ARTICLE 77 : CONCOURS FINANCIERS DE L'ÉTAT AU PROFIT DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE
I. TEXTE DU PROJET DE LOI
I. - Il est créé à compter de 2011 :
1° Une dotation globale d'autonomie pour la Polynésie française ;
2° Une dotation territoriale pour l'investissement des communes de la Polynésie française ;
3° En application des dispositions de l'article 169 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, un concours de l'État au financement des investissements prioritaires de la Polynésie française.
II. - L'État verse annuellement à la Polynésie française une dotation globale d'autonomie.
Son montant est fixé à 90 552 000 euros pour l'année 2011. Il évolue à compter de 2012 comme la dotation globale de fonctionnement mentionnée à l'article L. 1613-1. La dotation annuelle fait l'objet de versements mensuels.
III. - Au paragraphe 3 de la sous-section 3 de la section IV du chapitre III du titre VII du livre cinquième de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales, il est créé un sous-paragraphe 5 ainsi rédigé :
« Sous-paragraphe 5 : Dotation territoriale pour l'investissement des communes
« Article L. 2573-4-1. - Il est institué une dotation territoriale pour l'investissement au profit des communes de la Polynésie française.
« Cette dotation est affectée au financement des projets des communes et de leurs établissements en matière de traitement des déchets, d'adduction d'eau et d'assainissement des eaux usées.
« Son montant est fixé à 9 055 200 euros en 2011. Il évolue à compter de 2012 selon les critères définis à l'article L. 2334-32 pour la dotation globale d'équipement des communes.
« Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application du présent article. »
II. RAPPORT ASSEMBLÉE NATIONALE N° 2857 TOME III (2010-2011) ANNEXE 30
Observations et décision de la Commission :
Le présent article propose de substituer à la dotation globale de développement économique (DGDE) versée par l'État à la Polynésie française en application d'une convention de 2002, trois dotations distinctes : une dotation globale d'autonomie pour la Polynésie française, une dotation territoriale pour l'investissement des communes et un concours au financement des investissements prioritaires de la Polynésie française.
La réforme proposée répond aux critiques formulées à l'endroit de la DGDE, et devrait permettre une meilleure utilisation des fonds publics. Certaines dispositions du présent article mériteraient cependant d'être précisées.
I.- LA DOTATION GLOBALE DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE FAIT L'OBJET DE CRITIQUES ASSEZ SÉVÈRES.
A.- L'ARRÊT DES ESSAIS NUCLÉAIRES A ÉTÉ COMPENSÉ PAR LA CRÉATION D'UN FONDS DOTÉ CHAQUE ANNÉE DE 150 MILLIONS D'EUROS.
? Décidée en 1995 par le Président de la République nouvellement élu, la cessation des essais nucléaires a entraîné pour la Polynésie française une perte d'activité économique , et par voie de conséquence de ressources publiques. L'évaluation préalable de l'article 77, annexée au projet de loi de finances, rappelle en effet que le centre d'expérimentation du Pacifique (CEP) engendrait pendant la période des essais nucléaires 70 % du produit intérieur brut de la Polynésie française.
Afin de compenser ces pertes, une convention pour le renforcement de l'autonomie économique de la Polynésie française a été conclue entre l'État et le territoire le 8 août 1996.
? L'article 3 de cette convention a créé le fonds pour la reconversion de l'économie de la Polynésie française (FREPF) . Le FREPF, dont la durée de vie était limitée à dix ans, se voyait doté chaque année de 150,92 millions d'euros :
- 33,54 millions d'euros pour compenser dans le budget de fonctionnement de la Polynésie française la diminution des ressources fiscales et douanières résultant de l'arrêt des essais ;
- le solde étant versé au FREPF proprement dit, afin de financer des dépenses d'investissement.
? Fixées par la convention du 25 juillet 1996, les modalités de fonctionnement du fonds prévoyaient la présentation à l'État, par la Polynésie française, d'un plan stratégique de développement, soumis à l'agrément préalable d'un comité paritaire composé de représentants de l'État et du territoire. Les crédits (autorisations de programme et crédits de paiement) étaient délégués au fur et à mesure des réalisations.
B.- LA DOTATION GLOBALE DE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE S'EST SUBSTITUÉE AU FONDS EN 2003.
? Une nouvelle convention pour le renforcement de l'autonomie économique de la Polynésie française, conclue le 4 octobre 2002 entre le Premier ministre et le président du Gouvernement de la Polynésie française a créé la DGDE, qui s'est substituée au FREPF dès le 1 er janvier 2003, soit plus de trois ans avant l'échéance théorique du fonds.
