Sommaire

Présidence de M. Alain Marc

Secrétaires :

Mme Alexandra Borchio Fontimp, M. Mickaël Vallet.

1. Procès-verbal

2. Questions orales

maternités et défavorisation territoriale mettant en danger les femmes et leurs nourrissons

Question n° 048 de Mme Marie-Claude Varaillas. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi.

persistance de dysfonctionnements dans les données des assurés sociaux

Question n° 309 de Mme Nathalie Goulet. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi ; Mme Nathalie Goulet.

parution de l’arrêté interministériel permettant la mise en place de la nouvelle version du nutri-score

Question n° 397 de Mme Antoinette Guhl. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi.

difficultés des missions locales dans la région normandie

Question n° 399 de M. Didier Marie. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi ; M. Didier Marie.

financement et avenir des hôpitaux publics en seine-saint-denis

Question n° 417 de M. Adel Ziane. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi ; M. Adel Ziane.

hommage national en mémoire des victimes du covid-19

Question n° 419 de M. Cédric Chevalier. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi.

délai de traitement des dossiers par la maison départementale des personnes handicapées 92

Question n° 421 de Mme Marie-Do Aeschlimann. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi ; Mme Marie-Do Aeschlimann.

situation particulière des assistants familiaux recrutés par les départements

Question n° 423 de Mme Laurence Muller-Bronn. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi.

protection de l’enfance

Question n° 296 de Mme Michelle Gréaume. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi.

conséquences de la réduction des contrats « parcours emploi compétences » pour les collectivités territoriales

Question n° 447 de Mme Amel Gacquerre. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi ; Mme Amel Gacquerre.

prise en charge des détenus en établissement de santé psychiatrique

Question n° 441 de M. Franck Menonville. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi.

aide au financement du permis de conduire pour les apprentis de moins de 18 ans

Question n° 334 de M. Yves Bleunven. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre chargée du travail et de l’emploi.

application de la nouvelle convention fiscale franco-luxembourgeoise

Question n° 430 de Mme Véronique Guillotin. – Mme Amélie de Montchalin, ministre chargée des comptes publics ; Mme Véronique Guillotin.

projet solaire en coactivité agricole

Question n° 420 de M. Jean-François Longeot. – Mme Amélie de Montchalin, ministre chargée des comptes publics.

renouvellement des concessions hydroélectriques

Question n° 422 de M. Raphaël Daubet. – Mme Amélie de Montchalin, ministre chargée des comptes publics.

double imposition des travailleurs frontaliers luxembourgeois

Question n° 436 de Mme Silvana Silvani. – Mme Amélie de Montchalin, ministre chargée des comptes publics ; Mme Silvana Silvani.

double imposition des travailleurs transfrontaliers de l’hôpital de cerdagne

Question n° 439 de Mme Lauriane Josende. – Mme Amélie de Montchalin, ministre chargée des comptes publics ; Mme Lauriane Josende.

difficultés des élus locaux face aux implantations d’antennes 5g

Question n° 424 de M. Didier Rambaud. – Mme Amélie de Montchalin, ministre chargée des comptes publics.

conséquences de la suppression de la contribution des gestionnaires de réseau de distribution d’électricité au fonds de financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale

Question n° 446 de Mme Maryse Carrère. – Mme Amélie de Montchalin, ministre chargée des comptes publics.

situation de la fédération française de karaté

Question n° 449 de M. Gilbert-Luc Devinaz. – Mme Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative ; M. Gilbert-Luc Devinaz.

soutien de l’état et de ses opérateurs à la valorisation de la culture régionale bretonne

Question n° 450 de M. Simon Uzenat. – Mme Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative.

révision des critères d’éligibilité à la dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales

Question n° 350 de Mme Mireille Jouve. – Mme Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative.

situation préoccupante au sein de l’entreprise ritleng revalorisations

Question n° 408 de M. Jacques Fernique. – Mme Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative.

conséquences de la fin de l’exonération des cotisations patronales pour certains armateurs français

Question n° 413 de Mme Agnès Canayer. – Mme Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative ; Mme Agnès Canayer.

interdiction du plomb dans les munitions pour la chasse

Question n° 431 de M. Pierre Cuypers. – Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville ; M. Pierre Cuypers.

gestion des digues domaniales transférée aux collectivités

Question n° 322 de Mme Martine Berthet. – Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville.

conséquences de la réforme des normes applicables aux appareils de chauffage au bois

Question n° 415 de M. Jean-Claude Anglars. – Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville.

suppression du fonds de soutien aux temps d’activités périscolaires

Question n° 434 de M. Christian Redon-Sarrazy. – Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville ; M. Christian Redon-Sarrazy.

congés menstruels dans la fonction publique

Question n° 428 de M. Pascal Savoldelli. – Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville ; M. Pascal Savoldelli.

conséquences de la mise en œuvre du régime de la responsabilité financière des gestionnaires publics

Question n° 448 de M. Fabien Genet. – Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville ; M. Fabien Genet.

délais de traitement et de paiement des dossiers « maprimerénov’ » et « certificats d’économies d’énergie »

Question n° 189 de Mme Anne-Sophie Romagny. – Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville ; Mme Anne-Sophie Romagny.

compétence « mobilité » des communautés de communes

Question n° 401 de Mme Florence Lassarade. – Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville ; Mme Florence Lassarade.

objectifs triennaux de la loi « solidarité et renouvellement urbains » et crise immobilière

Question n° 433 de M. Éric Dumoulin. – Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville.

projet de port industriel à vigneux-sur-seine

Question n° 440 de M. Laurent Lafon. – Mme Juliette Méadel, ministre déléguée chargée de la ville.

non-application de la charte sociale européenne dans les outre-mer

Question n° 400 de Mme Audrey Bélim. – M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux.

manque de statistiques fiables des infanticides

Question n° 362 de Mme Laurence Harribey. – M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux ; Mme Laurence Harribey.

téléconsultation médicale des personnes placées en garde à vue

Question n° 372 de M. Édouard Courtial. – M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux.

problèmes d’immatriculation des motos de collection auprès des services de l’agence nationale des titres sécurisés

Question n° 347 de Mme Else Joseph. – M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux ; Mme Else Joseph.

nouvelles gendarmeries dans l’aisne

Question n° 358 de M. Pierre-Jean Verzelen. – M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux ; M. Pierre-Jean Verzelen.

section aérienne de gendarmerie de limoges

Question n° 411 de Mme Isabelle Briquet. – M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux ; Mme Isabelle Briquet.

urgence d’une solution pour reloger la direction départementale de la police nationale de l’ariège

Question n° 427 de M. Jean-Jacques Michau. – M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux ; M. Jean-Jacques Michau.

délais de livraison d’un hélicoptère de modèle h145 au bénéfice de la section aérienne de gendarmerie de briançon-villar-saint-pancrace

Question n° 432 de M. Jean-Michel Arnaud. – M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux ; M. Jean-Michel Arnaud.

prolifération des commerces de blanchiment d’argent à paris

Question n° 438 de Mme Agnès Evren. – M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué chargé de la francophonie et des partenariats internationaux.

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Pierre Ouzoulias

3. Livre blanc de la commission européenne sur la défense. – Débat organisé à la demande du groupe Les Républicains

M. Pascal Allizard, pour le groupe Les Républicains ; M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe ; M. Pascal Allizard.

M. Jean-Pierre Grand ; M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe.

M. Jean-Luc Ruelle ; M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe.

M. Jean-Baptiste Lemoyne ; M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe ; M. Jean-Baptiste Lemoyne.

M. André Guiol ; M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe ; M. André Guiol.

M. François Bonneau ; M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe ; M. François Bonneau.

Mme Michelle Gréaume ; M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe.

M. Guillaume Gontard ; M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe ; M. Guillaume Gontard.

M. Didier Marie ; M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe ; M. Didier Marie.

M. Stéphane Ravier ; M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe.

Mme Marta de Cidrac ; M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe.

Mme Hélène Conway-Mouret ; M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe ; Mme Hélène Conway-Mouret.

Mme Catherine Belrhiti ; M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe.

Conclusion du débat

M. Benjamin Haddad, ministre délégué chargé de l’Europe

M. Dominique de Legge, pour le groupe Les Républicains

4. Communication relative à une commission mixte paritaire

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE Mme Anne Chain-Larché

5. Moyens de contrôle des sénateurs et droits des groupes politiques. – Adoption d’une proposition de résolution dans le texte de la commission modifié

Discussion générale

Mme Sylvie Vermeillet, auteure de la proposition de résolution

Mme Muriel Jourda, rapporteur de la commission des lois

M. Stéphane Sautarel

Mme Patricia Schillinger

M. Michel Masset

Mme Olivia Richard

Mme Cécile Cukierman

M. Guy Benarroche

M. Éric Kerrouche

M. Christopher Szczurek

M. Dany Wattebled

Mme Catherine Belrhiti

Clôture de la discussion générale.

Article 1er – Adoption.

Après l’article 1er

Amendement n° 2 de M. Éric Kerrouche. – Rejet.

Article 2 – Adoption.

Après l’article 2

Amendement n° 80 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° 82 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° 79 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Article 3 – Adoption.

Après l’article 3

Amendement n° 3 de M. Éric Kerrouche. – Rejet.

Amendement n° 81 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° 74 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Article 4 – Adoption.

Article 5

Amendement n° 4 de M. Éric Kerrouche. – Rejet.

Adoption de l’article.

Après l’article 5

Amendement n° 34 de Mme Maryse Carrère. – Rejet.

Amendement n° 36 de Mme Maryse Carrère. – Rejet.

Amendement n° 5 de M. Éric Kerrouche. – Rejet.

Amendement n° 6 de M. Éric Kerrouche. – Rejet par scrutin public n° 254.

Article 6

Amendement n° 7 de M. Éric Kerrouche. – Rejet.

Adoption de l’article.

Après l’article 6

Amendement n° 38 de Mme Maryse Carrère. – Rejet.

Amendement n° 9 de M. Éric Kerrouche. – Rejet.

Amendement n° 76 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° 56 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.

Amendement n° 8 de M. Éric Kerrouche. – Rejet.

Amendement n° 75 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° 87 rectifié de M. Michel Masset. – Rejet.

Amendement n° 73 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° 29 rectifié de Mme Maryse Carrère. – Rejet.

Amendement n° 30 rectifié de Mme Maryse Carrère. – Rejet.

Amendement n° 27 de M. Éric Kerrouche. – Rejet.

Amendement n° 31 de Mme Maryse Carrère. – Rejet.

Amendement n° 55 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.

Amendement n° 10 de M. Éric Kerrouche. – Rejet.

Amendement n° 65 rectifié de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.

Amendement n° 89 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° 85 rectifié de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.

Amendement n° 88 rectifié de M. Michel Masset. – Rejet.

Amendement n° 63 rectifié de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.

Amendement n° 64 rectifié de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.

Amendement n° 66 rectifié de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.

Article 7 – Adoption.

Article 8

Amendement n° 23 de Mme Nathalie Goulet. – Retrait.

Adoption de l’article.

Après l’article 8

Amendement n° 26 de M. Éric Kerrouche. – Rejet.

Article 9 – Adoption.

Après l’article 9

Amendement n° 11 de M. Éric Kerrouche. – Rejet.

Article 10 – Adoption.

Après l’article 10

Amendement n° 32 de Mme Maryse Carrère. – Rejet.

Article 11 – Adoption.

Article 12

Amendement n° 57 de Mme Cécile Cukierman. – Adoption de l’amendement supprimant l’article.

Article 13 – Adoption.

Article 14

Amendement n° 70 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° 58 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 15 – Adoption.

Article 16

Amendement n° 59 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.

Amendements identiques nos 13 de M. Éric Kerrouche et 71 de M. Guy Benarroche. – Rejet des deux amendements.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 16

Amendement n° 60 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.

Amendement n° 35 de Mme Maryse Carrère. – Rejet.

Amendement n° 14 de M. Éric Kerrouche. – Rejet.

Article 17

Amendement n° 61 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.

Amendement n° 69 de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° 15 de M. Éric Kerrouche. – Rejet.

Adoption de l’article.

Après l’article 17

Amendement n° 39 de Mme Maryse Carrère. – Rejet.

Amendement n° 62 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.

Amendement n° 12 rectifié de Mme Marie-Pierre de La Gontrie. – Rejet par scrutin public n° 255.

Amendement n° 72 rectifié de M. Guy Benarroche. – Rejet.

Amendement n° 90 de la commission. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 33 rectifié de Mme Maryse Carrère. – Rejet.

Amendement n° 37 rectifié de Mme Maryse Carrère. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 40 rectifié de Mme Maryse Carrère. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 18 rectifié ter de Mme Nathalie Goulet. – Rejet.

Amendements identiques nos 54 de Mme Marie-Pierre de La Gontrie et 84 de M. Guy Benarroche. – Rejet, par scrutin public n° 256, des deux amendements.

Articles 17 bis (nouveau) et 18 – Adoption.

Article 19

M. Jean-François Rapin

M. Didier Marie

Amendement n° 91 de la commission. – Adoption.

Amendement n° 67 de Mme Cécile Cukierman. – Devenu sans objet.

Amendement n° 42 de M. Didier Marie. – Rejet.

Amendement n° 47 rectifié de M. Didier Marie. – Adoption.

Amendement n° 44 de M. Didier Marie. – Rejet.

Amendement n° 68 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.

Amendement n° 43 de M. Didier Marie. – Rejet.

Amendement n° 45 de M. Didier Marie. – Rejet.

Amendement n° 46 de M. Didier Marie. – Rejet.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 19

Amendement n° 24 de M. Éric Kerrouche. – Rejet.

Article 20

Amendement n° 41 de M. Arnaud Bazin. – Adoption.

Amendement n° 53 rectifié de M. Jean-Michel Arnaud. – Adoption.

Amendement n° 83 de Mme Cécile Cukierman. – Retrait.

Adoption de l’article modifié.

Après l’article 20

Amendement n° 77 de M. Guy Benarroche. – Retrait.

Article 21

Amendement n° 25 de M. Éric Kerrouche. – Rejet.

Adoption de l’article.

Article 22 – Adoption.

Après l’article 22

Amendements identiques nos 1 rectifié de M. Éric Kerrouche, 78 de M. Guy Benarroche et 86 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet, par scrutin public n° 257, des trois amendements.

Vote sur l’ensemble

M. Éric Kerrouche

M. Guillaume Gontard

Mme Sylvie Vermeillet

Adoption, par scrutin public n° 258, de la proposition de résolution dans le texte de la commission, modifié.

6. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Alain Marc

vice-président

Secrétaires :

Mme Alexandra Borchio Fontimp,

M. Mickaël Vallet.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Questions orales

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

maternités et défavorisation territoriale mettant en danger les femmes et leurs nourrissons

M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas, auteure de la question n° 048, adressée à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins.

Mme Marie-Claude Varaillas. Madame la ministre, il y a quelques jours, en Dordogne, une femme a donné naissance à son enfant dans sa voiture, sur le bord de la route, en pleine campagne.

Fort heureusement, son bébé, né avec le cordon ombilical autour du cou, est sain et sauf. Cette jeune mère avait une heure et quart de route à parcourir pour rejoindre la maternité de Périgueux, car celle de Sarlat, près de laquelle elle réside, ne pratique plus d’accouchements depuis le mois d’octobre 2024.

L’histoire de cette femme n’est malheureusement pas un cas isolé. D’autres jeunes mamans ont récemment fait la une des journaux pour avoir accouché dans leur voiture, dans leur salon, voire dans un camion de pompiers.

En cinquante ans, les trois quarts des maternités françaises ont disparu, à l’instar de celle de Sarlat, ce qui entraîne des accouchements extrahospitaliers et des risques accrus pour les femmes et les nourrissons. Il est prouvé que la mortalité néonatale est presque quatre fois plus élevée lorsque l’accouchement a lieu en dehors d’une maternité ou à plus de quarante-cinq kilomètres de l’établissement le plus proche.

Entre 1997 et 2019, le nombre de femmes en âge de procréer vivant à plus de quarante-cinq minutes d’une maternité a plus que doublé. Alors que notre pays connaît une stagnation inquiétante de la mortalité infantile, la Cour des comptes préconise pourtant de poursuivre la fermeture des petites maternités. Ces fermetures renforcent le sentiment d’abandon des territoires ruraux, qui subissent déjà la désertification des services publics.

Alors même que le Président de la République a appelé de ses vœux un « réarmement démographique » du pays, des territoires entiers se retrouvent dans des déserts obstétricaux et de nombreuses femmes vivent la fin de leur grossesse avec la peur de devoir accoucher dans leur voiture.

En réalité, sous prétexte d’un impératif de sécurité, on les met en danger ; alors que nous manquons de praticiens, ces décisions de fermetures ne font que pousser les gynécologues à fuir.

Madame la ministre, qu’envisage le Gouvernement pour revenir sur cette vision purement comptable et administrative de la question, qui nuit au maillage de l’offre de soins et à la sécurité des mères et des enfants à naître ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de lemploi. Madame la sénatrice Varaillas, le cas que vous citez et qui s’est produit cet été en Dordogne nous rappelle la situation critique des maternités. Fort heureusement, la mère et l’enfant sont saufs.

L’accès à une prise en charge périnatale de qualité en tout point du territoire est un sujet d’attention particulière du Gouvernement, alors que les maternités, comme l’ensemble des activités des établissements de santé, connaissent aujourd’hui des tensions, liées principalement aux effectifs des soignants.

