Travaux de la commission des finances
- Mercredi 12 octobre 2005
- Loi de règlement - Règlement définitif du budget pour 2004 - Examen des amendements
- PJLF pour 2006 - Mission « Transports » - Budget annexe « Contrôle et exploitations aériens » - Compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route » - Examen du rapport spécial
- Loi de règlement - Règlement définitif du budget pour 2004 - Examen des amendements
- Jeudi 13 octobre 2005
- Présidence de M. Jean Arthuis, président.
Loi de règlement - Règlement définitif du budget pour 2004 - Examen des amendements
La commission a constaté qu'aucun amendement n'avait été déposé sur le projet de loi n° 1 (2005-2006), adopté par l'Assemblée nationale, portant règlement définitif du budget pour 2004.
PJLF pour 2006 - Mission « Transports » - Budget annexe « Contrôle et exploitations aériens » - Compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route » - Examen du rapport spécial
La commission a ensuite examiné le rapport de MM. Alain Lambert, Jean-Pierre Masseret, Gérard Miquel et Yvon Collin, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Transports » et l'article 90 rattaché, le budget annexe « Contrôle et exploitations aériens » et le compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route ».
M. Jean Arthuis, président, a souligné qu'il s'agissait du premier rapport budgétaire de « l'ère LOLF » présenté en commission.
M. Alain Lambert, rapporteur spécial, a tout d'abord indiqué qu'il s'agissait d'un honneur, mais aussi d'un vrai défi, pour lui-même et ses trois corapporteurs, de présenter à la commission leur rapport sur la mission « Transports », car il était, en effet, le premier rapport en mode LOLF. Il a précisé qu'ils avaient voulu répondre par l'exemplarité du rapport à l'effort demandé au gouvernement, dans la présentation des objectifs et des indicateurs des programmes, dans la justification des demandes de crédits au premier euro et dans la transparence des coûts.
Il a souligné que l'accent avait été mis par les quatre corapporteurs sur l'analyse qualitative, qu'il s'agisse de la transparence budgétaire ou du bien-fondé des objectifs et des indicateurs, que l'analyse des missions avait été privilégiée et que la classique comparaison des chiffres d'une année sur l'autre, qui n'était sans doute pas la meilleure manière de juger de la performance, avait donc été évitée.
Il a précisé que la mission « Transports » comprenait 8 programmes et représentait 91.783 emplois (exprimés en équivalent temps plein), 9,44 milliards d'euros de crédits de paiement (CP), 2,5 milliards d'euros de fonds de concours et 1,8 milliard d'euros en dépenses fiscales.
Il a indiqué que les objectifs majeurs fixés à la mission « Transports » pour 2006 étaient de réaliser les orientations du Comité interministériel pour l'aménagement du territoire (CIAT) du 18 décembre 2003, d'améliorer la sécurité routière, maritime et aérienne, de veiller à la qualité des réseaux de transport et de réussir la décentralisation et, en particulier, la mise en oeuvre de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales pour le transfert de la gestion d'une partie du réseau routier national aux collectivités territoriales, précisant que ces priorités étaient déclinées dans les 8 programmes examinés ce jour par la commission.
Puis M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a indiqué que son intervention traitait, en fait, de deux sujets juridiquement séparés :
- d'une part, le programme « Transports aériens » de la mission « Transports » ;
- d'autre part, la mission correspondant au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », dont la logique s'inspirait de « l'ancien » budget annexe de l'aviation civile.
Il a précisé que, si ces deux entités étaient séparées, il était cependant essentiel de les étudier simultanément pour des raisons de lisibilité. Il a précisé qu'il s'agissait, en effet, d'une seule et même administration qui était chargée de ces deux entités : la direction générale de l'aviation civile (DGAC).
M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a indiqué que son propos allait s'articuler autour de deux grands thèmes :
- le premier, celui de la réforme de la DGAC inspirée très largement de la LOLF ;
- le second, qui s'arrêterait sur les grands enjeux de ces deux budgets, en se concentrant sur les points les plus importants.
M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a donc abordé, en premier point, la réforme de la DGAC.
Il a rappelé que l'article 18 de la LOLF imposait que les budgets annexes soient financés à titre principal par des redevances, et ce, pour des activités de prestation de services. Il a précisé que la réforme de la DGAC avait consisté à séparer de manière stricte ce qui relevait des prestations de services, activités placées dans le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », et ce qui relevait du régalien, placé dans le programme « Transports aériens » de la mission « Transports ». Il a ajouté qu'à ce cadre national s'ajoutait une contrainte européenne qui recommandait de séparer la fonction d'édiction de la réglementation de la fonction de contrôle de l'application de cette réglementation. Il a estimé que le travail effectué par la DGAC avait été extrêmement bien mené, et qu'il fallait saluer une administration qui avait réellement « joué le jeu » de la LOLF, en ne se contentant pas de « mesurettes cosmétiques ». Il a constaté qu'une vraie réflexion avait été menée sur les différentes activités, et la manière de les exercer au mieux, et jugé que les documents budgétaires étaient extrêmement clairs et lisibles. Il a souligné que la quasi-totalité des réponses au questionnaire avaient été adressées avant la date limite, ce qui confirmait l'excellente réactivité de la DGAC, déjà bien établie depuis plusieurs années.
M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a précisé que le second point de son intervention concernerait les éléments les plus intéressants dans ces budgets. Il a indiqué que, les « bleus », tels que désormais prévus par la LOLF, étant extrêmement clairs et didactiques, il se concentrerait sur les points les plus significatifs.
En ce qui concerne les recettes du budget annexe, il a indiqué que la commission avait adopté l'année dernière, dans la loi de finances rectificative pour 2004, un article 120 qui instaurait un système complet de redevances. Il a relevé qu'on pouvait donc observer une montée en puissance de ces nouvelles redevances, pour 35 millions d'euros, et corrélativement une baisse de la taxe d'aviation civile. Il a estimé que le passage était donc globalement « neutre » pour le transport aérien, mais conforme à l'article 18 de la LOLF.
Le deuxième point était relatif aux dépenses. Il a précisé que deux grands mouvements de crédit peuvent être observés :
- le premier mouvement est lié au transfert sur un compte d'affectation spécial des retraites des agents. Or, il a constaté que la DGAC, compte tenu de sa « démographie », appliquait jusqu'à présent un taux favorable qu'elle avait été obligée de relever, sans pour autant s'aligner complètement ;
- le second mouvement fait suite au changement de statut d'Aéroports de Paris (ADP), adopté par le Parlement en avril 2005. Il a rappelé que, tant qu'ADP était un établissement public, la société réalisait pour le compte de l'Etat des investissements lourds de navigation aérienne (tours de contrôle etc..), qui lui étaient remboursés annuellement. Il a considéré que le gouvernement avait fait le choix, qu'il estimait sage, de réaliser le remboursement en une fois, cette année, pour 152 millions d'euros. Il a estimé que les relations étaient donc claires, et que le président de la commission apprécierait certainement que l'Etat ne laisse pas en suspens un engagement « hors bilan ».