Un reliquat de subventions au titre du FREPF a d'ailleurs été versé chaque année entre 2003 et 2010, en plus de la DGDE. Ce reliquat résulte des retards pris par l'État dans le versement du FREPF.
À la différence du FREPF, la DGDE n'est pas limitée dans le temps.
? Inscrite jusqu'en 2005 au budget des charges communes de l'État, la DGDE relève depuis lors de la mission Outre-mer , et plus spécifiquement de l'action 6 Collectivités territoriales du programme 123 Conditions de vie outre-mer .
Le montant annuel de la DGDE est le même que celui arrêté pour le FREPF, soit 150,92 millions d'euros.
Ce montant se décompose, en 2010, de la manière suivante 1 ( * )
- 88,2 millions d'euros de DGDE-Investissement ;
- 22 millions d'euros de DGDE-Fonctionnement (cf. infra ) ;
- 40,7 millions d'euros au titre de la compensation des recettes fiscales et douanières.
L'encadré suivant, extrait de l'évaluation préalable annexée au projet de loi de finances, présente les mesures financées par la DGDE.
Mesures financées par la DGDE - Extrait de l'évaluation préalable
La DGDE intervient, comme la FREPF précédemment, pour le financement des investissements suivants :
- aide aux entreprises et en particulier à la reconversion des entreprises et des emplois affectés par l'arrêt du CEP (4 %) ;
- réalisation de grands projets d'équipements publics nécessaires au développement économique et social (61 %) ;
- aide à la création d'emploi en particulier des jeunes (1 %) ;
- logements sociaux et en priorité ceux qui favorisent l'emploi de la main-d'oeuvre locale (12 %) ;
- aides aux investissements des communes et de leurs groupements (2 %) ;
- mise en oeuvre d'une société de financement chargée de faire des prêts anticipatifs et de prendre des participations dans le capital d'entreprises constituées ou créées en Polynésie (1 %) ;
- aide en faveur de l'emploi et de la formation professionnelle (19%).
Ces actions s'inscrivent dans les cinq grandes orientations retenues dans le programme quinquennal 2008-2012 pour atteindre les objectifs fixés à moyen terme :
- créer un environnement macro-économique favorable au développement du secteur productif ;
- développer les infrastructures nécessaires à la mise en oeuvre et au fonctionnement du secteur productif ;
- maintenir une cohésion sociale en répondant au défi du chômage et de la pénurie d'habitat social ;
- assurer la cohérence des actions menées par la collectivité et les communes ;
- garantir les conditions d'un développement géographique équilibré dans l'ensemble des archipels.
C.- LES MODALITÉS DE FONCTIONNEMENT DE LA DGDE FONT L'OBJET DE CRITIQUES.
? À la logique d'agrément préalable des projets d'investissement définie par la convention créant le FREPF, la convention instituant la DGDE a substitué un dispositif de suivi a posteriori .
L'État verse en effet la DGDE sans préalablement agréer les projets qu'elle a vocation à financer. Le Gouvernement de la Polynésie affecte les crédits reçus aux projets du plan quinquennal d'investissement prévu à l'article 5 de la convention du 4 octobre 2002. La Polynésie notifie l'achèvement de ces projets à l'État, pièces administratives et comptables à l'appui.
La convention se contente de stipuler, en son article 8, que « les projets financés par la DGDE font l'objet d'un suivi annuel d'exécution [...] et d'un compte rendu d'exécution du Gouvernement de la Polynésie française à l'État ».
Interrogé par le Rapporteur spécial sur les modalités de contrôle de l'emploi des fonds de la DGDE, le ministère chargé de l'Outre-mer indique que c'est seulement depuis fin 2008 que la Polynésie française respecte ses obligations en matière de transmission des rapports quinquennaux d'utilisation des crédits.
? La convention de 2002 a pourtant institué un comité de suivi paritaire , composé de six représentants de l'État et de six représentants de la Polynésie française. Co-présidé par le haut-commissaire de la République et le président du Gouvernement de Polynésie, ce comité est supposé se réunir une fois par an. Mais il s'est réuni seulement deux fois, en juillet 2006 et en mai 2007.
? Les modalités de versement de la DGDE ont été critiquées, au motif qu'elles ne permettent pas de contrôler de manière satisfaisante l'emploi des fonds publics.
