II. TEXTE ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE LECTURE

Article 66 quater (nouveau)

L'article 47 de la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006 d'orientation agricole est ainsi rédigé :

« Art. 47. - I. - Le code des douanes est ainsi modifié :

« 1° Au I de l'article 266 sexies, il est ajouté un 10 ainsi rédigé :

« «10. À compter du 1 er janvier 2012, toute personne qui distribue par le commerce de détail à titre gratuit ou onéreux au consommateur final des sacs à déchet, en matière plastique, répondant à des caractéristiques définies par décret. » » ;

« 2° Le II du même article est complété par un 7 ainsi rédigé :

« «7. Aux sacs plastiques biodégradables constitués, dans des conditions définies par décret, d'un minimum de 40 % de matières végétales en masse. » » ;

« 3° À l'article 266 septies, il est ajouté un 10 ainsi rédigé :

« «10. La distribution par le commerce de détail à titre gratuit ou onéreux au consommateur final des sacs en matière plastique mentionnés au 10 du I de l'article 266 sexies . » »

« 4° À l'article 266 octies , il est ajouté un 9 ainsi rédigé :

« «9. Le nombre de sacs en matière plastique mentionnés au 10 du I de l'article 266 sexies . » »

« 5° Le tableau du B du 1 de l'article 266 nonies est complété par une ligne ainsi rédigée :

«

- Sacs de caisse à usage unique, en matière plastique :

unité

0,20

» »

II. -  Le I ne s'applique pas si, à la date du 31 décembre 2013, le nombre de sacs plastiques de caisse à usage unique distribués actuellement a été réduit de 99 % par rapport à l'année 2002.

III. RAPPORT SÉNAT N° 111 TOME III (2010-2011)

Commentaire : le présent article a pour objet de taxer les sacs de caisse en plastique à usage unique, en vue de leur disparition définitive.

I. LA DISPARITION PROGRESSIVE DES SACS EN PLASTIQUE

Le nombre de sacs de caisse à usage unique en matière plastique a considérablement diminué depuis 2002, passant de 10,5 milliards à un milliard en 2009. Cela représente un pourcentage d'élimination de 90 %.

Il s'agit d'éradiquer la totalité des sacs restants , soit environ un milliard de sacs de caisse en plastique non biodégradable.

Ces sacs plastiques ont indéniablement des effets néfastes sur l'environnement et entraînent des surcoûts pour les services d'entretien , ce qui pénalise les collectivités locales. Cette question revêt donc un enjeu local important .

L'article 47 de la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006 d'orientation agricole (LOA) prévoit l'interdiction de la distribution de sacs de caisse à usage unique en plastique non-biodégradables à compter du 1 er janvier 2010 , dans des conditions fixées par décret. Un projet de décret d'application avait donc été rédigé puis notifié à la Commission européenne en 2007, au titre de la directive 98/34/CE prévoyant une procédure d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques. Il s'agissait d'interdire la mise sur le marché d'un type d'emballages pourtant autorisé par la directive 94/62/CE relative aux emballages et aux déchets d'emballages. La Commission a donc recommandé aux autorités françaises de recourir à d'autres moyens pour promouvoir l'utilisation de sacs en plastique biodégradables n'entravant pas la libre circulation des produits.

Actuellement, les sacs en plastique ne sont pas taxés en France . Le Gouvernement a décidé de privilégier, au cas par cas, des approches volontaires avec les professionnels concernés. Des accords conventionnels ont notamment été obtenus par les élus locaux. A cet égard, les petits réseaux de distribution sont les plus réticents à s'engager dans une telle démarche, car ils sont moins en mesure d'assumer le surcoût des sacs de caisse biodégradables.

La Belgique a mis en place une taxation semblable à celle qui est proposée par le présent article et a réussi à éradiquer les sacs de caisse à usage unique.

II. LE DISPOSITIF INTRODUIT PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article a pour objectif de faire disparaître totalement l'usage des sacs de caisse en plastique , d'ici le 1er janvier 2012. Pour cela, il propose une taxation de l'usage de ces sacs , en instaurant une nouvelle catégorie de redevables à la TGAP.

Ainsi, le dispositif proposé modifie l'article 266 sexies du code des douanes en ajoutant un alinéa 10 à la liste des personnes qui doivent s'acquitter du paiement de la taxe générale sur les activités polluantes. Il s'agit de « toute personne qui distribue par le commerce de détail à titre gratuit ou onéreux au consommateur final des sacs à déchet, en matière plastique, répondant à des caractéristiques définies par décret ».

De plus, l'article introduit une exonération de la nouvelle composante de la TGAP au profit des « sacs plastiques biodégradables constitués, dans des conditions définies par décret, d'un minimum de 40 % de matières végétales en masse ». Ainsi, un alinéa 7 est introduit au II de l'article 266 sexies du code des douanes.

