VII. LA SUÈDE

La Suède a reçu, en 2019, 21 958 demandes d'asile dont 902 provenant de mineurs isolés. Ce nombre est globalement stable depuis une dizaine d'années, à plus ou moins 5 000 demandes, sauf entre 2012 et 2015 261 ( * ) , année record où le nombre de demandes a atteint 162 877 dont 35 369 provenant de mineurs non accompagnés, et 2020, année où seules 12 991 demandes ont été présentées dont 500 de mineurs isolés. Cette année-là, 46 %des premières demandes examinées par l'Office des migrations pour les mineurs isolés, soit 255 sur 559, ont reçu un avis favorable.

La loi suédoise de 1994 sur l'accueil des demandeurs d'asile 262 ( * ) définit les mineurs isolés comme des enfants âgés de moins de 18 ans qui, à leur arrivée en Suède, sont séparés de leurs deux parents ou de tout autre adulte pouvant être considéré comme faisant office de figure parentale ou qui, après leur arrivée, se retrouvent sans représentant légal.

L'afflux de migrants en 2015 a conduit les autorités à resserrer les conditions d'admission sur le sol suédois. La loi sur les restrictions temporaires à la possibilité de recevoir un permis de séjour en Suède 263 ( * ) , adoptée en 2016 264 ( * ) , s'applique désormais en priorité par rapport à la loi sur les étrangers de 2005, lorsque les dispositions des deux lois s'opposent 265 ( * ) . En particulier, la loi de 2016 limite dans le temps les permis de séjour accordés au titre de l'asile, sauf mention contraire.

A. LES MODALITÉS ET CRITÈRES D'ÉVALUATION DE L'ÂGE D'UN ÉTRANGER SE DÉCLARANT MINEUR

1. L'examen du dossier opéré par l'Office des migrations

En Suède, l'Office des migrations (Migrationsverket) est en charge de l'examen des demandes d'asile. Son site internet précise qu'un mineur non accompagné qui demande l'asile doit rendre « probable » (sannolik) son identité, qui consiste en son nom, sa date de naissance et sa citoyenneté. Si son âge n'apparaît pas vraisemblable, alors l'Office informera la personne de la possibilité de recourir à une détermination médicale de l'âge 266 ( * ) .

Plus généralement, la charge de la preuve en matière d'identité repose en premier lieu sur les demandeurs d'asile, qui doivent fournir à l'appui de leurs dires des documents écrits (passeport valide, ou autre document d'identité officiel délivré par une autorité compétente du pays d'origine). En l'absence de tels documents, d'autres écrits ou des informations orales peuvent servir pour évaluer l'âge du demandeur. Dans ce cas, l'Office des migrations devra enquêter sur les éléments fournis, par exemple en interrogeant le demandeur d'asile, pour déterminer si son âge est « probable ». L'Office doit alors statuer sur deux questions :

- est-ce que l'âge est vraisemblable ou non ? Dans la négative, l'Office devra informer la personne migrante de la possibilité de réalisation d'une analyse médicale de l'âge ;

- et est-ce que la personne est mineure ou majeure ?

Lorsqu'un demandeur d'asile déclare qu'il est mineur mais qu'il n'a pas de papiers d'identité à l'appui, l'Office des migrations enregistre la demande comme « enfant non accompagné » ainsi que l'âge déclaré. Il peut toutefois, avant l'enregistrement, estimer, sur la base d'une brève conversation avec la personne concernée, que l'âge déclaré lui semble manifestement incorrect et choisir alors d'enregistrer la personne en tant qu'adulte, s'il est évident, sans le moindre doute possible, que le demandeur d'asile est majeur. Cette évaluation n'est pas figée, l'âge pouvant être modifié en cas de présentation de pièces d'identité ou de documents ou preuves autres permettant de fixer un âge.

