NOTE DE SYNTHÈSE
En
France, les sapeurs-pompiers forment le coeur du système de
sécurité civile.
En effet, d'après le code
général des collectivités territoriales, les services
d'incendie et de secours sont
" chargés de la prévention,
de la protection et de la lutte contre les incendies "
. Cette mission
leur appartient en propre. En outre, avec les autres services concernés,
ils concourent à
" la protection et à la lutte contre les
autres accidents, sinistres et catastrophes, à l'évaluation et
à la prévention des risques technologiques ou naturels, ainsi
qu'aux secours d'urgence ".
Au nombre de 250 000, les sapeurs-pompiers français sont surtout
des civils, puisqu'il n'existe en France que deux unités militaires
chargées des secours et regroupant environ 10 000 hommes : la
brigade des sapeurs-pompiers de Paris et le bataillon des marins-pompiers de
Marseille.
Parmi les sapeurs-pompiers civils, environ 85 % sont des volontaires. Face
aux difficultés de recrutement,
la loi 96-370 du 3 mai 1996 relative
au développement du
volontariat dans les corps de
sapeurs-pompiers
a amélioré le statut des sapeurs-pompiers
volontaires. Elle leur reconnaît, d'une part, le droit à la
disponibilité, aussi bien pour les missions opérationnelles que
pour la formation et, d'autre part, celui de percevoir des vacations horaires
ainsi qu'une allocation de vétérance. Celle-ci est versée
aux anciens sapeurs-pompiers volontaires qui ont effectué au moins vingt
ans de service.
En même temps que la loi 96-370, le législateur a adopté
la loi 96-369 relative
aux services d'incendie et secours
. Cette
loi, consacrant une évolution de fait entamée depuis plusieurs
années, institue une nouvelle organisation territoriale des services
d'incendie et de secours.
La loi 92-125 du 6 février 1992 relative à l'administration
territoriale de la République avait déjà reconnu au
service départemental d'incendie et de secours (SDIS) pleine
compétence pour la gestion de tous les moyens consacrés à
la lutte contre les incendies et les autres accidents au niveau local
(c'est-à-dire par les communes, les établissements publics
intercommunaux et les départements). La loi 96-369 organise cette
départementalisation, puisque le SDIS devient le gestionnaire essentiel
des moyens humains, matériels et financiers des services d'incendie et
de secours dans le département. Il constitue un établissement
public territorial commun au département, aux communes et aux
établissements publics de coopération intercommunale. Il
gère le corps, désormais départemental, des
sapeurs-pompiers et comprend des centres de secours principaux, des centres de
secours, des centres de première intervention, ainsi qu'un service de
santé et de secours médical.
Dans la perspective d'une éventuelle réforme des services
d'incendie et de secours, la présente étude analyse les
dispositifs étrangers de secours et de lutte contre l'incendie sous
quatre aspects :
- l'organisation des services d'incendie et de secours ;
- les différentes catégories de sapeurs-pompiers ;
- les missions des corps de sapeurs-pompiers ;
- le statut des sapeurs-pompiers, professionnels et volontaires.
Six pays ont été retenus :
l'Allemagne, l'Angleterre et
le Pays de Galles, la Belgique, le Danemark, l'Espagne et les Pays-Bas.
Cet examen permet de mettre en évidence que :
- si la lutte contre l'incendie constitue une compétence des
communes dans tous les pays sous revue sauf en Angleterre et au Pays de
Galles, il existe partout des dispositifs de coopération pour pallier le
manque de moyens des communes face aux catastrophes les plus importantes ;
- les sapeurs-pompiers professionnels prédominent en Angleterre et
au Pays de Galles ainsi qu'au Danemark, tandis qu'ils jouent un rôle plus
effacé dans les autres pays ;
- dans tous les pays étudiés, la plupart des
éléments du statut des sapeurs-pompiers sont définis au
niveau municipal ou régional.
