IV. DÉBATS SÉNAT PREMIÈRE LECTURE DU 6 DÉCEMBRE 2010

Article 66 quater (nouveau)

M. le président. « Art. 66 quater . - L'article 47 de la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006 d'orientation agricole est ainsi rédigé :

« Art. 47. - I. - Le code des douanes est ainsi modifié :

« 1° Au I de l'article 266 sexies, il est ajouté un 10 ainsi rédigé :

« «10. À compter du 1 er janvier 2012, toute personne qui distribue par le commerce de détail à titre gratuit ou onéreux au consommateur final des sacs à déchet, en matière plastique, répondant à des caractéristiques définies par décret. » ;

« 2° Le II du même article est complété par un 7 ainsi rédigé :

« «7. Aux sacs plastiques biodégradables constitués, dans des conditions définies par décret, d'un minimum de 40 % de matières végétales en masse. » ;

« 3° à l'article 266 septies, il est ajouté un 10 ainsi rédigé :

« «10. La distribution par le commerce de détail à titre gratuit ou onéreux au consommateur final des sacs en matière plastique mentionnés au 10 du I de l'article 266 sexies . » ;

« 4° à l'article 266 octies , il est ajouté un 9 ainsi rédigé :

« «9. Le nombre de sacs en matière plastique mentionnés au 10 du I de l'article 266 sexies . » ;

« 5° Le tableau du B du 1 de l'article 266 nonies est complété par une ligne ainsi rédigée :

« «

- Sacs de caisse à usage unique, en matière plastique

unité

0,20

»

« II. - Le I ne s'applique pas si, à la date du 31 décembre 2013, le nombre de sacs plastiques de caisse à usage unique distribués actuellement a été réduit de 99 % par rapport à l'année 2002. »

M. le président. L'amendement n° II-558 rectifié, présenté par MM. Gouteyron, Braye, Revet et Pierre, Mme Sittler et MM. Fouché et Houel, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Adrien Gouteyron.

M. Adrien Gouteyron. La création d'une taxe sur les sacs en plastique est un sujet récurrent, dont le Parlement a déjà eu l'occasion de débattre voilà quelques années. En l'occurrence, une taxe avait bel et bien été créée, mais, en raison de son extrême complexité, elle est restée dans les cartons et n'a jamais été appliquée.

La taxe prévue à l'article 66 quater , qui ne figurait pas dans le projet de loi de finances initial du Gouvernement, a été introduite par voie d'amendement à l'Assemblée nationale. Je vais tâcher, mes chers collègues, de vous expliquer pourquoi cette initiative me semble inopportune.

Je me fonderai tout d'abord sur la réalité du nombre de sacs actuellement utilisés pour rappeler que, sans même qu'il ait été besoin d'appliquer une taxe, leur nombre est passé en quelques années de 10,5 milliards à 1 milliard.

Le but de cette taxe est donc de s'attaquer au milliard de sacs restant. Toutefois, elle risquerait surtout de pénaliser les petits commerçants, qui sont actuellement les principaux utilisateurs des sacs à usage unique. En effet, dans les grandes surfaces, ils ont été remplacés par des sacs tissés, plus lourds, fabriqués dans les pays asiatiques. Il me semble donc que l'on fait fausse route en voulant instaurer une telle taxe.

En outre, si je vous dis, mes chers collègues, que la Haute-Loire concentre 40 % des activités d'extrusion de polyéthylène, et que près de 3 000 emplois sont concernés, vous comprendrez que je m'intéresse de près à cette question en tant qu'élu de ce département.

J'ajoute que la taxe votée par l'Assemblée nationale représente environ vingt fois le coût du produit initial, ce qui est totalement déraisonnable ! Je sais que M. le rapporteur général a essayé, à travers ses amendements, de remédier à ces difficultés en prévoyant d'instituer une taxe plus modeste, progressive, qui tiendrait compte de la situation des petits commerçants.

Toutefois, pour ma part, je préférerais qu'on renonce purement et simplement à cette taxe. Il me semble que le mouvement de résorption qui s'est amorcé continuera de se poursuivre naturellement. Les industriels font de gros efforts de recherche et il faut leur laisser le temps de les mener à leur terme.

C'est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, d'approuver cet amendement de suppression.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement n'est pas compatible avec ceux que présente la commission.

Ce n'est en effet pas la première fois que nous rencontrons, au détour d'un projet de loi de finances, une taxe de cette nature. Pour ma part, je l'ai soutenue dans son principe dès le départ, tout en souhaitant que la transformation des entreprises et des activités se fasse progressivement, et que les structures commerciales, en particulier le petit commerce et l'artisanat, ne soient pas handicapées par ce dispositif.

