Travaux de la commission des finances



- Présidence de M. Jean Arthuis, président.

Octroi de mer - Examen des amendements

La commission a procédé à l'examen des amendements sur le projet de loi n° 335 (2003-2004), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, relatif à l'octroi de mer.

A l'article 24 (différentiels de taux pour les assujettis exonérés), après les interventions de MM. Claude Lise et Aymeri de Montesquiou, la commission a demandé le retrait de l'amendement n° 6 de M. Claude Lise, tendant à introduire une précision de nature comptable.

A l'article 30 (principe général des différentiels de taux), la commission a donné un avis défavorable aux amendements n° 7 de M. Claude Lise, tendant à la suppression de l'article, n° 10 de M. Paul Verges, tendant à préciser le rôle de la direction des douanes, et n° 3 de M. Rodolphe Désiré, tendant à introduire une modification rédactionnelle.

A l'article 43 (prélèvement pour frais d'assiette et de recouvrement), après les interventions de MM. Claude Lise et Jean Arthuis, président, la commission a donné un avis défavorable aux amendements n°s 2 de Mme Lucette Michaux-Chevry, et 8 de M. Claude Lise, tendant à abaisser le taux perçu par l'Etat au titre des frais d'assiette et de recouvrement.

A l'article 48 (Fonds régional pour le développement de l'emploi), elle a donné un avis défavorable aux amendements n° 11 de M. Paul Vergès, tendant à modifier les critères de répartition du Fonds régional pour le développement de l'emploi (FRDE), n° 4 de M. Dominique Larifla, tendant à majorer une aide pour les îles du sud de la Guadeloupe, n° 5 de M. Georges Othily, tendant à majorer la part communale en Guyane, n° 12 de M. Paul Verges, tendant à assouplir les conditions d'attribution des fonds du FRDE, n°s 1 de M. Anne-Marie Payet et 14 de M. Georges Othily, tendant à introduire une aide spécifique aux transports.

A l'article 48 bis (nouveau) (répartition du solde du FRDE), la commission a émis un avis défavorable aux amendements n°s 9 de M. Claude Lise et 13 de M. Paul Verges, tendant à supprimer cet article.

Mardi 22 juin 2004

- Présidence de M. Jean Arthuis, président.

Contrôle budgétaire - Outil diplomatique en Turquie - Communication

La commission a entendu une communication de M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, sur l'outil diplomatique en Turquie.

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a indiqué qu'il avait effectué une mission d'évaluation et de contrôle en Turquie à l'automne dernier, et qu'il avait eu, depuis, l'occasion de suivre l'évolution de certains dossiers, s'agissant notamment des problèmes immobiliers.

Il a considéré que l'influence culturelle française était importante auprès des élites turques, mais a souligné que des événements avaient compliqué nos relations bilatérales avec la Turquie au cours des dernières années.

Il a rappelé que le vote de la loi n° 2001-70 du 29 janvier 2001 relative à la reconnaissance du génocide arménien avait eu des effets non négligeables sur les entreprises françaises en Turquie et sur le développement de nos coopérations, de nombreux projets ayant été interrompus ou bloqués. Il a souligné que les Turcs interprétaient encore ce vote comme un acte inamical à leur égard. Par ailleurs, il a rappelé que les Turcs s'étaient émus des déclarations de M. Valéry Giscard d'Estaing, en novembre 2002, qui exprimait son désaccord quant à la perspective de l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne.

Il a indiqué que, depuis, la question de l'adhésion de la Turquie avait constitué l'un des principaux sujets de débat à l'occasion de la récente campagne pour les élections européennes, la plupart des partis adoptant sur ce point une position plutôt réservée ou franchement défavorable. Il a toutefois considéré que l'impact de ces prises de position partisanes était atténué par la déclaration de M. Jacques Chirac, Président de la République, et le sentiment que ces prises de position étaient liées à la campagne des élections européenne, et non à des positions définitives.

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a rappelé que le premier accord d'association entre la Communauté européenne et la Turquie datait du 12 septembre 1963 et fixait les objectifs fondamentaux de l'association. Il a souligné que la Turquie était devenue officiellement candidate à l'adhésion à la Communauté européenne en 1987, et qu'en décembre 1999, le Conseil européen d'Helsinki avait marqué l'acceptation définitive de la Turquie parmi les pays candidats.

Il a précisé que la prochaine étape, en décembre 2004, était celle où l'Union européenne devrait se prononcer sur l'ouverture des négociations d'adhésion avec la Turquie.

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a alors abordé la question de la présence française en Turquie. Il a rappelé que les crédits affectés à la Turquie figurant au chapitre 42-15 « coopération internationale et développement » s'étaient élevés à environ 6,5 millions d'euros en 2003, soit, hors Afrique, notre troisième poste de coopération dans le monde, juste après la Russie et la Chine. Il a précisé que la Turquie était, toujours hors Afrique, le premier poste s'agissant de la coopération culturelle et du français, avec plus de 3 millions d'euros. S'agissant de la coopération scientifique, universitaire et de recherche, il a indiqué que la coopération avec la Turquie se situait au quatrième rang mondial, après l'Inde, la Russie et la Chine.

Il a considéré que ces chiffres soulignaient l'importance de notre coopération. Il a précisé que ces crédits avaient été relativement épargnés par les mesures de régulation budgétaire, afin de maintenir notre coopération après l'effet négatif du vote de la loi reconnaissant le génocide arménien.

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a souligné que notre coopération était particulièrement importante sur le plan de l'enseignement, tant au niveau secondaire qu'au niveau universitaire.

Au niveau primaire et secondaire, outre les deux lycées publics français, Pierre Loti à Istanbul et Charles de Gaulle à Ankara, il a indiqué que plusieurs institutions importantes dispensaient des cours en français :

- le lycée de Galatasaray (soit environ 1.200 élèves) à Istanbul ;

- les 3 lycées de la fondation Tevfik Fikret (lycées privés turcs francophones), qui accueillaient plus de 2.000 élèves ;

- les 6 lycées de la fédération des écoles catholiques françaises de Turquie et leurs écoles associées, qui accueillaient au total plus de 4.500 élèves.

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a souligné que ces lycées congréganistes faisaient partie des plus réputés de Turquie. Il a précisé que l'on y entrait par concours et que les frais de scolarité (environ 6.000 euros) y étaient élevés, quoique plutôt dans la fourchette basse des lycées d'élite privés en Turquie. Il a indiqué que la France participait au financement de postes de professeurs français.

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a indiqué que ces établissements étaient confrontés à deux types de problèmes :

- d'une part, un problème de recrutement. Il a indiqué que le maintien d'un quota de professeurs français était indispensable pour conserver un bon niveau de français et un lien culturel avec la France. Or, il a souligné que ces établissements avaient de plus en plus de difficultés à recruter des professeurs français, compte tenu de la réticence des rectorats à autoriser des départs ;

- d'autre part, un problème financier. M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a indiqué que la participation de la France avait diminué au cours des dernières années, revenant à plus de 2 millions d'euros pour l'année scolaire 1996-1997 à environ 700.000 euros pour l'année scolaire 2003-2004. Il a considéré que si ce désengagement était nécessaire en raison du poids élevé de la rémunération des personnels dans notre enveloppe de coopération, il convenait d'éviter qu'il soit trop brutal ou important, de manière à permettre à nos partenaires de s'adapter à ces nouvelles conditions.

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a considéré qu'il était nécessaire de trouver les moyens d'une plus grande souplesse d'intervention et de diversifier les coopérations existantes, mais sans pour cela que les projets que la France avait soutenus de longue date ne soient contraints de s'interrompre. Or, il a souligné que plusieurs lycées congréganistes étaient confrontés à une situation financière délicate.

Par ailleurs, il a indiqué que le même problème existait en matière de coopération universitaire : la coopération scientifique, universitaire et de recherche représentait environ 2,5 millions d'euros, soit un peu plus d'un tiers de la programmation du poste. Il a indiqué que plus de 70 % de cette somme étaient consacrés à l'université de Galatasaray, principalement pour le financement de 35 enseignants en 2002-2003. Il a précisé que l'autre principal projet de coopération portait sur le département francophone des sciences politiques et administratives de l'université de Marmara, qui était d'ailleurs installé dans un bâtiment prêté par la France.

Au total, il a constaté que la masse salariale avait consommé jusqu'à 75 % du budget de la coopération universitaire en Turquie en 2001, et a indiqué que la France avait engagé un effort de réduction, avec l'objectif de ramener cette proportion à 60 % en 2005, afin de diversifier la coopération universitaire et d'augmenter les bourses d'études.

S'agissant du financement des postes de professeur dans les lycées et universités turcs, il a présenté le fonctionnement de la Mission de coopération éducative et linguistique (MICEL), établissement original, dépendant du ministère des affaires étrangères, et doté de l'autonomie financière.

Il a précisé que les bénéficiaires de contrats « MICEL » étaient placés sous l'autorité hiérarchique du conseiller de coopération et d'action culturelle en Turquie.

Il a précisé que pour les universités de Galatasaray et de Marmara et pour le lycée de Galatasaray, les enseignants étaient pris en charge intégralement par la MICEL, tandis que pour les lycées turcs dits « bilingues » (établissements congréganistes et fondation Tevfik Fikret) ayant passé une convention avec la MICEL, les enseignants signaient un contrat avec l'établissement et un avec la MICEL, et recevaient donc deux bulletins de salaire. A la rentrée 2003, la MICEL finançait ainsi 126 postes dans les lycées et universités turcs, dont 58 pour le lycée et l'université de Galatasaray.

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a considéré que l'on avait créé une filière d'élite francophone en Turquie, qui était une magnifique réussite, si l'on considérait notamment le prestige de Galatasaray.

