2. Un accès régulé

L'accès à l'AME est par ailleurs encadré par des dispositions législatives et réglementaires dont le respect est contrôlé. Trois conditions cumulatives sont exigées pour y prétendre :

- vivre en France de façon permanente et habituelle ;

- prouver une ancienneté de présence de trois mois ;

- disposer de revenus inférieurs à 634 euros par mois.

De 1945 à 1993, les étrangers en situation irrégulière mais ayant un travail avaient accès aux prestations de sécurité sociale dans les mêmes conditions que les autres travailleurs. La loi du 24 août 1993 9 ( * ) a mis fin à cette situation en imposant un plafond de ressources pour y avoir accès. Depuis lors, les étrangers en situation irrégulière dont les revenus sont supérieurs au plafond fixé doivent assumer la totalité des frais liés à leurs soins. Seuls les plus pauvres bénéficient d'une prise en charge par l'Etat dans les conditions précédemment indiquées.

Le bénéfice de l'AME est temporaire et la demande doit en être renouvelée chaque année. Chaque renouvellement nécessite le dépôt d'un nouveau dossier, dont la durée d'instruction est en moyenne de vingt-trois jours, mais d'environ deux mois en Seine-Saint-Denis où résident 20 % des titulaires de l'AME. Le contrôle de leur identité a également été renforcé. Comme l'indique le projet annuel de performance de la mission Santé, un arrêté du 10 juillet 2009 fixe désormais « le modèle du titre sécurisé d'admission à l'AME ainsi que les mentions obligatoires qu'il comporte. Ce nouveau titre est en papier sécurisé et filigrané sur lequel sont imprimées les données concernant le bénéficiaire et figure une photographie scannée du bénéficiaire âgé de plus de seize ans. La liste des bénéficiaires de moins de seize ans à la charge du titulaire du titre d'admission figure au dos de ce dernier avec, pour chacun d'eux, la mention des nom et prénom ainsi que de leur qualité au regard du titulaire et de la période de droit à l'AME. Le nouveau titre d'admission sécurisé est en cours de diffusion par les caisses depuis le deuxième trimestre 2010 » .

Les risques de fraude sont donc minimes. Les contrôles effectués portent sur les dossiers pour lesquels aucune ressource n'a été déclarée, ce qui ne représente que 5 % des demandes. Sur ce faible nombre de cas, une part importante, près de 50 % constatés en 2009, fait l'objet d'une analyse divergente entre la caisse et l'intéressé, qui repose essentiellement sur la compréhension de ce qui peut constituer une ressource. Ainsi, le fait de bénéficier d'un hébergement constitue une ressource au sens de la loi mais est rarement perçu comme tel par les demandeurs.

Comme l'indiquent les deux rapports publiés par l'Igas en février 2003 et mai 2007, l'AME est un dispositif efficace et géré de manière rigoureuse. En restreindre l'accès n'est donc pas nécessaire. On peut d'ailleurs penser que l'ampleur de la renonciation aux soins pour la population d'immigrés sans titre de séjour reste très importante : les estimations du bureau international du travail (BIT) portant sur la présence de 350 000 à 400 000 personnes en situation irrégulière en France, il faut en conclure que plus de cent mille personnes ne font pas de demande d'AME, peut-être faute de besoin, mais plus vraisemblablement par ignorance ou par peur.

Une dernière crainte doit être levée, celle liée au risque d'augmentation de l'AME du fait du nombre des ayants droits des titulaires. Les données recueillies par le ministère permettent de savoir que 80 % des titulaires de l'AME sont des personnes isolées. On compte 57 674 personnes à charge en 2010, dont 74 % de mineurs, dont la France doit assumer les soins médicaux du fait de ses obligations internationales.


* 9 Loi n° 93-1027 du 24 août 1993 relative à la maîtrise de l'immigration et aux conditions d'entrée, d'accueil et de séjour des étrangers en France.

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