V. LES MESURES RELATIVES À LA BRANCHE ACCIDENTS DU TRAVAIL - MALADIES PROFESSIONNELLES
A. LA COMPENSATION VERSÉE À LA BRANCHE MALADIE : UN MONTANT EN AUGMENTATION DE 300 MILLIONS D'EUROS
1. L'objectif de dépenses de la branche pour 2009 (article 69)
Le graphique qui suit retrace l'évolution des dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) entre 2006 et 2009.
Evolution des dépenses de la branche AT-MP
Source : commission des finances
Pour 2009, l'article 69 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale fixe à :
- 13 milliards d'euros l'objectif de dépenses de la branche AT-MP pour l'ensemble des régimes obligatoires de base en 2009, soit une augmentation de 6,5 % par rapport à l'objectif rectifié pour 2007 ;
- 11,4 milliards d'euros l'objectif de dépenses de la branche AT-MP pour le seul régime général , soit une augmentation de 7,5 % par rapport à l'objectif rectifié pour 2007.
Cette forte augmentation s'explique par la majoration de 300 millions d'euros de la compensation versée à la branche maladie . Ces évolutions sont respectivement de + 4 % et + 4,7 % en ne tenant pas compte de cette mesure.
2. La compensation versée à la branche maladie : un montant réévalué (article 68)
L'article 68 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale propose de fixer le versement à la branche maladie à 710 millions d'euros en 2009 , soit une augmentation de 300 millions d'euros par rapport à 2008 (+ 40 %).
Ce versement de la branche AT-MP à la branche maladie du régime général a pour but de compenser les conséquences financières de la sous-déclaration des accidents du travail et maladies professionnelles, phénomène qui a été souligné par de nombreux rapports.
Une commission spécialisée est chargée d'évaluer, tous les trois ans, le coût de cette sous-déclaration. Le rapport évaluant le coût réel pour la branche maladie de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles a été remis au Parlement et au gouvernement en juin 2008 64 ( * ) . Il estime le montant en cause dans une fourchette comprise entre 565 millions et 1.015 millions d'euros.
Votre rapporteur pour avis se félicite de la réévaluation ainsi effectuée, en observant que le montant de la dotation fixé est supérieur au montant minimal des sous-déclarations évalué par le rapport de juin 2008. Avant 2007, il était toutefois traditionnellement fixé à ce niveau.
B. LA CONTRIBUTION AUX « FONDS AMIANTE » : ENVIRON 1,2 MILLIARD D'EUROS EN 2009
Le drame de l'amiante a fait l'objet de nombreux travaux, notamment de nos collègues Gérard Dériot et Jean-Pierre Godefroy 65 ( * ) .
Le coût de ce drame monte progressivement en puissance, maintenant que les principaux éléments du cadre législatif sont fixés.
La branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général est le principal contributeur des deux fonds créés pour assurer l'indemnisation des victimes de l'amiante : le fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (FCAATA) et le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA).
Les contributions de la branche AT-MP à ces fonds pèsent de plus en plus sur les comptes de la branche. La CNAM AT-MP contribuerait ainsi pour près de 7,7 milliards d'euros au financement des fonds sur la période 2003-2009.
L'article 67 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit une dotation totale versée par la CNAM AT-MP aux fonds liés à l'amiante de 1,2 milliard d'euros, soit une progression de 30 millions d'euros en 2008 par rapport aux dotations versées en 2007 .