Il a toutefois indiqué que de nombreux étudiants francophones préféraient désormais partir dans les pays anglo-saxons plutôt qu'en France, afin de poursuivre leurs études universitaires.

Par ailleurs, il a estimé que la politique d'assistance que la France avait mise en place l'empêchait, compte tenu de la contrainte budgétaire, de diversifier ses actions. Il a indiqué que le dispositif était progressivement allégé, sans que nos partenaires y aient été toujours préparés et a considéré qu'il était nécessaire, dans ces conditions, de maintenir le niveau de notre engagement global en Turquie.

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a ensuite évoqué les multiples questions afférentes au parc immobilier français en Turquie. Il a précisé que, pour de très nombreux terrains et bâtiments, la France ne disposait pas d'un titre de propriété en bonne et due forme, ces derniers ayant souvent été donnés à la France, dans le passé, par le sultan ou par des fondations turques, pour des objets précis. Il a considéré que cette situation suscitait des difficultés, notamment lorsque la France envisageait de vendre une partie des locaux et terrains inutilisés. Il a indiqué qu'il convenait d'ajouter à cette caractéristique le risque sismique élevé dans la région, qui imposait le respect de normes strictes pour les bâtiments accueillant du public, et surtout, l'insuffisance de crédits et l'absence de visibilité en la matière, qui elles, n'étaient pas spécifiques à la Turquie.

Il a d'abord évoqué la construction de deux bâtiments dans l'enceinte de l'ambassade de France à Ankara, l'un pour les services consulaires et l'accueil des demandeurs de visas, l'autre pour le service de coopération et d'action culturelle. Il a précisé que ce dernier était en voie d'achèvement lors de sa mission en Turquie. Il a indiqué que, d'après les informations qu'il avait recueillies, la France avait obtenu un devis intéressant auprès de l'entreprise chargée de la réalisation de ces travaux, en échange de l'engagement de payer comptant les sommes dues. Or, pendant plusieurs mois, le ministère des affaires étrangères n'avait pas été en mesure de payer l'entrepreneur. M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a estimé que cette situation constituait une très mauvaise opération financière, compte tenu du coût des pénalités de retard, largement supérieur au coût de l'emprunt pour l'Etat. Il a précisé que les travaux avaient toutefois été réceptionnés début novembre 2003 et que les entreprises avaient été payées en totalité des travaux réalisés.

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a indiqué que le ministère des affaires étrangères n'avait pas été en mesure de régler l'ensemble des factures correspondant à ses investissements au cours de l'année 2003. En réponse à l'une de ses interrogations, le ministère des affaires étrangères lui avait indiqué, en décembre 2003, que le montant total des factures correspondant à des opérations immobilières qui resteraient impayées à l'issue de l'exercice 2003 était supérieur à 11 millions d'euros.

Concernant l'ambassade de France à Ankara, il a également souligné qu'il y avait constaté des défaillances portant sur la sécurité du site, de même qu'au Palais de France à Istanbul, mais que les travaux nécessaires avaient été engagés depuis sa mission.

S'agissant de l'institut d'études françaises d'Ankara, M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a indiqué que cet institut avait été ouvert en 1962, dans un bâtiment très bien situé, en centre-ville. Il a précisé que ce bâtiment avait été fermé en décembre 1999 à la suite d'une expertise ayant conclu à sa non-conformité aux normes de sécurité, notamment parasismiques.

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a indiqué que l'institut d'études françaises restait en fait discrètement ouvert pour permettre aux personnes qui le souhaitaient de demander des informations ou d'emprunter des ouvrages.

Par ailleurs, il a indiqué que, suite à la fermeture de l'institut, celui-ci avait loué 15 salles de classe dans un lycée anglophone voisin, pour un loyer mensuel d'environ 5.800 dollars, afin de poursuivre l'enseignement du français. Il a noté que cette solution interdisait désormais l'organisation de cours le soir et pendant la période des vacances scolaires, mais que le nombre « d'apprenants » restait toutefois en progression.

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a constaté qu'après cinq années, le bâtiment de l'institut français d'Ankara s'était dégradé, et que le coût des réparations ne ferait que s'accroître avec le temps, auquel il convenait d'ailleurs d'ajouter le coût de la location des salles de cours. Il a insisté sur la mauvaise impression que faisait notre pays en laissant une telle situation perdurer et notre centre culturel « tomber en ruine » dans l'une des plus importantes artères d'Ankara.

Il a donc estimé qu'il convenait de prendre rapidement une décision au sujet de ce centre :

- soit vendre cette implantation, mais qu'une telle décision ne manquerait pas d'être interprétée comme une volonté de renonciation et d'abandon de la présence de la France, voire comme un geste inamical vis-à-vis des autorités turques ;

- soit d'engager rapidement les travaux de rénovation nécessaires à sa mise aux normes, ainsi qu'à la restauration de sa façade.

Il a indiqué que les études se multipliaient, mais que l'on ne disposait d'aucune visibilité quant à la sortie de cette situation provisoire, coûteuse et totalement insatisfaisante.

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a ensuite évoqué la situation de nos implantations à Izmir. Il a précisé que la France disposait d'un centre culturel et d'un magnifique bâtiment sur la promenade longeant la baie d'Izmir, qui était notre consulat jusqu'en 1990, et accueillait aujourd'hui une petite antenne du consulat et de la mission économique. Il a précisé que ce bâtiment de marbre massif, du début du siècle, classé monument historique, avait été abîmé par un attentat en 1990. Il a ajouté que les questions relatives à la propriété des deux terrains que la France occupait étaient complexes. En tout état de cause, il a considéré que l'installation du centre culturel français dans le bâtiment de notre ancien consulat permettrait d'offrir une magnifique « vitrine » de la France à Izmir, alors que notre image était aujourd'hui ternie par l'utilisation très partielle et l'entretien limité de ce bâtiment. M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a donc estimé qu'il était nécessaire de trouver rapidement une solution, considérant que la France faisait mauvaise impression en laissant à l'abandon un tel bâtiment et était à la merci d'un éventuel arrêté d'insalubrité ou d'une mesure de préemption par la mairie d'Izmir.

A Istanbul, M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a indiqué que des travaux avaient été réalisés au Consulat pour l'accueil des demandeurs de visas, mais que l'état du bâtiment restait toutefois assez dégradé, de nombreux murs ayant des fissures apparentes au sein même des services consulaires.

S'agissant des lycées français, M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a indiqué que plusieurs projets immobiliers étaient prévus pour les deux lycées français de Turquie : le lycée Charles de Gaulle à Ankara et le lycée Pierre Loti à Istanbul. Pour ce dernier, dont une partie seulement était ouverte après avoir été mise aux normes de sécurité, il a noté qu'une solution provisoire satisfaisante avait été trouvée grâce à l'implantation de bâtiments préfabriqués d'excellente qualité dans la banlieue d'Istanbul, sur le terrain de Tarabya, propriété de la France. Toutefois, il a précisé que cette installation n'était que tolérée. Il a estimé qu'il convenait donc de décider rapidement, soit d'engager les travaux de mise aux normes sismiques de la seconde tranche du lycée Pierre Loti dans le quartier de Beyoglu, soit d'envisager le maintien, voire le développement de la structure existante à Tarabya, dans des conditions à définir avec les autorités turques.

A Ankara, pour la construction d'un nouveau lycée Charles de Gaulle, M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a indiqué qu'un concours d'architecture avait été organisé en 2002 et qu'un lauréat avait été désigné en avril 2003. En raison de la superficie insuffisante du terrain, qui contraignait à construire un lycée sur six étages pour accueillir les 1.200 élèves inscrits, il a noté que l'opération avait été suspendue et que, d'après les informations qu'il avait recueillies, l'ambassade de France serait aujourd'hui à la recherche d'un nouveau terrain dans la banlieue d'Ankara et revendrait le terrain actuel.

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a considéré qu'il convenait de tenir compte de la situation particulière de nos implantations en Turquie, mais que la principale difficulté en matière immobilière était la contrainte financière.

Il a indiqué qu'en réponse au questionnaire budgétaire sur le projet de loi de finances pour 2004, le ministère des affaires étrangères avait indiqué que « les restrictions budgétaires apportées par les réserves d'innovation et les annulations des autorisations de programme (AP) et des crédits de paiement (CP) en 2003, rendent la lisibilité des opérations immobilières incertaine. Dans ce contexte, certaines opérations n'ont pu être lancées ou poursuivies, faute de ressources suffisantes ». Il a considéré que cet argument pouvait expliquer, en partie, les difficultés de gestion pour l'année 2003, mais ne pouvait éluder les problèmes structurels de financement des investissements par le ministère des affaires étrangères.

Il a en effet constaté que le coût prévisionnel total des travaux pour les implantations françaises en Turquie était supérieur à 25 millions d'euros, soit près des deux tiers de la dotation annuelle du titre V du budget des affaires étrangères. Il a déploré un décalage considérable et croissant entre les projets et besoins immobiliers du ministère des affaires étrangères et les dotations en loi de finances, qui avaient constamment diminué au cours des dernières années. Il a considéré qu'il était indispensable de trouver une solution à ces impasses, qui mobilisaient un temps considérable sur place et créaient souvent des situations difficiles, tant vis-à-vis des communautés françaises à l'étranger que des autorités locales.

M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a estimé que la mise en oeuvre de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) pourrait aider à résoudre une partie des difficultés actuelles en matière de politique immobilière, en autorisant davantage de souplesse et de réactivité. Il a constaté que la France disposait du deuxième réseau diplomatique dans le monde, mais qu'elle n'avait plus les moyens de l'entretenir. Il a estimé qu'il était nécessaire de vendre les terrains et bâtiments inadaptés ou inutiles et de fermer les consulats dans l'Union européenne, afin de retrouver des marges de manoeuvre financières. Enfin, il s'est interrogé sur le fait de savoir s'il était opportun que la France continue de construire de luxueuses ambassades nouvelles à l'étranger dans un tel contexte et s'il ne paraît pas plus raisonnable de construire des ambassades fonctionnelles.