Le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins a rencontré Mmes les sénatrices Annick Jacquemet et Véronique Guillotin, qui sont à l’origine du rapport d’information intitulé Transformation de loffre de soins périnatals dans les territoires : le travail doit commencer. Le Gouvernement est très attentif à ce que ces tensions, qui peuvent notamment fragiliser les petites maternités, ne constituent pas un obstacle à l’accès des femmes enceintes à une prise en charge sécurisée de leur grossesse, le plus près possible de leur domicile.

Lorsqu’une maternité n’a pas d’autre choix que de fermer ses portes, faute de personnel disponible, l’agence régionale de santé (ARS) compétente se mobilise en lien avec les acteurs locaux pour mettre en place un ensemble de mesures permettant de continuer de proposer aux femmes un suivi de grossesse et une prise en charge après l’accouchement près de leur domicile.

Pour ma part, je tiens à réfuter, au nom du Gouvernement, l’idée selon laquelle nous fermerions des maternités en raison du trop faible nombre d’accouchements. On dénombre aujourd’hui en France une vingtaine de maternités dans lesquelles ont lieu moins de 300 naissances par an, qui sont néanmoins maintenues en raison de leur rôle clé dans les territoires isolés.

Chaque fois que nous fermons une maternité, nous le faisons bien évidemment à contrecœur, en ayant d’abord en tête la sécurité des mères et de leurs nouveau-nés. En outre, sur le site de l’ancienne maternité, des centres périnatals de proximité prennent alors le relais, pour offrir un panel large de soins en matière de périnatalité ; c’est absolument essentiel, alors que l’on constate, vous l’avez rappelé, madame la sénatrice, l’augmentation de la mortalité péri-infantile.

M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Par ailleurs, depuis 2019, une possibilité d’hébergement non médicalisé à proximité des maternités est proposée pour une prise en charge en amont.

J’y insiste, cette question retient toute l’attention du ministre chargé de la santé.

persistance de dysfonctionnements dans les données des assurés sociaux

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, auteur de la question n° 309, adressée à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins.

Mme Nathalie Goulet. Madame la ministre, je ne me résous pas à voir perdurer les dysfonctionnements relatifs au nombre d’assurés sociaux, dont la persistance est inquiétante.

En effet, le décalage entre les chiffres de l’Insee et ceux qui sont produits par nos organismes sociaux est important. Pour une même période, ces derniers dénombrent 60,3 millions de bénéficiaires, contre 55,4 millions pour l’Insee, soit une différence de pratiquement 5 millions. Quand on sait que l’on distribue 850 milliards d’euros de prestations sociales, vouloir disposer d’une base normale et vérifiée des bénéficiaires ne semble pas tout à fait absurde. L’inspection générale des finances elle-même regrette que les outils ne soient pas articulés entre eux.

Ma question est donc la suivante : combien y a-t-il précisément de personnes bénéficiaires de prestations et inscrites au répertoire national commun de la protection sociale (RNCPS) ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de lemploi. Madame la sénatrice Goulet, le Gouvernement tient d’abord à saluer votre engagement et votre travail en faveur de la lutte contre la fraude sociale et contre les dysfonctionnements pouvant exister en matière de droits, qui minent notre contrat social. À ce titre, il examine avec beaucoup d’attention les propositions que vous avez formulées pour renforcer les contrôles et les échanges de données à cette fin.

Pour répondre précisément à votre question, madame la sénatrice, je vous indique que les populations résidentes au sens de l’Insee et les populations assurées ne se recoupent pas totalement. C’est normal : certains résidents au sens de l’Insee peuvent ne pas être des assurés sociaux français et inversement.

En voici les raisons.

Les bases qui permettent de décompter ces deux catégories de population n’intègrent pas des informations comparables ; surtout, elles ne visent pas les mêmes finalités.

D’une part, le fichier de l’Insee recense les populations résidentes au terme d’une estimation statistique, après une collecte de données étalée sur cinq ans. D’autre part, le répertoire national inter-régime des bénéficiaires de l’assurance maladie (Rniam) est une base de données qui permet la gestion des droits à l’assurance maladie, pour identifier les assurés sociaux et leur rattachement à l’assurance maladie.

Ainsi, les assurés qui sont recensés n’ont pas forcément de droits ouverts à l’assurance maladie. Par exemple, les personnes décédées ou celles dont les droits sont fermés pour d’autres raisons, comme un départ définitif à l’étranger, demeurent inscrites dans ce répertoire pour une durée maximale de deux ans. En revanche, leurs droits sont bien fermés dans les bases de gestion des caisses primaires d’assurance maladie (CPAM) et organismes d’assurance.

Pourquoi en est-il ainsi ? La conservation de l’information du rattachement d’un assuré est nécessaire pour des raisons opérationnelles. Par exemple, des dépenses d’assurance maladie peuvent être traitées jusqu’à deux ans après le décès de la personne concernée ou à la fin de ses droits. Il est normal que les comptes de personnes décédées ne soient pas immédiatement supprimés, sans quoi les prestataires de santé seraient fortement pénalisés.

L’assurance maladie a toutefois conduit un important travail de mise à jour des fins de droit dans le Rniam.

M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. La remontée au fil de l’eau du stock des fins de droit s’est faite à partir de mi-2022 et la reprise du stock s’est conclue au mois de septembre 2023 avec la fermeture de plus de 670 000 dossiers. Nous gérons maintenant les dossiers au fil de l’eau.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour la réplique.

Mme Nathalie Goulet. Madame la ministre, j’appelle votre attention sur le cas relevé dans l’excellent rapport de l’IGF : environ 500 000 personnes bénéficient de droits, alors que leur séjour régulier est arrivé à terme. En d’autres termes, il n’existe aucun lien entre l’ouverture des droits et le séjour régulier : on peut très bien continuer à bénéficier de droits sociaux alors même que sa carte de séjour est périmée.

Il faut absolument lier l’ouverture des droits au fait de résider de manière régulière sur le territoire. Au moment où elle est délivrée, la carte de séjour doit être en même temps la carte d’ouverture de droits. Un rapport de l’inspection générale des affaires sociales (Igas) de 2023 réclame pour la énième fois une telle coordination, puisque nombre des prestations existantes sont liées à la régularité du séjour. Par conséquent, quand le droit au séjour régulier arrive à expiration, les droits doivent expirer en même temps.

Madame la ministre, je le répète, 500 000 personnes bénéficient d’avantages auxquels elles n’ont plus droit en raison de la fin de leur séjour régulier. Il faut donc absolument arriver à une coordination en la matière.

C’est pourquoi je propose que soit mis sur place un contrôle systématique du séjour, comme peuvent le faire les organismes de sécurité sociale aux termes de certains articles du code de la sécurité sociale. (Mme la ministre hoche la tête en signe dassentiment.)

parution de l’arrêté interministériel permettant la mise en place de la nouvelle version du nutri-score

M. le président. La parole est à Mme Antoinette Guhl, auteure de la question n° 397, adressée à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins.

Mme Antoinette Guhl. Madame la ministre, ma question devait initialement porter sur l’absence de publication de l’arrêté interministériel encadrant les nouvelles modalités de calcul du Nutri-score. Elle est aujourd’hui caduque, car cet arrêté a enfin été publié.

Cette mise à jour, fondée sur les dernières avancées scientifiques, permet de mieux prendre en compte la qualité nutritionnelle des aliments ultratransformés, trop gras, trop salés ou trop sucrés.

D’autres pays européens avaient déjà franchi le pas, mais la France, pourtant pionnière sur le sujet avec le Nutri-score, non ; silence radio. Enfin, pas tout à fait « silence radio », car, ici même, dans cet hémicycle, la ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, Annie Genevard, avait publiquement assumé avoir bloqué la publication de cet arrêté…

Je m’interroge donc : un blocage au bénéfice de qui ? Certainement pas des consommateurs, qui attendent une information plus fiable sur les aliments qu’ils consomment. Certainement pas non plus des entreprises qui jouent la transparence et qui essaient d’être plus vertueuses. Certainement pas, enfin, de nos politiques publiques de santé et de prévention, qui ont fixé l’obésité comme grande cause nationale de l’année 2026.

Le 14 mars dernier, enfin, l’arrêté a été publié. C’est une avancée.

Toutefois, je le dis, cette victoire est entachée par le temps perdu et par cette nouvelle démonstration du poids des lobbys agroalimentaires sur les décisions publiques.

Madame la ministre, il est urgent que le Gouvernement affirme son indépendance et mette tout en œuvre pour rendre le Nutri-score obligatoire. Chaque recul face aux intérêts privés sape la crédibilité de nos institutions et freine des mesures pourtant essentielles pour la santé publique. Quelles garanties donnez-vous aujourd’hui pour que ces pressions n’entravent plus jamais les politiques de santé publique ? Quand la santé des Français passera-t-elle enfin avant les intérêts des géants de l’industrie ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de lemploi. Madame la sénatrice Guhl, je vous confirme que les ministres Yannick Neuder, Catherine Vautrin, Annie Genevard, Éric Lombard et Véronique Louwagie ont bien signé cet arrêté le 14 mars dernier.

Un Français sur deux est atteint d’obésité ou de surpoids aujourd’hui. Par conséquent, promouvoir une alimentation équilibrée est indispensable : il s’agit d’une priorité de santé publique, notamment pour prévenir les maladies chroniques.

Depuis 2017, le Nutri-score constitue un outil de santé publique, qui permet d’éclairer le choix des consommateurs.

Dans le cadre de la gouvernance transnationale européenne, un comité scientifique d’experts indépendants a mené une évaluation complète des modalités de calcul du système, pour proposer des évolutions fondées sur des données scientifiques et des contributions des parties prenantes.

Les évolutions prévues pour cet arrêté permettent notamment d’améliorer la différenciation entre les aliments selon leur teneur en sel et en sucre, et la distinction entre les aliments complets riches en fibres et leurs substituts raffinés ou transformés. Elles améliorent en outre la classification des poissons gras et des huiles moins riches en acides gras saturés, ainsi que la différenciation entre les boissons selon leur teneur en sucre, tout en prenant en compte la présence d’édulcorants, afin de limiter leur usage en substitution du sucre.

Le ministre chargé de la santé vous confirme l’attention toute particulière qu’il accorde à la santé des Français via leur alimentation. Notons tout de même que l’arrêté relatif au Nutri-score contient des évolutions notables par rapport à la version initiale de 2017.

difficultés des missions locales dans la région normandie

M. le président. La parole est à M. Didier Marie, auteur de la question n° 399, adressée à Mme la ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi.

M. Didier Marie. Madame la ministre, les missions locales jouent un rôle essentiel dans nos territoires, crucial pour l’accompagnement social et professionnel des jeunes de 16 à 25 ans. Elles permettent le déploiement de politiques déployées par le tissu local, mais surtout la mise en œuvre de dispositifs de l’État, en premier lieu le contrat d’engagement jeune.

Ce dispositif, dont le déploiement s’est accompagné de financements supplémentaires en direction des associations, a conduit ces dernières à recruter de nouveaux collaborateurs pour répondre à l’augmentation du nombre de bénéficiaires accueillis et accompagnés.

À ce stade, les missions locales normandes n’ont pas de confirmation précise sur les financements de l’État pour l’année 2025, à l’exception d’une information transmise par la direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Dreets) de Normandie, qui leur a annoncé une éventuelle baisse de 5,9 % de leur dotation.

Cette situation place les missions locales normandes dans une incertitude qui complique la planification de leurs actions et menace la pérennité de leurs missions.

De plus, cette baisse intervient dans un contexte de hausse du taux de chômage des jeunes en Normandie. Au troisième trimestre de 2024, ce taux a atteint 7,2 %, ce qui représente une augmentation de 8,3 % du nombre de demandeurs d’emploi de moins de 25 ans sur un an. Dans ce contexte, il paraît crucial de renforcer les actions des missions locales, qui anticipent une augmentation du nombre de jeunes accueillis cette année.

Madame la ministre, quelles mesures compte prendre le Gouvernement pour pérenniser l’action des missions locales et leur permettre ainsi de poursuivre l’accompagnement des jeunes vers l’emploi ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de lemploi. Monsieur le sénateur Didier Marie, j’ai eu l’occasion d’effectuer plusieurs déplacements à Noyon, Hem, à Douai, mais aussi en Normandie, où j’ai pu rencontrer les missions locales.

Je rappelle que le financement de ces structures par l’État s’est nettement accru au cours des dernières années. Certes, il s’est réduit de 5,8 % cette année, mais il reste supérieur de 27 % à celui qui avait été fixé il y a quatre ans.

Je rappelle également que les effectifs des missions locales à l’échelon national ont augmenté de 20 % à 25 % depuis sept ans. Cette mesure d’économie est assortie du report, de 2025 à 2026, d’une partie des versements, compte tenu du niveau de trésorerie constaté et en veillant à tenir compte de la situation financière des structures au cas par cas, notamment en milieu rural.

Monsieur le sénateur, je vous confirme que ces versements ont pu être réalisés à la fin du mois de mars, ce qui a permis de sécuriser la trésorerie des missions locales en début de gestion. Les soldes au titre du contrat d’engagement jeune ont quant à eux bien vocation à être versés ce mois-ci.

J’ai des contacts très réguliers avec le président et le directeur de l’Union nationale des missions locales (UNML), notamment pour évoquer les irritants du quotidien, en particulier la charge que les reportings représentent et sur lesquels il nous faut collectivement nous améliorer.

Notre soutien est exigeant. À mon sens, il faut aujourd’hui réfléchir non pas simplement au nombre d’entrées dans le dispositif du contrat d’engagement jeune, mais aussi à la qualité de la sortie.

Je tiens à rappeler quelques chiffres : alors que 200 000 contrats d’engagement jeune sont suivis par les missions locales, contre 85 000 par France Travail, le taux de sortie est aujourd’hui d’environ 45 % en emploi et de 30 % en emploi durable.

Il est donc nécessaire de sortir aujourd’hui d’une logique d’entrées et de donner à l’ensemble des acteurs la capacité de créer des solutions structurantes positives pour nos jeunes.

M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Il s’agit d’un changement absolument essentiel de logiciel, pour nous tous.

M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour la réplique.

M. Didier Marie. Madame la ministre, si vous rappelez l’augmentation des moyens de l’État, il faut alors aussi rappeler que cela correspondait à une commande de ce dernier.

En outre, la baisse de 5,8 % des moyens des missions locales, que vous venez de confirmer, s’ajoute à la baisse des crédits des collectivités. En Normandie, cela représente 180 000 euros de moins pour l’ensemble du réseau.

Face à la montée du chômage des jeunes et à leurs difficultés d’insertion, réduire les moyens financiers de ces organismes revient à fragiliser leurs capacités d’action. Qui plus est, cela va malheureusement à l’encontre des politiques publiques d’insertion, que nous souhaitons tous mettre en œuvre.

financement et avenir des hôpitaux publics en seine-saint-denis

M. le président. La parole est à M. Adel Ziane, auteur de la question n° 417, adressée à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins.

M. Adel Ziane. Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur la situation très préoccupante des hôpitaux en Seine-Saint-Denis. Ce département, dont je suis l’élu, qui est à la fois le plus jeune et le plus pauvre de France métropolitaine, cumule de lourdes inégalités. Pourtant, l’accès aux soins continue de s’y dégrader.

Le groupement hospitalier de territoire Grand Paris Nord-Est, qui réunit les hôpitaux d’Aulnay-sous-Bois, du Raincy-Montfermeil et de Montreuil, incarne les contradictions de notre politique de santé. Malgré des indicateurs alarmants, ces établissements restent financièrement fragiles, surtout depuis la crise du covid-19.

Dans ce contexte déjà tendu, un plan de 590 millions d’euros a été lancé, avec des investissements importants, comme la reconstruction de l’hôpital du Raincy-Montfermeil. Toutefois, ce plan repose sur un emprunt de plus de 200 millions d’euros, que les hôpitaux ne peuvent assumer sans mettre en danger leur fonctionnement.

Un tel niveau d’endettement empêche les hôpitaux de remplir leurs missions, à savoir maintenir les services, investir dans le matériel, offrir des conditions dignes de travail et garantir l’accès aux soins. Les conséquences sont déjà visibles : à Aulnay-sous-Bois, le service de diabétologie a fermé, alors qu’il répondait à un besoin crucial chez les plus modestes.

Les syndicats hospitaliers, notamment la CGT 93, tirent la sonnette d’alarme depuis plusieurs mois. Ils dénoncent ce projet comme étant une régression sociale, tant pour le personnel que pour les usagers, et appellent à une réponse de l’État fondée sur l’égalité républicaine, non sur une logique purement comptable.

Madame la ministre, quelles garanties pouvez-vous apporter pour que la transformation du service hospitalier ne se traduise pas mécaniquement par des suppressions de services, par une perte d’attractivité pour les professionnels et, à la fin, par un recul de l’accès aux soins pour les habitants ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de lemploi. Monsieur le sénateur Adel Ziane, la situation des établissements composant le groupement hospitalier de territoire (GHT) Grand Paris Nord-Est constitue un enjeu majeur pour l’ARS d’Île-de-France. Les trois établissements s’inscrivent dans des dynamiques contrastées, qui sont plus ou moins dégradées.

Le plan de transformation de ce GHT, lancé en 2019, comprend plusieurs opérations, dont la principale est la reconstruction de l’hôpital du Raincy-Montfermeil. Il prévoit également d’autres investissements majeurs pour le territoire, comme le projet de campus hospitalo-universitaire Grand Paris Nord, la rénovation de l’établissement public de santé de Ville-Évrard ou encore des actions relatives aux déterminants de santé ou incitatives pour la démographie des professionnels de santé.

