Travaux de la commission des finances
- Mardi 31 octobre 2000
- PJLF pour 2001 - Crédits de l'équipement, des transports et du logement : I. - Services communs - Examen du rapport
- PJLF pour 2001 - Crédits de l'équipement, des transports et du logement : II. - Urbanisme et logement - Examen du rapport
- PJLF 2001 - Crédits de la Culture - Examen du rapport
- Epargne salariale - Examen du rapport
- Jeudi 2 novembre 2000
Mardi 31 octobre 2000
- Présidence de M. Alain Lambert, Président.
PJLF pour 2001 - Crédits de l'équipement, des transports et du logement : I. - Services communs - Examen du rapport
La commission a procédé à l'examen des crédits du ministère de l'équipement, des transports et du logement : I. - Services communs, sur le rapport de M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial.
En préalable à la présentation du budget des services communs, M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial, a rappelé que ce budget faisait, chaque année, l'objet de modifications de structure très substantielles, puis de transferts en cours d'année, qui rendaient sa signification limitée. Il a ajouté que l'information du Parlement était insuffisante, expliquant que seule la moitié des réponses au questionnaire budgétaire qu'il avait adressé au ministère lui était parvenue et que parmi ces réponses, des données essentielles, comme la présentation du budget à structure constante, n'étaient pas fiables. Il a conclu en soulignant toute la relativité de la présentation de ce budget et en exigeant que le ministère de l'équipement, des transports et du logement réalise enfin des efforts de transparence.
Puis M. Jacques Pelletier a précisé que les crédits des services communs du ministère de l'équipement, des transports et du logement, s'élevaient à 26,9 milliards de francs pour 2001, soit une progression apparente de 9,8 % par rapport à 2000, masquant une quasi-stabilité à structure constante, selon ses estimations. Il a rappelé que ce budget était constitué à 99,2 % de dépenses ordinaires et correspondait donc presque exclusivement à des crédits de personnels et de fonctionnement.
Il a ensuite présenté ses principales observations.
Il a tout d'abord indiqué que le budget des services communs, bien qu'en quasi-stabilité pour 2001, était marqué par un coup d'arrêt aux réductions d'effectifs. En effet, la rémunération des personnels progressera seulement de 0,2 % en raison d'une modération salariale, et non du fait d'un effort de réduction d'effectifs, comme c'était le cas les deux années précédentes. Pour 2001, 11 emplois seront créés, et concerneront des postes de contrôleurs des travaux publics de l'Etat, des emplois pour l'autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires et les services d'examen du permis de conduire. Toutefois, il a relevé que les chiffres concernant les effectifs du ministère donnés dans le " bleu " budgétaire ne correspondaient pas à ceux mentionnés dans le rapport du contrôleur financier du ministère et que les effectifs autorisés par la loi de finances divergeaient des effectifs réels. Il en a conclu qu'il était très délicat de faire un bilan précis des personnels des services communs. De même, il a expliqué que le budget comprenait de nombreuses modifications statutaires, des repyramidages, la titularisation de personnels contractuels, et que ces mouvements faisaient l'objet d'explications très limitées dans les documents budgétaires. Concernant les dépenses de fonctionnement, il a estimé que celles-ci étaient globalement maîtrisées, en raison d'efforts de productivité des services.
En conclusion de cette première observation, M. Jacques Pelletier a estimé qu'il conviendrait de se féliciter de la stabilité du budget de personnel et de fonctionnement du ministère de l'équipement, des transports et du logement, si cette stabilité n'était excessivement fragile en raison des inévitables accords salariaux qui, en l'absence d'efforts sur le niveau des effectifs, ne manqueront pas d'augmenter les dépenses de personnels à l'avenir.
Regrettant qu'aucune étude approfondie ne permette de mesurer exactement les besoins tant en personnels qu'en moyens de fonctionnement dans les différents domaines d'action du ministère, M. Jacques Pelletier a ensuite souligné l'urgence de promouvoir une comptabilité analytique, qui permettrait notamment de savoir exactement le nombre d'agents affectés à telle ou telle action ministérielle. Il s'est félicité que, pour la première fois, le " bleu " budgétaire comprenne un tableau de répartition des coûts, mais il a regretté que celui-ci soit établi sur une simple enquête auprès des services, et il a souhaité qu'une méthode d'évaluation permanente soit mise en place.
Enfin, le rapporteur spécial a considéré que la stabilisation de la présentation du budget constituait une nécessité démocratique. Il a rappelé que le budget des services communs était un budget à géométrie variable, qui comprenait de nombreux transferts en loi de finances initiale, 24 transferts pour 2001, et des modifications encore plus substantielles en cours d'année. Le rapport du contrôleur financier a, par exemple, montré que l'effectif autorisé par la loi de finances pour 1999 avait été dépassé de 4.581 emplois par transferts.
Il a conclu que le budget des services communs, bien qu'en apparente stabilité pour 2001, ne marquait pas une stabilisation durable, mais plutôt une pause dans un mouvement d'ensemble de progression des dépenses de personnel et de fonctionnement au détriment des dépenses d'investissement des budgets civils de l'Etat.
A l'issue de cette présentation, la commission a décidé de réserver sa position jusqu'à l'audition du ministre de l'équipement, des transports et du logement.
PJLF pour 2001 - Crédits de l'équipement, des transports et du logement : II. - Urbanisme et logement - Examen du rapport
La commission a ensuite procédé à l'examen des crédits de l'équipement, des transports et du logement : II - Urbanisme et logement, sur le rapport de M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial.
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial, a tout d'abord précisé que ce budget progressait de 1,2 % pour s'établir à 48,7 milliards de francs, les dépenses ordinaires représentant 36 milliards de francs, soit une hausse de 2 % et les dépenses en capital, 12,7 milliards de francs, soit une diminution de 1,3 %.
