BELGIQUE
I. POLITIQUE DE L'IMMIGRATION LÉGALE
Les flux migratoires en direction de la Belgique ont doublé entre 1983 et 2004. Ils ont atteint 109 000 personnes en 2007.
Le nombre d'étrangers présents sur le territoire était de 971 448 au 31 décembre 2007, soit 9,11 % de la population totale. 68 % d'entre eux étaient des citoyens européens (Français, 13 %, Néerlandais, 12 % et Polonais, 10 %) 2 ( * ) .
Entre 1985 et 2007, 707 109 étrangers sont devenus belges dont 36 063 personnes en 2007.
En dépit de la réforme du droit d'asile opérée en 2006 et de nouvelles modifications apportées en 2009, le nombre de demandeurs d'asile ne cesse d'augmenter. Le réseau d'accueil des demandeurs d'asile est saturé. 12 252 demandes d'asile ont été déposées en 2008.
1. Orientations générales
La politique de l'immigration légale est régie par la loi du 15 décembre 1980 sur l'accès au territoire, le séjour, l'établissement et l'éloignement des étrangers, modifiée à de nombreuses reprises, ainsi que par son arrêté d'application du 8 août 1980.
Depuis 1974, le droit à un séjour de plus de trois mois est principalement accordé au titre du mariage et du regroupement familial, du statut d'étudiant étranger et du statut de réfugié.
Le régime de l'emploi des immigrés résulte de la loi du 30 avril 1999 relative à l'occupation des travailleurs étrangers et d'un arrêté royal d'application du 9 juin 1999, plusieurs fois modifié.
La politique de l'immigration a fait l'objet de plusieurs inflexions qui concernent le regroupement familial, les naturalisations et l'intégration des étrangers. En outre, la Belgique a procédé à deux vagues de régularisations, en 1999 et en 2009.
• Le regroupement familial
Plus de la moitié des visas délivrés le sont au titre du regroupement familial dont le régime a été rendu plus rigoureux par une loi du 15 septembre 2006 et par des arrêtés royaux de 2007 pour les étrangers n'appartenant pas à l'Union européenne qui disposent d'un titre de séjour permanent et n'ont pas le statut de réfugié.
La loi exige notamment que les deux membres du couple soient âgés d'au moins 21 ans et cohabitent depuis au moins un an lorsqu'ils ne sont pas mariés, et que le demandeur :
- dispose d'un logement approprié ;
- bénéficie d'une assurance maladie qui couvre aussi sa famille ;
- perçoive des revenus suffisants pour subvenir aux besoins de ses proches. Les communes sont chargées de délivrer une attestation relative au caractère suffisant du logement compte tenu de la réglementation régionale.
Les dispositions relatives à la condition de logement figurant dans l'arrêté royal du 27 avril 2007 ont été difficiles à mettre en oeuvre compte tenu du degré élevé d'exigence qui résulte des normes régionales relatives au logement. Elles ont, du reste, été annulées par le Conseil d'État le 26 février 2010.
L'accord gouvernemental du 18 mars 2008 et la déclaration de politique générale du gouvernement du 13 octobre 2009 font également mention d'une condition de revenus. Un accord conclu au sein du Comité interministériel en octobre 2009 prévoit que le demandeur du regroupement familial doit disposer d'un revenu équivalent au revenu d'intégration d'un célibataire ayant une personne à charge.
S'agissant de la preuve du lien familial, la loi prévoit qu'à défaut de pouvoir le prouver par des documents officiels, « il est tenu compte d'autres preuves valables ». Une loi du 8 mars 2009 est venue compléter cette disposition en précisant qu'« à défaut, le ministre ou son délégué peut procéder ou faire procéder à des entretiens (...) ou à toute enquête jugée nécessaire, et proposer, le cas échéant, une analyse complémentaire ». Une circulaire du 17 juin 2009 a enfin indiqué que la preuve de filiation peut être apportée au moyen de tests ADN.
• La naturalisation
Le code de la nationalité entré en vigueur en 1985 a été modifié à plusieurs reprises afin de faciliter l'acquisition de la nationalité belge. En 2000 notamment, la procédure a été simplifiée accélérée et rendue gratuite, ce qui a permis plusieurs milliers de naturalisations.
• La politique
d'intégration
L'accueil et l'intégration des arrivants relèvent de la compétence des régions et de celle des communautés.
Dans la communauté francophone, le décret du 13 mai 2004 relatif à la cohésion sociale prévoit la mise en oeuvre de mesures qui ne sont pas spécifiquement destinées aux étrangers mais qui visent notamment à « la lutte contre toute forme de discrimination et d'exclusion sociale par le développement de politiques d'intégration sociale, d'interculturalité, de diversité socioculturelle et de cohabitation des différentes communautés locales ». Ces mesures, différentes d'une commune à l'autre, figurent dans des contrats communaux de cohésion sociale d'une durée maximale de cinq ans conclus entre les communes et le collège de la Commission communautaire française. Ce collège subventionne le Centre régional pour le développement de l'alphabétisation et l'apprentissage du français pour adultes.
