IV. DÉBATS SÉNAT PREMIÈRE LECTURE DU 7 DÉCEMBRE 2010

Article 64 ter ( nouveau )

( précédemment réservé)

M. le président. « Art. 64 ter . - I. - L'article L. 621-5-3 du code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) À la première phrase du 3°, les mots : « d'un document de référence annuel ou » sont supprimés ;

b) À la fin de la première phrase du 4°, le montant : « 2 000 euros » est remplacé par le montant « 4 000 euros » ;

2° Le II est ainsi modifié :

a) À la fin de la première phrase du a du 3°, le montant : « 5 000 euros » est remplacé par le montant : « 10 000 euros » ;

b) À la première phrase du 4°, le montant : « 500 euros » est remplacé par le montant : « 400 euros » ;

3° Après le II, sont insérés des II bis et II ter ainsi rédigés :

« II bis . - Il est institué une contribution, exigible le 1 er janvier de chaque année, due, à partir d'un seuil de capitalisation boursière d'un milliard d'euros apprécié au 1 er janvier de l'année d'imposition, par les émetteurs français dont les titres de capital sont admis à cette date aux négociations sur un marché réglementé de l'Espace économique européen et par les émetteurs étrangers dont les titres de capital sont admis à cette date aux négociations sur un marché réglementé français lorsque celui-ci est le marché réglementé sur lequel le volume des échanges de titres est le plus élevé. Le montant de cette contribution, compris entre 20 000 euros et 300 000 euros, est fixé en fonction de la capitalisation boursière moyenne de l'émetteur constatée le dernier jour de négociation des trois années précédentes ou, lorsque les titres de capital de l'émetteur sont admis aux négociations sur un marché réglementé depuis moins de trois ans, de sa capitalisation boursière constatée le dernier jour de négociation de l'année précédente. Les tranches du barème progressif de cette contribution, au nombre de cinq, ainsi que les montants correspondants, sont fixés par décret.

« II ter . - Il est institué une contribution annuelle due par les établissements de crédit et les entreprises d'investissement, à l'exception des sociétés de gestion de portefeuille, ayant leur siège en France et habilités au 1 er janvier à exercer le service d'investissement mentionné au 3 de l'article L. 321-1. Le redevable de la contribution est le prestataire de services d'investissement qui établit ses comptes sous forme consolidée, ou, à défaut, celle des entités consolidées du groupe habilitées à exercer le service d'investissement mentionné au même 3 ayant son siège en France dont le montant du produit net bancaire au titre du dernier exercice comptable est le plus élevé. Cette contribution n'est pas due par les prestataires de services d'investissement compris dans le périmètre consolidé d'une société ayant son siège hors de France.

« L'assiette de cette contribution est la fraction excédant un montant de 12 milliards d'euros de l'assiette mentionnée au A du II de l'article L. 612-20. Son taux, fixé par décret, est compris entre 0,06 pour mille et 0,14 pour mille. Cette contribution est liquidée au vu des exigences en fonds propres mentionnées dans l'appel à contribution mentionné au 1° du V du même article L. 612-20. L'Autorité de contrôle prudentiel communique cet appel à l'Autorité des marchés financiers avant le 30 avril. L'Autorité des marchés financiers communique avant le 31 mai aux personnes assujetties le montant de la contribution due. Les personnes assujetties acquittent le paiement correspondant au plus tard le 31 juillet de chaque année. Les contestations du montant des exigences en fonds propres sur lequel cette contribution est assise suivent le régime applicable aux contestations prévues au 3° du V de l'article L. 612-20. Lorsque, en application du VII du même article L. 612-20, l'Autorité de contrôle prudentiel révise le montant des exigences en fonds propres de la personne assujettie à cette contribution, elle communique à l'Autorité des marchés financiers l'appel à contribution rectificatif accompagné de l'avis de réception par la personne assujettie. Lorsque le montant des exigences en fonds propres est révisé à la hausse, le complément de la contribution qui en résulte est exigible à la date de réception de l'appel à contribution rectificatif. Le complément de contribution est acquitté auprès de l'Autorité des marchés financiers, dans les deux mois de son exigibilité. Lorsque le montant des exigences en fonds propres est révisé à la baisse, la personne assujettie peut adresser à l'Autorité des marchés financiers, dans un délai d'un mois après réception de l'appel à contribution rectificatif, une demande écrite de restitution du montant correspondant. Il est procédé à cette restitution dans un délai d'un mois après réception de ce courrier. »

II. - Sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna les modifications apportées par le I à l'article L. 621-5-3 du code monétaire et financier.

