II. UNE RÉGLEMENTATION PLUS EXIGEANTE
A. AU NIVEAU NATIONAL
1. La réorganisation de l'action de l'Etat en mer
Le Sénat avait, dans son rapport remis sur le naufrage de l'Erika 9 ( * ) , préconisé une réorganisation de l'action de l'Etat en mer. Celle-ci s'est traduite, en 2004, par l'élaboration de deux décrets, ce dont votre commission se félicite.
Le décret du 6 février 2004 relatif à l'organisation de l'action de l'Etat en mer 10 ( * ) renforce le pouvoir de coordination du préfet maritime et crée les conditions de la continuité de son action : celui-ci peut désormais donner des directives aux chefs des services déconcentrés, qui doivent lui rendre compte de leur exécution. Le décret comporte également des dispositions d'ordre statutaire et organisationnel : le préfet maritime est un officier général de marine , assisté par un adjoint pour l'action de l'Etat en mer et par des fonctionnaires et agents, civils et militaires désignés par les administrations qui concourent à son action.
Le décret du 6 février 2004 11 ( * ) charge le secrétariat général de la mer de l'établissement et de la mise à jour d'un schéma directeur des moyens nautiques et aériens de l'action de l'Etat en mer . Les règles d'élaboration et de mise à jour de ce schéma ont été validées par le Comité interministériel du 16 février 2004, et font l'objet d'une instruction du Premier ministre en cours de finalisation. Les schémas directeurs des moyens par façade maritime en métropole et par zone de responsabilité outre-mer seront approuvés par le prochain Comité interministériel de la mer.
2. La désignation des lieux de refuge
Le naufrage du pétrolier Prestige a mis en évidence la nécessité de pouvoir, dans certaines circonstances, orienter un navire en difficulté et le contraindre à se rendre dans un « lieu de refuge », abri ou port, où le sinistre peut être traité dans des conditions moins pénalisantes qu'en pleine mer. L'article 20 de la directive 2002/59/CE du Parlement et du Conseil du 27 juin 2002, relative à la mise en place d'un système communautaire de suivi des navires et d'information a ainsi prévu la désignation de « lieux de refuge ».
Cette obligation a tout d'abord rendu nécessaire une modification de la législation française . En effet, l'acheminement d'un navire en difficulté nécessite l'accord de l'autorité portuaire d'accueil : cet accord relève de l'Etat dans la majorité des ports français, soit directement pour les ports d'intérêt national, soit indirectement pour les ports autonomes. Il a cependant été nécessaire de prendre des dispositions appropriées à l'égard des ports décentralisés, d'autant plus que les actuels ports d'intérêt national seront prochainement transférés aux collectivités territoriales.
C'est pourquoi l'ordonnance n° 2004-691 du 12 juillet 2004 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine des transports a créé un nouvel article L. 361-1 dans le code des ports maritimes, qui prévoit que « le ministre chargé des ports maritimes ou son représentant peut enjoindre à l'autorité portuaire d'accueillir un navire en difficulté, pour des motifs de sécurité des personnes ou des biens ou de risque d'atteinte à l'environnement. Il peut également, pour les mêmes motifs, autoriser ou ordonner son mouvement dans le port ».
Par ailleurs, conformément à la directive européenne 2002/59, un plan national d'accueil des navires en difficulté a été établi, se composant :
- des plans d'accueil des navires en difficultés, élaborés sur chaque façade maritime, recensant tous les lieux de refuge potentiels ;
- d'une instruction du secrétariat général de la mer en date du 29 juillet 2004, qui précise le cadre de mise en oeuvre de ces différents plans.
Pour effectuer l'inventaire des sites potentiels d'accueil des navires en difficulté, les préfets maritimes se sont appuyés sur un certain nombre d'experts : pilotes, spécialistes de l'assistance en mer, représentants des autorités portuaires, représentants de l'administration maritime et portuaire, représentants de l'administration de l'environnement.
Il est prévu qu'une structure d'expertise analogue puisse se mettre en place très rapidement auprès du préfet maritime territorialement compétent, dès qu'une situation le justifiant aura été détectée. Cette cellule, dont les principes de fonctionnement sont définis par l'instruction du secrétariat général de la mer du 29 juillet 2004, pourra notamment regrouper des sociétés de classification, des sociétés d'assurances maritimes, des stations de pilotage, des organismes spécialisés ou des personnes choisies en fonction de leur compétence (capitaines de navires, industriels de la réparation navale).
Enfin, une ligne spécifique a été créée (article 20 du chapitre 35-34), abondée à hauteur de 305.000 euros, afin de permettre au préfet maritime, en cas de crise, de mobiliser sans délai les moyens nécessaires, notamment en matière d'expertise technique ou environnementale.
* 9 Erika : indemniser et prévenir - Mission commune d'information, n° 441, 1999-2000.
* 10 Décret n° 2004-112 du 6 février 2004 relatif à l'organisation de l'action de l'Etat en mer, qui remplace le décret n° 78-272 du 9 mars 1978.
* 11 Décret n° 2004-113 du 6 février 2004, qui modifie le décret n° 95-1232 du 22 novembre 1995 relatif au Comité interministériel de la mer et au secrétariat général de la mer.