Travaux de la commission des lois



- Présidence de M. Jacques Larché, président.

PJLF pour 1999 - Audition de Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice

Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la commission a procédé à l'audition de Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice, sur les crédits de son ministère pour 1999.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice,
a souligné la priorité, encore accentuée par rapport à l'exercice 1998, dont bénéficiait le budget de la justice. Elle a comparé la progression de 5,6 % des crédits totaux de son ministère à celle du budget de l'Etat, en hausse de 2,3 %. Elle a noté que la création de 930 emplois représentait la plus forte création de postes parmi les ministères civils. En matière d'équipement, elle a fait observer qu'avec 1,7 milliard de francs d'autorisations de programme nouvelles, la justice se trouvait au second rang derrière le secteur des transports.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a rappelé les trois grandes orientations de la réforme de la justice, pour lesquelles différents textes sont soit déposés, soit en cours d'examen au Parlement : pour une justice au service des citoyens, les projets de loi relatifs à l'accès au droit et à la simplification des procédures pénales ; pour une justice au service des libertés, le projet de loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes ; pour une justice indépendante et impartiale, le projet de loi constitutionnelle relatif au Conseil Supérieur de la Magistrature et le projet de loi relatif à l'action publique en matière pénale.

Concernant les moyens des services judiciaires, Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a mis l'accent sur les deux objectifs majeurs : l'amélioration du fonctionnement quotidien des juridictions et la mise en oeuvre des réformes.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a fait état de la création de 140 postes de magistrats et de 230 postes de fonctionnaires, soit le nombre le plus élevé de créations d'emplois de magistrats depuis quinze ans, au moyen de deux concours exceptionnels de magistrats et de l'augmentation des postes offerts au concours d'entrée à l'ENM en 1999. De plus, elle a annoncé le recrutement de 400 assistants de justice. Elle a noté que 18 millions de francs seraient consacrés à amorcer la réforme du statut de la magistrature, afin d'améliorer la progression de carrière des magistrats et leur mobilité.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a mis l'accent sur la hausse de 5,3 % de la dotation de fonctionnement des juridictions, permettant de développer les Conseils départementaux d'aide juridique, de poursuivre la création des maisons de justice et du droit, l'informatisation des juridictions et la création de pôles spécialisés dans la lutte contre la délinquance économique et financière. Elle a considéré que les crédits d'investissement, à hauteur de 673 millions de francs en autorisations de programme et 961 millions en crédits de paiement, permettraient la construction et la mise aux normes de sécurité des juridictions.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a ensuite détaillé les crédits affectés à la mise en oeuvre des politiques judiciaires. En matière pénale, elle a souligné que l'abondement supplémentaire du chapitre des frais de justice permettrait de financer les mesures liées au projet de loi relatif aux alternatives aux poursuites.

En matière civile, elle a fait savoir que le chapitre de l'aide juridictionnelle bénéficiait d'une importante mesure nouvelle de 97 millions de francs, destinée à financer les nouvelles missions définies dans le projet de loi relatif à l'accès au droit. Elle a indiqué que le projet de décret relatif à la procédure civile, dont l'objet est de limiter l'engorgement des cours et tribunaux, devrait être publié avant la fin de l'année et devrait redéfinir les compétences matérielles des juridictions, en particulier étendre le champ d'intervention du tribunal d'instance et réviser le taux en-deçà duquel il statue en dernier ressort.

Enfin, Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a indiqué que l'Inspection générale des services judiciaires serait renforcée par la création de cinq postes d'inspecteurs et le redéploiement de six postes qui seraient affectés au contrôle des tribunaux de commerce. Elle a souhaité que le budget du Conseil d'Etat et des juridictions administratives, en hausse de 4,9 % avec 803 millions de francs, permette de répondre à la hausse du contentieux, grâce à la création de 21 emplois de magistrats et l'installation de la Cour de Douai et du Tribunal de Melun.

Concernant les moyens affectés à la lutte contre la délinquance juvénile, Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a indiqué que le gouvernement avait arrêté ses orientations en matière de lutte contre la délinquance juvénile lors du Conseil de sécurité intérieure du 8 juin 1998, suivi de la circulaire de politique pénale du 15 juillet 1998. Elle en a évoqué les principaux points : apporter une réponse systématique aux faits de délinquance commis par les mineurs quelle que soit leur gravité, en particulier par le recrutement de 200 délégués du procureur spécialisés en matière de mineurs ; développer les mesures de réparation ; développer l'accueil de jour et la diversification de l'hébergement.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a constaté la forte augmentation du nombre de mineurs interpellés (154.000 en 1997 contre 92.000 en 1993). Elle a annoncé la mise en place, dans les 26 départements prioritaires, des cellules de coordination de l'accueil d'urgence, qui associent le secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse, le secteur associatif habilité, et l'aide sociale à l'enfance assurée par les Conseils généraux. Elle a précisé que l'objectif était de 9 conventions signées fin 1998 et 26 fin 1999 contre 5 actuellement. Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a indiqué que le nombre des dispositifs éducatifs renforcés passerait de 13 actuellement à 20 d'ici fin 1999. Enfin, elle a relevé la progression de 6,8 % des crédits de fonctionnement des services de la PJJ et la création de 150 emplois, soit le plus fort taux annuel d'augmentation des effectifs de la PJJ depuis 1982.

Concernant les services pénitentiaires, Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a constaté la stabilisation du nombre des détenus à 58 000 en 1998 et l'allongement de la durée moyenne d'incarcération (de 7,8 mois en 1996 à 8,1 mois en 1997). Elle a noté l'augmentation de 5 % en deux ans des publics suivis en milieu ouvert. En réponse à cette situation, elle a remarqué que les crédits des services pénitentiaires augmenteraient de 6% avec la création de 344 emplois dont 220 de surveillants.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a estimé indispensable l'amélioration de la prise en charge des détenus, au moyen par exemple de la généralisation progressive du " projet d'exécution des peines ". Elle a souhaité que l'augmentation des crédits de fonctionnement permette d'améliorer les conditions d'hygiène et d'alimentation des détenus ainsi que la prise en charge des indigents, puis elle a fait part de la réflexion en cours sur le maintien des liens familiaux, essentiel à la réinsertion des détenus, et sur le plan en faveur des mineurs détenus.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a observé que la modernisation du parc pénitentiaire se poursuivait, avec près de 700 millions de francs d'autorisations de programme destinés au programme d'équipement lancé en 1998, qui prévoit la création de trois nouveaux établissements et la rénovation de cinq établissements particulièrement dégradés.

Enfin Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a évoqué le développement des alternatives à l'incarcération, en particulier la réforme d'ici fin 1998 des services pénitentiaires d'insertion et de probation, qui bénéficieront de la création de 78 emplois en 1999, ou encore le projet de création de deux " centres pour peines aménagées " prenant en charge des détenus condamnés à de courtes peines.

A l'issue de cette présentation, Mme Dinah Derycke, rapporteur pour avis sur les crédits des services généraux, après avoir salué l'importante progression des crédits de la justice, a interrogé le garde des sceaux sur les réflexions en cours en vue d'une réforme de la carte judiciaire, les perspectives de réduction des vacances de postes grâce aux nouveaux efforts de recrutement, le bilan des emplois-jeunes pour le ministère de la justice, la réforme annoncée des tribunaux de commerce et le fonctionnement actuel des conseils de prud'hommes.

En réponse à ces questions, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice, a tout d'abord indiqué, s'agissant de la réforme de la carte judiciaire, qu'elle avait abandonné l'idée d'une " départementalisation " décidée depuis Paris, au profit de la constitution d'une mission composée de cinq personnes chargées d'étudier la diversité de la situation sur le terrain.

Après avoir précisé qu'elle entendait mener à bien la réforme de la carte judiciaire au cours de la durée de la présente législature, elle a annoncé qu'elle commencerait par réformer la carte des tribunaux de commerce, la mission ayant déjà étudié la situation des six cours d'appel comportant le plus de tribunaux de commerce.

En ce qui concerne les vacances de postes, le garde des sceaux a indiqué que la combinaison des recrutements nouveaux, latéraux et exceptionnels de magistrats avait d'ores et déjà permis de réduire le nombre de vacances de postes de magistrats passé de 3,7 % fin 1997 à 1,8 % fin 1998, le taux de vacances de postes de fonctionnaires se stabilisant autour de 2 %. Elle a en outre précisé qu'elle avait accru le nombre des magistrats " placés " afin de remédier au problème des absences résultant de congés divers.

Après avoir reconnu que la mise en place des emplois-jeunes par le ministère de la justice n'avait pas donné de résultats aussi performants que ceux qu'elle avait espérés, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice, a noté que 489 emplois-jeunes avaient déjà été créés, essentiellement dans les domaines de l'accès au droit, de l'aide aux victimes ou aux mineurs, ou encore de l'accueil du public, l'objectif étant de parvenir à la création de 3.500 emplois-jeunes sur une période de trois ans. Elle a ajouté qu'elle avait souhaité un niveau d'exigence élevé quant à la qualité des recrutements effectués.

Au sujet de la réforme des tribunaux de commerce, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice, a indiqué que la mixité serait réalisée grâce à la présence de juges professionnels dans les tribunaux de commerce et inversement de juges consulaires au sein des cours d'appel, que les règles d'incompatibilité seraient renforcées pour éviter les risques de conflits d'intérêts et que les professions auxiliaires, comme celle des greffiers, seraient réformées notamment afin de renforcer les contrôles externes ainsi que le contrôle des tarifs. Elle a annoncé le dépôt d'un projet de loi sur les tribunaux de commerce au milieu de l'année 1999, s'ajoutant à des mesures réglementaires, ainsi que la création progressive, à partir du projet de loi de finances pour l'an 2000, des 350 postes de magistrats nécessaires pour parvenir à la mixité.

Enfin, après avoir constaté une baisse du nombre de départages concernant les conseils de prud'hommes, elle a estimé que pour réduire les délais de traitement du contentieux en cette matière il convenait surtout d'améliorer la situation des cours d'appel.

