Travaux de la commission des finances
- Mardi 25 octobre 2005
- Contrôle budgétaire - Rapport de la Cour des comptes relatif aux fonds octroyés aux ONG françaises par le ministère des affaires étrangères - Audition de M. Philippe Etienne, directeur général de la coopération internationale et du développement (DGCID) du ministère des affaires étrangères, M. Jean-Louis Sabatier, chef de la mission pour la coopération non gouvernementale et de M. Alain Pichon, président de la quatrième Chambre de la Cour des comptes, accompagné de M. Gilles-Pierre Levy, conseiller-maître et de Mme Hélène Gadriot-Renard, conseiller-référendaire
- PJLF pour 2006 - Audition de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la Défense
- Contrôle budgétaire - Rapport de la Cour des comptes relatif aux fonds octroyés aux ONG françaises par le ministère des affaires étrangères - Audition de M. Philippe Etienne, directeur général de la coopération internationale et du développement (DGCID) du ministère des affaires étrangères, M. Jean-Louis Sabatier, chef de la mission pour la coopération non gouvernementale et de M. Alain Pichon, président de la quatrième Chambre de la Cour des comptes, accompagné de M. Gilles-Pierre Levy, conseiller-maître et de Mme Hélène Gadriot-Renard, conseiller-référendaire
- Mercredi 26 octobre 2005
- Projet de loi d'orientation agricole - Examen du rapport pour avis
- PJLF pour 2006 - Mission « Travail et emploi » - Examen du rapport spécial
- PJLF pour 2006 - Mission « Santé » - Examen du rapport spécial
- PJLFSS pour 2006 - Demande de renvoi pour avis et nomination d'un rapporteur pour avis
- Groupe de travail intercommissions sur la recherche - Désignation de candidats
- Projet de loi d'orientation agricole - Examen du rapport pour avis
- Jeudi 27 octobre 2005
- Présidence de M. Jean Arthuis, président.
Contrôle budgétaire - Rapport de la Cour des comptes relatif aux fonds octroyés aux ONG françaises par le ministère des affaires étrangères - Audition de M. Philippe Etienne, directeur général de la coopération internationale et du développement (DGCID) du ministère des affaires étrangères, M. Jean-Louis Sabatier, chef de la mission pour la coopération non gouvernementale et de M. Alain Pichon, président de la quatrième Chambre de la Cour des comptes, accompagné de M. Gilles-Pierre Levy, conseiller-maître et de Mme Hélène Gadriot-Renard, conseiller-référendaire
La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Philippe Etienne, directeur général de la coopération internationale et du développement (DGCID) du ministère des affaires étrangères, M. Jean-Louis Sabatier, chef de la mission pour la coopération non gouvernementale (MCNG) et de M. Alain Pichon, président de la quatrième Chambre de la Cour des comptes, accompagné de M. Gilles-Pierre Levy, conseiller-maître et de Mme Hélène Gadriot-Renard, conseiller référendaire, pour suite à donner au rapport de la Cour des comptes relatif aux fonds octroyés aux ONG françaises par le ministère des affaires étrangères.
M. Jean Arthuis, président, a préalablement rappelé que l'audition à laquelle procédait la commission était la treizième de ce type, en application de l'article 58 alinéa 2 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), qui prévoyait la réalisation, par la Cour des comptes, de « toute enquête demandée par les commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances sur la gestion des services ou organismes qu'elle contrôle ». Il a indiqué que cette audition, du fait de son objet, était ouverte aux membres de la commission des affaires étrangères, ainsi qu'à la presse, comme le bureau de la commission l'avait décidé, afin d'assurer un débat aussi ouvert et fructueux que possible.
Il a précisé que la Cour des comptes avait adressé à la commission, le 14 juin 2005, une « communication » sur les fonds octroyés aux organisations non gouvernementales (ONG) françaises par le ministère des affaires étrangères. Celui-ci avait également transmis, la veille de l'audition, ses réponses au relevé de constatations provisoires de la Cour ainsi que le rapport d'observations définitives.
Il a ajouté que la Cour des comptes avait procédé à une enquête auprès de la Mission pour la coopération non gouvernementale (MCNG) et vérifié les comptes et la gestion de quatre ONG, sans toutefois effectuer des contrôles dans leurs zones d'intervention. Le rapport transmis par la Cour des comptes mettait en évidence quatre points principaux :
- une absence de maîtrise de la définition des objectifs et des moyens consacrés par l'Etat aux ONG ;
- une sous-estimation récurrente de la part réelle des fonds publics dans le financement de ces associations ;
- des faiblesses dans le suivi et le contrôle de l'usage des subventions publiques, et des évaluations parfois sous-traitées à d'autres ONG ;
- certains dysfonctionnements dans la gestion financière des ONG contrôlées.
Il a ensuite invité M. Alain Pichon, président de la quatrième Chambre de la Cour des comptes, à présenter brièvement le contenu de son rapport.
M. Alain Pichon, président de la quatrième Chambre de la Cour des comptes, a rappelé les conditions dans lesquelles le président de la commission, par lettre du 18 mai 2004, avait sollicité la Cour des comptes pour que celle-ci réalise, dans le cadre de l'article 58-2 précité de la LOLF, un contrôle sur les fonds octroyés par le ministère des affaires étrangères aux ONG françaises, lors de la mise en oeuvre d'opérations et projets en temps de paix, à l'exclusion de l'urgence humanitaire. Il a indiqué que la quatrième Chambre de la Cour avait d'abord vérifié auprès de la MCNG du ministère des affaires étrangères, les subventions versées par l'Etat aux ONG et relevant de l'aide publique au développement. Elle avait ensuite décidé de procéder au contrôle particulier d'un échantillon d'ONG, dont les dossiers disponibles à la MCNG étaient lacunaires ou pouvaient laisser supposer des insuffisances de gestion. Elle avait ainsi sélectionné quatre ONG représentatives, mais ayant des modalités d'intervention diverses (prestations intellectuelles ou réalisations concrètes) et présentant des surfaces financières très variées :
- le groupement de recherche et d'études technologiques (GRET), qui avait reçu des subventions publiques directes à hauteur de 7,5 millions d'euros en 2002, soit 65 % de ses ressources, et à hauteur de 6,3 millions d'euros en 2003, soit 51 % ;
- « Eau vive », qui avait perçu 820.000 euros de subventions en 2002, soit 64 % de ses ressources, et un million d'euros en 2003, soit 67 % ;
- « Coordination SUD », à laquelle avaient été versés 370.000 euros en 2002 (soit 54 % du montant des produits d'exploitation) et 640.000 euros en 2003 (soit presque 60 % de ces produits) ;
- Agriculteurs français et développement international (AFDI), qui avait perçu des subventions à hauteur d'un million d'euros en 2002, soit 87 % des produits nets, les fonds versés par le ministère des affaires étrangères représentant 68 % de ce montant, et 1,4 million d'euros en 2003, soit 79 % des produits nets, la part du ministère des affaires étrangères correspondant à 57 % de la somme.
Il a indiqué que les quinze ONG les plus subventionnées par la MCNG avaient reçu 24,1 millions d'euros en 2002 et 21 millions d'euros en 2003. L'Association française des volontaires du progrès (AFVP) avait reçu, à elle seule, 52 % de cette somme en 2002 et 53 % en 2003. Trois des ONG retenues par la Cour des comptes (le GRET, « Eau Vive » et « Coordination SUD ») représentaient chaque année 10 % des subventions versées aux quinze associations les plus subventionnées, et 23 % en 2003 hors AFVP.
M. Alain Pichon a indiqué que la Cour des comptes avait, parallèlement, conduit une enquête sur l'AFVP, mais que cet organisme, qui était opérateur de l'Etat, ne pouvait être considéré comme une ONG à part entière, ce qui avait conduit à n'utiliser que marginalement, dans le rapport communiqué au Sénat, les constatations la concernant. Elles feraient l'objet d'une insertion au rapport public annuel 2005.
Il a ajouté que la Cour des comptes procédait actuellement à un contrôle très approfondi sur pièces et sur place de l'Agence française de développement (AFD), incluant cinq missions sur le terrain, qui aboutirait, après la phase de contradiction, à l'émission d'un rapport dit « bleu », qui serait également transmis à la commission.
Il a ensuite précisé qu'outre les contacts récurrents entretenus avec les responsables du ministère des affaires étrangères, le rapporteur de la Cour des comptes avait systématiquement rencontré les responsables des associations contrôlées au début de chaque enquête, et que de multiples entretiens complémentaires avaient, en outre, eu lieu tout au long des contrôles ainsi qu'à la clôture de la phase d'instruction. La lettre d'accompagnement du relevé de constatations provisoires qui avait été adressée aux présidents des associations leur proposait, conformément aux dispositions du code des juridictions financières, d'être auditionnés par la quatrième Chambre. Tous avaient répondu par écrit, mais aucun d'entre eux n'avait demandé à être entendu par la Chambre. Il a indiqué que chaque ONG contrôlée avait reçu un relevé d'observations définitives, assorti de critiques et de recommandations de gestion qui avaient également été adressés au ministère des affaires étrangères et au contrôle financier.
M. Alain Pichon a rappelé les principales constatations auxquelles la Cour des comptes était parvenue au terme de son enquête.
Devant l'abondance du nombre des ONG bénéficiaires de subventions publiques et la variété des domaines dans lesquels elles intervenaient au sein de nombreux pays éligibles à l'aide au développement, il n'apparaissait pas que le ministère des affaires étrangères ait la maîtrise de la définition des objectifs et des moyens consacrés par l'Etat à cette forme d'aide extérieure. Outre le fait que certaines ONG, à vocation médicale ou technique, souvent les plus importantes par la taille ou la notoriété, échappaient à sa compétence, celles qui en relevaient ne faisaient pas l'objet d'un suivi rigoureux. Cela obérait toute possibilité de réelle évaluation par les services du ministère de l'usage des fonds publics qui y étaient affectés. Il a précisé que ces crédits, d'un montant de 53 millions d'euros en 2005, demeuraient de faible ampleur et ne représentaient que 0,7 % de l'ensemble des crédits affectés à l'aide au développement. Ils étaient attribués, selon lui, davantage selon une pratique de reconduction des subventions, qu'en fonction d'une appréciation critique des résultats obtenus en regard des coûts exposés.
L'évaluation par la MCNG restait, selon lui, insuffisante, car celle-ci n'avait pas les moyens de la conduire elle-même, si bien qu'elle la sous-traitait souvent à d'autres ONG, qui étant « juge et partie », ne disposaient pas de l'indépendance nécessaire à l'expression d'un constat objectif.
S'agissant des ONG elles-mêmes, il a indiqué que plusieurs aspects des comptes et de la gestion méritaient d'être clarifiés ou réformés, tels que la surévaluation de l'expertise, la non-comptabilisation des subventions d'origine publique indirecte, la production défaillante de pièces justificatives des dépenses, les rémunérations accessoires accordées avec facilité, et la régularisation des libéralités non fiscalisées.
Il a estimé que la part réelle des fonds publics dans le financement de ces associations était fortement sous-estimée, et que les ONG, qui tiraient une part de leur légitimité de leur caractère « privé », avaient tendance à minorer dans leurs comptes les aides publiques autres que celle du ministère des affaires étrangères, à ne pas comptabiliser les subventions indirectes, telles que la mise à disposition de personnels et de locaux, et, à l'inverse, à surévaluer les apports en prestations de services. Une clarification de leur régime comptable lui semblait donc nécessaire, et il a considéré que le ministère devait se montrer plus exigeant dans les informations et les compétences qu'il recevait des associations subventionnées.
M. Alain Pichon a toutefois souligné que la Cour des comptes, dont les contrôles ne s'étaient pas traduits par des vérifications sur les lieux d'intervention des ONG, n'avait pas constaté dans les comptes et les documents consultés au siège des organisations, des situations de « gaspillages ou de gabegies » significatives, tout en relevant néanmoins un certain nombre de dysfonctionnements. Elle avait fait part aux quatre ONG spécialement contrôlées d'observations et de suggestions pour corriger certains défauts d'organisation et des lacunes statutaires, et dénoncé diverses libéralités indûment octroyées aux personnels. Il a, dès lors, appelé à davantage de rigueur.
Il a ajouté que la Cour des comptes avait jugé nécessaire, dans un cas précis, de saisir la direction générale des impôts, mais n'avait, en revanche, pas jugé que les faits constatés par ailleurs, certes répréhensibles, relevaient d'une telle gravité qu'ils rendissent nécessaire la saisine de la CDBF, voire de recourir à l'article 40 du code de procédure pénale.
Il a précisé que le suivi assuré par la MCNG était particulièrement lacunaire, de telle sorte que le bailleur public était devenu un « distributeur automatique de fonds », dont on attendait qu'il renouvelât systématiquement ses versements antérieurs. Il a considéré qu'il apparaissait clairement, à l'issue des contrôles, que nombre d'ONG françaises survivaient essentiellement grâce aux fonds publics. Dans ce contexte, une surveillance rigoureuse, sans être nécessairement pesante, devait s'imposer aux bailleurs qui devaient, de même, exiger de voir reconnue leur participation.
Il a finalement estimé qu'une stratégie en objectifs et performances au sens de la LOLF restait sans doute encore à clarifier. La France pouvait certes, selon lui, s'appuyer sur un réseau d'ONG, où le dévouement à la cause de l'aide au développement était indéniable quoique dispersé, mais la clarté comptable, la rigueur de gestion, le souci de rendre compte des objectifs poursuivis, l'obligation de justifier de l'emploi de tout l'argent public reçu, et enfin la démarche d'évaluation des résultats obtenus restaient encore très perfectibles, dans les mentalités comme les structures.
M. Philippe Etienne, directeur général de la coopération internationale et du développement, a présenté ses observations et considéré que l'enquête de la Cour des comptes avait permis d'établir un débat substantiel et des échanges intenses avec celle-ci, dont il ressortait des points de convergence et de divergence. Il a annoncé les trois axes de son propos : la place des ONG dans la coopération française, les réponses que le ministère avait formulées aux observations de la Cour des comptes et les mesures prises ou prévues pour remédier aux lacunes observées.
Il a précisé que la place et la taille des ONG en France était inférieure à celle qu'elles occupaient dans d'autres Etats européens, et que les fonds publics qui leur étaient octroyés représentaient 1,14 % des crédits d'aide publique au développement, contre 5 % dans la plupart des Etats membres de l'Organisation pour la coopération et le développement économique, et jusqu'à 10 % dans les pays d'Europe du nord. Il a rappelé que le Comité interministériel pour la coopération internationale et le développement (CICID) avait toutefois acté l'engagement du Président de la République de doubler cette part d'ici 2009. Il a estimé que les ONG pouvaient également jouer un rôle important et apporter une réelle plus-value en matière de coopération de proximité, de mobilisation de l'opinion publique et de relais des propositions de la France sur certains thèmes transversaux, tels que les financements innovants de l'aide au développement. Il a, à cet égard, fait référence au rôle joué par certaines associations à Sumatra et à Madagascar.