1) Sauf en Angleterre et au Pays de Galles, la lutte contre l'incendie
constitue une compétence des communes, mais des mécanismes de
coopération permettent de faire face aux catastrophes les plus
importantes
a) La lutte contre l'incendie constitue une compétence des communes
dans tous les pays sous revue sauf en Angleterre et au Pays de Galles
En Angleterre et au Pays de Galles, la loi de 1947
sur les services
d'incendie a supprimé le service national de lutte contre l'incendie et
chargé
les comtés d'organiser leurs propres services.
En revanche,
en Allemagne, en Belgique, au Danemark, en Espagne et aux
Pays-Bas, la lutte contre l'incendie constitue une compétence
communale.
Toutefois, il importe de souligner que, dans chacun de ces cinq pays,
la
population moyenne d'une commune est nettement supérieure à ce
qu'elle est en France,
puisqu'elle dépasse 5 000 habitants en
Allemagne et en Espagne, qu'elle est d'environ de 18 000 habitants en
Belgique et au Danemark, et de 30 000 habitants aux Pays-Bas.
De plus,
en Belgique, au Danemark et en Espagne, les communes n'ont pas
l'obligation de disposer de leur propre corps de sapeurs-pompiers, car elles
peuvent déléguer leur compétence.
En Belgique, les communes qui n'ont pas été
désignées comme centres de leur groupe régional peuvent
s'acquitter de leur obligation en payant une redevance annuelle forfaitaire
à la commune centre de leur groupe, qui, elle, doit disposer du
personnel et des matériels nécessaires. De même, au
Danemark, les communes ne sont pas tenues de disposer de leur propre service,
car elles peuvent passer des accords avec les communes voisines ou avec les
services régionaux, voire sous-traiter à une entreprise
privée. En pratique, les deux tiers des communes danoises ont
opté pour la dernière solution.
En Espagne, seules les communes de plus de 20 000 habitants ont
l'obligation de disposer de leur propre service de lutte contre l'incendie.
Encore peuvent-elles obtenir une dispense de leur communauté autonome.
Quant aux communes de moins de 20 000 habitants, la loi qui
détermine les principes d'organisation et de fonctionnement des
collectivités locales charge les provinces, au titre de l'assistance
qu'elles doivent aux communes, de la compétence en matière de
prévention et de lutte contre l'incendie.
b) Des dispositifs de coopération permettent de pallier le manque de
moyens des communes face aux catastrophes les plus importantes
En Allemagne, où la lutte contre l'incendie constitue une
compétence des Länder, les différentes lois
régionales précisent en général que les
Kreise
(c'est-à-dire les arrondissements) doivent notamment
prévoir les services et les équipements nécessaires pour
lutter contre les catastrophes qui dépassent les capacités des
corps municipaux et organiser des formations et des entraînements communs
aux différents corps municipaux. Les Länder, quant à eux,
doivent établir les plans de lutte contre les catastrophes de plus
grande ampleur et contrôler les corps locaux de sapeurs-pompiers.
En Belgique, la loi sur la protection civile a prévu la création
de groupes régionaux, chacun d'eux disposant d'une commune centre. De
plus, en 1999, les zones de secours ont été créées.
Par le biais de conventions signées entre les communes
concernées, elles facilitent la coopération dans un cadre
géographique plus large que celui des groupes régionaux.
Au Danemark, outre les six services régionaux qui prêtent
assistance aux services municipaux lorsque la catastrophe ne peut pas
être combattue par la commune concernée avec l'aide des communes
voisines, le ministère de l'Intérieur a désigné
sept services municipaux, qui fonctionnent comme services d'appui en cas de
besoin.
En Espagne, chaque niveau de collectivité gère son système
de protection de façon autonome, mais dans le respect des principes de
complémentarité, de subsidiarité et de solidarité.
Par conséquent, lorsque la commune ou la province ne peut pas faire face
à une situation d'urgence, la communauté autonome fait le
nécessaire. De même, l'État peut se substituer aux
communautés autonomes.
Aux Pays-Bas, la loi de 1985 sur les services d'incendie, tout en rappelant que
la lutte contre l'incendie constituait une compétence des communes, a
institué des services régionaux, qui assurent la coordination des
services municipaux en cas de catastrophe importante.
