Table des matières
Mardi 28 janvier 2003
- Présidence de M. Jacques Valade, président. -
Code de l'éducation - Ratification de l'ordonnance n° 2000-549 du 15 juin 2000 - Examen des amendements
Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a procédé à l'examen des amendements sur le projet de loi n° 470 (1999-2000) portant ratification del'ordonnance n° 2000-549 du 15 juin 2000 relative à la partie législative du code de l'éducation, sur le rapport de M. Philippe Richert.
Elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 6 présenté par MM. Gaston Flosse et Dominique Leclerc tendant à insérer un article additionnel après l'article 4 visant à exclure l'application, à la Polynésie française, de l'article 4 de l'ordonnance du 15 juin 2000, dont elle a relevé qu'il était sans objet, les articles L. 421-11 à L. 421-13 du code de l'éducation visés à cet article n'étant pas applicables à ce territoire.
Elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 7 rectifié présenté par MM. Gaston Flosse et Dominique Leclerc tendant à insérer un article additionnel après l'article 4 en vue de restreindre la liste des articles du Livre Ier du code de l'éducation applicables à la Polynésie française, d'assortir d'une réserve de compétence les articles L. 123-1 et L. 123-8 du code et d'abroger l'article L. 163-3, car elle a considéré que ces différentes dispositions n'empiétaient pas sur les compétences reconnues à ce territoire par le statut d'autonomie du 12 avril 1996.
Pour les mêmes raisons, elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 8 présenté par MM. Gaston Flosse et Dominique Leclerc tendant à insérer un article additionnel après l'article 4 visant à exclure l'application, à la Polynésie française, de plusieurs articles du Livre III du code de l'éducation ou à les assortir d'une réserve de compétence.
Considérant que certaines des dispositions codifiées en cause étaient issues de lois non applicables en Polynésie française et que le grief formulé à l'encontre des autres dispositions avait été rejeté par le Conseil d'Etat dans sa décision « Gouvernement de Polynésie française » du 29 mars 2002, la commission a donné un avis défavorable à l'amendement n° 9 présenté par MM. Gaston Flosse et Dominique Leclerc tendant à insérer un article additionnel après l'article 4 ayant pour objet d'insérer dans l'article L. 493-1 du code les références L. 442-13 et L. 442-14 et de supprimer la référence L. 442-20 pour la remplacer par trois alinéas visant à rendre inapplicables aux établissements d'enseignement privés sous contrat existant en Polynésie une trentaine d'articles du code et de rendre applicables, à ces mêmes établissements, six dispositions du code dont la mise en oeuvre est limitée aux établissements d'enseignement public.
Rappelant que le Conseil d'Etat, dans sa décision du 29 mars 2002 précitée, avait considéré que l'article L. 563-1 rendant applicables en Polynésie française les dispositions codifiées au Livre V ne méconnaissait pas les compétences des autorités territoriales, elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 10 présenté par MM. Gaston Flosse et Dominique Leclerc tendant à insérer un article additionnel après l'article 4 ayant pour objet de supprimer l'article L. 563-1 du code.
Considérant qu'il ne faisait l'objet d'aucune contre-indication particulière, elle a donné un avis favorable à l'amendement n° 11 présenté par MM. Gaston Flosse et Dominique Leclerc tendant à insérer un article additionnel après l'article 4 visant à ajouter, dans l'article L. 683-1 du code, les références L. 611-3 relative au projet d'orientation universitaire et professionnel des étudiants et L. 611-4 relative aux aménagements d'études universitaires pour sportifs de haut niveau.
Elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 12 présenté par MM. Gaston Flosse et Dominique Leclerc tendant à insérer un article additionnel après l'article 4 proposant d'assortir le troisième alinéa de l'article L. 721-1 d'une réserve de compétence, et d'étendre à la Polynésie française l'article L. 711-3 relatif à la création des universités de technologie.
Elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 13 présenté par MM. Gaston Flosse et Dominique Leclerc tendant à insérer un article additionnel après l'article 4 en vue d'étendre à la Polynésie française l'application de plusieurs articles du Livre VIII du code de l'éducation, considérant que ces articles ne faisaient que codifier des dispositions législatives qui n'étaient pas elles-mêmes applicables à ce territoire, et ne pourraient l'être sans adaptation.