2. L'évaluation médicale de l'âge

Si le demandeur n'est pas en mesure d'attester que son âge est « probable », une évaluation médicale de l'âge est proposée, qui repose sur le volontariat et requiert le consentement de la personne. Lorsque le demandeur donne son assentiment à une évaluation médicale de son âge, celle-ci est effectuée par la direction nationale de la médecine légale (rättsmedicinalverket) , qui travaille sur la base de deux examens conjoints 267 ( * ) 268 ( * ) :

- l'examen aux rayons X des dents de sagesse : une image de la mâchoire est réalisée, laquelle est soumise à deux dentistes qui, indépendamment l'un de l'autre, vont déterminer si selon eux, à la vue des images et sans autre information sur la personne, le développement des dents de sagesse a atteint le stade final. C'est le cas si les deux dentistes estiment, sans se concerter, qu'au moins une des dents de sagesse de la mâchoire inférieure a atteint la pleine maturité, avec des racines dentaires complètement fermées. Si les deux dentistes arrivent à une conclusion divergente, il est considéré que le développement n'est pas complet ;

- et l'examen par IRM de l'articulation du genou : une imagerie de la zone de croissance de la partie inférieure du fémur gauche est réalisée et présentée à deux radiologues qui l'étudient sans se concerter et sans autre information sur la personne. Le développement de l'articulation est considéré comme pleinement effectué si les deux radiologues considèrent que la zone de croissance étudiée a atteint un stade de pleine maturité.

À partir de ces estimations (qui ne donnent donc pas un âge mais un avis sur le fait que la pleine maturité développementale a été atteinte ou non), la direction de la médecine légale détermine un âge en fonction d'une matrice normée qui, à partir des étapes de développement des différentes parties du corps, donne une information standardisée quel que soit le médecin qui procède à l'évaluation ou l'endroit où elle se déroule. Cette évaluation n'est pas précisément chiffrée, elle vise plutôt, dans le cas des demandeurs d'asile, à estimer si la personne est majeure ou mineure. L'avis qui sera remis à l'autorité à l'origine de la demande, en l'occurrence l'Office des migrations, indique par conséquent que :

- le résultat de l'examen entrepris porte à croire que le demandeur a 18 ans ou plus ;

- le résultat de l'examen effectué ne permet aucune estimation concernant l'âge de la personne par rapport à la limite de 18 ans ;

- le résultat de l'examen effectué porte à croire que le demandeur a peut-être moins de 18 ans ;

- ou que le résultat de l'examen effectué porte à croire que le demandeur a moins de 18 ans.

3. La détermination de l'âge par l'Office des migrations

La détermination de l'âge s'appuie sur l'ensemble de toutes les pièces qui ont été apportées. C'est une détermination globale qui inclut autant les documents et informations fournies par le demandeur à l'appui de son identité que le résultat de l'évaluation médicale, s'il s'y est soumis. Sans évaluation médicale, la décision relative à l'âge du demandeur est alors prise sur la base des autres éléments et informations disponibles.

Dans tous les cas, cette première estimation de l'âge est considérée comme provisoire. Lors de l'examen, sur le fond, de la demande de séjour, une nouvelle estimation de l'âge sera opérée, qui remplacera la décision provisoire si, dans l'intervalle, des informations apparaissent qui contredisent l'évaluation initiale. Cette évaluation dans le cadre d'une décision relative à un permis de séjour peut faire l'objet d'un recours.

B. L'ACCUEIL ET LA PRISE EN CHARGE DES MINEURS ISOLÉS

De nombreux acteurs prennent part à la gestion des mineurs non accompagnés demandant l'asile en Suède 269 ( * ) :

- l'Office des migrations a pour mission de recevoir et d'examiner la demande d'asile, d'informer le demandeur de la possibilité de recourir à une évaluation médicale de l'âge, de rechercher des membres de la famille du demandeur, de gérer la question de l'aide financière, de faire en sorte que les mineurs déboutés de l'asile puissent retourner chez eux, de désigner la municipalité qui devra loger et prendre soin de l'enfant, de gérer les indemnités des communes et de déterminer chaque année la répartition communale pour l'accueil des demandeurs d'asile ;

- les préfectures, entre autres, exercent la surveillance des activités de tutelle ;