En réponse à quelques questions complémentaires de Mme Dinah Derycke, rapporteur pour avis, concernant la formation professionnelle des avocats, la réforme du statut de la magistrature et les difficultés constatées à l'occasion de l'organisation du " procès Chalabi  ", Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice, a déclaré qu'un projet de loi relatif à la formation professionnelle des avocats avait été élaboré à la suite des propositions du Conseil national des barreaux, afin notamment de développer la formation en alternance et de rationaliser les structures grâce à un regroupement des centres de formation.

Elle a précisé que les crédits prévus pour la réforme du statut de la magistrature permettraient d'améliorer le déroulement des carrières en " lissant " les incidences de la pyramide des âges.

A propos du " procès Chalabi ", après avoir rappelé que la décision de regrouper des procès relevait des prérogatives des magistrats, le garde des sceaux, reconnaissant que le gymnase de l'Ecole nationale pénitentiaire n'était sans doute pas un lieu idéal pour l'organisation de ce procès, a indiqué qu'elle avait demandé la réalisation d'une étude sur les possibilités d'accueillir de tels procès dans le cadre du palais du justice de Paris.

M. Georges Othily, rapporteur pour avis pour les crédits de l'administration pénitentiaire, a tout d'abord souhaité connaître les raisons du constant déclin des mesures de libération conditionnelle et les actions envisagées pour relancer le prononcé de ces mesures utiles à la réinsertion des condamnés. Il a demandé des précisions sur l'état d'avancement de la réforme du statut des personnels techniques, ainsi que sur la mise en oeuvre de la loi du 19 décembre 1997 sur le placement sous surveillance électronique.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a souligné que le déclin des mesures de libération conditionnelle s'expliquait avant tout par l'évolution de la population carcérale, marquée par une augmentation du nombre de personnes condamnées pour viol ou pour infractions à la législation sur les stupéfiants. Observant que les mesures de libération conditionnelle étaient plus difficiles à envisager pour ce type de détenus, elle a ajouté que l'augmentation des durées de détention, le prononcé de périodes de sûreté et la pratique des grâces collectives contribuaient également à la diminution du nombre de mesures de libération conditionnelle. Elle a indiqué que le renforcement des effectifs des services sociaux, marqué par le recrutement de 200 travailleurs sociaux en 1998 et de 78 en 1999, ainsi que la réforme des services d'insertion et de probation pourraient contribuer à faciliter une relance des mesures de libération conditionnelle.

A propos du statut des personnels techniques de l'administration pénitentiaire, le garde des Sceaux a indiqué que les derniers arbitrages interministériels devraient être pris au cours des prochains jours. Elle a précisé que les crédits nécessaires à cette réforme avaient été provisionnés et qu'elle prendrait effet rétroactivement à la date du 1er août 1996.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a ensuite évoqué la loi sur le placement sous surveillance électronique pour observer qu'il convenait en premier lieu de choisir un dispositif technique adapté et qu'une étude avait été confiée à une société chargée de rendre un rapport en mai 1999. Elle a en outre précisé qu'une concertation avec les personnels devait être menée d'ici la fin de l'année 1998 et que les expérimentations pourraient commencer à la fin de 1999. Elle a enfin indiqué que les futurs centres pour peines aménagées pourraient être le support de ces expérimentations.

M. Georges Othily, rapporteur pour avis, a alors souhaité savoir si des mesures particulières étaient envisagées pour la mise en oeuvre de la loi relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a répondu que des crédits étaient prévus dans le projet de budget pour la mise en oeuvre de cette loi et que plusieurs décrets d'application étaient en cours d'élaboration. Elle a indiqué qu'une réflexion conjointe des ministères de la justice et de la santé était en cours pour la mise en oeuvre de l'injonction de soins.

M. Guy Cabanel s'est félicité de la mise en oeuvre prochaine d'expérimentations pour l'application de la loi sur le placement sous surveillance électronique et a salué l'approche réaliste qui avait prévalu dans un dossier difficile car impliquant une évolution profonde des mentalités.

M. Patrice Gélard, rapporteur pour avis pour les crédits de la protection judiciaire de la jeunesse, a tout d'abord interrogé le garde des Sceaux sur les mesures envisagées pour améliorer les conditions de détention des mineurs. Il a souhaité savoir où seraient implantés les dispositifs éducatifs renforcés et quels moyens leur seraient consacrés. Il a par ailleurs demandé quels moyens étaient prévus pour la mise en oeuvre des missions confiées à la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) par la loi relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles et s'est interrogé sur le nombre d'emplois-jeunes crées dans secteur de la PJJ.

De manière plus générale, M. Patrice Gélard, rapporteur pour avis, a observé que les règles de procédure applicables en matière de délinquance des mineurs, en particulier en ce qui concerne la comparution à délai rapproché, le double dossier, l'exécution des mesures en milieu ouvert mériteraient peut-être d'être revues. Il a demandé s'il existait aujourd'hui des moyens suffisants en personnel pour mener une véritable politique à l'égard des mineurs délinquants et des mineurs en danger. Il a enfin souhaité savoir si des cellules de coordination seraient implantées dans l'ensemble des départements.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, s'est tout d'abord déclarée très préoccupée par la délinquance des mineurs, soulignant qu'avant de devenir des délinquants, les individus concernés étaient des enfants en danger. Elle a estimé qu'il convenait donc d'abord de protéger les enfants et de veiller à ce qu'ils ne puissent sortir sans contrôle de l'école. Elle a rappelé à cet égard que 200 classes relais seraient créées l'année prochaine. La ministre a en revanche souligné que la protection judiciaire de la jeunesse et les magistrats ne pouvaient pas suppléer à la carence éventuelle des administrations de l'Etat ou des collectivités territoriales ; elle a observé que les tribunaux n'avaient pas à connaître de l'incivilité des mineurs, celle-ci relevant de la responsabilité de l'ensemble des citoyens.

Le garde des Sceaux a ensuite indiqué que des quartiers réservés aux mineurs seraient installés dans les établissements pénitentiaires et que le suivi médico-psychologique des mineurs détenus serait renforcé. Elle a fait valoir que vingt dispositifs éducatifs renforcés seraient créés dont quatre par le secteur associatif. A propos des emplois-jeunes, elle a souligné que l'accord-cadre signé avec l'association française de sauvegarde de l'enfance et de l'adolescence permettrait la création de mille emplois en trois ans. Evoquant les cellules de coordination, elle a indiqué que 26 départements pilotes avaient été retenus, mais qu'il était souhaitable d'envisager par la suite une extension du dispositif.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a enfin souhaité un renforcement de la coordination de l'action des services de l'Etat et de celle des conseils généraux. Elle a en outre observé que le ministère de la justice serait associé à l'élaboration des contrats de plan Etat-régions.

M. Jacques Larché, président, s'est demandé où s'arrêtait l'incivilité et où commençaient les comportements pénalement punissables.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a alors souligné que la loi déterminait les comportements pénalement punissables, mais que les tribunaux n'avaient pas à connaître des atteintes aux usages ou à la politesse, qui constituent un problème relevant de la responsabilité de l'ensemble des citoyens.

M. Pierre Fauchon a demandé où en était le recrutement de magistrats à titre temporaire et a souhaité savoir le nombre approximatif de maisons de justice que le Gouvernement envisageait de créer. Il a enfin demandé si la création envisagée d'un juge de la détention provisoire donnerait lieu à un recrutement spécial ou si cette réforme était prise en compte dans les créations de postes envisagées.

M. Robert Badinter a tout d'abord qualifié de remarquable le projet de budget présenté par le garde des Sceaux. A propos des juridictions commerciales, il a fait valoir que la présence effective du ministère public était une question essentielle. Il s'est félicité de la volonté du garde des Sceaux d'instaurer une mixité entre magistrats professionnels et magistrats non professionnels au sein des tribunaux de commerce, soulignant qu'il avait déjà proposé cette évolution entre 1983 et 1985. Il s'est enfin inquiété de l'encombrement très préoccupant de la chambre sociale de la Cour de cassation.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a tout d'abord indiqué que quatre magistrats à titre temporaire avaient été recrutés à ce jour. Elle a précisé que trois conseillers de Cour d'appel en service extraordinaire avaient été recrutés en 1997 et deux en 1998. A propos des maisons de justice, elle a fait valoir que l'objectif était de passer de 60 à 80.

En réponse à M. Robert Badinter, le garde des Sceaux a souligné qu'elle avait diffusé, dès octobre 1997, une circulaire sur la présence du ministère public au sein des tribunaux de commerce. A propos de l'encombrement de la Cour de cassation, elle a souligné qu'un décret était en cours de préparation, qui permettrait notamment aux différentes chambres de siéger en formations restreintes.

A propos du projet de loi sur la présomption d'innocence, Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a souligné que ce texte comprenait un grand nombre de dispositions importantes et a cité la présence de l'avocat dès la première heure de la garde à vue, la possibilité pour l'avocat de demander des actes d'instruction, la création d'un juge de la détention provisoire, l'introduction de dispositions relatives aux délais pour conduire une affaire, enfin la mise en place de fenêtres de publicité pendant le déroulement d'une procédure. Elle a indiqué que la moitié environ des créations de postes de magistrats prévues par le projet de budget était destinée à la mise en oeuvre de la réforme de la détention provisoire et que ce recrutement serait complété dans le projet de loi de finances pour 2000.