Elle a également donné un avis défavorable à l'amendement n° 14 présenté par MM. Gaston Flosse et Dominique Leclerc, tendant à insérer un article additionnel après l'article 4 dont l'objet est d'étendre à la Polynésie française plusieurs articles du Livre IX du code de l'éducation relatifs aux personnels éducatifs, considérant que ces dispositions étaient issues de lois qui n'étaient pas elles-mêmes applicables à ce territoire.
Enfin, elle a donné un avis défavorable à l'amendement n° 15 présenté par MM. Gaston Flosse et Dominique Leclerc, tendant à insérer un article additionnel après l'article 4, en vue d'abroger l'article L. 163-4 du code de l'éducation, relevant que cet amendement était incompatible avec l'amendement n° 1 de la commission.
Audition de M. Jean-Claude Lehmann, président de l'académie des technologies
Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a entendu M. Jean-Claude Lehmann, président de l'académie des technologies.
M. Jacques Valade, président, a souhaité la bienvenue à M. Jean-Claude Lehmann, et rappelé qu'il avait été élu récemment à la tête de la jeune académie des technologies, succédant à M. Pierre Castillon.
M. Jean-Claude Lehmann a rappelé que l'académie des technologies avait été créée il y a un peu plus de deux ans, à partir du Comité d'application de l'académie des sciences (CADAS). Il a indiqué qu'elle comptait à l'heure actuelle 125 membres titulaires et 40 membres émérites, provenant de l'ancien CADAS, ou plus généralement de l'académie des sciences, auxquels s'ajoutaient des personnalités choisies pour leurs réalisations dans le domaine industriel ou dans celui des sciences de l'ingénieur.
Il a précisé que, contrairement aux principes en vigueur dans les autres académies, les membres de l'académie des technologies n'étaient élus que pour un mandat de cinq ans renouvelable, et qu'ils devenaient membres émérites à l'âge de 70 ans.
Il a ajouté que l'académie des technologies n'avait pas été créée au sein de l'Institut et qu'elle n'avait pour l'instant qu'un statut provisoire, qui devrait être précisé, vraisemblablement sous la forme d'un établissement public.
Présentant les objectifs assignés à cette nouvelle académie, il a indiqué que celle-ci avait vocation à réfléchir aux relations entre la société et le développement des technologies dans une approche équilibrée, en évitant de se faire l'apôtre systématique du progrès des technologies.
M. Jean-Claude Lehmann a reconnu que, pour couvrir ce champ de réflexion, l'académie devait disposer de compétences dans des domaines aussi variés que les sciences, les technologies, l'économie, l'industrie, la sociologie et l'urbanisme, ce qui pouvait l'inciter, malgré la diversité de sa composition, à recourir à des expertises extérieures, ou à se tourner vers les autres académies avec lesquelles elle est en relation.
Il a ensuite indiqué que les deux premières années avaient été consacrées au lancement de l'académie, à la mise en place de ses groupes de travail, et à l'élection de ses nouveaux membres. Il s'est, à cet égard, félicité que, deux d'entre eux aient, depuis lors, été nommés au Gouvernement : Mmes Claudie Haigneré et Noëlle Lenoir.
Il a indiqué que l'académie se réunissait selon un rythme mensuel, et que deux de ses séances se tenaient en région.
Il a estimé que l'académie devait privilégier les sujets de réflexion sur lesquels elle pouvait apporter une véritable valeur ajoutée, en s'attachant plus particulièrement aux problèmes ayant trait aux relations de la science ou des technologies avec la société. Il a ajouté que l'académie devait en outre s'attacher à bien identifier les publics qu'elle souhaitait toucher, et les moyens pour y parvenir, qu'il s'agisse du grand public ou des décideurs, et notamment des élus.
Parmi les thèmes déjà abordés par l'académie des technologies, il a plus particulièrement cité ceux de l'énergie, du téléphone mobile, et de l'évolution du droit de la propriété intellectuelle face au développement des nouvelles technologies de la communication.
Un débat a suivi l'exposé de M. Jean-Claude Lehmann.
M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis des crédits de la recherche, a estimé que les sujets étudiés par l'académie des technologies rejoignaient, sur bien des points, les préoccupations de la commission et celles de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques.
Évoquant plus particulièrement la politique en faveur de l'innovation, ou la politique énergétique, qui sont au coeur des préoccupations actuelles du Gouvernement et du Parlement, il a interrogé le président Jean-Claude Lehmann sur les moyens de nouer une concertation plus étroite avec l'académie des technologies.