Il a néanmoins reconnu qu'en dehors de l'aide humanitaire d'urgence, les ONG françaises se caractérisaient par une taille insuffisante, une réelle dispersion et une trop grande dépendance vis-à-vis des fonds publics. Il a relevé qu'un rapport de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale les avaient assimilées à des « entreprises à but non lucratif ».
M. Philippe Etienne a rappelé que le ministère des affaires étrangères ne pouvait financer plus de la moitié des projets, et qu'il encourageait la constitution de collectifs et de « plates-formes » d'ONG. Il a admis que le grief portant sur une logique de « guichet » n'était pas injustifié, mais a indiqué que la DGCID avait demandé aux ONG de se concentrer davantage sur certains pays, tels Haïti et le Soudan, où leur action sur place aurait un plus grand impact.
Revenant sur les critiques émises par la Cour des comptes, il a contesté celle portant sur le chiffrage peu cohérent ou imprécis des subventions accordées aux ONG, en indiquant que ses services disposaient d'un bilan par pays et avaient, dans un premier temps, souhaité répondre rapidement à la Cour des comptes, ce qui les avait conduit à fournir des données provisoires. S'agissant du suivi considéré par la Cour des comptes comme « peu rigoureux » et susceptible d'obérer le contrôle de l'usage des fonds publics, il a tenu à relativiser l'impression d'une absence de contrôle. Il a souligné que la MCNG analysait précisément chaque dossier de subvention, que les associations devaient contractuellement fournir un compte-rendu financier, que l'octroi des subventions pouvait être échelonné en fonction des résultats, que toutes les sommes indûment versées étaient récupérées, et que le visa d'un commissaire aux comptes était requis lorsque la subvention excédait un montant de 150.000 euros. Il a également indiqué que la DGCID conduisait actuellement une enquête afin de déterminer la part des fonds publics français ou internationaux dans le financement de l'ensemble des associations subventionnées.
Il a relevé que la pratique incriminée de reconduction de subventions, s'apparentant à un « abonnement », était aussi liée à la programmation triennale de certaines subventions et au fait qu'un assez petit nombre d'ONG apparaissait crédible. Il a indiqué que la MCNG les incitait à mieux s'organiser et à contracter des partenariats plus durables. S'agissant des déficiences de l'évaluation, il a précisé que celle-ci était indépendante, quel que soit l'organisme initialement porteur, et qu'elle pouvait donner lieu à des rectifications des actions menées, comme cela avait été le cas au Cambodge.
Puis il a abordé les mesures que le ministère envisageait ou avait déjà mises en oeuvre pour remédier aux dysfonctionnements constatés, et qui étaient de deux ordres. En premier lieu, il a indiqué que la Commission coopération-développement aurait plus systématiquement recours aux appels à propositions selon les priorités géographiques et sectorielles de la DGCID, accompagnerait la création d'ONG plus importantes, à l'instar des organisations anglo-saxonnes, accentuerait la réflexion sur le statut juridique des ONG et la part que devaient représenter les fonds publics dans leur financement, et mettrait en place des conventions d'objectifs et de moyens pour les organisations les plus dépendantes des subventions du ministère. En second lieu, il a annoncé une refonte de l'organigramme de la DGCID, la séparation, au sein de la MCNG, des missions afférentes à la coopération décentralisée et à la coopération internationale des ONG, et la réorganisation du suivi administratif et financier de chaque ONG subventionnée, en examinant notamment le nombre de salariés, la valorisation des apports en nature, ou le ratio des financements publics rapportés aux fonds propres. Il a précisé que le circuit de décision serait également rationalisé, en cohérence avec la LOLF, que les indicateurs de résultats déjà utilisés pour les subventions supérieures à 300.000 euros seraient généralisés, que l'instruction des dossiers serait davantage décentralisée et qu'une meilleure communication sur l'aide apportée par l'Etat auprès des populations bénéficiaires de l'action des ONG serait mise en oeuvre.
M. Jean Arthuis, président, a remercié M. Philippe Etienne, directeur général de la coopération internationale et du développement, pour ses éclaircissements et la réactivité dont le ministère avait ainsi fait preuve.
M. Michel Charasse, rapporteur spécial de la mission « Aide publique au développement », s'est déclaré satisfait que la commission ait retenu la suggestion d'enquête qu'il avait formulée au début de l'année 2004, mais a considéré que les investigations de la Cour des comptes étaient partielles. Il a rappelé que le thème de cette enquête s'inscrivait dans la continuité des contrôles sur place qu'il avait menés depuis 1992, et au cours desquels il avait relevé de nombreux manquements des ONG, qui n'étaient cependant généralement pas de nature délictueuse. Il a regretté que la Cour des comptes n'ait pas procédé à des contrôles sur place dans certains postes diplomatiques, où les lacunes et le manque de suivi était analogues à ce qui avait été constaté dans l'administration centrale du ministère, de telle sorte que ses conclusions ne relevaient, selon lui, qu'une partie des dysfonctionnements des ONG. Il a également relevé que l'AFD aurait probablement davantage recours à ces associations, en particulier du fait des récents transferts de projets issus du Fonds de solidarité prioritaire. Cela ne pouvait que souligner la légitimité de cette enquête.
Evoquant le plus grand recours des autres Etats européens aux ONG, il a relevé que cette politique s'expliquait, notamment, par le fait qu'ils ne disposaient pas toujours d'un ministère chargé de la coopération. Il a estimé qu'une action importante des ONG à Haïti était justifiée, dans la mesure où la présence de l'Etat y était faible, à la différence de la société civile.
M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a ensuite posé plusieurs questions relatives aux conclusions de l'enquête de la Cour des comptes, portant en particulier sur les échéances de révision de l'agrément des ONG accordé par le ministère, sur les perspectives d'amélioration des délais d'instruction et de recours à la dématérialisation des dossiers, sur l'évaluation de la part réelle des financements publics, sur les aménagements du « vade-mecum » envisagés, sur les réflexions du groupe de travail mis en place et traitant des procédures de mise en concurrence, sur les moyens mis en oeuvre pour accroître la perception par les ONG de la réversibilité des fonds publics, sur les loyers dus par certaines ONG, et notamment par le GRET au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), sur les subventions « gigognes » et les rémunérations accessoires, ou sur les moyens prévus pour améliorer le suivi lacunaire exercé par la MCNG. Il a considéré que l'action des ONG relevait parfois de la « générosité payante » et que les fonds collectés auprès des bailleurs et du public ne se traduisaient, dans certains cas, que pour moitié par des actions sur le terrain. Il a cependant observé, pour s'en féliciter, que les congrégations religieuses obtenaient généralement des résultats avec très peu de moyens. Il a enfin relevé que les lacunes en matière de compte-rendu n'étaient pas uniquement le fait des ONG, mais également des universitaires en mission dans les pays du champ de la coopération, particulièrement dans le domaine des sciences humaines.
Mme Hélène Luc a souligné l'intérêt des observations des représentants de la Cour des comptes et du ministère des affaires étrangères, et a souhaité que la commission des affaires étrangères puisse, à l'avenir, auditionner des représentants d'ONG. Elle a rappelé que les ONG françaises étaient souvent les premières à agir sur le terrain en situation d'urgence, et qu'il était nécessaire d'avoir une vision précise de leur travail, au-delà des seuls enjeux financiers.
M. Philippe Etienne a rappelé que l'enquête de la Cour des comptes avait porté sur les ONG qui n'étaient pas prioritairement impliquées dans l'urgence humanitaire, et a indiqué que le ministère des affaires étrangères était entré dans un processus de réforme à l'égard de l'AFVP.
M. Jean Arthuis, président, a constaté que les investigations de la Cour des comptes concluaient à de réelles marges de progression et à une insuffisance de contrôle et de pilotage. Il a considéré, en outre, que les ONG, qui étaient très majoritairement financées par des fonds publics, devenaient semblables à des commandites.
M. Philippe Etienne a précisé que le rapport accessible sur le site Internet de la DGCID datant de 2001, intitulé « Argent et organisations de solidarité internationale » verrait ses données prochainement actualisées. Il a rappelé que les financements publics pouvaient être d'origine française ou internationale. Il a indiqué, en outre, que ses services avaient amorcé une réflexion sur une stratégie permettant d'augmenter l'accès des ONG françaises aux financements du Fonds européen de développement dont la France était le premier bailleur avec une quote-part de 24,3 %, et de l'Union européenne, compte tenu de la concurrence qui existait, dans les faits, avec les ONG étrangères. Il a ajouté que les difficultés posées par les ONG agissant en tant qu'opérateurs de l'Etat justifiaient qu'elles fissent l'objet d'un traitement différencié par des conventions d'objectifs et de moyens. Il a enfin précisé que les subventions accordées par les postes transitaient essentiellement par le Fonds social de développement et étaient, surtout, destinées à des ONG locales.
M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a considéré que ces ONG locales étaient le plus souvent des émanations d'ONG françaises. Il a ajouté qu'il importait d'appréhender la part des fonds publics de manière globale, quelle que soit leur origine.
M. Philippe Etienne a exposé des exemples d'ONG locales relevant de l'Etat partenaire, ou susceptibles de « monter en puissance » grâce à leur collaboration avec des ONG françaises. En réponse à certaines questions formulées par M. Michel Charasse, il a indiqué que les demandes de comptes rendus financiers, si elles ne se révélaient pas systématiques, seraient améliorées, qu'un redressement de la situation du GRET au regard de ses loyers était en cours, que les « trop perçus » par les ONG, bien qu'en faible nombre, étaient tous recouvrés, et que des instructions seraient données aux services de coopération et d'action culturelle pour accroître la rigueur du suivi des dossiers.
M. André Dulait s'est interrogé sur le nombre total d'associations récipiendaires des subventions du ministère des affaires étrangères.
Mme Catherine Tasca a estimé que la rationalisation globale des relations financières avec les ONG devait s'inscrire dans une politique claire de recours aux acteurs privés de la coopération. Elle s'est interrogée sur le périmètre d'action de ces associations, afin de déterminer celles qui bénéficiaient d'une externalisation légitime de la coopération française, et pour lesquelles un soutien financier de l'Etat serait dès lors justifié. Considérant l' « éparpillement » et la taille variable des ONG, elle s'est également demandée par quels moyens l'Etat pouvait susciter des fusions, des synergies entre programmes et la mutualisation des moyens sur place. Elle a estimé que le constat de reconduction automatique des subventions était sans doute plus apparent que réel, et qu'une évaluation positive de l'action d'une association devait conduire à pérenniser le soutien de l'Etat au-delà de la période de programmation de trois ans. Elle a enfin jugé qu'en dépit de la faible part qu'elles représentaient dans l'aide publique au développement française, les ONG jouaient un rôle utile et ne devaient donc pas être stigmatisées par le constat de leurs seules lacunes.
M. Jean Arthuis, président, a approuvé le principe d'un regroupement d'ONG, susceptible de faciliter l'organisation des missions et la mutualisation des moyens.
M. Jean-Pierre Plancade a estimé que l'analyse de la Cour des comptes était pertinente, et que les ONG, du fait de leur rôle social et politique, assumaient certaines fonctions que l'Etat ne pouvait pas remplir. Cette forme de « délégation de service public » justifiait, selon lui, le recours à un cahier des charges et aux appels d'offres. Il a également considéré que la logique de guichet n'était pas condamnable en soi, dès lors que le contrôle et le suivi se révélaient rigoureux.
M. Jean-Jacques Jégou a fait part de son intérêt pour les propos tenus par M. Michel Charasse, rapporteur spécial de la mission « Aide publique au développement », et a établi un parallèle entre le recours par l'Etat aux ONG, d'une part, et aux associations dans le cadre de la lutte contre la toxicomanie, d'autre part. Il a considéré que la concurrence entre ONG intervenant en situation de crise était « curieuse » et « paradoxale », et que ces associations devaient se montrer plus actives à l'échelon européen. Il s'est enfin demandé dans quelle mesure les principes de la LOLF pouvaient contribuer à améliorer l'organisation des relations entre l'Etat et les ONG.
M. Alain Pichon a pris acte des réformes annoncées par M. Philippe Etienne, directeur général de la coopération internationale et du développement, et du jugement porté sur l'utilité de l'enquête. Il a corroboré l'appréciation portée par M. Michel Charasse, rapporteur spécial de la mission « Aide publique au développement », selon laquelle il aurait été opportun d'effectuer, dans le cadre de cette enquête, des contrôles sur place. Il a rappelé que le contrôle de l'AFD, en cours de réalisation, comportait nombre de tels contrôles.
M. Philippe Etienne a précisé que la DGCID finançait 112 associations, dont 80 % par le biais de subventions sollicitées par les ONG elles-mêmes, et 20 % par des commandes de la direction générale. Il a remercié les représentants de la Cour des comptes pour la qualité du dialogue entretenu durant l'enquête. En réponse à Mme Catherine Tasca, il a annoncé que ses services allaient mieux formaliser la stratégie de coopération avec les ONG, et citant l'exemple de « Handicap International », a considéré que certaines associations, du fait de leur efficacité, avaient connu une croissance soutenue de leur activité pour devenir des acteurs majeurs dans leur domaine. Il a confirmé que le ministère recourrait davantage à la mise en concurrence des associations, et développerait la contractualisation comme les regroupements d'ONG, à l'instar de ce qui avait déjà été expérimenté en Roumanie, au Maroc ou dans la région des Grands Lacs en Afrique. Il a ajouté que les commissions d'attribution des subventions s'inscrivaient explicitement dans le cadre de la LOLF, et que le programme « Solidarité à l'égard des pays en développement » de la mission interministérielle « Aide publique au développement » comportait des indicateurs relatifs aux ONG. Il a enfin indiqué, en réponse à M. Jean-Jacques Jégou, qu'un certain nombre d'ONG européennes était représenté au sein de la plate-forme CONCORD.
M. Robert Del Picchia a demandé à ce que les statistiques annuelles sur le financement des ONG puissent être transmises à la commission des affaires étrangères et à la commission des finances.
M. Yves Pozzo di Borgo a ajouté que ces statistiques devraient faire apparaître la ventilation des fonds attribués à chacune des associations.
M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a pris acte de la « bonne volonté » de l'administration du ministère des affaires étrangères, en réponse aux critiques de la Cour des comptes qui avaient fortifié sa propre appréciation. Revenant sur la distinction des activités des ONG en situation d'urgence et en temps de paix, il a considéré que ces dernières requéraient davantage d'attention, du fait d'une certaine tendance à l'externalisation par les acteurs publics de la coopération. Il s'est demandé dans quelle mesure il était possible de mieux rentabiliser les subventions accordées aux ONG, et a considéré que la pratique de reconduction était également usitée pour les crédits du titre IV, selon la nomenclature de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, des services locaux de coopération.