Ainsi, dans son rapport spécial sur le projet de loi de finances pour 2007, le sénateur Henri Torre relevait que « le fait de verser des dotations libres d'emploi n'offre pas réellement la possibilité de contrôler l'utilisation des fonds » 2 ( * ) .
Avant le sénateur Torre, notre collègue René Dosière avait déposé et rapporté en 2004 une proposition de résolution tendant à la création d'une commission d'enquête sur l'utilisation des fonds publics en Polynésie française, dont la DGDE représente l'essentiel. Cette proposition de résolution a été rejetée par la commission des Lois 3 ( * ) .
? Une pratique a par ailleurs été mise en place depuis 2008 par le ministère chargé de l'Outre-mer, tendant à verser la DGDE par tranches , après réception d'un certain nombre d'informations demandées à la Polynésie française sur les dépenses financées par la dotation.
Cette pratique a eu une traduction budgétaire en 2010 : le montant des crédits de paiement (137 millions d'euros) a été distingué du montant des autorisations d'engagement (150 millions d'euros) afin, selon les informations alors transmises à la commission des Finances, d'« acter du principe d'un financement des opérations d'investissement au fur et à mesure de leur réalisation ».
Cette pratique aurait fait naître un reliquat, estimé à 55,5 millions d'euros fin 2009, malgré un abondement en gestion de 25,5 millions d'euros. Ce reliquat devrait être soldé en 2011 (cf. infra ).
? Si aucun élément probant ne permet d'évoquer d'éventuels détournements de fonds, il faut en revanche constater que l'utilisation de la DGDE n'a pas été parfaitement conforme à son objet initial .
Censée financer des opérations d'investissement, la DGDE est en fait largement utilisée pour des dépenses de fonctionnement. La part de ces dépenses a atteint 50 % en 2005, ce qui a conduit l'État à conclure avec la Polynésie française un avenant à la convention de 2002, limitant cette part à 20 % (fléchés vers des programmes d'aides à l'emploi et à la formation professionnelle). Mais deux avenants à la convention de 2002, signés en 2009, ont prévu une modification pour 2009 et 2010 de la clé de répartition entre investissements (60 %) et fonctionnement (40 %).
? Dans son rapport public 2007, la Cour des comptes a résumé l'ensemble des critiques pouvant être formulées sur la DGDE, dans les termes reproduits dans l'encadré ci-après.
Extrait du rapport public 2007 de la Cour des comptes
Le contrôle de l'utilisation de la dotation globale de développement économique (DGDE), principale contribution de l'État au budget de la collectivité d'outre-mer [...] révèle bien les limites du rôle joué par l'État dans ce domaine.
La Polynésie française a l'obligation, dans le cadre de la convention du 4 octobre 2002 qui institue la DGDE, d'établir un programme quinquennal d'investissement. Ce programme présente l'inconvénient de n'être pas chiffré puisqu'il ne fixe que des orientations. La collectivité est toutefois tenue de présenter chaque année à l'État la tranche annuelle suivante quantifiée du programme d'investissement. L'exécution de ces projets donne lieu ensuite à un compte rendu annuel d'exécution. Un comité mixte paritaire, chargé du suivi de l'exécution de la convention, peut formuler des recommandations sur la mise en oeuvre du programme. Toutefois, il aura fallu attendre près de quatre ans pour voir la création de ce comité, en février 2006.
Par ailleurs, à l'achèvement de chaque projet, la collectivité est tenue de produire à l'État un dossier détaillé que le haut-commissaire adresse ensuite à la chambre territoriale des comptes pour qu'elle puisse exercer ses contrôles habituels. Le seul dossier communiqué à ce titre, concernant les aménagements de l'atoll de Fakarava, terminés en juillet 2003, n'a été transmis à la chambre qu'en juin 2005. Depuis cette date, aucun autre dossier n'a été communiqué, ni à la chambre ni aux services de l'État, alors que 13 autres opérations financées par la DGDE sont achevées.
L'analyse faite sur les comptes rendus annuels montre qu'il est particulièrement difficile de suivre les opérations initialement prévues au titre de la DGDE ou de l'ex-FREPF en raison des nombreux changements intervenus, soit dans l'origine du financement, soit dans le contenu des opérations. [...]