Il a également rappelé que la mission d'information sur la diffusion de la culture scientifique, créée par la commission, avait auditionné son prédécesseur, M. Pierre Castillon, et a souhaité que l'académie continue de contribuer à sa réflexion.
Citant enfin l'exemple de l'académie suédoise, qui organise chaque année un grand colloque suscitant un large écho dans le public, il a souhaité que des initiatives comparables soient prises en France, de façon à améliorer la compréhension qu'a la société des problèmes scientifiques et technologiques et de leurs enjeux.
Se félicitant de ce que l'académie des technologies tienne deux de ses réunions en région, M. Pierre Laffitte a insisté sur l'intérêt de prendre en compte les thématiques régionales, estimant que celles-ci sont, aujourd'hui, le support d'un nouveau développement économique.
M. Michel Thiollière s'est félicité de la création de l'académie des technologies dont il a estimé qu'elle répondait à un véritable besoin.
Il a souhaité connaître l'appréciation que M. Jean-Claude Lehmann portait sur la situation relative de la France au plan international, en matière de technologies et de transferts de technologies. Évoquant la désaffection relative des jeunes pour les filières scientifiques, il a demandé comment on pourrait contrecarrer cette évolution préoccupante.
M. Jacques Valade, président, a rappelé que les nuisances, qui sont souvent associées par le public au développement technologique, rendaient particulièrement cruciale la mission impartie à l'académie des technologies de contribuer à faire mieux comprendre, dans l'opinion, l'intérêt des technologies nouvelles.
Il l'a également interrogé sur les relations que l'académie des technologies entretenait avec l'académie des sciences et sur l'intérêt d'intégrer l'académie des technologies dans l'Institut.
M. Jean-Claude Lehmann, président de l'académie des technologies, a apporté aux commissaires les précisions suivantes :
- il est important que l'académie des technologies et les différentes instances compétentes du Parlement en matière de technologies conservent chacune l'approche qui leur est propre ; l'académie peut travailler sur des sujets qu'elle a elle-même choisis, mais peut également répondre à des saisines extérieures : l'intérêt des consultations qu'elle rend tient à son indépendance, et au recul qu'elle doit conserver à l'égard des événements ;
- qu'elle soit saisie d'un aspect particulier d'une question, ou qu'elle cherche au contraire à en dégager la problématique générale, elle s'attache à traiter les sujets dans une perspective globale sans se limiter à leurs seuls aspects techniques ;
- la diffusion de la culture scientifique et technique est au coeur des préoccupations de l'académie ; elle a déjà constitué un groupe de travail sur la diffusion de l'information scientifique, et envisage de mettre en place un centre d'information qui serait chargé de faire valider par les différentes académies compétentes les informations disponibles ;
- l'organisation d'un grand colloque annuel est une idée intéressante, même si l'académie n'a pas encore, en l'état actuel des choses, les moyens de s'engager dans un projet de cette envergure ;
- l'académie envisage de constituer un groupe de travail sur l'état des technologies en France, qui abordera trois questions essentielles : celle de l'état d'une économie française encore marquée par l'importance des freins à l'investissement industriel ; celle de l'état de la science française, de ses atouts et de ses retards ; celle de l'état des technologies susceptibles d'être le moteur du développement économique. Le seul constat sur lequel on s'accorde aujourd'hui est que le coeur du développement économique se situe davantage autour du Pacifique qu'autour de l'Atlantique ;
- la désaffection relative des jeunes pour les filières scientifiques est un problème réel, qui ne touche pas seulement la France, mais la totalité des pays industrialisés : elle tire son origine de la perception ambivalente que l'opinion a du rôle des sciences dans l'évolution de la société ; il convient de s'attacher à comprendre les mécanismes qui sont à l'origine des réticences de la société devant le progrès technologique, et de mieux expliquer que la technologie autorise aujourd'hui des réalisations dont on a rêvé depuis des siècles ;
- le CADAS a maintenant disparu, mais l'académie des sciences et celle des technologies conservent des relations étroites ;
- l'intégration de l'académie des technologies au sein de l'Institut de France mériterait d'être envisagée, même si elle ne constitue pas, aujourd'hui, l'objectif le plus urgent ;
- l'académie des technologies doit s'intéresser aux problèmes des nuisances réelles ou supposées des nouvelles technologies, sans négliger la dimension psychologique de la perception et de l'acceptabilité des risques dans l'opinion. Pour autant, la complexité des paramètres à prendre en compte, au nom du principe de précaution, ne permet à personne de prétendre détenir une vérité définitive ; ainsi, par exemple, les études scientifiques disponibles relatives à la téléphonie mobile montrent qu'il n'y a pas, actuellement, de raisons de freiner le développement de ce secteur économique, mais ne peuvent cependant pas conclure à l'absence totale de risque ;
- l'académie des technologies dispose de moyens encore modestes, qui proviennent pour leur plus grande part du ministère de la recherche ; les contributions que lui versent les clubs industriels en contrepartie des évaluations auxquelles elle procède à leur demande, sont minoritaires et doivent le rester, pour ne pas risquer de remettre en cause son indépendance.
