NOTE DE SYNTHESE
Le
projet de loi portant création d'une couverture maladie universelle
comporte trois mesures essentielles :
- l'affiliation obligatoire de tous les résidents réguliers
sur le territoire à un régime de base de sécurité
sociale ;
- le bénéfice d'une protection complémentaire
étendue - puisqu'elle inclut notamment la prise en charge du ticket
modérateur, du forfait hospitalier journalier et des dépassements
tarifaires en matière de prothèses dentaires et de frais
d'optique - pour les personnes les plus démunies ;
- la dispense de l'avance des frais pour ces mêmes personnes.
La présente étude cherche à comparer ces dispositions
à celles qui existent dans quelques pays européens :
l'
Allemagne
, le
Danemark
, l'
Espagne
, les
Pays-Bas
,
le
Royaume-Uni
, la
Suède
et la
Suisse
.
On a donc choisi, pour chacun de ces sept pays, de vérifier l'existence
d'une couverture maladie généralisée à l'ensemble
de la population. Lorsqu'une telle couverture existe, on a analysé le
contenu des prestations minimales qui sont garanties à tous.
Cet examen permet de mettre en évidence que :
-
seule l'Allemagne ignore la couverture maladie universelle
;
-
en général, les prestations minimales garanties
à l'ensemble de la population sont limitées aux soins
ambulatoires et aux frais d'hospitalisation, tandis que les médicaments,
les prothèses dentaires et les frais d'optique restent au moins
partiellement à la charge des patients
.
1) L'Allemagne est le seul pays à ne pas avoir institué une couverture maladie universelle
a) L'absence de couverture maladie universelle en Allemagne
Cette
situation résulte des conceptions bismarckiennes qui ont
présidé à la création du système de
protection sociale et selon lesquelles cette dernière était
accordée en contrepartie d'une activité professionnelle.
En conséquence,
bien que le champ de l'assurance maladie obligatoire
ait, au cours du temps, été élargi à d'autres
catégories que les salariés dont le revenu ne dépasse pas
le plafond d'affiliation, plusieurs groupes de personnes sont obligés de
souscrire une assurance privée
. C'est en particulier le cas des
travailleurs indépendants, des membres des congrégations
religieuses et des chômeurs qui ne bénéficient pas d'une
allocation de chômage.
b) L'existence d'une couverture maladie universelle dans les autres pays
Dans
tous les autres pays étudiés, il existe une couverture maladie
universelle
. Elle résulte soit des théories beveridgiennes
d'accès universel aux soins qui ont inspiré l'institution du
système de santé après la seconde guerre mondiale
(Danemark, Royaume-Uni, Suède), soit de l'élargissement d'un
régime d'assurance initialement limité à certaines
catégories (Espagne, Pays-Bas et Suisse).
Pour les Pays-Bas, il faut souligner que
la couverture maladie
généralisée est limitée aux soins exceptionnels et
difficilement assurables
, comme l'hospitalisation de longue durée.
En effet, la loi sur les caisses de maladie, qui
prévoit l'assurance
obligatoire des soins courants, ne concerne pas l'ensemble de la
population
. Initialement limité aux salariés jusqu'à
un certain seuil de revenus, son champ d'application a cependant
été étendu aux bénéficiaires d'une mesure
publique d'assistance financière, c'est-à-dire aux personnes les
plus modestes.
2) La couverture maladie de base se limite en général aux soins ambulatoires et aux frais d'hospitalisation
a) Le caractère restreint de la couverture maladie de base aux Pays-Bas
Aux Pays-Bas, la couverture maladie de base concerne seulement les frais médicaux particulièrement lourds (hospitalisations d'une durée supérieure à un an, traitements psychiatriques, soins à domicile...), car les soins ambulatoires, les frais d'hospitalisation de courte durée, les médicaments et les frais dentaires relèvent de la loi sur les caisses de maladie. Or celle-ci ne prévoit pas de faire bénéficier l'ensemble de la population de l'assurance obligatoire des soins courants.
b) Dans les cinq autres pays, les prestations minimales garanties à tous sont le plus souvent limitées aux soins ambulatoires de médecine générale et aux frais d'hospitalisation
Ils sont
gratuits au Danemark, en Espagne et au Royaume-Uni, tandis qu'en Suède
et en Suisse, une participation financière est demandée aux
patients. Dans ces deux pays, elle prend la forme d'une franchise annuelle
plafonnée pour les soins ambulatoires et d'une contribution
journalière pour les frais d'hospitalisation.
La gratuité des soins ambulatoires de médecine
générale ne s'étend pas nécessairement aux soins
dentaires : au Danemark et au Royaume-Uni, la gratuité des soins
dentaires est réservée aux enfants jusqu'à 16 ans.
Pour les patients plus âgés, les taux de remboursement se montent
respectivement à 40 % et 20 %.
De plus, dans les cinq pays qui connaissent une couverture maladie
généralisée assez étendue, les médicaments,
les prothèses dentaires et les frais d'optique ne sont que partiellement
remboursés, voire entièrement à la charge des patients.
Ainsi, en Espagne, les médicaments sont remboursés à
hauteur de 60 % ; au Royaume-Uni, une participation d'environ 60
francs par médicament prescrit est demandée au patient, à
moins que ce dernier ne préfère opter pour le paiement d'un
forfait quadrimestriel ou annuel ; au Danemark, les frais d'optique ne
sont remboursés qu'aux personnes souffrant d'une affection durable
à laquelle il ne peut être remédié que par le port
de lunettes.
Cependant, dans plusieurs pays (Espagne et Royaume-Uni essentiellement),
plusieurs catégories de personnes, parmi lesquelles les
détenteurs des revenus les plus modestes et les retraités, sont
dispensées du paiement du ticket modérateur.
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L'examen des dispositions en vigueur dans les pays étrangers retenus montre que le projet de loi portant création d'une couverture maladie universelle tend à placer la France parmi les pays offrant la meilleure protection contre la maladie à leurs habitants.