N° 31
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001
Annexe au procès-verbal de la séance du 18 octobre 2000 |
AVIS
PRÉSENTÉ
au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi portant habilitation du Gouvernement à transposer , par ordonnances , des directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire (Urgence déclarée),
Par M. Ladislas PONIATOWSKI,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Philippe François, Jean Huchon, Jean-François Le Grand, Jean-Paul Emorine, Jean-Marc Pastor, Pierre Lefebvre, vice-présidents ; Georges Berchet, Léon Fatous, Louis Moinard, Jean-Pierre Raffarin, secrétaires ; Louis Althapé, Pierre André, Philippe Arnaud, Mme Janine Bardou, MM. Bernard Barraux, Michel Bécot, Jacques Bellanger, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Gérard César, Marcel-Pierre Cleach, Gérard Cornu, Roland Courteau, Charles de Cuttoli, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Christian Demuynck, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Paul Dubrule, Bernard Dussaut , Jean-Paul Emin, André Ferrand, Hilaire Flandre, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Serge Godard, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Joly, Alain Journet, Gérard Larcher, Patrick Lassourd, Gérard Le Cam, André Lejeune, Guy Lemaire, Kléber Malécot, Louis Mercier, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Bernard Piras, Jean-Pierre Plancade, Ladislas Poniatowski, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Josselin de Rohan, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, Jean-Pierre Vial, Henri Weber.
Voir les numéros :
Sénat : 473 (1999-2000), 30 et 32 (2000-2001).
Union européenne . |
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le 18 octobre 2000, sous la présidence de M. Jean Huchon, vice-président, la Commission des Affaires économiques a procédé, sur le rapport pour avis de M. Ladislas Poniatowski, à l'examen du projet de loi n° 473 (1999-2000) portant habilitation du Gouvernement à transposer, par ordonnances, des directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions du droit communautaire. M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis, a indiqué que le projet de loi examiné par la commission proposait d'habiliter le Gouvernement à transposer par ordonnances quelque 51 directives communautaires et une quinzaine d'autres textes : règlements, décisions ou articles du Traité. Le Gouvernement serait également autorisé, a-t-il précisé, à prendre par ordonnances des " mesures d'adaptation " requises par ces transpositions. Le rapporteur pour avis a souligné que cette démarche, tout à fait exceptionnelle, était motivée par les retards de transposition accumulés par les Gouvernements successifs pour quelque 136 directives, source d'un important contentieux avec la Commission et la Cour de justice des communautés européennes. Il a estimé cette situation préjudiciable pour la France, actuellement présidente de l'Union. Bien que globalement en accord avec la démarche proposée, il a tenu à relever trois singularités du projet de loi. Le rapporteur pour avis a d'abord estimé inhabituelle l'ampleur de l'habilitation demandée au Parlement, relevant que la commission des affaires économiques était concernée par 32 directives, règlements ou autres mesures communautaires inclus au projet de loi . Il a jugé que les trois précédents des années soixante dont le Gouvernement se prévalait étaient sans commune mesure avec le texte en discussion : à elles trois, les lois du 14 décembre 1964, du 6 juillet 1966 et du 24 décembre 1969, permettant la transposition par ordonnances de directives de mise en oeuvre du marché commun, n'ont débouché que sur sept ordonnances, de portée limitée. Le rapporteur pour avis a jugé singulier, ensuite, le calendrier de discussion de ce projet de loi. Alors que le Gouvernement invoquait, notamment, la charge de travail pesant sur le Parlement qui rendrait " difficile, voire impossible " l'adoption des mesures législatives nécessaires, le rapporteur pour avis a fait valoir que le Parlement n'était pour rien dans les retards en cause. Il a précisé que le Sénat avait toujours instruit sans perte de temps les projets de loi liés à des exigences communautaires et qu'il avait même, pour la directive " Natura 2000 ", devancé les choses en adoptant, en juin 1998, une proposition de loi assurant cette transposition, à laquelle la ministre s'était opposée en évoquant l'imminence d'un projet de loi sur le sujet. Le rapporteur pour avis a rappelé qu'à plusieurs reprises, le Sénat avait mis en garde le Gouvernement contre la lenteur avec laquelle il transposait des directives importantes : ainsi pour le projet de loi " gaz ", pour lequel aucune date de discussion n'était arrêtée, alors que la France est déjà mise en demeure pour avoir laissé passer la date limite du 10 août 2000. Jugeant choquante l'utilisation de la procédure de l'urgence, il a dénoncé cette nouvelle méthode de discussion imposée par