M. Jean Arthuis, président, a conclu l'audition en remerciant les magistrats de la Cour des comptes et les représentants du ministère des affaires étrangères. Il a souligné que cette audition témoignait de ce que le Parlement disposait de réelles prérogatives de contrôle, et s'est réjoui que l'administration, dans un esprit constructif, reconnaisse ses lacunes. Il a invité les représentants de la DGCID à rendre à nouveau compte de leurs actions d'ici un an devant la commission, et a rappelé que la logique de la LOLF impliquait que le ministère des affaires étrangères fixât de réels objectifs aux ONG, qui ne constituaient pas ses « bonnes oeuvres ».
La commission a ensuite décidé d'autoriser la publication d'un rapport d'information sur la communication de la Cour des comptes relatif aux fonds octroyés aux ONG françaises par le ministère des affaires étrangères.
PJLF pour 2006 - Audition de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la Défense
La commission a ensuite procédé à l'audition de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, sur le projet de loi de finances pour 2006.
M. Jean Arthuis, président, a remercié Mme Michèle Alliot-Marie, d'être venue présenter, devant la commission et les rapporteurs pour avis des autres commissions, les missions dont elle a la charge : les missions ministérielles « Défense » et « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », ainsi que les missions interministérielles « Sécurité » et « Recherche et enseignement supérieur ».
Mme Michèle Alliot-Marie a précisé que pour la quatrième année consécutive les crédits du projet de loi de finances pour 2006 respectaient les objectifs de la loi n° 2003-73 du 27 janvier 2003 relative à la programmation militaire pour les années 2003 à 2008 (LPM). Elle a indiqué que les crédits de la mission « Défense » étaient présentés selon les règles prévues par la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), ce qui impliquait, à la fois, des objectifs de performance précis mesurant les résultats de l'action du ministère et un budget plus « transparent » et tourné vers la recherche de l'efficacité.
Elle a noté que la mission « Défense » était inscrite dans une logique globale d'objectifs et de résultats qui était naturelle au ministère, dont la première mission était d'assurer la protection du territoire national et la sécurité des citoyens. Elle a ajouté que cette mission tendait à accroître les performances du ministère dans le domaine économique. Elle a rappelé, à cet égard, que le ministère de la défense était le premier investisseur public de l'Etat, faisant travailler près de 10.000 entreprises, souvent des petites et moyennes entreprises ou industries, réparties sur l'ensemble du territoire, dont l'effectif total était de plus de 2 millions de salariés.
Mme Michèle Alliot-Marie a souligné que le ministère de la défense était également le premier « recruteur » de l'Etat, engageant chaque année 30 à 35.000 jeunes. Elle a précisé que les missions confiées à la défense concernaient à la fois l'emploi des jeunes, les entreprises, les usagers d'hôpitaux ou de la gendarmerie, les visiteurs de musées dont le ministère à la charge, mais aussi les chercheurs au sein de nombreux centres de recherche extérieurs.
Elle a observé que les crédits mis en oeuvre pour l'accomplissement des missions du ministère de la défense s'élèveraient, en 2006, à 47 milliards d'euros. Soulignant que la mise en oeuvre de la réforme budgétaire marquait la fin des comparaisons annuelles d'évolution des moyens, elle a toutefois rappelé que les crédits alloués à la mission « Défense » augmentaient de 3,4 % hors pensions, et de 2,2 % en incluant celles-ci, ce qui correspondait aux objectifs fixés par la LPM.
Mme Michèle Alliot-Marie a relevé que la LOLF permettait désormais au Parlement de disposer d'indicateurs d'efficience, de qualité des services et d'efficacité socio-économique pour mesurer les résultats obtenus par le ministère de la défense. Elle a noté que l'évolution de certains indicateurs mesurant la capacité de l'armée française à atteindre l'objectif « disposer d'une capacité extérieure », était suivie avec attention par les organismes internationaux tels que l'Organisation du traité de l'Atlantique-Nord (OTAN). Elle a souligné que les indicateurs de performance de la mission « Défense » témoignaient de son souci de permettre une lecture fiable et aisée des performances du ministère de la défense. Elle a cité, à titre d'exemple, l'indicateur relatif à l'évolution des devis permettant d'évaluer la progression de l'objectif « mettre à disposition des armées des équipements en maîtrisant le coût ».
Mme Michèle Alliot-Marie, rendant hommage à M. Alain Lambert qui était l'un des initiateurs de la LOLF, a estimé que la réforme budgétaire était une chance pour la gestion publique et pour la défense. Elle a indiqué que sa mise en oeuvre s'inscrivait dans la continuité de la stratégie ministérielle de réforme conduite depuis 2003.
Elle a relevé que cette stratégie reposait sur la clarification des responsabilités des différents acteurs du ministère de la défense, rappelant que la délégation générale pour l'armement (DGA) avait été réformée dans cette perspective et que les pouvoirs d'arbitrage du chef d'état-major des armées avaient été accrus en 2005 afin de lui permettre de devenir le coordinateur des chefs d'état-major des armées, et non plus le « primus inter pares ».
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, a noté que la stratégie de réforme ministérielle avait également pour objectif d'accroître l'efficacité du ministère en mutualisant certains services, tels que celui des archives, avec la création, en 2004, du service historique de la défense, et celui des infrastructures regroupant les différents services constructeurs dont disposait jusqu'à présent chacune des armées.
Elle a précisé que la modernisation de son ministère s'appuyait sur la mise en oeuvre de modes de gestion innovants, tels que la location de longue durée d'avions de transport, l'externalisation de certaines tâches et la signature de contrats de partenariats public privé. Elle a souligné que, depuis 2002, les économies ainsi réalisées représentaient plus de 480 millions d'euros.
Enfin, à la demande de M. Jean Arthuis, président, Mme Michèle Alliot-Marie a souhaité rappeler devant la commission, les objectifs « lolfiens », c'est-à-dire conformes à l'esprit de la réforme budgétaire, qu'elle s'était fixées. Elle a constaté que le financement des surcoûts des opérations extérieures (OPEX) était prévu à hauteur de 250 millions d'euros par le projet de loi de finances pour 2006, soit près de la moitié du coût prévisionnel total des interventions extérieures de la France. Elle s'est engagée à achever la budgétisation des OPEX dans le projet de loi de finances initiale pour 2007.
Elle a déclaré que la résorption des reports de crédits, dont le montant total dépassait 2 milliards d'euros en 2005, était engagée. Elle a indiqué que l'importance des crédits reportés d'une année à l'autre était due au mode de financement des OPEX. Elle a précisé que le ministère de la défense devait assurer le préfinancement du surcoût des OPEX en gestion jusqu'à l'adoption de crédits supplémentaires en loi de finances rectificative. Elle a observé que les crédits ouverts en loi de finances rectificative, s'ils permettaient de lever les réserves mises sur les autres crédits du ministère, intervenaient cependant trop tardivement dans l'année pour permettre au ministère de consommer l'ensemble de ces crédits. Elle a noté que la pratique interdisant de dépenser plus que la dotation votée en loi de finances initiale par le Parlement, contribuait également à l'accroissement des crédits reportés à la gestion suivante.
Enfin, Mme Michèle Alliot-Marie a annoncé que l'externalisation de la gestion immobilière du ministère de la défense, qui avait été retardée en raison de la complexité de sa mise en oeuvre, serait effective avant la fin de l'année 2006.
Elle a estimé que la réalisation de la LPM et de la loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (LOPSI) permettait d'inscrire l'effort de défense de la France dans la continuité. Elle a observé que cet effort permettait au ministère de la défense d'assurer la sécurité des Français et d'accroître la capacité de la France à oeuvrer en faveur du règlement des conflits et du maintien de la paix, de développer des équipements nécessaires aux armées pour l'exercice de leur mission, tout en favorisant la recherche duale, et de contribuer à la croissance et à l'avenir de la France.
M. Jean Arthuis, président, a observé que les engagements pris par Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, s'inscrivaient dans la durée et n'auraient qu'assez peu d'effets en 2006. Il a toutefois salué la volonté du ministère d'améliorer progressivement la sincérité de son budget.
M. Philippe Marini, rapporteur général, a souhaité obtenir des précisions sur les modalités de mise en oeuvre des financements innovants au sein du ministère de la défense, estimant que celui-ci était précurseur dans ce domaine. Il a rappelé que l'intérêt que suscitait le développement de financements non budgétaires devait être modéré par la nécessité de procéder à un examen rigoureux de leur efficacité.
Il s'est interrogé sur la mise en oeuvre par le ministère de la défense d'un « service national adapté », destiné à l'insertion sociale et professionnelle des jeunes peu qualifiés. Il a rappelé que le financement de ce projet ne relevait pas des crédits de la mission « Défense ».
Mme Michèle Alliot-Marie a indiqué que le recours à un mode de financement innovant tendait à fournir aux armées les équipements nécessaires à l'exercice de leur mission pour lesquels aucun financement budgétaire n'était prévu. Elle a relevé que la signature d'un contrat de location à longue durée de matériels de transport aérien répondait aux besoins des armées dans l'attente des livraisons de l'avion A 400 M, garantissait la disponibilité de la flotte, et était moins onéreux qu'une location au cas par cas.
M. Jean Arthuis, président, a estimé que cet exemple de financement innovant était probant, dans la mesure où il permettait de réaliser des économies tout en répondant plus efficacement aux besoins des armées.
Mme Michèle Alliot-Marie a insisté sur le coût que représentait le maintien en condition opérationnelle de matériels déjà anciens. Elle a noté que l'entretien des nouveaux matériels plus sophistiqués serait encore plus élevé. Elle a déclaré que le ministère de la défense étudiait la possibilité d'acheter non plus des matériels, onéreux à entretenir, mais des heures de disponibilité garanties. Elle a observé que la prochaine loi de programmation militaire débutant en 2009 devrait prendre en compte cet enjeu. Elle a indiqué que si les industriels risquaient d'accroître leurs coûts afin de s'adapter à cette évolution, des économies substantielles seraient réalisées sur la durée de la période de programmation grâce à la réduction de crédits nécessaires au maintien en condition opérationnelle. Elle a souhaité que le Parlement soit pleinement associé à la réflexion sur cette importante modification de la politique d'équipement du ministère de la défense.
Mme Michèle Alliot-Marie a précisé que l'externalisation de la formation des pilotes d'hélicoptère était prometteuse et qu'elle permettrait de réaliser leur formation initiale à moindre coût, sur des hélicoptères banalisés, tout en préservant les hélicoptères militaires dont le nombre d'heures de vol était déjà significatif.
Elle a noté que la mise en oeuvre des financements innovants se heurtait parfois à des obstacles, comme cela avait été le cas pour les frégates multimissions (FREMM) et l'externalisation des logements des gendarmes. Elle a rappelé que le financement budgétaire des FREMM allait coûter 1 milliard d'euros de plus que le projet de financement innovant.
Mme Michèle Alliot-Marie a indiqué que le projet « défense, deuxième chance », proche du service militaire adapté mis en oeuvre dans les départements d'outre-mer, devait concerner, chaque année, près de 20.000 jeunes dont l'échec scolaire, professionnel ou social, était décelé lors de la journée d'appel et de préparation à la défense (JAPD). Elle a ajouté que ces jeunes pourraient être accueillis, sur la base du volontariat, dans des structures spécifiques pour une durée d'un an renouvelable une fois afin de bénéficier d'une remise à niveau scolaire et comportementale, assortie d'un apprentissage professionnel. Elle a annoncé que les bénéficiaires de ce dispositif se voyaient attribuer une allocation de 300 euros mensuels, dont la moitié était capitalisée afin de leur être versée à l'issue de leur contrat et de favoriser ainsi leur réinsertion.
Mme Michèle Alliot-Marie a rappelé que les locaux accueillant ces jeunes étaient soit d'anciens bâtiments du ministère de la défense, devenus inutiles depuis la fin de la conscription, soit des locaux mis à disposition par les collectivités territoriales, soit dans le cas du premier centre ouvert à Montry, un ancien centre régional d'éducation physique et sportive (CREPS). Elle a précisé que le financement de ce programme de réinsertion était assuré par les crédits du ministère de la cohésion sociale et par une contribution de l'Union européenne et des collectivités territoriales volontaires. Elle a donné l'assurance que le ministère de la défense apportait un soutien logistique à cette action en fournissant du personnel d'encadrement, l'objectif étant de permettre à des militaires à la retraite, distingués pour leur capacité pédagogique, de signer un contrat complémentaire afin de gérer les centres d'accueil, en collaboration avec le personnel de l'éducation nationale et quelques officiers en activité.
M. Yves Fréville, rapporteur spécial de la mission « Défense », s'est félicité du respect des objectifs de la LPM et du montant des économies réalisées par le ministère de la défense grâce à une gestion efficace des dépenses publiques depuis 2002. Il a souhaité savoir si la résorption des 2,8 milliards d'euros de crédits reportés se traduirait par un montant de dépenses militaires supérieur à la dotation votée en loi de finances initiale jusqu'en 2007.
Mme Michèle Alliot-Marie a confirmé que jusqu'à la résorption complète des crédits reportés, le ministère de la défense serait autorisé à dépasser l'autorisation budgétaire du Parlement.
M. Yves Fréville, rapporteur spécial de la mission « Défense », a rappelé que le budget de la mission « Défense » était l'un des plus importants budgets d'équipement de l'Etat et qu'il était le seul à disposer d'un programme dédié à l'investissement. Il s'est demandé comment étaient rendus les arbitrages permettant la répartition des crédits entre le maintien en condition opérationnelle et l'acquisition de nouveaux matériels. Il a souligné que la LPM pour les années 2003 à 2008 semblait avoir sous évalué les besoins du maintien en condition opérationnelle. Il a estimé qu'il existait un problème « de soudure » entre la livraison des nouveaux matériels et la fin de vie des équipements existants, problème qui démontrait toute l'importance du maintien en condition opérationnelle. Il a souhaité savoir si le ministère se trouvait d'ores et déjà confronté au dilemme d'avoir à choisir entre l'entretien de matériels vieillissants et l'acquisition de nouveaux équipements.
M. Yves Fréville, rapporteur spécial de la mission « Défense », s'est réjoui de l'importante augmentation des crédits consacrés aux études amont.
Il s'est demandé si les retards sur les calendriers prévisionnels de livraison de certains équipements tels que les hélicoptères Tigre et NH 90 ou les chars Leclerc avaient des causes essentiellement financières ou si la qualité des prestations des industries de l'armement devait être mise en cause.
Enfin, il a souhaité savoir où en était le rapprochement industriel de DCN-SA et de la société Thalès et quelles étaient les perspectives de GIAT-Industries.
M. François Trucy, rapporteur spécial de la mission « Défense », a voulu connaître l'appréciation de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, sur le rattachement des crédits de la gendarmerie nationale à la mission interministérielle « Sécurité ». Il a souhaité obtenir des précisions sur les nouvelles modalités de formation des gendarmes, et notamment sur les coopérations prévues avec les armées dans ce domaine. Il s'est demandé si la gestion du logement des gendarmes, des dépenses d'informatique et de système de communication de la gendarmerie relevaient toujours de la mission « Défense ». Il s'est inquiété de la façon dont la compatibilité des équipements informatiques et de communication de la gendarmerie était assurée, tant avec les forces de la police nationale qu'avec les armées.