M. Jacques Larché, président, a alors indiqué que le Sénat s'apprêtait à adopter, vraisemblablement conforme, le projet de loi constitutionnelle relatif au Conseil supérieur de la magistrature. Il a observé que le Sénat ne savait pas pour l'instant quel serait le contenu définitif des textes les plus importants relatifs à la réforme de la justice, en particulier le projet de loi relatif à la présomption d'innocence et le projet de loi relatif à l'action publique en matière pénale. Il s'est en particulier interrogé sur les dispositions du projet de loi relatif à l'action publique tendant à imposer une motivation des classements sans suite et à créer un appel des décisions de classement. Il a fait valoir qu'il ne serait pas aisé pour les parlementaires de se déterminer définitivement sur la réforme du Conseil supérieur de la magistrature lors de la réunion du Congrès du Parlement s'ils devaient se prononcer en ignorant le sort réservé aux autres projets constituant la réforme de la justice.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a alors indiqué que la réforme était désormais bien engagée et que, sur les sept textes constituant cette réforme, cinq étaient passés en Conseil des ministres, la plupart d'entre eux ayant déjà fait l'objet d'au moins une lecture dans une assemblée. Elle a estimé que les deux projets de loi organiques respectivement relatifs au Conseil supérieur de la magistrature et au statut de la magistrature ne pourraient être déposés qu'après l'adoption définitive du projet de loi constitutionnelle. A propos de la responsabilité des magistrats, elle a rappelé que le projet de loi constitutionnelle prévoyait un transfert au Conseil supérieur de la magistrature du pouvoir disciplinaire à l'égard des magistrats du parquet.

Le garde des Sceaux a ensuite déclaré comprendre que les parlementaires effectuent un lien entre les réformes en cours et a souligné que les projets de loi déposés sur le Bureau de l'une ou l'autre assemblée seraient améliorés par le travail parlementaire. Evoquant la motivation des classements sans suite et l'appel des décisions de classement prévus par le projet de loi relatif à l'action publique en matière pénale, Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a souligné que ces procédures n'auraient, par définition, à s'appliquer qu'aux infractions dont les auteurs seraient connus. Elle a alors rappelé que 80% des classements résultaient du fait que l'auteur de l'infraction n'était pas connu.

La ministre a ajouté que les nouvelles dispositions ne joueraient que lorsqu'il y aurait des victimes et que l'infraction aurait donné lieu à une dénonciation ou à une plainte. Elle a estimé qu'en 1995, sur plus de 1,5 million de classements sans suite, seuls 32 000 auraient été susceptibles de se voir appliquer les dispositions du projet de loi. Elle a enfin souligné que ces nouvelles dispositions formaient un ensemble avec le renforcement de l'indépendance des magistrats du parquet et le transfert du pouvoir disciplinaire au Conseil supérieur de la magistrature.

A propos du calendrier de la réforme de la justice, Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a estimé que la réforme devrait être très avancée à la fin de la session parlementaire en cours et définitivement achevée à la fin de l'année 1999.

M. Robert Badinter a souhaité savoir si la date de réunion du Congrès en vue de l'adoption du projet de loi constitutionnelle relatif au Conseil supérieur de la magistrature était arrêtée et s'il était envisagé que le Congrès examine au cours d'une même réunion ce projet de loi et le projet de loi constitutionnelle modifiant l'article 88-2 de la Constitution.

Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a alors rappelé que la réunion du Congrès était une prérogative du Président de la République et qu'aucune date définitive n'avait à sa connaissance été arrêtée. Elle a indiqué que la révision constitutionnelle préalable à la ratification du traité d'Amsterdam revêtait un caractère prioritaire, compte tenu de la nécessité de ratifier le traité dans les meilleurs délais.

M. Guy Cabanel a souhaité savoir quel sort serait réservé à la réforme des Cours d'assises entreprise lors de la précédente législature.Mme Elisabeth Guigou, ministre de la justice, a fait valoir qu'elle ne souhaitait pas présenter au Parlement des textes pour lesquels un financement suffisant ne serait pas prévu. Elle a observé que l'adoption du projet de loi déposé pendant la précédente législature aurait impliqué le recrutement de cent magistrats et de cent fonctionnaires. Elle a estimé préférable de concentrer les efforts sur la réduction des délais de jugement tout en indiquant que ses services continuaient à réfléchir à des formules moins coûteuses telles que l'appel tournant.

PJLF pour 1999 - Audition de M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'Outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a entendu M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, ministre de l'intérieur par intérim, sur les crédits de l'outre-mer et de l'intérieur pour 1999.

Présentant tout d'abord les crédits de l'outre-mer, M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, a indiqué que le budget du secrétariat d'Etat à l'outre-mer, d'un montant de 5,6 milliards de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement, connaissait une progression significative de 7 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1998. Il a en outre précisé que ce budget ne constituait qu'une petite partie de l'action financière de l'Etat en faveur de l'outre-mer, d'un montant global de 51 milliards de francs pour 1999 en progression de 2,9 %, soit une progression supérieure à celle de l'ensemble du budget de l'Etat.

Abordant ensuite les grandes priorités du secrétariat d'Etat à l'outre-mer, le ministre a noté que les crédits du fonds pour l'emploi dans les départements d'outre-mer (F.E.D.O.M.), représentant un tiers du budget du secrétariat d'Etat, atteignaient 1,8 milliard de francs, en augmentation de 6,4 % et permettraient de financer 56.500 solutions nouvelles d'insertion contre 48.500 cette année, ainsi que la mise en place de nouveaux emplois-jeunes, l'objectif étant de porter le nombre total de ces emplois à 7.000 d'ici la fin de 1999.

Il a d'autre part insisté sur la progression de 58 % des crédits de la ligne budgétaire unique (L.B.U.) d'aide au logement dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte, destinés à financer la construction ou la réhabilitation de 19.000 logements.

Par ailleurs, il a déclaré que l'effort d'investissement serait poursuivi en 1999 grâce aux dotations prévues pour le fonds d'investissement des départements d'outre-mer (F.I.D.O.M.) et le fonds d'investissement pour le développement économique et social (F.I.D.E.S.) concernant les territoires d'outre-mer.

Enfin, il a relevé que les crédits du service militaire adapté, représentant près de 10 % du budget du secrétariat d'Etat à l'outre-mer, permettraient de mettre en oeuvre la réforme rendue nécessaire par la professionnalisation des armées, grâce à la création de 500 emplois de volontaires pour 1999.

A l'issue de cette présentation, M. José Balarello, rapporteur pour avis sur les crédits des départements d'outre-mer, a interrogé le ministre sur les raisons de l'orientation à la baisse des autorisations de programme, le contenu de la loi d'orientation sur les départements d'outre-mer annoncée pour l'année prochaine, les mesures prises pour lutter contre l'immigration irrégulière, le problème des surrémunérations des fonctionnaires, les perspectives d'évolution du statut de Mayotte, les suites à donner au rapport de M. Jean-François Merle sur la situation en Guyane, les conditions de financement des investissements à la suite des modifications de la loi " Pons " et les logements financés par les crédits d'aide au logement dans les départements d'outre-mer.

En réponse à ces questions, M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, a tout d'abord indiqué que la baisse des autorisations de programme, qu'il a jugée très relative, s'expliquait par trois raisons : la suppression du F.I.D.O.M. décentralisé, la fin de l'opération " plan vert " en Guyane et la possibilité de compléter les mesures nouvelles au titre de la réserve parlementaire.

Il a ensuite précisé que la loi d'orientation sur les départements d'outre-mer devrait comprendre trois volets :

- un volet économique destiné à prévoir des dispositions appelées à se substituer à celles de la " loi Perben " venant à expiration en mars 2000 ;

- un volet consacré à l'approfondissement de la décentralisation outre-mer, qui s'inscrirait dans le prolongement d'une mission confiée à deux parlementaires pour faire des propositions concernant la répartition des compétences entre les différentes collectivités locales ainsi que d'éventuels transferts de compétences de la part de l'Etat ;

- enfin, un troisième volet destiné à permettre une meilleure insertion des départements d'outre-mer dans leur environnement culturel et régional.

M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, a ensuite abordé le problème posé par l'immigration clandestine. Après avoir évoqué la situation particulière de la commune de Saint-Martin en Guadeloupe, qui compte 11.000 étrangers en situation régulière et plus de 5.000 en situation irrégulière sur une population totale de 35.000 habitants et où le contrôle de l'immigration est particulièrement difficile en raison de l'absence de frontières contrôlées entre la partie française et la partie néerlandaise de l'île, il a précisé les mesures prises pour améliorer la lutte contre l'immigration clandestine en Guyane, à savoir notamment le renforcement des effectifs de la police et de la gendarmerie et l'organisation d'un dispositif de patrouilles sur les fleuves Maroni et Oyapock. Il a en outre annoncé la conclusion prochaine d'un accord bilatéral avec le Brésil afin de définir un statut pour les populations frontalières.

S'agissant des majorations de traitements dans la fonction publique, le ministre a souligné qu'elles concernaient non seulement la fonction publique de l'Etat mais également la fonction publique territoriale, précisant à cet égard que si l'on devait intégrer dans la fonction publique territoriale les 11.000 " journaliers " communaux à la Réunion il faudrait augmenter de 65 % les impôts locaux. Il a par ailleurs rappelé que le Gouvernement précédent, qui avait tenté de supprimer les surrémunérations pour les nouveaux fonctionnaires dans ce département, avait finalement dû renoncer à une réforme sur cette question particulièrement délicate.

A propos de l'évolution du statut de Mayotte, le ministre a précisé qu'à la suite du rapport des groupes de travail coordonnés par les préfets Bonnelle et Boisadam, une mission serait prochainement conduite par le Gouvernement en vue de parvenir à une solution consensuelle permettant à la fois d'assurer l'enracinement de cette collectivité territoriale au sein de la République française et l'évolution de son statut.

Il a ensuite indiqué qu'à la suite du rapport établi par M. Jean-François Merle, des mesures avaient été prises afin de renforcer les moyens consacrés à la sécurité en Guyane, grâce à la signature d'un contrat local de sécurité, à la création d'une brigade d'intervention à Cayenne et au renforcement des effectifs de la gendarmerie dans le département.

Puis, M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, a rappelé que des amendements, adoptés par l'Assemblée nationale, présentés par M. Migaud, rapporteur général, avec l'approbation du Gouvernement tendaient à prolonger les effets de la " loi Pons " jusqu'en 2005, à prévoir un régime d'agrément des investissements défiscalisés dès le premier franc et non plus seulement au-dessus d'un million de francs, à rétablir les montages en sociétés de personnes écartés l'an dernier dans le dispositif de " tunnelisation " et à encourager l'imputation sur les positions fiscales des entreprises par une modification du régime d'abattement propre à l'outre-mer.