M. Jacques Pelletier a ensuite présenté ses principales observations.
Il a déclaré que la réforme des aides personnelles, qu'il avait appelée de ses voeux, nécessitait d'être parachevée. Il a rappelé que l'an dernier, il avait vivement regretté qu'une réforme d'envergure ne soit pas entreprise dans un contexte économique pourtant très favorable. Il s'est donc réjoui de constater que suite aux conclusions d'un groupe de travail entre l'Etat et la caisse nationale d'allocations familiales, une réforme des aides personnelles avait été annoncée lors de la conférence sur la famille du 15 juin 2000. Il a précisé que cette réforme poursuivait deux objectifs : d'une part, harmoniser et simplifier les barèmes des aides regroupées dans un barème unique, d'autre part, améliorer l'équité de ces aides en prenant en compte tous les revenus de la même manière. La réforme sera mise en place en deux étapes, en 2001 et 2002, et aura un coût très important, au total 6,5 milliards de francs, dont une partie sera prise en charge sur les crédits du secrétariat d'Etat au logement.
Se félicitant d'une telle réforme ayant pour objet de mettre sur un pied d'égalité les revenus de transferts et les revenus d'activité, le rapporteur spécial a toutefois fait observer les faiblesses du nouveau dispositif.
Il a indiqué que la réforme s'était faite par le haut, c'est-à-dire que toutes les prestations avaient été revalorisées sans souci d'économie, alors que les sources d'économies potentielles étaient nombreuses. Il a cité la révision des conditions de ressources pour l'octroi des aides personnelles, notamment s'agissant des étudiants, et la remise à plat des frais de gestion des caisses d'allocations familiales. Il a estimé qu'à défaut d'économies, le risque était grand, en cas de retournement de la conjoncture, de rencontrer des difficultés pour financer la réforme.
Il a ensuite indiqué que la réforme était incomplète en ce qu'elle ne prenait pas en compte les aides à l'accession à la propriété. Il a estimé que l'on retrouvait là le souci du gouvernement de privilégier la location plutôt que l'accession des personnes modestes à la propriété, ce qui se traduisait par ailleurs par la réduction des moyens accordés au prêt à taux zéro. Il a précisé que certaines formes d'hébergement, comme les logements-foyers, n'étaient pas concernées par la réforme. Il a enfin indiqué que la réforme était inachevée en ce qu'elle n'aboutissait pas à une unification complète des aides à la personne qui supposerait, il est vrai, une réforme du conventionnement.
Enfin, il a regretté que le financement des aides personnelles soit réalisé au détriment des aides à la pierre. Il a fait observer un effet de ciseaux entre l'augmentation des aides à la personne et des aides à la pierre, alors que des économies substantielles auraient pu être réalisées, par exemple sur l'épargne-logement.
En conclusion sur la réforme des aides personnelles, M. Jacques Pelletier a regretté que la priorité donnée à cette réforme, qui avait inévitablement un coût, ne s'accompagne pas des mesures structurelles indispensables à la pérennisation de l'effort en faveur de ces aides.
Le rapporteur spécial a ensuite déploré que les aides à la pierre souffrent de la priorité accordée aux aides à la personne. Il a relevé que pour compenser l'effort consenti en faveur des aides à la personne, toute une série de lignes budgétaires seraient réduites en 2001. S'agissant des moyens relatifs à la lutte contre les exclusions, il a noté la réduction des crédits de lutte contre le saturnisme, des crédits liés à la participation au fonds de solidarité pour le logement, de l'aide aux associations logeant des personnes défavorisées et des crédits destinés à la lutte contre l'habitat insalubre. Il a noté l'octroi de moyens nouveaux pour le financement des aires de nomades, à hauteur de 17 millions de francs, tout en craignant que ces moyens soient insuffisants pour permettre une bonne application de la loi relative à l'accueil des gens du voyage.
S'agissant des moyens dévolus à l'agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH) et à la prime pour l'amélioration de l'habitat, il a regretté que la fusion de ces aides s'accompagne d'une forte réduction des crédits de paiement ouverts pour 2001, ce qui contraindra l'ANAH à puiser dans sa trésorerie pour compenser la chute des dotations budgétaires. Il a remarqué que cette solution ne pouvait avoir de caractère pérenne et que de nouveaux moyens devraient être dégagés en 2002 pour ne pas pénaliser la rénovation du logement privé.
M. Jacques Pelletier a ensuite souligné la réduction de l'efficacité du prêt à taux zéro. Compte tenu de la croissance de la demande et de l'augmentation des taux d'intérêt, qui conduisent à l'augmentation du coût moyen des prêts, il a remarqué que la légère diminution de la dotation en faveur de l'accession à la propriété traduisait en réalité une baisse sensible de l'efficacité du dispositif. Il a rappelé que de nouvelles mesures de restriction avaient été prises récemment afin de limiter le coût budgétaire des prêts : un arrêté du 29 décembre 1999 a plafonné la subvention de l'Etat et un arrêté du 29 septembre 2000 a réduit la période de remboursement des prêts. Le rapporteur spécial a considéré que sans être complètement sacrifiés, les moyens en faveur de l'accession à la propriété des ménages modestes ne cessaient de se réduire en termes réels, alors même que le contexte économique actuel rendait l'effort public plus nécessaire. Il a cité la hausse des taux d'intérêts des prêts immobiliers, de 5,3 % en 1999 à 6,1 % en 2000 et la montée des prix des logements, le prix des appartements ayant progressé de 9,2 % au premier semestre 2000 et le prix des maisons de 12,3 %. Dans ces conditions, il a estimé que le risque d'un affaiblissement de la solvabilité des ménages était réel, particulièrement pour les plus modestes, et que l'action des pouvoirs publics était donc nécessaire.
M. Jacques Pelletier, rapporteur spécial, a ensuite expliqué que la construction sociale se trouvait toujours dans l'impasse. Il a rappelé que malgré la création du prêt locatif à usage social (PLUS), le gouvernement ne parvenait pas à relancer la construction de logements sociaux. Tout en soulignant que les organismes HLM avaient une responsabilité importante dans le rythme des mises en chantier de nouveaux logements, il a rappelé que la hausse du taux du livret A à 3 % avait réduit d'environ 20 milliards de francs les avantages accordés au secteur social.