Ce sont autant de démarches qui contribuent, comme vous l’appelez de vos vœux, à renforcer l’accès aux soins sur ce territoire et à tenir la promesse républicaine. J’ai déjà répondu ce matin à une question relative à la sécurité prénatale, qui constitue également un très grand enjeu dans le département dont vous êtes l’élu.

Afin d’assurer la pérennité financière du programme d’investissement, un ambitieux plan de financement 2024-2034 prévoit un recours à l’emprunt à hauteur de 217 millions d’euros, ainsi que des aides en capital à hauteur de 339 millions d’euros et un autofinancement de 21 millions d’euros par cession. Des aides régionales en exploitation sont également mobilisées pour un montant de 47 millions d’euros, afin de sécuriser la trésorerie.

Dans le cadre de la fusion administrative des trois établissements, prévue au 1er janvier 2026 et qui permettra de mutualiser des coûts de structure, l’ARS d’Île-de-France poursuivra le suivi régulier et l’accompagnement de ce projet ; le ministre de la santé y veillera tout particulièrement. Seront également associés tous les élus des territoires mobilisés sur ce projet.

M. le président. La parole est à M. Adel Ziane, pour la réplique.

M. Adel Ziane. Madame la ministre, j’entends votre réponse. J’insiste sur les difficultés et les dangers que représente cet emprunt de 200 millions d’euros pour le secteur hospitalier.

Dans un territoire comme la Seine-Saint-Denis, marqué par des besoins de santé considérables et une forte pression sur les établissements, toute mesure doit s’accompagner de garanties solides. L’objectif partagé doit rester l’amélioration de l’accès aux soins, dans des conditions soutenables pour les établissements comme pour les professionnels de santé.

Nous resterons attentifs à la manière dont les mesures évoquées seront concrètement mises en œuvre.

hommage national en mémoire des victimes du covid-19

M. le président. La parole est à M. Cédric Chevalier, auteur de la question n° 419, transmise à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins.

M. Cédric Chevalier. Madame la ministre, je veux vous parler ce matin de Lionel Petitpas.

Le 29 mars 2020, au tout début de la crise sanitaire, cet habitant de la Marne a perdu son épouse, emportée par le covid-19. Face à cette tragédie, au lieu de se replier dans la douleur comme tant d’autres, il a fait le choix de l’action, en créant l’association Victimes du covid-19, dont l’objectif est d’honorer la mémoire de ceux qui ont succombé au virus et d’offrir à leurs proches un lieu de recueillement.

Depuis lors, à Cormontreuil – sa commune –, mais aussi à Châlons-en-Champagne ou, plus récemment, à Taissy et à Reims, cet homme de 73 ans s’est engagé sans relâche pour convaincre les collectivités de mettre en place des lieux de mémoire : stèles, arbres, plaques commémoratives. Chaque installation a donné lieu à des hommages locaux, empreints d’émotion et de dignité.

Aujourd’hui, je souhaite appeler votre attention sur son combat et sur la nécessité de prévoir un hommage national à la mémoire des victimes de la pandémie de covid-19, une crise qui a profondément marqué notre pays.

Rappelons-nous : le 17 mars 2020, la France est entrée dans un premier confinement strict, bouleversant le quotidien de tous nos concitoyens. Cette date, devenue le symbole d’un bouleversement sanitaire, social et humain sans précédent, marque cette année son cinquième anniversaire.

Durant cette période sombre, des milliers de familles ont été endeuillées, souvent dans des conditions particulièrement cruelles : sans adieux, sans cérémonie, sans possibilité d’accompagner leurs proches dans leurs derniers instants.

Au-delà de la souffrance causée par la maladie, l’isolement dans la mort et la privation de rituels essentiels au deuil ont laissé des cicatrices profondes. Aujourd’hui encore, beaucoup ressentent le besoin d’un moment de reconnaissance collective, d’un temps de mémoire pour apaiser les douleurs et tourner une page douloureuse de notre histoire commune.

Certes, d’autres urgences occupent désormais l’agenda politique, mais il paraît indispensable qu’un hommage national puisse être institué, afin que la Nation dans son ensemble puisse se recueillir. Un tel moment, empreint de solennité et de respect, permettrait non seulement d’honorer les disparus, mais aussi d’apporter un soutien symbolique aux familles qui restent. Il s’agirait non de rouvrir les débats ou les polémiques, mais d’affirmer l’importance du devoir de mémoire, du lien entre les générations et de notre capacité à nous rassembler dans les épreuves.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Cédric Chevalier. Dans cet esprit de reconnaissance et de solidarité, le Gouvernement entend-il inscrire cet hommage dans la durée, sous la forme d’un rendez-vous annuel de mémoire nationale, afin de permettre aux Français de se souvenir, ensemble, des vies brisées par cette pandémie ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de lemploi. Monsieur le sénateur Cédric Chevalier, votre question nous rappelle que nous sommes entrés dans une nouvelle ère, celle des chocs externes : crises sanitaires, à l’image du covid-19, mais également chocs géopolitiques ou inflationnistes, à l’image de l’augmentation des prix alimentaires et énergétiques à laquelle nous assistons aujourd’hui. Tout cela nous oblige à nous poser la question fondamentale de la résilience nationale.

Votre proposition, consistant à instaurer un hommage national annuel aux victimes de la pandémie du covid-19, touche à un sujet essentiel : la mémoire collective. Nous nous souvenons tous de l’endroit où nous étions quand le Président de la République a annoncé le confinement et que le pays s’est arrêté. Vous l’avez rappelé, des familles ont perdu des proches sans pouvoir leur dire adieu, ce qui a provoqué des traumatismes intimes et collectifs, qui appellent un geste fort de la République.

Un hommage solennel, inscrit durablement dans notre calendrier républicain, serait un acte de reconnaissance, d’unité et de résilience nationales. Il pourrait rassembler autour de notre histoire récente nos douleurs partagées et, surtout, ce que nous avons appris ensemble. Ce serait également une manière de réaffirmer le rôle de l’État, en particulier de nos élus placés en première ligne – je pense aux maires –, comme garants du lien social et de la mémoire nationale.

Cette mémoire ne doit pas être figée, elle doit aussi nous permettre de tirer des leçons pour améliorer notre capacité à affronter les chocs externes.

Sur votre proposition d’instaurer une journée nationale d’hommage, je ne peux répondre ni m’engager formellement au nom du Gouvernement. En revanche, je peux vous dire que le Gouvernement souhaite qu’un débat puisse se tenir sur ce sujet.

Cette question mérite une réflexion collective, digne, à la hauteur de l’impact qu’a eu la pandémie sur notre société. C’est dans cet esprit d’écoute et de dialogue qu’il appelle à l’engagement de cette discussion, afin d’examiner avec vous les formes de reconnaissance et de mémoire les plus justes et les plus à même de nous rassembler.

délai de traitement des dossiers par la maison départementale des personnes handicapées 92

M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, auteure de la question n° 421, adressée à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée de l’autonomie et du handicap.

Mme Marie-Do Aeschlimann. Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur les graves difficultés que connaît la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) du département dont je suis élue, les Hauts-de-Seine, et sur la détresse de ses usagers.

Alors que le délai d’instruction d’un dossier ne devrait officiellement pas excéder quatre mois, il a atteint à la MDPH des Hauts-de-Seine, lors du troisième trimestre de 2024, huit mois et demi en moyenne, et parfois même plus de douze mois !

Ces délais de traitement excessifs résultent de moyens notoirement insuffisants. Pour fonctionner correctement, la structure devrait compter quinze médecins ; or ils ne sont que dix…

Des opérations « coup de poing » ont été menées pour absorber les dossiers en attente, au détriment des rendez-vous et des visites à domicile. Forcément, la satisfaction des usagers a chuté, passant de 70 % en 2022 à 44 % en 2023. En outre, les conditions de travail du personnel se dégradent.

Vendredi dernier, lors d’un déplacement dans les Hauts-de-Seine consacré au sujet de la simplification administrative, le Premier ministre a rappelé que les familles confrontées au handicap faisaient face à un « parcours du combattant » et a souligné l’ardente nécessité qui s’impose aux pouvoirs publics : réduire la complexité administrative, afin de rendre effectif l’accès aux droits.

Madame la ministre, à l’heure où nous célébrons les 20 ans de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, dite loi Handicap, envisagez-vous un plan d’urgence permettant de garantir un meilleur fonctionnement de la maison départementale des personnes handicapées des Hauts-de-Seine, afin d’éviter à nos concitoyens en situation de handicap de subir une double peine ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de lemploi. Madame la sénatrice Aeschlimann, depuis leur création en 2006, les MDPH ont vu leur activité tripler. Cette tendance se poursuit, d’où une forte augmentation du nombre de dossiers à traiter.

En 2023, la MDPH des Hauts-de-Seine a ainsi enregistré une augmentation du nombre de demandes de plus de 25 % par rapport à 2022. Le nombre de postes budgétaires a connu, parallèlement, une augmentation progressive, mais les recrutements sur les postes vacants restent difficiles. L’équipe pluridisciplinaire d’évaluation, qui représente 59 % des postes budgétaires, est particulièrement touchée par ces difficultés de recrutement.

Bien que la réglementation impose de traiter les dossiers en quatre mois au maximum, ce qui est déjà long, le délai national moyen de traitement s’élevait à 4,7 mois au deuxième trimestre 2024, avec des écarts importants selon les territoires et la complexité des dossiers ; les dossiers relatifs à la prestation de compensation du handicap (PCH), par exemple, nécessitent un traitement pouvant durer jusqu’à 5,9 mois. On se demande comment font les familles pendant ce temps : s’arrêtent-elles de travailler ou s’endettent-elles pour pouvoir rester auprès des personnes vulnérables, en attendant la réponse des MDPH, même si les prestations sont rétroactives ?

L’État tente de répondre à ces défis. En vertu de la loi du 14 décembre 2020 de financement de la sécurité sociale pour 2021, 15 millions d’euros supplémentaires par an ont été alloués aux MDPH. Un décret du 29 juin 2021 garantit ainsi un niveau supplémentaire de financement d’au moins 10 % pour chaque MDPH. Des actions sont également menées pour réduire les délais et améliorer la qualité du service, notamment au travers de la garantie délai.

Objectivement, cela n’est pas suffisant, mais en 2025 la MDPH des Hauts-de-Seine devrait profiter de ces mesures pour optimiser son fonctionnement.

La réduction des délais et l’amélioration de l’équité de traitement restent des priorités du Gouvernement. Des simplifications du parcours sont en cours d’étude, ainsi que le Premier ministre l’a indiqué lors de son déplacement dans votre département, madame la sénatrice.

M. le président. Il faut conclure, madame la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Une force opérationnelle, ou task force, a été constituée pour traiter ce sujet. Compte tenu de l’importance de la question des délais pour les familles, je vous propose de poursuivre cette discussion ultérieurement, madame la sénatrice.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour la réplique.

Mme Marie-Do Aeschlimann. Madame la ministre, je prends acte de ces bonnes nouvelles. Je connais votre attention et votre mobilisation sur ce sujet. C’est avec plaisir que je viendrai vous voir pour faire avancer ce dossier.

situation particulière des assistants familiaux recrutés par les départements

M. le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, auteure de la question n° 423, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.

Mme Laurence Muller-Bronn. Madame la ministre, ma question concerne la situation des assistants familiaux employés par les départements et qui demandent la rupture de leur contrat de travail.

De plus en plus d’assistants familiaux sollicitent le retrait de leur agrément par les services du département, dans la perspective de rompre leurs contrats de travail, afin de pouvoir bénéficier d’indemnités de licenciement et des allocations d’assurance chômage.

Dans les faits, le retrait de l’agrément constitue aujourd’hui le seul moyen de rompre lesdits contrats de travail. Certes, il n’ouvre pas droit au versement d’une indemnité de licenciement, mais il permet de percevoir les allocations de retour à l’emploi.

Ce procédé place les départements dans une situation confuse et surtout contraire à leur mission.

Dans un jugement du 6 octobre 2023, le tribunal administratif de Melun a considéré que le courrier envoyé par un assistant familial dans lequel celui-ci ne renonce qu’à son agrément ne peut être considéré comme une lettre de démission.

Toutefois, dès lors que le département fait droit à la demande de l’assistant familial et retire son agrément, ce qu’il n’est pas tenu de faire, il doit procéder, comme employeur, en vertu de l’article L. 423-8 du code de l’action sociale et des familles, au licenciement de l’intéressé. Il s’agit alors d’une rupture du contrat de travail sur l’initiative de l’employeur, qui ouvre droit aux indemnités.

Face aux demandes de plus en plus fréquentes de ce type, les départements ont deux options : soit ils refusent la demande de retrait de l’agrément, au risque de mettre en péril l’accueil des mineurs par l’assistant familial forcé de poursuivre son travail ; soit ils procèdent au retrait de l’agrément, ce qui entraîne le licenciement du demandeur.

Or, dans ce cas, les départements employeurs doivent, d’une part, respecter la procédure de licenciement, qui implique la saisine de la commission consultative paritaire et, d’autre part, verser une indemnité de licenciement ainsi que, le cas échéant, des allocations de retour à l’emploi.

Ainsi, en l’état actuel des textes et de la jurisprudence, un assistant familial souhaitant démissionner peut demander le retrait de son agrément pour bénéficier ensuite de l’ensemble des droits liés au licenciement.

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Laurence Muller-Bronn. Madame la ministre, quelles décisions envisagez-vous de prendre pour clarifier cette situation ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de lemploi. Madame la sénatrice Muller-Bronn, l’agrément d’un assistant familial peut être retiré si les conditions de son octroi cessent d’être remplies. Ces conditions sont les suivantes : présenter les garanties nécessaires pour accueillir des mineurs dans des conditions propres à assurer leur développement physique, intellectuel et affectif ; passer un examen médical ayant pour objet de vérifier que son état de santé lui permet d’accueillir habituellement des mineurs ; disposer d’un logement.

Si ces conditions ne sont plus remplies, le président du conseil départemental peut procéder au retrait de l’agrément après avis de la commission consultative. Cette décision doit être motivée et collégiale, et elle est susceptible de recours. L’assistant familial qui fait l’objet d’un retrait d’agrément ne peut plus exercer sa profession et ses employeurs doivent alors le licencier.

Le souhait d’un assistant familial de se voir retirer son agrément ne constitue pas un motif légitime de retrait d’agrément. L’assistant familial ne peut être à l’initiative d’un retrait d’agrément, et il ne peut être mis fin au contrat que par rupture conventionnelle ou par démission.

Madame la sénatrice, le Gouvernement est conscient des difficultés que les départements rencontrent dans ces situations. Cette question sera soulevée dans le cadre de travaux à venir sur les assistants familiaux, afin d’envisager une évolution de la réglementation. En effet, le Gouvernement envisage de lancer, au cours du semestre en cours, une concertation avec les départements et les associations professionnelles, afin d’identifier des réponses concrètes et opérationnelles aux besoins des assistants familiaux.

protection de l’enfance

M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, auteure de la question n° 296, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.

Mme Michelle Gréaume. Madame la ministre, plusieurs événements tragiques récents ont mis en lumière la situation dramatique, les failles et les dysfonctionnements de notre système de protection de l’enfance.

Je pense d’abord au procès du drame d’Amandine, jeune fille de 13 ans morte de faim et à la suite des mauvais traitements infligés par sa mère. Comment un tel drame a-t-il pu se produire malgré les signalements répétés aux services sociaux ? Pourquoi l’État n’a-t-il pas pu ou su protéger cette enfant ? Je pense ensuite à l’affaire Le Scouarnec. Comment un ex-chirurgien, accusé de viols et d’agressions sexuelles sur près de 300 victimes, a-t-il pu passer aussi longtemps sous les radars ?

Ces questions nous amènent tous à nous interroger. Depuis des années, magistrats, professionnels, élus et familles d’accueil tirent la sonnette d’alarme pour appeler notre attention sur l’état de la protection de l’enfance.

En octobre 2024, le Conseil économique, social et environnemental (Cese) a confirmé ce diagnostic alarmant. Le 28 janvier dernier, la Défenseure des droits a également dénoncé la dégradation préoccupante de la protection de l’enfance, soulignant que cette situation portait atteinte à l’intérêt supérieur et aux droits fondamentaux des enfants.

Près de 400 000 mineurs ou jeunes majeurs sont pris en charge par l’aide sociale à l’enfance (ASE), mais celle-ci peine à leur apporter la protection et l’aide nécessaires. Quelque 30 000 postes sont vacants dans les établissements du secteur médico-social, et 70 % des juges interrogés déclarent avoir déjà renoncé à placer des enfants faute de solution adéquate. En outre, l’accès aux soins n’est pas pleinement garanti.

Les départements, étranglés financièrement par les baisses de dotations et les transferts de charges non compensés, peinent à assumer leurs responsabilités en la matière.

La responsabilité de l’État, qui ne dispose même plus d’un ministère de plein exercice dédié à cette cause, est flagrante. L’obsession sécuritaire à l’encontre des mineurs a pris le pas sur la responsabilité de protéger les plus faibles, en particulier les enfants.

Madame la ministre, quelles dispositions le Gouvernement compte-t-il prendre pour garantir à chaque enfant la protection à laquelle il a droit ? Quels moyens humains et financiers seront consacrés à cette mission essentielle ?

M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Michelle Gréaume. Quelles suites comptez-vous donner aux recommandations de la Défenseure des droits ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de lemploi. Madame la sénatrice Michelle Gréaume, vos propos illustrent l’urgence de la refondation profonde du système de l’aide sociale à l’enfance. On ne peut plus continuer comme cela.

Le Gouvernement a décidé d’agir en mettant l’accent sur le renforcement de la prévention et le soutien à la parentalité. À titre personnel, j’insiste sur le rôle des pères, car les mères sont souvent laissées en première ligne.