Puis M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a abordé le troisième point concernant la taxation du transport aérien. Il a rappelé que le secteur est durement frappé par la conjoncture et la hausse des prix du kérosène, et que même si Air France affiche des résultats positifs, les compagnies françaises ne sont « pas à l'abri ». Il a estimé qu'il convenait donc de regarder avec attention la taxation du transport aérien. Il a indiqué que l'article 90 du projet de loi de finances pour 2006, rattaché pour son examen à la mission « Transports », proposait, ainsi, une hausse minime de la taxe d'aéroport pour certains aérodromes. Estimant cela justifié, il a toutefois demandé aux membres de la commission d'être vigilants pour le futur.
Enfin, M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a évoqué les préoccupations de sécurité et de sûreté dans le transport aérien. Il a rappelé que les évènements dramatiques d'août 2005, notamment le crash aérien survenu au Venezuela, avaient attiré l'attention sur la question des contrôles. Il a estimé, à ce titre, qu'il fallait relever qu'un programme spécial du budget annexe y était consacré, qui était « extrêmement clair ». Il a toutefois jugé qu'au-delà des aspects strictement budgétaires, il fallait s'interroger, et interroger le ministre, sur les moyens qu'il comptait affecter à cette question dans le futur, et sur la coopération européenne. Il a évoqué la fameuse « liste noire » et a considéré qu'il était du devoir des membres de la commission d'inciter le gouvernement à répondre à ce défi et de vérifier si tous les efforts étaient bien réalisés.
Il a déclaré qu'il avait bien pris en compte les efforts de réforme faits par la DGAC, et qu'il recommandait à la commission d'adopter les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », du programme « Transports aériens » de la mission « Transports » ainsi que de l'article 90 rattaché.
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial, a alors présenté les programmes « Réseau routier national » et « Sécurité routière » et le compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route ».
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial, a tout d'abord indiqué que le programme « Réseau routier national » représentait, après les reversements du programme de soutien, 29 % des crédits et 58 % des effectifs de la mission transports.
Il a rappelé que ce programme finançait le développement et l'entretien du réseau routier national et s'élevait à 914,6 millions d'euros en crédits de paiement, les crédits consacrés au développement des infrastructures étant considérablement augmentés, au-delà du double, par le rattachement de fonds de concours, ces derniers correspondant, pour une part, aux participations des collectivités territoriales dans les contrats de plan Etat-région (CPER) et, pour une autre part, à un abondement en provenance de l'Agence de financement des infrastructures de Transports en France (AFITF). Il a ajouté que les fonds de concours atteignaient 1.947 millions d'euros en autorisations d'engagement et 1.943 millions d'euros en crédits de paiement, soit le double des fonds de concours rattachés pour 2005, qui s'élevaient à 823 millions d'euros.
Il a souligné que les effectifs inscrits à ce programme, ceux de la Direction générale des routes, étaient en augmentation, les 10 emplois créés correspondant à la création d'une nouvelle structure dénommée « mission stratégie et réorganisation des services » et à un poste dédié au congrès mondial de la route « Paris 2007 ».
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial, a ensuite fait part de ses principales observations sur ce programme.
Il a souhaité, tout d'abord, que le ministre apporte des précisions sur les recettes des fonds de concours estimées ainsi que sur leur origine, en précisant la part respective des participations des collectivités territoriales et celle de l'AFITF. Il a ajouté que seuls figuraient au budget 197 millions d'euros de subvention à l'AFITF, représentant la moitié de la compensation que lui versera l'Etat. Il a également rappelé que l'AFITF avait désormais la responsabilité du financement des contrats de plan Etat-région (CPER), en plus de celui des grandes opérations, que ses ressources étaient également modifiées et qu'en tout état de cause, il fallait rester vigilant et veiller à obtenir des informations transparentes sur le financement des infrastructures.
Il a ensuite regretté que très peu d'indicateurs comprennent de cible ou de prévision valorisée, ce qui ôtait une grande part de leur intérêt.
Il a souhaité savoir, étant donné que le bleu ne répondait qu'insuffisamment à ces deux questions, comment était pris en compte, budgétairement, le transfert du réseau national aux collectivités territoriales qui serait réalisé en 2006 et comment était effectué le remboursement aux collectivités territoriales des sommes engagées pour la réalisation de travaux relevant de la part Etat des CPER.
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial, a ensuite évoqué le programme « Sécurité routière », représentant 122 millions d'euros en crédits de paiement, en plus de fonds de concours à hauteur de 15 millions d'euros sur l'action « Gestion du trafic et information des usagers ».
Il a précisé que les effectifs inscrits au programme, ceux de la Direction de la sécurité et de la circulation routière, étaient en augmentation : 196 demandés pour 2006, contre 192 estimés en 2005, regrettant cependant que le programme ne fournisse aucune justification particulière à cette augmentation.
Il a également indiqué que la politique de sécurité routière, compte tenu de son caractère interministériel, devait faire l'objet d'un « document de politique transversale » (DPT) qui n'avait pas encore été transmis.
Il a complété ces remarques par une interrogation sur les valeurs cibles retenues pour les indicateurs, qu'il s'agisse de la diminution du nombre annuel des tués à un mois ou du pourcentage des auto-écoles ayant un taux de réussite en première présentation au permis de conduire B inférieur à 50 %.
Concernant le programme « Sécurité routière», il a précisé qu'il était complété par un compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route », dont les recettes provenaient d'une partie du produit des amendes du contrôle automatisé, indiquant que ce compte d'affectation spéciale serait doté de 140 millions d'euros.
Il a souligné que le premier objectif assigné à ce programme, « Assurer l'efficacité du système de contrôle-sanction », était mesuré par trois indicateurs dont l'un ciblait une diminution de la vitesse moyenne de 85 km/h en 2004 à 83 km/h en 2006, sans qu'il soit bien sûr que cette diminution puisse être attribuée, exclusivement ou majoritairement, à l'efficacité du système mis en place.