Il a regretté la manière dont le problème du logement social était posé aujourd'hui. Il a rappelé que tous les chiffres montraient que la part de la construction sociale dans la construction neuve tendait à diminuer dans l'Union européenne. Il a expliqué que le gouvernement avait choisi un dispositif coercitif à l'égard des collectivités locales en leur imposant un quota d'au moins 20 % de logements sociaux à compter du 1er janvier 2002, afin de contrer cette évolution. Il a mis en garde les pouvoirs publics sur l'idée que l'échec de la construction sociale reposerait sur les seules collectivités locales ou les organismes sociaux, alors même que l'Etat avait, à de nombreuses reprises, modifié la réglementation des prêts au logement social et entretenu une certaine confusion.
Il a enfin rappelé que le contexte économique avait changé et qu'un débat sur la seule construction sociale n'était pas suffisant. Il a tenu à rappeler le rôle du parc social de fait et de l'accession à la propriété. Il a expliqué qu'il fallait enfin reconnaître que la qualité du logement des personnes à faibles revenus ne dépendait pas uniquement du nombre de logements sociaux construits, mais également des mesures en faveur de leur accès au parc privé. A cet égard, il a rappelé que la commission des finances du Sénat avait approuvé sans réserve la volonté du secrétaire d'Etat au logement de créer un parc de logements locatifs conventionnés. Il a souhaité que le Gouvernement développe en conséquence tous les efforts nécessaires à la consolidation d'un secteur locatif privé intermédiaire.
En conclusion, M. Jacques Pelletier a rappelé le contexte très favorable dans lequel était élaboré le budget de l'urbanisme et du logement pour 2001. L'année 2000 était en effet marquée par un fort dynamisme du marché immobilier, accentué par les mesures fiscales relatives à la baisse des droits de mutation et à la réduction du taux de TVA pour les travaux réalisés dans les logements d'habitation. Dans ces conditions, il a considéré que le budget pouvait être un budget de continuité et il s'est déclaré personnellement favorable à son adoption.
Toutefois, il a regretté qu'aucune réforme ne soit prise concernant les dispositifs importants qui souffrent actuellement d'insuffisance, à savoir le prêt locatif à usage social, le prêt à taux zéro, les dispositions fiscales relatives à l'investissement privé locatif. Il a estimé que la remontée des taux d'intérêt, l'augmentation des prix du marché immobilier, les incertitudes pesant sur la solvabilité des ménages nécessitaient pourtant de préparer l'avenir.
Un débat s'est alors ouvert, auquel ont participé M. Jacques Oudin et M. Alain Lambert, président.
En réponse à M. Jacques Oudin, M. Jacques Pelletier a indiqué qu'il ne disposait pas de toutes les informations nécessaires pour commenter les chiffres des effectifs du ministère de l'équipement, des transports et du logement, en raison de l'incapacité des services et du cabinet ministériel à lui transmettre en temps utile toutes les informations qu'il souhaitait. Il a expliqué que s'il pouvait obtenir dans de bonnes conditions des réponses du secrétariat d'Etat au logement sur le budget " urbanisme et logement ", aucun motif ne justifiait une information aussi partielle et ténue pour le budget des services communs. Il a expliqué qu'il ne disposait d'aucun chiffre précis sur le nombre de mises à dispositions du ministère de l'équipement, mais il a indiqué que celles-ci étaient certainement plus faibles que dans d'autres départements ministériels, comme l'éducation nationale.
En réponse à M. Alain Lambert, président, il a déclaré que dans tous les pays de l'Union européenne, la part de la construction sociale dans la construction neuve tendait à diminuer et que, dans ces conditions, la faiblesse de la construction sociale en France n'était en rien une exception.
A l'issue de ce débat, la commission a décidé d'attendre l'audition de M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement, avant de se prononcer sur les crédits de l'équipement des transports et du logement - II. Urbanisme et logement, le président Alain Lambert rappelant que les crédits du ministère de l'équipement, des transports, du logement ne donneraient lieu qu'à un seul vote.
PJLF 2001 - Crédits de la Culture - Examen du rapport
Puis la commission a examiné le rapport de M. Yann Gaillard, rapporteur spécial des crédits de la culture.
Avant de présenter ses principales observations, le rapporteur spécial a rappelé les principales données chiffrées relatives aux crédits de la culture : le budget croît de 590 millions de francs en termes de crédits de paiement, pour atteindre 16,67 milliards de francs, ce qui fait apparaître une hausse de + 3,67 %. Il a toutefois fait observer qu'à périmètre constant, cette croissance n'était que de 2,57 %, si l'on tenait compte d'un transfert de 176 millions de francs, au titre des charges de retraite, en provenance du budget des charges communes.
Il a noté qu'avec 0,997 % du budget de l'Etat, le montant de ces crédits se rapprochait de l'objectif de 1 %, fixé, il y a maintenant vingt ans, pour les crédits de la culture.
S'interrogeant sur le sens de cet objectif, le rapporteur spécial en a souligné le caractère arbitraire et attiré l'attention sur ce qu'un tel indicateur pouvait avoir de critiquable, dans la mesure où il faut savoir passer du " plus " au " mieux " culturel. Il a noté que l'objectif du 1 % n'a été atteint que par suite de la montée en puissance des grands travaux et de l'extension du périmètre du ministère, dont le champ de compétence s'est accru avec le rattachement des services de l'architecture et de crédits des bibliothèques.
Puis le rapporteur spécial a évoqué l'équilibre Paris/régions en matière d'investissements culturels : contrairement à l'année dernière, les crédits d'investissements à Paris sont, avec 744 millions de francs, supérieurs à ceux des investissements en régions, soit 600 millions de francs. Observant que ce retournement tient pour une bonne part à l'inscription des crédits du musée du Quai Branly, qui, à lui seul absorbe plus de la moitié des crédits parisiens, M. Yann Gaillard a indiqué que cette centralisation était tempérée par la poursuite du mouvement de déconcentration des crédits.