- les communes doivent examiner les besoins de l'enfant et déterminer les mesures et le logement dont il bénéficiera, nommer un curateur, veiller à ce que l'enfant soit scolarisé, gérer l'intégration et l'établissement de l'enfant en cas de demande acceptée ;

- les régions veillent à ce que les mineurs demandeurs d'asile reçoivent les mêmes soins médicaux, pédopsychiatriques et dentaires que les autres enfants vivant en Suède ;

- les services d'inspection sanitaire et sociale sont responsables de la surveillance notamment des services sociaux et de certaines procédures d'agrément ;

- et la direction nationale de la santé et des affaires sociales est chargée d'édicter des normes, des conseils généraux et des lignes directrices pour soutenir les services sociaux et les services de santé dans leur travail auprès des mineurs non accompagnés.

1. Cadre général de l'accueil des mineurs isolés

En Suède, les communes sont responsables de l'accueil des mineurs non accompagnés, en lien avec l'Office des migrations. Lorsqu'un demandeur d'asile mineur arrive en Suède, il bénéficie en premier lieu d'un logement temporaire dans la commune où il a pris contact pour la première fois avec les autorités suédoises, c'est-à-dire la municipalité d'arrivée (Ankomstkommun) 270 ( * ) , qui a donc la charge de l'enfant le temps que l'Office des migrations désigne une municipalité d'accueil qui aura à long terme la responsabilité du demandeur (Anvisningskommun) . Cette désignation doit intervenir dès que possible après que l'enfant a demandé l'asile. La répartition des mineurs isolés dans les différentes communes se fait à partir d'un modèle de calcul complexe qui comporte plusieurs facteurs (population, nombre de migrants accueillis, nombre de mineurs isolés accueillis etc.). Les calculs sont effectués chaque année en décembre pour prendre effet au 1 er janvier suivant. Depuis 2019, les communes d'un même comté peuvent se redistribuer leurs parts d'un commun accord. La municipalité désignée ne peut pas faire appel de cette décision 271 ( * ) .

a) L'accueil d'un mineur en Suède

La municipalité d'accueil désignée par l'Office des migrations doit :

- définir les besoins de l'enfant ;

- prendre les décisions s'agissant des mesures le concernant ;

- lui fournir un logement approprié ;

- et s'assurer que l'enfant bénéficie d'un enseignement scolaire.

Si un mineur étranger arrivé en Suède n'a ni parent ni adulte faisant office de parent à ses côtés, un curateur (god man ) est nommé, qui sera responsable de lui et gèrera ses affaires 272 ( * ) . Le curateur l'aidera également dans ses démarches et assistera aux entretiens ou examens médicaux que le mineur sera amené à passer. L'Office des migrations ou les services sociaux de la commune de résidence de l'enfant sont à l'origine de la demande.

S'agissant de la demande d'asile, elle est déposée par l'enfant lui-même. Avant toute chose, l'Office des migrations vérifie que c'est bien la Suède qui doit examiner cette demande. Dans cette hypothèse, l'Office des migrations étudiera les motifs de la demande lors d'une réunion comprenant, outre un membre du personnel de l'Office, le demandeur d'asile et son curateur 273 ( * ) . Lors de cet entretien, le mineur est invité à parler de sa vie avant le départ pour la Suède. L'Office, quant à lui, doit tenir compte dans son enquête de l'âge de la personne, de sa maturité et de son état psychique.

Lorsque la demande d'asile a été déposée, une carte, dite carte LMA (LMA-kort) 274 ( * ) est délivrée au mineur en présence de son curateur. Il ne s'agit pas d'un titre d'identité mais d'un document prouvant que le mineur est enregistré auprès de l'Office des migrations. Cette carte doit être présentée lors des relations avec les autorités et offre certaines réductions sur les frais de santé.

