2. Profil des apprenants
A l'image de la société coréenne
qui privilégie la collectivité, l'école fonctionne pour
les apprenants considérés d'abord en tant que groupe. Un exemple
significatif : dans l'enseignement secondaire, les élèves sont
identifiés par un numéro qui leur est donné, en
début d'année, d'après l'ordre de leur taille respective.
Ceci pour faciliter les interrogations au hasard, les enseignants ne pouvant
mémoriser le nom des élèves de leurs différentes
classes. Chacun se présente : année X, classe Y, n° Z, nom
et prénom. De même, les étudiants précisent d'abord
leur appartenance : telle faculté, telle année et leur nom.
En outre, la population coréenne étant constituée d'une
seule ethnie, le profil des apprenants est uniforme. Ces
caractéristiques permettent de présenter les apprenants
coréens en groupe, plutôt que l'apprenant en tant qu'individu.
a) Les lycéens
Agés de quinze à dix-sept ans,
également répartis entre garçons et filles, ils sont issus
d'un milieu socio-culturel relativement varié, dans la mesure où
presque tous les Coréens (99 %) terminent au moins les études
secondaires.
De toute leur vie scolaire et universitaire, la période des trois
années de lycée est la plus chargée, tant par l'importance
des programmes imposés que par le nombre d'heures de cours
dispensées, de huit heures du matin à huit heures du soir, la
journée du lycéen se terminant encore plus tard par des
leçons particulières. Le travail des candidats au concours
d'entrée, très soutenus par leurs parents, s'étale
uniformément tout au long de la journée et de la soirée,
jusqu'à dix-huit heures par jour. Le but de ce travail acharné
est d'être admis en faculté, de préférence dans les
meilleures. Le lycéen coréen n'existe que pour ses études
et pour le succès aux examens.
Ils ont une attitude soumise vis-à-vis de l'Institution et des
enseignants : attentifs, coopératifs, serviables... mais leur
défaut majeur est une passivité et une certaine timidité
qui les empêchent de s'exprimer librement. Ils comptent beaucoup sur les
enseignants pour que la barrière psychologique tombe et que des liens
s'instaurent réellement. L'échec scolaire est extrêmement
rare, car il ne viendrait à l'esprit d'aucun élève
d'abandonner en cours de route.
Leur curiosité en seconde langue est assez grande, d'autant qu'ils vont
étudier, pour la première fois, une nouvelle langue
étrangère en dehors de l'anglais. Ce cours d'une à trois
heures hebdomadaires est considéré comme une bouffée
d'oxygène parmi les programmes d'études surchargés. Ceux
qui apprennent le français, par exemple, sont ravis de saluer en
français et d'échanger quelques mots, déjà entendus
dans les films ou les chansons. Mais, très vite, leur enthousiasme
diminue, car l'apprentissage limité à la grammaire ne leur permet
pas de faire des progrès comme ils le souhaiteraient. C'est souvent
cette insuffisance qui les amène à reprendre cette même
langue en faculté -comme spécialité-, avec l'envie d'aller
plus loin et de combler les lacunes du lycée.
b) Les étudiants en section française
Leur âge se situe entre dix-huit et vingt-huit
ans. Ce dernier cas correspond aux garçons qui doivent assumer deux ans
et demi de service militaire obligatoire durant leurs études et qui ont
voulu passer plusieurs fois le concours d'entrée pour accéder aux
meilleures universités. Chez les filles, l'éventail des
âges est moins large, dans la mesure où elles font rarement
plusieurs tentatives d'entrée en faculté et qu'elles n'ont pas
d'autres obligations.
Les étudiants sont généralement célibataires et
habitent chez leurs parents, sauf ceux qui poursuivent leurs études dans
une autre ville. Ce dernier cas devient de moins en moins fréquent par
rapport aux années soixante - soixante-dix, où les meilleures
facultés se trouvaient dans la capitale. De plus en plus de jeunes
finissent leurs études dans leur ville d'origine, pour éviter aux
parents les dépenses élevées d'hébergement et de
nourriture.
Les étudiants coréens représentent 2 % d'une population
totale de 45 millions et sont issus d'une double sélection :
- intellectuelle : le concours d'entrée est un examen d'autant plus
sélectif que les places offertes en faculté sont en nombre
limité ;
- financière : en raison du coût élevé des
études dans l'enseignement supérieur, seules les familles
aisées peuvent assumer cette lourde charge.
Il en résulte que l'origine sociale est assez homogène et
concerne essentiellement la classe aisée. Le système de bourses,
bien développé grâce à de généreuses
contributions extérieures, n'est réservé qu'aux meilleurs
éléments.
Contrairement aux lycéens, les étudiants ont un emploi du temps
souple. Ils ont, chaque semestre, huit unités de valeur à suivre,
avec environ vingt heures de cours par semaine, et font huit semestres en
quatre ans d'études de licence. La répartition des cours est
régulière pendant la semaine jusqu'au samedi à midi,
tandis que la bibliothèque, ouverte toute l'année, reste toujours
pleine.
Malgré l'augmentation des étudiants en section française,
le fait de choisir le français est toujours considéré
comme
" chic "
, voire snob. Cela est lié au prestige
que conservent la France et sa langue dans l'esprit des Coréens.
Jusqu'à la fin des années soixante-dix, l'enseignement du
français était majoritairement suivi par des jeunes filles de
bonne famille et quelques rares garçons littéraires. Les filles
choisissaient les études de littérature, avec des motivations
personnelles et culturelles, car elles ne travaillaient
généralement pas après leur mariage, pour mieux se
consacrer à l'éducation de leurs enfants. Les garçons,
eux, entraient dans les sections scientifiques en vue d'une meilleure insertion
dans la vie active.
Aujourd'hui, les critères du choix se diversifient et la
répartition entre garçons et filles est moins tranchée.
Ainsi, chaque département de français compte deux tiers ou la
moitié de filles, tandis que les sections allemandes sont plus
prisées par les garçons.
Ces études de langue et de littérature sont à plein
temps. Les étudiants ont, dès la première année,
trois ou quatre unités de valeur de français, où l'accent
est mis sur la grammaire et l'audiovisuel. Par la suite, l'étude de la
littérature devient prédominante. A l'issue de la
quatrième année, les étudiants de français
obtiennent le diplôme de licence ès Lettres, diplôme commun
à tous les étudiants de langue et de littérature.
Leurs souhaits se portent maintenant vers des débouchés
professionnels plus larges qui leur permettent de valoriser le diplôme
obtenu. Pour le moment, ce diplôme n'est reconnu que dans les
établissements secondaires. Dans le monde professionnel, les postes
nécessitant la connaissance du français restent très rares.