En ce qui concerne le patrimoine, le rapporteur spécial a fait trois observations montrant que ce domaine ne constituait pas une vraie priorité pour le gouvernement :
· en matière d'entretien, l'Etat ne dépense, pour les 87 cathédrales et les 100 monuments historiques dont il a la charge, que 200.000 francs en moyenne par bâtiment, ce qui est cruellement insuffisant ;
· le patrimoine, qui, par le passé, a subi le poids des annulations budgétaires, supporte aujourd'hui l'essentiel des efforts de maîtrise de la dépense que le ministère des finances impose au ministère de la culture dans le cadre des contrats de gestion ;
· c'est le fonds du patrimoine, déjà chichement doté, qui finance, par transfert de crédits, le coût de l'extension de la gratuité d'accès aux musées nationaux.
Abordant alors des considérations à caractère financier, le rapporteur spécial a fait les observations suivantes :
· l'institutionnalisation des reports de crédits dans le cadre des contrats de gestion aboutit en fait à des reports plus importants par suite des difficultés structurelles de consommation des crédits en matière de monuments historiques ;
· les indications contenues dans les documents de présentation du budget du ministère de la culture montrent que les effectifs de ce ministère, administration et établissements publics, ont été considérablement renforcés avec 1.175 créations de postes, entre 1996 et 1999, dont une petite moitié seulement correspond à une régularisation d'emplois précaires ;
· des efforts croissants sont constatés en matière de gestion des interventions culturelles : tandis qu'on assiste à la généralisation et à un perfectionnement continu de la comptabilité analytique, il semble que l'on évolue vers des systèmes d'aides n'aboutissant plus nécessairement à la reconduction automatique des subventions.
Répondant aux questions de MM. Philippe Marini, rapporteur général, Jacques Oudin et Joseph Ostermann, ainsi que de M. Alain Lambert, président, M. Yann Gaillard, rapporteur spécial, a indiqué :
· que des listes de monuments historiques en état de péril étaient disponibles par région et sans doute par département ;
· que la situation de la Réunion des Musées Nationaux s'était rétablie et qu'à sa connaissance cet organisme avait dégagé un résultat positif de plus de 20 millions de francs en 1999 ;
· que la tempête de la fin décembre 1999 avait joué le rôle de révélateur du mauvais entretien de notre patrimoine monumental et que l'aide prévue par la loi de finances rectificative pour 2000 était plus rapidement mise en oeuvre pour les bâtiments appartenant à l'Etat que pour les autres ;
· que la fondation du patrimoine créée par la loi de 1996 ne démarrait que lentement par suite de retards dans la mise en place du dispositif incitatif sur lequel doit s'appuyer ses interventions ;
· qu'il fallait, en matière d'archéologie préventive, attendre le premier bilan du texte qui vient d'être adopté par le Parlement.
A l'issue de ce débat, la commission a décidé, sur proposition du rapporteur spécial, de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la culture.
Epargne salariale - Examen du rapport
Puis la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Joseph Ostermann sur le projet de loi n° 11 (2000-2001), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, sur l'épargne salariale.
Le rapporteur a tout d'abord expliqué que ce projet de loi avait une longue histoire et se voulait l'apport de la majorité plurielle à l'oeuvre de la participation ouverte par le Général de Gaulle. Il a énuméré les cinq objectifs affichés par le Gouvernement :
- inciter davantage les entreprises à mettre en place des accords proposant les outils de l'épargne salariale, en améliorant les dispositifs existants ;
- étendre l'épargne salariale à ceux qui en sont exclus, notamment : mandataires sociaux des entreprises de moins de cent salariés, création de plans d'épargne interentreprises (PEI) pour les petites et moyennes entreprises (PME) ;
- créer un nouvel outil d'épargne longue : le plan partenarial d'épargne salariale volontaire (PPESV) ;
- renforcer les droits des salariés, et en particulier revoir les mécanismes d'implication des salariés actionnaires ;
- et ouvrir l'épargne salariale vers des placements dits " solidaires ".
Il a regretté que ce texte, reflet de compromis, soit parsemé d'incohérences, de malfaçons et d'erreurs.
Il a expliqué qu'il avait cherché, par souci de pragmatisme, à perfectionner et simplifier les propositions du Gouvernement, modifiées par l'Assemblée nationale, et à renouveler les différentes propositions que le Sénat avait formulées l'année dernière sur des thèmes proches. Il s'est félicité d'avoir travaillé de concert avec le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, M. Jean Chérioux.
Il a donc proposé de conserver le PEI, déjà proposé par M. Jean Chérioux, destiné à étendre l'épargne salariale dans les PME, en l'améliorant par l'extension des modes de négociation. Il a souhaité conserver, au prix d'une amélioration forte, le PPESV en le transformant en un plan glissant de dix ans, et en étendant les modalités de conclusions de l'accord. Il a expliqué qu'il ne voulait pas entrer dans le débat sur l'assimilation ou non du PPESV à un produit de retraite. Il a considéré que la question de la retraite était à la fois trop urgente et trop importante pour être traitée par le biais d'instruments imparfaits, qui, à hésiter entre des objectifs inconciliables, n'en atteindraient aucun.
Au titre de son souci de reprendre les propositions du Sénat, il a indiqué qu'il laisserait au rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales le soin d'introduire dans le texte les dispositions déjà adoptées par la Haute Assemblée sur l'actionnariat salarié. Il a ensuite exposé les travaux de MM. Jean Arthuis et Charles Descours sur l'épargne-retraite déjà adoptés par le Sénat. Il a indiqué qu'il lui semblait que le Sénat devait prendre ses responsabilités et intégrer à ce projet de loi un titre nouveau proposant la mise en place de véritables plans d'épargne-retraite. Il a conclu en indiquant que la réforme des retraites ne pouvait plus attendre : alors que le Gouvernement se contente de faire des rapports, le Sénat doit montrer qu'il agit.