Par coordination , le dispositif crée un nouvel alinéa 10 à l'article 266 septies du même code, relatif au fait générateur de la taxe, qui introduit « la distribution par le commerce de détail à titre gratuit ou onéreux au consommateur final des sacs en matière plastique ».

De même, il est ajouté un nouvel alinéa 9 à l'article 266 octies du code des douanes, relatif à l'assiette de la TGAP, afin de l'élargir au « nombre de sacs en matière plastique mentionnés au 10 du I de l'article 266 sexies ».

Enfin, le tableau annexé au B du I de l'article 266 nonies est complété par une ligne prévoyant un tarif de 0,20 euro par sac plastique .

Le II du dispositif précise, quant à lui, que, si « la disparition ou quasi-disparition » des sacs en plastique est constatée avant l'échéance fixée, soit le 31 décembre 2013, alors l'article deviendra caduc .

Cet article a été adopté à l'initiative de notre collègue député Charles de Courson, malgré l'avis défavorable de la commission des finances de l'Assemblée nationale et du Gouvernement .

Le rapporteur général du budget a notamment rappelé qu'un tel amendement avait été adopté, il y a quelques années, mais qu'il s'était heurté à de grandes difficultés pratiques d'application.

Aucune estimation du rendement que pourrait procurer cette nouvelle taxe n'existe à ce jour. Cependant, s'il reste environ un milliard de sacs de caisse à usage unique à éliminer, on peut en déduire qu'à raison de 20 centimes d'euro par sac, la taxe représenterait une recette de l'ordre de 200 millions d'euros .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Si votre rapporteur général souscrit à son principe, le présent article pose toutefois plusieurs problèmes , qui tendent à le rendre inopérant .

A. DES PROBLÈMES RÉDACTIONNELS

D'une part, cet article pose un problème de rédaction , dans la mesure où il se réfère alternativement aux sacs à déchets et aux sacs de caisse, ce qui crée une confusion , car les deux notions ne sont pas tout à fait identiques. En effet, les sacs à déchets désignent les sacs poubelles domestiques tandis que les sacs de caisse désignent les sacs en plastique à usage unique distribués au supermarché pour ranger les courses. Votre rapporteur général vous propose un amendement rédactionnel visant à clarifier le texte , qui ne s'appliquerait qu'aux sacs de caisse à usage unique en matière plastique.

D. DES DIFFICULTÉS OPÉRATIONNELLES

Ensuite, les modalités de mise en oeuvre concrète du dispositif proposé ne sont pas opérationnelles .

Ainsi, il n'est pas précisé à partir de quelles données pourra être calculée une éventuelle diminution de 99 % de la quantité de sacs distribués depuis 2002.

En outre, faut-il déduire d'une rédaction qui dispose que la taxe n'est pas due « si, à la date du 31 décembre 2013, le nombre de sacs plastiques de caisse à usage unique distribués actuellement a été réduit de 99 % par rapport à l'année 2002 » que le texte conduit à taxer au titre de 2012 et à annuler la taxe (rétroactivement ?) si en 2013 l'objectif est atteint ? Faut-il comprendre que la taxe sera appliquée seulement si l'objectif n'est pas atteint (mais alors il existe une contradiction avec l'applicabilité de la taxe à compter de 2012, énoncée au I de l'article) ?

Pour lever cette ambiguïté, et parce que cette taxe n'a pas une logique de rendement mais d'incitation à modifier les comportements, votre rapporteur général vous propose de remplacer le II, en précisant que « la taxe cesse de s'appliquer à compter de l'exercice au titre duquel l'objectif de disparition de la distribution des sacs de caisse à usage unique en matière plastique a été atteint ».

C. UN CALIBRAGE À AMÉLIORER

Notre collègue député Gilles Carrez a également relevé que le dispositif présentait un problème de coût et de calibrage . En effet, il a noté que le sac coûtait un centime d'euro à la production et que la taxe représentait vingt fois ce coût. Cette disproportion ne pourra que susciter de fortes réticences de la part des acteurs du secteur.

On peut objecter à cet argument que, par principe, le montant d'une taxe écologique ne doit pas être fonction du coût de la production, mais être établi en fonction du coût de la nuisance. Toutefois, afin de permettre une mise en oeuvre graduée, votre rapporteur général vous propose d'échelonner le tarif de la taxe, qui serait de 0,1 euro par unité en 2012 puis 0,20 euro par unité à partir de 2013 .

De même, votre rapporteur général propose une modulation du dispositif en faveur des commerces non soumis à la commission départementale d'aménagement commercial , afin de ne pas pénaliser outre mesure les petits commerçants par rapport à la grande distribution.

Parallèlement, il peut être opportun de maintenir la pression sur l'ensemble des acteurs du secteur pour qu'ils élaborent des accords conventionnels et des approches volontaires en vue de réduire le recours aux sacs en plastique . Le Gouvernement a ainsi rappelé, au cours de la discussion à l'Assemblée nationale, que les débats qui ont eu lieu au sein de la grande distribution ont permis d'éliminer la grande majorité des sacs plastiques.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.