Mercredi 29 janvier 2003
- Présidence de M. Jacques Valade, président. -
Audiovisuel - Audition de M. Dominique Baudis, président du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA)
La commission a procédé à l'audition de M. Dominique Baudis, président du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA).
Accueillant M. Dominique Baudis, dont il a souligné la toujours grande disponibilité à l'égard du Sénat,M. Jacques Valade, président, a annoncé que le prochain colloque organisé par la commission, un an après celui dédié aux nouvelles télévisions, serait consacré au contenu des programmes télévisés.
Remerciant le président Jacques Valade de son accueil et confirmant d'ores et déjà sa participation à ce colloque, M. Dominique Baudis a tout d'abord souhaité aborder la question des pouvoirs de sanction du CSA. Indiquant que le CSA se devait de disposer d'une gamme de sanctions appropriées pour faire face efficacement au non-respect de leurs obligations par les opérateurs, il a affirmé que, depuis l'origine, l'action du conseil en ce domaine se trouvait limitée par une disposition législative lui interdisant d'infliger une amende, dès lors que le manquement en cause était passible d'une poursuite pénale. Après avoir préconisé l'aménagement de cette disposition législative pour permettre de défalquer du montant de l'amende éventuellement infligée par un tribunal celle déjà perçue par le CSA, il a indiqué qu'un amendement en ce sens serait déposé par le député Patrice Martin-Lalande, rapporteur de la commission des finances de l'Assemblée nationale pour le budget de la communication, à l'occasion de la discussion prochaine du projet de loi destiné à renforcer la confiance dans l'économie numérique.
Notant que la protection des mineurs faisait partie des missions confiées par le législateur au CSA, il a rappelé que le conseil, devant la situation alarmante révélée par plusieurs enquêtes mettant en évidence le nombre élevé d'enfants de moins de onze ans ayant visionné un film pornographique, avait pris l'initiative de tenter de réduire l'accès des mineurs à ce genre de programmes. Il a souligné que, pour ce faire, deux solutions étaient envisageables : interdire purement et simplement, comme en Belgique et en Allemagne, la diffusion télévisée des films pornographiques, ou mettre en place un système de double verrouillage consistant, en plus de l'abonnement, à mettre à disposition de l'abonné un code confidentiel à quatre chiffres pour lever le brouillage des programmes de catégorie 5. Après avoir rappelé que, devant la pression du CSA et après le dépôt de deux propositions de loi, toutes les chaînes diffusant ce type de programmes s'étaient engagées à mettre en place un système de double verrouillage, il a néanmoins regretté qu'aucune mesure législative ne soit intervenue depuis lors pour contraindre les opérateurs à s'exécuter.
Constatant qu'au plan juridique, les résultats obtenus pour restreindre l'accès des mineurs aux programmes à caractère pornographique étaient limités, M. Dominique Baudis a cependant tenu à souligner l'accueil favorable rencontré par la nouvelle signalétique jeunesse mise en place sur l'ensemble des chaînes depuis le 18 novembre 2002. Ainsi, d'après un sondage réalisé un mois et demi après son entrée en vigueur, 65 % des personnes interrogées se sont aperçues du changement de signalétique, 90 % d'entre elles la trouvent plus claire, plus lisible et donc plus efficace et 75 % des parents déclarent en tenir compte dans le choix des programmes qu'ils regardent en compagnie de leurs enfants.