M. François Trucy, rapporteur spécial de la mission « Défense », s'est interrogé sur les perspectives d'évolution de la réserve militaire et a demandé si des mesures spécifiques étaient prévues afin d'en renforcer l'attractivité.
Estimant que l'action sociale du ministère de la défense devait être adaptée aux besoins d'une armée professionnelle, il a souhaité savoir quels étaient les projets du ministère dans ce domaine.
M. Aymeri de Montesquiou, rapporteur spécial de la mission « Sécurité », s'est demandé si des audits étaient prévus afin d'évaluer et d'améliorer les performances du ministère de la défense. Il a souhaité obtenir des précisions sur les projets conduits par l'agence européenne de défense (AED). Enfin, il a voulu connaître l'état de réalisation de la LOPSI et s'est interrogé sur la nécessité d'adapter ses objectifs, notamment en termes de création d'emploi, à la montée de l'insécurité.
M. Jacques Baudot, rapporteur spécial de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », a rappelé que les anciens combattants étaient au nombre de 1,417 million et que les assujettis au régime de pensions des anciens combattants représentaient 2,4 millions de personnes. Il a indiqué que la question de la revalorisation des pensions se posait, tant pour les anciens combattants que pour les conjoints survivants, précisant qu'une augmentation d'un point des retraites des anciens combattants coûtait 18 millions d'euros par an.
M. Charles Guéné, rapporteur spécial pour avis de la mission « Sécurité civile » au nom de la commission des lois, a souhaité savoir comment était prise en compte la montée de la menace terroriste.
M. Jean Arthuis, président, a demandé à Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, si les modalités de « copilotage » de missions interministérielles dont elle avait la charge étaient définies.
Mme Michèle Alliot-Marie a indiqué que la direction partagée des missions interministérielles « Sécurité » et « Recherche et enseignement supérieur » ne posait aucune difficulté et qu'elle serait donc présente avec les autres ministres concernés lors de l'examen des crédits de ces missions devant le Parlement.
Elle a observé que la LPM était déjà largement formalisée lorsqu'elle avait pris ses fonctions et qu'elle n'avait pu, en conséquence, obtenir l'augmentation des crédits de maintien en condition opérationnelle qu'elle estimait nécessaire. Elle a relevé la pertinence de l'analyse de M. Yves Fréville, rapporteur spécial, sur la difficulté qu'il y avait à privilégier le maintien en condition opérationnelle au détriment des nouvelles acquisitions, ces deux postes budgétaires entrant en concurrence tout en étant complémentaires.
Mme Michèle Alliot-Marie a constaté que la révision annuelle des référentiels de la LPM avait permis de dégager des marges de manoeuvre réduites permettant de maintenir un niveau relativement suffisant de crédits alloués au maintien en condition opérationnelle des équipements des armées et d'améliorer, ainsi, leur disponibilité. Elle a ajouté que, depuis 2002, les taux de disponibilité et d'activité des équipements des armées avaient augmenté. Elle a indiqué que l'indisponibilité des appareils de l'armée de l'air avait été ramenée de dix jours à un jour, que le taux de disponibilité globale des bâtiments de la marine nationale avait progressé de 10 %. Elle a remarqué que les taux de disponibilité des équipements de l'armée de terre restaient très variables en raison de la diversité du degré d'obsolescence des matériels et de leur surutilisation, au regard de leur potentiel, dans le cadre des OPEX. Elle a souligné que les équipements utilisés en OPEX avaient un taux de disponibilité de 92 %, ce qui était considérable étant donné le nombre d'OPEX auxquelles participait la France.
Elle a considéré que les retards de livraison des hélicoptères Tigre et NH 90 et des chars Leclerc tenaient plus à des problèmes industriels et techniques qu'à des problèmes financiers. Elle a déploré cette situation, regrettable, tant pour le bon fonctionnement des armées que pour le développement des exportations françaises. Elle a affirmé que le ministère de la défense veillait avec la plus grande attention, à éviter tout nouveau dérapage en soumettant les sociétés concernées à un suivi quasi-journalier.
Mme Michèle Alliot-Marie a estimé que la restructuration de GIAT-Industries était désormais sur la bonne voie. Elle a précisé que le ministère de la défense avait tenu ses engagements en termes d'apports de crédits, d'implantation des unités de production sur le territoire et de gestion sociale des personnels. Elle a regretté que tous les partenaires engagés dans la restructuration de cette entreprise n'aient pas honoré aussi scrupuleusement leurs obligations. Elle a souhaité que soit définie une politique de développement novatrice et ambitieuse pour GIAT-Industries, première étape indispensable à la mise en oeuvre de partenariats européens.
Mme Michèle Alliot-Marie a jugé que la transformation de DCN en société anonyme était une pleine réussite. Elle a considéré que le rapprochement de DCN-SA avec la société Thalès constituait un projet industriel solide, préfigurant le développement d'une industrie de l'armement naval européenne. Elle a estimé que la consolidation des industries d'armement au niveau européen était indispensable pour faire face à la concurrence des pays de l'Asie du sud-est, et a indiqué que la collaboration entre Thalès et DCN-SA devrait être précisée prochainement.
Elle a assuré que les crédits relatifs à la formation, à la logistique, au logement, aux systèmes informatiques et aux systèmes de communication de la gendarmerie nationale étaient inscrits au sein de la mission « Défense ». Elle a indiqué qu'elle veillait à la compatibilité des équipements de la gendarmerie avec ceux de la police nationale d'une part, et des armées, d'autre part.
Elle a rappelé qu'elle portait une attention particulière à la « remilitarisation » de la gendarmerie nationale, à travers la réouverture des grandes écoles militaires destinées aux officiers de gendarmerie, et la participation d'escadrons de gendarmes aux OPEX, notamment en Côte d'Ivoire. Elle a précisé qu'elle souhaitait que tous les officiers de gendarmerie aient pris part à une OPEX à l'horizon 2010.
Mme Michèle Alliot-Marie a estimé que la gendarmerie nationale avait vocation, dans les OPEX, à gérer les situations de fin de crise et à canaliser les foules. Elle a souligné l'importance symbolique pour les populations concernées du « passage de l'uniforme kaki » de l'armée de terre à l'uniforme bleu « de la gendarmerie ». Elle s'est déclarée réticente quant aux projets de spécialisation d'unités de l'armée de terre dans la gestion des situations de fin de conflits qui relevaient de la compétence de la gendarmerie nationale.
Elle a observé que la réserve militaire constituait un soutien indispensable à l'armée active en comblant certaines de ses lacunes. Elle a souhaité renforcer son attractivité en créant de véritables « filières d'emplois réservistes », en reculant la limite d'âge des réservistes, en offrant aux volontaires de participer aux OPEX et en développant une nouvelle forme de « réserve opérationnelle citoyenne ». Elle a précisé que cette dernière permettrait aux réservistes qui le souhaitaient d'intervenir, aux côtés des « forces d'active » pour mettre en place le soutien à la reconstruction du pays concerné. Elle a considéré que les chefs d'entreprise réservistes pourraient être intéressés par les perspectives économiques qui leur échappaient aujourd'hui largement, tout en contribuant ainsi à renforcer l'image de la France.
Mme Michèle Alliot-Marie a observé que le recrutement de personnels civils s'améliorait et que la gestion de cette catégorie de personnels pouvait évoluer, en accord avec les syndicats, afin de mettre en place un système de formation permanente directement lié aux perspectives de promotion interne. Elle a souligné que cette évolution permettrait de combler les besoins en personnels techniques qualifiés des armées.
Elle a noté que le service de santé des armées bénéficierait, en 2006, de la création de 20 postes supplémentaires et, qu'à la fin de la période de programmation actuelle, les effets de la suppression de la conscription ne seraient plus perceptibles.
Mme Michèle Alliot-Marie a indiqué que le projet de loi de finances pour 2006 prévoyait une augmentation des crédits destinés à l'amélioration de la situation des personnels militaires et civils. Elle a précisé que la construction de nouvelles crèches était indispensable. De plus, elle a observé que, pour répondre aux attentes des personnels, l'extension du bénéfice de certaines prestations sociales aux signataires d'un pacte civil de solidarité (PACS) pouvait être accordée, à condition que le PACS ait été signé trois ans auparavant.
Elle a annoncé que deux audits étaient prévus sur des crédits du ministère de la défense : l'un sur la gestion des centres payeurs des armées et l'autre sur le délai de traitement des pensions militaires des armées.
M. Jean Arthuis, président, s'est demandé si ces audits permettraient de réaliser des économies substantielles.
Mme Michèle Alliot-Marie a estimé que d'importantes économies pourraient être dégagées grâce à la réforme des centres payeurs, à condition que certaines règles et procédures comptables soient assouplies. Elle a souligné, que pour les OPEX, l'achat de matériels sur place reviendrait moins cher que son envoi depuis la France s'il était autorisé, et que le rapatriement obligatoire de tous les équipements utilisés en OPEX représentait ainsi souvent un coût supérieur à la valeur de ces derniers.
Elle a annoncé que l'Agence européenne de défense (AED) disposait désormais de locaux, de personnels et de son propre budget. Elle a déclaré que les premiers dossiers de l'agence portaient sur le domaine spatial, les drones et les avions ravitailleurs. Elle a insisté sur la nécessité de doter l'agence européenne d'armement d'un réel projet de développement, celui-ci étant toutefois conditionné à la participation financière effective de tous les partenaires concernés.
S'agissant de la LOPSI, Mme Michèle Alliot-Marie a regretté que sa réalisation n'ait pas été encadrée par des objectifs annuels. Elle a affirmé qu'un effort particulier serait fait en 2006 afin de garantir la pleine exécution de cette loi grâce à l'attribution de 200 millions d'euros supplémentaires pour les équipements et la création de 2.000 postes de gendarmes. Elle a considéré que les créations de postes prévues par la LOPSI correspondaient au besoin de renforcer la sécurité nationale dans un contexte de montée des menaces terroristes.
Mme Michèle Alliot-Marie a estimé qu'une revalorisation des pensions des anciens combattants n'aurait de sens que si elle s'élevait à deux points, ce qui représentait 40 millions d'euros. Rappelant que les crédits figurant dans la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation » étaient très contraints, elle a indiqué qu'il semblait difficile de trouver de nouvelles marges de manoeuvre.
Enfin, elle a rappelé que la lutte contre le terrorisme était une préoccupation majeure du ministère de la défense qui mobilisait pour cela tous ses services de renseignement. Elle a souligné que la marine nationale exerçait une activité importante de surveillance des côtes, et que l'armée de l'air était en niveau d'alerte rouge, c'est-à-dire qu'elle pouvait garantir le décollage d'un avion d'intervention deux minutes après en avoir reçu l'ordre afin de réaliser l'interception nécessaire dans un laps de temps n'excédant pas dix minutes. Elle a rappelé, de plus, que l'armée et la gendarmerie nationale participaient très activement au plan Vigipirate.
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial de la mission « Recherche et enseignement supérieur », a souhaité obtenir des précisions sur la mise en oeuvre du projet « Sécoia » visant à l'élimination des obus chimiques de la première guerre mondiale, collectés notamment dans le nord de la France.
Mme Michèle Alliot-Marie a précisé que les difficultés ayant retardé la mise en oeuvre de ce projet avaient été analysées, la société Thalès ayant fourni les efforts nécessaires.
M. Gérard Longuet a souhaité savoir combien de personnels du ministère de la défense encadreraient les 20.000 jeunes bénéficiant du projet « défense deuxième chance ».
Mme Michèle Alliot-Marie a indiqué que le centre de Montry disposait de cinq personnels militaires en activité. Elle a précisé que 10.000 encadrants devraient participer à la mise en oeuvre du projet d'insertion des jeunes en difficulté et que seuls quelques dizaines d'officiers seraient mobilisées.
M. Jean Arthuis, président, revenant sur la problématique de la sous-traitance, a souhaité attirer l'attention de Mme Michèle Alliot-Marie sur le risque que les marchés passés par son ministère favorisent, de fait, des sous-traitants privilégiant l'« outsourcing » hors des frontières. Il a souhaité savoir si le ministère pouvait évaluer l'impact de son activité économique sur la localisation des emplois en France.
Mme Michèle Alliot-Marie s'est déclarée favorable à la mise en oeuvre d'une inspection ou d'une enquête sur ce sujet essentiel pour le développement de la France et très complexe.
M. Jean Arthuis, président, a vivement remercié Mme Michèle Alliot-Marie pour la clarté et la précision de son intervention.
Mercredi 26 octobre 2005
- Présidence de M. Jean Arthuis, président.
Projet de loi d'orientation agricole - Examen du rapport pour avis
La commission a tout d'abord procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis, sur le projet de loi n° 26 (2004-2005), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, d'orientation agricole.
M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis, a indiqué que le projet de loi d'orientation agricole, tel que présenté en Conseil des ministres le 18 mai 2005, comportait 35 articles et qu'après son examen à l'Assemblée nationale, le texte transmis au Sénat en contenait 85, soit plus du double. Il a donc souligné que ce sujet intéressait indéniablement la représentation nationale.
Il a précisé que l'avenir de l'agriculture française cristallisait des interrogations qui avaient un retentissement dans l'ensemble de la société française.
M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis a remarqué que, depuis les grandes lois fondatrices de 1960 et 1962, le secteur agricole avait connu des évolutions importantes, tant internes qu'externes, qui s'étaient traduites par un bouleversement radical de son environnement économique et sociologique.
Il a souligné que, si le développement de l'agriculture au cours des cinquante dernières années avait permis de placer la France au premier rang mondial des pays exportateurs de produits agricoles et de lui assurer l'indépendance alimentaire, force était de constater que le modèle agricole promu par le cadre législatif défini au début des années 1960, ne répondait plus que partiellement aux attentes actuelles des agriculteurs et de la société dans son ensemble. En effet, il a rappelé que ce modèle était celui de l'exploitation agricole familiale dont la taille permettait d'assurer la rémunération de deux unités de travail. Il a remarqué qu'au fil du temps, ce modèle avait du faire place à plus de diversité pour répondre à la multiplicité des formes d'exploitations, tandis qu'avec l'affirmation de nouvelles attentes de la société, notamment en matière environnementale, les pouvoirs publics avaient envisagé, sous un jour nouveau, les autres missions de l'agriculture, telles que l'aménagement de l'espace rural, des paysages et la préservation de l'environnement.
Il a indiqué que les évolutions liées au progrès technique, l'évolution socio-économique du monde agricole, les modifications des règles communautaires et internationales de régulation des marchés et de soutien des productions, l'apparition de nouvelles attentes de la société avaient rendu nécessaire de redéfinir la place de l'agriculture dans la société française en lui redonnant une ambition, des perspectives et une légitimité renouvelée.
