ESPAGNE
L'article 14 de la Constitution pose le principe
général de l'interdiction de toute discrimination :
"
Les Espagnols sont égaux devant la loi ; ils ne
peuvent faire l'objet d'aucune discrimination pour des raisons de naissance, de
race, de sexe, de religion, d'opinion ou pour n'importe quelle autre raison ou
circonstance personnelle ou sociale.
"
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1) Les pratiques discriminatoires explicitement interdites par la loi
A
l'article 4-2-c,
la loi portant statut des salariés
énonce le droit de ces derniers à ne pas subir de discrimination,
ni lors du recrutement, ni ultérieurement, pour des raisons liées
au sexe, à l'état civil, à l'âge, à la race,
au statut social, aux croyances religieuses, aux idées politiques,
à l'appartenance syndicale ou à la langue.
La loi interdit également toute discrimination fondée sur un
handicap physique, mental ou sensoriel, dans la mesure où
l'intéressé est en mesure d'occuper le poste à pourvoir.
La loi ne distingue pas les discriminations directes des discriminations
indirectes, mais les tribunaux considèrent que tout traitement
apparemment équitable, mais qui, dans la réalité, engendre
des différences entre les personnes constitue une discrimination.
L'article 96-12 de la même loi qualifie d'
infractions
très graves les décisions
unilatérales de
l'employeur qui comportent des discriminations
, et ce quel
que soit
le fondement de la discrimination. Toutefois, cet article autorise les
discriminations favorables liées à l'âge du salarié,
ce qui permet, d'une part, de faciliter l'insertion des jeunes dans le monde du
travail et, d'autre part, d'octroyer des avantages aux salariés les plus
âgés.
L'article 28 de la loi sur les infractions et sanctions en matière
sociale vise les offres d'emploi. Il qualifie
d'infraction très
grave
la mention, dans toute offre d'emploi, de conditions susceptibles de
limiter l'accès à l'emploi pour des raisons liées au sexe,
à l'état civil, à l'âge, à la race, au statut
social, aux croyances religieuses, aux opinions politiques, à
l'appartenance syndicale ou à la langue.
2) Les sanctions de ces interdictions
L'article 17-1 de la loi portant statut des salariés frappe de
nullité
toutes les dispositions discriminatoires contenues dans
une convention collective, dans un contrat individuel ou dans une
décision unilatérale de l'employeur. Cette disposition, qui
s'applique quel que soit le motif de la discrimination (âge, sexe,
origine...), autorise cependant l'octroi d'avantages liés à
l'âge.
Les
infractions très graves
, qu'elles soient définies par
la loi portant statut des salariés ou par la loi sur les infractions et
sanctions en matière sociale, sont sanctionnées par une amende
dont le montant varie entre 500 000 et 15 000 000 pesetas
(c'est-à-dire entre 20 000 et 600 000 FRF).
Le nouveau code pénal érige en délit certaines
infractions aux droits des salariés
, parmi lesquels l'interdiction
de toute discrimination. A l'article 314, il prévoit que les
auteurs d'une grave discrimination dans le travail, qu'il s'agisse d'un emploi
public ou privé, sont passibles d'une peine de prison comprise entre six
mois et deux ans, ou d'une amende de six à douze mois
(2(
*
))
lorsque la discrimination est fondée
sur "
l'idéologie, la religion ou les croyances, l'appartenance
à une ethnie, à une race ou à une nation, l'orientation
sexuelle, la situation familiale, la maladie ou le handicap physique
".
Par ailleurs, l'article 14 du nouveau code pénal dispose que, de
manière générale, la volonté de discrimination
constitue une
circonstance aggravante
.
3) Les procédures spécifiques permettant aux victimes de faire valoir leurs droits
a) Les recours particuliers
Le
principe constitutionnel d'interdiction de toute discrimination jouit d'un
niveau de protection très élevé,
l'article 53-2
de la Constitution énonçant : "
Tout citoyen pourra
demander la protection des libertés et des droits reconnus à
l'article 14 et à la section première du
chapitre II
[du titre premier]
devant les tribunaux ordinaires par
une action fondée sur les principes de priorité et de la
procédure sommaire et, le cas échéant, par le recours
individuel d'amparo (3(
*
)) devant le Tribunal
constitutionnel (...)
".
Ainsi, la victime d'une discrimination a non seulement la possibilité de
soumettre son affaire très rapidement aux juridictions ordinaires, mais
elle peut également, lorsque tous les recours judiciaires ont
été épuisés, saisir le Tribunal constitutionnel
dans les vingt jours qui suivent la notification du dernier jugement rendu.
En revanche, si la Constitution inclut la liberté d'entreprise (qui
implique notamment la liberté contractuelle, laquelle peut être en
contradiction avec le principe de non-discrimination) parmi les droits et
devoirs fondamentaux, elle lui accorde un niveau de protection moins
élevé. En effet, la liberté d'entreprise figure à
la section II du chapitre II du titre premier et ne relève
donc pas de l'article 53-2.
b) L'action en justice des syndicats
La loi sur la procédure devant les tribunaux du travail permet aux syndicats d'agir en justice pour y défendre leurs propres intérêts. Elle leur permet aussi d'agir au nom de leurs membres et de défendre leurs droits individuels . La loi présume même l'accord de ces derniers pour être représentés par les syndicats. Cette règle s'applique de façon générale à toutes les procédures devant les tribunaux du travail. Elle n'est pas propre aux affaires de discrimination.
c) L'aménagement des règles de preuve
En règle générale, le Tribunal constitutionnel admet que l'existence de la discrimination doit être prouvée par la victime, mais qu'il appartient à l'autre partie de justifier le motif de la discrimination.