C. DES MOYENS DE FONCTIONNEMENT À PEINE SUFFISANTS
1. Les conséquences de long terme de budgets de fonctionnement fortement diminués
Après avoir déploré que les crédits de fonctionnement soient souvent la variable d'ajustement de la contrainte budgétaire, votre rapporteur constate un infléchissement positif, aussi bien pour la gendarmerie nationale que pour la police nationale.
Pour la police nationale, les moyens de fonctionnement ont subi une diminution permanente. En crédits de paiement (CP), le budget du titre 3 est en effet diminué de 705,7 millions d'euros en 2013 à 674,5 millions d'euros en 2014, soit une baisse de 4,4% . Entre les lois de finances 2007 et 2013, le budget de fonctionnement des services de police a connu un recul de près de 17,8%.
Pour la gendarmerie nationale, les moyens de fonctionnement font l'objet d'une légère augmentation pour l'année 2014. En crédits de paiement (CP), le budget du titre 3 est en effet augmenté de 1 058 millions d'euros en 2013 à 1 082 millions d'euros en 2014 , soit une hausse de 2,2 % .
Lors de leur audition par votre rapporteur, tant le directeur général de la gendarmerie nationale que le directeur général de la police nationale ont souligné que l'absence de renouvellement est désastreuse pour la gestion des parcs informatique ou automobile. Le vieillissement s'accélère et le taux de disponibilité diminue.
Ainsi, le parc automobile de la police nationale a subi un vieillissement accéléré depuis 2010, puisque l'âge moyen est passé d'un peu moins de cinq ans à près de cinq et demi entre 2010 et 2013.
Le parc automobile de la gendarmerie nationale est également vieillissant. Le respect des critères de réforme (huit ans et 200 000 km) nécessiterait l'achat de 3 000 véhicules par an, soit un besoin annuel de 60 millions d'euros .
2. Des moyens encore limités
Dans le projet de loi de finances pour l'année 2014, quelques opérations d'investissement pour renouveler le parc informatique ou le parc automobile pourront être réalisées, au sein des deux programmes.
Toutefois, votre rapporteur observe que le budget de fonctionnement fait l'objet de fortes contraintes, en matière de loyers immobiliers au sein de la gendarmerie nationale par exemple, puisque ces dépenses représentent près de 465,3 millions d'euros en AE et 460,3 millions d'euros en CP pour l'année 2012 . Pour l'année 2013, 466,7 millions d'euros devraient être dépensés au titre des loyers, soit près de 60% de la ressources hors titre II . Enfin, en 2014, 474 millions d'euros seront consacrés aux loyers budgétaires.
Avec 140 millions d'euros en 2014, la police nationale consacre une part nettement moins importante aux loyers.
Pour 2014, la gendarmerie nationale bénéficiera d'environ 40 millions d'euros pour renouveler partiellement son parc automobile.
La gendarmerie nationale bénéficiera en 2014 d'un renouvellement partiel des terminaux informatiques, puisque dans le projet de loi de finances pour 2014, 7,6 millions d'euros d'AE sont consacrés à leur renouvellement. Par ailleurs, la plate-forme centrale d'exploitation de Rosny-sous-Bois et la plate-forme de secours de Nogent-sur-Marne, qui hébergent l'ensemble des applications opérationnelles nécessaires à l'exécution des missions de la gendarmerie nationale ainsi que certains systèmes d'information communs de la police et de la gendarmerie bénéficieront d'un renouvellement des matériels ainsi que leur entretien, pour 3,7 millions d'euros (AE) .
Au-delà des conséquences sur les missions, puisque le manque de carburant conduit parfois à limiter les patrouilles par exemple, l'insuffisance des moyens alimente un malaise, comme votre rapporteur l'a constaté, lors de l'audition des principaux syndicats de policiers. En effet, malgré un budget « sanctuarisé », les personnels ont fait part de leur très vif mécontentement, lié en grande partie aux conditions d'exercice de leurs fonctions.
3. Les conséquences sous-optimales des mesures de régulation budgétaire
Au-delà de budgets de fonctionnement contraints, votre rapporteur a été sensibilisée aux conséquences des mesures de régulation budgétaire.
Lors de son audition, le directeur général de la gendarmerie nationale a observé que les pratiques de régulation budgétaire « empêchaient toute politique équilibrée d'investissement » et créaient de grandes difficultés de gestion.
Pour l'année 2013, les « gels » de crédits au sein de la gendarmerie nationale ont à la fois porté sur les crédits d'investissement, relatifs à l'achat de véhicules par exemple pour 20,4 millions d'euros (AE) et 27 millions d'euros (CP), sur les crédits pour l'achat de matériel informatique, pour 11 millions d'euros (AE-CP) mais aussi sur les crédits de fonctionnement, comme le carburant.
L'indisponibilité d'une partie des crédits dès le début de l'année rend difficile une politique d'achat cohérente : débloqués en fin d'année, les crédits doivent être rapidement utilisés. Des achats de matériels sont alors décidés dans l'urgence, alors que la disponibilité des crédits tout au long de l'année aurait permis de prendre des décisions mieux étudiées 15 ( * ) .
Lors de son audition par votre commission 16 ( * ) , M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur, a également déploré les mesures de gel des crédits, tout en soulignant que 111 millions d'euros avaient finalement pu être débloqués pour la fin de l'exercice 2013, au bénéfice des forces de l'ordre.
* 15 Pour un exemple concret, la part « gendarmerie » du budget du service des technologies et des systèmes d'information de la sécurité intérieure (ST(SI)²) est de 71,75 millions d'euros (AE) et 71,81 millions d'euros (CP). Sur ce montant, 26,7 millions d'euros ont été gelés (soit près de 40%) ; 12,2 millions d'euros (AE) et 2,5 millions d'euros (CP) ont été finalement « dégelés ».
* 16 Audition du 12 novembre 2013.