le Gouvernement, déjà qualifiée par M. Henri Revol, lors de la discussion du projet de loi " électricité ", et par MM. Gérard Larcher et Pierre Hérisson, pour la discussion du projet de loi " Nouvelles régulations économiques ", de l'" urgence lente ", qui consiste à laisser les retards s'accumuler pour pouvoir ensuite précipiter la discussion législative. Enfin, le rapporteur pour avis a insisté sur l'étendue de l'autorisation demandée au Parlement. Sans se déclarer hostile à un " rattrapage " de transposition pour les textes techniques, il a considéré que le projet de loi mêlait transpositions pures et simples (ce qu'il a jugé normal vu son objet), des " adaptations " liées aux transpositions (à son sens acceptables) et des réformes du droit interne non requises par les textes communautaires, ce qui était, à son avis, moins légitime. Il a déclaré que l'insistance avec laquelle l'exposé des motifs du projet de loi affirmait le caractère " technique " ou " essentiellement technique " des mesures envisagées ne devait pas faire illusion, l'article 4 du projet de loi étant un exemple particulièrement significatif de l'étendue de l'habilitation demandée par le Gouvernement . M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis, est ensuite entré dans le détail du projet de loi. Pour nombre de directives et autres textes communautaires, il a jugé le recours à la procédure des ordonnances regrettable, mais envisageable. Renvoyant à son rapport écrit pour l'analyse de chaque directive, il a indiqué que : - dans le secteur des télécommunications, les neuf directives du projet de loi concernaient notamment le coût du service universel des télécommunications, l'annuaire universel des télécommunications et le régime d'agrément des équipements terminaux, qui serait entièrement revu. Le Gouvernement s'apprêterait ainsi à réécrire onze pages du code des postes et télécommunications ; - dans le domaine industriel, la transposition de deux directives, d'un règlement et deux articles du traité conduirait à l'introduction de la marque communautaire en droit national, ainsi qu'à la définition d'un nouveau régime de protection des dessins et modèles : dix pages seraient ajoutées au code de la propriété intellectuelle ; - en matière environnementale : cinq directives et quatre règlements étaient concernés. Hormis " Natura 2000 ", les sujets traités étaient assez techniques : contrôle des produits chimiques et dangereux (directives dites " SEVESO ") ; autorisation de mise sur le marché des produits biocides (mesure susceptible d'entraîner une restructuration importante du secteur) ; contrôle des substances appauvrissant la couche d'ozone, -sujet sur lequel le rapporteur pour avis a indiqué proposer un amendement technique - ; liberté d'accès à l'information en matière environnementale ; régime des plans particuliers d'intervention. Le rapporteur pour avis a regretté que la transposition de la directive " biocides " ne donne pas lieu à un débat au Parlement ; - pour l'agriculture et l'alimentation : un règlement et quatre directives étaient concernés par le projet d'habilitation, qui touchaient au secteur viti-vinicole, à l'ionisation, au contrôle des denrées alimentaires mais aussi à l'alimentation animale ; - pour le droit de la consommation : quatre directives concernaient la protection des consommateurs, relatives aux clauses abusives, aux contrats à distance, aux actions en cessation, mais aussi à la publicité comparative. Le rapporteur pour avis a jugé regrettable que le Parlement ne discute pas de la transposition de la directive sur la publicité comparative, en insistant sur l'impact juridique et économique de ce texte. Il a jugé que le Parlement était mieux à même d'exprimer les inquiétudes des milieux professionnels concernés et de garantir l'équilibre du dispositif de transposition que les cabinets ou certaines administrations. Ne voulant pas pratiquer d'obstruction systématique, le rapporteur pour avis a toutefois proposé de préférer la rapidité de transposition au débat pour l'ensemble de ces sujets. Mais sur trois points, M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis, a jugé que le recours aux ordonnances n'était pas envisageable : ainsi pour la directive postale, pour celle relative à " Natura 2000 " et pour le volet autoroutier. En matière postale, il a rappelé les nombreux travaux antérieurs de la commission des affaires économiques, de longue date attentive à cette question. Il a indiqué que le dépôt d'un projet de loi postal avait été annoncé à différentes reprises par le Gouvernement, par la voix de M. Christian Pierret en février 1999 à l'Assemblée nationale et de Mme Dominique Voynet au Sénat en mars 1999. Evoquant les propositions, nombreuses, de la commission quant au contenu de ce projet de loi, il a cité celle relative au service universel bancaire, récemment adoptée par le Sénat sous forme d'amendement au projet de loi sur les nouvelles régulations économiques. Il a considéré qu'alors que les autres