Hébergement

Les mineurs non accompagnés sont logés par la municipalité d'accueil lorsque leur demande a été déposée. Différents types de logements, qui ne sont pas nécessairement réservés aux demandeurs d'asile, existent selon les communes. D'après le site des « communes et régions de Suède » 275 ( * ) , il est courant que les municipalités fournissent des logements dans des « HVB » ( hem för vård eller boende) . Il s'agit d'une institution sociale de type foyer de placement offrant notamment des soins. Mais les demandeurs peuvent également être hébergés dans des familles d'accueil ou dans d'autres types de structures d'accueil (stödboende) . C'est la commune qui décide du logement qui convient pour le demandeur.

Aides financières

Les mineurs demandant l'asile ont droit, si nécessaire et sur demande, à une aide financière composée de deux éléments : une indemnité journalière et une allocation spéciale 276 ( * ) . Pour les mineurs de moins de 16 ans, la demande est obligatoirement introduite par le curateur. Les enfants de 16 ans et plus sont autorisés à introduire la demande eux-mêmes ; ils peuvent toutefois choisir de passer par leur curateur.

L'indemnité journalière vise à couvrir les frais de vêtements et de chaussures, les activités de loisirs, les articles d'hygiène, ainsi que les frais de santé, de soins dentaires et de médicaments. Elle s'élève à 61 couronnes suédoises (SEK) soit environ six euros, ou 71 SEK (sept euros) par jour, pour un enfant qui vit seul ou avec des proches et doit subvenir lui-même à son alimentation 277 ( * ) . Dans l'hypothèse où le mineur est hébergé dans un foyer dans lequel la municipalité intervient pour lui fournir nourriture, les soins et certains loisirs, son indemnité journalière sera réduite à 24 SEK (2,4 euros) visant à subvenir à ses besoins en vêtements et chaussures, médicaments ou articles d'hygiène. Enfin, si le mineur perçoit déjà une compensation de la part de la commune, l'Office ne pourra pas lui accorder d'indemnité journalière pour les mêmes frais.

L'allocation spéciale couvre les besoins urgents pour les dépenses qui ne rentrent pas dans l'allocation journalière. Cela ne vaut que pour des besoins importants, à l'instar de lunettes de vue, de vêtements chauds pour l'hiver, d'équipements pour personnes handicapées ou pour bébés. L'Office n'accorde pas d'allocation spéciale si la commune apporte déjà une aide financière pour le besoin en question 278 ( * ) .

Un compte bancaire et une carte associée sont ouverts pour le compte du demandeur auprès de la banque ICA. Cette carte est reçue par le curateur, qui gère également les avoirs détenus sur le compte et qui détermine qui est autorisé à utiliser le moyen de paiement. Un enfant âgé de 16 ans et plus, dans le cas où son curateur n'a pas encore été désigné, peut recevoir directement la carte. Le compte lié à la carte est celui sur lequel les prestations seront versées.

Éducation

Tous les enfants demandeurs d'asile en Suède ont le droit d'être scolarisés et la commune d'accueil doit leur offrir la possibilité d'aller à l'école au même titre que n'importe quel enfant vivant en Suède ; ils ne sont toutefois pas concernés par l'obligation scolaire. Des programmes de mise à niveau (introduktionsprogrammen) , dispensés à temps plein doivent permettre aux élèves n'ayant pas les compétences requises soit de pouvoir ensuite rejoindre le cursus scolaire classique, soit de pouvoir obtenir les acquis pour entrer dans le monde professionnel 279 ( * ) . À côté de cela, une formation en langue suédoise doit permettre aux nouveaux arrivants de pouvoir ensuite suivre les enseignements scolaires ou une formation en suédois.

b) Le cas d'un mineur qui atteint 18 ans avant le rendu de la décision d'asile

Lorsqu'un demandeur d'asile atteint la majorité, il perd les droits qui lui étaient donnés en tant que mineur isolé, et voit sa demande examinée comme celle d'un adulte.

Avant la date anniversaire, ou si l'Office des migrations décide de modifier l'âge dans le dossier, le demandeur est convoqué à un entretien au cours duquel lui seront expliquées les modifications sur le point d'intervenir.

Tout d'abord, la mission du curateur prend fin avec la majorité du demandeur. Ce dernier est donc réputé pouvoir gérer lui-même les relations avec les autorités. Il devient également responsable de la gestion de son argent.