Il a précisé que le programme comprenait trois actions : radars, aide au financement du permis de conduire des jeunes et fichier national du permis de conduire. Il a souligné que les dépenses de l'action « Radars » devaient permettre de financer les coûts d'entretien et de fonctionnement des 1.500 radars déjà en fonctionnement et l'installation de 500 radars supplémentaires au coût unitaire compris entre 77.000 euros et 100.000 euros, ce dispositif devant permettre l'émission de 20 millions d'avis de contraventions en 2006.
Quant au coût du dispositif du « permis à un euro par jour », M. Gérard Miquel, rapporteur spécial, a précisé qu'il était estimé à 11 millions d'euros en 2006 pour 160.000 bénéficiaires, l'aide étant constituée sous la forme d'un prêt à taux zéro et qu'il n'y avait pas d'indicateurs pour cette action.
Enfin, il a regretté que, pour l'action « Fichier national du permis de conduire », les 9 millions d'euros de crédits demandés ne soient pas justifiés.
Puis M. Jean-Pierre Masseret, rapporteur spécial, a présenté les programmes « Météorologie » et « Conduite et pilotage des politiques d'équipement ».
Il a estimé que ces programmes étaient à l'opposé l'un de l'autre puisque le premier programme « Météorologie » est confié à un opérateur extérieur, Météo France, et ne représente que 2 % de la mission en termes de crédits, et que le second programme « Conduite et pilotage des politiques d'équipement » constitue le plus important selon le même critère (41 % des crédits demandés).
Il a rappelé que le programme « Météorologie » retraçait la subvention versée par le ministère des transports à l'opérateur Météo France, et que ce programme représentait 155 millions d'euros. Il a souligné que l'établissement recevait également, au titre de la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur », une subvention du programme recherche spatiale, d'un montant de 36,58 millions d'euros.
Concernant les effectifs de l'opérateur, il a indiqué qu'ils étaient en diminution de 3.728 à 3.710 équivalents temps plein, conformément aux objectifs retenus par le contrat d'objectifs qui avait été conclu entre l'Etat et l'établissement pour la période 2005-2008, qui prévoyait au total 70 suppressions de postes sur 4 ans.
Il a ajouté que les objectifs retenus étaient, en priorité, ceux qui avaient été fixés par le contrat d'objectifs 2005-2008 qui prévoyait, sur le plan financier, une réduction de 0,3 % par an en euros constants des subventions pour charges de service publics versées par l'Etat à l'établissement.
Il a constaté que l'opérateur était donc amené à atteindre son équilibre budgétaire par une augmentation de ses recettes commerciales propres, dont il évaluait la part relative par rapport à la subvention de l'Etat à 22,4 % pour 2006, contre 22,2 % en 2005.
M. Jean-Pierre Masseret, rapporteur spécial, a salué la qualité et le réalisme des objectifs retenus par le programme « Météorologie » qui méritaient d'être soulignés. Il a relevé, de même, pour s'en féliciter, que les observations formulées par la commission dans son rapport sur Météo France publié en mars 2005 avaient été prises en compte. La commission avait, en effet, souhaité des indicateurs du type « coût unitaire », qui permettaient, d'une part, de savoir si Météo France rendait le meilleur service au meilleur coût pour l'Etat, d'autre part, de connaître le pourcentage des recettes propres de l'établissement par rapport à ses recettes totales plutôt que leur montant absolu. Il a indiqué que, désormais, ces indicateurs avaient été intégrés.
Il a rappelé, pour conclure, que les rapporteurs spéciaux devraient procéder, en 2006, à un bilan des mesures qui auront été prises par Météo France et par sa tutelle, afin de donner suite à la communication réalisée par la Cour des comptes en 2005 sur la base de l'article 58-2 de la LOLF et qui avait donné lieu au rapport précité de la commission.
Concernant le programme « Conduite et pilotage des politiques d'équipement », M. Jean-Pierre Masseret, rapporteur spécial, a indiqué que ce programme regroupait les fonctions dites de « soutien » des différents programmes de la mission « Transports », et que ceci expliquait son poids budgétaire.
Il a rappelé, en effet, que ce programme représentait 1.427 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement, et bénéficiait du rattachement de fonds de concours à hauteur de 163,5 millions d'euros, pour l'essentiel sur l'action « Politique et gestion des moyens généraux et de l'immobilier ».
Il a souligné que ce programme regroupait les crédits du titre 2 pour tous les effectifs des services déconcentrés du ministère de l'équipement qui travaillent pour les programmes de la mission « Transports ».
Concernant les effectifs de ce programme, il a indiqué que, compte tenu du choix de gestion opéré, ils représentent 97 % des effectifs de la mission, et que leur nombre est en diminution de 1 %, soit 89.951 demandés pour 2006, contre 90.931 estimés en 2005. Il a précisé qu'au niveau du ministère de l'équipement, le schéma d'emploi comporte, en 2006, 4.025 sorties et 2.630 entrées, soit une réduction globale de 1.395 postes de travail et une économie de 36,39 millions d'euros.
Par ailleurs, il a noté que, ce qu'il était convenu d'appeler « l'adaptation du réseau des implantations territoriales de l'équipement », donnerait lieu à la mise en oeuvre d'une indemnité exceptionnelle de mobilité pour les agents (au nombre de 8.000) concernés par un déplacement significatif de leur lieu de travail, et que son coût était estimé à 9 millions d'euros.
Il a évoqué, ensuite, les objectifs et indicateurs retenus qui mesurent la qualité du service rendu aux responsables de programme et services déconcentrés.
M. Jean-Pierre Masseret, rapporteur spécial, a précisé que le programme comprenait 21 actions, dont 15 étaient des actions « miroir » reflétant les contributions apportées par ce programme à l'exécution d'autres programmes (de la mission « Transports » ou d'autres missions), notamment par la prise en charge de la gestion des crédits des personnels déconcentrés (ou des contributions recueillies, par des transferts en gestion, en provenance d'autres missions).
Il a indiqué que cette présentation rendait assez difficile la lecture du programme, et qu'elle était sans doute inévitable dans un contexte marqué par une restructuration profonde des services déconcentrés, la présentation du programme devant, à ce titre, être modifiée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2008.
Il a noté que les actions n'appelaient pas de commentaire particulier de sa part, à l'exception de l'action « Politique et gestion des moyens généraux et de l'immobilier » qui comprenait, notamment, les dépenses d'immobilier de l'administration centrale et des services déconcentrés, et dans laquelle il avait été tenu compte de la refonte des implantations territoriales. Il a souligné, par ailleurs, que cette action devrait faire l'objet d'un contrôle attentif de son exécution.