M. Jean Arthuis, président, s'est en effet interrogé sur le crédit dont pouvait disposer la France auprès de la Turquie, compte tenu de la misère qu'elle avait tendance à afficher, et, au vu des observations présentées par M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, a proposé « d'aller plus loin » sur ces questions immobilières et d'interroger, sur ce point, en commission, des représentants du ministère des affaires étrangères.

M. Aymeri de Montesquiou a souligné l'importance de la mise en oeuvre de la LOLF pour aider à la résolution de ces problèmes.

M. Yann Gaillard a confirmé qu'il s'agissait là d'un problème crucial, auquel il convenait de trouver une solution satisfaisante.

Après qu'il a été donné acte à M. Jacques Chaumont, rapporteur spécial, de sa communication, M. Jean Arthuis, président, a alors proposé à la commission d'entendre le mercredi 30 juin après-midi M. Hubert Colin de Verdière, secrétaire général du Quai d'Orsay, au sujet de la politique immobilière du Quai d'Orsay, afin de lui permettre de répondre aux interrogations soulevées lors de la communication du rapporteur spécial, et de compléter ainsi, de façon « interactive », son travail de contrôle budgétaire.

Mercredi 23 juin 2004

- Présidence de M. Jean Arthuis, président.

Contrôle budgétaire - Caisse des dépôts et consignations - Audition de M. Philippe Auberger, président de la commission de surveillance et de M. Francis Mayer, directeur général

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Philippe Auberger, président de la commission de surveillance, et de M. Francis Mayer, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations.

A titre liminaire, M. Jean Arthuis, président, a remercié M. Philippe Auberger, président de la commission de surveillance, et M. Francis Mayer, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), de se prêter cette année, comme l'année précédente, à une audition conjointe, devenue maintenant traditionnelle, à l'occasion de la parution du rapport annuel de la CDC. Il s'est félicité, par ailleurs, des relations privilégiées existant entre la CDC et le Parlement.

M. Philippe Auberger a présenté le rapport annuel de la commission de surveillance de la CDC. Constatant que les résultats de la CDC étaient nettement meilleurs en 2003 qu'en 2002 malgré une conjoncture économique difficile, il a expliqué que cette évolution était due au redressement du marché financier et à l'abondance de l'épargne.

Indiquant que le résultat des fonds d'épargne avait plus que doublé en 2003, M. Philippe Auberger a ajouté que cette performance avait permis à l'Etat de prélever un montant de 932 millions d'euros au titre de la rémunération de sa garantie sur les fonds d'épargne. Il a précisé qu'un prélèvement complémentaire serait réalisé à l'automne.

S'agissant du résultat de l'établissement public, M. Philippe Auberger a observé que celui-ci avait plus que triplé, passant de 227 millions d'euros à 759 millions d'euros, tandis que le résultat des filiales atteignait 822 millions d'euros, permettant au total le versement d'un dividende à l'Etat d'un montant de 527 millions d'euros. Il a ajouté que ce dividende serait complété, avant la fin de l'année, par le montant de la plus-value de la vente de CDC-Ixis qui devait être réalisée dans le cadre de l'opération de refondation du partenariat avec les Caisses d'épargne. Il a précisé que ce dividende complémentaire serait d'un montant d'environ 550 millions d'euros.

En définitive, M. Philippe Auberger a déclaré que la contribution de la CDC au budget de l'Etat pour 2004 se situerait entre 2,5 et 3 milliards d'euros.

M. Philippe Auberger a dressé, ensuite, un bilan des travaux de la commission de surveillance au cours de l'année écoulée. S'agissant des fonds d'épargne, il a indiqué que l'année avait été marquée par la mise en oeuvre du rapport Noyer-Nasse. Il a rappelé que, suite à ce rapport, le taux du Livret A avait été ramené de 3 % à 2,25 % et qu'une règle d'indexation automatique sur l'inflation et sur l'Euribor avait été mise en place. Il a précisé, en outre, qu'en application de cette nouvelle règle d'indexation, aucune modification du taux du Livret A n'était à prévoir au 1er août 2004. Il a ajouté, qu'en conséquence de l'évolution de la rémunération de l'épargne, les taux des prêts au logement avaient pu être révisés à la baisse et que des mesures nouvelles pourraient être mises en oeuvre. Il a rappelé que la CDC participerait à l'effort déployé dans le cadre de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) et que, par ailleurs, une enveloppe de prêts aux infrastructures de 4 milliards d'euros avait été instituée.

Ensuite, M. Philippe Auberger a évoqué la question du niveau des fonds propres des fonds d'épargne, qui devrait être ajusté dans la perspective de l'application de l'accord de « Bâle II ». Il a par ailleurs souhaité que le niveau des commissions aux réseaux de distribution diminue très bientôt, conformément à la recommandation émise par le Comité des fonds d'épargne.

Puis M. Philippe Auberger a détaillé l'accord de partenariat avec la Caisse nationale des caisses d'épargne (CNCE), dont la CDC serait désormais actionnaire à 35 %. Il a rappelé que les conditions de ce partenariat permettraient à la CDC d'accéder aux résultats des caisses régionales qui devaient émettre des certificats coopératifs d'investissement à hauteur de 20 % de leur capital. Il a rappelé que la discussion de la loi de finances initiale pour 2004 avait été l'occasion d'adopter les dispositions législatives nécessaires à la mise en place des certificats coopératifs d'investissement d'une part, et aux garanties accordées au personnel d'autre part.

En dernier lieu, M. Philippe Auberger a esquissé les contours du nouveau groupe CDC, indiquant que trois opérations majeures avaient été menées en 2003 : la vente d'EGIS PORTS et de MEDICA FRANCE, ainsi que le changement de majorité au sein de la Compagnie des Alpes. Il a indiqué qu'à l'avenir des évolutions étaient prévisibles concernant EGIS, VVF Vacances et le partenariat entre TRANSDEV et la RATP. Il s'est félicité de la nouvelle politique de la CDC en matière de gouvernance, indiquant qu'un comité de gouvernance, présidé par M. René Barbier de la Serre, avait été mis en place pour assurer le suivi des participations de la CDC.

Pour conclure, M. Philippe Auberger a observé que la présence d'un actionnaire stable, tel que la Caisse des dépôts et consignations, était un élément indispensable, tant pour assurer le financement des entreprises que pour garantir une gestion de l'épargne dans l'intérêt général, au-delà des préoccupations de rentabilité immédiate.

Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Francis Mayer a ensuite présenté les résultats du groupe en 2003, ainsi que les orientations stratégiques pour 2004.

Il a indiqué que l'objectif d'avoir un retour sur capitaux propres de plus de 10 % avait été tenu, puisque ce retour s'élevait à 12,8 % en 2003. Il a estimé, par conséquent, que l'année 2003 avait été une excellente année pour la CDC. Il a ajouté que l'année passée avait également été l'occasion de clarifier la stratégie de la CDC au service du pays, en opérant des mouvements, tant dans le domaine des missions d'intérêt général que dans celui des filiales et participations stratégiques.

M. Francis Mayer a ensuite présenté l'évolution du résultat net consolidé de la CDC, qui a augmenté de 123 % par rapport à 2002 et de 25 % hors éléments exceptionnels. Il a précisé la contribution de chaque filiale au résultat net du groupe, indiquant que l'ensemble des filiales représentait 52 % du résultat en 2003, contre 68 % en 2002. Il a ensuite apporté des précisions sur l'affectation du résultat, indiquant qu'un tiers de celui-ci était reversé sous forme de dividende au budget de l'Etat. S'agissant du bon résultat des fonds d'épargne (1,13 milliard d'euros), il a indiqué que cette évolution était la conséquence de la baisse des taux de rémunération adoptée l'année dernière.

M. Francis Mayer a exposé les orientations stratégiques de la CDC, indiquant que la gestion du long terme était la « raison d'être » de la Caisse, tant dans sa gestion de l'épargne que dans sa fonction de financement au service du logement social, des collectivités territoriales et des entreprises. A propos du développement des missions d'intérêt général, il a précisé que la CDC allait gérer le nouveau régime additionnel de retraite assis sur les primes des fonctionnaires et a évoqué le rôle que la CDC jouerait dans le financement des infrastructures de transport et dans la rénovation urbaine. Il a également évoqué le rachat de la Société nationale immobilière (SNI) à l'Etat, pour un montant de 518 millions d'euros, regrettant, à ce sujet, que l'externalisation de la gestion du patrimoine immobilier de l'Etat ne soit pas plus rapidement mise en oeuvre.

Enfin, M. Francis Mayer a présenté les nouvelles orientations de la Caisse des dépôts et consignations en matière de gouvernance, indiquant que de nouvelles mesures avaient été prises, tant au sein de la commission de surveillance de la CDC, où des comités spécialisés avaient été créés, qu'au sein du conseil de surveillance de la CNCE qui s'était ouvert à des administrateurs extérieurs et où les comités spécialisés avaient été renforcés. Il a considéré que la création de CDC Entreprises témoignait de ce mouvement vers plus de transparence, de même que la réforme de la gouvernance de la SNI. Enfin, il a rappelé la mise en place du nouveau comité consultatif sur la gouvernance des grandes participations dans les sociétés cotées.

Un large débat s'est ensuite instauré.

Etant donné le rôle joué par la CDC dans le financement de la trésorerie de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), M. Jean Arthuis, président, s'est demandé quelles étaient les recommandations de la CDC en matière de financement de la sécurité sociale.