Abordant la question des droits de retransmission des matches, il a précisé que les sommes dépensées par les opérateurs pour acquérir les droits de diffusion des différentes compétitions sportives diminuaient d'autant les budgets des chaînes consacrés aux autres programmes. Il a par ailleurs relevé que l'inflation des droits sportifs avait provoqué en Allemagne et en Italie des dégâts considérables, à la fois dans le monde de la télévision et dans celui du football. En effet, la faillite de certaines chaînes liées par contrats avec les clubs ou les ligues de football a plongé ces derniers dans d'énormes difficultés financières. Après avoir rappelé que le CSA avait reçu M. Frédéric Thiriez, président de la Ligue de football professionnel, au moment du lancement de la consultation visant à attribuer les droits télévisés du championnat de France de football, il s'est félicité que le Conseil de la concurrence ait tenu compte, dans sa décision, de l'avis donné par le CSA, qui avait notamment noté qu'une exclusivité absolue attribuée à l'un ou l'autre des opérateurs satellitaire pouvait conduire à la disparition de la plate-forme concurrente.
Il a enfin souhaité évoquer le dossier de la télévision numérique terrestre (TNT). Après avoir rappelé que l'objectif était de numériser le réseau analogique hertzien pour mettre à la disposition des téléspectateurs munis d'un adaptateur une offre élargie de programmes (33 chaînes dont 19 gratuites), il a indiqué que les projets de convention avec les chaînes sélectionnées pour occuper les canaux numériques devraient être signés avant la fin du premier trimestre 2003. Précisant que le financement des travaux de numérisation du réseau hertzien serait pris en charge par les opérateurs et ne pèserait donc pas sur le contribuable, il a souhaité que le Sénat, par son soutien, contribue à l'aboutissement de ce projet et a proposé qu'un nouveau colloque soit organisé pour traiter spécifiquement de la situation des services locaux qui bénéficieront des trois canaux sur la TNT et dont la sélection sera effectuée en cours d'année par le CSA.
A la suite de cet exposé, un débat s'est engagé.
M. Jacques Valade, président, a rappelé que certains, au regard du développement d'Internet et des possibilités nouvelles offertes par le haut débit en matière de télévision, en venaient à remettre en cause le choix de numériser le réseau hertzien et s'inquiétaient même d'un éventuel « doublonnement » futur de ces deux technologies concurrentes.
Il s'est également interrogé sur la pertinence d'une fusion entre les deux plates-formes satellitaires TPS et CanalSatellite, dont il a souligné la forte similarité des programmes proposés aux abonnés.
Estimant que la Ligue de football professionnel, intéressée par la manne financière issue des droits télévisés, et les chaînes, qui profitaient du décuplement de leur audience lors de la retransmission des rencontres, étaient les principaux responsables du trop grand nombre de matches programmés chaque semaine sur les antennes, M. André Vallet s'est demandé si, dans l'intérêt du téléspectateur comme dans celui du football, il n'était pas plus raisonnable de limiter le nombre de matches de football diffusés à la télévision.
Après avoir regretté que la TNT n'ait pas fait l'objet d'un véritable débat public et que certains, aveuglés par leurs études prospectives, remettent si hâtivement en cause son avenir, M. Ivan Renar a tenu à rappeler que, contrairement à Internet, la télévision était un média de masse qui avait encore de beaux jours devant lui.
Il a également déploré que France 2 ait, au cours de l'un de ses journaux télévisés, laissé librement et sans opposition un représentant de la secte Rael développer ses thèses sur le clonage reproductif, pratique qui devrait bientôt être qualifiée pénalement de crime contre l'espèce humaine. Bien que France 2 ait, depuis lors, traité cette information avec la distance critique nécessaire, il a souhaité que les apprentis journalistes soient, au cours de leur formation, mieux sensibilisés aux problèmes éthiques.
Précisant qu'Internet serait bientôt reçu sur les écrans de télévision, M. Jean-Marie Vanlerenberghe a estimé que ce changement d'utilisation à venir du traditionnel poste de télévision pouvait modifier les termes du débat relatif à la technologie la plus adaptée pour diffuser le signal télévisé numérique.
Mme Annie David, après avoir rappelé l'existence, sur le territoire français, de « zones d'ombre » à l'intérieur desquelles le signal télévisé hertzien ne pouvait être reçu, a souhaité savoir si le développement de la télévision numérique terrestre permettrait de résoudre cette difficulté.
M. Philippe Richert a regretté que les chaînes du service public n'organisent pas de débats politiques au cours desquels les questions de société pourraient faire l'objet d'une analyse approfondie. Il a estimé qu'une telle initiative permettrait aux Français d'avoir une image de la politique différente de celle donnée par des débats contradictoires dont le thème n'est qu'un prétexte à des « effets de manche » inutiles. A cet égard, il a indiqué que le besoin ressenti par les deux Assemblées de créer leurs propres chaînes de télévision était révélateur de la vacuité du débat public sur les chaînes hertziennes et s'est prononcé en faveur d'une augmentation des obligations des chaînes du service public en ce domaine.