Comme chacun sait, les sacs en plastique sont une véritable lèpre pour notre environnement, qu'il soit terrestre, fluvial ou maritime. Quand on habite comme moi une ville qui se situe aux confins de la forêt, il suffit de constater combien d'opérations de nettoyage sont nécessaires chaque année pour combattre ce mal qui ne cesse de se répandre. Et ceux qui habitent non loin du littoral le savent mieux encore ! Les enjeux en termes de préservation de l'environnement sont donc considérables.

L'idée de nos collègues députés mérite ainsi d'être soutenue, pour autant qu'elle soit mise en oeuvre de façon responsable et que les évolutions technologiques permettent aux entreprises de se tourner vers d'autres activités.

Au demeurant, comme le dit très justement Adrien Gouteyron, l'évolution est déjà en cours dans la grande distribution, où, dans la plupart des cas, la substitution s'est déjà opérée, avec, notamment, la mise en place de dispositifs incitatifs, proposés aux consommateurs pour un prix modique.

C'est, en quelque sorte, à une prise de conscience que l'on appelle les consommateurs, aux fins d'améliorer la qualité de notre environnement, de la même façon que nous l'avons fait pour tri sélectif.

La commission souhaiterait donc que M. Gouteyron puisse retirer cet amendement.

Elle préférerait que l'on adapte ce dispositif pour éviter les inconvénients qui ont été signalés : tel sera l'objet des amendements que nous allons présenter dans quelques instants, à condition bien entendu que l'amendement de suppression ne soit pas adopté.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. François Baroin, ministre. Pour une fois, nous allons être à fronts renversés, monsieur le rapporteur général. Le Gouvernement est en effet favorable à l'amendement Gouteyron, pour les raisons suivantes.

En premier lieu, le texte adopté à l'Assemblée nationale est inapplicable : l'assiette de la taxe et l'exonération pour les sacs biodégradables ne sont pas clairement définies, et les redevables, in fine , seront les petits commerçants, ce qui est un comble puisque ce serait l'inverse de ce que nous souhaitions

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Les amendements de la commission visent précisément à corriger ces défauts !

M. François Baroin, ministre. Ces amendements ont effectivement bien identifié les problèmes auxquels nous sommes confrontés.

En second lieu, la création d'une fiscalité ad hoc paraît disproportionnée par rapport à l'objectif visé, qui semble pouvoir être atteint par l'autorégulation des grandes surfaces commerciales, comme en témoigne notamment la réduction très sensible du nombre de sacs en plastique constatée.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Le problème ne se pose plus pour les grandes surfaces !

M. François Baroin, ministre. Il faut voir dans l'amendement adopté par l'Assemblée nationale un appel à redoubler ces efforts, mais, en la matière, l'objectif nous semble déjà assez largement atteint.

Dans cette curieuse inversion des valeurs, où M. le rapporteur général souhaite le maintien d'une taxe alors que le Gouvernement y est défavorable, nous avons, je crois, des arguments solides pour accompagner la démarche de M. Gouteyron.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cette position régressive me surprend !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-558 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 66 quater est supprimé.

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-321, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 4

Remplacer les mots :

des sacs à déchet, en matière plastique

par les mots :

des sacs de caisse à usage unique en matière plastique

II. - Alinéa 6

Remplacer les mots :

sacs plastiques

par les mots :

sacs de caisse à usage unique en matière plastique

III. - Alinéas 8 et 10

Remplacer les mots :

sacs en matières plastique

par les mots :

sacs de caisse à usage unique en matière plastique

L'amendement n° II-123 rectifié bis , présenté par Mme Keller, MM. Faure et Le Grand, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 4

Remplacer les mots :

à déchets, en matière plastique

par les mots :

à usage unique

II. - Alinéas 8 et 10

Remplacer les mots :

en matière plastique

par les mots :

à usage unique

III. - Alinéa 12, tableau

Supprimer les mots :

en matière plastique

L'amendement n° II-322, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 5

Remplacer les mots :

ainsi rédigé

par les mots :

et un 8 ainsi rédigés

II. - Après l'alinéa 6

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« «8. Au titre de l'année 2012, aux personnes mentionnées au 10 du I qui, au titre de leur activité, ne relèvent pas de la commission départementale d'aménagement commercial régie par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie. Au titre de l'année 2013, ces personnes bénéficient d'un abattement de 50 % de la taxe mentionnée au I.» ;

III. - Alinéa 12, tableau

Rédiger ainsi ce tableau :

«

2012

2013

Sacs de caisse à usage unique, en matière plastique

unité

0,10

0,20

»

IV. - Alinéa 13

Rédiger ainsi cet alinéa :

« II. - La taxe cesse de s'appliquer à compter de l'exercice au titre duquel l'objectif de disparition de la distribution des sacs de caisse à usage unique en matière plastique a été atteint. »

Ces trois amendements n'ont plus d'objet.