M. Adrien Gouteyron a ajouté que la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES) devait reprendre à l'avenir la dette de la sécurité sociale. Il s'est interrogé sur le rôle que jouerait la CDC dans ces évolutions.

M. Philippe Auberger a rappelé que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 avait porté à 33 milliards d'euros le montant des avances à court terme susceptibles d'être accordées à l'ACOSS. Il a précisé que cette situation devrait être prochainement réexaminée lors du débat sur le projet de loi réformant l'assurance maladie. Il a ajouté que la CDC n'avait pas vocation à se prononcer sur l'opportunité d'une reprise de la dette par la CADES.

M. Paul Girod, après avoir rappelé que 2 milliards d'euros devaient être affectés à la réhabilitation des HLM, s'est demandé dans quels délais ces fonds seraient débloqués et combien ils représenteraient par rapport à l'effort national en faveur de la réhabilitation des logements sociaux.

En réponse, M. Francis Mayer a indiqué que 80.000 logements sociaux étaient réhabilités par an et que l'effort de la CDC permettrait de passer à 100.000, pour un montant de 400 millions d'euros par an sur cinq ans. Il a précisé que cette somme devait être distinguée des 130 millions d'euros qui seraient alloués à la rénovation urbaine par l'intermédiaire de l'ANRU sur cinq ans (études et conduite de projets). Rappelant que l'ANRU était maintenant en place, il a souhaité que son intervention ne ralentisse pas la réalisation des opérations. Il a précisé que la CDC participait au comité d'engagement de l'ANRU et qu'elle lui verserait une subvention directe d'un montant de 20 millions d'euros sur cinq ans.

M. Paul Girod s'est ensuite interrogé sur la diminution des encours des prêts d'épargne-logement.

M. Francis Mayer a répondu que cette évolution concernait les plans d'épargne-logement de la Poste. M. André-Laurent Michelson, directeur des Fonds d'épargne, a ajouté que cette évolution résultait des taux pratiqués sur le marché, qui pouvaient inciter les épargnants à ne pas utiliser les droits à prêt à taux plus élevé conférés par le plan d'épargne-logement.

M. François Trucy a ensuite évoqué le rachat de la SNI par la CDC et s'est interrogé sur le rôle que la Caisse des dépôts et consignations souhaitait jouer en matière d'externalisation de la gestion du patrimoine immobilier de l'Etat.

En réponse, M. Francis Mayer a rappelé que la CDC avait racheté 74 % de la SNI pour un montant de 518 millions d'euros, estimant qu'il s'agissait là d'un bon investissement, en synergie avec les autres métiers de la Caisse. Il a ajouté que celle-ci lui paraissait bien placée pour gérer un patrimoine immobilier que l'Etat avait parfois négligé. S'agissant de l'externalisation de la gestion des logements des gendarmes, il a observé que le choix d'une procédure d'appel d'offres international retarderait considérablement l'opération. Il a ajouté qu'une expertise juridique qu'il avait diligentée auprès d'un professeur de droit tendait à démontrer que le recours à l'appel d'offres n'était pas nécessaire.

M. Philippe Auberger a ajouté qu'il fallait distinguer le produit de la vente de la SNI, qui serait inscrit au sein d'un compte d'affectation spéciale, et le produit de la redevance qui pourrait être perçu en contrepartie de l'opération d'externalisation des logements des gendarmes. Il a précisé qu'un obstacle juridique demeurait toutefois au versement de cette redevance, à l'avance, et en une seule fois, obstacle qu'une proposition de loi récemment déposée par M. Philippe Marini tendait à lever.

M. Jean Arthuis, président, s'est demandé si l'opération d'externalisation dont il était question ne constituait pas une forme de « déconsolidation » de la dette, définie au sens du traité de Maastricht.

M. Francis Mayer lui a répondu que cette opération relevait en premier lieu de la réforme de l'Etat et qu'il s'agissait de mettre en place une saine gestion administrative. Il a ajouté que la CDC s'était engagée à affecter les deux tiers des loyers qui seraient perçus à des opérations de rénovation et de réhabilitation des logements des gendarmes.

M. Adrien Gouteyron a demandé quelles étaient les relations entre la CDC et le Fonds de réserve des retraites (FRR).

En réponse, M. Francis Mayer s'est félicité de ce que les partenaires sociaux aient décidé d'investir 55 % de ce fonds en actions, mais il a regretté une certaine complexité administrative et juridique, faisant obstacle à une bonne gouvernance du FRR.

M. Philippe Auberger a précisé que le FRR était géré de façon totalement autonome, puisqu'il disposait de son propre conseil de surveillance et de son propre directoire.

M. Jean Arthuis, président, a considéré que, d'un point de vue budgétaire, l'existence de ce fonds de réserve était quelque peu paradoxale étant donné le poids de la dette publique, estimé à près de 1.000 milliards d'euros.

M. Jacques Oudin s'est interrogé sur le développement des prêts aux infrastructures de transport et sur la gestion de la future agence de financement des infrastructures de transport (AFIT).

M. Francis Mayer a estimé que la gestion de l'AFIT reviendrait probablement à la Caisse des dépôts et consignations. Il a souhaité que la mise en place de cet organisme soit l'occasion de simplifier le schéma actuel de financement des infrastructures de transport, dans la mesure où la CDC gérait déjà la Caisse nationale des Autoroutes (CNA) et Autoroutes de France (ADF).

Il a par ailleurs estimé que l'enveloppe de 4 milliards d'euros évoquée précédemment ne serait peut-être pas à la hauteur des enjeux définis par le comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire (CIADT) du 18 décembre 2003.

M. François Marc a souhaité obtenir des précisions quant aux performances de la CDC au regard de celles du secteur bancaire en général. Il s'est demandé par ailleurs comment la Caisse appréciait le souhait du gouvernement de favoriser la consommation au détriment de l'épargne et comment elle anticipait les conséquences de la décentralisation.

M. Francis Mayer a observé que les performances de la CDC étaient conformes à celles du secteur bancaire, mais il a fait remarquer que la Caisse dépendait, beaucoup plus que les autres grands établissements financiers, de l'évolution des marchés d'actions. A propos de la décentralisation, il a indiqué que des évolutions étaient déjà engagées en ce qui concernait le financement du logement social, puisque celui-ci serait, à l'avenir, décentralisé et globalisé grâce à la conclusion de conventions pluriannuelles avec chaque opérateur.

M. Maurice Blin a demandé des précisions au sujet des performances de la filiale Caisse des dépôts développement (C3D).

M. Francis Mayer lui a indiqué que le résultat du pôle C3D avait diminué de 16 % en 2003 et que les performances de ce pôle étaient contrastées. Il a ajouté que C3D avait accompli son rôle historique consistant à redresser ses filiales et que l'évolution du périmètre de C3D, engagée au cours de l'année écoulée, serait poursuivie.

M. Maurice Blin a ensuite demandé des précisions sur les performances de CNP Assurances.

M. Francis Mayer lui a indiqué que le résultat du pôle CNP avait crû de 4 % en 2003, mais que cette filiale était maintenant confrontée au défi de se maintenir comme n° 1 de l'assurance-vie, face à une concurrence accrue.

En conclusion, M. Jean Arthuis, président, s'est félicité de l'impulsion forte donnée par la Caisse à l'économie française. Il a souhaité que les nouvelles orientations de la CDC en matière de gouvernance permettent de prohiber l'acquisition d'actions de sociétés exerçant une partie de leur activité off-shore.

Contrôle budgétaire - Conseil supérieur de l'audiovisuel - Communication

La commission a ensuite entendu une communication de M. François Marc, rapporteur spécial, sur le Conseil supérieur de l'audiovisuel.

M. François Marc, rapporteur spécial, a tout d'abord signalé que le choix d'opérer un contrôle budgétaire du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA), en application de l'article 57 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), l'avait conduit à s'intéresser à une autorité administrative indépendante (AAI) aux moyens relativement modiques : les dotations du CSA s'élevaient à 32,7 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2004 ; le CSA employait 270 agents contractuels ou titulaires. Il a toutefois relevé que le CSA jouait un rôle essentiel, fortement débattu, pour la régulation de l'audiovisuel public. Il a remercié M. Claude Belot, rapporteur spécial des crédits de la communication audiovisuelle, qui lui avait permis de partager son expérience. Il a précisé, en effet, que le CSA, tout en relevant du champ des médias, était financé par le budget des services généraux du Premier ministre, dont il était le rapporteur spécial au sein de la commission des finances.

Il a rapidement rappelé l'histoire du CSA, relevant qu'avant 1982 un monopole public s'exerçait sur les chaînes de radio et de télévision, auquel la création de la Haute autorité de la communication audiovisuelle, ancêtre du Conseil supérieur de l'audiovisuel, avait mis fin, dans un contexte de reconnaissance des radios libres, puis d'essor des premières chaînes de télévision privée. Il s'est félicité de ce que le CSA, successeur de la Commission nationale de la communication nationale et des libertés, ait su s'affirmer comme un régulateur indépendant aux missions multiples et variées : délivrer les autorisations hertziennes ; conventionner les chaînes du câble et du satellite ; s'assurer du respect de leurs obligations par ces chaînes ; autoriser l'exploitation des réseaux câblés ; nommer les dirigeants des sociétés de l'audiovisuel public. Il a souligné que ces missions incombaient aux neuf membres du CSA, nommés pour six ans, selon des règles inspirées de celles qui présidaient à la désignation des membres du Conseil constitutionnel : ces neuf membres étaient renouvelés par tiers tous les deux ans, dont trois étaient désignés par le Président de la République, trois par le président de l'Assemblée nationale et trois par le président du Sénat.