Puis M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis, a précisé que le projet de loi d'orientation agricole tel que transmis par l'Assemblée nationale s'efforçait de relever les défis auxquels était aujourd'hui confronté le monde agricole. Il a précisé que ces défis étaient de trois ordres : économique, social et environnemental. Dès lors, il a indiqué que l'objectif principal du projet de loi était de permettre l'adaptation du monde agricole aux évolutions du contexte international et communautaire, marqué par la poursuite des négociations internationales dans le cadre de l'OMC et par la réforme de la PAC issue des accords de Luxembourg du 26 juin 2003.
Il a indiqué que le projet de loi était structuré autour de cinq titres principaux en précisant que trois d'entre eux avaient pour objectif de redonner des marges de manoeuvre à l'agriculture française afin de la rendre plus efficace économiquement et d'offrir davantage de liberté d'initiative aux exploitants agricoles.
Il a souligné que le titre Ier s'intéressait à l'entité fondamentale qu'était l'exploitation agricole et visait à favoriser la démarche d'entreprise, que le titre II tendait à conforter le revenu agricole en intervenant au niveau des filières, tandis que le titre IV simplifiait l'environnement administratif de l'agriculture. Il a également précisé que le titre III visait à rapprocher l'agriculture des préoccupations sociales actuelles en matière de qualité alimentaire et d'environnement et, qu'enfin, le titre V apportait des réponses adaptées à la situation foncière particulière de l'Outre-mer.
M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis, a déclaré que la commission avait choisi de se saisir pour avis de ce texte en raison des nombreuses dispositions fiscales qu'il contenait et, qu'au total, le coût fiscal des mesures contenues dans ce projet de loi s'élèverait à quelque 80 millions d'euros annuels.
Rentrant dans le détail des dispositifs auxquels il s'était intéressé dans son rapport, il a estimé que la création du fonds agricole par l'article 1er du projet de loi, rendue optionnelle par l'Assemblée nationale, avait pour objet de faire évoluer le statut de l'exploitation agricole traditionnelle vers celui d'entreprise agricole et de permettre d'appréhender, dans une même unité économique, l'ensemble des facteurs de production liés à l'activité agricole, qu'ils soient corporels ou incorporels.
M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis, a rappelé que les objectifs poursuivis par la création du fonds agricole étaient de dépasser l'approche patrimoniale des exploitations, de transmettre l'exploitation agricole et d'évaluer l'entreprise en fonction de sa capacité à générer du revenu et, plus globalement, d'encourager le financement et le dynamisme de l'agriculture.
M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis, a souligné qu'il ne fallait toutefois pas passer sous silence les interrogations légitimes suscitées par la mise en place de ce nouvel outil juridique. Parmi ces interrogations, il souhaitait évoquer le risque d'un renchérissement du coût fiscal des transmissions et, par conséquent, du prix du foncier agricole ainsi que la question de l'opportunité de l'incorporation des droits incorporels cessibles dans le fonds agricole, au premier rang desquels les droits à paiement unique issus de la réforme de la PAC. Il a reconnu que la valeur des éléments incorporels du fonds agricole, tels les droits à paiement unique (DPU) ou les droits à produire cessibles, serait variable dans le temps mais que l'important était de pouvoir les évaluer au moment de la cession du fonds. Il a estimé qu'il était nécessaire d'accepter l'idée d'un fonds agricole évolutif en fonction, notamment, de la valeur des droits incorporels cessibles et que, pour disposer d'une valeur économique réelle, le fonds agricole devait pouvoir être cessible en toutes circonstances.
Il a ajouté que, parallèlement à l'introduction de la possibilité pour l'exploitant de constituer un fonds agricole, l'article 2 du projet de loi, prévoyait la création d'un nouveau type de bail rural, cessible en dehors du cadre familial.
M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis, a indiqué que, depuis sa promulgation en 1946, le statut du fermage s'était caractérisé par l'encadrement strict des libertés et des droits du bailleur et la protection de l'exploitant. Après avoir été considérée longtemps comme un atout, sa rigidité apparaissait désormais aujourd'hui comme un obstacle au développement de l'activité agricole et de la pluriactivité rurale, particulièrement touchées par les difficultés de transmission des exploitations.
Il a ajouté que, dans ces conditions, la création d'une nouvelle catégorie de bail, soumis au statut, mais dérogatoire à certaines de ses dispositions, représentait un espoir pour de nombreux propriétaires ruraux ou exploitants « à la recherche » de repreneurs.
Concernant la facilitation des transmissions agricoles, il a souligné que l'agriculture française était aujourd'hui confrontée à un enjeu crucial de renouvellement de ses générations. On dénombrait aujourd'hui en France métropolitaine un peu moins de 600.000 exploitations agricoles, dont 60 % dites professionnelles, compte tenu de leur dimension économique et le nombre de ces exploitations professionnelles était en diminution constante, de l'ordre de 2,3 % par an.
Il a précisé qu'à l'horizon 2020, selon la pyramide des âges, 250.000 exploitants devraient quitter l'agriculture pour partir à la retraite et de même, plus de 200.000 salariés de la production et 150.000 salariés travaillant dans les différentes organisations professionnelles agricoles partiraient à la retraite pendant la même période.
M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis, a indiqué que, dans le but de favoriser ce renouvellement et donc d'inciter à l'installation, le projet de loi prévoyait différents types de mesures visant, notamment, à encourager l'installation sociétaire ou à permettre la transmission progressive d'exploitations individuelles.
Il a ainsi fait savoir que l'article 6 visait à instaurer une réduction d'impôt de 50 % des intérêts perçus au titre du différé de paiement accordé à un jeune agriculteur par un contribuable cédant son exploitation, dans le cadre d'un contrat de vente progressive. Il s'agissait d'un nouvel instrument fiscal qui devrait favoriser l'installation des jeunes agriculteurs.
Evoquant ensuite le défi social pour améliorer les conditions de vie des exploitants et la sécurisation de leurs revenus, il a souligné que le projet de loi d'orientation agricole contenait diverses mesures de nature à améliorer le « quotidien » des agriculteurs.
Il a cité notamment les dispositions de l'article 9 s'adressant aux exploitants agricoles soumis à de fortes contraintes en termes de présence sur l'exploitation, tels les éleveurs laitiers par exemple, qui constituaient une incitation fiscale intéressante au remplacement pour congé par un tiers, cet article introduisant un crédit d'impôt destiné à prendre en charge la moitié des coûts liés à l'emploi d'un salarié en cas de remplacement.
M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis, a rappelé que cette mesure fiscale devrait non seulement permettre aux exploitants soumis à une astreinte quotidienne sur leur exploitation de bénéficier de meilleures conditions de vie et de travail, mais aussi constituer une incitation à l'installation des jeunes agriculteurs, parfois rebutés par l'intensité du rythme de travail sur les exploitations.
Il a souligné que l'amélioration des conditions de vie des agriculteurs passait aussi par la sécurisation de leur revenu et plus globalement par le développement des outils de gestion des risques et des aléas en agriculture et qu'un des enjeux cruciaux pour l'agriculture moderne était, en effet, de parvenir à développer une assurance propre à ce secteur qui soit économiquement viable.
Il a ajouté que, dans un contexte d'essor de l'assurance récolte face à une augmentation des risques, les articles 18 et 19 du projet de loi visaient à permettre une réorientation du fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA) vers un nouveau partage des responsabilités entre les exploitants agricoles, les entreprises d'assurance et l'Etat.
Il a rappelé qu'il s'agissait, en effet, de répondre aux spécificités de l'assurance « récolte » car le risque de survenance des aléas était si élevé que le niveau des primes et cotisations d'assurance s'avèrerait dissuasif pour une partie des exploitants, déjà confrontés à un niveau élevé de charges, en l'absence soit d'une incitation par l'Etat en phase initiale de développement de l'assurance agricole, soit d'une aide de la collectivité nationale en cas de calamité agricole.
M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis, a indiqué que traditionnellement, l'assurance agricole était développée presque exclusivement contre les risques liés à la grêle et à la tempête (ainsi qu'au gel pour les exploitations viticoles), alors que les autres risques (sécheresse, inondations, échaudage, vents de sable...) relevaient des calamités agricoles et de la solidarité nationale, ou bien étaient pris en charge par les exploitants eux-mêmes.
Il a ajouté que l'indemnisation des dommages causés par les aléas climatiques aux exploitations agricoles était estimée à un coût annuel moyen de 401 millions d'euros, répartis entre les exploitants à hauteur de 309 millions d'euros et l'Etat à hauteur de 92 millions d'euros, les contrats d'assurance récolte couvrant environ 300.000 exploitations.
Il a précisé que, dans ce contexte, la prise en charge par le FNGCA d'une partie des primes et cotisations d'assurance proposée par ce projet de loi répondait à une réorientation du fonds dans le cadre de l'essor d'une nouvelle assurance multi-risques climatiques et que cette prise en charge était apportée par l'Etat en contrepartie d'une extension des risques couverts.
Il a rappelé que l'article 18 du projet de loi créait le cadre nécessaire à cette évolution en modifiant les missions du FNGCA, que l'article 19 tendait, quant à lui, à requalifier la Commission nationale des calamités agricoles en « Comité national de l'assurance en agriculture », conformément à la réorientation de l'activité du FNGCA vers l'encouragement à l'essor de l'assurance agricole. Enfin l'article 20 modifiait les conditions d'utilisation de la déduction pour aléas, outil fiscal de gestion des risques en agriculture, de façon à la rendre plus attractive et à développer son utilisation encore très en deçà des espérances initiales.
Sur le plan environnemental, M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis, a indiqué que le projet de loi d'orientation agricole cherchait à répondre aux préoccupations exprimées par la société française.
Il a noté que l'article 12 contenait deux mesures visant à supprimer des contraintes pesant sur deux produits de l'exploitation agricole et forestière à usage énergétique : les huiles végétales pures et le bois de chauffage.
Il a ajouté que le projet de loi rappelait également les objectifs fixés par le gouvernement en matière de production de biocarburants et d'encouragement à cette production. L'article 24 introduisait ainsi un avantage fiscal sous forme de crédit d'impôt pour les entreprises ayant achevé leur conversion à l'agriculture biologique dans le but d'encourager le maintien de l'activité de celles ayant fait l'objet d'une certification en agriculture biologique.
Il a souligné que si la France se situait dans la moyenne européenne pour les aides à la conversion, elle n'accordait, en revanche, contrairement à tous les grands pays agricoles européens, aucune aide au maintien des pratiques répondant aux critères de l'agriculture biologique, aide qui devrait prendre le relais des aides à la conversion.
A l'issue de cette présentation, un large débat s'est ouvert.
M. Jean Arthuis, président, a remercié le rapporteur pour avis pour la qualité de sa présentation qui avait mis en perspective les enjeux du projet de loi.
M. Michel Moreigne s'est interrogé quant à la prise en compte des spécificités de la forêt par le nouveau dispositif d'assurance mis en place par le projet de loi.
M. François Marc a considéré que le texte du projet était assez modeste par rapport aux ambitions affichées mais qu'il comportait des mesures d'ajustement attendues. Il s'est inquiété des dispositions relatives au fonds agricole et à la cessibilité du bail, celles-ci risquant, selon lui, de conduire à une « marchandisation » de l'exploitation agricole. S'agissant de l'agriculture biologique, il a regretté le manque d'ambition du texte et que la France profite insuffisamment des aides européennes en la matière.
M. Adrien Gouteyron s'est interrogé sur l'articulation entre le fonds des calamités agricoles et le nouveau dispositif prévu par le projet de loi. En outre, il a demandé quelle serait la liberté de l'exploitant dans le choix de son remplaçant temporaire et si, pour bénéficier du crédit d'impôt prévu par le projet de loi, il devait, forcément, avoir recours aux services de remplacement.
M. Jean Arthuis, président, a estimé que la création du fonds agricole mettrait fin à l'hypocrisie actuelle qui consiste à tenir compte de manière indirecte, dans le prix de cession des actifs, de l'existence de droits à produire, incessibles en théorie. Il s'est déclaré perplexe quant à l'utilité de créer un crédit d'impôt pour inciter aux remplacements des exploitants, estimant, au surplus, que la France, eu égard à sa situation budgétaire actuelle, n'avait pas les moyens de financer ce type de mesure dicté essentiellement par un souci de communication.
En réponse aux intervenants, M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis, a précisé que l'article 19 du projet de loi prévoyait que le comité national de l'assurance en agriculture serait consulté sur les dommages à la forêt, que la cessibilité du bail était une mesure indissociable de la création du fonds agricole, que le choix du remplaçant par l'exploitant serait libre, et que celui-ci ne serait pas contraint de recourir à des services de remplacement spécialisés.
Un débat s'est ensuite ouvert sur l'opportunité de l'intégration des droits à paiement unique (DPU) dans le fonds agricole. M. Henri de Raincourt a estimé anormal que ces droits soient susceptibles d'être compris dans le nantissement du fonds agricole et que leur incorporation dans le fonds relevait de la « spoliation ». M. Philippe Adnot a approuvé cette prise de position, considérant qu'il était indispensable de distinguer les droits créés par la politique agricole commune (PAC) de la valorisation du fonds créée par l'exploitant lui-même.
M. Jean Arthuis, président, ayant souligné que les DPU ne constituaient pas les seuls actifs incorporels intégrés à la valeur du fonds, M. Philippe Adnot a ajouté qu'il considérait comme très menaçant, pour l'avenir de l'agriculture, le découplage mis en oeuvre par la PAC et la suppression du lien entre les aides et l'acte de production.
M. François Marc a estimé que la création du fonds agricole posait la question fondamentale de l'installation des jeunes agriculteurs et a fait savoir que la valorisation de l'actif incorporel pouvait être dangereuse.
M. Michel Moreigne a souhaité connaître les conséquences de la création du bail cessible sur l'équilibre entre les propriétaires ruraux et les preneurs.
En réponse à ces interventions, M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis, a estimé que la création du fonds agricole était inséparable de l'intégration de tous les droits corporels et incorporels cessibles dans ce fonds. En outre, il a rappelé que le bail cessible était fixé à une durée de 18 ans et que tous les représentants des bailleurs et des preneurs étaient favorables à la cessibilité du bail, hors cadre familial.
Puis la commission a procédé à l'examen des amendements présentés par le rapporteur pour avis.
A l'article premier (création du fonds agricole), après les interventions de M. Henri de Raincourt et de Mme Nicole Bricq, la commission a adopté un amendement tendant à supprimer la mention selon laquelle la décision de l'exploitant de créer un fonds agricole doit faire l'objet d'une déclaration à l'autorité administrative.
A l'article 2 (baux ruraux cessibles hors du cadre familial), après les interventions de MM. Henri de Raincourt et Philippe Adnot, la commission a adopté trois amendements. Le premier amendement tend à supprimer une disposition introduite par l'Assemblée nationale qui prévoit que si le bailleur dispose d'un candidat à la reprise du fonds de son exploitation, aux conditions fixées par le cessionnaire sortant pour son candidat à l'achat du fonds, il peut choisir librement son cessionnaire. Les deuxième et troisième amendements tendent à clarifier les conditions d'exonération des baux cessibles au regard de l'impôt sur la fortune.