postes européennes avaient été parfois bien préparées à la concurrence, -la Deutsche Post devant entrer en Bourse le 20 novembre et ayant racheté l'intégrateur DHL- tel n'était pas vraiment le cas en France, malgré certaines avancées récentes. Il a indiqué que la directive de 1997 était déjà en cours de révision et que la proposition de la Commission européenne ferait basculer plusieurs milliards de francs supplémentaires de chiffre d'affaires de La Poste dans la concurrence. Il a également évoqué la question de l'évolution du réseau postal sur le territoire. En conséquence, il a estimé qu'un débat national s'imposait pour assurer l'avenir de La Poste, comme cela avait été le cas pour les télécommunications, -ce qui avait permis à France Télécom de devenir un acteur international majeur- ou pour l'électricité. Il a rappelé que le Sénat avait adopté cette position lors du débat d'aménagement du territoire en 1999. M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis, a ensuite rappelé -comme l'avait fait M. Jean-François Le Grand dans son rapport d'information adopté à l'unanimité par la commission des affaires économiques, en avril 1997-, les conditions difficiles de mise en oeuvre de la directive " Habitats naturels ", qui expliquaient le rejet unanime qui s'était installé à la mi-1996 contre ce texte parmi l'ensemble des acteurs du monde rural. Soulignant qu'à l'initiative de la commission, une proposition de loi de transposition avait été adoptée par le Sénat en juin 1998, contre l'avis du Gouvernement, qui prétextait alors de l'imminence d'un projet de loi sur cette question, il a déploré avec vigueur que deux ans après, le Gouvernement choisisse l'expédient des ordonnances. Le rapporteur pour avis a relevé que la quasi-totalité des acteurs locaux concernés lui avait fait part de réserves quant au procédé employé et, en outre, que la propriété agricole, les communes forestières, la FNSEA ou encore les chasseurs, et même France Nature environnement, s'étaient à divers titres inquiétés des imprécisions du projet d'ordonnance ou de ses lacunes. Sur le fond même des dispositions envisagées, il a dénoncé le procédé consistant à valider de façon rétroactive, par arrêté, les zones de protection spéciale déjà désignées en application de la directive " Oiseaux " de 1979, et intégrées dans le réseau écologique européen par la directive " Habitats naturels ". En droit interne, ce zonage établi à partir des zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique, n'a fait l'objet, à la différence des zones de conservation spéciale, a précisé le rapporteur pour avis, d'aucune procédure de concertation des élus locaux ou des professionnels concernés. Le rapporteur pour avis a jugé que la procédure de concertation locale fonctionnait correctement et devait être poursuivie. Il a en conséquence proposé de supprimer la directive " Habitats naturels " de la liste du projet de loi. Pour les dispositions relatives au secteur autoroutier, le rapporteur pour avis a jugé que le projet de loi allait bien au-delà d'une simple transposition de directives, qu'il s'agisse de la directive " Poids lourds " du 17 juin 1999 ou même de la directive " Travaux " du 14 juin 1993. Il a considéré que le Gouvernement proposait des mesures parfois opportunes mais dépassant largement le cadre d'une simple transposition. Le rapporteur pour avis a jugé qu'en voulant prolonger la durée des concessions de six sociétés d'économie mixte autoroutière, comme le recommandait d'ailleurs le Sénat dans ses travaux antérieurs, le Gouvernement entendait améliorer la situation financière des sociétés d'économie mixte existantes et les mettre à égalité avec les sociétés privées, ce qui dépassait, à l'évidence, le champ des obligations communautaires de la France. Il a fait la même analyse pour la suppression des règles garantissant aux sociétés d'économie mixte la reprise de leur passif, ou l'introduction, dans le code de la voirie routière, des principes de non discrimination et de modulation des péages, étendus à tous les usagers alors que la directive communautaire " Poids lourds " ne s'applique qu'aux véhicules lourds de transport de marchandises. Bien que favorable sur le fond à certaines de ces mesures, le rapporteur pour avis a jugé anormal de les introduire par voie d'ordonnances. Ainsi a-t-il jugé que la suppression envisagée du principe de gratuité autoroutière méritait, à tout le moins, un débat. Enfin, le rapporteur pour avis a jugé nécessaire une discussion parlementaire du principe de l'autorisation de mise à péage des ouvrages d'art nationaux, départementaux et communaux, qu'aucune contrainte communautaire n'impose. Il a relevé qu'au mois de novembre 1999, le ministre de l'Equipement, des Transports et du Logement s'était d'ailleurs engagé devant les commissions des affaires économiques et des finances du Sénat à déposer un projet de loi sur ces sujets. Il a considéré qu'un projet de loi permettrait seul de discuter des questions fondamentales que