Un plan de prévention périnatale sera déployé, incluant un accompagnement à domicile et une contractualisation avec les départements. L’objectif est de soutenir de manière ciblée les familles en difficulté, qu’il est nécessaire de mieux identifier. Nous devons absolument éviter que des situations de vulnérabilité ne débouchent sur des placements d’enfants.

Parallèlement, à court terme, nous renforçons les mesures de sécurisation et améliorons les conditions de placement, dont chacun connaît les limites.

Il nous faut également assurer un meilleur suivi des enfants confiés à l’ASE, ce qui passe par des contrôles accrus des établissements médico-sociaux et des évaluations rigoureuses. Il faut notamment revoir les normes d’accueil applicables aux pouponnières, au sujet desquelles certains témoignages sont terrifiants.

Dans le domaine de la santé, un bilan psychologique et somatique sera systématiquement réalisé dès la prise en charge des enfants, conformément au souhait de Mme Vautrin.

Le placement à dimension familiale doit être privilégié pour offrir aux enfants un environnement stable et chaleureux. Nous devons poursuivre la simplification des démarches permettant de recruter des assistants familiaux. La révision des modalités d’adoption complétera également cette démarche, afin de sécuriser durablement le parcours des enfants vulnérables.

Il est indispensable de repenser la gouvernance pour assurer une coordination optimale des actions. Un comité des financeurs en lien avec les départements se tiendra à la fin du mois d’avril, et le comité interministériel à l’enfance réunira, durant l’été, les ministères de la justice, de l’éducation nationale, des familles et de la santé.

Le Gouvernement mesure la gravité et l’urgence de la situation.

M. le président. Il faut conclure, madame la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Nous nous engageons à mobiliser l’ensemble des moyens humains et financiers nécessaires pour améliorer les choses.

conséquences de la réduction des contrats « parcours emploi compétences » pour les collectivités territoriales

M. le président. La parole est à Mme Amel Gacquerre, auteure de la question n° 447, transmise à Mme la ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi.

Mme Amel Gacquerre. Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur l’annonce de la réduction drastique du nombre des contrats aidés « parcours emploi compétences » (PEC) au sein des collectivités territoriales.

Depuis le 1er janvier 2018, les contrats aidés dans les collectivités et associations ont été transformés en PEC, afin de faciliter l’insertion professionnelle des personnes les plus éloignées de l’emploi. Pour des milliers de citoyens, ces contrats représentent encore aujourd’hui l’unique opportunité d’accéder à un emploi.

Ils sont essentiels pour permettre à de nombreuses associations, mairies, départements ou régions d’assurer des missions indispensables de service public. Ils concernent des milliers d’agents d’accueil, de restauration scolaire, de service technique, qui agissent au plus près des habitants.

Ils constituent donc un outil majeur pour les collectivités territoriales, notamment rurales, dont les marges de manœuvre sont financièrement restreintes, alors que les besoins de service public n’ont jamais été aussi importants.

Malgré cela, on constate depuis plusieurs années une réduction significative du nombre de contrats PEC à l’échelle nationale. En 2023, leur nombre a diminué de 25 %, soit de 31 700 contrats, par rapport à 2022.

Cette dynamique baissière est observable dans le Pas-de-Calais, le département dont je suis élue, alors même que le taux de chômage y est toujours supérieur à celui de la moyenne nationale. Par exemple, un maire m’a interpellée il y a quelques jours, car en 2025 le nombre de nouveaux contrats PEC a baissé de 75 % dans sa commune.

Madame la ministre, le maintien du nombre de PEC étant indispensable pour assurer la continuité des services publics, quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour soutenir les collectivités territoriales face à l’annonce de leur réduction brutale et sévère ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de lemploi. Madame la sénatrice Gacquerre, je le répète, en ce qui concerne les politiques d’insertion dans l’emploi, il faut sortir d’une logique d’entrée pour adopter une logique de sortie et s’assurer d’un meilleur accompagnement des personnes.

Je tiens à rappeler les chiffres. Sans même parler d’emploi durable, à la sortie des contrats aidés, 54 % des personnes trouvent un emploi, avec une forte différence entre le secteur marchand et le secteur non marchand ; en effet, plus on est proche de l’entreprise, plus les chances de trouver un emploi sont fortes. Ce taux atteint 45 % pour l’insertion par l’activité économique (IAE), et 52 % pour les contrats d’engagement jeune.

Plutôt que de toujours adopter des logiques attachées à l’entrée dans les dispositifs, qui ne permettent pas toujours de répondre aux questions, il faut regarder ces chiffres.

Dans le cadre d’une réduction des crédits de la mission « Travail, emploi et administration des ministères sociaux », j’ai souhaité améliorer les solutions structurantes de sortie et l’accompagnement. Je ne sous-estime pas la difficulté de l’équation budgétaire des collectivités territoriales, mais, en tant que ministre chargée du travail et de l’emploi, je dois d’abord m’occuper de la logique d’accompagnement de ces personnes qui cherchent un emploi.

Cette année, j’ai souhaité laisser aux préfets beaucoup plus de souplesse pour leur permettre de répartir les moyens entre l’insertion par l’activité économique, les entreprises adaptées et les contrats aidés. Plutôt que d’obéir à des ordres venus de Paris, ils doivent décider en fonction des acteurs présents sur les territoires, qui peuvent localement améliorer les politiques d’accompagnement.

Encore une fois, sortons de la logique centrée sur les entrées, qui consiste à comptabiliser le nombre d’emplois aidés, pour regarder combien de personnes sortent avec un emploi durable des emplois aidés, de l’insertion par l’activité économique ou des contrats d’engagement jeune. C’est ainsi que nous répondrons au défi de l’emploi des personnes les plus éloignées du monde du travail et de nos jeunes.

M. le président. La parole est à Mme Amel Gacquerre, pour la réplique.

Mme Amel Gacquerre. Madame la ministre, je vous remercie de vos explications.

Toutefois, alors que je vous parle de personnes très éloignées de l’emploi et d’enjeux de service public, vous me répondez en évoquant les logiques d’entrée et de sortie. Il faut certes réfléchir à cette question, mais sur le terrain il y a un véritable enjeu : si ces personnes ne sont pas accompagnées et recrutées au sein de nos collectivités ou d’associations, elles ne trouvent pas d’emploi.

prise en charge des détenus en établissement de santé psychiatrique

M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, auteur de la question n° 441, adressée à M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l’accès aux soins.

M. Franck Menonville. Madame la ministre, ma question porte sur la sécurité du personnel soignant lors des transfèrements de détenus vers les établissements psychiatriques.

Les troubles psychiatriques sont trois fois plus élevés parmi la population carcérale que dans le reste de la population. De ce fait, la prise en charge médicale de ces patients au statut particulier est cruciale.

Si les détenus bénéficient systématiquement d’escortes sécurisées lors de consultations hospitalières conventionnelles, il n’en va pas de même lorsqu’ils présentent des troubles psychiatriques nécessitant une hospitalisation.

Lorsqu’il signe un arrêté de soins sans consentement sur décision d’un représentant de l’État (SDRE), le préfet détermine la nature de l’escorte et, force est de le constater, les soignants sont très fréquemment contraints d’assurer le transport de ces patients, s’exposant ainsi à des risques majeurs pour leur sécurité.

En outre, en cas d’hospitalisation, un transfert de responsabilité s’opère entre le directeur de l’établissement pénitentiaire et celui du centre hospitalier. Le détenu devenu patient dispose de droits régis par le code de la santé publique et non plus par le code pénitentiaire.

Néanmoins, aucune information relative à la nature de la détention ou à la dangerosité des individus n’est communiquée aux personnels de santé. Ainsi, dans un contexte tendu, alors que l’hôpital public est déjà confronté à des problèmes de recrutement et de sous-effectif, la dangerosité particulièrement élevée de ce type d’opérations se révèle de plus en plus préoccupante.

Madame la ministre, le personnel soignant a besoin d’être rassuré. Quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour renforcer leur sécurité tant lors des transfèrements qu’au cours de l’hospitalisation en psychiatrie des détenus ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de lemploi. Monsieur le sénateur Franck Menonville, vous m’interrogez sur la sécurité des soignants au contact de détenus qui nécessitent un suivi psychiatrique.

Dans le cadre de la dernière feuille de route Santé des personnes placées sous main de justice, une action est consacrée à « l’amélioration du parcours de soins en santé mentale sur […] trois niveaux ».

Vous le savez, bien que la prise en charge des personnes détenues nécessitant des soins psychiatriques sans consentement en hospitalisation complète soit en priorité orientée vers des unités d’hospitalisation spécialement aménagées (UHSA), un grand nombre d’entre elles fait l’objet d’une prise en charge dans d’autres services au sein d’établissements de santé autorisés en psychiatrie.

Cela nous a conduits à publier, à l’automne dernier, un guide de bonnes pratiques pour la prise en charge en établissement de santé autorisé en psychiatrie des personnes détenues hospitalisées en soins sans consentement.

Ce guide a été réalisé en étroite concertation avec tous les professionnels, notamment les représentants de l’Association des secteurs de psychiatrie en milieu pénitentiaire (ASPMP), des membres de la commission nationale de psychiatrie (CNP) et de la sous-commission psychiatrie médico-légale, des représentants de l’association des établissements du service public de santé mentale (ADESM).

Il permet d’accompagner les professionnels et les directions hospitalières des établissements autorisés en psychiatrie amenés à prendre en charge des patients détenus, en apportant des réponses concrètes à chacune des difficultés rencontrées. Il rappelle notamment les règles applicables en matière d’escorte, ainsi que les modalités d’application des droits fondamentaux des patients.

Parallèlement, le ministre de la santé copilote avec le ministre de la justice le déploiement de la seconde tranche des UHSA, avec la construction de trois nouvelles unités. Celles-ci permettront la création de 160 lits supplémentaires, s’ajoutant aux 440 lits déjà existants.

Enfin, il faut souligner les travaux parlementaires sur ce sujet. La mission d’évaluation de la prise en charge des troubles psychiques des personnes placées sous main de justice, dont Mmes Josiane Corneloup et Élise Leboucher sont les rapporteures, permettra aussi d’appuyer l’action de l’État.

aide au financement du permis de conduire pour les apprentis de moins de 18 ans

M. le président. La parole est à M. Yves Bleunven, auteur de la question n° 334, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.

M. Yves Bleunven. Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur une incohérence réglementaire qui pénalise nos jeunes apprentis.

Depuis le 1er janvier 2024, le permis de conduire est accessible dès 17 ans. C’est une avancée, mais, dans le même temps, le décret du 3 janvier 2019 relatif à l’aide au financement du permis de conduire pour les apprentis réserve cette aide aux apprentis de 18 ans révolus. Résultat : un apprenti de 17 ans peut passer le permis, mais ne peut pas bénéficier de l’aide prévue à cet effet.

Madame la ministre, envisagez-vous d’étendre cette aide, dans un souci d’équité et de cohérence, aux apprentis de 17 ans, afin que ceux-ci puissent eux aussi accéder à l’autonomie que donne le permis de conduire ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de lemploi. Monsieur le sénateur Bleunven, la question des transports, fondamentale, constitue l’un des principaux freins à l’entrée de nos jeunes dans la vie active.

L’aide pour les apprentis majeurs inscrits dans une école de conduite pour la préparation des épreuves du permis de conduire est actuellement d’un montant forfaitaire de 500 euros. Elle est complétée par d’autres dispositifs existants déployés par plusieurs conseils régionaux et départementaux.

L’objectif de cette aide est de faciliter les déplacements des apprentis dans le cadre de leur formation pratique en apprentissage. Elle permet également de faciliter leur insertion professionnelle à la fin de leur contrat d’apprentissage.

Le Gouvernement examine actuellement l’opportunité d’élargir cette aide aux apprentis à partir de 17 ans. J’espère que cette anomalie pourra être corrigée. Si en principe cette extension permet de mieux sécuriser le parcours des plus jeunes apprentis, elle doit aussi être envisagée dans le cadre des difficultés budgétaires que nous connaissons.

Le sujet est essentiel pour permettre la mobilité des apprentis, notamment en milieu rural. Le Gouvernement sera très attentif sur ce sujet.

application de la nouvelle convention fiscale franco-luxembourgeoise

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, auteure de la question n° 430, adressée à Mme la ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics.

Mme Véronique Guillotin. Madame la ministre, en 2018 était signée la nouvelle convention fiscale entre la France et le Luxembourg. Son objectif était simple : éviter la double imposition, mais aussi lutter contre la fraude fiscale. Elle a été amendée à deux reprises, et son entrée en vigueur a été repoussée d’autant depuis sa signature.

Le ministre de l’époque, M. Bruno Le Maire, s’était engagé à effectuer une étude d’impact afin de mesurer ses effets sur le taux d’imposition des ménages concernés. Dernièrement, le Gouvernement a annoncé appliquer les dispositions de la convention fiscale sur les revenus de 2024, faisant naître de vives inquiétudes dans nos territoires.

En effet, les conséquences de cette réforme pour les contribuables frontaliers, particulièrement pour les retraités et ceux qui disposent de revenus mixtes, seraient loin d’être neutres. Par exemple, un couple aux revenus luxembourgeois et français qui payait 2 000 euros d’impôts par an pourrait voir son imposition monter à plus de 2 600 euros.

Il ne s’agit que de projections : je le répète, sans étude d’impact, l’application de cette convention fiscale conduit nos concitoyens à éprouver de légitimes appréhensions, car beaucoup d’entre eux n’ont pu anticiper la facture finale dans leur budget.

Dans la région dont je suis élue, le Grand Est, ce ne sont pas moins de 150 000 travailleurs frontaliers qui sont concernés. Dès 2018, à mes côtés, des parlementaires faisaient part de leurs inquiétudes sur les conséquences de cette convention. Plus récemment, le président de la région, Franck Leroy, et moi-même appelions votre attention dans le même sens, madame la ministre.

Madame la ministre, comptez-vous réaliser cette étude d’impact, afin que nous disposions d’une évaluation transparente avant que cette convention ne soit appliquée ? Comment comptez-vous rassurer les travailleurs frontaliers, qui sont inquiets ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics. Madame la sénatrice, cette nouvelle convention fiscale a modifié la manière dont est calculé l’impôt sur le revenu, afin d’éliminer les risques de double imposition pour les résidents de France qui perçoivent certains revenus de source luxembourgeoise, essentiellement les salaires et les revenus immobiliers.

Nous sommes passés d’un régime dit de l’exemption, ne permettant pas d’éviter d’éventuelles doubles exonérations, au régime que nous pratiquons avec de très nombreux pays voisins – l’Allemagne, la Suisse, l’Italie, l’Espagne ou le Royaume-Uni –, celui de l’imputation, qui prévoit que les revenus touchés au Luxembourg resteront exclusivement imposés au taux prévu par la législation luxembourgeoise.

Néanmoins, le passage d’une méthode à l’autre pourra avoir une incidence sur le taux d’imposition appliqué en France sur les autres revenus perçus en France.

La méthode précédemment utilisée limitait la progressivité de l’impôt appliqué aux revenus imposables en France. Sur ce point, la nouvelle convention créera de la justice entre nos concitoyens, puisqu’elle assurera que les revenus de source française des foyers qui perçoivent par ailleurs des revenus de source luxembourgeoise soient imposés au même taux que ceux des foyers qui, à montants équivalents, ne disposent que de revenus de source française. Il s’agit donc d’une réforme d’équité.

L’application pleine et entière de la convention permettra donc de rétablir l’égalité de traitement des frontaliers et des autres résidents.

Pour laisser le temps aux foyers de s’adapter, l’application de l’ancien système a été tolérée aux revenus perçus en 2020 et en 2021, puis en 2022 et en 2023. Après quatre ans de transition, la convention de 2018 s’appliquera pleinement aux revenus perçus à compter de 2024, donc dès maintenant.

Des mesures d’accompagnement des transfrontaliers sont toutefois prévues. Je pense notamment à l’ouverture d’un guichet spécial au sein de la direction départementale des finances publiques (DDFiP) de Moselle pour aider les contribuables à déterminer l’assiette imposable en France en application des nouvelles règles conventionnelles.

Mes services sont à l’entière disposition de ceux qui se poseront des questions. Il s’agit d’une réforme de justice fiscale qui concerne tous les habitants de Moselle, de Meurthe-et-Moselle et des départements environnants.

M. le président. Il faut conclure, madame la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. À revenu égal en France, imposition égale !

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour la réplique.

Mme Véronique Guillotin. Je regrette tout de même l’absence d’étude d’impact et d’anticipation des effets de cette convention sur les travailleurs.

Le fait frontalier doit être appréhendé dans sa globalité : il faut prendre en compte également les questions de mobilité, de santé, d’aménagement du territoire, d’économie et de formation. À cet égard, nous avons déjà évoqué la nécessité d’installer un comité interministériel aux questions frontalières, aux côtés des élus locaux. Je profite de cette question orale pour vous le rappeler, madame la ministre.

projet solaire en coactivité agricole

M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, auteur de la question n° 420, adressée à M. le ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie et de l’énergie.

M. Jean-François Longeot. J’attire votre attention, madame la ministre, sur le décalage problématique entre le discours volontariste de l’État sur le développement d’un mix énergétique décarboné et les blocages dont les services de votre ministère portent la responsabilité en matière de déploiement des énergies renouvelables.

Dans le département dont je suis élue, le Doubs, le projet en coactivité agricole de la commune d’Accolans, déposé en novembre 2023, est un parfait exemple de cette schizophrénie.