M. Jean-Pierre Masseret, rapporteur spécial, a précisé que l'examen de ce programme « balai » appelait, de sa part, deux questions principales :
- s'agissant de la validité des choix de politique de gestion des personnels (effectifs et crédits regroupés dans l'action de soutien), il s'est demandé si cela constituait une solution de facilité liée à des contraintes de gestion, et si cela était conforme à l'esprit de la LOLF. Il a indiqué que cette solution lui paraissait n'être que provisoire ;
- concernant la réalisation des transferts d'effectifs entre services déconcentrés de l'Etat et départements, il s'est également inquiété de savoir quand ils seraient entrepris, selon quels principes et surtout quel calendrier.
M. Alain Lambert, rapporteur spécial, a présenté ensuite les trois derniers programmes de la mission.
S'agissant du programme « Transports terrestres et maritimes », il a précisé que celui-ci regroupait les moyens mis en oeuvre pour le transport ferroviaire, fluvial et maritime, et l'intermodalité, et qu'il représentait 2.671 millions d'euros en crédits de paiement, auxquels étaient rattachés 381 millions d'euros au titre de fonds de concours correspondant à la participation des collectivités aux contrats de plan Etat-région. Il a ajouté que ce programme était également abondé par une dépense fiscale évaluée à 378 millions d'euros et qu'il était, pour une part importante, mis en oeuvre par des opérateurs, comme l'Agence de financement des infrastructures de transports de France (AFITF) ou Voies navigables de France (VNF).
Il a ajouté que c'était dans l'action « Infrastructures de transports collectifs et ferroviaires » de ce programme que l'on retrouvait les 197 millions d'euros, correspondant à la moitié de la subvention versée à l'AFITF, l'autre moitié étant sur le programme routes, et la contribution à Réseau ferré de France (RFF), pour 2.069 millions d'euros. Il a précisé que la subvention à VNF, fixée à 50 millions d'euros, conformément au contrat d'objectif 2005/2008 signé avec l'Etat, figurait dans l'action « Infrastructures fluviales et portuaires et aménagement du littoral ».
Il a indiqué que les effectifs inscrits au programme, ceux de la Direction générale de la mer et des transports et des services centraux rattachés, étaient en diminution.
Il a constaté que les principales observations sur ce programme concernaient les objectifs et les indicateurs sur lesquels la commission, comme le Comité interministériel d'audit des programmes (CIAP), avaient été assez critiques lorsqu'ils avaient eu connaissance des avant-projets de projet annuel de performance (PAP).
Il a regretté, en particulier, que le programme propose un indicateur de maîtrise des coûts déclaré par avance « sans objet », au motif qu'il s'agissait d'un indicateur de maîtrise de l'évolution du rapport coûts réels/prévisions de coût qui ne pouvait pas être calculé, faute de mise en exploitation de gros investissements avant 2007.
M. Alain Lambert, rapporteur spécial, s'est demandé quel pouvait être l'intérêt, au regard des principes de la LOLF, de l'action « Inspection du travail dans les transports » qui ne disposait que d'une dotation de 45.000 euros et a souhaité que l'importance des frais de fonctionnement et des effectifs d'organismes rattachés comme le secrétariat général au tunnel sous la Manche soit mieux justifiée.
Il a ensuite indiqué que le programme « Passifs financiers ferroviaires » avait pour finalité de contribuer au désendettement des deux établissements publics ferroviaires, Réseau ferré de France et la SNCF.
Il a souligné que ce programme représentait 1.427 millions d'euros en crédits de paiement, en diminution de 3,38 % par rapport à la loi de finances initiale de 2005, et que celle-ci, qui portait sur l'action « Désendettement de la SNCF », était justifiée par le « bleu » budgétaire, au motif des conditions de taux actuelles.
S'agissant de la présentation du programme, des objectifs et des indicateurs, il a rappelé que la commission avait regretté, en mars dernier, que les indicateurs proposés (montant de la dette de RFF, montant de la dette SNCF) soient de purs indicateurs de moyens. Il a indiqué que la commission avait alors proposé deux autres indicateurs qui auraient permis de mesurer l'écart du coût de financement de RFF, d'une part, et du service annexe d'amortissement de la dette (SAAD) par rapport au coût de financement de la dette de l'Etat, d'autre part.
Il a déploré que ces recommandations n'aient pas été suivies d'effets et que l'action « Passifs financiers ferroviaires » ne comportât, désormais, plus aucun indicateur de performance, ce qui ne lui semblait pas vraiment conforme à l'esprit de la LOLF, espérant toutefois que le gouvernement évolue sur ce point.
Concernant le programme « Sécurité et affaires maritimes », M. Alain Lambert, rapporteur spécial, a précisé qu'il représentait 142,8 millions d'euros en crédits de paiement, auxquels il convenait d'ajouter le rattachement de fonds de concours à hauteur de 4,5 millions d'euros et une dépense fiscale évaluée à 115 millions d'euros en faveur des entreprises de transport maritime.
Il a formulé deux observations principales sur ce programme. Tout d'abord, il a constaté le caractère peu incitatif des indicateurs, notamment ceux de l'objectif « Améliorer l'efficacité des dispositifs d'aide à la flotte de commerce », les niveaux retenus pour 2006 étant souvent stables par rapport à 2005, voire 2004. Ensuite, il a souligné la forte augmentation par rapport à l'estimation 2005 des crédits de l'action de soutien qui, par définition, avait vocation à regrouper des dépenses résiduelles, augmentation qui devrait donc être justifiée.
En conclusion, il a présenté, au nom de l'ensemble des corapporteurs spéciaux de la mission, quatre observations principales sur la mission.
Premièrement, en application de la LOLF, il a rappelé que les recettes tirées de fonds de concours étaient désormais prévues et évaluées en loi de finances, et qu'elles étaient retracées en dépenses par programme et par titre dans les projets annuels de performance (PAP) figurant dans les « bleus » par mission, qui constituent les annexes explicatives jointes au projet de loi de finances.
Il a précisé qu'elles représentaient un montant particulièrement important pour la mission « Transports » et le programme « Réseau routier national » (1,9 milliard d'euros, soit plus du double des crédits consacrés par l'Etat à ce programme). Il a cependant souhaité que l'origine de ces fonds de concours soit mieux précisée, et notamment les parts respectives des participations des collectivités territoriales et de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF).
Deuxièmement, il a indiqué que l'établissement du « bleu » de la mission « Transports » n'avait pas été facilité par les perspectives de transfert vers les départements et l'opération de réorganisation des services de l'équipement. Il fallait donc rendre hommage aux efforts qui avaient été faits.