Le contrôle des opérations financées par la DGDE est d'autant plus nécessaire que le nouveau dispositif mis en place par la convention de 2002 présente plus de souplesse pour la collectivité que le régime antérieur d'octroi des subventions d'équipements par l'État, comme l'ont bien montré les péripéties du financement de la construction de nouvel hôpital de Papeete. La précipitation observée lors du lancement de ce projet par la collectivité, en 1999, avait conduit l'État à suspendre sa participation financière au titre de cette opération, dans l'attente de la réalisation d'études préalables relatives au coût de fonctionnement futur du nouvel équipement et à son impact sur l'équilibre des comptes sociaux. Avec la mise en place de la DGDE, l'État est devenu, ultérieurement, le principal financeur de ce projet estimé à 276,5 millions d'euros, alors que les incertitudes sur le financement des coûts de fonctionnement de la structure hospitalière demeurent.
D.- LA MESURE DE LA PERFORMANCE DE LA DGDE EST DÉFAILLANTE.
Un indicateur dédié à la DGDE a été introduit dans le projet annuel de performances pour 2008. Rattaché à l'objectif 4 ( Accompagner le développement des collectivités d'outre-mer ), il mesure la Part des crédits de la DGDE dans les investissements financés par la Polynésie française . Dans une logique de développement endogène, la cible est une réduction de cette part à horizon 2012.
Cet indicateur ne renseigne pas le Parlement sur l'emploi des fonds de la DGDE, pas plus que sur leur efficacité.
PART DES CRÉDITS DE LA DGDE DANS LES INVESTISSEMENTS FINANCÉS PAR LA POLYNÉSIE FRANÇAISE
(en %)
2007 réalisation |
2008 réalisation |
2009 prévision
|
2009
|
2010 prévision |
2011 cible |
|
Part des crédits DGDE dans les investissements de l'année mobilisant la DGDE |
83,3 |
76,4 |
75 |
75 |
63 |
50 |
Part des crédits DGDE dans les investissements de l'année de la Polynésie française |
39,2 |
40 |
40 |
30 |
30 |
30 |
Source :projet annuel de performances 2010
*
Les critiques adressées à la DGDE ont conduit le Gouvernement à réfléchir à sa réforme. Annoncée pour 2010, elle est finalement proposée dans le présent projet de loi de finances.
*
II.- LA RÉFORME DE LA DGDE PROPOSÉE PAR LE PRÉSENT ARTICLE RÉPOND À DE BONNES INTENTIONS, MAIS SON CONTENU EST IMPARFAIT.
Le I du présent article propose la création, à compter de 2011, de trois dotations :
- une dotation globale d'autonomie pour la Polynésie française ( 1° ) ;
- une dotation territoriale pour l'investissement des communes de la Polynésie française ( 2° ) ;
- un concours de l'État au financement des investissements prioritaires de la Polynésie française ( 3° ).
S'il ne fait pas de doute que ces trois dotations se substitueront à l'actuelle DGDE, il faut remarquer que le texte de l'article ne le prévoit pas expressément. Seuls l'exposé des motifs et l'évaluation préalable annexée au projet de loi de finances l'indiquent.
A.- LA DOTATION GLOBALE D'AUTONOMIE SERAIT UNE DOTATION DE FONCTIONNEMENT DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE.
? Le II apporte quelques précisions sur la dotation globale d'autonomie (DGA).
? La DGA serait, à en croire l'exposé des motifs, « une dotation de fonctionnement de la Polynésie française », qui serait donc libre d'emploi .
? Cette dotation annuelle serait versée par douzième , mensuellement. Cela correspondrait à l'institutionnalisation de la pratique, évoquée supra , du versement par tranche de la DGDE.
? Son montant serait fixé pour 2011 à 90,552 millions d'euros, soit très exactement 60 % du montant de l'actuelle DGDE . La part du fonctionnement dans le montant global des dotations de l'État augmenterait donc de 20 points, puisque ce sont actuellement 40 % de la DGDE qui sont fléchés vers les dépenses de fonctionnement (cf. supra ). Tel n'était pas l'esprit qui a présidé à la création de la DGDE, conçue comme une dotation d'investissement. Mais, dès lors que les besoins de fonctionnement sont importants, autant prévoir expressément leur financement, dans des proportions conformes à la réalité.
? Le montant de la DGA évoluerait « comme la dotation globale de fonctionnement mentionnée à l'article L. 1613-1 ». Le code visé est sans doute le code général des collectivités territoriales (CGCT), mais il n'est pas expressément mentionné par le texte du présent article. De fait, l'article L. 1613-1 est bien celui qui fixe les modalités d'évolution annuelle de la DGF.
