B. L'AVENIR DE LA CNCCFP : VERS UNE FUSION AVEC LA HATVP ?
Déjà évoquée dans le rapport du comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques de l'Assemblée nationale en octobre 2010, l'idée d'un rapprochement entre la commission nationale de contrôle des comptes de campagne et des financements politiques et de l'autorité ayant en charge le contrôle des déclarations de patrimoine des personnes publiques a de nouveau été envisagée dans le cadre de la discussion devant le Parlement de la loi sur la transparence de la vie publique. Une telle décision du législateur impliquerait une étude préalable de l'ensemble de ses conséquences.
Votre rapporteur s'est déjà déclaré a priori favorable à un tel rapprochement, d'une part dans une optique de mutualisation des moyens, et d'autre part, plus substantiellement, pour donner davantage de poids à la nouvelle autorité qui en résulterait, compte tenu d'un nécessaire renforcement des prérogatives de la CNCCFP.
Une telle fusion avait été soumise à l'examen de votre commission par voie d'amendement lors de l'examen du projet de loi relatif à la transparence de la vie publique en juillet 2013. Votre commission avait estimé que si la question de la fusion de ces autorités administratives indépendantes pouvait se poser compte-tenu du caractère connexe voire complémentaire de leurs missions, le contexte d'examen du projet de loi, notamment du fait de l'engagement de la procédure accélérée, ne permettait pas d'envisager raisonnablement cette hypothèse. Il lui avait alors paru préférable de ne pas compliquer la mise en place de la nouvelle autorité indépendante qu'est la Haute Autorité en modifiant le périmètre de l'autorité à laquelle elle succède.
Toutefois, pour prolonger la réflexion sur ce sujet, votre commission avait demandé au gouvernement un rapport au Parlement dans le délai d'un an afin de mesurer l'intérêt et la faisabilité à terme de cette fusion. Cependant, cette disposition a été supprimée en nouvelle lecture par l'Assemblée nationale.
Certains des arguments avancés lors de ces débats sont d'ailleurs repris par le président de la CNCCFP qui estime qu'un tel rapprochement, dans les conditions actuelles, n'est pas envisageable. Une fusion supposerait donc préalablement de lever les difficultés évoquées pour qu'un tel rapprochement soit opérant.
En premier lieu, il est possible de craindre un transfert de mission à une même autorité des missions de la CNCCFP et de la HATVP sans l'accompagner des moyens nécessaires, espérant par une fusion obtenir des économies supérieures aux simples économies d'échelles par une réduction globale des effectifs et des crédits.
Pour mémoire, la CNCCFP comporte, outre ses neuf membres, un peu plus d'une trentaine d'agents permanents avec un renfort temporaire de vingt autres en périodes de contrôle des comptes de campagne, et jusqu'à 160 rapporteurs dont une partie travaille dans les locaux mêmes de l'institution. La commission a ainsi tenu 110 séances en dix-huit mois, dont 70 consacrées exclusivement au contrôle des comptes de campagne des candidats à l'élection présidentielle et aux élections législatives, ce qui représente l'examen de 4 283 comptes de campagne. En y ajoutant le contrôle et la publication des comptes des quelque 400 partis ou groupements politiques ainsi que le contrôle et l'authentification de l'ensemble des reçus délivrés dans le cadre du financement des campagnes électorales et des partis politiques, dont les procédures ont été encore renforcées, la CNCCFP pronostique finalement un doublement des charges de la nouvelle autorité qui serait à prévoir
Par ailleurs, la CNCCFP, comme le ministre de l'intérieur lors de son audition devant votre commission, a fait valoir que la nouvelle Haute Autorité a un domaine de compétence excédant largement le champ politique puisqu'elle devra examiner les déclarations de patrimoine et d'intérêts non seulement d'élus mais aussi d'un certain nombre de hauts fonctionnaires et dirigeants d'entreprises publiques. Le périmètre d'action des deux institutions n'est donc pas identique même s'il se recoupe largement.
Il est vrai qu'une fusion impliquerait de tenir compte de la nature tout à fait différente des compétences de la commission par rapport à celles de la future Haute autorité, puisque la CNCCFP gère essentiellement un système de remboursement sur fonds publics, avec des pouvoirs d'investigation plus limités que ceux qui visent les déclarations de patrimoine. Une évaluation des conditions de faisabilité de l'opération devra donc avoir lieu pour permettre un tel rapprochement.
Votre rapporteur souligne également que l'échéance d'une telle fusion devra également être examinée avec un soin particulier. Alors que la commission s'apprête à assurer le contrôle des comptes de campagne des candidats à six scrutins nationaux et locaux, dont deux nouveaux (élections sénatoriales et départementales) étalés sur une période de douze mois, il n'est nullement question de désorganiser l'activité de contrôle en cours d'organisation. Le principe d'une fusion doit donc être sérieusement envisagé, mais il n'est envisageable qu'à terme. Des exemples étrangers, comme celui du Canada, disposant d'une autorité unique, invitent à poursuivre cette réflexion que votre rapporteur se propose de mener avec l'accord de votre commission.
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Au-delà des crédits destinés au financement de la vie politique et aux contrôles qui sont exercées en ce domaine, le programme budgétaire vie politique, cultuelle et associative regroupe les crédits dont dispose le ministre de l'intérieur pour veiller à l'exercice par nos concitoyens de trois droits ou libertés de rang constitutionnel : le droit de vote, la liberté d'association et la liberté de cultes.
S'agissant des moyens alloués à la lutte contre les dérives sectaires dont votre rapporteur avait souligné, l'an dernier, la faiblesse, votre rapporteur ne peut que renvoyer aux travaux de la commission d'enquête sur l'influence des mouvements à caractère sectaire dans le domaine de la santé présidée par notre collègue Alain Milon et dont le rapporteur, notre collègue, Jacques Mézard, a largement développé cette question. En conclusion de ses travaux, la commission d'enquête propose de « renforcer le statut de la Miviludes, qui reposerait sur un fondement législatif accordant une immunité encadrée à son président, dans le cadre du rapport qu'il remet chaque année au Premier ministre », ce qui rejoint un souhait exprimé par votre rapporteur l'an dernier.
En matière de droit des associations que votre rapporteur avait évoqué l'an dernier à propos du registre national des associations, la discussion en novembre 2013 par le Sénat du projet de loi relatif à l'économie sociale et solidaire a permis à notre collègue Alain Anziani, au nom de votre commission, de traiter ce domaine à travers l'examen des dispositions modifiant la loi du 1 er juillet 1901 relative au contrat d'association.
Enfin, votre rapporteur s'était intéressé à la question du vote électronique notamment pour l'élection des députés élus par les Français établis hors de France. Au regard de l'intérêt de cette question, votre commission a décidé la création d'une mission d'information sur ce sujet confiée à nos collègues Alain Anziani et Antoine Lefèvre. Leurs travaux permettront ainsi en 2014 de prolonger fructueusement ceux entrepris par votre rapporteur l'an dernier.
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Sous le bénéfice de ces observations, votre commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « vie politique, cultuelle et associative » de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », inscrits au projet de loi de finances pour 2014.