M. François Marc, rapporteur spécial, a estimé que le débat sur les missions, la composition et le statut du CSA, ne pouvait être ignoré de la commission, car il alimentait utilement la réflexion sur sa situation budgétaire. Il a observé que les actes de gestion du CSA, autorité administrative indépendante, n'étaient pas soumis au visa d'un contrôleur financier, et que le CSA jouissait en pratique de réelles marges de manoeuvre dans sa gestion courante. Il a exposé les bonnes pratiques entre le CSA et la direction du budget : en contrepartie d'un effort de transparence dans la gestion du CSA, la direction du budget avait régulièrement accepté des reports de crédits relativement élevés, qui ne faisaient pas l'objet de mesures de régulation en cours d'exécution budgétaire. Il a souligné qu'en 2003 ces reports avaient représenté un cinquième des dotations du CSA inscrites en loi de finances initiale pour 2002, du fait de retards pris dans la mise en oeuvre de la télévision numérique terrestre (TNT). Dans ces circonstances, il a jugé que les reports de crédits représentaient un mode de gestion particulièrement nécessaire.

M. François Marc, rapporteur spécial, a ensuite présenté les missions du CSA. Il a montré que celles-ci n'avaient cessé de se développer depuis quinze ans, tant à l'initiative du législateur, de plus en plus exigeant sur le contrôle des programmes, qu'en raison de l'essor du nombre de chaînes et de méthodes de contrôle « cousu main ». Il a ainsi observé que peu d'autorités étrangères comparables au CSA mesuraient, à la seconde près, les interventions des hommes politiques sur les chaînes hertziennes. Il a souligné que le CSA disposait de moyens globalement stables, malgré l'accroissement de ses missions : le budget du CSA en loi de finances initiale pour 2004 s'élevait à 32,7 millions d'euros, contre 31,1 millions d'euros en loi de finances initiale pour 1998, soit une progression de 5,1 % en six ans. Il a relevé que le CSA était donc tenu de procéder à des arbitrages en cas de surcroît d'activité. Prenant l'exemple de la TNT, il a indiqué que la phase d'instruction avait mobilisé un quart des services du CSA pendant neuf mois, et que le CSA avait alors dû procéder à une redéfinition de ses priorités, vraisemblablement au détriment d'un contrôle plus exhaustif des programmes.

M. François Marc, rapporteur spécial, a signalé qu'eu égard aux préoccupations habituellement mises en avant par la commission, il lui semblait nécessaire de poser, pour l'avenir, le principe d'une étude d'impact sur les moyens du CSA en cas d'extension de ses missions par le législateur.

Il a rappelé, par ailleurs, qu'il était essentiel que le CSA organisât sa gestion à partir d'une comptabilité analytique, définie sur la base des objectifs et des indicateurs de performance prévus par la LOLF. Il a observé qu'une autre autorité administrative indépendante, la Commission nationale de l'informatique et des libertés, avait déjà mis en place une comptabilité analytique comme outil interne de pilotage de son activité.

Il a ajouté, à cet égard, qu'il pouvait apparaître surprenant que le CSA, malgré une charge d'activité croissante, mesurée par la hausse du nombre d'autorisations délivrées par le CSA (de 770 en moyenne annuelle entre 1998 et 2000 à 920 en moyenne annuelle en 2001 et 2002), n'ait pas jugé prioritaire la mise en place d'instruments qui auraient démontré sa capacité d'adaptation à l'exercice de nouvelles missions. Il a mentionné des obstacles d'ordre culturel pour l'expliquer : la logique de productivité était peu explicitée dans les modes d'organisation du CSA, alors même que d'importants gains de productivité avaient été obtenus pour faire face, notamment, à l'accroissement du nombre de chaînes.

M. François Marc, rapporteur spécial, a souligné qu'une comptabilité analytique améliorerait significativement l'information du Parlement dans ses choix budgétaires. Il a rappelé que le législateur avait défini les missions du CSA et qu'il conviendrait qu'il dispose d'une information sur les conditions dans lesquelles ces missions étaient exercées, ainsi que sur les résultats quantitatifs et qualitatifs atteints. Sur cette base, le législateur pourrait décider, le cas échéant, des missions qui devraient être renforcées et adapter, en conséquence, les moyens mis à la disposition du régulateur.

Il a montré que la LOLF devait également permettre de renforcer la liberté de gestion du président du CSA, en regroupant en une seule enveloppe des crédits aujourd'hui éclatés entre quatre chapitres budgétaires. Il a déploré que cette dispersion des moyens ne soit pas propice à résoudre les questions de personnel auxquelles était confronté le CSA.

Il a relevé que la vacance d'une dizaine de postes, sur 270 emplois budgétaires, constituait un problème récurrent pour le CSA. Il a souhaité que ces vacances soient progressivement comblées pour répondre aux besoins nouveaux en personnels liés à une activité croissante.

M. François Marc, rapporteur spécial, a ajouté que d'autres difficultés provenaient de la décision d'intégrer au CSA 46 personnels techniques de Télédiffusion de France (TDF), jusqu'alors mis à sa disposition. Il s'est félicité que la fin de cette mise à disposition renforce l'indépendance du CSA dans le domaine technique. Il a toutefois montré que des difficultés pratiques se posaient : la perte par les personnels concernés de certains avantages hors masse salariale - en matière de protection sociale mutualiste et d'épargne salariale - devait être prise en compte dans le calcul de la prime de départ versée par TDF. Il a observé qu'un changement de statut trop défavorable pourrait conduire les personnels mis à disposition par TDF à opter pour le maintien dans leur entreprise d'origine, comme la possibilité leur en était offerte. Le CSA devrait alors procéder à des embauches et à des opérations de formation, susceptibles de retarder le démarrage de la TNT.

En conclusion, il a mis en exergue que le recours à une comptabilité analytique rigoureuse devrait constituer un chantier prioritaire à court terme pour le CSA, dont il avait apprécié le souci d'une gestion transparente, ainsi que la bonne volonté et la coopération manifestée par le Président Dominique Baudis, ainsi que son état-major lors de ce contrôle budgétaire. Il lui avait ainsi été donné de participer à une séance plénière, y compris au huis clos, ce qui lui avait permis de prendre la mesure du volume et de la qualité du travail accompli. Il a noté que cela démontrait l'importance et la portée des opérations de contrôle, ainsi que l'étendue des pouvoirs qui étaient ceux des rapporteurs spéciaux, tels que les définissait l'article 57 de la LOLF.

Tout en se félicitant que le CSA ait su s'adapter à des enjeux nouveaux et à des missions élargies, il a souligné qu'il importait de définir les objectifs et des indicateurs de performance prévus par la LOLF, afin d'apporter l'information nécessaire au contrôle budgétaire du Parlement. Il a estimé qu'ainsi le CSA pourrait renforcer sa vocation de régulateur de la communication audiovisuelle, dans un contexte marqué par des exigences nouvelles de coopération européenne et internationale.

M. Jean Arthuis, président, a déclaré qu'il serait particulièrement attentif à l'impact budgétaire des nouvelles missions du CSA, afin que la qualité de ses diligences sur son corps de métier ne soit pas altérée. Après avoir félicité le rapporteur spécial pour la qualité de son travail, il s'est plu à relever que le contrôle du CSA illustrait pleinement la portée des missions de contrôle sur pièces et sur place que la commission pouvait engager en application des dispositions précitées de la LOLF.

Un large débat s'est alors instauré.

M. Adrien Gouteyron s'est interrogé sur les raisons rencontrées par le CSA pour pourvoir à certains postes. Par ailleurs, il s'est demandé comment s'opérait le contrôle des programmes concernant la part de productions d'origine française. Enfin, il a souhaité savoir quels pouvaient être les chevauchements éventuels de compétences entre le CSA et l'Autorité de régulation des télécommunications (ART).

M. François Marc, rapporteur spécial, a répondu que la stabilité des moyens du CSA le conduisait à ne pas pourvoir à certains postes vacants, afin de pouvoir préserver le niveau de qualité de son recrutement. S'agissant de la répartition des compétences entre le CSA et l'ART, il a observé que la fusion éventuelle des deux autorités n'était pas souhaitée par le CSA, même si cette option avait été retenue dans d'autres pays européens : le champ de compétence de l'ART s'avérait, en effet, très technique, alors que la régulation du CSA présentait, elle, un caractère davantage qualitatif et plus politique. Enfin, il a observé avoir pu contrôler, sur place, que le CSA procédait à une « vérification scrupuleuse » des productions d'origine française, tout en reconnaissant que les frontières géopolitiques ne constituaient plus toujours des limites pour définir les zones de diffusion des programmes des chaînes étrangères du câble et du satellite.

M. Maurice Blin s'est interrogé sur la nécessité de renforcer les moyens du CSA pour maintenir la qualité de ses contrôles.

M. François Marc, rapporteur spécial, a souligné que l'absence d'objectifs et d'indicateurs de performance avait constitué pour lui une source permanente d'interrogations et que, dès lors, il avait dû s'en tenir aux appréciations de ses interlocuteurs du CSA quant au travail qualitatif effectué.

A titre l'illustration, il a relevé que l'instruction des dossiers de demande dans le cadre de la TNT avait mobilisé 60 collaborateurs du CSA pendant deux mois ; or, le CSA avait déclaré pouvoir continuer d'exercer l'ensemble de ses missions « dans de bonnes conditions ».

Il a également souligné qu'il lui avait toutefois été rapporté, lors des entretiens auxquels il avait procédé, les difficultés à définir précisément le volume des programmes destinés à la jeunesse. Il en concluait que l'accroissement des missions du CSA conduisait, à moyens constants, à opérer des arbitrages et ne rendait que plus impérieuse la définition d'indicateurs de performance.