L'indexation de la DGA sur la DGF est une nouveauté introduite par le présent article. En effet, la DGDE n'était pas indexée, son montant ayant été fixé et gelé par la convention précitée du 4 octobre 2002.
B.- LA DOTATION TERRITORIALE POUR L'INVESTISSEMENT DES COMMUNES DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE LEUR PERMETTRAIT D'EXERCER PLEINEMENT CERTAINES DE LEURS COMPÉTENCES.
? Le III introduit un sous-paragraphe 5 au paragraphe 3 de la sous-section 3 de la section IV du chapitre III du titre VII du livre cinquième de la deuxième partie du CGCT, qui porte création d'un nouvel article L. 2573-4-1 4 ( * ) . Cet article précise les modalités de fonctionnement de la dotation territoriale pour l'investissement des communes de la Polynésie française.
? Le montant de cette dotation serait en 2011 de 9,0552 millions d'euros, soit exactement 6 % de l'actuelle DGDE .
? À compter de 2012, ce montant évoluerait comme celui de la dotation globale d'équipement des communes (DGE) , selon les critères définis à l'article L. 2334-32 du CGCT.
Cet article prévoit que « chaque année, la loi de finances détermine le montant de la dotation globale d'équipement des communes par application du taux de croissance de la formation brute de capital fixe des administrations publiques prévu pour l'année à venir, tel qu'il est estimé dans la projection économique présentée en annexe au projet de loi de finances ».
Or, l'article 82 du projet de loi de finances prévoit de fusionner la DGE et la dotation de développement rural en une dotation unique, la dotation d'équipement des territoires ruraux. L'indexation sur la DGE prévue par le présent article est donc caduque avant même d'entrer en vigueur.
? Le produit de la dotation territoriale pour l'investissement des communes serait fléché vers le financement d'opérations limitativement définies, à savoir les « projets des communes et de leurs établissements en matière de traitement des déchets d'adduction d'eau et d'assainissement des eaux usées » .
La nature des opérations éligibles sera probablement indiquée dans le décret en Conseil d'État prévu pour préciser les modalités d'application du nouvel article codifié.
Mais le fléchage ainsi prévu paraît de bon sens . Lors de son déplacement en Polynésie française dans le cadre de la préparation du rapport d'application de la LODEOM, le Rapporteur spécial a pu mesurer l'importance, pour la collectivité, du développement d'un réseau moderne de traitement des eaux.
? L'évaluation préalable indique que la dotation doit permettre de financer les projets programmés dans le respect des délais fixés par l'ordonnance n° 2007-1434 du 5 octobre 2007 5 ( * ) pour la mise en oeuvre en Polynésie française des compétences communales suivantes :
- distribution d'eau potable (31 décembre 2015) ;
- assainissement (31 décembre 2020) ;
- traitement des déchets (31 décembre 2011).
La dotation permettrait donc aux communes de Polynésie française d'assumer certaines des compétences qui leur ont été transférées.
C.- LES MODALITÉS DU CONCOURS DE L'ÉTAT AUX INVESTISSEMENTS PRIORITAIRES DE LA POLYNÉSIE FRANÇAISE MÉRITERAIENT D'ÊTRE PRÉCISÉES.
? Le présent article est peu disert sur le concours de l'État au financement des investissements prioritaires de la Polynésie française.
Le 3° du I indique simplement que ce concours est créé à compter de 2011, « en application des dispositions de l'article 169 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ». Le texte de cet article est reproduit dans l'encadré ci-dessous.
Article 169 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004
À la demande de la Polynésie française et par conventions, l'État peut apporter, dans le cadre des lois de finances, son concours financier et technique aux investissements économiques et sociaux, notamment aux programmes de formation et de promotion.
Des conventions entre l'État et la Polynésie française fixent les modalités de mise à la disposition de la Polynésie française, en tant que de besoin, des agents et des services de l'État.
Au cas où les besoins des services publics de la Polynésie française rendent nécessaires les concours d'organismes ou d'établissements publics métropolitains, les modalités de ces concours sont fixées par des conventions passées entre eux et la Polynésie française. Ces concours sont soumis à un avis préalable du haut-commissaire qui doit être informé de leur réalisation.
Selon toute vraisemblance, le concours prévu par le présent article serait versé en application du premier alinéa de l'article 169, qui seul correspond à son objet.
Le dispositif prévu est donc particulièrement flou : il ne permet de connaître ni le montant, ni les modalités de versement, ni la destination des fonds, ni les procédures de contrôle de leur bon emploi.