En contrepartie de cette organisation très décentralisée,
tous les pays étudiés ont mis en place des services d'inspection
ou de contrôle : au niveau du Land en Allemagne et au niveau
national dans les autres pays.
2) Les sapeurs-pompiers professionnels prédominent en Angleterre et
au Pays de Galles ainsi qu'au Danemark, tandis qu'ils jouent un rôle plus
effacé dans les autres pays
a) La professionnalisation des sapeurs-pompiers anglais et danois
En Angleterre et au Pays de Galles, les collectivités territoriales
emploient quelque 52 000 sapeurs-pompiers. La plupart d'entre eux,
35 500, sont employés à temps plein. Les autres ne sont
employés qu'à temps partiel : requis pour deux à
trois vacations hebdomadaires, ils doivent habiter et travailler à moins
de cinq kilomètres du service d'incendie dont ils dépendent. En
revanche, les volontaires sont très peu nombreux.
De même, au Danemark, les sapeurs-pompiers volontaires sont minoritaires.
Ils sont surtout présents dans la région frontalière avec
l'Allemagne. Les deux tiers des 51 000 sapeurs-pompiers professionnels
sont employés à temps partiel et ont donc l'obligation d'exercer
leur activité professionnelle principale à proximité du
centre de secours dont ils dépendent. Les sapeurs-pompiers
professionnels à temps complet sont principalement employés dans
les villes de plus de 100 000 habitants.
b) L'importance des sapeurs-pompiers volontaires allemands, belges et
néerlandais
La Fédération allemande des sapeurs-pompiers recense un peu plus
d'un million de sapeurs-pompiers volontaires pour 27 000 professionnels.
En Belgique et aux Pays-Bas, les volontaires représentent respectivement
70 % et 85 % de l'effectif total des sapeurs-pompiers.
Dans ces trois pays, les professionnels exercent surtout dans les grandes
villes. Ils forment également l'encadrement des services dans les autres
communes.
c) Une situation intermédiaire en Espagne
Comme chaque niveau de collectivité gère son système de
protection civile de façon autonome, la répartition des
sapeurs-pompiers entre professionnels et volontaires est variable d'une
communauté autonome à l'autre, voire d'une commune à
l'autre.
3) La plupart des éléments du statut des sapeurs-pompiers sont
définis au niveau municipal ou régional
En Allemagne, comme la lutte contre l'incendie relève de la
compétence des Länder, le statut des sapeurs-pompiers varie d'un
Land à l'autre. Dans les autres pays, même si les textes nationaux
leur imposent des règles détaillées pour l'organisation
des services de secours, les collectivités territoriales sont largement
responsables de la définition du statut des sapeurs-pompiers.
En Angleterre et au Pays de Galles, il est établi par les
différents comtés. En Espagne, il est
déterminé par la collectivité dont dépend le
service d'incendie : commune, province ou communauté autonome.
Dans les autres pays étudiés, la Belgique, le Danemark et les
Pays-Bas, il est fixé par la commune. Les communes belges ont toutefois
l'obligation de respecter les dispositions contenues dans des règlements
communaux types et la plupart des communes néerlandaises ont
adhéré à un accord national, de sorte que les variations
d'une commune à l'autre sont limitées.
Cette diversité ne facilite pas les comparaisons. Il importe cependant
de souligner que les sapeurs-pompiers professionnels belges ont obtenu en 1999
la reconnaissance de leur profession comme dangereuse et insalubre. En
conséquence, à partir de l'âge de cinquante-six ans, ils
peuvent demander à bénéficier d'un congé
spécial pendant lequel ils perçoivent 80 % de leur dernier
traitement. En Angleterre et aux Pays-Bas, les sapeurs-pompiers professionnels
qui participent directement à la lutte contre l'incendie peuvent,
à condition de justifier d'une certaine ancienneté, prendre leur
retraite respectivement à l'âge de cinquante et cinquante-cinq ans.