Troisièmement, concernant le programme « Conduite et pilotage des politiques d'équipement », il a déclaré qu'il s'agissait d'un programme de soutien, dont les dépenses contribuaient à plusieurs politiques publiques, qu'il regroupait notamment les crédits du titre 2 pour tous les effectifs des services déconcentrés du ministère de l'équipement qui travaillaient pour les programmes de la mission « Transports », même si, afin d'apprécier le coût réel des programmes, les dépenses de chaque programme liées aux effectifs déconcentrés avaient fait l'objet d'un « reversement analytique ». Il a indiqué, qu'au-delà de considérations pratiques, le choix de concentrer les crédits de personnel sur un programme de soutien devait être, soit temporaire, soit justifié par un choix de management et que le gouvernement serait interrogé sur ce point.
Enfin, il a souhaité que la place de l'AFITF comme opérateur de la mission « Transports » soit précisée et clairement établie, regrettant que certains arbitrages rendus très tardivement ne soient pas retracés par le bleu budgétaire, ajoutant que, sur ce point aussi, la plus grande transparence était attendue.
Un large débat s'est alors instauré.
M. Jean Arthuis, président, a relevé la nouveauté de l'exercice, soulignant que la présentation d'une grande qualité des quatre corapporteurs spéciaux de ces missions constituait une « première », puisqu'elle était réalisée dans le cadre fixé par la LOLF. Il a précisé les conditions de vote des crédits, rappelant que les gestionnaires des programmes disposaient maintenant, au titre de la « fongibilité asymétrique des crédits », de toute liberté pour remplir, au mieux, les objectifs présentés devant le Parlement.
En ce qui concerne la mission « Transports », il a indiqué que le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, M. Dominique Perben, serait auditionné par la commission le mercredi 16 novembre.
M. Michel Charasse s'est interrogé sur la localisation, dans les différents « bleus » budgétaires, des crédits consacrés à la Société nationale Corse Méditerranée (SNCM). Il a fait état de sa préoccupation quant à la privatisation des autoroutes, proposant, à ce titre, deux modifications :
- d'une part, la création d'une commission permanente chargée de vérifier l'application du cahier des charges par les sociétés concessionnaires des autoroutes, relevant que des rapports de la Cour des comptes avaient mis en lumière certains manquements ;
- d'autre part, une attention soutenue accordée au respect de la concurrence dans l'attribution des marchés de travaux réalisés sur ces autoroutes, les futurs concessionnaires étant, pour la plupart, des entrepreneurs du BTP, ce qui pourrait priver des marchés les entreprises locales.
M. Jean Arthuis, président, a indiqué que la gestion de la SNCM était confiée à l'Agence des participations de l'Etat (APE), qui relevait de la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques ».
Mme Marie-France Beaufils s'est interrogée sur l'endettement de la société Réseau ferré de France (RFF), s'inquiétant de sa capacité à financer les investissements nécessaires à l'expansion et à l'entretien du réseau.
Mme Fabienne Keller a fait état de sa préoccupation quant aux ressources de l'AFITF. Elle a relevé que l'élargissement des compétences de l'agence la conduisait à financer une partie des CPER, ce qui était positif, mais pouvait nuire à la visibilité de l'agence qui ne s'occupait, jusqu'alors, que des grands projets d'infrastructure.
M. Gérard Longuet, en sa qualité de président de l'AFITF, a apporté des éléments de réponse. Il a souligné que le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire s'était engagé à ce que le budget de l'AFITF lui permette en 2006 et 2007 de financer ses obligations, y compris celles relevant des CPER. A ce sujet, il a indiqué que les besoins s'élevaient à 2 milliards d'euros sur le volet « infrastructures » pour 2006 et 2007, que les financements liés aux grandes opérations décidées par le Comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT) représentaient une charge annuelle de 1 milliard d'euros entre 2005 et 2012. Il a noté que le gouvernement avait décidé de remplacer les dividendes des sociétés d'autoroutes par le produit de la taxe d'aménagement du territoire, qui s'élevait à environ 700 millions d'euros, les redevances domaniales payées par les sociétés d'autoroutes pour 160 millions d'euros, ainsi que 80 millions d'euros provenant du produit des amendes de radars, ce qui s'ajoutait à la dotation de 4 milliards d'euros sur deux ans provenant du produit des privatisations et à une dotation budgétaire de 400 millions d'euros. Il a souligné que ces financements devaient permettre à l'AFITF d'assurer l'intégralité de ses engagements.
M. Jean Arthuis, président, a relevé que, grâce à la LOLF, les fonds de concours apparaissaient désormais au stade de la loi de finances initiale dans les documents budgétaires, en dépenses comme en recettes, notant qu'ils s'élevaient pour la mission « Transports » à 1,9 milliard d'euros. Il s'est cependant interrogé sur la clarté du dispositif, indiquant que les fractions provenant des collectivités territoriales et de l'AFITF n'étaient pas précisées.
M. Michel Charasse s'est félicité de la présence de fonds de concours, dans les documents budgétaires, relevant cependant qu'il était nécessaire que l'Etat demande aux différents intervenants la réalisation effective de ces versements.
M. Jean Arthuis, président, a souligné que l'AFITF constituait une forme de « débudgétisation » des crédits de l'Etat, ce qui nécessitait une attention soutenue afin de conserver une vision d'ensemble des dépenses. Il a relevé, toutefois, que les recettes issues des privatisations allaient permettre de « purger » la dette de l'Etat sur les CPER. En ce qui concerne RFF, il a indiqué que l'article 48 du projet de loi de finances pour 2006 créait une société de valorisation de biens immobiliers de Réseau ferré de France, qui devrait susciter 350 millions d'euros de recettes au profit du budget général de l'Etat, ce qui lui paraissait être une estimation relativement optimiste.
M. Alain Lambert, rapporteur spécial, a tout particulièrement relevé le changement d'habitude que constituait, pour le Parlement et ses commissions, le passage à la LOLF, estimant qu'on ne ferait plus de comparaison entre un projet de budget et celui voté l'année précédente sans disposer des éléments nécessaires à l'appréciation de son exécution. Il s'est félicité de la prochaine audition du ministre qui serait en mesure d'éclairer la commission sur certains points laissés en suspens, ainsi que de la question orale avec débat qui devrait avoir lieu au Sénat concernant la privatisation des sociétés d'autoroutes et le financement des infrastructures.
En réponse à Mme Marie-France Beaufils, il a fait état de ses inquiétudes quant à la capacité d'investissement de Réseau ferré de France, les besoins en termes d'entretien du réseau ayant été estimés à 700 millions d'euros par un récent audit.