Ensuite, s'agissant de l'hébergement, la municipalité d'accueil peut demander à ce que l'Office des migrations prenne en charge le logement du demandeur, puisqu'elle a la responsabilité d'organiser le logement temporaire des demandeurs adultes qui en ont besoin. Dans cette hypothèse, le demandeur ne pourra pas choisir son lieu d'hébergement, la décision sera prise en fonction des logements vacants de l'Office, même si, en général, cette dernière essaie dans la mesure du possible que ce soit proche du précédent lieu d'habitation. En matière d'hébergement, le demandeur adulte peut aussi choisir d'être responsable de son logement, soit en s'installant chez des proches, soit en louant une habitation.

S'agissant des soins médicaux et dentaires, les demandeurs d'asile mineurs ont droit à plus de prestations que ceux qui sont majeurs, qui ne peuvent bénéficier gratuitement que de soins médicaux et dentaires urgents, ne pouvant attendre. Les demandeurs d'asile majeurs paient les consultations médicales et les médicaments, ils peuvent toutefois bénéficier d'une réduction sur présentation de la carte LMA.

L'aide financière, si elle est nécessaire, continue d'être versée jusqu'au rendu de la décision. Si le demandeur décide de louer sa propre habitation, il peut demander à bénéficier d'une allocation logement. Les mineurs isolés bénéficient du même montant d'aide que les adultes.

Les demandeurs d'asile peuvent continuer leur scolarité à leur majorité, y compris s'ils sont amenés à déménager dans un logement de l'Office dans une autre commune 280 ( * ) .

2. La prise en charge en cas de décision positive en matière d'asile
a) Les conséquences de l'obtention d'un titre

Lorsqu'un demandeur d'asile mineur a reçu une décision positive de permis de séjour, l'Office l'en informe ainsi que sa municipalité d'accueil. Lors de la réception de la carte de séjour, qui prouve la décision positive, le mineur et son curateur doivent contacter l'administration fiscale pour que le mineur soit inscrit au registre de la population.

Depuis l'entrée en vigueur de la loi de 2016 précitée, les permis de séjour accordés au titre de l'asile sont temporaires. Les mineurs non accompagnés peuvent bénéficier de permis avec deux statuts différents : soit celui de bénéficiaire de la protection subsidiaire (alternativt skyddsbehövande) , d'une durée, dans la plupart des cas, de 13 mois, soit celui de réfugié (flykting) , généralement d'une durée de trois ans.

Lorsque le statut est accordé, l'enfant sort du système d'accueil, il ne peut plus prétendre ni aux aides financières (indemnité journalière et allocation spéciale) ni à la carte et au compte bancaire spécifique qui étaient liés à ces aides. Son dossier à l'Office étant clos avec la décision positive, la responsabilité et la prise en charge de l'enfant reviennent alors à la municipalité.

Les services sociaux de la commune doivent ensuite former une demande, ou notifier le besoin, d'un tuteur auprès du tribunal de première instance. Ce tuteur remplace le curateur qui accompagnait l'enfant pendant la période d'instruction du dossier.

Enfin, les logements communaux à destination des mineurs étrangers isolés en attente de détermination de leur statut s'adressent également à ceux ayant reçu une autorisation de séjour 281 ( * ) .

b) La possibilité de regroupement familial

Quand un mineur obtient l'asile en Suède, ses parents et frères et soeurs peuvent demander à le rejoindre. Pour pouvoir prétendre au regroupement familial, l'enfant doit :

- ne pas être marié et avoir moins de 18 ans, au moins au moment de la demande de protection si la demande de regroupement familial est déposée moins de trois mois après l'octroi de la protection ;

- être venu en Suède sans parent ni adulte faisant office de parent ou avoir été laissé seul après l'arrivée ;

- avoir reçu un permis de séjour en Suède au titre de l'asile ;

- ne pas être devenu citoyen suédois.

