C. DES INTERROGATIONS PERSISTANTES

L'année 2004 a été marquée par l'adoption de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales, qui organise le transfert des compétences en matière portuaire au bénéfice des collectivités territoriales, à l'issue d'une concertation locale, pour les ports maritimes non autonomes relevant de l'Etat (actuels ports d'intérêt national). La loi venant tout juste d'être promulguée, il est encore trop tôt pour en mesurer les effets.

1. Le financement du code ISPS

Le 1 er juillet 2004 sont entrées en vigueur les dispositions du code international pour la sûreté des navires et des installations portuaires (code ISPS), dispositions reprises par le règlement (CE) n° 725/2004 du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004. Ces textes imposent :

- une évaluation de la sûreté du navire débouchant sur l'élaboration d'un plan de sûreté du navire, approuvé par l'administration du pavillon ou un organisme de sûreté reconnu par elle ;

- la désignation d'un agent de sûreté de la compagnie et d'un agent de sûreté du navire ;

- la mise en place d'un système d'alerte de sûreté du navire ;

- l'établissement d'un plan de sûreté de l'installation portuaire approuvé par l'Etat ;

- la désignation d'une personne responsable de la sûreté.

Le règlement précité du Parlement européen et du Conseil a étendu le dispositif de l'OMI au trafic national entre 2004 et 2007. Par ailleurs, une directive européenne, qui devrait entrer en application dès le début 2005, étend la sûreté des installations portuaires à la totalité du port .

L'ordonnance n° 2004-691 du 12 juillet 2004 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports a modifié en conséquence la partie législative du code des ports maritimes :

- elle crée, dans le titre II du livre III relatif à la police des ports maritimes, un chapitre IV intitulé « sûreté portuaire » ;

- elle modifie la loi n° 83-581 du 5 juillet 1983 sur la sauvegarde de la vie humaine en mer, en insérant les articles 2-1 à 2-4 relatifs aux plans de sûreté des navires, à l'évaluation de leur sûreté et au constat d'infraction ou de manquement à la sûreté sur les navires. L'article 2-4 précise qu'un décret en Conseil d'Etat en fixera les modalités d'application.

Un projet de décret en Conseil d'Etat pour l'application de cette ordonnance, est en cours d'élaboration. Il met en place les instances chargées de superviser la sûreté maritime au plan national et reprend les instructions données aux préfets des départements concernés pour l'établissement des plans de sûreté et le recours à des organismes de sûreté habilités, l'identification, la clôture et la police des zones d'accès restreint, l'habilitation des personnels chargés de constater les infractions et les manquements aux règles de sûreté, et le régime des sanctions.

Outre les adaptations législatives, des recrutements importants ont été effectués, conformément à la décision prise lors du Comité interministériel de la mer d'avril 2003 de créer, en trois ans, 40 postes supplémentaires d'officiers de port et d'officiers de port adjoints. Ainsi, 15 postes avaient été créés en 2004, 15 sont inscrits dans le projet de loi de finances pour 2005.

Dès le 1 er juillet 2004, 168 navires battant pavillon français disposaient d'un certificat international de sûreté. Ce nombre pourrait atteindre le chiffre de 190 fin 2004. Pour les ports, sur les 343 installations portuaires recensées en France, d'importance très variée, 284 installations sont aujourd'hui conformes au code ISPS ou sur le point de l'être . Le bilan de l'application du code ISPS dans les ports français est globalement satisfaisant, même si des progrès restent à faire dans certains ports.

Les installations portuaires des grands ports français, et notamment des ports autonomes, sont dotées, pour une très grande majorité d'entre elles, d'un plan de sûreté. L'élaboration de ces plans a déjà permis de renforcer nettement la collaboration indispensable entre les exploitants des installations, les autorités portuaires et les services de l'Etat. Ces plans constituent donc un socle qui devrait permettre d'améliorer de manière très significative la sûreté maritime et portuaire.

S'agissant du coût de la mise en oeuvre de ce dispositif , il ressort des conclusions rendues en 2004 par l'inspection générale de l'administration, de la police nationale et des finances et le conseil général des ponts et chaussées que :

- les ports concernés par les mesures ISPS sont les 6 ports autonomes de métropole et celui de Guadeloupe, 16 ports d'intérêt national en métropole et Corse et 4 outre-mer, et un port départemental, soit un total de 28 ports ;

- une première estimation, établie pour le compte de la Commission européenne, pour les 28 ports initialement choisis, prévoyait, pour l'application du seul code ISPS, 111 millions d'euros la première année et 60 millions pour les années suivantes ;

- le rapport d'expertise rendu en juin 2004 évalue, pour les 28 mêmes ports, l'investissement à 100 millions d'euros et le fonctionnement à 63,3 millions d'euros.

Il convient de trouver un mode de financement qui n'introduise pas de distorsion de concurrence entre les ports. Si les instances européennes ne se sont pas encore prononcées sur la question du financement des mesures de sûreté, l'organisation des ports maritimes européens propose que les Etats prennent en charge les coûts résultant des mesures spécifiques au code ISPS, tandis que les autres coûts se rapportant aux installations portuaires seraient à la charge des usagers de ces installations.

La mission propose donc deux sources de financement :

- les mesures destinées au contrôle des sites, qui concourent à d'autres objectifs que la sûreté, entre autres à la sécurisation des sites et à la lutte contre les vols, seraient financées par voie de redevance . Ces dépenses sont estimées à 60 % des investissements et 64 % du fonctionnement ;

- les dépenses qui relèvent strictement d'engagements internationaux souscrits par la France (ISPS, traité franco-britannique signé au Touquet le 6 février 2003) effectuées à titre permanent et dans l'intérêt général (et non directement et principalement au profit des transporteurs), relèveraient de financements publics (dépenses afférentes aux évaluations et aux plans de sûreté, à la formation et à la rémunération des agents de sûreté des installations portuaires, aux équipements de contrôle des containers principalement utilisés par la douane dans le cadre de sa mission propre, aux contrôles sûreté des passagers). Ces dépenses sont estimées à 29 millions d'euros en investissement et 25 millions d'euros en fonctionnement.

Dans le cas où le redéploiement budgétaire nécessaire ne pourrait être réalisé à temps, il est proposé à titre transitoire (3 ans) la création d'une taxe de sûreté portuaire sur les passagers des ferries et les croisiéristes , taxe qui, par exemple, pourrait varier de 2 euros par passager ferry piéton à 5 euros pour les véhicules (gratuit dans ce cas pour leurs passagers). Le produit de la taxe serait versé à l'Etat et affecté au financement des ports. Le principe de la création de cette taxe n'est toujours pas acté, alors même qu'il convient de définir un mode de financement très rapidement.

Enfin, depuis le mois de mars 2004, le cabinet du Premier ministre a demandé au Secrétariat général de la défense nationale (SGDN), en relation avec le Secrétariat général de la mer, de conduire une réflexion en vue d'établir une doctrine nationale dans le domaine de la sûreté maritime et portuaire . Il s'agit notamment, par cette doctrine, d'élaborer une position française dans le cadre communautaire et international. L'élaboration de cette doctrine nationale est conduite par le SGDN avec le souci de relier cette démarche avec le plan national de vigilance Vigipirate et sa transposition en mer Vigimer. Une première conclusion porte sur la nécessité d'assurer dans les meilleurs délais une présence ostensible sur les plans d'eau portuaires, dans les limites administratives des ports et dans les zones d'attente.

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