Enfin, le ministre a déclaré que la politique en faveur du logement social dans les départements d'outre-mer se caractérisait par la volonté de mettre en oeuvre une variété de logements sociaux adaptés aux réalités de l'outre-mer mais se heurtait notamment à une difficulté liée au coût des terrains.

Puis M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis sur les crédits des territoires d'outre-mer, a successivement interrogé M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'État à l'outre-mer, sur les résultats de la consultation intervenue le 8 novembre 1998 en Nouvelle-Calédonie et l'avis rendu par le congrès sur l'avant-projet de loi organique relatif au statut, les incidences de la crise du nickel sur l'implantation d'une usine métallurgique en province nord, les projets de développement financés par les 990 millions de francs versés annuellement par l'État à la Polynésie française en application de la convention du 25 juillet 1996, les incidences de la définition d'une citoyenneté calédonienne pour la communauté wallisienne et futunienne installée en Nouvelle-Calédonie, les suites du rapport du groupe de réflexion constitué de quatre experts indépendants sur les missions et les moyens impartis au territoire des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), l'évolution des négociations sur la définition d'un nouveau régime d'association entre les Pays et territoires d'outre-mer (PTOM) et l'Union européenne, le calendrier législatif concernant les territoires d'outre-mer en 1999.

M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'État à l'outre-mer, s'est tout d'abord félicité de la forte participation (74 %) et du score élevé enregistré en faveur du " oui " (72 %) lors de la consultation du 8 novembre tendant à approuver l'Accord de Nouméa. Il a observé que ces résultats constituaient un progrès significatif par rapport à la consultation référendaire de 1988 où le " oui " avait obtenu 63 % en Nouvelle-Calédonie et seulement 57 % dans la province sud. Après avoir rappelé que les représentants du FLNKS (Front de libération nationale kanak socialiste) s'étaient abstenus lors de la consultation du congrès sur l'avant-projet de loi organique traduisant en termes juridiques l'Accord de Nouméa, il a souligné que ce texte avait fait l'objet d'une concertation approfondie et a indiqué qu'il serait examiné en conseil des ministres le 25 novembre prochain. Il a précisé que sa première lecture par l'Assemblée nationale aurait lieu les 22 et 23 décembre et qu'il serait inscrit à l'ordre du jour du Sénat à la fin du mois de janvier ou au début du mois de février pour pouvoir être adopté définitivement au début du printemps. Exprimant le souhait que la démarche consensuelle ayant présidé à son élaboration soit poursuivie, il a indiqué que les nouvelles institutions de la Nouvelle-Calédonie devraient pouvoir être mises en place au mois de juillet 1999.

Après avoir rappelé que la crise du nickel, révélée par la chute des cours, résultait du tarissement des débouchés dû à la situation économique des pays asiatiques, M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'État à l'outre-mer, a estimé qu'elle ne remettait pas en cause à ce jour les accords de Bercy sur l'échange de gisements miniers en vue de la création d'une usine métallurgique en province nord. Il a considéré que les investissements dans ce secteur restaient attractifs du fait du caractère abondant et de la forte teneur du minerai calédonien. Il a souligné l'importance du projet d'usine du nord pour la poursuite du rééquilibrage économique du territoire.

Concernant les projets d'équipement devant contribuer à la reconversion de l'économie polynésienne et financés par un versement annuel de l'État s'élevant à 990 millions de francs sur une période de dix ans, il a indiqué que le dispositif prévu par la convention du 25 juillet 1996 était pleinement opérationnel depuis le début du deuxième semestre 1998, date coïncidant avec la fermeture définitive du Centre d'expérimentation du Pacifique. Après avoir rappelé le détail de ce versement forfaitaire pour l'année 1997, il a indiqué qu'un montant de près de 100 millions de francs avait été affecté à la réalisation d'une série de six projets d'équipement au mois de juillet 1998, les premiers paiements devant intervenir avant la fin de l'année.

Après avoir souligné que la communauté wallisienne et futunienne était plus nombreuse en Nouvelle-Calédonie qu'à Wallis-et-Futuna, il a estimé qu'elle ne serait pas menacée par les mesures protectrices de l'emploi local fondées sur la définition d'une citoyenneté calédonienne dans la mesure où le nouveau dispositif ne concernerait pas les emplois existants.

Concernant la réflexion menée sur la situation des TAAF, il a souligné la nécessité de réaffirmer la souveraineté française sur la zone économique exclusive (ZEE), riche en ressources halieutiques. Il a observé que l'utilisation du Marion Dufresne, navire océanographique effectuant des rotations dans les TAAF, devrait être rationalisée et a indiqué qu'une nouvelle convention serait prochainement élaborée par le secrétariat d'État à l'outre-mer et le ministère de la recherche sur les relations entre ce territoire et l'Institut de recherche et de technologie polaires (IFRTP).

Après avoir rappelé que le Gouvernement avait déposé en début d'année 1997 un mémorandum relatif à la définition d'un nouveau régime d'association entre les PTOM et l'Union européenne, prévoyant l'élaboration d'un programme de développement économique et social et la création d'un fonds spécifique distinct du Fonds européen de développement (FED), il a indiqué que la Commission européenne avait initié une réflexion sur ce sujet en vue d'organiser une réunion de partenariat au début de l'année 1999 à laquelle les élus des PTOM seraient invités à participer.

Concernant les textes à venir consacrés aux territoires d'outre-mer, M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'État à l'outre-mer, a précisé qu'après l'adoption du projet de loi organique relatif à la Nouvelle-Calédonie au début du printemps serait présentée une réforme constitutionnelle pour la Polynésie française. Il a rappelé que le projet de loi relatif aux communes polynésiennes et les quatre projets de loi de ratification des vingt ordonnances, déposés sur le bureau du Sénat et de l'Assemblée nationale, devraient être examinés au cours de l'année 1999.

Après s'être félicité du dialogue qui s'était instauré entre le secrétariat d'État à l'outre-mer et les autorités du territoire, M. Gaston Flosse a souligné l'importance du régime de défiscalisation des investissements effectués outre-mer instauré par la loi Pons pour le développement économique des départements et territoires d'outre-mer. Approuvant la prorogation jusqu'en 2005 de ce dispositif à la suite de l'adoption par l'Assemblée nationale d'un amendement présenté par M. Didier Migaud lors de l'examen du projet de loi de finances pour 1999, il a cependant regretté les modifications relatives à la procédure d'agrément susceptibles de créer de nouveaux freins. Il a rappelé que plusieurs projets d'investissement n'avaient pu être débloqués que grâce à l'intervention du secrétariat d'État à l'outre-mer face à la résistance du ministère du budget. Il a en outre déploré que le système de défiscalisation territorial propre à la Polynésie française et conçu comme devant combiner ses effets avec le dispositif résultant de la loi Pons soit interprété par l'administration des finances comme un système de subvention réduisant d'autant l'avantage fiscal obtenu au titre des investissements agréés.

M. Gaston Flosse a par ailleurs souligné la nécessité de pérenniser la participation de l'État au Fonds intercommunal de péréquation (FIP) prévue par la loi d'orientation jusqu'en 1998.

Après avoir reconnu que le secrétariat d'État à l'outre-mer avait parfois dû intervenir auprès du ministère des finances pour faire aboutir des procédures d'agrément concernant des investissements en Polynésie française, M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'État à l'outre-mer, s'est félicité de l'amendement adopté par l'Assemblée nationale pour proroger le dispositif issu de la loi Pons. Concernant la subvention versée par l'État au territoire au titre du FIP, il a indiqué qu'une disposition tendant à pérenniser ce mécanisme figurait dans le projet de loi relatif aux communes polynésiennes. Il a précisé que si ce texte n'était pas examiné prochainement, il faudrait insérer une disposition spécifique dans un projet de loi de finances rectificative.

M. Jean-Jack Queyranne, ministre de l'intérieur par intérim, a ensuite présenté les crédits du ministère de l'intérieur pour 1999, rappelant tout d'abord que ceux-ci s'élèveront en 1998 à 88 milliards de francs en hausse de 3 % par rapport à 1998 et soulignant que les dépenses en personnel représentaient 80 % de ce budget.

Il a précisé que ces moyens seraient complétés, dans le prochain projet de loi de finances rectificative pour 1998, par un crédit supplémentaire de 500 millions de francs.

Traitant tout d'abord des questions de police nationale, M. Jean-Jack Queyranne, ministre de l'intérieur par intérim, a exposé qu'à la date du 31 décembre 1998, 8.250 adjoints de sécurité auront été recrutés, ce nombre devant être porté à près de 16.000 à la fin de l'année suivante et à 20.000  avant l'été 2000.

Il a indiqué que la professionnalisation des armées entraînerait la suppression de 4.175 emplois de policiers auxiliaires, mais que 4.150 d'entre eux seraient maintenus au cours de l'année 1999. Il a souligné que la pyramide des âges dans la police rendrait nécessaire le recrutement de 25.000 agents d'ici 2003 et que, pour éviter une réduction momentanée du potentiel opérationnel, il avait demandé au Premier ministre l'autorisation de procéder à des recrutements en surnombre dès 1999.

M. Jean-Jack Queyranne, ministre de l'intérieur par intérim, a exposé que le budget de l'intérieur pour 1999 permettrait de prendre des dispositions indemnitaires en faveur des agents d'encadrement des adjoints de sécurité et des gardiens de la paix ainsi que pour les 6.000 gradés et gardiens accédant à la qualification d'officier de police judiciaire à la suite de la loi récemment adoptée par le Parlement.

Il a indiqué que les agents du corps de maîtrise et d'application qui exercent sur la voie publique dans les circonscriptions les plus sensibles verraient revalorisée la prime de fidélisation qu'ils perçoivent à compter de la sixième année de service.

M. Jean-Jack Queyranne, ministre de l'intérieur par intérim, a précisé que les crédits de fonctionnement progresseraient de 2,6 % à structure constante, soulignant que la vétusté du parc des véhicules automobiles justifierait des moyens complémentaires, prévus dans le prochain projet de loi de finances rectificative.