La commission a ensuite procédé à l'examen des articles.
A l'article premier A (nouveau) relatif à la modification d'intitulés dans le code du travail, la commission a adopté un amendement proposant de revenir au titre initial, tout en le complétant pour tenir compte des différents plans d'épargne salariale, ainsi qu'un amendement de coordination.
A l'article premier relatif à l'ancienneté minimale requise pour bénéficier des dispositifs d'épargne salariale, la commission a adopté un amendement rédactionnel.
A l'article 2 relatif au transfert des valeurs épargnées dans un plan d'épargne d'entreprise (PEE) en cas de départ de l'entreprise, la commission a adopté deux amendements de précision, un amendement supprimant la création du livret d'épargne salariale et un amendement autorisant le transfert des sommes détenues par le salarié dans un PEI vers un PEI de même durée minimale auquel aurait adhéré son employeur.
A l'article 3 relatif au plan d'épargne de groupe, la commission a adopté quatre amendements visant l'un à supprimer la référence au code de la mutualité, l'autre à élargir la définition du groupe retenue par cet article, le troisième à préciser les conditions dans lesquelles un fonds commun de placement d'entreprise (FCPE) peut investir dans les parts d'une société coopérative et le quatrième visant à éviter la remise en cause des accords existants à la date de promulgation de la présente loi.
Puis la commission a adopté sans modification l'article 3 bis (nouveau) relatif à l'intéressement infra-annuel.
A l'article 3 ter (nouveau) relatif à l'assujettissement des unités économiques et sociales de plus de cinquante salariés à la participation obligatoire, la commission a adopté deux amendements de précision, afin que le dispositif proposé par cet article ne soit pas interprété comme imposant à toutes les unités économiques et sociales la mise en place d'un accord de participation de groupe.
La commission a ensuite adopté un amendement de suppression de l'article 3 quater (nouveau) relatif à la suppression du blocage de la participation pendant trois ans.
A l'article 3 quinquies (nouveau) relatif à la formation des membres des conseils de surveillance des FCPE, la commission a adopté un amendement rédactionnel.
A l'article 3 sexies (nouveau) relatif au compte spécial d'épargne-temps, la commission a adopté un amendement supprimant la faculté donnée aux salariés de décider de manière unilatérale de l'affectation du produit de leur épargne salariale dans le compte épargne-temps, ainsi qu'un amendement rédactionnel.
La commission a alors adopté un amendement de suppression de l'article 3 septies (nouveau) relatif à la création de sociétés d'investissement à capital variable dédiées à l'épargne salariale.
A l'article 4 relatif à la provision pour investissement et aux dispositions diverses relatives à l'épargne salariale, la commission a adopté deux amendements étendant la notion de groupe et assouplissant les conditions pour le calcul de la performance des salariés des holdings, un amendement sécurisant les accords de participation, et un amendement validant les accords d'intéressement passés dans le cadre de la réduction et de l'aménagement du temps de travail.
A l'article 5 relatif aux PEI, la commission a adopté un amendement visant à élargir les modes de négociation de tels plans : au cas où il serait conclu entre entreprises prises individuellement, un PEI pourrait être établi non seulement par accord collectif, mais aussi par le vote des comités d'entreprise ou la ratification à la majorité des deux tiers des salariés de chaque entreprise concernée.
A l'article 5 bis (nouveau) relatif à l'extension aux coopératives agricoles, la commission a adopté un amendement rédactionnel.
A l'article 6 relatif à la participation des mandataires sociaux aux PEE, la commission a étendu à 500 salariés le seuil en dessous duquel les mandataires sociaux peuvent bénéficier des PEE et a adopté un amendement rédactionnel.
La commission a ensuite adopté un amendement de suppression de l'article 6 bis (nouveau) relatif au fonds de solidarité de l'épargne salariale.
A l'article 6 ter (nouveau) relatif à l'affectation des fonds en déshérence aux fonds de réserve pour les retraites, la commission a adopté un amendement rédactionnel.
A l'article 7 relatif aux PPESV, la commission a adopté cinq amendements. En premier lieu, elle a adopté un amendement élargissant les modalités d'institution de tels plans : ils pourront être conclus non seulement par accord collectif, mais aussi à l'initiative de l'entreprise, par le vote du comité d'entreprise ou encore par la ratification à la majorité des deux tiers des salariés. Puis elle a adopté des amendements supprimant le plan à terme fixe proposé par le Gouvernement pour ne conserver que le plan glissant, transformant l'obligation de prévoir des investissements dans des fonds solidaires en une simple faculté, précisant que des versements à ces fonds ne pourront se faire qu'à l'initiative des participants, et enfin supprimant la contribution de 8,2 % sur la fraction du versement complémentaire de l'employeur supérieure à 15.000 francs.
A l'article 8 relatif aux dispositions diverses relatives au PPESV, la commission a adopté sept amendements dont deux amendements de précision rédactionnelle. Elle a également adopté un amendement indexant les plafonds applicables aux versements complémentaires de l'employeur sur le plafond de la sécurité sociale. Elle a adopté un amendement de coordination avec sa proposition à l'article 14 de ne pas permettre aux entreprises d'abonder le PEE en titres de cette entreprise, et un autre amendement de coordination avec la suppression du PPESV à terme fixe proposée à l'article 7. Elle a adopté un amendement permettant aux entreprises d'utiliser la provision pour investissement dans un délai de deux ans et un autre amendement supprimant la faculté offerte aux entreprises d'utiliser cette provision au titre des stages de formation.
Puis elle a adopté, sans modification, l'article 8 bis (nouveau) relatif aux cas de sorties anticipées d'un PEE.
A l'article 9 relatif à l'économie solidaire, la commission a adopté, outre un amendement rédactionnel, quatre amendements :
- de suppression de la limitation à ce texte de la définition de l'économie solidaire ;
- de rétablissement de la condition de rémunération pour la définition de l'économie solidaire ;
- d'abaissement du seuil maximal de titres que peut détenir un FCPE dans une même entreprise solidaire.