sont la concurrence et la complémentarité entre tous les modes de transport. Il a donc proposé de supprimer l'article 4 du projet de loi, insistant sur le fait que cela ne devrait pas entraîner de retard des projets autoroutiers actuels, les procédures communautaires pouvant être respectées même en l'absence de texte, comme ce fut le cas pour l'autoroute A 28. Après avoir jugé que le rapporteur avait fait preuve, malgré sa déclaration liminaire sur la responsabilité partagée des gouvernements successifs, d'une certaine partialité à l'égard de l'actuel Gouvernement, M. Jacques Bellanger a souligné que le recours aux ordonnances pour la transposition des directives devait susciter, au-delà des clivages politiques traditionnels, une réflexion approfondie sur les procédures d'adoption et de transposition des textes communautaires. Il a estimé que le recours aux ordonnances, qui conduit à un dessaisissement du Parlement, était critiquable dans son principe. Il a ensuite indiqué qu'il était en désaccord avec l'analyse du rapporteur sur trois points. D'abord, l'évolution des télécommunications ne lui semblait pas pleinement satisfaisante, la récente attribution des licences de boucle locale radio posant des problèmes d'aménagement du territoire. Ensuite, il a rappelé que la Deutsche Post avait accru sa capacité d'investissement grâce à une augmentation sensible du prix du timbre, exemple à son sens à ne pas suivre. Il a enfin jugé que la proposition de la Commission européenne de restreindre à seulement 50 grammes le périmètre des services réservés aux opérateurs postaux nationaux était de nature à remettre en cause la capacité de La Poste à remplir ses missions de service public, en particulier dans les zones rurales. En réponse, M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis, a apporté les précisions suivantes : - le retard pris par la France dans la transposition des directives est imputable à tous les Gouvernements depuis 20 ans, toutes tendances confondues ; - s'il n'y a pas d'objections majeures à transposer par ordonnances la très grande majorité des directives concernées, il apparaît difficile d'accepter la transposition par cette méthode des directives relatives au secteur postal, à Natura 2000 et au régime des autoroutes, alors que le Sénat et sa commission des affaires économiques réclament depuis des années un débat parlementaire sur ces sujets ; - s'il faut effectivement veiller à ce que France Télécom remplisse les missions de service public que la loi lui impose, force est de constater que l'évolution de son statut lui a permis de devenir un acteur industriel particulièrement dynamique en France et dans le monde. Rejoignant les propos du rapporteur, M. Pierre Hérisson a estimé que si l'on n'avait pas ouvert à la concurrence le marché des télécommunications et modifié le statut de France Télécom, celui-ci n'aurait pas connu le dynamisme qu'il connaît aujourd'hui. Il a relevé que cette évolution avait non seulement garanti le service public des télécommunications mais aussi apporté à l'Etat des ressources importantes liées à la vente partielle du capital de l'opérateur. Il a fait observer que l'augmentation contestée du prix du timbre allemand avait permis à la Deutsche Post de mener une politique de croissance externe très active et constituait un véritable " piège ", le maintien de larges services réservés conduisant paradoxalement à pérenniser cet avantage. Il a souhaité que l'on puisse doter La Poste d'un statut juridique qui lui permette d'affronter ses concurrents et de trouver sa place sur les marchés internationaux. Evoquant, enfin, le régime juridique des autoroutes, il a estimé qu'un débat parlementaire était nécessaire, notamment pour préciser la répartition des responsabilités dans le financement des infrastructures entre les collectivités territoriales et l'Etat. M. Michel Souplet s'est félicité des positions adoptées par le rapporteur. Il a jugé qu'en matière d'environnement comme d'infrastructures, un travail d'explication était nécessaire, que seul le débat parlementaire permettait. Il a relevé qu'alors qu'on juge nécessaire de rapprocher la politique des citoyens et de revaloriser le rôle du Parlement, la procédure de transposition par ordonnances n'était pas opportune, surtout sur des sujets d'importance. Il a demandé au rapporteur pourquoi celui-ci n'avait pas souhaité supprimer la référence aux directives relatives à la publicité comparative et aux biocides, dont la transposition lui paraissait pourtant devoir faire l'objet d'un débat parlementaire. M. Pierre Lefebvre a jugé que le recours aux ordonnances proposé par le Gouvernement était d'autant plus critiquable que le débat parlementaire permettait, l'expérience le prouve, d'amender largement les projets de transposition. Craignant une généralisation de cette méthode, il a jugé que ce n'était pas ainsi qu'on rapprocherait les citoyens de l'Europe. Il a indiqué qu'en conséquence, il partageait les préoccupations du rapporteur quant