BELGIQUE
La
loi organique du 18 juillet 1991 relative au contrôle des services
de police et de renseignement
a créé un comité
permanent de contrôle des services de renseignement et de
sécurité, le
comité R
(4(
*
))
. Ses membres ne sont pas des
parlementaires, mais ils sont nommés par le Sénat. Les
contrôles du comité R portent en particulier sur le respect
des droits fondamentaux par les services de renseignement, et sur leur
«
coordination
et [leur]
efficacité
».
|
1) La composition et le fonctionnement de l'instance parlementaire de contrôle des services de renseignement
C'est
le comité R, instance composée non de parlementaires, mais
d'experts choisis par le Sénat, qui contrôle les services de
renseignement. Cependant, une commission sénatoriale
ad
hoc
supervise le fonctionnement du comité R.
a) Le comité R
Le comité R est composé de
trois membres
qui sont
nommés par le Sénat
pour une durée de
cinq ans
. Leur mandat est renouvelable deux fois
. Le
président est un magistrat, et les autres membres des juristes
expérimentés et spécialisés dans les
questions de police et de renseignement
. Seul le président exerce
son activité à temps plein. En même temps que les trois
titulaires, le Sénat désigne trois suppléants.
Les membres du comité doivent détenir une habilitation de
sécurité du
niveau
« très
secret »
(5(
*
))
,
c'est-à-dire être susceptibles de connaître les informations
les plus confidentielles qui soient.
Leur mandat est incompatible avec un mandat public électif et avec
certains emplois ou fonctions «
qui pourraient mettre en
péril l'indépendance ou la dignité de la
fonction
». Les membres du comité ne peuvent faire partie
ni du comité P ni d'un service de police ou de renseignement.
Le comité R peut agir de sa propre initiative. Il doit alors informer
le Sénat. Il peut aussi agir à la demande de l'une des deux
assemblées, du ministre de la justice ou de celui de la
défense nationale.
En outre, il peut être saisi de plaintes de
particuliers ou être réquisitionné par les autorités
judiciaires.
Le comité R est assisté d'un
service d'enquêtes
, qui
comprenait cinq membres en 2000. Nommés par le comité R, les
membres du service d'enquêtes sont en règle générale
détachés d'un service de police ou de renseignement.
Émanation du Parlement, le comité R constitue un instrument
d'expertise à la disposition - non exclusive - du
législateur
, qui peut utiliser ses travaux pour prendre des
initiatives législatives ou pour exercer sa fonction de contrôle
de l'exécutif.
b) La commission du suivi du comité R
Présidée par le président du Sénat, la
commission du suivi du comité R
comporte en outre quatre
sénateurs élus après chaque renouvellement du
Sénat
au scrutin de liste pour la durée de la
législature.
La commission précise les modalités de l'organisation de ses
travaux et de la rédaction des procès-verbaux dans un
règlement
intérieur, qu'elle établit
elle-même.
La commission se réunit au moins une fois par trimestre avec le
président ou avec l'ensemble des membres du Comité R. Elle peut
également se réunir à la demande de la majorité de
ses membres, du président du comité R ou de la
majorité des membres du comité R. Par ailleurs, elle peut
être saisie de toute dénonciation de la part d'un membre du
comité relative au non-respect par ce dernier de la loi de 1991 ou de
son règlement intérieur.
Les réunions de la commission se déroulent à huis clos et
les commissaires sont soumis à une obligation de confidentialité,
même lorsqu'ils ont cessé leurs fonctions.
2) Les compétences de l'instance parlementaire de contrôle des services de renseignement
a) Le
comité R
La loi de 1991 charge le comité R d'enquêter
«
sur
les activités et les
méthodes
des services de renseignement, sur leurs règlements et directives
internes
».
Le comité se réunit aussi souvent qu'il estime utile et, pour
remplir sa mission, il dispose d'
importants pouvoirs
. Il peut se faire
transmettre tout document qu'il juge nécessaire et entendre toute
personne dont l'audition lui paraît utile. Les personnels des services de
renseignement ont l'obligation de lui révéler tous
«
les secrets
dont ils ont
dépositaires
», sauf ceux qui portent sur des affaires
judiciaires en cours. Les personnels ne peuvent par exemple pas s'abriter
derrière la nécessité de protéger certaines
personnes, car, en pareil cas, c'est le président du comité R qui
statue. Le service d'enquêtes du comité peut également
procéder à des perquisitions et à des saisies dans les
endroits où les personnels des services de renseignement exercent leurs
fonctions. Il peut s'adjoindre la collaboration d'experts.
Par ailleurs, les services de renseignement doivent communiquer de leur propre
chef tous leurs documents internes au comité.
Chaque enquête donne lieu à un rapport, qui est communiqué
au ministre compétent ainsi qu'à la commission sénatoriale
de suivi. Le ministre doit informer le comité des mesures qu'il compte
prendre en réponse aux conclusions du comité.
De plus, le comité R a estimé que la loi l'autorisait à
interroger les responsables des services de renseignement sur des questions
ponctuelles. Ce mode de contrôle, plus souple, permet au comité de
savoir comment les services de renseignement traitent un point donné.
La loi de 1991 oblige le comité R à adresser un rapport
annuel d'activité à la commission sénatoriale de suivi.
Lorsqu'il a été chargé d'une enquête par la Chambre
des représentants ou par le Sénat ou lorsqu'il a constaté
que des conclusions qu'il avait transmises au ministre n'ont pas
été suivies d'effet ou que les mesures prises sont
inadéquates, le Comité R établit également un
rapport.
Le budget des services de renseignement est inclus dans celui du
ministère de la justice ou de l'intérieur et le comité R
ne dispose d'aucun pouvoir de contrôle
a priori
. En revanche, dans
le cadre de ses enquêtes, il peut vérifier l'emploi des
crédits. En 1995, le Comité R a procédé à
une analyse des budgets des deux services de renseignement. Cette analyse s'est
limitée à une vérification des fonds spéciaux.
b) La commission du suivi du comité R
La commission supervise le fonctionnement du Comité R
.
La commission exerce toutes les compétences que la loi attribue au
Sénat vis-à-vis du
Comité R
. Elle peut en
particulier :
- charger le Comité R (et le Comité P)
d'enquêtes ;
- prendre l'avis du Comité R sur des projets de textes
législatifs ou réglementaires ;
- obtenir communication de tous les rapports d'enquête du
Comité R et se faire transmettre ses dossiers d'enquête, y compris
sur des affaires en cours, la mise en péril de tiers ou l'entrave au bon
fonctionnement des services de renseignement nationaux et étrangers
constituant la seule limite à la communication des informations. C'est
pourquoi l'identité de dénonciateurs ne peut pas être
transmise par exemple.
La commission du suivi du comité R siège avec la commission du
suivi du comité P pour examiner les rapports annuels des deux
comités avant leur publication. Les conclusions des deux commissions
sont jointes aux rapports des comités. Les deux commissions peuvent
également siéger ensemble pour analyser les résultats
d'une enquête demandée par la Chambre des représentants au
Comité R (ou par le Sénat au Comité P) ou pour
échanger des informations.
*
* *
Il
semble que le Parlement n'exploite pas pleinement les possibilités que
la législation lui donne. Depuis la création du
comité R, le Sénat ne lui a adressé que peu de
demandes et n'a pas réagi à ses rapports. En revanche, le
gouvernement a généralement donné suite à ses
enquêtes.
Le Comité R ne dispose pas de l'exclusivité du
contrôle des services de renseignement. Ainsi, plusieurs commissions
d'enquête s'y sont consacrées.