Evoquant ensuite l'équipement de la police, il a fait valoir que les crédits permettraient de mettre en oeuvre la tranche 1999 du programme de réseaux de télécommunications numériques cryptées (ACROPOL). Il a souligné que ce programme serait achevé à l'horizon 2007, et non en 2014, comme prévu précédemment, précisant que les départements du Rhône, de l'Isère, de la Loire et de la Seine-Saint-Denis, ainsi que la région Picardie étaient équipés, la couverture devant s'étendre à la fin de l'année prochaine à Paris, à la " petite couronne " et à la Corse.

Abordant ensuite les questions de sécurité civile, M. Jean-Jack Queyranne,ministre de l'intérieur par intérim, a précisé que les conseils d'administration des services départementaux d'incendie et de secours, issus des lois du 3 mai 1996, avaient tous été installés.

Il a évoqué l'intervention de 250 membres des personnels de sécurité civile aux Antilles lors du passage du cyclone Georges et en Amérique centrale à la suite des ravages commis par le Cyclone Mitch.

Il a exposé que la professionnalisation des unités militaires de sécurité civile, nécessaire du fait de la suppression du service national, conduirait à la concentration des moyens humains et matériels dans des unités totalement opérationnelles, impliquant en particulier la fermeture de celle de Rochefort-sur-Mer.

Il a souligné l'effort important engagé pour l'équipement de la sécurité civile, citant l'exemple de la location d'un Hercule C 130 dont les capacités se sont avérées complémentaires de celles des Canadair récemment acquis.

Il a annoncé la mise en oeuvre en 1999, à la suite d'un mouvement social au mois de juillet dernier, d'un plan de trois ans de revalorisation indemnitaire en faveur des pilotes de Canadair.

Il a souligné l'importante mission de la cellule de déminage dont le plan de modernisation serait poursuivi avec la remise à niveau d'un centre de déminage.

Traitant ensuite de l'administration centrale et territoriale, M. Jean-Jack Queyranne, ministre de l'intérieur par intérim, a exposé que les crédits de fonctionnement seraient maintenus et a souligné que les services avaient dû faire face en 1998 à des opérations substantielles, comme celles relatives à la régularisation des étrangers et au lancement de la pastille verte.

Il a indiqué que l'action sociale en faveur des personnels constituait une priorité et a confirmé la construction d'hôtels de police à Strasbourg, Lyon et Nice, précisant que chaque projet impliquait des autorisations de programme d'un montant de 200 à 250 millions de francs.

M. Jacques Larché, président, a constaté que l'Etat n'avait pas souhaité rechercher des formules de coopération avec les départements dans ce domaine.

A M. René-Georges Laurin, rapporteur pour avis des crédits de la sécurité civile, qui l'interrogeait sur les difficultés de fonctionnement des nouveaux Canadair, M. Jean-Jack Queyranne, ministre de l'intérieur par intérim, a répondu que la société canadienne Bombardier avait accepté de prendre en charge l'essentiel des réparations nécessaires des huit appareils affectés. Il a souligné que les résultats positifs en matière de lutte contre les incendies de forêt notamment en Méditerranée étaient liés aux dépenses d'investissement engagées.

M. René-Georges Laurin, rapporteur pour avis, s'est ensuite préoccupé du coût pour les collectivités territoriales de la départementalisation des services d'incendie et de secours et des dispositions statutaires et indemnitaires résultant des lois du 3 mai 1996 et des textes pris pour leur application.

S'inquiétant du transfert aux collectivités du financement de la totalité de l'allocation de vétérance, qui résulterait de l'adoption d'une proposition de loi prochainement soumise à la commission des lois, il s'est étonné de ce que cette initiative n'ait pas été prise sous la forme d'un projet de loi qui aurait donc été soumis à l'examen du Conseil d'Etat.

Il a enfin interrogé le ministre sur l'état d'avancement de ses réflexions concernant la recherche de ressources supplémentaires susceptibles d'alléger les charges des collectivités territoriales.

En réponse, M. Jean-Jack Queyranne, ministre de l'intérieur par intérim, a fait valoir que le coût moyen de la départementalisation était évalué à 240 F par habitant, cette dépense constituant à ses yeux le prix de la sécurité.

Il a évalué à 10 millions de francs l'incidence financière des dispositions statutaires et, s'agissant des dispositions indemnitaires, il a estimé difficile de procéder à une évaluation précise de leur coût supplémentaire, la situation nouvelle devant être comparée à des cas de figure variables selon les départements. Il a convenu que cette incidence pourrait être élevée dans certains d'entre eux.

S'agissant de la recherche de ressources complémentaires pour la sécurité civile, M. Jean-Jack Queyranne, ministre de l'intérieur par intérim, a évoqué l'hypothèse d'une taxe additionnelle sur les contrats d'assurance, formulée par un député au cours du débat budgétaire à l'Assemblée nationale, faisant observer cependant que ces contrats faisaient déjà l'objet d'une taxation pour couvrir les calamités naturelles. Il a également évoqué l'hypothèse d'une taxation sur l'utilisation des autoroutes, indiquant que sa réflexion sur le sujet devait se poursuivre.

M. Jacques Larché, président et M. René-Georges Laurin, rapporteur pour avis, ont rappelé l'incohérence du financement des secours qui dépend du service sollicité, l'intervention du SAMU étant couverte par la sécurité sociale et celle des pompiers par les collectivités territoriales.

Après avoir souhaité connaître les résultats du programme de modernisation des préfectures engagé depuis plusieurs années, M. Daniel Hoeffel, rapporteur pour avis des crédits consacrés à l'administration territoriale et aux collectivités locales, a souligné la lassitude de beaucoup de maires qui ne pensaient pas solliciter un nouveau mandat.

Rappelant les causes qui pouvaient expliquer ce malaise, notamment l'inflation normative, il s'est demandé s'il ne justifiait pas des réponses plus déterminées, en particulier en ce qui concerne l'amélioration du statut de l'élu, une mise en oeuvre plus réaliste des normes nouvelles, ou encore la simplification des textes applicables aux collectivités locales.

Après avoir fait observer que le nouveau contrat de croissance et de solidarité n'intégrait pas le problème essentiel de l'évolution des charges de plus en plus diverses et souvent liées à des politiques décidées par l'Etat seul, le rapporteur pour avis s'est demandé si la maîtrise des charges imposées aux collectivités locales ne devait pas être le corollaire d'une modération de l'évolution de leurs recettes.

Puis, abordant la réforme fiscale voulue par le Gouvernement, M. Daniel Hoeffel, rapporteur pour avis, s'est interrogé sur la conciliation possible entre la suppression de la base " salaires " de la taxe professionnelle avec la prochaine réforme de l'intercommunalité qui entendait encourager le développement de la taxe professionnelle d'agglomération. Il a en outre souhaité connaître les perspectives de mise en oeuvre de la réforme des évaluations cadastrales, en particulier pour le calcul de la taxe d'habitation.

M. Daniel Hoeffel, rapporteur pour avis, s'est en outre demandé si le renforcement du rôle des pays, prévu par le projet de loi d'orientation relatif à l'aménagement et au développement durable du territoire, n'aboutirait pas à les institutionnaliser au risque de compliquer encore plus la carte territoriale.

Enfin, rappelant que le groupe de travail sur les chambres régionales des comptes, présidé par M. Jean-Paul Amoudry, avait formulé des propositions équilibrées en vue d'une modernisation du contrôle financier, le rapporteur pour avis a souhaité savoir si le Gouvernement entendait prendre en compte ces réflexions.

M. Jacques Larché, président, a alors fait observer que le contrôle de légalité n'apportait aucune garantie au regard du contrôle financier, l'absence d'observations de la part du premier sur la légalité d'un acte ne protégeant pas les collectivités locales contre la mise en cause ultérieure par la chambre régionale des comptes à propos du même acte.

M. Jean-Jack Queyranne, ministre de l'intérieur par intérim, a tout d'abord indiqué que le montant des autorisations de programme destinées à l'investissement immobilier des préfectures serait stable en 1999. Il a fait observer que les préfectures devaient réaliser des investissements à la fois pour maintenir leur parc immobilier, mais aussi pour l'adapter, notamment en vue d'améliorer l'accueil des usagers et de prendre en compte les nouvelles technologies de communication. Il a relevé qu'il était souvent difficile pour les préfets de gérer un parc immobilier qui avait vieilli.

S'agissant du malaise ressenti par beaucoup de maires quant aux conditions d'exercice de leur mandat, M. Jean-Jack Queyranne a considéré qu'une réflexion était nécessaire sur le statut de l'élu. Il a rappelé que l'Assemblée nationale avait prévu dans le projet de loi relatif au non cumul des mandats une revalorisation des indemnités des maires. Il a en outre considéré qu'il serait nécessaire de veiller à une plus grande sécurité juridique des actes des collectivités locales.

M. Jacques Larché, président, a alors regretté qu'un sondage récent faisant état de la lassitude de beaucoup de maires repose sur un présupposé erroné selon lequel les communes de plus de 10 000 habitants formeraient un bloc uniforme.

Abordant la question des charges des collectivités locales, M. Jean-Jack Queyranne a fait valoir que ces dernières avaient entrepris, au cours des trois dernières années, un gros effort de rationalisation de leur gestion. Il a néanmoins admis que le poids des dépenses de personnel constituait un vrai problème et relevé que les collectivités locales devaient supporter les charges résultant de l'application des accords salariaux.

Puis le ministre de l'intérieur a considéré qu'en dépit de la suppression de la base " salaires " de la taxe professionnelle, la taxe professionnelle d'agglomération resterait néanmoins attractive. Il a exposé que le premier ministre avait indiqué que la réforme des évaluations cadastrales interviendrait en 1999. Notant qu'il avait été envisagé d'inclure cette réforme dans le prochain collectif budgétaire, il a fait observer que le Gouvernement avait choisi, en définitive, de présenter un texte spécifique, en raison à la fois du nombre de dispositions en cause et de la réalisation préalable de simulations sur l'impact de cette réforme.