En réponse à Mme Fabienne Keller, il a estimé que le gouvernement devrait donner toutes les explications sur les ressources affectées à l'AFITF, ainsi que sur sa gouvernance. Il a précisé que RFF disposerait de trois versements de l'Etat afin de faire face à ses obligations, tout en exprimant son accord avec les doutes de M. Jean Arthuis, quant à l'opportunité de créer une nouvelle structure.
En réponse à M. Yves Fréville qui remarquait que l'exercice de comparaison des budgets pourrait être effectué, au moins en partie, sans attendre la discussion de la loi de règlement, M. Jean Arthuis, président, a précisé que la LOLF invitait le Parlement à se concentrer sur les objectifs et sur la bonne utilisation des finances publiques plus que sur l'évolution des crédits.
A l'issue de ce débat, à l'invitation de M. Jean Arthuis, président, la commission a décidé de réserver son vote sur les crédits de la mission « Transports » et de l'article 90 rattaché, le budget annexe « Contrôle et exploitations aériens » et le compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route », jusqu'à l'audition de M. Dominique Perben, ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, prévue pour le mercredi 16 novembre 2005.
Jeudi 13 octobre 2005
- Présidence de M. Denis Badré, vice-président, puis de M. Jean Arthuis, président.
Droit des sociétés - Offres publiques d'acquisition - Examen du rapport
La commission a procédé à l'examen du rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général, sur le projet de loi n° 508 (2004-2005) relatif aux offres publiques d'acquisition.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a préalablement rappelé qu'il avait travaillé en concertation avec la commission des lois, qui s'était saisie pour avis de certains articles du projet de loi.
Il a indiqué qu'il s'agissait d'un texte apparemment de simple transposition, mais qui avait pris une tournure plus politique en dépit d'un dispositif très technique et touchant à un domaine particulier du droit boursier.
Il a souligné que le projet de loi, qui proposait de transposer certaines dispositions de la directive 2004/25/CE du 21 avril 2004 concernant les offres publiques d'acquisition (OPA), intervenait dans un contexte marqué par une reprise du mouvement de fusions et acquisitions à l'échelle internationale. Il a précisé que cette tendance n'épargnait pas le marché français, qui était le théâtre d'opérations nationales d'envergure - telles que le rachat d'Aventis par Sanofi en mai 2004 - ou de rachats par des concurrents étrangers, tels que l'OPA d'Alcan sur Péchiney fin 2003. Il a ajouté que ce contexte se caractérisait également par une certaine sensibilité de l'opinion, qui avait été récemment alimentée par des rumeurs de marché comme celles de l'été 2005 relatives à l'intérêt de Pepsico pour Danone, et que l'on retrouvait encore aujourd'hui avec le débat autour du thème du « patriotisme économique ».
Abordant les enjeux de compétitivité, il a souligné l'importance de ce texte compte tenu de la globalisation des marchés boursiers, et que les OPA participaient de la mobilité et de la vitalité du tissu économique, en permettant, en particulier, l'obtention de la taille critique ou de synergies industrielles et commerciales, la conquête plus rapide de parts de marché, voire la remise en cause d'une mauvaise gestion et d'une direction.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a indiqué que la simple probabilité de ces opérations constituait un facteur incitatif à la création de valeur et à la préservation des intérêts patrimoniaux des actionnaires.
Il a ajouté que les OPA revêtaient fréquemment une portée symbolique lorsque des actifs et un savoir-faire français devenaient la propriété d'acquéreurs étrangers. Il a souligné que les avantages des OPA tendaient néanmoins à l'emporter sur leurs inconvénients et qu'une offre publique pouvait, en réalité, exercer un impact positif pour l'actionnaire de la société cible, pour la société cible elle-même, pour la société initiatrice et enfin pour l'économie nationale.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a indiqué, en outre, que les menaces d'OPA étaient loin d'être « à sens unique » et que les sociétés françaises, au cours de la période récente, avaient été en réalité plus en position d'acquéreur que de cible. Les sociétés initiatrices françaises figuraient ainsi, au 21 septembre 2005, au premier rang des fusions-acquisitions sur des entreprises européennes.
Il a rappelé que la directive relative aux OPA, en dépit de ses lacunes et de son cheminement cahoteux, avait le mérite d'exister et de progresser dans la voie de l'harmonisation des droits nationaux des offres publiques, en particulier sur les questions du prix et des modalités d'adoption des mesures de défense, et répondait à la plupart des préoccupations que son collègue Yann Gaillard avait exprimées dans sa proposition de résolution de février 2003, adoptée par la commission le 12 mars 2003. Il a indiqué qu'il avait d'ailleurs déjà manifesté sa vigilance sur le processus d'adoption de la directive, en déposant une proposition de résolution, devenue résolution du Sénat le 6 juillet 2000, qui demandait une clarification de certaines dispositions sur la protection des actionnaires minoritaires. M. Philippe Marini, rapporteur général, a indiqué que le projet de loi proposait une transposition de cette directive, qu'il jugeait équilibrée.
Il a ensuite fait un bref rappel historique en évoquant que le projet communautaire de directive portant sur un cadre harmonisé des OPA remontait à juin 1985, lorsque fut publié le Livre blanc de la Commission européenne sur l'achèvement du marché intérieur. Son adoption était alors prévue pour 1989, mais la première proposition n'avait été présentée par la Commission que le 19 janvier 1989. Le texte avait ensuite fait l'objet de controverses et de versions successives, avant de n'être finalement adopté que le 21 avril 2004, dans le cadre du Plan d'action pour les services financiers.
Concernant les termes du débat communautaire, il a rappelé que les oppositions au sein des Etats membres s'étaient essentiellement cristallisées sur le manque d'« égalité des conditions de jeu », c'est-à-dire l'inégalité quant aux moyens de défense susceptibles d'être engagés par les sociétés cibles, et sur l'obligation pour les dirigeants d'obtenir l'autorisation de l'assemblée générale pour adopter de telles mesures. Cette irruption du débat sur l'égalité des conditions avait largement influencé la conception même d'une réglementation des offres publiques au sein de l'Union européenne.
Evoquant une directive à « géométrie variable », M. Philippe Marini, rapporteur général, a précisé qu'elle reposait essentiellement sur les principes de protection accrue des actionnaires minoritaires, de transparence des opérations et du contrôle, de proportionnalité entre la prise de risque et le contrôle exercé après le lancement de l'offre, et de neutralisation de certaines mesures de défense.