Répondant aux différents intervenants, M. Dominique Baudis a notamment apporté les précisions suivantes :
- le développement des « web télévisions » ne s'oppose pas à la numérisation du réseau hertzien. En effet, alors que seulement 15 % des Français sont connectés à Internet et que 25 % sont abonnés à des chaînes payantes, la quasi-totalité d'entre eux reçoit la télévision hertzienne analogique. La télévision, véritable média de masse, a une fonction fédérative que les milliers de « web télévisions » n'auront certainement jamais. En effet, les téléspectateurs souhaitent regarder des programmes que d'autres ont également vus et dont ils pourront discuter le lendemain. C'est certainement la raison pour laquelle les trois quarts des téléspectateurs abonnés au câble ou au satellite continuent à regarder les chaînes hertziennes. De plus, alors que la technologie numérique terrestre est au point et que la plupart des pays européens s'apprêtent à l'utiliser, la France ne peut pas se contenter d'offrir indéfiniment aux téléspectateurs une télévision hertzienne analogique et les contraindre à payer un abonnement à Internet, au câble ou au satellite pour avoir accès à la qualité numérique. Enfin, le coût de la numérisation du réseau, évalué à 100 millions d'euros, soit 1,5 euro par téléspectateur, n'est pas excessif, d'autant plus qu'il sera totalement pris en charge par 33 éditeurs de programmes qui disposeront de dix ans pour amortir leur investissement ;
- la boulimie financière du football risque, à terme, de lui porter préjudice et les premières conséquences de l'augmentation du nombre de rencontres diffusées sur les différentes chaînes peuvent d'ailleurs déjà être constatées : les stades sont désertés par le public. Il convient néanmoins de préciser que l'audience n'est pas la principale préoccupation des chaînes payantes qui s'intéressent avant tout au nombre de leurs abonnés et pour lesquelles le football représente un argument commercial essentiel, à tel point que la décision prise par la Ligue d'attribuer l'exclusivité des droits télévisés sur les matches de la Ligue 1 à CanalSatellite a fait chuter le nombre d'abonnements à TPS ;
- le traitement, par les journalistes, des questions d'éthique a fait l'objet de critiques de la part de nombreux téléspectateurs. Concernant France 2, il convient néanmoins de reconnaître à la chaîne publique le mérite de se remettre en question chaque semaine en confrontant, au cours d'une émission animée par le médiateur de la chaîne, les journalistes de la rédaction et les téléspectateurs sur les sujets sensibles de la semaine ;
- la fusion de TPS et de CanalSatellite ne manquerait pas de se solder par l'augmentation, pour le consommateur, du prix de l'abonnement. Aussi, et bien que les relations qui règnent à l'heure actuelle entre les deux opérateurs semblent peu propices à un tel rapprochement, du moins de manière amicale, le CSA, s'il était consulté sur ce point par le Conseil de la concurrence, ne manquerait pas de souligner les désagréments induits par une telle opération pour l'abonné ;
- la télévision numérique terrestre ne permet pas de résoudre le problème des « zones d'ombre », dont le Parlement devrait par ailleurs se préoccuper, puisque le réseau hertzien qui sera utilisé pour la diffusion en mode numérique est le même que celui utilisé actuellement. La persistance de telles zones est d'autant moins acceptable que les téléspectateurs acquittent la redevance, alors même qu'ils ne reçoivent aucune des chaînes publiques ;
- ce n'est pas au CSA, mais au Gouvernement, de modifier le cahier des charges des chaînes publiques pour leur imposer de faire un effort supplémentaire en matière de débats politiques. La mise en place de la télévision numérique terrestre constitue à cet égard une opportunité à saisir pour effectuer une telle modification. Si la télévision numérique se met en place, il conviendra de profiter de la meilleure diffusion de France 5 (24 heures sur 24) pour réviser son cahier des charges et pour inciter cette chaîne, dont l'audience progresse et dont la programmation est axée sur la réflexion et sur les documentaires, à s'ouvrir vers l'organisation de débats politiques de fond. La Chaîne Parlementaire, quant à elle, bénéficiera également d'un canal entier en clair sur la télévision numérique terrestre, ce qui permettra aux téléspectateurs de suivre les débats organisés par cette chaîne du civisme et de la citoyenneté.