M. Maurice Blin a souhaité savoir si les personnels du CSA disposaient des qualifications professionnelles exigées pour accomplir des missions spécialisées.

M. François Marc, rapporteur spécial, a observé que les tâches accomplies par les personnels mis à disposition par TDF requéraient une grande technicité, ce qui témoignait de la nécessité de leur proposer des conditions attractives d'intégration au CSA.

Suite à la séance plénière à laquelle il avait pu participer, il s'est félicité des grandes compétences techniques des conseillers du CSA, aptes à rapporter eux-mêmes l'ensemble des dossiers sans l'appui des services techniques. A cet égard, il a souligné qu'il avait ainsi pu constater que leurs opinions politiques ne transparaissaient nullement dans leur approche du dossier.

M. Jean Arthuis, président, s'est interrogé, d'une part, sur la cohérence des mesures prises par le CSA pour se doter d'un système informatique approprié et, d'autre part, sur les possibilités d'externalisation de certaines tâches de gestion.

M. François Marc, rapporteur spécial, a effectivement déploré que les dépenses informatiques constituent une variable d'ajustement budgétaire, bien que leur poids fût inférieur à 2 % de l'ensemble des crédits du CSA. Il a ajouté que le CSA n'employait que sept informaticiens.

S'agissant de l'externalisation de certaines tâches, il a évoqué les réticences culturelles des agents du CSA, conscients de la particularité de leur mission, à s'engager en ce sens. Il a toutefois ajouté que le CSA procédait assez largement à la sous-traitance de certaines de ses fonctions supports. Il a ainsi, en particulier, cité un partenariat avec l'Institut national de l'audiovisuel (INA) pour l'enregistrement des programmes, qui avait valeur d'exemple, car il s'était traduit par une coopération fructueuse entre deux institutions publiques. Il a signalé que, de fait, l'externalisation concernait principalement les contrôles purement techniques relevant de tâches mécaniques, alors qu'une telle évolution était plus difficilement envisageable quand les missions du CSA comportaient une part d'appréciation qualitative.

La commission a alors donné acte de sa communication, à l'unanimité, à M. François Marc, rapporteur spécial, et décidé que les conclusions de sa mission feraient l'objet d'une publication sous la forme d'un rapport d'information.

Contrôle budgétaire - SNCF - Communication

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a entendu une communication de M. Jacques Oudin, rapporteur spécial des crédits des transports terrestres et de l'intermodalité, sur les comptes de la SNCF.

M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a indiqué, tout d'abord, que sa communication concernerait autant les comptes de la SNCF que les modalités de contrôle, par la commission des finances du Sénat, de cette société avec laquelle les relations avaient parfois été difficiles.

Il a évalué la contribution des collectivités publiques au système ferroviaire à environ 8 milliards d'euros en 2003, rappelant que, par ailleurs, dans le cadre du plan de redressement du fret ferroviaire, l'Etat avait promis à la SNCF un apport en capital de 800 millions d'euros, dont 250 millions d'euros pourraient être versés dès cette année.

Il a rappelé que la Cour des comptes avait dressé, dans son rapport public annuel pour 2003, un bilan de la loi du 13 février 1997 réformant le système ferroviaire. Il a précisé que cette réforme n'avait, selon la Cour des comptes, que partiellement atteint son but, puisqu'elle n'avait pas permis de diminuer le montant des concours publics à la SNCF.

M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a ensuite estimé que cette situation devait être analysée au regard du déséquilibre des comptes présentés par la SNCF. Il a précisé qu'en 2003, si le résultat net part du groupe était positif, à hauteur de 11 millions d'euros, ce bénéfice était la conséquence d'un résultat exceptionnel découlant des plus-values sur cessions d'actifs enregistrées par la société après, notamment, la vente de sa participation minoritaire dans la Compagnie nationale du Rhône. Il a observé que ce bénéfice, artificiellement gonflé, tendait à dissimuler des pertes courantes d'un montant de 121 millions d'euros et a ajouté que la situation de la branche Fret était particulièrement inquiétante, avec un recul significatif du chiffre d'affaires et un résultat d'exploitation négatif, à hauteur de 429 millions d'euros, en baisse par rapport à 2002.

M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a ensuite rappelé, qu'en application de l'article 57 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), la commission des finances avait commandé, en juin 2002, une étude technique au cabinet Didier Kling, portant sur les aspects comptables de la gestion et du financement public du secteur ferroviaire. Il a précisé que le retard constaté dans la remise de ce rapport était essentiellement imputable au manque de coopération de la SNCF, de ses commissaires aux comptes, ainsi que de RFF. Il a, en outre, indiqué que la Cour des comptes s'était également penchée sur les comptes de la SNCF dans un rapport particulier publié en mars 2003.

Suite à l'ensemble de ces opérations de contrôle, portant sur les exercices 1995 à 2001, il a jugé que la SNCF avait indéniablement amélioré la lisibilité de ses comptes, mais que la vigilance devait rester de mise, car un certain nombre de difficultés n'étaient pas résolues.

En premier lieu, M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a souligné que la mission confiée au cabinet Didier Kling avait permis de consolider le cadre des relations entre la commission des finances et la SNCF, ce dont il convenait de se féliciter.

Il a précisé que cette expérience, la première mission d'assistance technique réalisée lors de la mise en oeuvre de l'article 57 de la LOLF, avait montré que le recours à des experts extérieurs était susceptible d'apporter un éclairage technique sur des données comptables factuelles, et que cette approche était de nature à compléter celle des rapporteurs spéciaux, sans pour autant, bien évidemment, s'y substituer.

Par ailleurs, M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a souhaité rappeler, qu'après de longs mois de négociations, il avait fini par obtenir, depuis octobre 2003, d'être personnellement destinataire des procès-verbaux et documents préparatoires du conseil d'administration de la SNCF.

Il a expliqué que les relations tripartites entre la SNCF, le rapporteur spécial de la commission des finances et le cabinet mandaté avaient donné lieu à un certain nombre de difficultés pratiques, mais que cette situation serait simplifiée à l'avenir, puisque le président de la SNCF avait récemment entériné le principe de relations directes avec le cabinet mandaté par la commission des finances pour réaliser une mission d'assistance technique, en application de l'article 57 précité de la LOLF.

Puis M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a ajouté que cette mission avait également été l'occasion de préciser le cadre des relations entre les commissions des finances et les commissaires aux comptes des sociétés contrôlées. Il a précisé que le travail du cabinet Didier Kling avait, en effet, été « entravé » par le manque de coopération des commissaires aux comptes de la SNCF, qui s'étaient trop facilement « réfugiés » derrière leurs obligations professionnelles. Or il a rappelé qu'à l'occasion de la seconde lecture au Sénat du projet de loi de sécurité financière, M. Francis Mer, alors ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, avait levé tous les doutes susceptibles de persister, en confirmant que le secret professionnel imposé aux commissaires aux comptes était levé à l'égard des rapporteurs spéciaux des commissions des finances, exerçant leurs pouvoirs de contrôle, en application de l'article 57 de la LOLF.

En second lieu, M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a formulé un certain nombre d'observations sur les comptes de la SNCF.

Evoquant le partage des actifs entre la SNCF et RFF, il a rappelé que la réorganisation du système ferroviaire en 1997 avait modifié le périmètre des immobilisations de la SNCF, alors même qu'il n'existait pas, alors, d'inventaire détaillé de ces immobilisations. Il a précisé que les comptes de la SNCF n'avaient pas pris en considération l'incidence financière du différend subsistant avec RFF. A ce sujet, toutefois, il a ajouté que des progrès avaient été enregistrés, puisqu'un fichier des immobilisations avait enfin été établi, ce qui constituait un préalable indispensable au partage définitif des actifs. Il a indiqué que, par conséquent, les commissaires aux comptes de la SNCF avaient levé leurs réserves sur cette question, mais pas sur l'incertitude concernant la propriété des biens. Il a regretté que le retard pris dans le partage des actifs ne pénalise l'avancement de nombreux projets au niveau local et n'empêche les deux entreprises de mener une politique active de gestion de leur patrimoine, retardant ainsi la mise en oeuvre des préconisations du rapport Pommellet concernant la mobilisation, en Ile-de-France, d'un million de m² de terrains appartenant à RFF ou à la SNCF, à des fins de constructions immobilières.

M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a rappelé que le rapport remis en janvier 2004 au gouvernement par M. Christian Vigouroux, conseiller d'Etat, avait proposé plusieurs solutions et que le gouvernement avait récemment enjoint aux présidents de RFF et de la SNCF de procéder à la répartition des actifs avant le 31 octobre 2004. Il a demandé, par conséquent, à la SNCF et à RFF, de se conformer à cette exigence.

Il a observé, par la suite, que les commissaires aux comptes de la SNCF s'étaient interrogés sur le caractère exhaustif des sommes comptabilisées au titre des recettes « voyageurs ». Il a ajouté que, d'après les informations recueillies à ce jour, il semblait que la comptabilité des recettes « voyageurs » était devenue plus fiable, grâce à la mise en place d'un nouveau système informatique. Il a précisé que les commissaires aux comptes avaient levé leurs réserves sur ce point.

Puis M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a évoqué la mise en place d'une comptabilité analytique par domaines, engagée depuis 1997. Il a indiqué que, malheureusement, les audits internes réalisés par la SNCF avaient fait l'objet d'un refus de communication et que, d'après les informations qui avaient pu être recueillies, les avancées sur cette question étaient insuffisantes et inégales. Il a précisé que les règles d'affectation reposaient encore sur des clefs forfaitaires peu transparentes, même si, s'agissant de l'activité TER, ces règles avaient été examinées avec les régions. En définitive, il a jugé que l'objectif de certification des comptes par domaines par les commissaires aux comptes était encore loin d'être rempli.