M. le président. L'amendement n° II-401 rectifié, présenté par MM. P. Dominati, du Luart et Gilles, Mlle Joissains et M. Milon, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Philippe Dominati.

M. Philippe Dominati. Cet amendement aurait pu être déposé simplement pour le principe. Il porte effectivement sur le dernier article du projet de loi de finances pour 2011, qui tend à créer deux taxes nouvelles. Or il me semble qu'il serait bon de ne pas terminer le texte sur un tel signal.

Cela est d'autant plus nécessaire que ces deux taxes nouvelles concernent l'Autorité des marchés financiers, l'AMF, pour une recette avoisinant 20 millions d'euros, qui doit permettre à cette dernière de répondre à l'élargissement du périmètre de ses missions.

Le rapport parlementaire sur les autorités administratives indépendantes, rendu public le 28 octobre dernier, mentionne parmi ses recommandations la suppression des doublons entre ces autorités administratives indépendantes et les administrations. J'ai bien noté en outre que, en présentant l'amendement qui suit, M. le rapporteur général lui-même apparaît un peu réservé quant à la nécessité d'abonder cette autorité administrative indépendante.

Pour ma part, je souhaite la suppression de l'article 64 ter, car il me semble que l'AMF dispose des moyens suffisants pour remplir ses missions.

J'ai d'ailleurs une question à poser au Gouvernement : est-il vrai que l'AMF dispose de moyens supérieurs à ceux, par exemple, de l'autorité américaine de régulation des marchés financiers, qui semble pourtant avoir un périmètre d'action beaucoup plus vaste, et que les habitudes de fonctionnement de l'autorité française impliquent des frais supérieurs à ceux de l'autorité américaine ?

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement de notre collègue Philippe Dominati s'apparente à une interpellation. En tout cas, il exprime une préoccupation, qui d'ailleurs, pour une part, nous est commune.

L'article 64 ter tend effectivement à créer deux nouvelles taxes affectées à l'Autorité des marchés financiers. La première est une contribution supportée par les émetteurs dont la capitalisation boursière est supérieure à un milliard d'euros, la seconde, une contribution supportée par les grands prestataires de services d'investissement au titre de leurs activités de négociation pour compte propre. En clair, il s'agit là des salles de marchés des grandes banques françaises.

Comme pour les autres taxes affectées à l'AMF, la loi fixerait uniquement un plafond ou une fourchette de taux et il reviendrait au pouvoir réglementaire d'arrêter les taux et les barèmes applicables.

Il m'a semblé que le Gouvernement, par cet article, entendait transférer 30 millions d'euros de plus à l'Autorité des marchés financiers, à savoir 10 millions d'euros pour chacune des deux nouvelles taxes et 10 millions d'euros grâce à des ajustements réglementaires portant sur d'autres taxes existantes.

Notre commission a estimé qu'elle ne disposait pas des informations permettant de justifier ce montant de 30 millions d'euros, d'autant que le niveau de la trésorerie de l'AMF devrait toujours se situer, à la fin de l'année, entre 30 et 35 millions d'euros, c'est-à-dire l'équivalent de cinq à six mois de fonctionnement.

Par ailleurs, l'évaluation préalable dont nous avons connaissance ne comporte aucun élément sur les dépenses prévisionnelles de l'AMF.

Enfin, nous manquons de données sur l'évolution prévisionnelle des taxes déjà affectées à l'AMF.

Donc, monsieur le ministre, ayant manifesté la même exigence pour toute une série d'opérateurs ou d'agences de l'État, par exemple pour le Centre national du cinéma et de l'image animée, il serait anormal que nous ne soyons pas aussi exigeants à l'égard de l'Autorité des marchés financiers.

Voilà pourquoi la commission des finances a présenté un amendement tendant à abaisser le plafond des deux nouvelles taxes, afin de limiter le transfert de ressources à l'AMF à 20 millions d'euros.

Cependant, monsieur le ministre, sans doute vous sera-t-il possible, par les éléments d'information que vous êtes susceptibles de nous apporter, de répondre à nos légitimes préoccupations, ce qui nous permettrait de bien clôturer l'examen des articles non rattachés de la seconde partie de ce projet de loi de finances, par un retrait que j'espère possible et partagé.