? Ces précisions seraient sans doute apportées par la convention organisant le concours de l'État. La rédaction de l'article ne permet d'ailleurs pas de savoir si ce concours sera versé en application d'une ou de plusieurs conventions.
De même n'est-il pas possible de savoir, à la seule lecture du texte, si la convention en question sera annuelle ou pluriannuelle. La convention devrait couvrir plusieurs exercices budgétaires , le montant du concours étant fixé annuellement en loi de finances, en application de l'article 169 de la loi organique du 27 février 2004.
? Telle est la présentation faite par l'évaluation préalable, qui précise en outre :
- que la convention déterminera pour chaque opération financée la participation respective de l'État et de la Polynésie française ;
- que « la bonne exécution et le suivi de cette convention seront confiés à un comité de pilotage composé de représentants de l'État et de la Polynésie française [qui] définira la programmation pluriannuelle et fixera le montant et l'échéancier de réalisation des investissements » ;
- que les crédits de paiement seront versés après service fait, « au fur et à mesure de l'avancée réelle des travaux et sur présentation des pièces justificatives ».
L'intention du Gouvernement est donc de mieux contrôler l'emploi des fonds. Il aurait été logique, dès lors, de prévoir dans le présent article un encadrement de la procédure. En l'état, le texte ne garantit pas une plus grande transparence que l'actuelle DGDE , le dispositif conventionnel n'étant par définition pas approuvé par le Parlement.
? L'évaluation préalable du présent article indique que les financements pourraient concerner en particulier le domaine des transports (routier, portuaire et aéroportuaire) et celui de la défense contre les eaux.
? L'exposé des motifs indique que le concours de l'État représenterait 34 % de l'actuelle DGDE , soit 51,31 millions d'euros. Ce chiffre est extrait de la déclaration commune signée le 4 février 2010 par la ministre chargée de l'Outre-mer et le président du Gouvernement de la Polynésie française, prévoyant la suppression de la DGDE et son remplacement par les trois dotations dont le présent article propose la création.
Le projet annuel de performances du programme Conditions de vie outre-mer confirme pour 2011 ce montant en autorisations d'engagement (AE), mais prévoit seulement 7,7 millions d'euros en crédits de paiement (CP).
Le tableau suivant présente la décomposition, au titre de l'année 2011, de la ligne budgétaire consacrée, dans l'action 6 du programme 123, à l' Aide à la reconversion de l'économie polynésienne .
LA RÉFORME DE LA DGDE DANS LE PLF 2011
(en millions d'euros)
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
|
Dotation globale d'autonomie |
90,5 |
90,5 |
Dotation territoriale pour l'investissement des communes |
9 |
9 |
Concours de l'État au financement d'investissements prioritaires |
51,3 |
7,7 |
Solde de la DGDE |
7,9 |
34,2 |
Total |
158,7 |
141,4 |
Source : projet annuel de performances
? Du fait de la réforme prévue de la DGDE, le dispositif de mesure de la performance du PAP évolue, l'indicateur relatif à la DGDE étant supprimé .
L'indicateur 2.1 ( Respect du taux de cofinancement prévu dans les opérations contractualisées ), rattaché à l'objectif 2 ( Accompagner les collectivités d'outre-mer dans leur action en faveur de l'aménagement et du développement durable ), intègre désormais une ligne consacrée au dispositif contractuel de financement des investissements prioritaires.
Ce sous-indicateur encourt les mêmes critiques que l'indicateur lui-même, à savoir qu'il ne mesure nullement la performance des crédits, mais - à peine - les modalités de leur emploi.
*
La Polynésie française a besoin du soutien de l'État. C'est pourquoi les modalités de versement et de contrôle de ce soutien doivent être aussi transparentes que possible.
De ce point de vue, l'intention du présent article est bonne. Toutefois, son contenu n'est pas assez précis pour remplir pleinement les objectifs que le Gouvernement a assignés à la réforme de la DGDE.
*
* *
M. le Rapporteur spécial. Sur le vote de cet article, je m'en remets à la sagesse de la Commission.
La Commission adopte l'article 77 sans modification .
* 1 En autorisations d'engagement.
* 2 Annexe n° 17 au rapport général n° 78, novembre 2006, page 31.
* 3 Rapport n° 1923, novembre 2004.
* 4 Il faudrait en fait lire L. 2573-54-1.
* 5 Portant extension des première, deuxième et cinquième parties du code général des collectivités territoriales aux communes de la Polynésie française, à leurs groupements et à leurs établissements publics.