B. LES INÉGALITÉS HOSPITALIÈRES
1. La politique des fonds
Dans le secteur hospitalier, comme dans le reste de la branche maladie d'ailleurs, on assiste depuis 1996 à la multiplication des fonds qui sont autant d'éléments d'affectation au sein des dépenses de la branche maladie.
Dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, il faut noter d'une part la création du Fonds pour la modernisation sociale des établissements de santé, qui entraîne la suppression du Fonds d'accompagnement social pour la modernisation des établissements de santé (FASMO) créé par la loi de financement pour 1998, d'autre part l'abondement à hauteur de 150 millions de francs du Fonds de modernisation des cliniques privées, sans compter l'existence par ailleurs du Fonds d'aide à l'adaptation des établissements hospitaliers (FIMHO), créé par la loi de finances pour 1998 et dont les crédits sont inscrits au chapitre 66-12 du budget du ministère de l'emploi et de la solidarité.
a) La création du Fonds pour la modernisation sociale des établissements de santé (article 33)
L'article 33 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 supprime le FASMO et crée un nouveau Fonds pour la modernisation sociale des établissements de santé (FMES).
Le FASMO avait été créé par l'article 25 de loi de financement de la sécurité sociale pour 1998. Géré par la Caisse des dépôts et consignations, il était destiné aux personnels des hôpitaux publics et privés participant au service public soumis à des mesures de restructuration, ainsi qu'aux salariés des cliniques privées pour autant que l'opération concerne un établissement public.
Ce fonds était financé par des contributions des régimes obligatoires d'assurance maladie, à hauteur, pour le seul régime général, de 244 millions de francs en 1998 et de 650 millions de francs en 2000. Au total, en 1998, le FASMO avait été doté de 300 millions de francs répartis entre les différents régimes conformément au décret n° 98-1223 du 29 décembre 1998. Pour 1999, en revanche, le rapport de la commission des comptes ne mentionne aucun montant versé par la branche maladie au " fonds de modernisation de l'hôpital ".
Ce fonds avait pour mission de contribuer au financement des actions de modernisation sociale des établissements décidées dans le cadre d'un dialogue social, de participer au financement des contrats d'amélioration des conditions de travail et de financer les aides individuelles destinées à favoriser l'adaptation des personnels et leur mobilité lorsqu'ils sont personnellement concernés par une opération de restructuration. Il permet notamment de financer des indemnités exceptionnelles de mobilité, des primes à l'embauche pour les établissements accueillant les personnels quittant leur établissement dans le cadre de sa réorganisation, des actions de conversion ainsi que des indemnités de départ volontaire.
En raison de la lenteur de la mise en place du FASMO, au même titre d'ailleurs que le fonds d'aide à la qualité des villes, dénoncée par la Cour des comptes dans son rapport sur la sécurité sociale de 1999, les dépenses du fonds furent faibles en 1999 et 2000 : 13 millions de francs en 1999 et 74 millions de francs en 2000. Les crédits du FASMO avaient été abondés au total de 300 millions de francs dès la fin 1998, dont 244 millions de francs financés par la branche maladie du régime général. C'est pourquoi ce fonds de modernisation présente actuellement un important excédent de ressources de l'ordre de 200 millions de francs.
Le tableau suivant retrace les dépenses effectives du FASMO par catégorie d'aide au 31 août 2000 (versements effectifs depuis la création du fonds ou montants payés par la Caisse des dépôts et consignations à cette date) auxquelles s'ajoutent les versements en cours par la CDC à la même date (montants engagés).
Récapitulatif des aides par prestation au 31 août 2000
(en francs)
Prestation |
Montants au 31/08/2000 (Montants effectifs et versements en cours) |
Cellules d'accompagnement |
2 452 000 |
Remboursement du différentiel de rémunération |
698 287 |
Indemnités de mobilité et de déménagement |
5 457 675 |
Indemnités de départ volontaire |
44 762 311 |
Actions de conversion |
5 741 220 |
Total |
59 111 493 |
Source : Ministère de l'emploi et de la solidarité
Votre rapporteur pour avis s'interroge dès lors sur l'opportunité de créer un nouveau fonds qui connaîtra sans doute les mêmes avatars que son prédécesseur.
L'article 33 du projet de loi de financement supprime donc le FASMO pour créer le Fonds pour la modernisation sociale des établissements de santé qui doit financer " des actions d'amélioration des conditions de travail des personnels des établissements de santé et d'accompagnement social de la modernisation des établissements de santé " selon les termes même du projet de loi. Comme le FASMO, ce fonds est géré par la Caisse des dépôts et consignations.
Les ressources du fonds sont constituées par une contribution des régimes obligatoires d'assurance maladie, dont le montant est fixé chaque année par arrêté ministériel. En outre, le solde disponible du FASMO est versé au FMES, à la date de sa création.
Conformément au protocole d'accord du 14 mars 2000 conclu entre le gouvernement et les organisations syndicales représentatives des personnels de la fonction publique hospitalière, le fonds a été porté à un milliard de francs en 2000, dont 400 millions de francs au titre des contrats d'amélioration des conditions de travail et 400 millions de francs au titre des actions de modernisation sociale. En outre, le solde de 200 millions de francs du FASMO est versé au FMES. En 2000, la commission des comptes prévoit pour ce fonds une dépense de la branche maladie du régime général de 650 millions de francs et pour 2001 de 300 millions de francs.
Votre rapporteur pour avis remarque ainsi la curieuse méthode du gouvernement qui consiste à créer un nouvel outil par un effet d'affichage lors d'un conflit social alors qu'il en disposait déjà d'un, largement sous-employé. Cet article 33 relèverait ainsi d'une logique " marketing " bien dans l'esprit du gouvernement, que votre rapporteur pour avis ne partage pas.
Votre rapporteur pour avis ne peut également que douter de l'utilité de la création d'un tel fonds alors même que son prédécesseur avait déjà suscité des interrogations quant à sa pertinence soulevées notamment par la Cour des comptes dans son rapport sur la sécurité sociale datant de 1999. S'agira-t-il une fois de plus d'un dispositif très lent à se mettre en place et dont les crédits ne seront consommés qu'au compte-gouttes remettant par là même en cause son utilité première : l'amélioration des conditions de travail dans la fonction publique hospitalière et la modernisation sociale des établissements de santé qui ne sauraient souffrir de délais de mise en oeuvre ?