A l'article 6 (mise en place d'un « crédit transmission »), la commission a adopté deux amendements. Le premier amendement tend à préciser la rédaction de cet article en visant les agriculteurs de moins de 40 ans qui s'installent et non plus seulement ceux qui sont déjà installés depuis moins de cinq ans. Le deuxième amendement vise à étendre, jusqu'au 31 décembre 2013, l'application de la réduction d'impôt sur le revenu à raison des intérêts perçus au titre du différé de paiement accordé par un exploitant qui cède son exploitation à un jeune agriculteur qui s'installe, dans le cadre d'un contrat de vente progressive.
A l'article 6 bis (nouveau) (application des régimes de faveur aux transmissions à titre gratuit d'un fonds agricole ou d'une partie de celui-ci), la commission a adopté un amendement de suppression de cette disposition.
A l'article 12 (autorisation de l'autoconsommation des huiles végétales pures comme carburant et abaissement du taux de TVA sur les utilisations énergétiques non domestiques du bois) la commission a adopté trois amendements. Le premier amendement, par souci de simplification, tend à supprimer des renvois inutiles à des articles du code des douanes fixant des sanctions. Le deuxième amendement vise à supprimer une mesure de nature réglementaire prévoyant la publication de recommandations sur les méthodes de production des huiles et les usages des tourteaux. Adopté après les interventions de MM. Gérard Longuet et Henri de Raincourt, le troisième amendement vise à supprimer le dispositif applicable après le bilan de l'autorisation d'usage des huiles dans la mesure où il prévoit qu'un décret pourrait modifier les règles fixées par la présente loi.
A l'article 16 (modernisation du statut de la coopération agricole), la commission a adopté quatre amendements rédactionnels et, après une intervention de M. Adrien Gouteyron, un amendement qui prévoit que le plafond de dérogation des coopératives d'utilisation de matériel agricole (CUMA), au principe de l'exclusivisme, puisse être relevé à 15.000 euros dans les zones de revitalisation rurale.
A l'article 19 (assurance contre les dommages causés aux exploitations agricoles et à la forêt), la commission a adopté un amendement de coordination et un amendement visant à préciser les missions du nouveau comité national de l'assurance en agriculture.
A l'article 20 (amélioration des conditions d'utilisation de la déduction pour aléas), après l'intervention de M. François Marc, la commission a adopté trois amendements. Le premier amendement vise à supprimer une disposition qui permet aux entrepreneurs de travaux agricoles, ruraux et forestiers de bénéficier de la déduction pour aléas. Le deuxième amendement tend à préciser les conditions dans lesquelles un exploitant agricole peut pratiquer un complément de déduction pour aléas à hauteur de 4.000 euros, au-delà du plafond global commun. Le troisième amendement est un amendement de coordination.
A l'article 24 (octroi d'un crédit d'impôt aux entreprises agricoles ayant fait l'objet d'une certification en agriculture biologique), après les interventions de MM. Jean Arthuis, président, Gérard Longuet et François Marc, la commission a adopté deux amendements. Le premier amendement vise à permettre aux petites exploitations, qui ne répondent pas aux critères de superficie, de pouvoir bénéficier de la majoration maximale de 800 euros s'agissant du crédit d'impôt « agriculture biologique », le deuxième amendement tend à corriger une erreur matérielle de référence.
A l'article 29 (modification des missions des offices agricoles et création d'une Agence unique de paiement), la commission a adopté trois amendements. Le premier amendement vise à préciser les missions de l'Agence unique de paiement, le deuxième amendement est un amendement de précision rédactionnelle, le troisième amendement étant un amendement d'harmonisation des dispositions du code général des impôts.
A l'issue de cet examen, la commission a émis un avis favorable à l'adoption du projet de loi ainsi amendé.
PJLF pour 2006 - Mission « Travail et emploi » - Examen du rapport spécial
La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport spécial de M. Serge Dassault, rapporteur spécial, sur la mission « Travail et emploi » et les articles 91 et 92 rattachés.
Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Serge Dassault, rapporteur spécial, a d'abord critiqué le transfert des exonérations générales de charges sociales à la sécurité sociale, car il permettait de tenir artificiellement la promesse d'un budget en croissance « zéro » et amenait à écarter la politique d'exonération de la discussion budgétaire et de la mesure de performance. Selon lui, les 18,9 milliards d'euros d'exonérations ne pouvaient pas trouver de justification acceptable compte tenu du niveau de l'endettement public, ayant rappelé qu'au surplus une partie importante des sommes en jeu résultait de la politique « néfaste » de réduction du temps de travail.
A titre personnel, il s'est déclaré en faveur d'une réduction progressive du niveau des exonérations générales de charges sociales, dont le champ aurait pu être progressivement réduit en diminuant le salaire maximum éligible à ces exonérations de 1,6 fois le SMIC en 2005 à 1,5 fois le SMIC en 2006, puis à 1,4 fois le SMIC en 2007 et ainsi de suite. M. Serge Dassault, rapporteur spécial, a donc indiqué qu'il proposerait, à titre personnel, un amendement de suppression de l'article 41 figurant dans la première partie du projet de loi de finances. Par ailleurs, il s'est déclaré favorable à la mise en place d'un taux réduit de TVA pour l'hôtellerie et la restauration. D'une façon générale, il a estimé que, pour stimuler l'emploi, il convenait de proposer aux chefs d'entreprises des subventions sous forme d'aides remboursables ou de garanties d'emprunts, formule qui lui semblait bien plus porteuse de croissance et d'emploi que les aides existantes à la sécurité sociale.
Puis M. Serge Dassault, rapporteur spécial, a abordé les autres observations que lui avait inspirées la mission « Travail et en emploi ». En premier lieu, il a souligné que la programmation budgétaire de la loi de programmation pour la cohésion sociale n'avait pas été respectée. En deuxième lieu, il a estimé que la situation de l'ANPE était paradoxale puisque ses moyens budgétaires étaient, a priori, insuffisants pour accomplir l'intégralité des nouvelles missions qui lui étaient imparties, mais que sa performance, en termes de placement, n'était pas précisément mesurée. En troisième lieu, il a souligné, concernant le financement de l'apprentissage, les difficultés qu'entraînait la suppression par l'Assemblée nationale de l'article 18 du projet de loi de finances pour 2006. Enfin, il s'est prononcé en faveur de l'adoption des articles 91 et 92 rattachés qui visaient respectivement à reconduire, pour 2006, l'aide à la restauration et à recomposer les allocations financées par le fonds de solidarité.
M. Serge Dassault, rapporteur spécial, a ensuite rappelé et détaillé les principales données budgétaires concernant la mission « Travail et emploi », pour laquelle il était prévu 13,7 milliards d'euros de crédits de paiement pour 2006 : 0,88 milliard d'euros était dévolu au programme 133 « Développement de l'emploi », 7,1 milliards d'euros étaient destinés au programme 102 « Aides et retour à l'emploi », 4,39 milliards d'euros devaient permettre l'« Accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques » (programme 103), 82 millions d'euros étaient dévolus au programme 111 « Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail » et 724 millions d'euros au programme 155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail ».
En dernier lieu, M. Serge Dassault, rapporteur spécial, en est venu à des considérations qu'il a qualifiées de plus personnelles. Il a insisté sur la nécessité d'une plus grande flexibilité qui permettrait plus d'embauches, serait providentielle pour les entreprises en difficulté et favoriserait in fine la croissance, mais dont le coût serait néanmoins nul et qui faisait, pourtant, l'objet d'un « tabou ».
Par ailleurs, afin de financer la sécurité sociale de façon moins pénalisante pour l'emploi, il a proposé de mettre en place le « coefficient emploi-activité ». Il a expliqué que ce mode de prélèvement aboutirait à privilégier les entreprises dont le mode de production était le plus dense en emplois, tout en évitant de faire supporter par l'Etat le poids de certaines charges sociales. Il a proposé que les cotisations sociales assises sur les salaires soient uniquement destinées à financer les prestations liées à l'activité, c'est-à-dire le chômage, les retraites et les accidents du travail. En revanche, il a estimé que la sécurité sociale, les allocations familiales, la formation et le logement, qui intéressaient l'ensemble de la population, devaient donner lieu à une cotisation spécifique, dite « coefficient emploi-activité », portant sur une assiette sociale différente des salaires, égale au chiffre d'affaires diminué des salaires et des charges qui leur étaient associés, dans la définition qu'il venait d'exposer.
Récapitulant ses propositions personnelles, M. Serge Dassault, rapporteur spécial, a rappelé les quatre mesures qui lui paraissaient envisageables : la suppression de l'article 41 du projet de loi de finances pour 2006, un éventuel rétablissement de l'article 18 dudit projet de loi de finances, la mise à l'étude du « coefficient emploi-activité » ainsi que des avantages liés à une plus grande flexibilité.
Un large débat s'est alors instauré.
Après avoir remercié M. Serge Dassault, rapporteur spécial, pour l'intérêt de son propos, M. Jean Arthuis, président, a indiqué que l'occasion de revenir sur les articles 18 et 41 du projet de loi de finances pour 2006 se présenterait avec l'examen par la commission de la première partie de ce texte. Concernant l'article 41, il a souligné que l'intention de la commission était plutôt de substituer au « panier » de taxes proposées par le gouvernement une quote-part de la TVA, et qu'un rétablissement de l'article 18 lui semblait présenter certains inconvénients.
M. Louis Souvet, rapporteur pour avis de la mission « Travail et emploi » au nom de la commission des affaires sociales, après avoir confirmé que le point essentiel résidait dans le transfert à la sécurité sociale des exonérations de charges générales et constaté qu'une part de la TVA sur les produits pharmaceutiques figurait déjà parmi les taxes prévues pour le financement de ces exonérations, a approuvé la démarche visant à substituer, d'une manière générale, une quote-part de la TVA à ces taxes, précisant qu'il n'était pas totalement convaincu par la pérennité de la progressivité de ces dernières. M. Jean Arthuis, président, s'est alors félicité de la perspective d'avancer conjointement avec la commission des affaires sociales sur la voie de l'attribution à la sécurité sociale d'une quote-part de la TVA.
Evoquant le sujet de la taxe d'apprentissage, M. Philippe Marini, rapporteur général, s'est déclaré proche de la position de M. Jean Arthuis, président. L'évolution de la collecte de la taxe d'apprentissage pose, en effet, un problème dans la mesure où elle se trouve affectée prioritairement aux régions et à des structures de branches (qui, du reste, ne parvenaient pas toujours à dépenser les montants qui leur étaient attribués), tandis que la fraction de taxe d'apprentissage librement affectée par les chefs d'entreprise se trouve inopportunément réduite. Dès lors, il a estimé que la suppression de l'article 18 était de bonne politique. Concernant le « coefficient emploi-activité », M. Philippe Marini, rapporteur général, a préconisé le dépôt d'une proposition de loi, qui lui semblait le véhicule adéquat pour un examen utile de ce type de dispositif.
M. Philippe Adnot, après avoir rappelé qu'il s'était prononcé, à l'occasion de l'examen, en commission, du budget de l'emploi et du travail pour 2005, contre l'adoption de la disposition visant à réduire la fourchette salariale d'éligibilité aux réductions générales de charges sociales, car l'économie d'1,2 milliard d'euros ainsi engendrée devait se trouver réaffectée à de nouvelles dépenses, a constaté que le non respect de la programmation des dépenses concernant la mise en place des « maisons de l'emploi » prenait, ici, un relief particulier.
M. Marc Massion a alors remarqué que l'opposition sénatoriale était aussi critique que M. Serge Dassault concernant l'article 41, au motif que ce texte aboutissait à un budget insincère. Mais il a douté de l'étendue des vertus que le rapporteur spécial attribuait à la flexibilité, observant que le « contrat nouvelle embauche », par exemple, ne permettait pas une véritable insertion, car les banques n'étaient pas prêtes à s'engager auprès de personnes bénéficiant de formules contractuelles précaires.
M. Jean-Jacques Jégou, après avoir remercié M. Serge Dassault d'avoir eu le courage de proposer des solutions nouvelles, s'est aussi posé la question de l'utilité économique des plus de 7 milliards d'euros dévolus au programme 102 « Aide et retour à l'emploi ». Il a déclaré partager la préoccupation du rapporteur spécial de remettre en cause les assiettes de prélèvements ne portant que sur les salaires et enfin contesté l'intérêt de mettre en place une TVA à taux réduit dans la restauration.
Revenant aux orientations de la commission concernant les modalités de transfert à la sécurité sociale du financement des allègements généraux de charges, M. Jean Arthuis, président, a précisé que l'attribution d'une quote-part de la TVA ne serait pas sans précédent, puisque tel avait été le mode de financement du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA). En outre, elle était susceptible d'orienter l'avenir, constituant, en quelque sorte, une « préfiguration » de la « TVA sociale », qu'il appelait, comme un nombre croissant de ses collègues, de ses voeux.
Puis M. Philippe Adnot a précisé que, pour évaluer le coût véritable des « maisons de l'emploi », il aurait été nécessaire d'adjoindre les financements provenant des collectivités territoriales. M. Jean Arthuis, président, a souligné que l'embauche par l'ANPE de 3.000 personnes supplémentaires ne garantissait rien d'autre qu'une diminution à due concurrence du nombre de chômeurs. M. Marc Massion a évoqué les expériences contractuelles de l'ANPE auprès de cabinets privés afin d'accélérer le retour à l'emploi des chômeurs.
En réaction à l'ensemble de ces interventions, M. Serge Dassault, rapporteur spécial de la mission « Travail et emploi », a admis qu'il était certes difficile, même pour les personnes bénéficiant d'un contrat à durée déterminée, d'obtenir un emprunt auprès d'une banque, et qu'une plus grande flexibilité nécessitait, en effet, l'acclimatation d'un état d'esprit nouveau, voire le renforcement de certains droits.
Revenant aux modalités de transfert de ressources à la sécurité sociale opéré par le projet de loi de finances pour 2006, M. Jean-Jacques Jégou a déploré que la taxe sur les salaires, qui faisait partie du « panier » d'impositions concerné, se trouve ainsi pérennisée, alors qu'elle pénalisait fortement les emplois dans le secteur bancaire et dans celui des assurances, ajoutant que, de même, les hôpitaux payaient inopportunément la taxe sur les salaires.
En conclusion, sur la recommandation de M. Jean Arthuis, président, et sous le bénéfice des observations qui avaient été formulées, la commission a alors décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Travail et emploi » ainsi que les articles 91 et 92 rattachés pour 2006.
PJLF pour 2006 - Mission « Santé » - Examen du rapport spécial
La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport spécial de M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, sur la mission « Santé ».
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a tout d'abord indiqué que seulement 45 % des réponses au questionnaire budgétaire lui étaient parvenues à la date limite prévue par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).
Il a rappelé que la mission ministérielle « Santé » rassemblait 409,2 millions d'euros d'autorisations d'engagement (AE) et 399,3 millions d'euros de crédits de paiement (CP), répartis en trois programmes d'importance inégale.
Il a précisé que cette présentation des crédits devait toutefois être fortement relativisée pour trois raisons.