Au sujet du service annexe d'amortissement de la dette (SAAD), M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a rappelé que la Cour des comptes regrettait que les montants figurant au SAAD ne soient pas inscrits au passif de la SNCF, alors que ce service n'était pas juridiquement distinct de l'établissement public SNCF. Il a précisé que la SNCF avait aménagé le traitement réservé au service annexe, en fournissant certaines informations dans les comptes annuels publiés. Il a ajouté que les engagements de l'Etat à ce titre mériteraient un traitement spécifique dans le cadre de la mise en place d'une comptabilité patrimoniale certifiée, prévue par la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

Abordant la question de la transparence des comptes de la SNCF, M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a signalé que le contenu du rapport annuel d'activité avait été modifié à partir de 2000, car la SNCF avait alors entrepris de communiquer plus sur le groupe que sur l'établissement public, « rejetant dans l'ombre » ses comptes sociaux. Il a souhaité que les comptes sociaux soient mieux présentés à l'avenir, afin d'améliorer la lisibilité de l'ensemble. Par ailleurs, il a ajouté que, depuis cette année, la SNCF établissait des comptes trimestriels, perfectionnant ainsi son outil de pilotage, ce qui permettrait, à partir de l'année prochaine, de procéder à des comparaisons à partir de données infra-annuelles. De façon générale, il a indiqué que les délais d'établissement des comptes avaient été améliorés, puisque le conseil d'administration de la SNCF les examinait actuellement au mois de mars au lieu du mois de mai. Il a estimé que la présentation conjointe des comptes consolidés et des comptes sociaux constituait également un progrès.

Enfin, en matière de gouvernement d'entreprise, M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a relevé que la SNCF avait suivi les évolutions des pratiques et de la législation. Il a précisé que l'entreprise avait mis en place un comité d'audit au sein de son conseil d'administration et qu'elle avait récemment publié, par ailleurs, en application de la loi de sécurité financière du 1er août 2003, son rapport sur le gouvernement d'entreprise et le contrôle interne. Il a observé que ce rapport adoptait une approche essentiellement descriptive du contrôle interne, ce qui était acceptable pour une première année mais qu'il fallait, dès l'année prochaine, que la SNCF adopte, dans ce rapport, une démarche d'évaluation de ses procédures de contrôle interne.

En conséquence des observations précédentes, il a formulé sept recommandations, indiquant que la SNCF ne devait pas échapper au mouvement que la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances avait initié vers plus de transparence et d'évaluation.

En premier lieu, M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a demandé que le partage des actifs entre la SNCF et RFF soit entériné au plus vite, selon l'arbitrage rendu par le gouvernement à la suite du rapport Vigouroux et que ce partage des immobilisations devait être réalisé avant le 31 octobre prochain, conformément aux injonctions du gouvernement.

Il a ensuite indiqué que les comptes de gestion par activité devaient être fiabilisés et, à terme, certifiés par les commissaires aux comptes et que cela impliquait, au préalable, que les règles d'affectation entre les différentes activités soient affinées, ce qui passait par la renonciation aux clefs forfaitaires, la fixation de prix de transfert internes et la construction de bilans pour chacune des branches.

M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, s'est ensuite prononcé pour une clarification de la comptabilité des charges de la SNCF, remarquant que cela impliquait une remise en question des relations financières avec RFF et qu'un observatoire européen des péages serait, à cet égard, un instrument utile. Par ailleurs, il a indiqué que l'augmentation du prix de l'énergie électrique correspondait, pour la seule SNCF, à un montant de plus de 120 millions d'euros et que cette augmentation ne résultait pas seulement de la hausse du prix de l'énergie, mais aussi de la hausse de la contribution au service public de l'électricité et de la hausse des tarifs de transport. Il s'est donc prononcé pour une remise à plat des relations entre la SNCF, EDF et RTE.

Il a ensuite souhaité que les comptes hors bilan de la SNCF soient éclaircis, s'agissant notamment des provisions pour charges de retraite et du service annexe d'amortissement de la dette.

Corollairement, il a demandé que la mise en oeuvre des normes comptables internationales IFRS se fasse de la façon la plus transparente possible, souhaitant que l'entreprise indique quel serait l'impact des nouvelles normes sur ses capitaux permanents, et notamment sur sa dette. Il a souhaité que ce changement comptable ne provoque pas d'opacité supplémentaire dans les comptes de la SNCF.

S'agissant de la transparence de l'information financière, M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a jugé nécessaire que le rapport annuel de la SNCF comprenne, outre les comptes consolidés, les comptes complets de l'EPIC et l'avis des commissaires aux comptes. En outre, il a ajouté que les comptes consolidés devaient présenter la liste intégrale des filiales du groupe et leurs modes d'intégration respectifs. Enfin, il a souhaité que le rapport annuel présente un tableau chiffré précis des contributions de l'Etat et des autres collectivités publiques.

En dernier lieu, il a demandé à l'Etat de formuler clairement ses exigences à l'égard de la SNCF. Il a souhaité que la dotation en capital devant être versée d'ici à 2006 soit réellement conditionnée à des objectifs précis, mesurés selon des indicateurs chiffrés publiés, selon une démarche conforme à l'esprit qui présidait à la mise en oeuvre de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.

Il a préconisé une véritable contractualisation pluriannuelle entre l'Etat, la SNCF et RFF, estimant que ce cadre devrait fixer les objectifs de l'opérateur et du gestionnaire d'infrastructure ainsi que les modalités de suivi de la réalisation de ces objectifs. Il a jugé qu'un tel cadre permettrait de clarifier les relations trilatérales et d'apporter à l'Etat et aux collectivités publiques une visibilité et des garanties qui faisaient actuellement défaut.

Un débat s'est alors instauré.

M. Jean Arthuis, président, s'est félicité des progrès accomplis par la SNCF dans la présentation de ses comptes et a tenu à saluer tout particulièrement la persévérance du rapporteur spécial qui avait permis de faire reculer la « culture du secret ».

M. Maurice Blin a demandé des précisions concernant le coût des retraites et celui des permis de circuler. Il s'est interrogé sur le bilan financier du TGV et a souhaité disposer de quelques éléments de comparaison au niveau européen.

M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a indiqué que son approche des comptes de la SNCF s'était voulue globale, afin de pouvoir justement mieux répondre à ce type d'interrogation spécifique. Il a indiqué que l'activité TGV était le seul secteur équilibré de la SNCF et a souhaité que l'Europe se structure, à l'avenir, autour d'un réseau européen rapide. Il a jugé, qu'à défaut de disposer de comptes clairs, les comparaisons européennes étaient sujettes à caution. Il s'est félicité, par ailleurs, que l'Europe, la régionalisation et la clarification des comptes de l'Etat dans le cadre de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) constituent trois impulsions réformatrices convergentes.

M. Roland du Luart a souhaité obtenir des précisions au sujet du SAAD. Il s'est demandé si la construction des lignes nouvelles de TGV ne serait pas retardée, étant donné la situation décrite par le rapporteur spécial. Enfin, il a observé que les difficultés du fret tenaient tant à la mauvaise tenue des horaires qu'à l'utilisation d'un matériel inadapté.

M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a répondu que l'Etat verserait en 2004 à la SNCF 677 millions d'euros au titre du SAAD. Il a indiqué que le CIADT du 18 décembre 2003 avait précisé le calendrier s'agissant des lignes nouvelles de TGV, mais a craint un allongement des délais initiaux. Il a précisé, en outre, que le fret ferroviaire connaissait des difficultés dans l'ensemble de l'Europe et a regretté l'absence d'une véritable politique européenne dans ce domaine.

La commission a ensuite donné acte à M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, de sa communication.

Mission d'information à l'étranger - Chine (19 au 25 avril 2004) - Compte rendu

La commission a ensuite entendu le compte rendu de la mission effectuée en Chine du 19 au 25 avril 2004.

A titre liminaire, M. Jean Arthuis, président, a exposé que la mission effectuée en Chine, entre le 19 et le 25 avril 2004, par une délégation du bureau de la commission des finances, composée de MM. Jean Arthuis, président, Philippe Marini, rapporteur général, et de MM. Jean-Pierre Demerliat, Adrien Gouteyron, Paul Loridant, Roland du Luart et Aymeri de Montesquiou, s'était inscrite dans le contexte de l'année de la Chine en France et des célébrations du 40e anniversaire des relations diplomatiques entre la Chine et la France. Il a indiqué qu'elle avait comporté trois axes principaux de travail : des rencontres avec des hauts responsables politiques chinois (vice-président de l'Assemblée nationale populaire, président de la commission des finances de l'Assemblée nationale populaire, premier vice-ministre de l'économie) ; un dialogue avec les acteurs chinois du développement économique ; enfin, le souci de mesurer concrètement la présence des entreprises françaises en Chine.

Après avoir effectué un rappel de l'histoire politique et économique de la Chine, un « Etat plus vieux que l'histoire » selon le général de Gaulle, caractérisée par la récurrence des révoltes paysannes, M. Jean Arthuis, président, a indiqué que les relations politiques franco-chinoises étaient constructives, dynamiques, approfondies et placées sous le signe du « partenariat global stratégique » réaffirmé lors de la visite en France du Président Hu Jintao en janvier 2004, mais que les relations économiques entre nos deux pays n'étaient pas encore à la hauteur de l'excellence de ces relations diplomatiques. Il a précisé que ces relations économiques demeuraient, en effet, dominées par les grands contrats, la France étant d'ailleurs dans l'attente des choix de la Chine en matière d'équipements électronucléaires, et que les échanges commerciaux entre les deux pays étaient aussi modestes que déséquilibrés, la Chine étant le 8e fournisseur de la France, mais seulement son 14e client. Il a relevé que les parts de marché de la France en Chine s'étaient érodées à 1,4 % en 2002, contre 5,6 % pour l'Allemagne, d'où la volonté française, non seulement de renforcer sa présence dans les équipements structurants (nucléaire, aéronautique, transports), mais aussi d'aider les petites et moyennes entreprises et les petites et moyennes industries (PME et PMI) à s'implanter en Chine, tout en accroissant la coopération culturelle, scientifique, technique et administrative.