Les parents, lorsque leur demande aboutit, reçoivent un titre de séjour de la même durée que celui de leur enfant. Lorsque la demande est rejetée, les parents ont la possibilité de faire appel dans les trois semaines suivant le rendu de la décision. S'agissant de la fratrie, leurs liens sont examinés en premier lieu avec les parents, si ceux-ci obtiennent effectivement un titre de séjour.

Si la recherche des parents est un élément de la politique migratoire suédoise, cela n'implique pas pour autant un droit à venir en Suède, l'idée première étant de voir dans quelle mesure il est possible que l'enfant retrouve sa famille dans son pays d'origine ou dans un autre pays dans lequel les parents sont en sécurité. Ce n'est que dans un troisième temps, si les deux premières possibilités sont exclues, que le regroupement pourra être effectué en Suède. Cela ne vaut cependant que si l'enfant avait des motifs propres de demander l'asile.

3. Les conséquences d'une demande d'asile refusée

En cas de rejet de la demande d'asile, le mineur et son curateur sont convoqués à l'Office des migrations pour un entretien, au cours duquel il sera expliqué les raisons du rejet 282 ( * ) . Ensuite, le mineur, en accord avec son curateur et, le cas échéant, son avocat, pourra décider de faire appel de la décision, dans un délai maximal de trois semaines suivant la réception de la décision.

a) La possibilité de faire appel

En cas d'appel, la première étape consistera à l'envoyer à l'Office des migrations, qui regardera s'il a des raisons de reconsidérer sa décision. Dans le cas contraire, il transmettra la requête au tribunal des migrations (migrationsdomstol) . Celui-ci entend l'affaire et statue ensuite sur la décision de l'Office, soit en la confirmant, soit en la modifiant.

En cas de confirmation de la décision de l'office, et donc de rejet de l'appel, un nouvel appel peut être interjeté devant la cour d'appel des migrations (migrationsöverdomstol) , sur autorisation, car celle-ci n'examine que les affaires qui revêtent une importance particulière et qui peuvent ensuite faire jurisprudence pour l'Office et les tribunaux des migrations.

b) En cas de rejet définitif

Si la décision de l'Office est confirmée et qu'il n'y a plus de possibilité de recours, elle acquiert alors l'autorité de la chose jugée. Le mineur doit ainsi quitter la Suède dans le délai spécifié dans la décision, qui est en général de deux à quatre semaines. Si le mineur devient majeur après le rendu de la décision définitive, il perd ses droits à assistance (indemnité journalière, allocation spéciale, hébergement par l'office des migrations notamment).

Dans l'hypothèse où, après le rendu de la décision de rejet, de nouveaux évènements apparaissent, tels que des changements dans la situation politique du pays d'origine ou un évènement qui arriverait à la personne en Suède (par exemple le diagnostic d'une maladie grave ne pouvant pas être prise en charge dans le pays d'origine), l'Office peut examiner la nouvelle information et déterminer s'il existe des obstacles à l'application de la décision de rejet. Des inquiétudes concernant le voyage de retour ou des problèmes sociaux ou économiques dans le pays d'origine ne sont pas des évènements suffisants pour que l'Office reconsidère sa décision.

Lors de l'examen des nouvelles informations, l'Office peut décider d'annuler le voyage retour. La décision initiale peut également être bloquée s'il existe des obstacles pour entreprendre le voyage retour. Cela ne signifie pas que l'Office revient sur sa décision de rejet mais que cette dernière ne peut être exécutée dans l'immédiat ; la préparation du retour se poursuit toutefois.

c) La politique de retour

La préparation au voyage de retour commence dès que l'enfant a reçu une décision définitive de rejet et que les recours sont épuisés. Entre le moment où la décision est rendue et celui où l'enfant quitte la Suède, le mineur a toujours droit à la poursuite de sa scolarité et aux soins médicaux.

L'Office convoque le mineur et son curateur à des réunions sur la façon dont le retour devrait avoir lieu, celui-ci devant être organisé en toute sécurité, l'enfant étant accompagné lors du voyage et remis à quelqu'un à l'arrivée. L'Office ne s'occupe que du retour volontaire des mineurs. Si ceux-ci ne se présentent pas à l'entretien, refusent de rentrer dans leur pays ou disparaissent en Suède, leur dossier (et la gestion de leur retour) est transmis à la police.