À l’origine, la municipalité avait pour projet de faire construire une centrale photovoltaïque au sol. L’exploitant agricole partenaire du projet, qui vit aujourd’hui de l’élevage bovin, avait proposé la création d’un atelier ovin sur la parcelle retenue. Cet atelier lui permettait de diversifier ses activités au sein de son exploitation et de conserver la vocation agricole du site.

Alors que l’ensemble des parties prenantes, à savoir la commune, l’exploitant agricole et l’énergéticien, étaient d’accord, la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) a émis un avis consultatif défavorable sur le projet en avril 2024.

Le projet d’Accolans a été déposé antérieurement à la publication du décret du 8 avril 2024 relatif au développement de l’agrivoltaïsme et aux conditions d’implantation des installations photovoltaïques sur des terrains agricoles, naturels ou forestiers, décret qui était prévu dans la loi du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, dite loi Aper.

Pourtant, les services locaux de l’État cherchent à appliquer à ce projet ce nouveau cadre réglementaire, dont la mise en œuvre nécessite encore de nombreuses clarifications, au point que la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC) est en train de travailler à une instruction interministérielle afin d’harmoniser les pratiques.

De son côté, la Cour des comptes relevait dans son rapport intitulé La délivrance des permis de construire – Un parcours complexe dans un cadre instable publié en septembre 2024 une procédure d’instruction difficilement prévisible.

Dans ces conditions, comment allons-nous pouvoir développer un mix énergétique décarboné ? Je peux vous citer des dizaines et des dizaines d’autres exemples de projets bloqués. Dans certaines communes, l’architecte des Bâtiments de France ne veut pas d’installation sur les toitures. Le syndicat intercommunal d’électricité de Labergement Sainte Marie, quant à lui, ne peut tout simplement pas implanter de panneaux solaires. C’est un véritable problème. Comment peut-on le résoudre ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics. Monsieur le sénateur Longeot, je vais répondre à votre question sur l’agrivoltaïsme au nom de mon collègue Marc Ferracci.

Pour rappel, la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables prévoit que deux types d’installations peuvent être implantées dans des espaces naturels, agricoles et forestiers : d’une part, les installations agrivoltaïques, qui doivent apporter un service direct à l’activité agricole ; d’autre part, les installations photovoltaïques dites compatibles, qui ne peuvent, elles, se développer que sur des terres incultes ou non exploitées depuis le 10 mars 2013 et qui sont identifiées dans un document-cadre pris sur proposition de la chambre d’agriculture.

Le décret d’application de la loi Aper précise que les dispositions s’appliquent aux projets pour lesquels la demande d’autorisation a été déposée à compter du 9 mai 2024 pour les installations agrivoltaïques et à compter de la publication du document-cadre par la chambre d’agriculture du territoire concerné pour les installations photovoltaïques dites compatibles.

Ainsi, si le projet que vous évoquez a bien été déposé antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi Aper, je vous confirme qu’il n’est pas soumis au nouveau cadre réglementaire.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Par ailleurs, pour accompagner la mise en œuvre de ce nouveau cadre, différents groupes de travail ont été mis en place : l’un avec les énergéticiens, un autre avec les organisations professionnelles agricoles et un dernier avec les services déconcentrés de l’État.

Le cadre réglementaire est adapté aux spécificités du terrain depuis la publication du décret d’application en avril 2024, lequel a été complété en juillet 2024 par un arrêté spécifiant les modalités de contrôle et de sanction.

Enfin, une instruction technique a été publiée en février 2025 pour clarifier la trame devant être suivie par les services instructeurs.

Nous restons donc pleinement à l’écoute des différents acteurs afin de lever les barrières au développement d’un agrivoltaïsme raisonné, qui doit reposer sur de la confiance et de la stabilité. Nous laissons évidemment de la place à l’innovation technologique pour accompagner les projets. Les services instructeurs disposent aujourd’hui de tous les éléments pour prendre leurs décisions.

renouvellement des concessions hydroélectriques

M. le président. La parole est à M. Raphaël Daubet, auteur de la question n° 422, adressée à M. le ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie et de l’énergie.

M. Raphaël Daubet. Madame la ministre, la souveraineté et les ambitions énergétiques de la France sont au cœur des préoccupations de nos concitoyens et des élus dans les territoires.

J’attire aujourd’hui votre attention sur l’urgence de mettre fin à l’enlisement du dossier du renouvellement des concessions hydroélectriques à la suite de l’adoption en 2014 de la directive sur l’attribution de contrats de concession, dite directive Concessions, qui impose une mise en concurrence lors du renouvellement des contrats.

Depuis une décennie, la France résiste à l’ouverture à la concurrence. Le soutien politique transpartisan en la matière signe la volonté de maîtriser notre souveraineté énergétique. Ce sujet n’est pas anecdotique. L’hydroélectricité est notre deuxième source de production d’électricité, derrière l’énergie nucléaire, et notre première source d’électricité renouvelable, stockable et pilotable, produite par une technologie mature.

L’enjeu est d’autant plus important que les barrages contribuent à atténuer les pénuries d’eau et à prévenir les inondations en régulant les flux, grâce à une gestion plus adaptée et plus concertée qu’auparavant.

Ces ouvrages et leur fonctionnement jouent ainsi un rôle majeur d’aménagement de vallées entières, comme la vallée de la Dordogne, qui traverse le département du Lot.

Aujourd’hui, nous avons le sentiment d’être dans une impasse, au point mort, bloqués dans un précontentieux avec la Commission européenne. Chaque partie s’accorde sur la nécessité de moderniser les installations hydroélectriques, de conforter l’industrie de l’hydroélectricité et de maintenir les compétences dans ce domaine.

C’est le cas de la Commission européenne, qui a publié à la fin du mois de février dernier un rapport sur la compétitivité des technologies énergétiques propres. C’est le cas également du Gouvernement puisque la troisième programmation pluriannuelle de l’énergie, soumise à consultation publique jusqu’à la mi-avril 2025, prévoit d’augmenter les capacités de la grande hydroélectricité.

Reconnaissez, madame la ministre, que, sans visibilité et sans stabilité pour les exploitants, cette ambition sera vaine ! Les pistes jusqu’alors étudiées, à savoir la quasi-régie et le basculement d’un régime de concession vers un régime d’autorisation, se sont toutes heurtées à des blocages juridiques ou financiers.

Comment envisagez-vous la sortie de ce précontentieux ? Où en sont aujourd’hui les négociations avec la Commission européenne ? Avez-vous entamé des discussions sur la prochaine révision de la directive Concessions ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics. Vous interrogez mon collègue Marc Ferracci sur la situation des barrages hydroélectriques et sur l’état des négociations avec la Commission européenne.

Le Gouvernement est convaincu que l’hydroélectricité est une source d’énergie renouvelable cruciale. En 2023, cette électricité a représenté environ 60 térawattheures de notre production électrique, soit 12 % de notre approvisionnement et près de 40 % de notre production d’électricité renouvelable. Le parc est relativement stable depuis plusieurs années, la puissance installée étant de 25 gigawatts, un chiffre tout à fait substantiel.

Comme nous le savons tous, l’hydroélectricité sera amenée à représenter une part de plus en plus importante de notre mix électrique, qui comptera une part croissante d’énergies renouvelables. En effet, elle présente deux avantages : elle est prévisible et pilotable. Elle est donc un élément clé de la stabilité de notre système électrique. Comme vous l’avez dit, la programmation pluriannuelle de l’énergie prévoit d’augmenter les capacités de 2,8 gigawatts à l’horizon 2035.

Les enjeux de l’usage de l’eau seront également déterminants pour l’alimentation en eau potable, l’irrigation et le soutien d’étiage.

Or, vous l’avez dit, nous nous trouvons dans une situation de contentieux avec la Commission européenne : la réglementation nous impose la mise en concurrence des ouvrages qui sont aujourd’hui sous le régime des concessions. Cette situation empêche l’investissement dans les installations existantes et pénalise notre transition énergétique.

De nombreuses solutions sont à l’étude, notamment le basculement d’un régime de concession vers un régime d’autorisation. Une mission d’information des députés Philippe Bolo et Marie-Noëlle Battistel devrait prochainement rendre son rapport et nous proposer des options à envisager. Aucune solution n’est simple ; toutes soulèvent des questions juridiques ou financières importantes. Ces sujets font l’objet d’intenses discussions avec la Commission européenne et sa direction chargée de l’énergie, de la concurrence et de la croissance afin de trouver une voie de sortie.

La révision de la directive est en effet une option, mais les délais seraient tels qu’elle n’apporterait aucune solution à court terme. Plutôt que de nous lancer dans une bataille juridique, nous cherchons des pistes de relance rapide des investissements face aux besoins accrus en hydroélectricité.

double imposition des travailleurs frontaliers luxembourgeois

M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, auteure de la question n° 436, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Mme Silvana Silvani. Madame la ministre, ma question porte sur la double imposition des travailleurs frontaliers luxembourgeois et l’entrée en application du nouveau mode d’imposition pour l’exercice fiscal 2025. Il concerne les contribuables français ayant des revenus de source mixte, française et luxembourgeoise.

Je tiens à rappeler les engagements pris par M. Bruno Le Maire : il avait assuré que ce nouveau mode n’aurait aucune conséquence financière pour les contribuables concernés et que cette réforme serait précédée d’une étude d’impact approfondie. Or malgré le report de 2021 à 2024 de l’entrée en vigueur de cette réforme, les conditions d’acceptabilité sociale de cette mesure ne sont toujours pas réunies.

En effet, aucune étude d’impact n’a démontré de manière transparente qu’en intégrant le prélèvement à la source luxembourgeois, un même revenu imposable de source mixte ou exclusivement française produirait sensiblement le même montant d’imposition. Cette situation est d’autant plus surprenante que l’avenant à la convention fiscale entre la France et la Suisse, examiné au Sénat jeudi dernier, a donné lieu à une étude d’impact.

Des cas concrets de hausses d’imposition m’ont été rapportés par les contribuables concernés. Après discussion avec le cabinet de M. le ministre de l’économie, il semble que cette évolution ait été sous-estimée.

Face à cette situation, envisagez-vous de suspendre l’application de cette réforme au titre des revenus de 2024, afin de réunir les conditions de son acceptabilité sociale ? Ce délai permettrait de réaliser une étude d’impact approfondie et garantirait l’équité fiscale nécessaire pour les contribuables concernés.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics. Madame la sénatrice, quand les modalités de calcul de l’imposition changent, des questions se posent en effet.

Je rappelle que cette convention fiscale a été signée en 2018, que son application a été reportée en 2020, en 2021, en 2022 et en 2023. Elle s’appliquera aux revenus de 2024. C’est essentiel pour assurer l’équité fiscale et donner de la clarté à nos concitoyens des territoires que vous représentez.

Avec cette convention, les revenus perçus au Luxembourg resteront taxés au taux luxembourgeois. C’est la règle. En revanche, dans un couple, les revenus de madame, qui travaille en France, seront imposés comme si ceux de monsieur, qui travaille au Luxembourg, avaient été générés en France. Cela permet de garantir une équité.

Les revenus perçus par un ménage composé de deux Français ou par un ménage franco-luxembourgeois seront imposés en France de la même manière, qu’il y ait ou non des revenus perçus au Luxembourg par ailleurs.

Cette méthode d’imputation est prévue dans toutes les conventions fiscales que nous avons signées avec l’Allemagne, le Royaume-Uni ou la Suisse. Ce régime est aussi en vigueur ailleurs. Il s’appliquera aussi de manière intelligible et équitable aux régions transfrontalières du Luxembourg.

Deux éléments, je le rappelle, sont importants.

En premier lieu, un guichet spécial est ouvert au sein de la direction générale des finances publiques (DGFiP) de Moselle pour aider l’ensemble des contribuables qui le souhaitent à comprendre l’assiette de l’impôt du côté français.

En second lieu, il est possible depuis 2023 de télétravailler en France trente-quatre jours, au lieu de vingt-neuf, tout en restant intégralement imposable au Luxembourg, aux termes de l’avenant du 7 novembre 2022. En cas de dépassement – il est permis, car la portée n’est que fiscale –, le prélèvement à la source à la charge de l’employeur est remplacé par le système des acomptes contemporains suivant l’article 3 de la loi de finances pour 2023.

M. le président. Il faut conclure, madame la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. J’ai été à l’époque la ministre des affaires européennes chargée de ces négociations. Une fois que les conventions sont signées, elles doivent s’appliquer, ce qui est le cas maintenant ! Nous accompagnerons tous les Français.

M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour la réplique.

Mme Silvana Silvani. Je tiens à préciser qu’il ne s’agit pas du tout, ni pour les contribuables ni pour moi, de mettre en cause l’impôt. La question est bien celle du mode de calcul, qui n’est absolument pas équitable : les revenus imposables au Luxembourg s’ajoutent aux revenus pris en compte en France. Ils ne sont déduits qu’après. Il existe donc bien une double imposition.

double imposition des travailleurs transfrontaliers de l’hôpital de cerdagne

M. le président. La parole est à Mme Lauriane Josende, auteure de la question n° 439, adressée à Mme la ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics.

Mme Lauriane Josende. Madame la ministre, depuis 2023, trente-deux salariés de l’hôpital transfrontalier de Cerdagne, résidant en France et de nationalité espagnole, subissent une situation aussi absurde qu’injuste. Ils sont imposés deux fois : par la France, où ils vivent, et par l’Espagne. Au motif que l’hôpital, bien que transfrontalier, se situe de son côté de la frontière, l’Espagne leur réclame l’impôt sur le revenu dû par les non-résidents, à hauteur de 19 % de leur salaire, de surcroît de manière rétroactive, depuis 2020. Cette double imposition est une violation manifeste de l’accord qui lie nos deux pays.

Malgré des mois de démarches et de promesses de traitement du dossier par les autorités françaises, rien n’a changé depuis désormais deux ans. Pis, la situation s’aggrave. Ces salariés reçoivent relance sur relance du fisc espagnol, la dernière datant du 10 mars dernier. Des intérêts de retard leur sont même désormais réclamés !

L’administration française est pourtant informée depuis longtemps de cette situation. Une procédure amiable a été ouverte, un moratoire annoncé et une réunion avec les autorités fiscales espagnoles prévue à la fin de l’année 2024. Concrètement, ces initiatives n’ont débouché sur aucune avancée réelle, sur aucune solution, pas même sur une protection temporaire.

À présent, l’administration espagnole va encore plus loin : elle vient d’écrire, fin mars, à la direction de l’hôpital, laissant entendre que l’établissement pourrait être tenu pour responsable du paiement de l’impôt de ses salariés.

Madame la ministre, cet hôpital transfrontalier est unique en son genre dans l’Union. À l’heure où nous parlons d’intégration et d’Europe de la défense, des travailleurs volontaires qui jouent le jeu de l’intégration européenne se retrouvent à devoir payer deux fois l’impôt sur leur salaire, ce qui les met en grande difficulté. Ce n’est pas l’idée que nous nous faisons d’une union européenne !

Où en est précisément la procédure amiable avec l’Union européenne ? Pourquoi les relances continuent-elles malgré le moratoire annoncé ? Surtout, quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre dans les jours, et non dans les mois, qui viennent pour mettre fin à cette situation inacceptable ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics. Madame la sénatrice, vous attirez mon attention sur la situation effective de double imposition que subissent des travailleurs transfrontaliers de l’hôpital de Cerdagne à la suite d’opérations de contrôle fiscal menées par les autorités espagnoles.

Il y a un an, la direction générale des finances publiques a été informée que les services fiscaux espagnols avaient émis des avis de redressement à l’encontre de plusieurs membres du personnel hospitalier ayant une résidence fiscale en France et un domicile situé à moins de vingt kilomètres de la frontière.

L’administration fiscale leur réclame le paiement de l’impôt sur le revenu des personnes physiques en Espagne et considère qu’ils ne peuvent pas bénéficier du régime fiscal des travailleurs transfrontaliers, situation qui conférerait le droit d’imposition à la France.

L’Espagne s’appuie sur l’article 19 de la convention fiscale franco-espagnole, qui stipule que « les rémunérations […] payées par un État contractant ou l’une de ses collectivités territoriales, ou par l’une de leurs personnes morales de droit public […] ne sont imposables que dans cet État ».

Néanmoins, mes services, la direction de l’hôpital et les salariés sont dans leur bon droit de considérer que cet article ne s’applique pas à une personne morale partagée par les deux États, telle que l’hôpital de Cerdagne, qui est, comme vous l’avez dit, un groupement européen de coopération territoriale.

Saisi de la situation par les intéressés et en lien avec la direction de l’hôpital, le service chargé de la résolution des différends internationaux de la DGFiP, qui se trouve sous mon autorité, a pris attache avec son homologue espagnol afin de trouver au plus vite une solution à cette situation que je qualifierai d’inacceptable.

Il est important que nous prenions en compte les discussions qui ont déjà eu lieu entre les administrations fiscales française et espagnole lors de très nombreuses réunions bilatérales et au travers de l’échange d’un certain nombre de notes et de positions techniques en application de la convention de 1995.

Néanmoins, à ce jour, il subsiste toujours une divergence profonde dans l’analyse du régime applicable. La situation de blocage ayant été constatée sur le plan administratif, il a été décidé que cette question serait portée au plus haut niveau. Notre ambassadrice à Madrid écrira prochainement à la ministre des finances espagnole pour insister sur la nécessité de trouver une solution rapidement et de conclure un accord afin de mettre un terme à cette situation insupportable de double imposition.

Si cette démarche n’aboutit pas, je prends ici l’engagement devant vous, madame la sénatrice, de m’impliquer personnellement auprès de mon homologue espagnol afin de régler ce problème absurde.