Il a exposé, ensuite, que le dialogue engagé entre les membres de la délégation et des acteurs chinois du développement économique leur avait permis d'appréhender une politique économique originale, caractérisée par le poids du pragmatisme et par le « recours encadré » au marché. A cet égard, il a souligné que la Chine avait effectué l'une des transformations les plus spectaculaires et les plus rapides qu'un pays ait connue depuis la Révolution industrielle, et qu'elle possédait aujourd'hui les éléments d'une économie moderne tout en restant, par certains aspects, un pays en développement, confronté à de nombreux défis : l'écart entre le pays réel et le système politique ; la fracture grandissante entre les zones côtières et l'intérieur du pays ; la fragilité du système bancaire due aux créances douteuses et à la spéculation ; la persistance des problèmes sociaux, avec un gigantesque exode rural, estimé entre 100 et 150 millions de personnes, dû au sous-emploi dans les campagnes ; l'intensité des atteintes à l'environnement ; enfin, la faiblesse des recettes fiscales.

Cela étant, il a estimé que la domination du parti communiste demeurait intacte sur le plan politique, ce parti s'adaptant pour conserver le pouvoir, la démocratisation n'étant pas à l'ordre du jour, même si le système évoluait, comme l'illustraient la suppression de la procédure de détention-rapatriement en août 2003, ainsi que la révision constitutionnelle de mars 2004 reconnaissant la propriété privée « légalement acquise » et saluant les entrepreneurs privés comme des « constructeurs du socialisme ».

Après avoir souligné que toutes les statistiques devaient être maniées avec une extrême précaution, il a rappelé que la Chine connaissait depuis 1978 un développement extrêmement rapide, avec un taux de croissance annuel moyen de 9,4 %, l'industrie représentant aujourd'hui 53 % du produit national brut, contre 32 % pour les services et 15 % pour l'agriculture. Il a ajouté que le taux d'ouverture, mesuré par le ratio des exportations sur le produit intérieur brut, avait atteint 61 % en 2003, ce dernier chiffre illustrant le rôle essentiel des exportations. Il a estimé que la division internationale du travail au profit de la Chine ne s'effectuait, ainsi, plus seulement entre industries, mais également au sein même des processus industriels, de sorte que la Chine fabriquait aujourd'hui aussi bien des produits à forte intensité de main-d'oeuvre (l'entreprise Wal-Mart important ainsi chaque mois 14 milliards de dollars de produits chinois aux Etats-Unis), que des composants électroniques sophistiqués ou des éléments d'avions par exemple. Il a jugé que la force de la Chine résidait donc dans le fait que ce pays pouvait offrir une palette complète de produits.

M. Jean Arthuis, président, a exposé que la Chine était toutefois confrontée à de nombreux problèmes économiques du fait du rythme et des modalités de sa croissance : des risques de surchauffe inflationniste et de surinvestissement ; des risques de pénurie dans les industries de base (énergie, transports) ; une dépendance extérieure croissante pour ses matières premières (la Chine consommant actuellement 7 % du pétrole mondial et de 30 à 40 % de la production mondiale de fer, de ciment, de cuivre et d'aluminium, pour produire seulement 4 % du PIB mondial) ; des inégalités fortes et se creusant encore entre les villes et les zones rurales ; l'incapacité de l'industrialisation à absorber la main-d'oeuvre agricole inutilisée, de nombreux chômeurs s'installant dans les villes dans des conditions extrêmement précaires ; des différentiels de développement entre les zones côtières de l'est, d'une part, le centre et l'ouest du pays, d'autre part ; l'imperfection du système de protection sociale, l'insuffisance des services médicaux et éducatifs ; enfin, l'impact du développement économique de la Chine sur celui de ses partenaires. S'agissant de ce dernier point, il a observé que les autorités chinoises recherchaient, officiellement, les moyens d'une « émergence pacifique » prenant en compte les intérêts et les capacités d'adaptation des autres pays, et s'attachaient à citer régulièrement le dicton suivant : « Quand la Chine se réveillera, le monde s'en réjouira ».

Il a rappelé que le ministère de l'économie du Japon avait, dans une note de 2001, qualifié la Chine « d'usine du monde », expression qui avait connu un grand retentissement depuis, et que ce concept se justifiait au regard de l'étendue des domaines où la Chine était devenue le premier producteur mondial : l'acier, le charbon, le ciment, le textile et le vêtement, les chaussures, les jouets, les télévisions, les ordinateurs portables, etc. Il a précisé que cette évolution s'appuyait très largement sur des flux d'investissements directs étrangers, pour moitié en provenance de la diaspora chinoise, justifiés par le faible coût de la main-d'oeuvre, mais aussi par la perspective de conquérir un énorme marché, ainsi que, pour les sous-traitants, par la nécessité de suivre leurs donneurs d'ordre.

M. Jean Arthuis, président, a exposé que l'ambition des autorités chinoises consistait, pour l'avenir, à développer des grands groupes à l'international, avec comme objectif d'avoir deux ou trois champions nationaux par grand secteur stratégique et de passer ainsi du « made by China » au « made in China », afin de lutter contre les faiblesses actuelles des groupes industriels chinois : taille limitée, insuffisance des efforts de recherche-développement et structures de management et de financement peu claires. Il a estimé que, pour de nombreux observateurs, la Chine deviendrait ainsi, d'ici à 2010, le troisième exportateur et importateur mondial, et que la concurrence chinoise toucherait aussi bien le Mexique, la Thaïlande, le Maghreb et l'Europe de l'Est que les économies occidentales, ce qui poserait d'ailleurs, avec une acuité croissante, la question de la sous-évaluation du yuan. Cela étant, il a également jugé que la Chine demeurerait handicapée par la faiblesse de l'encadrement des entreprises, par le coût des terrains, par les tensions inflationnistes, par les problèmes environnementaux et par ses difficultés d'approvisionnement en énergie et en matières premières.

Après avoir relaté les visites effectuées dans des entreprises françaises implantées sur des zones d'activités aménagées, d'une part, les entretiens conduits auprès des autorités de régulation bancaire, d'autre part, qui illustraient les deux facettes de la croissance chinoise - d'un côté les opportunités, de l'autre les risques -, il a indiqué en conclusion qu'il était difficile de tirer des enseignements définitifs d'un séjour de quelques jours seulement dans un pays de 1,3 milliard d'habitants, mais que cette mission, par la richesse de son contenu, invitait à des réflexions approfondies à la fois sur la dialectique entre le pouvoir économique et la puissance géopolitique et sur la problématique des délocalisations d'activités.

Après s'être félicité de la diligence et de l'efficacité de la mission économique en Chine, M. Jean Arthuis, président, a ainsi proposé à la commission de poursuivre le travail de réflexion « au long cours » ainsi entamé, en approuvant les cahiers des charges et en lançant des appels d'offres en vue de la réalisation de deux études relatives aux délocalisations : une enquête sur un échantillon représentatif d'entreprises françaises pour mesurer et identifier les risques de délocalisation d'emplois de service, d'une part, l'évaluation de la part de la consommation d'un ménage-type qui pouvait être satisfaite par des produits exposés à la délocalisation, d'autre part.

Un débat s'est alors engagé.

M. Paul Loridant a souligné la contradiction fondamentale existant entre la gestion politique et la gestion économique de la Chine et s'est interrogé sur la soutenabilité, à terme, de ce hiatus.

M. Maurice Blin s'est inquiété du manque de ressources naturelles de la Chine. A partir des exemples du Chili et de la Corée du Sud, il s'est demandé si le développement de la Chine dans un cadre politique autoritaire serait suivi d'une démocratisation ou bien si la Chine n'était pas, une fois de plus dans son histoire, menacée d'éclatement.

A cet égard, M. Jean Arthuis, président, a confirmé que l'unité politique de la Chine était mise à rude épreuve par l'exode rural et surtout par les écarts considérables de revenus, notamment entre les fonctionnaires et les nouveaux entrepreneurs. A l'unisson de M. Paul Girod, il a toutefois souligné combien il était hasardeux de se lancer dans des jugements définitifs et généraux sur un pays d'une telle complexité.

A l'issue de ce débat, après avoir donné acte à M. Jean Arthuis, président, de sa communication, la commission a approuvé le principe du recours à deux expertises extérieures afin de pouvoir engager les procédures visant à obtenir du Conseil de questure, d'une part, les crédits nécessaires au financement de ces prestations et, d'autre part, l'autorisation de lancer le processus de sélection des prestataires selon les modalités définies par le code des marchés publics.

Nomination de rapporteur

La commission a ensuite nommé M. Philippe Marini, rapporteur général, rapporteur sur le projet de loi n° 1676 (AN - XIIe législature) pour le soutien à la consommation et à l'investissement, sous réserve de son adoption par l'Assemblée nationale et de sa transmission.

Demandes de renvois pour avis et nominations de rapporteurs pour avis

Enfin, la commission a décidé de se saisir pour avis :

- sur le projet de loi n° 343 (2003-2004), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, de simplification du droit et a nommé M. Gérard Braun, rapporteur pour avis de ce projet de loi ;

- sur le projet de loi n° 1613 (AN - XIIe législature) relatif au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières et a nommé M. Philippe Marini, rapporteur général, rapporteur pour avis de ce projet de loi, sous réserve de son adoption par l'Assemblée nationale et de sa transmission.