Après avoir rappelé que le contrôle de légalité ne liait ni le juge financier, ni le juge pénal, M. Jean-Jack Queyranne a reconnu que les divergences d'appréciation entre les différents contrôles pour un même acte constituaient un vrai problème pour les maires.

Relevant que le rapport du groupe de travail sur les chambres régionales des comptes avait formulé un certain nombre de propositions, notamment sur le régime de la gestion de fait, le contrôle de la gestion, ou encore en vue de la création de pôles de compétences auprès des préfets, le ministre de l'intérieur a indiqué que ce rapport était en cours d'examen afin de déterminer les conclusions qui pourraient en être tirées.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis des crédits police-sécurité, a fait part de son inquiétude concernant le recrutement massif d'adjoints de sécurité, majoritairement dotés d'une arme après une formation de deux mois. Il a insisté pour que soit assurée la qualité du recrutement et de l'encadrement de ces jeunes, notamment en région parisienne où avait été constaté un déficit de candidatures, et il a suggéré qu'ils ne soient dotés d'une arme qu'après un an d'exercice de leurs fonctions.

Se montrant préoccupé par les 25.000 départs à la retraite de policiers attendus dans les cinq ans à venir, il a considéré qu'il était indispensable de procéder systématiquement à des recrutements anticipés pour éviter les vacances de poste pendant la durée de formation des personnels.

Il s'est étonné de la baisse des crédits de formation consacrés aux écoles, la jugeant paradoxale au regard de l'émergence de nouveaux besoins de formation et de la priorité annoncée par le Gouvernement en la matière, concrétisée par la création d'une direction de la formation.

Il a critiqué le manque de concertation qui avait entouré le projet de redéploiement territorial des forces de police et de gendarmerie et a craint que les fermetures de commissariats ou de brigades de gendarmerie ne s'opèrent au détriment de la sécurité des communes concernées.

Soulignant les retards importants en matière d'équipement des services, il a souhaité connaître l'affectation de la dotation de 500 millions de francs dont le ministre avait annoncé l'inscription dans le projet de loi de finances rectificative.

Après avoir rappelé que M. José Balarello, dans son rapport établi au nom de la commission d'enquête du Sénat, présidée par M. Paul Masson, sur la régularisation des étrangers en situation irrégulière, avait stigmatisé l'institution, par cette procédure, de " clandestins officiels ", M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis, a interrogé le ministre sur le bilan de l'opération et les intentions du Gouvernement concernant les personnes non régularisées.

Il a enfin souhaité connaître les suites qui seraient données au rapport de M. Alex Türk établi au nom de la mission d'information de la commission des Lois, présidée par M. Paul Masson, sur le suivi du processus européen de coopération policière, concernant tant la structure du ministère de l'Intérieur que son rôle au niveau des instances de coopération européenne.

En réponse, M. Jean-Jack Queyranne, ministre de l'Intérieur par intérim, a indiqué que les adjoints de sécurité étaient encadrés par des fonctionnaires titulaires, indemnisés à cet effet. Il a considéré que ces emplois permettraient à des jeunes, qui n'en auraient pas eu la possibilité, notamment ceux issus des quartiers défavorisés, d'entrer dans la police, 40 % des postes proposés aux concours de recrutement devant à l'avenir être réservés aux adjoints de sécurité ayant trois ans d'activité. Tout en reconnaissant que des problèmes de recrutement, d'ailleurs en voie de résolution, étaient apparus dans certains départements, il a jugé que le recours aux adjoints de sécurité était dans l'ensemble satisfaisant. Concernant l'armement, il a considéré qu'il fallait se montrer prudent en la matière, mais il a rappelé que l'armement des policiers auxiliaires après un mois de formation n'avait pas posé de problèmes.

M. Jacques Larché, président, a craint que la qualité des adjoints de sécurité soit moindre que celle des policiers auxiliaires qui avaient donné toute satisfaction.

Soulignant la priorité accordée à la formation des policiers,M. Jean-Jack Queyranne, ministre de l'Intérieur par intérim, a annoncé la tenue, au mois de février, d'assises nationales de la formation.

Il a confirmé que le Premier ministre avait autorisé le recrutement anticipé de 1.200 à 1.400 policiers pour lisser l'effet des départs à la retraite.

Concernant les redéploiements territoriaux des forces de police et de gendarmerie, il a affirmé qu'aucune décision n'avait été prise, dans l'attente du résultat de la concertation complémentaire menée par M. Fougier, conseiller d'Etat.

Il a annoncé qu'une grande partie des 500 millions de francs inscrits au projet de loi de finances rectificative serait consacrée à l'équipement et au fonctionnement de la police nationale, et notamment au système ACROPOL.

Retraçant le bilan de l'opération de régularisation des étrangers, il a indiqué que sur 143.000 demandes, 80.000 environ avaient été acceptées, des recours hiérarchiques et gracieux étant encore en cours d'examen. Reprenant les propos tenus le jour même par le Premier ministre à l'Assemblée nationale, il a affirmé qu'il ne saurait être question de régulariser l'ensemble des sans-papiers, les 50.000 personnes dont la régularisation aurait été refusée devant être convoquées par l'office des migrations internationales pour se voir proposer une aide au retour et, le cas échéant, être invitées à quitter le territoire.

Evoquant la coopération policière internationale, il a souligné que la présidence autrichienne de l'Union européenne était particulièrement préoccupée par les questions d'asile et d'immigration.

Mercredi 18 novembre 1998

- Présidence de M. Jacques Larché, président.

Nomination de rapporteurs

La commission a tout d'abord procédé à la nomination de rapporteurs pour les textes suivants :

- M. Guy Cabanel pour le projet de loi constitutionnelle n° 985 (AN, XIe législature), relatif à l'égalité entre les femmes et les hommes (sous réserve de son adoption par l'Assemblée nationale et de sa transmission) ;

- M. Pierre Fauchon pour le projet de loi constitutionnelle n° 1072 (AN, XIe législature), modifiant l'article 88-2 de la Constitution (sous réserve de son adoption par l'Assemblée nationale et de sa transmission) ;

- M. Jean-Jacques Hyest pour le projet de loi organique relatif à la Nouvelle-Calédonie (sous réserve de son dépôt, de son adoption par l'Assemblée nationale et de sa transmission) ;

- M. Luc Dejoie pour le projet de loi n° 555 (1997-1998), portant réglementation des ventes de meubles aux enchères publiques ;

- M. Patrice Gélard pour les propositions de loi n°s 1118, 1119, 1120, 1121 et 1122 (AN, XIe législature) relatives au pacte civil de solidarité (sous réserve de leur adoption par l'Assemblée nationale et de leur transmission).

Justice - Conseil supérieur de la magistrature (pjlc n° 6) : Examen des amendements

Puis, la commission a procédé, sur le rapport deM. Charles Jolibois, à l'examen des amendements sur le projet de loi constitutionnelle n° 6 (1998-1999), adopté avec modifications par l'Assemblée nationale, relatif au Conseil supérieur de la magistrature.

Après les observations de MM. Charles Jolibois, rapporteur, Robert Badinter, Patrice Gélard et Jacques Larché, président, la commission a tout d'abord émis un avis défavorable à l'amendement n° 1 présenté par M. Michel Charasse, tendant à insérer un article additionnel avant l'article 1er afin de créer des juridictions particulières chargées de juger les magistrats dont la responsabilité pénale ou civile serait mise en cause pour des actes accomplis dans l'exercice de leurs fonctions.

Un débat, auquel ont participé MM. Charles Jolibois, rapporteur, Jacques Larché, président, Robert Badinter, Patrice Gélard et Pierre Fauchon, s'est ensuite engagé au sujet de l'amendement n° 2 présenté par M. Michel Charasse à l'article 1er, tendant à prévoir des poursuites disciplinaires à l'encontre des magistrats du parquet en cas de non respect des instructions générales du ministre de la Justice.

M. Charles Jolibois, rapporteur, a indiqué que cet amendement était motivé par une préoccupation qu'il partageait, à savoir le souci d'assurer le respect par le parquet des instructions générales du garde des sceaux, mais que cette question serait traitée par la loi organique. Il a en outre précisé que le texte adopté pour l'article 65 de la Constitution disposait déjà que le Conseil supérieur de la magistrature statuerait comme conseil de discipline à l'égard des magistrats du parquet et que la proportion de non-magistrats avait été renforcée au sein de ce conseil.

M. Patrice Gélard a jugé légitime la préoccupation manifestée par M. Charasse, rappelant que les magistrats étaient les seuls à se juger eux-mêmes.

M. Jacques Larché, président, a fait observer que ce problème avait été dans une certaine mesure résolu par l'accroissement de la proportion de non-magistrats au sein du Conseil supérieur de la magistrature, appelé à statuer comme instance disciplinaire à l'égard des magistrats.

M. Pierre Fauchon, après avoir jugé assez équilibrée la nouvelle composition retenue pour le Conseil supérieur de la magistrature, a considéré que l'amendement posait le problème général des relations hiérarchiques au sein du parquet et des moyens d'assurer l'efficacité des instructions générales du garde des sceaux, mais que ce problème serait réglé par la loi organique.

M. Robert Badinter a estimé qu'on ne pourrait pas éluder le débat sur la responsabilité des magistrats au regard du renforcement de leurs garanties d'indépendance.

Après avoir rappelé que les magistrats relevaient le cas échéant des juridictions pénales de droit commun, il a distingué la question de leur responsabilité civile dans la mesure où celle-ci était toujours couverte par l'Etat, lequel ne se retournait jamais contre le magistrat mis en cause. Il a en outre précisé qu'en matière disciplinaire, il y avait eu un accroissement du nombre des poursuites au cours des dernières années et qu'une forme de publicité était donnée à ces poursuites.

A l'issue de ce débat, la commission a émis un avis défavorable à l'amendement n° 2 présenté par M. Michel Charasse.