A l'article 10 relatif à l'obligation d'offrir des modes de placements sécurisés dans le cadre d'un PEE, la commission a adopté un amendement rédactionnel et un amendement supprimant une disposition de nature réglementaire.
A l'article 10 bis (nouveau) relatif à l'information des conseils de surveillance des FCPE, la commission a adopté un amendement simplifiant le dispositif proposé.
A l'article 11 relatif aux diverses dispositions relatives à la négociation collective en matière d'épargne salariale, la commission a adopté deux amendements rédactionnels, ainsi qu'un amendement remplaçant la procédure de consultation du comité d'entreprise en cas de création d'un PEE par décision unilatérale de l'employeur par une procédure d'information et un amendement accompagnant l'obligation de dépôt du PEE auprès du directeur départemental du travail d'un dispositif qui renforce la sécurité juridique des entreprises.
A l'article 12 relatif au conseil de surveillance des FCPE, la commission a adopté huit amendements visant à supprimer l'obligation de choisir le président du conseil de surveillance parmi les porteurs de parts, à limiter les pouvoirs de décision du conseil de surveillance en matière d'apports de titres aux offres d'achat ou d'échange, à consacrer au niveau législatif la faculté pour les FCPE d'investir dans des titres de capital émis par les coopératives dans les conditions fixées par décret, à supprimer deux dispositions tendant à donner au conseil de surveillance du FCPE les mêmes pouvoirs qu'au comité d'entreprise, à supprimer une disposition incompatible avec la législation sur les offres publiques d'achat, à supprimer la référence au rapport simplifié annuel que doit adopter le conseil de surveillance et à allonger le délai accordé aux FCPE pour mettre leurs règlements en conformité avec les dispositions de cet article.
A l'article 13 relatif à la représentation des salariés actionnaires dans les organes dirigeants des sociétés, la commission a adopté un amendement rédactionnel, ainsi que trois amendements visant à supprimer l'obligation faite aux entreprises de s'interroger tous les trois ans sur la nécessité de faire élire des administrateurs, ou, le cas échéant des membres du conseil de surveillance, par les salariés et à rétablir le dispositif existant en matière de calcul de la part du capital détenue par les salariés.
A l'article 14 relatif aux incitations au développement de l'actionnariat salarié, la commission a adopté trois amendements visant à supprimer la faculté, pour les entreprises, d'abonder les PEE avec des titres de l'entreprise. Puis elle a adopté trois amendements rédactionnels et deux amendements visant, l'un à supprimer l'obligation pour l'assemblée générale extraordinaire de se prononcer sur la réalisation d'une augmentation de capital réservée aux salariés lorsqu'elle a délégué ses pouvoirs au conseil d'administration et l'autre à supprimer la référence à un décret pour le calcul du prix de cession des titres qui ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé.
A l'article 15 relatif aux procédures applicables aux entreprises du secteur public, la commission a adopté un amendement visant à limiter l'intervention de la commission des participations et des transferts.
Puis elle a adopté une division additionnelle après l'article 15 relative à l'épargne-retraite.
Elle a ensuite adopté sept articles additionnels après l'article 15 instaurant un dispositif complet d'épargne-retraite sous forme de plans de retraite, gérés par des personnes morales dédiées dites " fonds de retraite ", afin de fournir un complément de retraite à l'ensemble des salariés du secteur privé, soit quelque 14 millions de personnes.
La commission a alors adopté un amendement relatif à l'intitulé du projet de loi afin d'y intégrer la notion d'épargne-retraite.
Enfin, elle a décidé de proposer au Sénat d'adopter le projet de loi ainsi modifié.
Jeudi 2 novembre 2000
- Présidence de M. Alain Lambert, président.
PJLF 2001 - Emploi et solidarité - Examen du rapport
Au cours d'une séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport de M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial, sur les crédits consacrés à l'emploi et à la solidarité, dans le projet de loi de finances pour 2001.
M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial, a indiqué que les crédits du ministère de l'emploi s'élevaient, dans le projet de loi de finances pour 2001, à 111,83 milliards de francs, alors qu'ils s'établissaient à 122,07 milliards de francs en 2000 : cette diminution de 1,9 %, après une progression de 2,3 % en 2000, montre que le budget de l'emploi, en raison de l'amélioration conjoncturelle du marché du travail, ne constitue plus une priorité pour le Gouvernement.
Le rapporteur spécial a ensuite fait part des quatre observations que lui inspirent les dotations allouées à l'emploi pour 2001. Il a d'abord déploré que le budget de l'emploi ne retrace pas l'ensemble des crédits de la politique de l'emploi. Le coût des 35 heures, en effet, n'apparaît pas dans le budget, étant supporté par le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC), dont le rapporteur avait dénoncé l'année dernière la grande complexité en parlant " d'usine à gaz ". Seuls 280 millions de francs sont inscrits au budget de l'emploi pour 2001 au titre des aides au conseil dans le cadre des 35 heures, alors que les dotations du FOREC s'établiront à 85 milliards de francs. Il a dès lors considéré que le budget de l'emploi n'était plus sincère et que le véritable coût de la politique de l'emploi devait prendre en compte non seulement les dotations du ministère, mais également celles du FOREC, soit un total de 196,83 milliards de francs.