Il a ajouté que certaines dispositions majeures faisaient toutefois l'objet d'une harmonisation « à la carte » et que l'accord du Parlement européen et du Conseil n'avait pu être obtenu qu'au prix du caractère optionnel et non plus obligatoire de certaines des dispositions les plus importantes de la directive, qu'étaient celles de l'article 9, relatif à l'approbation préalable des mesures de défense par l'assemblée générale et, de l'article 11, relatif à la neutralisation des restrictions statutaires et conventionnelles au transfert de titres et à l'exercice des droits de vote.
Il a souligné que certaines critiques des Etats membres avaient été apaisées par les dispositions de l'article 12, qui prévoyaient un système de double option exercée par les Etats et les sociétés, lesquelles pouvaient volontairement appliquer les dispositions des articles 9 et 11, si l'Etat membre de leur siège ne les leur imposait pas, assortie d'une clause de réciprocité portant sur l'un et/ou l'autre de ces deux articles.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a indiqué que les choix de transposition du gouvernement se fondaient largement sur les conclusions du groupe de travail présidé par M. Jean-François Lepetit, dont le rapport avait été remis le 27 juin 2005, proposant une application différenciée des options ouvertes par l'article 12 de la directive. Le présent texte intégrait, dès lors, certaines conséquences importantes de la nouvelle législation communautaire, tout en préservant certains principes généraux du droit français.
Il a souligné que le projet de loi tendait à renforcer le rôle central de l'Autorité des marchés financiers (AMF), qui promouvait un certain nombre de principes généraux régissant le bon déroulement des offres publiques, mentionnés dans l'article 231-3 de son règlement général, tels que le libre jeu des offres et de leurs surenchères, l'égalité de traitement et d'information des détenteurs des titres des personnes concernées, la transparence et l'intégrité du marché et la loyauté dans les transactions et compétition.
Il a précisé qu'au-delà du régime qu'elle contribuait à façonner, l'AMF disposait également d'une certaine latitude pour clarifier les modalités d'une offre imminente ou en cours, que ce soit par exemple en vue de demander des précisions à un offrant pressenti par des rumeurs ou pour invalider certaines mesures de défense prises par la cible.
Il a indiqué qu'une société cotée qui faisait l'objet d'une OPA disposait de plusieurs moyens de défense, décidés préventivement ou en cours d'offre, dont l'efficacité et la fréquence devaient toutefois être relativisées. Il a ainsi mentionné les clauses portant sur les cessions de titres présentes dans certains pactes d'actionnaires, le recours à l'autocontrôle dans la limite de 10 % du capital, l'augmentation ou la réduction du capital, le plafonnement des droits de vote ou la forme sociale de société en commandite par actions.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a néanmoins indiqué que ces mesures ne pouvaient faire l'objet d'une improvisation. Il a estimé que leur crédibilité exigeait qu'elles soient accompagnées d'un véritable projet stratégique, susceptible de représenter une alternative à celui de l'initiateur et d'emporter la conviction des actionnaires. Il a estimé que ces mesures permettaient le plus souvent de « gagner du temps » et que la meilleure défense consistait finalement en une augmentation régulière du cours de bourse, comme en témoignait la fréquence des OPA en période de vulnérabilité boursière des sociétés cibles.
Puis il a procédé à la présentation de ses propositions.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a déclaré que celles-ci étaient guidées par des idées directrices simples. Il a précisé qu'il fallait donner à l'assemblée générale, juge en dernier ressort de l'intérêt de l'entreprise, les moyens d'exercer en connaissance de cause les responsabilités que lui conférait la directive, ce qui impliquait que les délais de convocation de l'assemblée générale fussent raccourcis pour être cohérents avec la période d'offre. Il a souligné que le nouveau régime ne devait pas pénaliser les petits actionnaires, et qu'il était dès lors nécessaire de donner toute sa portée au principe de réciprocité, de façon à ne pas rendre irréversible le désarmement volontaire vis-à-vis d'un offrant qui n'appliquerait pas les mêmes règles du jeu.
Il a considéré qu'il importait de prêter une attention particulière à la définition du « prix équitable », prévue par la directive, dans le cadre d'une offre publique obligatoire. Rappelant que l'AMF demeurait en charge de la recevabilité des offres et disposait de la faculté de demander la modification du prix proposé, en se fondant en particulier sur l' « analyse multicritères » en cas de dysfonctionnements du marché rendant le cours de bourse non significatif, il a estimé que la notion de prix équitable requérait une interprétation précise de la directive. Il a déclaré qu'il tendait à privilégier une lecture plus proche des dispositions communautaires, lesquelles définissaient le prix équitable comme le prix le plus élevé payé par l'offrant, et a proposé deux amendements tendant, d'une part, à prévoir que le prix proposé soit « équivalent » au prix le plus élevé payé par l'offrant (et ne consiste donc pas en un prix minimum « au moins équivalent ») et, d'autre part, à insérer dans la loi, plutôt que dans le règlement général de l'AMF, une période de douze mois constituant la référence pour la détermination de ce prix équitable.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a proposé un nouveau seuil spécifique de mise en oeuvre des offres publiques de retrait obligatoire consécutives à une offre publique d'acquisition, et a indiqué que l'article 5 du projet de loi maintenait le seuil de 95 % du capital ou des droits de vote, qui correspondait à la première des deux options ouvertes par l'article 15 de la directive, et au seuil actuel de mise en oeuvre d'une offre publique de retrait obligatoire en complément d'une offre publique de retrait, instauré en 1993. Il a estimé que la France serait toutefois fondée à exercer plutôt la seconde option, qui correspondait à un seuil représentant 90 % du capital assorti des droits de vote de la société cible et 90 % des droits de vote faisant l'objet de l'offre, lesquels étaient souvent désignés comme le « flottant ».
Il a estimé que cette solution, qui se traduisait par un seuil supérieur ou égal à 90 %, selon la participation initialement détenue par l'initiateur de l'offre, était en effet plus pragmatique en ce qu'elle tenait compte de la liquidité de la société cible et accordait une prime à l'offrant qui initiait l'opération « les mains vides », et permettait de se rapprocher du seuil appliqué par d'autres Etats membres, tels que le Royaume-Uni et la Belgique.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a également indiqué qu'il partageait l'approche transcrite aux articles 10 à 19 du projet de loi, s'agissant des options ouvertes sur les articles 9 et 11 de la directive. Il a souligné que la transposition « défensive » des dispositions de l'article 9, c'est-à-dire le principe de l'approbation ou de la confirmation préalable par l'assemblée générale, en cours d'offre, des mesures de défense envisagées par la société cible, permettait en effet de promouvoir le rôle des actionnaires, qui devaient pouvoir apprécier l'intérêt d'une opération exerçant des conséquences sur leurs droits patrimoniaux, indépendamment des intérêts des dirigeants. Il a rappelé que la levée de l'option afférente à la réserve de réciprocité permettait néanmoins d'établir une égalité des conditions entre l'offrant et la société cible.