PJLF pour 1999 - Outre-mer - Département d'outre-mer : Examen du rapport pour avis

La commission a ensuite procédé, sur le rapport de M. José Balarello, à l'examen pour avis des crédits des départements d'outre-mer pour 1999.

En préambule, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a précisé que l'avis qu'il présentait portait sur les crédits alloués aux quatre départements d'outre-mer (Guadeloupe, Guyane, Martinique et La Réunion) et aux deux collectivités territoriales à statut particulier de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon. Il a rappelé le régime juridique applicable à ces départements et collectivités d'outre-mer, ainsi que quelques données générales concernant leur situation économique et sociale, marquée à la fois par un taux de chômage très élevé et par des niveaux de vie largement supérieurs à ceux des pays environnants.

Abordant ensuite la présentation des crédits, le rapporteur pour avis a tout d'abord constaté que les dotations du secrétariat d'Etat à l'outre-mer ne représentaient que 11 % seulement de l'ensemble des crédits de l'Etat affectés aux départements et collectivités territoriales d'outre-mer.

Après avoir relevé une augmentation marquée des crédits de paiement, mais une baisse des autorisations de programme, il a évoqué les deux grandes priorités du budget du secrétariat d'Etat à l'outre-mer, à savoir les actions en faveur de l'emploi et l'aide au logement social.

Il a par ailleurs noté une stabilité des crédits affectés aux départements et collectivités d'outre-mer par le ministère de l'intérieur et une progression de ceux provenant du ministère de la justice et permettant le financement de la poursuite d'un important programme immobilier concernant la rénovation des palais de justice et des établissements pénitentiaires.

M. José Balarello, rapporteur pour avis, a ensuite estimé que des efforts seraient encore nécessaires pour améliorer l'exercice des missions régaliennes de l'Etat dans les départements d'outre-mer, ainsi que l'avait notamment souligné le rapport établi par M. Jean-François Merle, chargé par le Gouvernement d'une mission relative à la situation de la Guyane.

Le rapporteur pour avis a en effet constaté, dans ces départements, une stabilisation de la délinquance à un niveau élevé, une progression soutenue de l'activité des juridictions, une surpopulation carcérale persistante, ainsi qu'une immigration clandestine préoccupante, tout particulièrement dans la commune de Saint-Martin en Guadeloupe, en Guyane et à Mayotte.

Il a en outre souligné le problème récurrent posé par les surrémunérations des fonctionnaires affectés outre-mer, estimant qu'il faudrait lui apporter une solution en dépit des difficultés rencontrées lors des précédentes tentatives de réforme.

Puis, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a rappelé que l'adaptation du droit applicable aux départements d'outre-mer et à Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon s'était poursuivie cette année avec la publication de quinze ordonnances prises en application de la loi d'habilitation du 6 mars 1998.

Il a par ailleurs précisé que la situation des départements d'outre-mer au regard du droit communautaire s'était trouvée confortée par l'adoption du nouvel article 299-2 du traité d'Amsterdam.

Enfin, le rapporteur pour avis a évoqué les perspectives d'évolutions statutaires des départements d'outre-mer, dans le cadre des adaptations permises par l'article 73 de la Constitution.

Il a notamment précisé qu'une consultation des habitants de Mayotte sur l'avenir statutaire de la collectivité devrait avoir lieu d'ici l'an 2000, que des propositions avaient été formulées en vue d'une division en deux départements de l'Ile de La Réunion et que les élus des Iles du nord, en Guadeloupe, souhaitaient voir reconnu un statut particulier pour ces îles.

En conclusion, après avoir rappelé que M. Jean-Jacques Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, avait annoncé la nomination prochaine de deux parlementaires en mission, chargés de formuler des propositions sur l'approfondissement de la décentralisation dans les départements d'outre-mer, ainsi que la présentation d'un projet de loi d'orientation dans le courant de l'année 1999, M. José Balarello, rapporteur pour avis, a proposé à la commission de donner un avis favorable à l'adoption des crédits du secrétariat d'Etat à l'outre-mer pour 1999, ramenés aux montants proposés par la commission des finances.

A l'issue de cette présentation, M. Christian Bonnet a interrogé le rapporteur sur la justification des propositions de bidépartementalisation de La Réunion.

Après avoir rappelé la décision du Conseil constitutionnel à l'origine de l'institution de régions monodépartementales dans les départements d'outre-mer, M. Jacques Larché, président, a relevé le coût particulièrement élevé, pour les finances publiques, des surrémunérations des fonctionnaires affectés outre-mer.

M. Michel Duffour a souhaité obtenir des précisions sur les amendements de réduction des crédits présentés par la commission des finances. Le rapporteur pour avis a précisé que ces amendements tendaient, dans un souci de maîtrise de l'évolution des dépenses publiques, à une réduction forfaitaire des crédits de fonctionnement et d'intervention, mais non des crédits d'investissement, de l'ensemble des ministères autres que les ministères régaliens.

Suivant la proposition de son rapporteur pour avis, la commission a alors décidé de donner un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés aux départements d'outre-mer et aux collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon dans le projet de budget du secrétariat à l'outre-mer pour 1999, ramenés aux montants proposés par la commission des finances.

PJLF pour 1999 - Intérieur + Police et sécurité : Examen du rapport pour avis

La commission a ensuite procédé, sur le rapport deM. Jean-Patrick Courtois, à l'examen pour avis des crédits de la police et sécurité.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis,
a indiqué que le budget de la police s'élevant à 29,11 milliards de francs connaissait une croissance de 2,9 % par rapport à l'année précédente, légèrement supérieure à celle de l'ensemble du budget, mais insuffisante pour répondre aux attentes en matière de sécurité.

Il a constaté que la baisse de 1,86 % de la criminalité enregistrée en 1997 était due pour la plus grande part à la diminution des vols liés à l'automobile et aux deux-roues résultant des progrès des systèmes antivols. Mais il a souligné que la délinquance avait été multipliée par six depuis 1950 et que le sentiment d'insécurité des citoyens n'avait pas diminué, alimenté par la recrudescence d'une délinquance de proximité de plus en plus violente. Il a noté à cet égard que les coups et blessures volontaires avaient doublé en dix ans et continué à croître de 8,60 % en 1997. Il a estimé que l'augmentation de la violence dans les transports en commun justifiait que soient renforcées les sanctions des infractions commises à l'encontre des personnels.

Il a considéré que la faiblesse du taux d'élucidation des infractions de proximité alliée au nombre important d'affaires classées par les parquets encourageait un sentiment d'impunité et dissuadait les citoyens de porter plainte.

Il s'est montré particulièrement préoccupé de l'accroissement de la délinquance des mineurs et de son caractère de plus en plus violent et précoce et il a estimé que la lutte contre cette délinquance devait être commencée à la base par un véritable apprentissage de la citoyenneté, les petites infractions ne devant pas être laissées sans réponse, les parents devant être responsabilisés et les meneurs éloignés de leur quartier d'origine.

Il a insisté sur la nécessité d'une lutte efficace contre la toxicomanie tant en ce qui concerne l'action interne que la coopération internationale, estimant que la politique du Gouvernement devait être à cet égard ferme et sans ambiguïté.

Il a rappelé que la recherche des auteurs de l'assassinat du préfet Claude Erignac nécessitait la mobilisation des services spécialisés en matière de terrorisme qui avaient par ailleurs mené des actions contre les groupes armés islamistes au moment de la coupe du monde de football et permis l'arrestation d'activistes de l'ETA militaire basque.

Concernant la lutte contre l'immigration irrégulière, il a souligné l'émergence forte d'une immigration irakienne d'origine kurde, concentrée pour une grande part à la frontière italienne. Faisant référence à la notion de " clandestins officiels " mise en évidence par M. José Balarello dans son rapport établi au nom de la commission d'enquête sur les régularisations, présidée par M. Paul Masson, il a considéré que la régularisation de l'ensemble des sans-papiers ne pourrait que créer un appel d'air à l'immigration irrégulière et aboutir à une démotivation totale des services compétents.

Il a indiqué que le Gouvernement donnait priorité à une politique de sécurité de proximité à travers les contrats locaux de sécurité et les emplois-jeunes que sont les adjoints de sécurité et les agents de médiation sociale.

Il a fait part de ses inquiétudes concernant le recrutement massif d'adjoints de sécurité, armés après deux mois de formation et dont la qualité semblait laisser à désirer, notamment en région parisienne où un déficit de candidatures avait été constaté. Prenant acte de la déclaration du ministre lors de son audition de la veille de réserver aux adjoints de sécurité 40 % des postes de policiers mis au concours, il a craint que le niveau de recrutement de la police ne régresse de ce fait, alors que la tendance actuelle était à une élévation certaine du niveau des agents.

M. Jacques Larché, président, a considéré comme particulièrement élevée cette proportion de 40 % de postes réservés aux adjoints de sécurité.

M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur pour avis, a ensuite critiqué l'absence de concertation qui avait entouré la mise en oeuvre du projet de redéploiement territorial des forces de police et de gendarmerie faisant suite au rapport de MM. Roland Carraz et Jean-Jacques Hyest, et il a craint que les redéploiements envisagés ne s'opèrent au détriment de la sécurité des communes concernées.

Après avoir évoqué la réforme de la préfecture de police de Paris et le projet de loi sur les polices municipales, il a abordé l'examen proprement dit des crédits de la police pour 1999.

Faisant ressortir le poids des dépenses de personnels qui s'élèvent à près de 84 % du total dans une administration qui gère 127.000 agents, dont 113.000 personnels actifs, il a indiqué que l'évolution de celles-ci était en grande partie conditionnée par l'accord salarial de la fonction publique de février 1998. Il a retracé les mouvements affectant les effectifs budgétaires se résumant principalement dans la création de 7.600 postes d'adjoints de sécurité, la suppression de 4.500 policiers auxiliaires et la transformation, en application de la loi d'orientation, d'emplois du corps de conception et de direction et du corps de commandement et d'encadrement en emplois du corps de maîtrise et d'application. Concernant les mesures catégorielles, il s'est interrogé sur le caractère insuffisamment incitatif de la prime dite " OPJ 16 ", créée au bénéfice des agents du corps de maîtrise et d'application qui deviendraient officiers de police judiciaire, pour un montant net mensuel de 90 francs, déduction faite de la prime d'agent de police judiciaire.

