NOTE DE SYNTHESE
En
France, le référendum d'initiative populaire, c'est-à-dire
le référendum organisé à l'initiative d'une
fraction du corps électoral, n'est pas prévu par la Constitution.
En effet, celle-ci attribue l'initiative du référendum au
président de la République, que le référendum ait
lieu dans le cadre de l'article 11 ou dans celui de l'article 89.
Dans le premier cas, c'est le président de la République, sur
proposition conjointe des deux assemblées ou, pendant la durée
des sessions, sur proposition du gouvernement, qui peut décider de
soumettre à référendum «
tout projet de loi
portant
sur
l'organisation des pouvoirs publics, sur des
réformes relatives à la politique économique
ou
sociale de la Nation et aux services publics qui y concourent, ou qui tendent
à
autoriser
la ratification d'un traité qui,
sans être contraire à la Constitution, aurait des incidences sur
le fonctionnement des institutions
».
Dans le second, le référendum constitue en principe
l'aboutissement de la révision constitutionnelle, après qu'elle a
été approuvée par les deux assemblées en termes
identiques. Toutefois, lorsque la révision a pour origine une initiative
de l'exécutif, le président de la République peut
décider de ne pas la soumettre à référendum, mais
au Parlement réuni en Congrès.
Le référendum prévu par la Constitution
française est donc un référendum normatif, puisqu'il
permet l'adoption d'un texte, législatif ou constitutionnel.
Cependant, dans d'autres pays, le référendum, notamment lorsqu'il
est organisé à la demande d'une fraction du corps
électoral, peut également être
abrogatif
ou
consultatif
. Le premier vise à abroger des textes
déjà en vigueur, tandis que le second est organisé pour
connaître l'opinion des électeurs, mais n'a aucune valeur
contraignante.
La présente étude analyse les dispositions nationales relatives
au référendum d'initiative populaire en
Italie
et en
Suisse,
seuls pays européens où il existe. En effet, en
Autriche et au Portugal, si le mécanisme de l'initiative populaire
permet à une fraction du corps électoral de saisir le Parlement
fédéral d'une proposition, il n'entraîne pas
nécessairement l'organisation d'un référendum
(1(
*
))
.
L'étude examine également l'exemple californien,
la
Californie
étant l'État américain qui recourt le plus
souvent au référendum.
L'analyse des dispositions italiennes, suisses et californiennes montre
que :
- dans les trois cas, le référendum d'initiative
populaire donne aux électeurs un droit de veto sur certains textes que
le Parlement vient d'adopter ;
- en Italie, les lois en vigueur peuvent être abrogées par un
référendum d'initiative populaire ;
- en Suisse et en Californie, une fraction du corps électoral peut,
par référendum, demander l'adoption de textes législatifs.
1) En Italie, en Suisse et en Californie, le référendum
d'initiative populaire donne aux électeurs un droit de veto sur certains
textes que le Parlement vient d'adopter
Après leur adoption et avant leur entrée en vigueur, certains
textes peuvent être soumis à référendum à la
demande d'une partie du corps électoral.
La demande de
référendum a un
effet suspensif
: l'entrée en
vigueur de la norme attaquée est subordonnée au résultat
du vote.
Le
délai référendaire
est exprimé de
façon légèrement différente, à la fois en
terme de longueur et de point de départ, mais il est dans les trois cas
de l'ordre de
trois
mois
.
Cette procédure, qui subordonne l'entrée en vigueur de la norme
contestée à l'approbation de la
majorité des
électeurs
, s'applique :
-
à presque toutes les lois en Californie
;
-
à toutes les lois fédérales et aux
arrêtés fédéraux les plus importants en
Suisse
;
-
aux lois constitutionnelles en Italie, dans la mesure où elles
n'ont pas recueilli la majorité des deux tiers des membres de chaque
assemblée lors de la seconde délibération.
La procédure est mise en oeuvre à la demande de
500 000
électeurs en Italie, de 50 000 électeurs
en Suisse,
et d'un nombre d'électeurs égal à 5 % des personnes
ayant participé à la dernière élection du
gouverneur en Californie
, ce qui représente environ 400 000
électeurs.