à la méthode proposée par le Gouvernement, soulignant en revanche que, sur le fond des dossiers, et en particulier en matière de libéralisation du marché postal, il avait une position sans doute très différente. M. Dominique Braye a considéré que la transposition de 51 directives par voie d'ordonnances manifestait de la part du Gouvernement un mépris du Parlement, qui était ainsi dessaisi de ses prérogatives. Il a estimé qu'il ne fallait pas se contenter de protester contre la méthode employée, mais ne pas hésiter à amender le texte du projet de loi. M. Jean-Pierre Plancade s'est interrogé sur les raisons de fond qui conduisaient le rapporteur à vouloir retirer les directives concernant les services postaux, " Natura 2000 " et les autoroutes de la liste des directives que le Gouvernement serait habilité à transposer par voie d'ordonnances. M. Jean-Paul Emorine a jugé que la position du rapporteur était équilibrée, soulignant qu'elle permettrait au Gouvernement de combler le retard pris par la France dans la transposition de nombre de directives, tout en réaffirmant, sur des sujets essentiels, les prérogatives du Parlement. Partageant les positions du rapporteur, en particulier sur la directive relative à Natura 2000, M. Louis Moinard a souhaité que la Commission Européenne ne se contente pas d'un bilan statistique des transpositions des directives mais élabore un bilan qualitatif de la façon dont les Etats membres transposaient ces textes. En réponse aux différents intervenants, M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis, a apporté les précisions suivantes : - le fait pour la commission de ne pas autoriser le Gouvernement à transposer certaines directives par la voie des ordonnances ne préjuge pas des positions que chacun peut prendre sur tel ou tel autre texte communautaire à transposer ; - le recours aux ordonnances pour transposer 51 directives pose, en effet, le problème du rôle des Parlements nationaux dans la transposition des directives ; - la transposition des directives concernant les services postaux, " Natura 2000 " et le statut juridique des autoroutes soulève, en effet, de nombreuses questions de fond concernant aussi bien le statut juridique de La Poste et le rôle de l'Etat, la protection de la propriété privée dans les zones protégées par la directive " Habitats naturels ", ou la répartition des responsabilités entre l'Etat et les collectivités territoriales dans le financement des infrastructures. L'ensemble de ces questions devrait faire l'objet d'un débat parlementaire ; - la Commission européenne a jugé que lors de la mise en oeuvre de la directive 92-43/CE relative aux "Habitats naturels", la France n'avait pas défini des zones protégées suffisamment étendues. M. Jean-Marc Pastor a jugé que le recours aux ordonnances posait effectivement des questions de principe, soulignant que les questions de fond abordées par le rapporteur mériteraient un débat parlementaire. Il a demandé au rapporteur si, dans le cas où le Parlement n'autoriserait pas, sur certains textes, le Gouvernement à procéder par voie d'ordonnances, celui-ci serait à même de proposer dans des délais raisonnables des projets de loi de transposition. En réponse, M. Ladislas Poniatowski, rapporteur pour avis, a rappelé que le Gouvernement était maître de l'ordre du jour. Il a, par ailleurs, indiqué que les projets d'ordonnances relatifs à la directive postale, à " Natura 2000 " et aux autoroutes étaient déjà rédigés et pourraient donc, si le Gouvernement le souhaitait, faire l'objet d'une discussion dans des délais très brefs. Après avoir indiqué qu'il approuvait la position du rapporteur, M. François Gerbaud a considéré qu'" au cimetière des illusions européennes, on pourrait bientôt trouver la mention : ci-gît le Parlement Français, mort sur ordonnances ". La commission a ensuite examiné les articles du projet de loi. A l'article premier, la commission a adopté deux amendements tendant à supprimer : - le 10° du I relatif à la directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 concernant la conservation des "Habitats naturels" ainsi que de la faune et de la flore sauvages et article 4 de la directive 79/409/CEE du Conseil du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages ; - le 15° du II relatif à la directive 97/67/CE du Parlement Européen et du Conseil du 15 décembre 1997 concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité du service ; A l'article 2, la commission a adopté un amendement rédactionnel tendant à substituer à la référence au règlement n° CE 3093/94 du Conseil du 15 décembre 1994 relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone celle du règlement n° CE 2037/2000 du Parlement Européen et du Conseil du 29 juin 2000 qui abroge et remplace le règlement du 15 décembre 1994 précité. A l'article 4, la commission a adopté un amendement de suppression de cet article. Sous réserve des modifications proposées, la commission a donné un avis favorable à l'adoption du projet de loi. |