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Prolongeant les premiers travaux entamés sur le sujet par Muriel Jourda et Philippe Bonnecarrère lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2024, la commission des lois a créé le 3 avril 2024 une mission d'information sur les accords internationaux conclus par la France en matière migratoire.
Pourquoi ce contrôle ?
Il s'agit d'une réalité méconnue mais la France a conclu de très nombreux traités et accords internationaux avec des pays d'émigration. Si certains de ces traités et accords sont identifiés par le grand public, à l’instar de l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 , la plupart restent relativement confidentiels et difficilement accessibles. En outre, cette « diplomatie migratoire » ne semble, a priori, pas reposer sur une stratégie formalisée et aucune évaluation de l'application de ces traités et accords n'a été réalisée à ce jour. Ce constat est d'autant plus préoccupant que les ressortissants des États concernés échappent, parfois très largement, à l'application du droit commun de l'entrée et du séjour des étrangers et ce sans que la pertinence de telles dérogations n’ait été interrogée jusqu’alors. Dans ce contexte, la mission poursuivra trois objectifs principaux :
- fiabiliser le recensement des accords internationaux conclus par la France en matière migratoire ;
- établir un bilan de leur application ;
- formuler des recommandations visant à renforcer la cohérence et l'efficacité de la diplomatie migratoire française.
Quels constats et recommandations ?
Au terme de ses travaux, la mission d'information a recensé 197 instruments internationaux, bilatéraux ou européens, applicable en matière migratoire. Elle considère qu'une rationalisation de l'usage de ces instruments est indispensable, tant leur objet, portée juridique et application effective sont aléatoires. Cinq axes de travail prioritaires ont été identifiés à cette fin : rehausser le niveau d'information disponible, formaliser dès que possible une doctrine d'usage, engager une réflexion sur le futur des instruments obsolètes, approfondir le suivi de l'exécution de tous les instruments internationaux et se doter de dispositifs d'évaluation suffisamment robustes.
S'agissant du Royaume-Uni, la mission d'information a fait un double constat selon lequel la coopération transfrontalière fondée sur des traités internationaux est un échec flagrant et que le statu quo faisant de la France la gestionnaire de fait de la frontière britannique n'est plus acceptable. Elle appelle donc à engager un dialogue pour que le Royaume-Uni prenne sa juste part dans le financement de la gestion de la frontière.
À terme, seul un accord migratoire global sera toutefois de nature à réduire durablement la pression migratoire.
S'agissant de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, la mission d'information estime que le régime très favorable de circulation et de séjour qu'il offre aux Algériens ne connaît plus de justification évidente et ne s'accompagne aucunement d'un surcroît de coopération en matière de lutte contre l'immigration irrégulière.
Elle appelle donc, en priorité, à renégocier cet accord et, en cas d'échec, à mettre fin unilatéralement à son application.