Il a relevé, tout d'abord, l'absence des crédits de personnel et a noté que le programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales » de la mission « Solidarité et intégration » contribuait pour plus de 279,9 millions d'euros à la mission « Santé ». Il a souhaité que le ministère reconsidère le choix de placer l'intégralité des personnels au sein du programme support de la mission « Solidarité et intégration », des marges de manoeuvre semblant pouvoir être dégagées si les personnels d'administration centrale étaient inclus dans les programmes de la mission « Santé ».
Il a ensuite indiqué qu'avec un montant de 1,88 milliard d'euros, les dépenses fiscales - dont il s'interrogeait sur la pertinence - représentaient près de cinq fois les crédits budgétaires.
Enfin, il a observé que cette mission apparaissait, à certains égards, comme une mission « annexe » du budget de la sécurité sociale, l'Etat n'intervenant que pour moins d'1 % du total des dépenses effectuées au titre de l'offre de soins, ce qui posait la question du rapport entre loi de finances et loi de financement de la sécurité sociale.
Il a également noté que les crédits de fonds de concours abondant la mission « Santé » seraient peu élevés et devraient s'établir à 1,2 million d'euros.
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a ensuite fait part de ses principales remarques et questions sur les trois programmes de cette mission.
Tout d'abord, il a indiqué que les dotations inscrites sur les différents programmes au titre des frais de justice paraissaient insuffisantes, ce qui laissait supposer des redéploiements en gestion.
Concernant le programme « Santé publique et prévention », il a souligné deux changements de périmètre qui nécessitaient des compléments d'information. Il a ainsi indiqué que certaines compétences de prévention sanitaire seraient recentralisées, un montant de 41,7 millions d'euros étant inscrit à ce titre. Il a souhaité connaître les départements qui avaient choisi de signer des conventions avec l'Etat afin de conserver leurs compétences dans ce domaine.
Il a également noté que les motivations exactes entourant le transfert à l'assurance maladie du financement des centres d'accueil et d'accompagnement à la réduction des risques pour les usagers de drogues (CAARUD) devraient être clarifiées.
Il a ensuite observé que la justification au premier euro des crédits du programme « Santé publique et prévention » souffrait d'imprécisions et devrait être améliorée à l'avenir. Il a ajouté qu'il serait amené à proposer à la commission, pour correspondre à la justification au premier euro présentée dans le « bleu » budgétaire, de réduire les crédits de paiement du programme de 100.000 euros et les autorisations d'engagement de 105.000 euros, afin de transférer ces crédits vers le programme « Offre de soins et qualité du système de soins ».
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a constaté que plus de 18 millions d'euros inscrits sur le programme « Santé publique et prévention » correspondaient à la mise en oeuvre de la partie sanitaire du plan gouvernemental de lutte contre les drogues illicites, le tabac et l'alcool et à d'autres actions visant, notamment, à subventionner des réseaux de soutien ou des structures d'accueil pour toxicomanes. Il a fait valoir que ce partage n'apparaissait pas cohérent avec l'existence, au sein de la mission « Santé », d'un programme spécifiquement dédié à la lutte contre les drogues et les toxicomanies, et que ce choix avait été guidé par une logique de frontières administratives. Il a ainsi proposé à la commission de transférer ces 18 millions d'euros vers le programme « Drogue et toxicomanie ».
Il a indiqué, par ailleurs, que les relations entre l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES) et l'Institut national du cancer (INC) n'étaient pas encore stabilisées et que le ministère de la santé et des solidarités devrait porter une attention particulière à ce point.
Enfin, il a ajouté que la réflexion sur les indicateurs de performance devait, de manière générale, être poursuivie, plusieurs d'entre eux ne permettant pas d'apprécier la performance des actions conduites par le ministère dans le cadre du programme « Santé publique et prévention ».
Concernant le programme « Offre de soins et qualité du système de soins », M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a indiqué que deux constats de fond s'imposaient. D'une part, les crédits inscrits sur ce programme étaient minimes par rapport aux dépenses incombant à l'assurance maladie. D'autre part, les marges de manoeuvre du ministère apparaissaient réduites sur près de la moitié des crédits qui correspondaient à la rémunération des internes de spécialité durant les stages que ceux-ci peuvent effectuer dans des organismes extrahospitaliers ou dans des cabinets libéraux, ainsi qu'aux indemnités de maîtres de stages perçues par les praticiens libéraux.
Il a salué la refonte des objectifs et indicateurs de performance, notamment à la suite des remarques formulées par les commissions des finances du Sénat et de l'Assemblée nationale, ces objectifs et indicateurs étant désormais en phase avec les leviers d'action du ministère.
Il a affirmé que tous les opérateurs devaient être soumis à la logique de performance, y compris la Haute autorité de santé, son statut ne devant pas l'exonérer de cette contrainte.
Il a également fait part de ses interrogations concernant le programme « Offre de soins et qualité du système de soins ». Il a ainsi souhaité connaître les implications des distinctions opérées entre « opérateurs », « acteurs » et « partenaires » du programme, au regard de l'appréciation de la performance de l'utilisation des crédits.
Il s'est ensuite interrogé sur l'efficacité des subventions d'investissement accordées dans le cadre de contrats de développement passés avec des collectivités d'outre-mer.
Enfin, il a fait part du projet de création d'un centre national de gestion des personnels, actuellement gérés par la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins, suivant le modèle du centre national de gestion de la fonction publique territoriale (CNFPT). Il a relevé que cette solution n'était pas forcément synonyme d'économies. Il a souhaité obtenir des précisions sur le calendrier et les modalités, en particulier financières, envisagés par le gouvernement.
Concernant le programme « Drogue et toxicomanie », M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial, a indiqué que la principale observation avait trait au positionnement délicat de ce programme, qui répondait davantage à une logique administrative qu'à une logique de projet, au sein de la mission « Santé ».
Il a également observé que, pour conduire ce programme, la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) s'appuyait sur quatre opérateurs, dont une association qu'elle finançait à 100 %, ce qui lui paraissait devoir être reconsidéré à l'avenir.
Par ailleurs, il a considéré que la justification au premier euro des crédits de ce programme devrait, à l'avenir, être plus détaillée et qu'il conviendrait de compléter certains indicateurs afin de pouvoir apprécier l'efficacité des actions menées sous l'impulsion de la MILDT.
Enfin, il a attiré l'attention de la commission sur le devenir du fonds de concours provenant des saisies de la police et de la gendarmerie, qui devrait rapporter 1,2 million d'euros. Le président de la MILDT lui ayant indiqué que le rattachement de ce fonds de concours « par assimilation » au programme « Drogue et toxicomanie » n'était plus garanti, il a souhaité connaître les intentions précises du gouvernement sur ce point.
A l'issue de cette présentation, M. Serge Dassault s'est interrogé sur le lien entre les crédits de cette mission et ceux de la sécurité sociale.
Puis, à l'invitation de son rapporteur spécial, la commission a adopté deux amendements tendant à :
- transférer 105.000 euros en autorisations d'engagement et 100.000 euros en crédits de paiement de l'action n° 3 du programme « santé publique et prévention » vers l'action n° 3 du programme « offre de soins et qualité du système de soins », afin de renforcer les outils de pilotage du système hospitalier des agences régionales de l'hospitalisation ;
- transférer 18.061.178 euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement de l'action n° 2 du programme « santé publique et prévention » vers l'action n° 1 du programme « drogue et toxicomanie », afin de clarifier l'architecture de cette mission.
La commission a alors décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Santé » pour 2006 ainsi amendés.
PJLFSS pour 2006 - Demande de renvoi pour avis et nomination d'un rapporteur pour avis
Puis la commission a décidé de se saisir pour avis du projet de loi n° 2575 (AN- XIIe législature) de financement de la sécurité sociale pour 2006 et a désigné M. Jean-Jacques Jégou comme rapporteur pour avis.
Groupe de travail intercommissions sur la recherche - Désignation de candidats
Enfin, la commission a ensuite désigné MM. Philippe Adnot, Denis Badré, Maurice Blin, Mme Nicole Bricq, MM. Serge Dassault, Yves Fréville et Adrien Gouteyron, comme membres du groupe de travail intercommissions sur la recherche.
Jeudi 27 octobre 2005
- Présidence de M. Jacques Baudot, puis de M. Jean Arthuis, président.
PJLF pour 2006- Mission « Pouvoirs publics » - Examen du rapport spécial
La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport spécial de M. Jean Arthuis, rapporteur spécial, sur la mission « Pouvoirs publics ».
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial, a tout d'abord indiqué que la mise en oeuvre de la LOLF avait entraîné le transfert des crédits destinés au fonctionnement des pouvoirs publics vers une mission spécifique, clairement identifiée.
Tout en aménageant sa structure, elle n'en a pas modifié le périmètre, permettant ainsi une transition sans difficulté particulière. Cependant, M. Jean Arthuis, rapporteur spécial, a noté que l'absence d'éléments d'information dans le « bleu » annexé au projet de loi de finances, conduisait à devoir attendre la parution des « jaunes » et, qu'en conséquence, son exposé resterait donc nécessairement limité.
Il s'est interrogé sur la possibilité pour le ministère du budget d'envisager la publication de ces annexes plus en amont au moment du dépôt du projet de loi de finances sur le bureau de l'Assemblée nationale.
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial, a ensuite fait part des quelques éléments disponibles. Il a indiqué qu'aux termes de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), les crédits affectés aux pouvoirs publics étaient regroupés sous le « titre 1. Dotations des pouvoirs publics », composé de sept dotations.
Il a rappelé que dans la nomenclature issue de l'ordonnance organique de 1959, ces crédits étaient, jusqu'à présent, « hébergés » au sein du Titre II du budget des charges communes.
Présentant les crédits, M. Jean Arthuis, rapporteur spécial, a précisé que s'agissant de dotations, les autorisations d'engagement sont égales aux crédits de paiement. Compte tenu de la stabilité du périmètre de la mission, une comparaison des crédits demandés et de leur évolution par rapport à ceux ouverts au titre de la loi de finances initiale pour 2005 pouvait être faite.
Portant un regard général sur l'ensemble des crédits demandés au titre de la mission, il a constaté que l'évolution positive de ceux-ci (+ 1,88 %) restait dans les objectifs de « progression zéro » en volume applicables à l'ensemble des dépenses du budget de l'Etat, compte tenu des prévisions d'inflation s'établissant à 1,8 %.pour 2006
Intervenant au cours du débat qui a suivi, M. Yves Détraigne, rapporteur pour avis au nom de la commission des lois de la mission « Justice » a indiqué qu'il avait, à ce titre, adressé un questionnaire aux différentes juridictions figurant au sein des pouvoirs publics et, qu'à ce jour, il n'avait obtenu aucune réponse.
Pour sa part, M. Jean-Claude Frécon, s'exprimant en sa qualité de rapporteur spécial de la mission « Conseil et contrôle de l'Etat », a indiqué avoir reçu, en temps et en heure, l'intégralité des réponses aux questions posées. Il en a par ailleurs relevé, pour s'en féliciter, la très grande qualité.
En réponse à M. Yann Gaillard, qui s'étonnait que « la chaîne parlementaire » soit traitée sur le même pied que les « pouvoirs publics traditionnels », M. Jean Arthuis, rapporteur spécial, a précisé que s'agissant de dotations, c'était là, un moyen de comptabilité analytique permettant d'individualiser les crédits.
La commission a alors décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission « Pouvoirs publics » pour 2006.
PJLF pour 2006- Mission « Gestion et contrôle des finances publiques » - Examen du rapport
La commission a tout d'abord examiné le rapport spécial de M. Bernard Angels, rapporteur spécial, sur la mission « Gestion et contrôle des finances publiques », le compte spécial« Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » et le compte spécial « Avances à divers services de l'Etat ou organismes gérant des services publics ».
M. Bernard Angels, rapporteur spécial, a souligné au préalable que la mission « Gestion et contrôle des finances publiques » était la principale mission, en termes budgétaires, du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie puisqu'elle représentait 78,6 % du plafond d'emplois du ministère, et constituait le « coeur de métier régalien » de Bercy, lié au recouvrement des recettes et au paiement des dépenses de l'Etat. Il a indiqué qu'elle représentait 136.754 emplois et 8,82 milliards d'euros de crédits de paiement, soit 3,3 % de l'ensemble des missions, correspondant, pour 79 %, à des dépenses de personnel du titre 2.
Il a précisé que la mission regroupait deux programmes, d'inégale importance en termes de crédits. Il a expliqué que le programme « gestion fiscale et financière de l'Etat et du secteur public local », doté de 8,1 milliards d'euros, représentant 92 % des crédits de paiement de la mission, avait pour principal objet le calcul de l'assiette, le recouvrement et le contrôle des recettes de l'Etat, des collectivités territoriales ou de celles versées à l'Union européenne, le paiement des dépenses publiques et la tenue des comptes publics, et que son responsable était le secrétaire général du ministère de l'économie et des finances (Minéfi). Il a indiqué que le second programme « conduite et pilotage des politiques économique, financière et industrielle », doté de 715 millions d'euros, constituait le programme « soutien » de l'ensemble des missions rattachées au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie et que son responsable était le directeur du personnel, de la modernisation et de l'administration.
Il a ensuite fait valoir que les efforts de productivité réalisés sur les deux programmes s'étaient poursuivis, et même accélérés, par rapport aux années antérieures. Il a noté une réduction de 2.077 emplois sur le premier programme, soit une baisse des effectifs de 1,6 % par rapport à l'exercice précédent et une suppression de 342 emplois sur le second programme. Il a remarqué que l'accentuation de l'effort de productivité allait de pair avec un objectif, affiché par les responsables de la mission, d'amélioration de la qualité du service rendu aux usagers.
Il a énuméré les quatre priorités fixées par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie au titre de sa mission « Gestion et contrôle des finances publiques» en 2006.
Il a indiqué que la première priorité était de faciliter l'impôt, en progressant vers un interlocuteur unique, tant pour les particuliers que pour les entreprises (y compris les PME), et en améliorant de manière plus globale la qualité des services rendus, avec notamment l'ambition d'atteindre 10 millions de télédéclarations de l'impôt sur le revenu en 2006, grâce notamment au crédit d'impôt de 20 euros, dont le coût pour les finances publiques devrait atteindre 105 millions d'euros en 2006.
Il a fait valoir que la deuxième priorité était d'améliorer la qualité des comptes de l'Etat et des collectivités territoriales, en réduisant par exemple le nombre de jours-anomalies constatés dans la comptabilité de l'Etat, et grâce au déploiement, en 2006, du programme Hélios, visant à accroître l'offre de service proposée aux collectivités territoriales en matière comptable.
Il a souligné que la troisième priorité était consacrée à une gestion plus efficiente des moyens, en améliorant les conditions dans lesquelles les administrations relevant de la mission exerçaient leurs actions. Cela est notamment mesuré par l'évolution du taux d'intervention en matière fiscale et la mesure de la productivité, avec, pour cette dernière, une croissance prévue de 2,5 % en 2006, après 2 % en 2005.