M. le président. L'amendement n° II-318, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 9, deuxième phrase

Remplacer le montant :

300 000 euros

par le montant :

200 000 euros

II. - Alinéa 11, deuxième phrase

Remplacer le taux :

0,14 pour mille

par le taux :

0,08 pour mille

Monsieur le rapporteur général, vous avez déjà défendu cet amendement. Je suppose que, dans le même temps, votre présentation valait avis défavorable sur l'amendement n° II-401 ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mon avis valait une demande conditionnelle de retrait !

M. René-Pierre Signé. C'est assez subtil !

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Philippe Richert, ministre. Nous examinons donc deux amendements, le premier tendant à supprimer les deux nouvelles taxes qui offrent des ressources nouvelles à l'AMF, le second visant à limiter la hausse des ressources de l'autorité à 25 millions d'euros.

Nous partageons la préoccupation rappelée par M. le rapporteur général de limiter au strict minimum les moyens de l'Autorité des marchés financiers.

De manière générale, le Gouvernement partage d'ailleurs l'intention de la représentation nationale de veiller à un usage mesuré et efficace des ressources publiques par les autorités administratives indépendantes, intention manifestée notamment dans le rapport parlementaire du 28 octobre dernier.

Je veux néanmoins rappeler que le Parlement a décidé de confier à l'AMF, en plus des responsabilités qui lui incombaient jusqu'alors, trois missions supplémentaires.

Premièrement, elle pourra désormais sanctionner les abus de marché sur les marchés dérivés, notamment des CDS, ou credit default swaps, et des matières premières.

Deuxièmement, elle est chargée de contrôler et surveiller les ventes à découvert.

Troisièmement, elle devra contrôler, surveiller et sanctionner les marchés de carbone.

C'est notamment la commission des finances de la Haute Assemblée qui a souhaité confier ces responsabilités supplémentaires à l'AMF.

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances . C'est vrai !

M. Philippe Richert, ministre. L'autorité doit donc faire face à un nouveau périmètre de travaux. C'est justement pour répondre à ce besoin d'investigations que nous souhaitons lui apporter plus de moyens.

Le plan stratégique de l'AMF prévoit la création de 65 nouveaux emplois entre 2010 et 2012, ce qui fera passer ses effectifs totaux de 404 emplois en 2010 à 469 emplois en 2012. À la fin de l'année 2010, ceux-ci atteindront 420 postes.

Vous comprenez donc bien, mesdames, messieurs les sénateurs, que, tout en ayant la volonté de réduire les dépenses, il est difficile de ne pas permettre une augmentation des moyens de l'AMF.

Pour autant, cet octroi de moyens nouveaux n'exclut pas la recherche d'économies : les programmes d'économie décidés par l'AMF ont permis de réduire les dépenses générales de 1,1 million d'euros en 2009 et de 2,3 millions d'euros en 2010. En outre, la hausse des effectifs se fera à parc immobilier constant.

Par ailleurs, je voudrais rassurer M. Philippe Dominati, à périmètre d'intervention constant, les budgets consacrés, en France, à l'agence de régulation financière se situent en dessous des montants utilisés aux États-Unis. Mais, bien évidemment, le périmètre d'intervention peut varier et nous venons de voir que nous sommes en train d'augmenter celui de l'AMF.

S'agissant de l'interrogation soulevée par notre rapporteur général, je suis prêt à prendre l'engagement devant la Haute Assemblée de limiter à 25 millions d'euros, en 2011, la hausse des ressources de l'AMF décidée par les pouvoirs publics. Je réponds ainsi très concrètement à la demande qu'il a formulée en présentant son amendement.

Ainsi, monsieur le rapporteur général, puisque, dans la pratique, nous répondrons à vos exigences, je vous prie de bien vouloir retirer votre amendement. Je demande également le retrait de l'amendement n° II-401 rectifié.

M. le président. Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° II-318 est-il maintenu ?

M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° II-318 est retiré.

Monsieur Dominati, l'amendement n° II-401 rectifié est-il maintenu ?

M. Philippe Dominati. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L'amendement n° II-401 rectifié est retiré.

M. Jean-Louis Carrère. Tout ça pour ça !

M. le président. Je mets aux voix l'article 64 ter .

(L'article 64 ter est adopté.)