M. le président. La parole est à Mme Lauriane Josende, pour la réplique.

Mme Lauriane Josende. Madame la ministre, je vous remercie de vous engager personnellement. La situation est ubuesque. Elle justifie que nous réfléchissions à un statut de salarié pour ce GECT spécifique.

difficultés des élus locaux face aux implantations d’antennes 5g

M. le président. La parole est à M. Didier Rambaud, auteur de la question n° 424, transmise à M. le ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie et de l’énergie.

M. Didier Rambaud. Madame la ministre, depuis plusieurs mois, je suis alerté par des maires : ils rencontrent des difficultés lors de l’implantation d’antennes-relais 5G, qui seraient causées par la réglementation encadrant ces installations.

En premier lieu, selon l’article R. 421-9 du code de l’urbanisme, l’installation d’un mât ou d’une antenne par les opérateurs ou les sociétés spécialisées dans la gestion de ces infrastructures, les tower companies (TowerCo), doivent faire l’objet d’une déclaration préalable. L’instruction de cette demande repose uniquement sur les documents exigés dans le règlement d’urbanisme en vigueur, les opérateurs n’ayant pas l’obligation de fournir d’autres éléments d’information à la commune.

En second lieu, l’arrêté du 12 octobre 2016 pris en application de l’article L. 34-9-1 du code des postes et des communications électroniques impose aux opérateurs de téléphonie mobile de transmettre un dossier d’information mairie (DIM) à la collectivité concernée. L’objectif est d’informer la municipalité du projet d’installation et de faciliter ainsi l’instauration d’un dialogue entre les élus et les habitants de la commune.

Toutefois, l’autorisation d’urbanisme n’étant pas conditionnée au dépôt du dossier d’information mairie, une déclaration préalable de travaux peut être acceptée quand bien même la mairie n’aurait pas encore eu connaissance du projet d’implantation. Aussi, découvrant ce projet au dernier moment, les élus ne sont plus en mesure d’informer et de consulter leurs administrés dans de bonnes conditions, créant ainsi incompréhension et frustration de part et d’autre. Pourtant, le développement du réseau mobile reste un enjeu majeur dans les zones rurales.

Madame la ministre, dans un contexte où les maires ont besoin de retrouver de la capacité d’action, ne faudrait-il pas envisager une harmonisation de la réglementation, par exemple en rendant obligatoire la prise en compte du dossier d’information mairie dans l’instruction des demandes d’urbanisme ou en instaurant un délai minimum entre la transmission de ce document et le dépôt de la demande ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics. Monsieur le sénateur, vous interrogez M. le ministre Ferracci sur les difficultés que rencontrent les élus locaux lors de l’implantation d’antennes-relais : ils ont le sentiment d’être dépossédés de leur pouvoir de police et l’information de la population est problématique.

Différentes réglementations, visant chacune des objectifs différents, sont mises en œuvre pour l’accueil d’antennes-relais. Si elles donnent une apparence de complexité, j’y vois le gage d’une implantation raisonnable et raisonnée.

Tout d’abord, le code de l’urbanisme définit les règles applicables aux constructions et donne compétence au maire en matière d’autorisation d’urbanisme.

Ensuite, le code des postes et des communications électroniques confie au ministre chargé des communications électroniques, à l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) et à l’Agence nationale des fréquences (ANFR) le soin de déterminer les modalités d’implantation des antennes sur l’ensemble du territoire.

La procédure dite du dossier d’information mairie a pour seul objet l’information de la population. Il est extrêmement important aussi que nous vérifiions la conformité de l’antenne aux valeurs limites d’exposition du public aux ondes et l’absence de brouillage préjudiciable aux autres utilisateurs, ce que vérifie l’ANFR.

Je vous rassure, monsieur le sénateur, il n’y a ni incohérence de la réglementation ni dépossession des maires de leur pouvoir de police. Le processus est garant du respect des valeurs d’exposition du public aux ondes. Nos concitoyens peuvent être rassurés sur ce point.

Toutefois, certaines difficultés sont remontées par les élus locaux. C’est d’ailleurs pour cela que le Gouvernement avait proposé dans la version initiale du projet de loi de simplification de la vie économique un droit pour les maires de ne pas revenir sur une décision favorable ou de non-opposition à l’implantation d’une antenne-relais. La Haute Assemblée a souhaité supprimer cette disposition, que l’Assemblée nationale a réintroduite en commission.

En ce qui concerne le dépôt du dossier d’information mairie, je comprends que le délai d’un mois est insuffisant et que les opérateurs sollicitent fréquemment un délai plus court. Je suis pour ma part très attachée à ce que tant les élus locaux que la population soient informés dans de bonnes conditions, gage d’acceptabilité et de meilleure couverture numérique du territoire.

Monsieur le sénateur, si des difficultés locales continuent d’être portées à votre connaissance dans votre département, le cabinet de M. le ministre Ferracci se tient à votre disposition pour examiner la manière d’accompagner au mieux les projets, pour une meilleure connexion de nos territoires et pour une meilleure acceptabilité de ces projets.

conséquences de la suppression de la contribution des gestionnaires de réseau de distribution d’électricité au fonds de financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale

M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère, auteure de la question n° 446, transmise à M. le ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie et de l’énergie. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme Maryse Carrère. Ma question porte sur les conséquences de la suppression de la contribution des gestionnaires de réseau de distribution d’électricité au compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale » (CAS Facé), intégrée dans la loi de finances pour 2025.

En remplaçant cette contribution par une fraction de l’accise sur l’électricité, cette mesure remet en question un mécanisme de financement historique des syndicats d’énergie, menaçant leur capacité à financer les investissements dans les zones rurales.

Au lieu de simplifier le système, cette réorganisation pourrait entraîner une réduction importante des investissements en faveur de la transition énergétique et de la prévention des aléas climatiques, particulièrement dans les communes rurales, déjà confrontées à une diminution de leurs financements.

De plus, les répercussions ne se limiteraient pas à une dégradation du service public. Elles représenteraient également une véritable menace pour l’économie rurale, qui repose sur des infrastructures énergétiques fiables et résilientes.

Enfin, cette réforme risque d’avoir des conséquences sur les marchés publics auxquels concourent les entreprises locales chargées de la modernisation et du renforcement des réseaux électriques et donc des répercussions directes sur l’économie locale et l’emploi.

Derrière l’objectif affiché de simplification, c’est en réalité l’existence même du CAS Facé qui est menacée, car la réforme déconnecte le financement des réseaux des besoins réels et accentue les disparités entre zones rurales et zones urbaines.

Aussi, comment le Gouvernement envisage-t-il de procéder pour garantir aux syndicats d’énergie la pérennité de la maîtrise d’ouvrage locale des travaux d’électrification rurale ? Pour maintenir et actualiser les volumes financiers consacrés à l’électrification et doter ainsi les territoires ruraux de la capacité d’agir ? Pour prendre en compte les spécificités locales dans la répartition des financements ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre auprès du ministre de léconomie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics. Madame Carrère, vous m’interrogez sur l’évolution des modalités de financement du CAS Facé, telles qu’elles ont été prévues dans la loi de finances pour 2025.

Vous le savez, la loi de finances pour 2025 supprime au 1er août 2025 la contribution des gestionnaires de réseau de distribution et la remplace par une fraction de l’accise sur l’électricité. Cela nous mettra en conformité avec le droit européen et rendra les schémas de financement du CAS Facé plus transparents.

La loi a également prévu l’indexation sur l’inflation de son montant pour les années qui viennent. Le Gouvernement a ainsi déposé lors de l’examen du texte par le Sénat, d’une part, un amendement visant à garantir un montant de 377 millions d’euros pour l’année 2025, d’autre part, un amendement tendant à indexer ce montant sur l’inflation afin de rendre dynamique le financement du CAS Facé.

Par la loi de finances, nous avons non seulement maintenu ce compte, mais nous l’avons renforcé juridiquement, en assurant sa mise en conformité avec le droit européen, et financièrement, grâce à l’indexation.

En ce qui concerne les modalités d’attribution des aides, elles demeurent inchangées dans cette loi de finances : la répartition des dotations entre départements n’est ainsi pas modifiée et les dossiers de demande de subvention continueront d’être instruits comme précédemment.

Parce que nous savons que l’électricité joue un rôle déterminant dans le quotidien des Français et de nos entreprises, le Facé continuera à être une politique structurante dans les territoires ruraux afin de leur garantir une électricité de qualité. C’est un gage de cohésion entre les territoires urbains et ruraux.

Ce compte fait partie intégrante du service public de l’électricité qui vise à garantir l’approvisionnement partout, y compris en bout de ligne. Je pense aux territoires isolés ou aux petits villages ou lieux-dits que notre pays a mis des décennies à électrifier et dont nous devons maintenir la qualité du réseau. Je pense que nous avons ici une solution durable.

situation de la fédération française de karaté

M. le président. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz, auteur de la question n° 449, adressée à Mme la ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative.

M. Gilbert-Luc Devinaz. Madame la ministre des sports, ma question porte sur la crise institutionnelle que traverse la Fédération française de karaté et disciplines associées (FFKDA). J’ai été alerté sur des dérives graves : soupçons de corruption, délivrance illégale de grades, opacité financière, verrouillage des élections internes.

De plus, le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) a établi un constat sans ambiguïté concernant l’élection à la présidence de la Fédération, qui avait cristallisé l’ensemble des alertes et des critiques.

Pour sortir de cette crise, le CNOSF a recommandé l’organisation d’un nouveau scrutin, proposition que la présidence de cette fédération a refusée.

Au mois de juin 2024, l’Agence française anticorruption (AFA) avait recommandé une inspection générale de cette fédération : cette recommandation est restée sans suite. Pendant ce temps, la FFKDA poursuit ses manquements au contrat de délégation : absence totale de parité au sein de la commission nationale des grades ; absence d’un plan de prévention, de lutte et de formation contre les violences sexuelles et sexistes ; manque répété de transparence financière de la part de la fédération et de certains de ses organes déconcentrés.

Madame la ministre, 250 000 licenciés attendent aujourd’hui que l’État se tienne à leurs côtés. L’héritage des jeux Olympiques ne saurait être ni à géométrie variable ni à la carte. Cet héritage, c’est aussi le respect des règles, à tous les niveaux !

Allez-vous faire usage de vos prérogatives ? Allez-vous diligenter l’inspection demandée par l’AFA voilà bientôt un an ? Envisagez-vous d’autres mesures susceptibles de garantir aux licenciés que leur fédération agira à l’avenir de manière plus démocratique et plus éthique, en un mot de manière légitime ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur le sénateur Devinaz, je suis régulièrement destinataire de signalements concernant un certain nombre de dysfonctionnements au sein de la Fédération française de karaté et disciplines associées.

Pour ce qui est de l’assemblée générale élective du 12 décembre 2024, vous l’avez dit, la conférence des conciliateurs du CNOSF, dans son avis, a reconnu l’inégalité de traitement entre les candidats et a préconisé l’organisation de nouvelles élections à la présidence.

M. Bruno Verfaillie, le président élu, a refusé cette proposition de conciliation. Les opposants ont désormais la possibilité de contester cette élection en justice.

Par ailleurs, vous le rappelez également, une enquête préliminaire a été ouverte par le parquet de Grenoble, au mois de janvier 2024, pour abus de confiance et opacité financière, visant spécifiquement le comité directeur du comité départemental de l’Isère et son président, M. Thierry Lombardi.

La Fédération française de karaté et disciplines associées est citée dans cette procédure pour avoir perçu des fonds liés à la liquidation de la zone interdépartementale Dauphiné-Savoie. Les conclusions du parquet n’ont pas encore été communiquées, l’enquête étant toujours en cours.

Pour ce qui est des autres points évoqués, notamment la lutte contre les violences, la direction des sports a adressé à la fédération, le 23 décembre 2024, un courrier dans lequel elle exige une mise en conformité : si au 30 avril 2025 la fédération n’a pas répondu de manière favorable à ces exigences, son agrément lui sera alors retiré.

La FFKDA a en outre été auditionnée le 5 juillet 2024 dans le cadre de la mission d’inspection générale sur les sports de combat diligentée sur l’initiative de la ministre des sports de l’époque, mission dont j’ai reçu le rapport.

Nous serons évidemment vigilants quant aux suites à donner à l’ensemble des sujets que je viens d’évoquer.

M. le président. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz, pour la réplique.

M. Gilbert-Luc Devinaz. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.

Une action de votre part serait de nature à ramener la sérénité dans cette fédération. C’est urgent : d’avance, merci pour le sport !

soutien de l’état et de ses opérateurs à la valorisation de la culture régionale bretonne

M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, auteur de la question n° 450, adressée à Mme la ministre de la culture.

M. Simon Uzenat. La confédération Kenleur, dont le siège est dans le Morbihan, œuvre activement à la transmission et à la valorisation des danses bretonnes, du patrimoine vestimentaire, du chant, de la musique et des langues de Bretagne. Rassemblant aujourd’hui près de 200 cercles celtiques et 15 000 adhérents, elle peut se prévaloir d’un rayonnement dépassant largement les frontières régionales.

Reconnue par l’éducation nationale comme association complémentaire de l’enseignement public et par les collectivités bretonnes comme structure d’enseignement artistique et culturel, elle rassemble près de 1 600 élèves inscrits dans le parcours qu’elle propose, de l’école élémentaire au collège. La confédération Kenleur se voit pourtant systématiquement exclure du programme de mécénat « danse » de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), alors même qu’elle répond aux critères de fond de ce programme.

La condition stricte exigeant que les projets soient portés par des chorégraphes professionnels ayant diffusé des pièces dans le « réseau » de danse prive la confédération de l’accès au financement de la CDC, alors même que les professionnels intervenant pour Kenleur sont très majoritairement des chorégraphes dont la réputation n’est plus à faire, mais qui sont issus des cercles associatifs bretons, eux-mêmes très largement animés par un milieu et par des acteurs bénévoles.

Ce refus est le symptôme d’un problème plus large : l’insuffisance du soutien de l’État et de ses opérateurs à la valorisation de la « matière culturelle bretonne » et à ses acteurs, qui jouent pourtant un rôle déterminant dans le bien-vivre-ensemble et dans la transmission et la vitalité de notre patrimoine immatériel, et ce sur l’ensemble du territoire régional, notamment rural.

Cette carence concerne aussi la transmission de la musique : elle affecte notamment les bagadoù, ces ensembles musicaux emblématiques de la culture bretonne, rassemblés au sein de la confédération Sonerion, qui compte plus de 10 000 pratiquants. Malgré leur importance historique et sociale, ces acteurs voient leur financement reposer essentiellement sur des aides locales, décentralisées et limitées, surtout dans le contexte budgétaire actuel, qui touche durement les collectivités territoriales.

Alors que la direction régionale des affaires culturelles (Drac) de Bretagne reconnaît l’utilité publique de la confédération Kenleur et l’accompagne via le dispositif d’aide au service des publics, comment justifier que la Caisse des dépôts et consignations, qui est sous tutelle de l’État, n’en fasse pas de même ?

Quelles mesures concrètes le Gouvernement entend-il donc mettre en place pour garantir l’équité d’accès aux financements publics des acteurs culturels et faire en sorte que la France reconnaisse et valorise pleinement la culture bretonne, et plus largement les cultures régionales ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur le sénateur Uzenat, les arts et traditions populaires sont source de lien social ; ils témoignent de la grande diversité culturelle de nos territoires. Pourtant, comme vous l’avez rappelé, ces pratiques ont souvent été l’angle mort de nos politiques culturelles.

Ce besoin de reconnaissance a d’ailleurs clairement été exprimé, en 2024, dans le cadre des consultations du Printemps de la ruralité. Il y a déjà été répondu par la mesure « Villages en fête » du plan Culture et Ruralité et, au mois de mars dernier, par l’élargissement du plan Fanfare aux musiques et danses traditionnelles, ainsi qu’aux pratiques inscrites au patrimoine culturel immatériel, comme le fest-noz en Bretagne.

La Drac de Bretagne y est très attentive. Elle a notamment noué des relations étroites avec la confédération Kenleur, qu’elle soutient dans le développement de ses différentes actions ; je citerai notamment un festival d’été itinérant permis par le dispositif « Été culturel », ou encore les manifestations financées en ruralité dans le cadre des « Villages en fête ». Au total, en 2024, la confédération Kenleur a ainsi bénéficié de 40 500 euros d’aides aux projets de la part de la Drac.

Par ailleurs, la Drac de Bretagne soutient d’autres acteurs qui contribuent à valoriser les cultures bretonnes, via des aides régulières au fonctionnement ou, plus ponctuellement, des aides aux projets : des bagadoù, comme l’association Bodadeg ar Sonerion ; des équipes artistiques, comme la compagnie de danse C’hoari ; des lieux de diffusion, comme La Grande Boutique ; des structures de valorisation de la culture et de l’identité bretonnes, comme l’association Bretagne Culture Diversité.

Soyez convaincu, monsieur le sénateur, que le ministère de la culture suit de près la situation de la confédération Kenleur.

révision des critères d’éligibilité à la dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales

M. le président. La parole est à Mme Mireille Jouve, auteure de la question n° 350, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Mme Mireille Jouve. Madame la ministre, c’est avec émotion et le cœur lourd que je m’adresse à vous aujourd’hui, car je pense à Olivier : Olivier Frégeac, maire de Peyrolles-en-Provence, qui nous a brutalement quittés voilà dix jours. Il bataillait sans relâche sur le dossier des aménités rurales, en sa qualité de président du grand site Concors Sainte-Victoire. Les aménités, c’était son sujet ; c’est notre sujet.

