer et de mon prédécesseur Michel Magras traduisent bien la volonté de nos territoires d'aller de l'avant, ce qui implique de mieux différencier et adapter les solutions.
En ces temps très difficiles, il faut souligner le gisement de jeunes talents ultramarins qui sont prêts à apprendre et à entreprendre si on allège la rigidité du cadre existant . Comme l'a indiqué le Haut-Commissaire au Plan, François Bayrou, lors de son audition, l'État est trop souvent producteur de normes qui bloquent même ses propres actions : les outre-mer subissent ce phénomène de façon démultipliée. L'exemple le plus frappant est celui des crédits logement dans le budget des outre-mer : depuis 2018, même si on annonce des hausses, ils sont de moins en moins consommés et la construction baisse.
Au-delà de l'affichage des crédits budgétaires et des financements de relance, chacun reconnait aujourd'hui que le principal défi consiste à les activer sur le terrain : notre commission le souligne avec force depuis plusieurs années en proposant des remèdes concrets et ciblés. La Cour des comptes, dans son rapport public thématique de septembre 2020 consacré au logement dans les outre-mer, conteste elle-même aujourd'hui des « exigences sans réel rapport avec les réalités locales », rejoignant ainsi les préoccupations du Sénat qui appelle à acclimater les soutiens aux entreprises pour faciliter leur survie et leur montée en gamme.
Réunie le 25 novembre 2020 pour examiner les crédits de la mission outre-mer, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits.
I. L'IMPACT DU BUDGET DES OUTRE-MER FACE AU RISQUE D'EFFONDREMENT ÉCONOMIQUE D'ENTREPRISES DÉJÀ FRAGILISÉES
A. UN CRI D'ALARME POUR LES PETITES ENTREPRISES DU SECTEUR MARCHAND, LE TOURISME ET LES ACTIVITÉS QUI EN DÉPENDENT
Lorsque les chiffres pour 2020 seront disponibles, on constatera sans doute que le PIB des outre-mer a globalement moins baissé que la moyenne nationale : - 5% au lieu de - 10 % selon certaines estimations réalisées très tôt par le réseau des chambres de commerce et d'industrie (CCI). Ce chiffrage :
- démontre que le secteur public administratif a joué un rôle d'amortisseur ;
- et masque le risque d'effondrement de pans entiers du secteur marchand ultramarin qui ont subi le choc Covid dans une phase où ils étaient déjà très fragilisés par les crises sociales, économiques et les catastrophes naturelles des années précédentes.
Si les chantiers de construction du BTP ont repris dès le mois de juillet dernier, le secteur du tourisme devrait perdre plus de 60 % de son chiffre d'affaires en 2020 par rapport à 2019, ce dont témoignent des hôtels quasiment vides à la veille d'une saison touristique qui sera décisive. La place du tourisme dans le PIB des territoires, comme dans celui de l'hexagone, est difficile à estimer car l'INSEE ne recense l'activité touristique multiforme qu'à travers l'hôtellerie et la restauration : les évaluations sont donc très variables. En toute certitude, il est en tous cas souhaitable de rappeler à nos concitoyens qu'ils peuvent faire le tour du monde en séjournant en France.
On doit également souligner que le tourisme a également un effet d'entrainement considérable :
- sur l' activité portuaire, aéroportuaire ou aérienne ;
- et sur un nombre considérable de petites ou micro-entreprises qui, trop souvent, manquent des capacités nécessaires pour repérer les aides publiques et en bénéficier .
Or, en Guyane et à Mayotte par exemple, un tiers des entreprises - à 95 % des TPE ou PME - ne connaissaient pas l'existence des dispositifs de soutien mis en place lors du premier confinement, faute d'un accès à internet suffisant, ce qui conduit les CCI a distribuer des prospectus d'information. S'agissant, plus généralement, des modalités d'accès aux aides , les CCI constatent que l'État les a ajustées de façon pragmatique pour les rendre plus accessibles.
Structurellement, la création de richesses et l'avenir économique des outre-mer dépendent d'un tissu constitué de très petites entreprises qui ont besoin d'un soutien adapté et simple d'accès pour survivre avant de se relancer, de se numériser et d'innover.
La commission estime donc fondamental, entre autres, de parfaire les soutiens à la numérisation et à la couverture numérique des territoires ultramarins. Il s'agit là d'un socle pour démultiplier :
- les moyens d'action et d'information des entreprises, tout en accompagnant les progrès dans la gestion des microentreprises ;
- et les possibilités de télétravail ou de téléformation.