M. François PATRIAT, rapporteur spécial
IV. UNE PÉNURIE DE MOYENS QUI S'ACCOMPAGNE D'UNE POLITIQUE DE TRANFERTS DE CHARGES HORS DU BUDGET DE L'ETAT
A. TRANSFERT DE CHARGES VERS LES OPÉRATEURS POUR ASSURER LA GESTION DES DEMANDEURS D'EMPLOI
Un certain nombre de dotations semblent stabilisées :
- Pôle Emploi bénéficiera du maintien de sa subvention à son niveau de 2010 et 2011 soit 1 360 millions d'euros, conformément à l'engagement de l'Etat (convention tripartite), illustrant ainsi le fait que la RGPP ne peut s'appliquer à un opérateur qui doit faire face à un nombre accru de demandeurs d'emploi ;
- la dotation globale aux missions locales est maintenue, comme en LFI pour 2011, à 179 millions d'euros et le financement des structures de l'insertion par l'activité économique est lui aussi préservé à son niveau de 2011 (207 millions d'euros).
Déduction faite de l'inflation, il faut toutefois souligner qu'à moyens constants, en volume, ces opérateurs font face à des charges croissantes de gestion que l'Etat ne compense pas. Ainsi, Pôle emploi doit-il traiter près de 30 % de demandeurs d'emploi supplémentaires par rapport à 2009 et devrait terminer l'année 2011 en déficit de 110 millions d'euros 12 ( * ) . En outre, les missions locales voient, à moyens constants, le nombre de jeunes en contact avec le réseau augmenter chaque année (de 1,13 million en 2007 à 1,32 million en 2010).
B. TRANSFERT DE CHARGES VERS LES PARTENAIRES SOCIAUX POUR ASSURER LE FINANCEMENT DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE
La raréfaction des moyens budgétaires a également conduit le Gouvernement à renouveler en 2012 ses mesures de débudgétisation de la politique de l'emploi .
Dans les mêmes conditions qu'en 2011, l'article 63 du présent projet de loi de finances a pour objet de prélever une nouvelle contribution de 300 millions d'euros en 2012, sur le fonds paritaire de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP) et d'affecter cette contribution à plusieurs organismes intervenant dans le champ de l'emploi et de la formation professionnelle. Les fonds ainsi prélevés contribueront au financement en 2012 de la politique publique conduite dans ce domaine. La contribution prélevée sur ce fonds sera affectée :
- d'une part, à l' Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), pour le financement de la mise en oeuvre des titres professionnels du ministère de l'emploi, à hauteur de 75 millions d'euros (dont 54 millions d'euros pour la mise en oeuvre des titres professionnels délivrés par le ministère chargé de l'emploi et 21 millions pour la participation de l'AFPA au service public de l'emploi) ;
- d'autre part, à l' Agence de services et de paiements (ASP), pour le financement de la rémunération des stagiaires de la formation professionnelle, à hauteur de 200 millions d'euros ;
- enfin à Pôle emploi , pour le financement de l'allocation en faveur des demandeurs d'emploi en formation, à hauteur de 25 millions d'euros.
Le FPSPP souligne que cette nouvelle ponction entraînera un déficit de trésorerie en 2012 qui a été exposé à votre rapporteur spécial par ses responsables. Aussi, s'agissant d'une opération de débudgétisation de dépenses qui ont vocation à figurer dans le budget de l'Etat, il vous sera proposé de supprimer l'article 63.
C. TRANSFERT DE CHARGES VERS LES RÉGIONS POUR REMPLIR LES OBJECTIFS DE L'ETAT EN MATIÈRE D'APPRENTISSAGE
Enfin votre rapporteur spécial souhaite exprimer sa préoccupation devant l'évolution des crédits consacrés par l'Etat à la formation professionnelle et à l'apprentissage.
En premier lieu, il relève que la dotation générale de décentralisation versée par l'Etat aux régions au titre des compétences transférées en matière de formation professionnelle et d'apprentissage ne sera pas revalorisée en 2012 en fonction de l'inflation et restera fixée à 1,7 milliard d'euros. Depuis 2008, cette dotation connaît un quasi-gel.
Evolution de la dotation générale de
décentralisation
Formation professionnelle et
apprentissage
(en millions d'euros)
2008 |
2009 |
2010 |
2011 |
2012 |
|
Montant de la dotation de décentralisation |
1 686 |
1 688 |
1 702 |
1 702 |
1 702 |
Source : annexe au projet de loi de finances pour 2012 « Formation professionnelle »
Or dans le même temps, la dépense globale des régions consacrée à la formation professionnelle, à l'apprentissage, à l'accueil, l'information et l'orientation s'est inscrite sur une courbe en croissance (4 milliards en 2008, 4,8 milliards en 2009 et 4,9 milliards en 2010) 13 ( * ) . Certes, l'augmentation des budgets régionaux résulte des transferts de compétences opérés par l'Etat, notamment pour les actions de formation mises en oeuvre par l'AFPA.
La réduction continue des crédits affectés aux contrats de professionnalisation (17,4 millions d'euros pour 2012 au lieu de 17,8 millions en 2011 et 72,9 millions en 2010, soit une réduction de 55 millions d'euros en deux ans) ainsi que le prélèvement de 300 millions d'euros sur le FPSPP n'en sont pas moins inquiétants car ils n'illustrent pas seulement des transferts de charges mais un désengagement de l'Etat de la politique de formation professionnelle.
* 12 Déjà, la loi de finances rectificative pour 2009 a procédé à une annulation de 135 millions d'euros en CP au titre de la réduction de la subvention pour charge de service public de Pôle emploi. L'exécution budgétaire montre que la dotation de l'Etat a été inférieure de 187 millions d'euros à la prévision votée en loi de finances initiale, soit 1 173 millions d'euros au lieu de 1 360 millions d'euros.
* 13 Source : annexe au projet de loi de finances pour 2012 « Formation professionnelle ».