Il s'est montré très préoccupé de l'insuffisante gestion prévisionnelle des effectifs au regard des 25.000 départs à la retraite de policiers attendus dans les années à venir. Considérant qu'il était impératif de procéder à des recrutements anticipés systématiques pour éviter les vacances de postes pendant la durée de la formation des personnels, il a estimé que le recrutement en surnombre de 1.400 agents annoncé par le ministre serait insuffisant.

En matière de formation, il s'est déclaré très étonné de constater une diminution des crédits consacrés aux écoles, la jugeant paradoxale au moment où était créée une direction de la formation et où des besoins nouveaux émergeaient, notamment à l'égard des adjoints de sécurité.

Concernant les crédits de fonctionnement et d'équipement, il a constaté qu'ils permettraient la poursuite dans des conditions satisfaisantes des programmes informatiques en cours ainsi que l'extension du système Acropol à la région parisienne et à la Corse mais qu'ils seraient insuffisants pour rattraper le retard en matière de véhicules et de parc immobilier. Il a noté que le ministre, lors de son audition de la veille, avait annoncé, sans donner de précision sur sa répartition exacte, l'inscription dans le projet de loi de finances rectificatives d'un crédit supplémentaire de 500 millions de francs au titre du fonctionnement et de l'équipement des services.

Il a craint que, faute de moyens suffisants, la police ne fonctionne en amateur face à une délinquance qui se professionnalise.

Evoquant le bilan d'application de la loi d'orientation et de programmation de la sécurité du 21 janvier 1995, il a noté que ses objectifs financiers avaient été complètement abandonnés tout comme le principe du recrutement de 5.000 agents administratifs.

Sur le plan européen, il a rappelé les conclusions du rapport établi par M. Alex Türk, au nom de la mission d'information de la commission des lois, présidée par M. Paul Masson, sur le suivi du processus européen de coopération policière. Il a appelé de ses voeux la ratification rapide des conventions de coopération transfrontalière passées avec nos voisins en application de la convention d'application de l'accord de Schengen. Notant que la convention Europol était entrée en vigueur le 1er octobre 1998, il a regretté qu'un accord n'ait pu être trouvé sur l'autorité de contrôle et que sept pays, dont la France, n'aient pas encore ratifié le protocole sur les privilèges et immunités des fonctionnaires.

Estimant en conclusion que le budget de la police ne traduisait pas réellement la priorité annoncée par le Gouvernement en matière de sécurité, il a proposé à la commission de s'en remettre à l'avis de la commission des finances sur le vote des crédits.

M. Christian Bonnet après avoir insisté sur l'extrême importance de la mise en oeuvre opérationnelle du système Acropol, a obtenu du rapporteur la confirmation que l'hypothèse d'achèvement du réseau en 2007 n'était pas remise en cause. Il a souligné les risques de dégradation de la qualité des personnels que pouvait présenter un recrutement massif tel celui devant intervenir dans les années à venir. Observant qu'en période de chômage la nécessité de trouver un emploi primait sur la vocation, il a considéré que la motivation des personnels pouvait être un meilleur gage d'adaptation aux fonctions de gardien de la paix que la détention de diplômes trop élevés.

M. Alex Türk, donnant des précisions sur les négociations tendant à la mise en place de l'autorité de contrôle d'Europol, qu'il était amené à suivre en tant que représentant du Sénat à la Commission nationale de l'informatique et des libertés, a indiqué que l'Allemagne avait, concernant le comité d'appel de cette autorité, une conception juridictionnelle que la France et quelques pays latins ne partageaient pas.

Sur le redéploiement territorial des forces de police et de gendarmerie, M. Jean-Jacques Hyest, tout en reconnaissant que la procédure n'avait pas été mise en oeuvre de manière satisfaisante, a considéré qu'une réorganisation territoriale était indispensable pour tenir compte des disparités résultant à la fois des évolutions démographiques et des caractéristiques de la criminalité, dans la mesure où, dans un contexte de maîtrise des dépenses publiques, il n'était pas envisageable d'augmenter de 3000 policiers et 1200 gendarmes les effectifs dans les zones sensibles tout en laissant en place par ailleurs des forces de sécurité sous-employées.

M. José Balarello, a craint que les redéploiements ne conduisent à diffuser l'insécurité à travers tout le pays, au moment où la délinquance commençait à toucher les zones rurales, et il a plaidé pour que les forces de sécurité restent proches des habitants sur l'ensemble du territoire.

M. Jacques Larché, président, faisant ressortir le caractère dissuasif pour la délinquance de la présence de forces de sécurité, a considéré qu'il fallait prendre en compte le risque d'évolution défavorable de la criminalité dans les communes où celles-ci seraient amenées à disparaître.

M. Pierre Jarlier après avoir fait part des mauvaises conditions dans lesquelles avaient été menée la concertation dans son département, a souligné que la suppression d'une brigade de gendarmerie pourrait retirer toute chance de survie à certaines zones rurales.

M. Simon Sutour
, partageant l'avis des orateurs précédents, a considéré que la notion de territoire devait être prise en compte au même titre que celle de population et a souligné l'importance, dans une optique d'aménagement du territoire, du maintien des brigades de gendarmerie en zone rurale.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission a décidé de s'en remettre à l'avis de la commission des finances sur le vote des crédits de la section police-sécurité du ministère de l'intérieur.

PJLF pour 1999 - Outre-mer - Territoires d'outre-mer : Examen du rapport pour avis

La commission a enfin procédé, sur le rapport de M. Jean-Jacques Hyest, à l'examen pour avis des crédits des territoires d'outre-mer pour 1999.

Après avoir rendu hommage au travail accompli par M. Jean-Marie Girault, en charge depuis de nombreuses années des textes relatifs aux territoires d'outre-mer au sein de la commission des Lois, M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis, a observé que les crédits affectés à ces territoires dans le projet de loi de finances pour 1999 étaient en très légère progression.

Il a souligné que la forte augmentation de l'ordre de 7 % du budget du secrétariat d'Etat à l'outre-mer bénéficiait essentiellement aux départements d'outre-mer, la part de ce budget consacrée aux territoires d'outre-mer, qui ne représentait qu'environ 11 % de l'effort global consenti en leur faveur, subissant une baisse de près de 5 % qui s'expliquait pour l'essentiel par la non reconduction de la subvention versée

à la Polynésie française au titre du Fonds intercommunal de péréquation (FIP).

Après avoir rappelé la contribution respective du ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, du ministère de la défense, du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, du ministère de l'intérieur et du ministère de la justice dans les crédits alloués aux territoires d'outre-mer, il a précisé que la légère régression du montant de l'agrégat " développement économique et social " dans le budget du secrétariat d'Etat à l'outre-mer résultait principalement de la réduction de la subvention de l'agence de développement de la culture canaque, du fait de l'achèvement du Centre culturel Jean-Marie Tjibaou, et de la diminution des crédits affectés à la section générale du Fonds d'investissement pour le développement économique et social (FIDES).

Il a observé que si 61 % des crédits alloués aux territoires d'outre-mer dans le budget du secrétariat d'Etat à l'outre-mer revenaient à la Nouvelle-Calédonie, l'effort consenti dans l'ensemble du budget de l'Etat en leur faveur bénéficiait en premier lieu à la Polynésie française.

Puis M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis, a fait le point des évolutions politiques et institutionnelles des territoires d'outre-mer au cours de l'année écoulée.

Se félicitant de la forte participation et du score obtenu par le " oui " lors de la consultation du 8 novembre dernier en Nouvelle-Calédonie, il a observé que chacune des trente-trois communes avait approuvé l'Accord de Nouméa alors qu'au référendum de 1988 six d'entre elles avaient exprimé un vote de rejet. Il a rappelé que la politique contractuelle d'aide au développement menée depuis cette date en application des accords de Matignon avait permis de renforcer les infrastructures, en particulier en province nord et dans la province des îles, et a souhaité que le projet de création d'une usine métallurgique dans le nord, crucial pour la poursuite du rééquilibrage économique, ne soit pas remis en cause par la crise du nickel.

Après avoir indiqué que le dispositif institutionnel résultant des lois statutaires du 12 avril 1996 fonctionnait de façon satisfaisante en Polynésie française, il a précisé qu'une réforme constitutionnelle consacrant une nouvelle avancée statutaire pour ce territoire était envisagée. Ayant rappelé que la fermeture du Centre d'expérimentation du Pacifique et le démantèlement corrélatif des sites d'essais nucléaires avaient été achevés au cours de l'été 1998, il a observé que le mécanisme de financement compensatoire résultant de la convention du 25 juillet 1996 conclue entre l'Etat et le territoire était désormais pleinement opérationnel pour favoriser la reconversion de l'économie polynésienne.

Il a indiqué qu'aucune évolution statutaire n'était à ce jour envisagée pour Wallis-et-Futuna et a relaté les assurances données par M. Jean-Jack Queyranne, secrétaire d'Etat à l'outre-mer, sur les conséquences de l'Accord de Nouméa pour l'importante communauté wallisienne et futunienne implantée en Nouvelle-Calédonie.

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis, ayant rappelé que le siège du territoire des Terres australes et antarctiques françaises avait été transféré à la Réunion, M. José Balarello s'est interrogé sur le nombre de navires bénéficiant du pavillon Kerguelen.

Après avoir présenté les évolutions normatives et les travaux de codification bénéficiant aux territoires d'outre-mer, M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour avis, a souligné que les pays et territoires d'outre-mer (PTOM) français souhaitaient une modernisation de leurs liens avec l'Union européenne et qu'une réflexion sur la définition d'un nouveau régime d'association était actuellement menée au sein de la Commission européenne.

Sous le bénéfice de l'ensemble de ces observations, la commission des lois a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés aux territoires d'outre-mer dans le projet de budget du secrétariat d'Etat à l'outre-mer pour 1999, aux montants proposés par la commission des finances.