Il a montré que la quatrième priorité était de moderniser la gestion des ressources humaines en développant une gestion plus qualitative et individualisée des agents. Ce dont devait témoigner l'existence, par exemple, d'indicateurs relatifs à la part des agents qui bénéficient d'entretiens d'évaluation-notation ou qui suivaient des formations, notamment pour les agents de catégorie C, et en progressant dans l'accélération des délais de traitement des dossiers de pension.
Il a par ailleurs formulé sur l'ensemble de la mission trois remarques d'ordre général.
Il a regretté avoir reçu au 10 octobre, délai limite fixé par la LOLF, moins de 5 % des réponses à son questionnaire budgétaire, notant que ce taux ne s'était pas amélioré depuis lors malgré un courrier adressé à M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, jugeant que le Minéfi, maître d'oeuvre de la LOLF, devrait pourtant être « exemplaire » dans l'application de celle-ci.
Il a fait remarquer, en ce qui concernait la définition des objectifs et des performances, que le ministère de l'économie et des finances, et notamment les administrations financières qui concouraient à la mission, bénéficiaient d'une réelle avance liée aux contrats « objectifs-moyens » ou contrats « de performance » mis en place au cours des dernières années. Il a fait observer que les indicateurs avaient ainsi pu être améliorés au fil du temps et qu'ils étaient disponibles sur des séries temporelles longues, ce qui facilitait les comparaisons, et les rendait crédibles aux yeux du Parlement. Il a considéré qu'il était temps que ces contrats puissent être conclus par d'autres ministères que le seul Minéfi.
Il a enfin constaté que le Minéfi n'était toujours pas parvenu, malgré des annonces successives, à définir de manière satisfaisante des procédures d'intéressement des personnels, donnant ainsi le sentiment que les responsables du ministère ne savaient pas véritablement comment associer leurs agents à la modernisation de Bercy.
Il a ensuite détaillé ses remarques sur le premier programme lié à la collecte de l'impôt, l'exécution et la comptabilisation de la dépense, qui concernait les administrations fiscales et financières de Bercy.
Il a souligné que les indicateurs liés au respect de leurs obligations fiscales par les contribuables particuliers et professionnels montraient le bon niveau déjà atteint par les administrations fiscales dans « l'encouragement » au civisme fiscal. Il a considéré qu'il restait à poursuivre la réflexion sur la faisabilité et les avantages de la retenue à la source.
Il a observé que l'indicateur relatif à la part des recettes de TVA acquittées par télérèglement révélait, qu'à ce stade, la procédure de téléTVA constituait un semi-échec, liée à une insuffisante attractivité du produit aux yeux des entreprises. Il a expliqué qu'avec 81.500 télédéclarants en 2004, les résultats restaient très éloignés de la cible de 2005 (250.000). Il a constaté que, manifestement, les actions de communication annoncées par M. Bruno Parent, directeur général des impôts, devant la commission le 13 juillet 2004, destinées à convaincre les entreprises de souscrire à téléTVA, avec deux arguments majeurs (l'un portant sur les économies possibles en termes de jours de valeur, et donc de trésorerie, pour les redevables procédant par virement, l'autre sur le caractère utile et prometteur du certificat électronique, au-delà de sa seule application à la téléTVA) n'avaient pas été encore, à ce jour, couronnées de succès. Il a fait valoir que l'abaissement du seuil du chiffre d'affaires au-delà duquel la téléTVA était obligatoire (15 millions d'euros aujourd'hui), à 1,5 million d'euros en 2006 et à 760.000 euros en 2007, prévu par l'article 71 du projet de loi de finances pour 2006, ne serait pas de nature à garantir, à lui seul, le succès du produit téléTVA.
Il a souligné que l'indicateur relatif au nombre de particuliers ayant souscrit leurs déclarations de revenus par Internet manifestait des ambitions certaines, 10 millions de télédéclarations en 2006, 15 millions en 2008, rappelant que ces objectifs étaient indéniablement facilités par la réduction d'impôt de 20 euros applicable pour l'imposition des revenus 2004, 2005 et 2006. Il a considéré néanmoins que l'augmentation rapide du nombre de télédéclarants à l'impôt sur le revenu devait aller de pair avec une amélioration, toute aussi rapide, de la fiabilité et de la qualité de service du site internet impots.gouv.fr. Il a ainsi appelé à renforcer la fiabilité du système d'information qui avait malheureusement connu des « ratés » lors de la campagne 2005. Il a jugé qu'il fallait surtout améliorer les services offerts en ligne aux contribuables, l'absence d'interface commune entre les pages consacrées à la déclaration, et à la consultation du compte fiscal, et les pages consacrées au paiement de l'impôt, ainsi qu'au changement d'adresse, rendant la consultation du site impots.gouv.fr trop peu conviviale. Il a déclaré que l'obligation, pour la déclaration d'impôt sur le revenu, et pour chaque adhésion à la mensualisation, impôt par impôt, de disposer d'identifiants différents, fort complexes, faisait sentir la nécessité d'un identifiant fiscal unique. Enfin, il a indiqué, faisant état de son expérience personnelle, qu'il était parfois illusoire d'attendre un accusé de réception électronique à une simple démarche d'adhésion à la mensualisation ou de changement d'adresse effectuée en ligne.
M. Bernard Angels, rapporteur spécial a remarqué, en outre, que les indicateurs relatifs au taux de recouvrement des créances de contrôle fiscal et aux taux de recouvrement des amendes et condamnations pécuniaires affichaient des valeurs cibles trop peu ambitieuses à ses yeux, et qu'elles n'étaient pas satisfaisantes en l'état. Il a ainsi indiqué que le taux de recouvrement des créances fiscales devrait passer de moins de 40 % en 2004 à seulement 42 % en 2008 et que le taux de recouvrement contentieux des amendes et condamnations pécuniaires, qui occupait pourtant 1.420 personnes à temps plein à la direction générale de la comptabilité publique, était de seulement 34 % en 2004, ce taux devant passer à 42 % en 2008. Il a reconnu qu'il ne fallait pas mésestimer les difficultés inhérentes à ces recouvrements. Il a jugé, par ailleurs, qu'une distinction du taux de recouvrement selon la nature du recouvrement contentieux, amendes majorées ou décision de justice, serait la bienvenue, mais a considéré que les montants financiers en jeu exigeaient des efforts accrus de la part des administrations concernées. Il s'est interrogé sur l'opportunité de réaliser un travail de contrôle budgétaire sur ce sujet en 2006, soit de son propre chef en application de l'article 57, soit en « passant commande » au titre de l'article 58-2 de la LOLF à la Cour des comptes.
Il a précisé enfin qu'un objectif lui paraissait ignoré par les responsables du programme, celui lié à la « présence territoriale » des administrations financières, répondait à un impératif d'aménagement du territoire pourtant reconnu par le gouvernement. Il a recommandé la création d'un tel indicateur.
En ce qui concernait le second programme de la mission, qui regroupait les crédits de « soutien » du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, il a noté que le potentiel d'économies lié à une optimisation des achats était très important, 100 millions d'euros en 2006, 150 millions en 2007, l'exemple de Bercy paraissant de nature à inspirer les autres ministères.
Il s'est inquiété, par ailleurs, du faible taux de connaissance déclaré par les agents des évolutions du Minéfi, la valeur cible étant de 55 % seulement en 2008. Il a fait remarquer en outre que l'indicateur ne permettait pas de mesurer l'adhésion des agents aux évolutions de leur ministère. Il a souligné que la performance d'une communication tenait pourtant à sa capacité à convaincre.
Il a enfin jugé que les dépenses de plateau technique (ensemble des dépenses de structures liées à l'immobilier, y compris les loyers et charges, le nettoyage et la surveillance des locaux, la maintenance et les travaux d'aménagement) connaissaient une tendance à la hausse inquiétante, qui appelait des correctifs, par la mise en place d'une gestion du parc immobilier des administrations centrales du Minéfi encore plus performante. Il a signalé l'importance des dépenses d'investissement immobilier liées à l'arrivée du bâtiment de Bercy dans la période « 15-20 ans », qui nécessitait une modernisation des équipements pour que ceux-ci continuent à fonctionner de manière satisfaisante. Il a précisé que la dépense prévue pour ce seul bâtiment atteignait 4,42 millions d'euros en autorisations d'engagement pour 2006 et 11 millions d'euros en crédits de paiement.
En conclusion, après avoir indiqué que les crédits des deux missions « Avances à divers services de l'Etat ou organismes gérant des services publics » et « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » n'appelaient pas de remarques particulières, il a souligné que, faute de réponses complètes à son questionnaire budgétaire, il devait réserver sa position sur le vote des crédits des trois missions concernées.
Un débat s'est alors engagé.
M. Jean Arthuis, président, a remercié le rapporteur spécial pour la qualité de son intervention.
M. François Trucy s'est inquiété de l'incapacité du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie à répondre dans les délais aux questionnaires budgétaires adressés par les rapporteurs spéciaux. Il s'est interrogé sur le point de savoir si les crédits de la mission « Gestion et contrôle des finances publiques » correspondaient bien à l'ensemble des administrations financières, notant que les masses budgétaires en jeu paraissaient plus faibles qu'il ne l'avait imaginé.
M. Jean-Claude Frécon, comme M. Yann Gaillard, après l'intervention de M. Roger Karoutchi, ont regretté la lenteur avec laquelle les administrations fiscales tenaient compte des demandes de rectification des redevables ou des changements de situation fiscale.
M. Yann Gaillard a considéré, en outre, qu'il était très difficile à un ministre de l'économie, des finances et de l'industrie de s'intéresser à l'organisation de son ministère, en raison des risques de troubles sociaux. Il a signalé l'importance de la réforme du service de la redevance mené par M. Nicolas Sarkozy, alors ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Jean Arthuis, président, s'est inquiété des activités éditoriales du syndicat national unifié des impôts (SNUI) et des prises de position de ce syndicat sur la politique fiscale des gouvernements. Il a invité le rapporteur spécial à examiner les modalités de recouvrement de l'impôt de la Belgique, ce pays ayant développé des possibilités de transaction permettant de meilleurs rentrées fiscales.
M. Jean-Jacques Jégou a regretté, comme M. Philippe Dallier, la résistance de certaines trésoreries face à des demandes d'amélioration émanant des collectivités territoriales, liées par exemple au paiement par carte bleue dans les régies municipales.
En réponse, M. Bernard Angels a précisé que la mission dont il était le rapporteur spécial regroupait l'ensemble des crédits dédiés au recouvrement de l'impôt et au paiement de la dépense. Il a jugé que les progrès dans la réforme du Minéfi étaient indéniables, mais que l'on progressait lentement, pas à pas. Il a indiqué son intention de réaliser une ou deux visites de perceptions, dans le cadre d'un contrôle sur pièces et sur place effectué en application de l'article 57 de la LOLF, afin d'interroger les responsables locaux sur les différents constats faits par ses collègues.
A l'issue de ce débat, à l'invitation de M. Jean Arthuis, président, et de M. Bernard Angels, rapporteur spécial, la commission adécidé de réserver son vote sur les crédits des missions « Gestion et contrôles des finances publiques », « Avances à divers services de l'Etat ou organismes gérant des services publics » et « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés », jusqu'à réception de l'ensemble des réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial.
Contrôle de l'application des lois au 30 septembre 2005 - Communication
La commission a enfin entendu une communication de M. Jean Arthuis, président, sur le contrôle de l'application des lois du 1er octobre 2004 au 30 septembre 2005.
M. Jean Arthuis, président, a rappelé que chaque année le Sénat publiait un rapport sur le contrôle de l'application des lois, et que les commissions étaient chargées d'établir un bilan de la parution des textes règlementaires d'application des mesures législatives votées par le Parlement dont elles avaient été saisies au fond, ce bilan faisant traditionnellement l'objet d'une communication dans chaque commission, qui est annexée au rapport annuel.
Il a ensuite fait part de ses observations, en précisant qu'avec la LOLF, les commissaires des finances avaient une obligation renforcée de contrôle budgétaire.
S'agissant des textes de loi « ordinaires », il a constaté, au plan statistique, que la tendance à l'amélioration des délais de parution, observée lors du précédent contrôle se confirmait. Le taux de publication des textes d'application pris sur les douze derniers mois se situait légèrement au-dessus de 50 %, pour atteindre un taux global d'application des lois promulguées égal à 80 % pour l'ensemble, et proche de 90 % pour les lois antérieures au 1er octobre 2004
Il a relevé que ce taux cachait nécessairement des disparités importantes. A titre d'exemple, il a évoqué la loi d'orientation pour le développement économique, social et culturel de la Polynésie française, votée en 1994, qui faisait toujours l'objet d'un suivi, alors qu'à l'opposé, la loi de finances pour 2002 (n° 2001-1275 du 28 décembre 2001) était désormais entièrement applicable. Par ailleurs, un certain nombre de blocages, qui persistaient, semblaient également être en voie d'être levés.
Concernant les lois promulguées à compter du 1er octobre 2004, M. Jean Arthuis, président, a noté que les deux lois de finances votées fin 2004, loi de finances initiale pour 2005 et loi de finances rectificative pour 2004, avaient reçu les deux tiers des textes règlementaires attendus. Il a constaté, par ailleurs, que les contacts pris avec les ministères signataires laissaient augurer une pleine applicabilité des mesures envisagées dans un délai assez court.
Au titre des textes en instance, M. Jean Arthuis, président,a évoqué le décret en Conseil d'Etat précisant les conditions de fonctionnement du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) ainsi que les modalités de suppression du Conseil des impôts. Il a regretté que ce décret ne soit toujours pas publié à ce jour, alors que la loi prévoyait explicitement l'entrée en vigueur du Conseil à compter du 1er octobre 2005 et que la presse évoquait déjà son programme de travail. Il a rappelé que la commission avait été à l'origine de la création du CPO et, qu'en conséquence, il veillerait avec une attention toute particulière à ce que le décret soit pris dans les meilleurs délais et que le retard soit le plus réduit possible.
M. Jean Arthuis, président, a ensuite constaté que le nombre toujours élevé -14 en 2004, 11 en 2005- de demandes de textes règlementaires devenant sans objet posait la question du recours trop fréquent à un encadrement règlementaire, alors que le texte même de la loi était suffisant pour son application directe, ou que les pratiques « sur le terrain » ne posaient pas de problème particulier.
En conclusion, M. Jean Arthuis, président, s'est félicité que les nouvelles pratiques vertueuses entrevues l'an dernier semblaient vouloir se pérenniser et que celles-ci, combinées à une meilleure préparation en amont des textes soumis au Parlement et à un contrôle toujours plus présent, participaient à une meilleure lisibilité de l'action gouvernementale. Il a souhaité voir, dans cette tendance, certains effets de la mise en oeuvre de la LOLF qui, d'ores et déjà, impliquaient de nouveaux comportements pour rendre plus efficientes les missions de la politique engagée.
La commission a alors donné acte à M. Jean Arthuis, président, de sa communication.