Contribution de la CNAM AT-MP au fonds liés à l'amiante
(en millions d'euros)
Source : lois de financement de la sécurité sociale correspondantes
Les projections relatives au coût des indemnisations des victimes de l'amiante L'article 6 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 avait prévu la remise au Parlement d'un rapport présentant l'impact financier de l'indemnisation des victimes de l'amiante. La troisième partie de ce rapport présente les perspectives financières pour les vingt prochaines années, tant pour l'indemnisation des victimes que pour la cessation anticipée d'activité, même s'il est précisé que, compte tenu de l'insuffisance des informations disponibles, s'agissant des éléments financiers comme des données épidémiologiques, ces estimations « doivent être regardées comme des tendances que la littérature actuelle permet de tracer mais qui seront révisées dans les années futures ». Dans ce cadre, le rapport estime que le coût annuel moyen de la prise en charge des pathologies malignes liées à l'amiante (victimes de mésothéliomes et cancers broncho pulmonaires ainsi que leurs ayants droit) pourrait être compris entre 493 millions et 928 millions d'euros par an et, sur 20 ans, entre 9,9 et 18,5 milliards d'euros. Le coût annuel en fin de période devrait être nettement supérieur au coût constaté en début de période (rapport de 1 à 4 au moins). L'indemnisation des pathologies bénignes liées à l'amiante serait quant à elle comprise au total entre 91 et 177 millions d'euros par an en moyenne et entre 1,8 et 3,6 milliards d'euros sur les 20 prochaines années, la quasi-totalité de l'indemnisation de ces pathologies étant prise en charge par le FIVA. Le coût annuel de l'indemnisation de l'ensemble des pathologies liées à l'amiante (hors dispositif de cessation anticipée d'activité) serait donc compris entre 584 millions et 1,1 milliard d'euros par an en moyenne et le coût total sur 20 ans compris entre 11,7 et 22 milliards d'euros. L'essentiel de l'écart entre les hypothèses basse et haute s'explique par les écarts dans les prévisions épidémiologiques qui sont particulièrement importantes pour les cancers broncho-pulmonaires. Le coût de la cessation anticipée d'activité, financé par le FCAATA, serait également important. Selon les hypothèses retenues pour évaluer ce coût, le nombre de bénéficiaires au titre des listes continuerait à augmenter jusqu'en 2006, pour atteindre un pic de près de 32.000 allocataires. Il diminuerait ensuite progressivement, cette baisse s'accélérant par la suite pour atteindre environ 6.400 bénéficiaires à l'horizon 2022. Pour les salariés entrant dans le dispositif au titre de la maladie professionnelle, la montée en charge du dispositif serait régulière jusqu'en 2016, avec un plafond de 14.395 bénéficiaires, stable jusqu'en 2022. Sur cette base, la fourchette de coût de la prise en charge des victimes de l'amiante (indemnisation et cessation anticipée d'activité) serait comprise entre 1,3 et 1,9 milliard d'euros par an et entre 26,8 et 37,2 milliards d'euros pour les vingt prochaines années. Cet écart important est directement lié à l'état des évaluations épidémiologiques disponibles. Le tableau qui suit retrace ces projections, en indiquant la charge incombant aux différents organismes intervenant dans le champ de prise en charge particulière des victimes de l'amiante.
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1. La situation du Fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (FCAATA) et la suppression de la contribution patronale versée au fonds (article 67)
L'article 41 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 a créé une allocation de cessation anticipée d'activité, c'est-à-dire une préretraite, destinée aux travailleurs de l'amiante âgés de plus de 50 ans, et a également institué le fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (FCAATA) qui finance cette allocation.
Le dispositif était initialement ouvert aux personnes atteintes d'une maladie professionnelle liée à l'amiante et aux personnes ayant travaillé dans un établissement de fabrication de matériaux contenant de l'amiante.
L'article 36 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 a élargi le dispositif aux personnes ayant travaillé dans un établissement de flocage et de calorifugeage à l'amiante, de même qu'il a été étendu aux personnes qui avaient exercé un métier dans un établissement de construction ou de réparation navale ou avaient été « ouvriers dockers professionnels ».
Un arrêté du 3 décembre 2001 a étendu le dispositif aux personnes atteintes de plaques pleurales. L'article 54 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 a également étendu le dispositif aux salariés agricoles reconnus atteints d'une maladie professionnelle liée à l'amiante. Depuis le 1 er janvier 2003, quatre arrêtés complétant et modifiant les listes d'établissements ouvrant droit au bénéfice de l'allocation ont été pris.
Si la montée en charge du dispositif se poursuit, le nombre de sorties du dispositif est de plus en plus important, ce qui explique un léger fléchissement de l'augmentation du nombre des allocations versées , ainsi que le montre le tableau suivant :
Nombre d'entrées et de sorties et nombre d'allocations versées par le FCAATA |
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2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
|
Entrées |
9.697 |
18.032 |
25.717 |
33.361 |
40.397 |
46.731 |
52.722 |
Sorties |
545 |
1.351 |
3.201 |
5.962 |
9.029 |
13.672 |
18.813 |
Nombre d'allocations versées |
9.152 |
16.681 |
22.516 |
27.409 |
31.368 |
33.059 |
33.909 |
Source : réponse au questionnaire de votre rapporteur pour avis |
Le tableau qui suit retrace l'évolution de la situation budgétaire du FCAATA. On observe que, depuis 2003, les produits sont inférieurs aux charges supportées par le fonds, qui voit maintenant sa réserve cumulée devenir fortement négative, à hauteur de 280 millions d'euros en 2008.