M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial, a ensuite noté que l'amélioration de la situation de l'emploi connaissait de réelles limites. Certes, le taux de chômage est revenu de 12,6 % de la population active à la mi-1997 à 9,6 % au milieu de cette année, mais il a estimé que cette évolution était fragile, tenant uniquement à la bonne conjoncture. Le chômage français reste à un niveau élevé, 9,6 %, contre 9 % dans la zone euro, 8,3 % dans l'Union européenne, 2,5 % aux Pays-Bas et 4,1 % aux Etats-Unis. Par ailleurs, l'amélioration de la situation de l'emploi est inégale, les femmes, les jeunes, les non ou peu diplômés, les salariés précaires, les chômeurs de longue durée continuant d'être touchés plus sévèrement que la moyenne nationale par le chômage. Il a surtout déploré qu'un recul important du chômage se heurte au niveau élevé du chômage structurel, évalué par la Caisse des dépôts et consignations à 8 % de la population active, mais à 3 % seulement aux Etats-Unis. Il a d'autre part regretté que l'incitation au travail en France reste trop faible, et le coût du travail, trop élevé. Ce phénomène, connu sous le nom de " trappe à inactivité ", dissuade certaines personnes de chercher du travail en raison de gains de revenus trop faibles, voire nuls, par rapport aux montants des minima sociaux dont elles peuvent bénéficier : il est donc financièrement plus intéressant pour elles de rester au chômage.
M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial, a ensuite expliqué que, seule, la conjoncture permet au Gouvernement de dégager des économies sur les crédits de l'emploi. Cela se vérifie à travers la forte baisse des flux d'entrée dans les dispositifs de la politique de l'emploi : ainsi le nombre de contrats initiative-emploi a-t-il diminué de 41 % depuis 1997, celui des contrats-emploi consolidé de 47 % et celui des contrats emploi-solidarité, de plus de 48 %. Il s'est inquiété de l'absence de réformes structurelles susceptibles de faire reculer le montant du budget de l'emploi, ses crédits n'allant pas manquer de connaître une vive expansion en cas de retournement conjoncturel et de reprise du chômage.
Enfin, il a observé que les échéances se rapprochaient pour les emplois-jeunes. En 2001, le coût de ce dispositif s'accroît de 3,1 %, soit un rythme moins rapide qu'en 1999 et 2000, en raison du ralentissement de la montée en charge du dispositif, 22 milliards de francs étant tout de même inscrits au budget au titre des emplois-jeunes en 2001. Il a rappelé que, à la fin du mois d'août dernier, ils étaient 263.800, le Gouvernement escomptant le recrutement de 280.000 jeunes à la fin de cette année. Il continue d'afficher son objectif initial de porter le nombre de jeunes embauchés à 350.000 d'ici la fin de l'année 2001. Le rapporteur spécial a toutefois mis en évidence le fait que, si cet objectif était atteint, les crédits inscrits dans le budget général s'avéreraient très insuffisants, le coût en année pleine de 350.000 emplois-jeunes s'établissant en effet à environ 37 milliards de francs pour le seul budget de l'Etat, alors que seulement 24,6 milliards de francs sont prévus pour 2001. En effet, il convient de garder à l'esprit que le budget de l'emploi ne regroupe pas l'ensemble des crédits destinés au financement des emplois-jeunes, les budgets de l'éducation nationale, de l'intérieur, de la justice et de l'outre-mer étant également sollicités. Il a fait part de ses inquiétudes sur l'avenir de ces jeunes, rappelant que cette question avait été très bien analysée par M. Alain Gournac dans le rapport qu'il a établi au nom de la commission des affaires sociales sur le bilan, à mi-parcours, des emplois-jeunes.
M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial, a ensuite présenté les quatre articles rattachés, pour leur examen, au budget de l'emploi.
L'article 57 propose une fois encore de s'en prendre au financement de l'apprentissage en réservant l'aide à l'embauche aux employeurs occupant au plus dix salariés. Cette mesure ne poursuit en aucun cas un objectif de réforme de la formation professionnelle, qui est souvent annoncée, mais elle est uniquement motivée par la recherche d'économies budgétaires estimées à 117 millions de francs, soit un montant relativement modique au regard des sommes considérables mobilisées par certains dispositifs, les 35 heures en premier lieu. Par ailleurs, il n'existe pas de lien automatique entre la diminution du chômage des jeunes, qui reste par ailleurs plus élevé que la moyenne, et les besoins de formation comme le montre l'apparition de pénuries de main-d'oeuvre dans certains secteurs.
L'article 58 propose de supprimer le dispositif d'exonération de cotisations familiales pour les salariés des entreprises non agricoles, situées dans des zones défavorisées. La suppression de ces dispositifs aurait pour effet de ne plus tenir compte de la situation des entreprises concernées, dont les avantages avaient été institués précisément pour encourager la création d'emplois dans ces zones défavorisées, et par conséquent pour lutter soit contre la désertification des campagnes, soit contre l'exclusion sociale continuant d'affecter certains quartiers urbains.
M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial, a ensuite présenté les articles 59 et 60. Le premier vise à proroger de 18 mois, jusqu'au 30 juin 2002, le dispositif du contrat de qualification-adulte et de fixer au 30 juin 2001 la date à laquelle les partenaires sociaux doivent avoir terminé leurs négociations en vue de pérenniser ce dispositif expérimental. Le second article propose de reporter le terme de l'expérimentation du dispositif dénommé " encouragement au développement d'entreprises nouvelles (EDEN) " de deux ans, jusqu'au 31 décembre 2002 , afin de bénéficier du temps nécessaire à son expérimentation.
Un débat s'est ensuite instauré.
M. Gérard Braun a voulu savoir s'il était possible de continuer de recruter des emplois-jeunes au-delà de l'année 2001, puis a exprimé ses inquiétudes quant à l'avenir des jeunes embauchés, notamment dans les associations et les collectivités territoriales.
M. Philippe Adnot a voulu connaître le montant du FOREC en 2001, ainsi que le nombre d'emplois qu'il permettrait d'aider. Il a ensuite estimé que les emplois-jeunes étaient à l'origine d'un effet d'éviction à l'égard des contrats emploi-solidarité, plus adaptés aux publics les plus défavorisés.
M. Alain Lambert, président, a manifesté son attachement à la sincérité des comptes publics et par conséquent à celle du budget de l'emploi, regrettant que la totalité du coût de la politique de l'emploi ne puisse être simplement appréhendée. Il a également fait part de son attachement à la reprise d'activité par de nombreuses personnes longtemps marginalisées du marché du travail, ce qui l'avait amené, avec le rapporteur général, M. Philippe Marini, à déposer une proposition de loi tendant à instituer un revenu minimum d'activité (RMA). Il a enfin voulu savoir quelles seraient les conséquences financières de la nouvelle convention d'assurance-chômage pour le budget de l'emploi.