Depuis 1999, l'intégration des immigrants constitue l'une des priorités du gouvernement flamand. Le décret sur l'intégration civique du 23 février 2003, entré en vigueur le 1 er avril 2004, en a précisé les modalités. Cette politique, qui crée des obligations à la fois pour le gouvernement flamand et pour les immigrants, vise à proposer aux nouveaux arrivants, ainsi qu'à tout Belge majeur né hors de Belgique, si au moins un de ses parents est aussi né à l'étranger, et à tout étranger majeur ayant un titre de séjour de longue durée, de suivre un parcours « sur mesure » d'intégration civique. Certains étrangers ont l'obligation de suivre cette formation, notamment les personnes indemnisées au titre du chômage, les locataires d'un logement social et les responsables d'un des cultes reconnus. Cette formation peut être composée :
- de cours de néerlandais pouvant aller jusqu'à 600 heures pour les analphabètes ;
- de cours d'orientation sociale (environ 60 heures dans la langue de l'immigrant) qui ont pour objet de présenter le fonctionnement et l'organisation de la société belge et de permettre l'acquisition de connaissances relatives à la vie pratique ;
- d'une offre d'orientation professionnelle destinée à aider l'immigrant à déterminer un projet professionnel.
• La régularisation de
2009
Après la régularisation de 42 000 clandestins en 1999, la Belgique a procédé à une nouvelle régularisation estimée à 25 000 immigrants entre le 15 septembre et le 15 décembre 2009.
L'instruction du 19 juillet 2009 a en effet permis de régulariser les étrangers « sans papiers » :
- pouvant prouver 5 ans de présence sur le territoire avant le 18 mars 2008 s'ils ont fait une tentative de régularisation de leur séjour et disposant de connaissances linguistiques et de liens sociaux avec la Belgique outre des compétences professionnelles utilisables sur le marché du travail ;
- présents sur le territoire depuis le 31 mars 2007 et détenant au moins une offre de contrat de travail leur garantissant un salaire minimum.
Elle laisse ouverte la possibilité de régulariser les étrangers engagés dans des procédures « déraisonnablement longues » (par exemple trois ans pour une procédure d'asile concernant une famille avec enfants scolarisés et quatre ans pour une famille sans enfant).
Cette instruction a été annulée par le Conseil d'État le 11 décembre 2009 à la requête du Vlaams Belang au motif que les dispositions adoptées relevaient de la compétence du législateur. Le ministre compétent et l'Office des étrangers se sont cependant engagés à continuer d'appliquer les critères de l'instruction aux demandes de régularisation dans le cadre de leur pouvoir discrétionnaire.
2. Les développements récents
Dans sa déclaration gouvernementale du 25 novembre 2009, le Premier ministre Yves Leterme a indiqué que le gouvernement entendait soumettre au Parlement des projets de loi en vue de réformer le code de la nationalité, le régime du regroupement familial et de lutter contre les mariages de complaisance.
Il a également manifesté sa « volonté de poursuivre la mise en oeuvre de l'accord de gouvernement de 2008 et de la déclaration de politique générale du 13 octobre 2009 ». L'accord gouvernemental du 18 mars 2008 qui pose les bases de la politique applicable de 2008 à 2011 prévoit en effet que :
- le gouvernement introduira « à court terme la possibilité d'une immigration économique, en tenant compte des réserves actuelles sur le marché du travail et de l'effet de la suppression imminente des restrictions à la libre circulation des travailleurs des nouveaux pays membres de l'Union européenne » ;
- « le gouvernement mènera une politique de retour et d'éloignement effective à l'égard des étrangers qui n'ont pas obtenu de permis de séjour. Il donnera la priorité au retour ou à l'éloignement volontaire et autonome [...] dans le cadre de programmes d'accompagnement au retour volontaire » ;
- « l'acquisition de la nationalité belge par naturalisation sera également subordonnée à des conditions de droit de séjour d'une durée indéterminée, de séjour légal préalable et ininterrompu de cinq ans et de preuve d'une volonté d'intégration, ce qui peut entre autres être prouvé par une attestation de l'autorité locale ou d'un service agrée ».
La déclaration du gouvernement relative à sa politique générale du 13 octobre 2009 indique enfin que celui-ci envisage d'instaurer la déchéance de la nationalité belge en cas de condamnation pour certains crimes graves.
* 2 Cf. Le rapport de 2009 publié par la Direction générale Emploi et marché du travail : L'immigration en Belgique : effectifs, mouvements et marché du travail.