Pour empêcher ce dispositif de paralyser le législateur, ce
dernier peut, en Suisse et en Californie, qualifier une loi d'urgente. En
Suisse, l'urgence annule l'effet suspensif de la demande de
référendum et permet à la norme attaquée d'entrer
immédiatement en vigueur, tandis que, en Californie, elle la soustrait
définitivement au champ du référendum. De plus, la
Constitution californienne exclut qu'une demande de référendum
puisse être présentée contre certaines lois, en particulier
contre les lois fiscales ou budgétaires.
2) En Italie, les lois en vigueur peuvent être abrogées par un
référendum d'initiative populaire
Presque toutes les normes de rang législatif peuvent, à la
demande de 500 000 électeurs
, être soumises à
référendum en vue de leur abrogation, la demande d'abrogation
portant sur tout ou partie de la norme contestée.
Cependant,
certains textes ne peuvent pas faire l'objet d'un
référendum abrogatif
. La
Constitution
l'exclut pour
les lois fiscales et budgétaires, pour les lois d'amnistie et de remise
de peine, ainsi que pour les lois autorisant la ratification de traités
internationaux. En outre,
la Cour constitutionnelle, qui contrôle la
recevabilité des demandes de référendum
abrogatif
, a peu à peu élaboré un ensemble de
règles encadrant l'utilisation de ce dispositif. Elle a ainsi soustrait
à son champ d'application les normes de rang supérieur à
la loi ordinaire. Elle rejette également les demandes de
référendum lorsque l'abrogation demandée risque
d'altérer l'équilibre institutionnel.
Pour que la norme contestée soit abrogée, il faut, d'une part,
que la majorité des votants approuve la proposition et, d'autre part,
que la participation électorale atteigne 50 %.
3) En Suisse et en Californie, une fraction du corps électoral peut,
par référendum, demander l'adoption de certains textes
législatifs
En Californie, les initiatives populaires, qui peuvent avoir pour objet une
révision de la Constitution ou l'adoption d'une loi ordinaire, sont
soumises à référendum en dehors de toute
intervention du Parlement
.
Selon qu'elle porte sur une matière constitutionnelle ou
législative, une telle initiative doit être
présentée par un nombre minimal d'électeurs égal
à 8 % ou à 5 % des personnes ayant participé à
la dernière élection du gouverneur.
Le dépôt de l'initiative populaire entraîne automatiquement
l'organisation d'un référendum, à l'issue duquel la norme
proposée peut être définitivement adoptée. Si le
Parlement conserve la possibilité de la modifier ou de l'abroger, la loi
alors adoptée par le Parlement doit, à son tour, être
validée par référendum.
En Suisse, au niveau fédéral, l'initiative populaire doit
être présentée par 100 000 électeurs. Elle ne
peut être mise en
oeuvre qu'en matière
constitutionnelle
.
Sauf dans le cas exceptionnel où elle porte sur une révision
totale de la Constitution, l'initiative n'est pas directement soumise aux
électeurs, mais elle est d'abord examinée par le Parlement
fédéral.
Lorsque l'initiative est rédigée, c'est-à-dire susceptible
d'être insérée telle quelle dans la Constitution, le
Parlement fédéral peut présenter une contre-proposition.
Le référendum porte donc soit sur le texte de l'initiative, soit
à la fois sur ce texte et sur la contre-proposition.
En revanche, lorsque l'initiative est présentée sous forme de
principes généraux et que le Parlement fédéral ne
l'approuve pas, un premier référendum, portant sur
l'opportunité de la révision, doit être organisé.
Ensuite, si la majorité des votants approuve le principe de la
révision, le Parlement fédéral doit élaborer une
proposition de révision constitutionnelle, elle-même soumise
à référendum. Lorsque le Parlement fédéral
approuve une demande présentée en termes généraux,
il élabore directement une proposition de révision
constitutionnelle, également soumise à référendum.
Les propositions de révision constitutionnelle, qu'elles
résultent d'une demande rédigée ou qu'elles aient
été élaborées par le Parlement
fédéral, doivent être approuvées à la double
majorité des votants et des cantons.
*
* *
Aux trois exemples étudiés, il convient d'ajouter celui de la Belgique , qui ignore actuellement le référendum au niveau fédéral, mais qui étudie la possibilité d'instaurer le référendum consultatif d'initiative populaire.