Concernant les dispositions optionnelles de l'article 11 de la directive, relatives à la suspension ou à l'inopposabilité, en période d'offre, des restrictions statutaires ou conventionnelles au transfert de titres et à l'exercice des droits de vote, M. Philippe Marini, rapporteur général, a déclaré qu'il adhérait au principe de liberté des sociétés promu par le projet de loi, et à la consécration législative de certaines suspensions d'ores et déjà appliquées par l'AMF.
Il a toutefois considéré que les sociétés qui choisissaient à titre individuel l'option d'adhérer totalement aux dispositions de l'article 11 de la directive devaient également pouvoir se prévaloir du principe de réciprocité, et donc écarter ces contraintes si elles étaient attaquées par des initiateurs qui n'adhéraient pas aux mêmes « règles du jeu ». Il a ainsi estimé qu'il convenait d'exploiter au mieux toutes les options offertes par la directive.
Un débat s'est alors instauré.
Mme Nicole Bricq a souligné l'opposition qui existait, selon elle, entre les déclarations du Premier ministre sur le patriotisme économique et l'encouragement à l'application de la clause de réciprocité afférente à l'article 9 de la directive, reprise par le projet de loi.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a estimé qu'il n'existait pas d'alternative à la possibilité de s'en remettre à l'assemblée générale des actionnaires, dans la mesure où l'offre devrait in fine convaincre ces derniers.
Mme Nicole Bricq a indiqué qu'elle aurait souhaité un texte plus ambitieux au regard de la protection de l'ordre public économique, dans un contexte où les fusions et les acquisitions avaient pour conséquence des délocalisations et des fermetures de sites.
M. Jean Arthuis a observé qu'il ne convenait pas tant de déterminer la nationalité du capital des entreprises que de considérer la localisation du siège des sociétés.
M. Denis Badré, président, a rappelé les travaux qu'avait conduits en 2001 la mission commune d'information sur l'expatriation des compétences, des capitaux et des entreprises, qu'il avait présidée, au sujet de la nationalité des entreprises.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a déclaré partager la volonté de M. Jean Arthuis sur la nécessité de « briser certains tabous », soulignant en particulier qu'il existait, selon lui, « de bonnes OPA ».
La commission a ensuite procédé à l'examen des amendements présentés par M. Philippe Marini, rapporteur général.
A l'article 2 (pouvoirs de l'Autorité des marchés financiers), la commission a adopté deux amendements tendant à préciser ce qu'il fallait entendre par prix équitable en cas d'offre publique obligatoire et un amendement tendant à clarifier les pouvoirs de l'Autorité des marchés financiers en la matière.
A l'article 5 (aménagement du régime du retrait obligatoire), la commission a adopté deux amendements. Le premier amendement propose que soit exercée la seconde option prévue par la directive, consistant à autoriser un retrait obligatoire à l'issue d'une offre publique, dès que l'offrant a acquis au moins 90 % des droits de vote faisant l'objet de l'offre d'une part, et détient in fine un minimum de 90 % du capital et des droits de vote. Le second amendement prévoit que l'indemnisation effectuée dans le cadre du retrait obligatoire consécutif à une offre publique puisse être constituée par un règlement en titres à condition qu'un règlement en numéraire soit systématiquement proposé à titre d'option.
A l'article 6 (transparence des mesures susceptibles d'avoir une influence sur le cours de l'offre), après une intervention de Mme Nicole Bricq, la commission a adopté un amendement de clarification, ainsi qu'un amendement rédactionnel et trois amendements de précision.
A l'article 7 (information des salariés), la commission a adopté un amendement rédactionnel.
A l'article 10 (approbation préalable ou confirmation des mesures de défense par l'assemblée générale en période d'offre), elle a adopté un amendement apportant deux modifications rédactionnelles, un amendement prévoyant la possibilité de réduire, par voie réglementaire, les délais de convocation de l'assemblée générale en période d'offre, ainsi que deux autres amendements rédactionnels.
A l'article 11 (clause de réciprocité), après une intervention de M. Denis Badré, la commission a adopté deux amendements. Le premier présente un caractère rédactionnel et le second tend à modifier l'application de la clause de réciprocité afférente à l'article 9 de la directive, en cas d'offres publiques concurrentes, afin d'éviter que des offrants potentiels n'appliquant pas le régime de gouvernance de l'article 9 ne puissent bénéficier des mesures de désarmement de la directive qu'une société cible serait obligée de prendre en cas d'offre émanant d'un initiateur vertueux.
A l'article 12 (inopposabilité obligatoire des restrictions statutaires au transfert de titres), la commission a adopté un amendement de coordination.
A l'article 13 (inopposabilité obligatoire des restrictions statutaires au transfert de titres), elle a adopté un amendement de coordination.
A l'article 14 (suspension facultative des restrictions contractuelles à l'exercice des droits de vote), elle a adopté un amendement de coordination.
A l'article 15 (suspension facultative des restrictions statutaires à l'exercice des droits de vote), elle a adopté deux amendements, l'un de conséquence et l'autre rédactionnel.
A l'article 16 (suspension des restrictions statutaires en cas de réussite de l'offre), la commission a adopté un amendement de coordination.
A l'article 17 (suspension sur une base volontaire des restrictions statutaires et conventionnelles en cas de réussite de l'offre), après avoir adopté un amendement de coordination, elle a adopté un amendement rédactionnel.
A l'article 18 (suspension sur une base volontaire des droits extraordinaires concernant les dirigeants sociaux en cas de réussite de l'offre), elle a adopté un amendement de coordination avec un amendement apporté à l'article 10.
A l'article 19 (publicité par l'Autorité des marchés financiers des cas de suspension volontaire), la commission a adopté deux amendements, l'un rédactionnel et l'autre relatif à l'application de la clause de réciprocité aux dispositions de l'article 11 de la directive OPA.
A l'article 21 (entrée en vigueur de la loi et dispositions transitoires), après une intervention de Mme Nicole Bricq, elle a adopté un amendement tendant à avancer la date d'entrée en vigueur de la loi au 15 mars 2006.
M. Jean Arthuis, président, a remercié M. Philippe Marini, rapporteur général, pour la qualité de son travail et les améliorations significatives qu'il avait proposées dans ses amendements, nonobstant la brièveté des délais qui avaient présidé à la rédaction de son rapport.
La commission a ensuite adopté l'ensemble du projet de loi ainsi modifié.