Il est à noter que l'article 67 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit la suppression de la contribution à la charge des entreprises, versées au FCAATA , introduite par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005. Selon les réponses au questionnaire budgétaire de votre rapporteur pour avis, plusieurs éléments sont avancés pour justifier cette suppression :
- son faible rendement, de l'ordre de 30 millions d'euros par an, contre un rendement attendu de 100 millions d'euros ;
- ses difficultés de recouvrement en raison d'une identification complexe des entreprises redevables ;
- les nombreux contentieux engendrés, liés « à l'incompréhension [pour les entreprises concernées] de devoir assumer les conséquences d'une charge résultant de reprises successives d'établissements anciens ». « Pour les mêmes raisons, elle constitue un obstacle majeur à la reprise de l'activité des sociétés en redressement ou en liquidation judiciaire et à la transmission, pesant ainsi gravement sur l'emploi dans des secteurs ou des zones géographiques souvent déjà fortement sinistrés » 66 ( * ) .
En conséquence, la dotation de la branche AT-MP au FCAATA est augmentée pour 2009 de 30 millions d'euros, supportée par une majoration des cotisations AT-MP de l'ensemble des employeurs.
La suppression de la contribution sera effective à compter de l'entrée en vigueur de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.
Votre rapporteur pour avis s'interroge sur l'effet « déresponsabilisant » pour les entreprises de cette mesure, celle-ci ayant pour conséquence de reporter sur l'ensemble des employeurs le comportement fautif de certaines entreprises. C'est pourquoi il vous propose un amendement visant à rétablir la contribution des entreprises au FCAATA . En conséquence, il sera également prévu de ramener la dotation versée en 2009 par la branche AT-MP au FCAATA à 850 millions d'euros.
Evolution de la situation budgétaire du FCAATA
(en millions d'euros)
Source : réponse au questionnaire de votre rapporteur pour avis
2. La situation du Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) (article 67)
Le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) a été institué par l'article 53 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 afin de procéder à la réparation intégrale des préjudices subis par les personnes ayant obtenu la reconnaissance d'une maladie professionnelle occasionnée par l'amiante ou par les personnes ayant été directement exposées à l'amiante.
Selon les données de l'annexe 8 au présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, le nombre de demande d'indemnisation continue de progresser fortement (+ 33,2 %) pour atteindre 25.579 demandes en 2007.
Depuis sa création et jusqu'au 31 décembre 2007, le montant total des indemnisations versées par le FIVA s'élève à 1,64 milliard d'euros.
Evolution de la situation du FIVA
(en millions d'euros)
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
2008 (p) |
2009 (p) |
|
Charges |
176,7 |
462 |
432 |
392 |
356 |
302 |
665 |
Produits |
230 |
100 |
347 |
402 |
402 |
399 |
399 |
Résultat net |
53,3 |
-362 |
-85 |
10 |
45 |
97 |
-266 |
Résultat cumulé depuis 2001 |
695,5 |
333,5 |
251 |
261 |
306 |
403 |
139 |
Source : annexe 8 au présent projet de loi de financement de la sécurité sociale
L'annexe 8 au présent projet de loi de financement de la sécurité sociale évalue à 665 millions d'euros les charges du FIVA en 2009 et ses produits à 399 millions d'euros, compte tenu des 315 millions d'euros versés par la branche AT-MP en application de l'article 67.
L'année 2009 devrait ainsi être marquée par un doublement des charges du fonds en raison, selon les données de l'annexe 8 au présent projet de loi de financement, de la mise en place d'une cellule spéciale chargée de traiter le stock de dossiers de demandes d'indemnisation. Il en résultera un solde net fortement négatif (- 266 millions d'euros) pour 2009. Le solde positif cumulé du fonds depuis sa création, soit 403 millions d'euros en 2008, devrait permettre d'absorber le fort déficit attendu pour 2009.
Votre rapporteur pour avis souhaite que, à l'occasion de l'examen de l'article 67 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale, le gouvernement donne des précisions quant à l'évolution prévisible de la situation financière du FIVA pour 2009.
* 64 Rapport de la commission d'évaluation sur le coût des accidents du travail, présidée par M. Noël Diricq, juin 2008.
* 65 Rapport d'information n° 37 (2005-2006).
* 66 Réponse à la question 78 du questionnaire budgétaire.