M. Joseph Ostermann, rapporteur spécial, a rappelé que le Gouvernement avait prévu d'achever le recrutement des 350.000 emplois-jeunes à la fin de l'année 2001et que, par conséquent, l'effet sur l'emploi de ce dispositif après cette date devrait être quasi-nul. Il a indiqué que, avant son départ du Gouvernement, Mme Martine Aubry avait estimé que 55 % des emplois-jeunes dans les associations étaient solvabilisés et que les autres devaient faire l'objet d'une réflexion tendant à leur permettre d'intégrer le marché du travail. Il a rappelé que le FOREC devrait supporter des dépenses à hauteur de 67 milliards de francs en 2000 et de 85 milliards de francs en 2001, alors que la réduction du temps de travail, d'après le Gouvernement lui-même, permettrait au milieu de cette année de créer ou de préserver plus de 220.000 emplois : comme le Sénat l'avait à plusieurs reprises affirmé, on ne connaîtra jamais le nombre exact d'emplois créés par les 35 heures, d'autant plus que les créations dont il est question ne sont que des engagements, et non des décisions fermes. Le nombre de contrats emploi-solidarité a nettement diminué depuis 3 ans, les publics les plus défavorisés étant en effet pénalisés par la priorité accordée aux emplois-jeunes. En vertu de la nouvelle convention d'assurance-chômage, l'Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC) devrait verser 7 milliards de francs à l'Etat, mais ni les modalités de versement, ni l'utilisation de cette somme, ni même le support législatif utilisé pour y procéder ne sont connus à l'heure actuelle.
Puis, conformément aux recommandations du rapporteur spécial, la commission a décidé de proposer au Sénat le rejet du projet de budget de l'emploi pour 2001, la suppression des articles 57 et 58 rattachés, ainsi que l'adoption sans modification des articles 59 et 60.
Mission de contrôle relative à la situation, la gestion et les rémunérations des personnels du ministère de l'emploi - Communication
Puis la commission a entendu une communication de MM. Joseph Ostermann et Gérard Braun sur leur mission de contrôle relative à la situation, la gestion et les rémunérations des personnels du ministère de l'emploi.
Après que MM. Joseph Ostermann et Gérard Braun, rapporteurs, eurent présenté leurs conclusions, un débat s'est engagé.
M. Philippe Adnot a estimé qu'il était nécessaire, selon lui, d'ajouter à l'ensemble des personnels intervenant dans la mise en oeuvre de la politique de l'emploi les effectifs des associations intervenant dans ce secteur, dont la création est souvent suggérée par le directeur régional ou départemental du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, et auxquelles les collectivités territoriales versent des subventions. Il a considéré qu'il n'était pas condamnable pour un ministère de recruter des personnels contractuels, sauf si cela a pour objectif de masquer la progression réelle des effectifs.
M. Yann Gaillard s'est étonné de ce que l'absentéisme de certaines catégories de fonctionnaires soit aussi important et a souhaité obtenir des informations complémentaires. Il a déclaré partager l'analyse des rapporteurs concernant le malaise de l'inspection du travail, notant toutefois que ce malaise résultait de l'inadaptation de ces agents aux réalités sociales, rappelant que les inspecteurs du travail avaient été en conflit avec Mme Martine Aubry et qu'ils prétendent échapper à toute autorité hiérarchique. Il a déploré la complexité croissante de la réglementation qui pose des problèmes aux services de l'Etat eux-mêmes. Enfin, il a rappelé que les ministères sociaux avaient très longtemps disposé de moyens extrêmement limités.
M. Alain Lambert, président, a considéré que, en raison d'un chômage toujours important dans notre pays, les services du ministère de l'emploi devaient être gérés de façon exemplaire. Il a estimé que l'inspection du travail avait souvent une conception extensive de ses compétences et qu'elle tendait à s'ériger en instance quasi-juridictionnelle. Puis il a souhaité obtenir des informations complémentaires sur les difficultés d'adaptation des services de l'Etat au passage des entreprises aux 35 heures, ainsi que sur les personnels du ministère mis à disposition.
M. Gérard Braun, rapporteur, a expliqué que le malaise de l'inspection du travail provenait de difficultés d'adaptation au changement d'orientation de leur administration, passée du contrôle de la législation du travail et de la sanction de sa transgression à la promotion de l'emploi. Il a indiqué que, au ministère de l'emploi, il n'existait pas de définition du taux d'absentéisme de ses agents. Des chefs de service rencontrés lui ont indiqué que certains agents, ceux de catégorie C notamment, pouvaient présenter un taux de dépassement des droits à congé annuel considérable, même si ces situations diffèrent en fonction de la personnalité du chef de service. Enfin, il a rappelé que, afin de contourner le principe consistant, à partir du milieu des années 1990, à réduire le nombre d'agents de l'administration centrale, environ 70 fonctionnaires de cette dernière ont été statutairement affectés dans les services déconcentrés d'Ile-de-France, alors que, en réalité, ils continuaient d'exercer leur activité à l'administration centrale.
M. Joseph Ostermann, rapporteur, a ajouté que le système des primes était géré de manière excessivement rigide, donnant de ce fait peu de marge aux chefs de service pour rémunérer leurs agents au mérite. Il a également rappelé que l'ensemble des personnels rencontrés au cours de ses déplacements s'était plaint de la lourdeur du travail engendré par la mise en oeuvre de la législation sur la réduction du temps de travail, qui se fait au détriment d'autres tâches, pourtant essentielles, du ministère. De surcroît, ces difficultés risquent d'être plus grandes encore au moment du passage des petites et moyennes entreprises aux 35 heures.
La commission a alors donné acte aux rapporteurs de leur communication et a décidé d'autoriser la publication de leurs conclusions sous la forme d'un rapport d'information.