Lorsqu'une décision de reconduite à la frontière ou d'expulsion est prise à l'encontre d'un mineur, l'Office peut décider de garder le mineur sous surveillance, voire de le placer dans un centre fermé (förvar) . Si l'Office pense que la surveillance ne sera pas suffisante face au risque de disparition du mineur et qu'il est évident que le mineur ne coopèrera pas pour quitter la Suède, le placement sous surveillance, ou dans un centre fermé peut également être décidé à l'encontre d'un mineur qui a reçu, ou qui recevra probablement, une décision de reconduite à la frontière immédiate. Le séjour en centre fermé est limité à 72 heures, renouvelable une fois s'il existe des raisons spéciales pour cela, mais jamais au-delà.

C. LE FINANCEMENT DE LA PRISE EN CHARGE DES MINEURS ISOLÉS

Le financement de l'accueil des mineurs isolés en Suède est principalement assuré par l'Office des migrations. En effet, si de nombreuses dépenses sont assumées par les communes et acteurs locaux, ceux-ci peuvent prétendre à des aides accordées par l'État, via l'Office des migrations, pour les dédommager. Le budget de l'Office, y compris ses frais de fonctionnement, est inscrit aux programmes 8 (migration) et 13 (égalité des genres et installation des nouveaux immigrés) du budget de l'État suédois. Le budget prévisionnel total de l'Office 283 ( * ) , en 2019, s'est élevé à environ 24 milliards SEK (2,36 milliards d'euros) pour une dépense réalisée, la même année, de 22,1 milliards SEK (2,18 milliards d'euros).

Pour compenser les frais engagés au titre de l'asile, l'Office des migrations a ainsi versé plus de 15,2 milliards SEK (1,5 milliard d'euros) en 2019 aux municipalités et aux régions 284 ( * ) , ce montant était de 25,5 milliards SEK en 2018 (2,52 milliards d'euros) et de plus de 42,3 milliards SEK en 2017 (4,18 milliards d'euros) 285 ( * ) .

Selon les termes du règlement sur la compensation de l'État pour les demandeurs d'asile 286 ( * ) , à titre d'exemple, une commune qui est municipalité d'arrivée pour un mineur isolé peut recevoir une aide de 3 000 SEK par enfant et par jour (environ 297 euros) le temps que l'Office statue sur la municipalité d'accueil du demandeur.

Les municipalités reçoivent chaque année une rémunération fixe et variable pour leur permettre de préparer l'accueil des mineurs isolés. S'agissant de la rémunération fixe, toutes les communes reçoivent 500 000 SEK (49 444 euros). Cette part est augmentée d'une somme variable calculée en fonction de l'évaluation du nombre de mineurs qui devrait demander l'asile et de la part de la commune en termes de places d'accueil. Par ailleurs, une commune d'accueil reçoit un montant de 52 000 SEK (5 142 euros) par enfant affecté dans la municipalité pour couvrir les frais d'enquête ou encore le curateur. Une somme de 1 350 SEK par enfant et par jour (133,5 euros) est également versée à la municipalité au titre des frais liés à l'accueil. Les municipalités peuvent aussi demander la prise en charge d'autres frais, à l'instar de dépenses exceptionnelles qu'elles pourraient être amenées à engager, si ceux-ci n'ont pas pu être planifiés ni envisagés par la municipalité et qu'ils ne sont pas couverts par d'autres compensations.