Comme nombre de maires ruraux, il était inquiet de la révision des critères d’éligibilité à la dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales. Cette révision a en effet eu des incidences sur les enveloppes que nos édiles avaient déjà intégrées dans leurs budgets prévisionnels : elles ont fondu comme neige au soleil, après que les critères ont été modifiés de manière abrupte.

Les maires ne sauraient se satisfaire de la note d’information qui leur a été communiquée le 11 juillet dernier : la réforme, y est-il écrit, « vise à reconnaître et valoriser davantage les services environnementaux rendus par les communes rurales à l’ensemble de la Nation en termes de maintien des réservoirs de biodiversité ».

En réalité, derrière cette phraséologie se cache l’exclusion : de nombreuses communes sont exclues du dispositif, alors même que leur territoire n’a pas évolué. Pis, ces communes n’avaient pas démérité dans leur action en faveur du patrimoine naturel.

Non, cette note ne traduit pas un recentrage : elle démontre que des économies sont réalisées sur le dos des communes et au détriment de la protection de l’environnement.

Dans les Bouches-du-Rhône, par exemple, cette dotation atteignait plus de 1,3 million d’euros en 2023. Du fait de la révision des critères visant à « valoriser davantage les services environnementaux », quinze communes ont été exclues du dispositif. Or ces « budgets » ne seront pas redistribués aux communes qui y restent éligibles : un tour de passe-passe a permis l’évaporation de plus de 550 000 euros de dotations !

Ma question est donc simple, madame la ministre : que comptez-vous mettre en œuvre pour aider ces communes qui engagent des projets coûteux pour valoriser leur patrimoine naturel ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative. Madame la sénatrice Jouve, la réforme de la dotation de soutien aux communes pour les aménités rurales a modifié les critères d’attribution de cette dotation pour cibler les communes rurales. Celles-ci sont définies selon la grille communale de densité de l’Insee, dont les catégories 5, 6 et 7 visent respectivement les bourgs ruraux, la ruralité à habitat dispersé et la ruralité à habitat très dispersé.

Ce critère a conduit à ne plus prendre en compte 146 communes qui percevaient la dotation de soutien aux communes pour la protection de la biodiversité et pour la valorisation des aménités rurales mise en place en 2019.

Il a également conduit à prendre en compte 2 680 communes qui n’y étaient pas éligibles en 2023, 8 921 communes rurales étant éligibles à la dotation en 2024. Sont désormais intégrées au dispositif l’ensemble des communes dont une part importante du territoire est consacrée à la protection de la biodiversité, en cohérence avec la stratégie nationale des aires protégées, et non plus seulement les communes situées en parc national, en parc naturel marin ou en site Natura 2000. L’enveloppe totale de la dotation passe ainsi de 41,6 millions d’euros à 100 millions d’euros entre 2023 et 2024.

Cette réforme concourt ainsi au double objectif de reconnaître la contribution des communes rurales à l’atteinte des objectifs de la transition écologique et d’inciter ces mêmes communes rurales à poursuivre et à amplifier l’engagement qui est le leur dans le cadre de la stratégie nationale des aires protégées, laquelle vise, selon une ambition consacrée par le Président de la République, à couvrir le territoire national de 30 % d’aires protégées bien gérées et de 10 % d’espaces sous protection forte.

Enfin, la dotation n’est pas le seul outil de valorisation de l’engagement des collectivités en faveur de la biodiversité. Il faut mentionner également l’accompagnement proposé par l’Office français de la biodiversité : les projets d’atlas de la biodiversité communale ou les démarches « Territoires engagés pour la nature », par exemple, sont financés jusqu’à 80 % des montants engagés.

situation préoccupante au sein de l’entreprise ritleng revalorisations

M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, auteur de la question n° 408, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

M. Jacques Fernique. Madame la ministre, je souhaite alerter le Gouvernement sur la situation de l’entreprise Ritleng Revalorisations, spécialisée dans la préparation au recyclage des déchets de plâtre.

Cette entreprise alsacienne compte parmi les plus importantes en France pour ce qui est du traitement des déchets de plâtre de la filière REP (responsabilité élargie des producteurs) des produits et matériaux de construction du bâtiment (PMCB). Or de graves manquements m’ont été signalés, qui s’accumulent depuis la création de l’entreprise en 2012, tant en matière de respect du droit du travail que de respect des normes environnementales.

En septembre 2024, plusieurs salariés ont exercé leur droit de retrait après des contrôles positifs à l’amiante. Depuis des années, l’entreprise n’offrirait ni protection ni formation adéquate à ses employés, exposant de surcroît les riverains à des poussières potentiellement toxiques. Les cartons jaunes se sont succédé, mais, malgré des constats d’irrégularité dressés de manière répétée par l’inspection des installations classées, l’entreprise poursuit ses activités sans entrave notable. Des mises en demeure ont été prononcées, mais elles n’ont pas été suivies d’effets significatifs. Des amendes ont été infligées ; elles apparaissent inopérantes pour aboutir au changement exigé.

Le pire serait qu’une partie du plâtre sortant de l’entreprise contienne de l’amiante et soit réintroduit sur le marché sans contrôle adéquat.

En outre, la liberté syndicale et le droit des lanceurs d’alerte sont particulièrement malmenés. Le représentant du personnel de la CGT, premier à signaler ces irrégularités, a fait l’objet, en guise de représailles, d’une procédure de licenciement ; ce licenciement a été par deux fois invalidé par l’inspection du travail.

Enfin, cette entreprise continue de contracter avec l’éco-organisme Valobat dans le cadre de la filière REP PMCB, révélant ainsi les failles du système instauré par la loi Agec, la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire. Cette situation soulève des questions sur les modalités de contrôle des éco-organismes et la traçabilité réelle des déchets.

Madame la ministre, comment le Gouvernement compte-t-il renforcer les contrôles dans la filière REP PMCB pour empêcher de telles dérives, protéger les travailleurs exposés à l’amiante, ainsi que les riverains et l’environnement, et garantir un recyclage réellement sûr et responsable des déchets ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur le sénateur Fernique, les services de l’État sont pleinement mobilisés pour traiter les sujets que vous évoquez, et le site dont vous parlez fait l’objet d’un suivi renforcé de la part des services de l’inspection des installations classées pour la protection de l’environnement.

Ainsi, depuis 2022, trois mises en demeure ont été adressées à l’exploitant de ce site et deux amendes administratives ont été prononcées par le préfet à la suite de constats de non-conformité persistants.

Dans le cadre d’un contrôle engagé depuis plusieurs mois, l’inspection du travail a par ailleurs rappelé à l’employeur les principes généraux de prévention et l’obligation générale de préservation de la santé et de la sécurité des travailleurs. Elle a demandé que des mesures adaptées soient prises afin d’assurer la protection des salariés, notamment en ce qui concerne leur exposition aux émissions de poussières et à l’amiante.

Ce contrôle se poursuit et l’entreprise fait l’objet d’un suivi spécifique de la part de l’inspection du travail.

J’en viens à la filière à responsabilité élargie des producteurs des produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment. L’entreprise Ritleng Revalorisations est en effet l’un des prestataires de l’éco-organisme agréé Valobat.

À la suite des alertes émises à propos de ce site, l’éco-organisme a rappelé à l’entreprise, et plus généralement à l’ensemble de ses prestataires, les bonnes pratiques auxquelles elles doivent se conformer face au risque d’exposition à l’amiante. Valobat a également rappelé les consignes de tri définies par la filière auprès des points de reprise, des chantiers et des centres de massification des déchets avec lesquels il est en contrat.

Par ailleurs, en application du code de l’environnement, l’éco-organisme Valobat a conçu un programme d’audit auprès de ses prestataires gérant des déchets. Si l’entreprise Ritleng Revalorisations n’a pas encore été soumise à un tel audit, elle est bien inscrite dans le programme de Valobat et fera prochainement l’objet des vérifications qui s’imposent.

conséquences de la fin de l’exonération des cotisations patronales pour certains armateurs français

M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, auteur de la question n° 413, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Mme Agnès Canayer. Il y a bientôt dix ans, la loi du 20 juin 2016 pour l’économie bleue instaurait une exonération des cotisations patronales pour les armateurs français afin de renforcer leur compétitivité.

Malheureusement, le champ d’application de cette mesure a été réduit par la dernière loi de financement de la sécurité sociale. Les armateurs français, dorénavant exclus de ce dispositif d’exonération, sont particulièrement inquiets, comme tout l’écosystème portuaire havrais. Tous alertent sur les risques que fait peser cette réforme sur l’emploi des marins français, sur le maintien de notre pavillon et sur notre place dans la transition écologique maritime.

Cette hausse soudaine des coûts d’exploitation de 25 % provoque un surcoût non budgété de 2,2 millions d’euros pour les armateurs havrais. Elle met en péril leur modèle économique.

L’entreprise Towt est particulièrement affectée alors qu’elle développe un transport français à la voile relevant pleinement du zéro émission. Elle prévoyait, d’ici à 2027, la mise en service de six nouveaux voiliers-cargos, en plus des deux déjà existants, Artemis et Anemos.

De même, l’entreprise Sogestran, spécialiste du transport fluvial, qui a baptisé son premier navire à hydrogène, est fortement touchée, comme l’est la société Les Abeilles International, qui assure la sécurité en mer, notamment dans la Manche.

Madame la ministre, le Gouvernement envisage-t-il de revenir sur la fin de ces exonérations, dès cette année ou à l’horizon du budget pour 2026 ? Pouvez-vous rassurer les armateurs français ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marie Barsacq, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative. Madame la sénatrice Canayer, le secteur du transport et des services maritimes fait face à une intense concurrence internationale. La compétitivité des pavillons repose en grande partie sur les coûts salariaux, principal facteur discriminant par rapport aux autres coûts d’exploitation.

Jusqu’à présent, et ce depuis 2016, les armateurs placés en situation de concurrence internationale pour leurs navires battant pavillon français ou communautaire bénéficiaient de l’exonération totale des contributions patronales.

L’adoption de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 modifie la donne : depuis le 1er mars 2025, le bénéfice de la totalité des exonérations est réservé aux seuls armateurs opérant des navires de transport de passagers, des navires câbliers et des navires de service consacrés aux énergies marines renouvelables. En revanche, les autres segments de flotte perdent l’exonération des parts « chômage » et « famille », tout en conservant l’exonération des cotisations pour les gens de mer affiliés au régime d’assurance vieillesse des marins. Il est à noter que cette dernière part, dite Enim, reste prépondérante au sein de l’ensemble des exonérations.

Comme vous le savez, la situation financière du pays impose des choix budgétaires responsables. Comme d’autres, la mesure sur laquelle vous m’interrogez permet de réaliser des économies, contribuant ainsi à l’effort collectif de redressement des finances publiques.

Nous mesurons toutefois combien les effets de cette réforme sont significatifs : plusieurs armateurs ont publiquement fait part de leur intention de changer de pavillon, notamment les entreprises de la filière vélique, ce qui témoigne des tensions suscitées par cette mesure.

Conscients de ces signaux, nous avons d’ores et déjà prévu une évaluation approfondie du dispositif visant à en apprécier pleinement les effets économiques et budgétaires : il va nous falloir comparer les gains réalisés aux effets produits sur la compétitivité du pavillon français.

Le cas échéant, et à la lumière de cette évaluation, le Gouvernement n’exclut pas de rouvrir le débat lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026.

M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, pour la réplique.

Mme Agnès Canayer. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.

Nous sommes responsables : dans un contexte budgétaire contraint, notre pays a besoin de faire des économies – nous l’entendons.

Néanmoins, les armateurs français sont aussi soumis aujourd’hui à l’évolution des droits de douane, qui va peser sur le trafic et sur les échanges. La suppression de ces exonérations, notamment pour les petits armateurs qui investissent dans la transition écologique, est une mesure dont on doit peser les effets réels sur la compétitivité du pavillon français.

J’espère que ce débat pourra être rouvert et que des mesures susceptibles de rassurer les armateurs français pourront être prises rapidement.

interdiction du plomb dans les munitions pour la chasse

M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, auteur de la question n° 431, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

M. Pierre Cuypers. Le 27 février 2025, la Commission européenne a publié un projet de modification de l’annexe 17 du règlement du 18 décembre 2006 sur l’enregistrement, l’évaluation, l’autorisation et la restriction des substances chimiques (Reach).

Ce texte a pour objet, à terme, mais dans un calendrier très serré, d’éliminer le plomb dans les munitions pour la chasse. Ainsi, le plomb serait interdit dans les balles à percussion de calibre supérieur à 5,6 millimètres dans un délai de dix-huit mois suivant l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation ; les plombs de chasse seraient interdits dans un délai de trois ans ; la vente au détail des cartouches à plomb serait prohibée dans un délai de cinq ans.

En tant que président du groupe d’études Chasse et pêche du Sénat, je crains – c’est malheureusement plus qu’une crainte : une certitude – que ces mesures ne se traduisent par une baisse du nombre de chasseurs, lesquels devront s’adapter à marche forcée.

Je m’interroge par ailleurs, madame la ministre, sur l’opportunité de cette nouvelle contrainte pesant sur les professionnels de l’armement. En effet, ceux-ci fabriquent souvent à la fois des munitions à usage civil et d’autres à usage militaire ; ils vont devoir se réorganiser et doubler leurs lignes de production à l’heure où l’Europe doit augmenter ses capacités militaires !

J’appelle également votre attention, madame la ministre, sur l’augmentation significative, en cas de non-report, de la dépendance du secteur stratégique de l’armement à l’égard de la Chine, s’agissant d’approvisionnements en matières premières « sans plomb ».

Dans ces conditions, il me semble indispensable, pour ne pas dire incontournable, de reporter la mise en œuvre de l’ensemble de ces mesures d’interdiction du plomb dans les munitions de chasse, afin qu’elles ne prennent effet que dans dix ans.

Madame la ministre, quelle est la position de la France en la matière ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Juliette Méadel, ministre déléguée auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ville. Je remplace ma collègue Marie Barsacq, qui a dû partir.

Monsieur le sénateur Cuypers, vous le savez, ce projet d’interdiction du plomb dans les munitions de chasse a été présenté aux États membres le 27 février 2025. Il fait suite à l’interdiction de l’usage de munitions au plomb dans les zones humides, qui date, elle, de 2021 et est entrée en application le 15 février 2023.

Ce projet va faire l’objet de discussions, et sans doute d’évolutions, avant sa publication officielle et son entrée en vigueur dans notre pays.

Vous mentionnez une période de transition de dix-huit mois pour les balles à percussion centrale de calibre supérieur à 5,6 millimètres et une période de transition de trois ans pour la grenaille de chasse. Ces durées ont été proposées par la Commission européenne, qui considère qu’il existe des solutions de remplacement techniquement performantes et financièrement accessibles.

Dans l’étude qui accompagne la proposition, il est indiqué que le coût de la grenaille en acier est équivalent à celui de la grenaille de plomb. Toutefois, il nous faut examiner plus en détail la question de savoir si ces solutions sont bien disponibles en France, qui plus est dans le nouveau contexte géopolitique.

Pour ce qui est des forces armées, il n’est pas prévu de restriction de mise sur le marché pour les balles de plomb. L’usage des balles resterait autorisé dans les centres de tir, intérieurs comme extérieurs – ceux-ci seraient toutefois soumis à autorisation préalable.

Pour l’instant, si le Gouvernement partage évidemment l’ambition du texte concernant les gains environnementaux attendus – la Commission européenne soutient qu’il permettrait d’éviter le rejet de plus de 670 000 tonnes de plomb au cours des deux prochaines décennies, ainsi que les effets néfastes associés à l’usage du plomb sur la biodiversité –, il est certain que les impacts socio-économiques de cette réforme sur les chasseurs doivent également être considérés. Leurs représentants dialoguent actuellement à ce propos avec le ministère de la transition écologique.

Les conséquences sur la filière économique de la production de munitions seront également analysées, bien sûr, et ce même si le projet d’interdiction ne porte pas sur les munitions destinées aux forces armées, aux forces de police ou aux forces de gendarmerie.

M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour la réplique.

M. Pierre Cuypers. Madame la ministre, je ne partage pas votre appréciation, qui est contestée par l’ensemble du monde de l’armurerie : il n’est pas vrai que les solutions que vous avancez soient des solutions de « juste » remplacement !

Mesurez bien les conséquences d’une telle décision sur les filières de la chasse : elle les placerait dans une situation totalement catastrophique.

gestion des digues domaniales transférée aux collectivités

M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, auteure de la question n° 322, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Mme Martine Berthet. J’appelle l’attention du Gouvernement sur les difficultés majeures que rencontrent certaines collectivités chargées de la compétence Gemapi (gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations), auxquelles l’État a transféré la gestion des digues domaniales le 29 janvier 2024.

Bien que Mme la ministre chargée de l’environnement ait été alertée à plusieurs reprises, par courrier, par une question orale et lors de son audition, la visibilité financière demeure inchangée pour la deuxième collectivité la plus touchée par ces transferts, le syndicat mixte de l’Isère et de l’Arc en Combe de Savoie (Sisarc). Sa capacité à assurer la sécurité des populations et des infrastructures se trouve ainsi compromise.

La loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (Maptam) prévoyait le transfert par l’État de la gestion d’ouvrages mis en conformité avec les exigences réglementaires et légales. Or le Sisarc a dû accepter un transfert « à prendre ou à laisser », sans que ces mises aux normes aient été réalisées, alors même que d’importants travaux de sécurisation étaient nécessaires.