* 261 Pour les statistiques des dernières années, on s'est rapporté à celles publiées sur le site de l'Office suédois des migrations

https://www.migrationsverket.se/Om-Migrationsverket/Statistik/Asyl.html

* 262 https://www.riksdagen.se/sv/dokument-lagar/dokument/svensk-forfattningssamling/lag-1994137-om-mottagande-av-asylsokande-mfl_sfs-1994-137

* 263 https://www.riksdagen.se/sv/dokument-lagar/dokument/svensk-forfattningssamling/lag-2016752-om-tillfalliga-begransningar-av_sfs-2016-752

* 264 Loi temporaire initialement en vigueur jusqu'au 19 juillet 2019, son application a été prolongée jusqu'au 20 juillet 2021.

https://www.riksdagen.se/sv/dokument-lagar/arende/betankande/forlangning-av-lagen-om-tillfalliga-begransningar_H601SfU26

* 265 https://www.riksdagen.se/sv/dokument-lagar/dokument/svensk-forfattningssamling/utlanningslag-2005716_sfs-2005-716

* 266 https://www.migrationsverket.se/Andra-aktorer/Gode-man/Asylprocessen/Aldersbedomning.html

* 267 https://www.rmv.se/verksamheter/medicinska-aldersbedomningar/metoder/

* 268 Si l'un des examens est impossible (par exemple s'il n'y a pas de dents de sagesse ou encore si le demandeur ne peut subir d'IRM du fait d'une grossesse ou de la présence de fragments métalliques), alors l'estimation médicale de l'âge sera basée uniquement sur celui qui a pu être réalisé.

* 269 https://www.migrationsverket.se/Andra-aktorer/Gode-man/Olika-myndigheters-ansvar.html

* 270 Toutes les communes suédoises peuvent théoriquement devenir une municipalité d'arrivée, même si dans les faits il est plus fréquent que les demandeurs choisissent une municipalité qui contient une antenne de l'office des migrations. La commune choisit elle-même le type de logement qui sera octroyé au demandeur.

* 271 https://www.migrationsverket.se/download/18.748d859516793fb65f915e/1607603477562/Migrationsverkets%20anvisningsmodell%20f%C3%B6r%20ensamkommande%20barn.pdf

* 272 https://www.riksdagen.se/sv/dokument-lagar/dokument/svensk-forfattningssamling/lag-2005429-om-god-man-for-ensamkommande-barn_sfs-2005-429

* 273 Éventuellement, un avocat peut aussi participer.

* 274 LMA signifie « lagen om mottagande av asylsökande », c'est-à-dire « loi sur l'accueil des demandeurs d'asile ».

* 275 https://skr.se/integrationsocialomsorg/asylochflyktingmottagandeintegration/boendebosattning.7088.html

* 276 Pour les mineurs non accompagnés, les montants des aides financières sont les mêmes que pour un adulte.

* 277 Le montant de 61 SEK sera retenu si plusieurs personnes partagent les frais au sein d'un même logement.

* 278 Une particularité existe s'agissant des frais optiques, les régions offrant une subvention pouvant atteindre 800 SEK (79,5 euros) pour les demandeurs d'asiles âgés de 8 à 19 ans. L'Office des migrations pourra intervenir sur le reste à charge.

* 279 https://www.skolverket.se/skolutveckling/leda-och-organisera-skolan/nyanlanda-barn-och-elevers-utbildning/ensamkommandes-utbildning

* 280 Il existe en Suède un permis de séjour spécifique que peuvent demander les candidats déboutés du droit d'asile ayant eu 18 ans et souhaitent continuer leurs études secondaires .

* 281 https://lidkoping.se/stod-och-omsorg/integration-och-flykting/

* 282 https://www.migrationsverket.se/Andra-aktorer/Gode-man/Om-barnet-far-avslag.html

* 283 https://www.migrationsverket.se/download/18.2b2a286016dabb81a186962/1582201496682/%C3%85rsredovisning%202019.pdf

* 284 Il s'agit d'un montant global pour tous les demandeurs d'asile, sans distinction qu'ils soient majeurs ou mineurs.

* 285 https://www.migrationsverket.se/Andra-aktorer/Kommuner/Statlig-ersattning.html , et https://www.migrationsverket.se/download/18.2b2a286016dabb81a186962/1582201496682/%C3%85rsredovisning%202019.pdf page 84

* 286 https://www.riksdagen.se/sv/dokument-lagar/dokument/svensk-forfattningssamling/forordning-2017193-om-statlig-ersattning-for_sfs-2017-193

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