Si des subventions sont prévues via le fonds Barnier, leur montant est insuffisant. Le plafond de 80 % des dépenses ne s’applique qu’aux dossiers validés avant 2027, contre un plafond de 40 % une fois passée cette échéance. Ce calendrier est irréaliste compte tenu de la longueur des procédures administratives, de l’ampleur des travaux, de la nature des contraintes techniques et environnementales et de la disponibilité des entreprises.

Pour le Sisarc, les quatre-vingt-dix kilomètres transférés nécessitent près de 110 millions d’euros hors taxe de travaux. Même portée à son maximum, la taxe Gemapi, jamais revalorisée depuis 2014, ne permettrait de financer que 14 millions d’euros.

Pour compenser cet écart, le ministre d’alors, M. Christophe Béchu, s’était engagé à octroyer des aides supplémentaires permettant d’atteindre 95 % du coût des travaux.

Aussi, madame la ministre, au regard de l’incohérence observée entre les contraintes qui sont imposées à nos collectivités et les réalités auxquelles elles font face, le Gouvernement respectera-t-il l’engagement qu’il a pris de financer quasi intégralement les travaux et de prolonger jusqu’en 2035 l’application du taux de subvention à 80 %, et ce malgré les restrictions budgétaires nécessaires ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Juliette Méadel, ministre déléguée auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ville. Madame la sénatrice Berthet, la taxe Gemapi a été créée, vous le savez, pour donner aux « Gemapiens » les moyens d’exercer leur compétence.

La loi Maptam de 2014 avait prévu une période de transition de dix ans dans le cas des digues domaniales, qui représentent moins de 10 % des digues dans la France entière et dont l’État a poursuivi temporairement la gestion pour le compte des Gemapiens.

Cette période a pris fin le 28 janvier 2024. La très grande majorité de ces ouvrages a été reprise en gestion par les Gemapiens, par voie de convention.

En Savoie, le syndicat mixte de l’Isère et de l’Arc en Combe de Savoie s’est vu confier un linéaire d’ouvrages d’environ soixante et onze kilomètres. Des travaux de réhabilitation sont en cours, financés en totalité par le fonds Barnier, à hauteur de 6 millions d’euros.

D’autres travaux prioritaires ont été programmés par le Sisarc, pour 46 millions d’euros ; le syndicat mixte les financera sans reste à charge grâce aux subventions bonifiées du fonds Barnier à 80 % et à une soulte de 10,5 millions d’euros, dont la moitié a été versée au moment du transfert de gestion.

Si des travaux complémentaires demeurent nécessaires à l’horizon de 2030, le Gouvernement continuera de soutenir le Sisarc via les différents dispositifs de soutien à l’investissement, afin que le reste à charge, une fois optimisées les recettes procurées par la taxe Gemapi, soit aussi réduit que possible.

Par ailleurs, compte tenu du rôle joué par ces ouvrages pour la protection d’infrastructures routières et ferroviaires stratégiques, d’autres contributeurs pourraient être appelés à soutenir leur financement à long terme.

Enfin, l’obligation d’inscrire les ouvrages dans l’actif comptable de la collectivité est une mesure technique sans effets sur ses finances.

conséquences de la réforme des normes applicables aux appareils de chauffage au bois

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, auteur de la question n° 415, transmise à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

M. Jean-Claude Anglars. Madame la ministre, le chauffage au bois est important en milieu rural ; les autres solutions de chauffage sont moins adaptées et souvent plus coûteuses que l’utilisation du bois des forêts privées de particuliers.

De même, l’exploitation de la forêt paysanne favorise une filière locale de bois-énergie bon marché et durable. Ce secteur économique dynamique regroupe notamment les fabricants, distributeurs et installateurs d’équipements de chauffage au bois.

Toutefois, la Commission européenne envisage de nouvelles normes pour les appareils de chauffage. Elle prévoit notamment d’imposer un durcissement des seuils d’émission des particules fines, d’oxydes d’azote et de monoxyde de carbone, ainsi que des rendements énergétiques minimums.

Ces nouvelles normes pourraient avoir des effets considérables sur la filière, en contraignant les professionnels à revoir leurs gammes de produits et en obligeant les consommateurs à investir dans de nouveaux équipements.

Alors qu’elle devait initialement être présentée le 12 février 2025, cette réforme a été reportée en raison des incertitudes sur sa faisabilité technique et économique.

Ce report prolonge l’incertitude et les nombreuses interrogations des acteurs du secteur, qui demeurent dans l’attente de précisions sur les seuils retenus et sur les délais de mise en conformité. Les professionnels s’interrogent sur les adaptations techniques nécessaires pour répondre aux futures exigences. Quant aux ménages, ils redoutent les coûts élevés de remplacement ou de mise aux normes de leurs équipements.

Cette situation est d’autant plus préoccupante qu’aucune solution de substitution réellement viable n’a été présentée. Afin d’éviter de fragiliser des milliers de foyers et de compromettre l’avenir de la filière du bois-énergie, il importe qu’il n’y ait pas d’interdiction sans solution.

Dans ce contexte, madame la ministre, pouvez-vous apporter des précisions sur le contenu de la future réforme et sur les dispositifs d’accompagnement qu’il conviendra de mettre en place pour soutenir les professionnels de la filière et les ménages concernés par ces évolutions réglementaires ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Juliette Méadel, ministre déléguée auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ville. Monsieur le sénateur Jean-Claude Anglars, la réglementation européenne relative à l’écoconception et à l’étiquetage énergétique vise à garantir la performance énergétique – vous le savez –, mais aussi la durabilité et la réparabilité des produits mis sur le marché européen.

Le Gouvernement suit activement les travaux européens sur la réglementation relative à la mise sur le marché des équipements de chauffage au bois, qui vise à améliorer leur efficacité énergétique et à réduire leurs émissions de polluants atmosphériques, sans interdire leur installation ni imposer le remplacement des équipements existants.

Cette réglementation simplifie l’accès au marché européen pour les fabricants, en uniformisant les normes pour toute l’Europe, tout en veillant aux bénéfices rendus aux utilisateurs.

Les règlements, en vigueur depuis 2020, pour les chaudières fonctionnant à la biomasse, et depuis 2022, pour les poêles à bois, font l’objet d’une mise à jour. Celle-ci a notamment pour objectif d’améliorer la réparabilité et la performance des nouveaux appareils, l’efficacité de leur consommation de combustibles et la réduction des émissions de polluants atmosphériques, sans interdire la conservation des équipements déjà installés.

La Commission européenne a publié en janvier 2025 des documents de travail préliminaires afin de recueillir l’avis technique des experts et des parties prenantes.

Une analyse de 14 000 produits vendus en Europe a déjà été réalisée en 2023 et est publiquement accessible. Les travaux devraient être finalisés en 2026. Un délai est prévu avant l’entrée en vigueur de la réglementation afin de permettre aux fabricants d’adapter leur gamme de produits si nécessaire.

Le Gouvernement veillera à mettre en œuvre une approche équilibrée, conciliant exigences environnementales et réalités économiques, et accompagnera les professionnels et les ménages dans cette transition.

suppression du fonds de soutien aux temps d’activités périscolaires

M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, auteur de la question n° 434, adressée à Mme la ministre d’État, ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche.

M. Christian Redon-Sarrazy. Madame la ministre, à compter de la rentrée scolaire 2025, le fonds de soutien au développement des activités périscolaires (FSDAP) sera supprimé, comme prévu par la loi de finances pour 2024.

Sa disparition, si elle se concrétise, aura des conséquences considérables sur les communes, qui ont besoin de ce financement pour assurer la soutenabilité financière des temps d’activités périscolaires (TAP). Or, à ce jour, aucune solution de remplacement n’est prévue pour les communes bénéficiaires.

Pour rappel, ce fonds est subordonné à l’organisation au bénéfice des élèves scolarisés sur le territoire d’activités périscolaires dans le cadre d’un projet éducatif territorial et à une organisation du temps scolaire sur neuf demi-journées ou huit demi-journées comprenant cinq matinées.

Ces aides sont calculées en fonction du nombre d’élèves éligibles dans la commune et comprennent un montant forfaitaire ainsi qu’une majoration forfaitaire en faveur des communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine cible ou à la dotation de solidarité rurale cible.

En Haute-Vienne, quatre communes, Nieul, Peyrilhac, Saint-Gence et Veyrac, ont maintenu, dans le cadre du projet éducatif de territoire 2024-2027, l’organisation sur cinq matinées. Via le syndicat intercommunal enfance, petite enfance et adolescence, elles proposent une offre d’activités périscolaires de grande qualité à l’ensemble des enfants scolarisés. De surcroît, dans un souci de réduction des inégalités, les communes et le syndicat intercommunal ont fait le choix de les rendre gratuites pour tous.

Madame la ministre, il est indispensable de préserver de tels services à la population et de soutenir les communes rurales qui les mettent en œuvre.

Le Gouvernement va-t-il revenir sur la suppression du fonds de soutien aux TAP ou, a minima, va-t-il prévoir un mécanisme de compensation ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Juliette Méadel, ministre déléguée auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ville. Monsieur le sénateur Christian Redon-Sarrazy, vous l’avez rappelé, le fonds de soutien au développement des activités périscolaires avait pour objectif de contribuer à mettre en place des activités périscolaires lors du passage à une organisation scolaire sur quatre jours et demi.

Ce fonds avait une durée limitée : la loi de 2013, qui l’a créé, est très claire sur ce point.

Depuis le décret du 27 juin 2017, les communes qui en bénéficiaient ont, dans leur majorité, opté pour une organisation du temps scolaire sur quatre jours. Elles ne bénéficient donc plus du fonds.

L’évolution est sensible : tandis que, pour l’année scolaire 2016-2017, 20 000 communes, représentant 5 millions d’élèves, ont bénéficié de ce fonds, pour un coût de 380 millions d’euros, le nombre de communes bénéficiaires a aujourd’hui été divisé par vingt et le coût par dix, puisqu’il a été ramené à 37 millions d’euros. Au reste, 50 % de ce coût est concentré sur quinze communes, dont Paris, qui représente à elle seule 5 millions d’euros.

Il apparaît que le fonds n’incite pas les communes à maintenir la réforme des rythmes scolaires pour les élèves de leur territoire, raison pour laquelle son extinction a été programmée pour la rentrée 2023. Toutefois, répondant à l’inquiétude des élus, le Gouvernement a choisi de reporter son extinction pour permettre aux collectivités d’avoir le temps de s’adapter.

Cette décision ne remettait cependant pas en question le principe de la suppression du FSDAP pour la rentrée 2025, qui a été acté dans la loi de finances pour 2024. Un nouveau report ne peut pas être envisagé, a fortiori par la voie réglementaire.

Enfin, dans un contexte budgétaire contraint, la ministre Élisabeth Borne a fait le choix de recentrer ces crédits sur d’autres dispositifs et d’autres priorités sociales. Je pense notamment aux crédits ouverts dans le cadre de la loi de programmation pour la refondation de Mayotte.

Bien entendu, nous sommes à votre disposition et à l’écoute de vos propositions pour préparer le budget pour 2026.

M. le président. La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy, pour la réplique.

M. Christian Redon-Sarrazy. Madame la ministre, je n’avais pas beaucoup d’illusions sur le contenu de votre réponse…

Hélas, votre décision fait encore porter tout l’effort budgétaire sur les collectivités qui ont fait le choix d’une organisation sur cinq matinées. Alors que leurs finances sont déjà très contraintes, leurs marges de manœuvre seront encore réduites. Elles ne pourront sans doute plus offrir aux enfants les activités variées qu’elles avaient mises en place via des structures aujourd’hui bien établies, lesquelles comptaient sur ces financements.

Dans ces conditions, les enfants ne pourront pas bénéficier de l’émancipation culturelle dont ils sont parfois privés par ailleurs.

congés menstruels dans la fonction publique

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, auteur de la question n° 428, adressée à M. le ministre de l’action publique, de la fonction publique et de la simplification.

M. Pascal Savoldelli. Madame la ministre, l’endométriose touche 2 millions de femmes en France. La délégation du Sénat aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes avait fait de cette maladie un sujet central de l’égalité professionnelle. Dans un rapport publié en 2023, elle relevait que les « conséquences de l’endométriose sur la vie professionnelle des femmes qui en souffrent sont (…) majeures, multiples et souvent discriminantes ».

Certaines entreprises privées ont pris des mesures en faveur de ces femmes, mais le secteur public est en retard de ce point de vue.

Certaines communes volontaristes ont pourtant essayé d’instaurer un congé menstruel, mais le tribunal administratif de Toulouse a suspendu, le 20 novembre 2024, les délibérations de ces collectivités. Depuis, cette décision fait partout jurisprudence. Que les maires soient empêchés de mettre en place une mesure d’égalité est une situation ubuesque.

À cet égard, je salue la présence dans nos tribunes de Fatah Aggoune, maire de Gentilly, et d’agents territoriaux de sa commune.

Ma question est simple, madame la ministre : allez-vous publier un décret afin d’autoriser, dans la fonction publique, des aménagements des conditions de travail des femmes souffrant de règles douloureuses, de dysménorrhées, d’endométriose, d’adénomyose ou encore du syndrome des ovaires polykystiques ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Juliette Méadel, ministre déléguée auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ville. Monsieur le sénateur Pascal Savoldelli, plusieurs collectivités ont en effet pris la décision de mettre en place des autorisations spéciales d’absence (ASA) pour congé menstruel. Ces autorisations permettent ainsi, et c’est heureux, aux femmes souffrant de règles douloureuses, d’endométriose, d’adénomyose ou de dysménorrhées invalidantes de s’absenter de leur service, sans effet sur leurs droits à congés annuels.

Toutefois, cette initiative soulève des questions juridiques importantes.

En l’état actuel du droit, la création d’une nouvelle catégorie d’ASA pour raison de santé ne relève pas des compétences des collectivités locales. En effet, l’article L. 622-1 du code général de la fonction publique prévoit des autorisations spéciales d’absence pour des motifs spécifiques, tels que la parentalité ou certains événements familiaux, mais pas pour raison de santé. Ainsi, la mise en place d’un tel dispositif par les collectivités repose sur une base légale très contestable.

C’est pourquoi le tribunal administratif de Toulouse a suspendu, le 20 novembre 2024, les délibérations de deux collectivités ayant instauré un congé menstruel, estimant que celles-ci étaient incompatibles avec le droit, en l’absence, à ce jour, de dispositions législatives ou réglementaires permettant de le faire.

Consciente de l’intérêt porté à cette question et de la demande croissante des collectivités et des administrations, la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) travaille actuellement à l’identification de solutions juridiques permettant de mieux prendre en compte ces situations, afin de leur apporter une réponse adaptée.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour la réplique.

M. Pascal Savoldelli. Premièrement, je précise que nous avons déjà débattu d’une proposition de loi sur ce sujet, mais que le Gouvernement l’a rejetée, madame la ministre. Le travail législatif a donc déjà été fait sur cette question !

Deuxièmement, je pensais que vous alliez retenir une modalité simple, à savoir un décret.

Il arrive souvent que l’on nous renvoie ici à ce qui se passe dans d’autres pays, de manière parfois fondée d’ailleurs. Or, en la matière, la France reste à la traîne, l’Espagne, le Japon, l’Indonésie ayant déjà instauré un congé menstruel.

En outre, dans un sondage réalisé en 2021 par l’Institut français d’opinion publique (Ifop), 68 % des Françaises interrogées se sont déclarées favorables à la mise en place d’un tel congé.

J’insiste, madame la ministre : prenez l’initiative de rédiger un décret, ou soutenez les initiatives législatives des collectivités ! N’attendons plus.

conséquences de la mise en œuvre du régime de la responsabilité financière des gestionnaires publics

M. le président. La parole est à M. Fabien Genet, auteur de la question n° 448, adressée à M. le ministre de l’action publique, de la fonction publique et de la simplification.

M. Fabien Genet. Ma question s’adresse au ministre chargé de la fonction publique. Elle porte sur le nouveau régime de responsabilité financière des gestionnaires publics.

Issu de l’ordonnance du 23 novembre 2022, ce nouveau régime est entré en vigueur le 1er janvier 2023. Depuis son application, les mises en cause des directions générales de nos collectivités locales et de leurs équipes se multiplient, ce qui soulève de nombreuses inquiétudes quant à la sécurité juridique des agents concernés.

En effet, le champ des responsabilités des directions générales, bien que partiellement encadré par la loi, n’est pas encore suffisamment clair. La principale incertitude porte sur la notion de faute grave, qui n’est pas précisément définie dans l’ordonnance de novembre 2022.

Lors d’une réunion sur la mise en œuvre de cette réforme, le président de la chambre du contentieux de la Cour des comptes, Serge Barichard, a précisé que cette notion serait progressivement clarifiée par la jurisprudence, tout en insistant sur le fait que seuls les manquements les plus graves donneraient lieu à des poursuites. Autrement dit, le champ des responsabilités sera affiné au fur et à mesure par les juges.

Cette incertitude crée un climat d’insécurité pour les gestionnaires publics, qui doivent exercer leurs missions sans cadre précis leur permettant d’anticiper d’éventuelles mises en cause.

Par ailleurs, dans sa décision du 29 janvier 2025, le Conseil d’État a rappelé que la protection fonctionnelle s’appliquait aux agents publics poursuivis pénalement. Toutefois, les sanctions financières de la Cour des comptes relèvent d’un régime spécifique et ne sont pas considérées comme pénales. Dès lors, les agents concernés ne peuvent pas bénéficier de la protection fonctionnelle de manière automatique.

Les agents sont placés dans une situation particulièrement vulnérable en cas de contentieux. Ce manque de garanties pourrait, à terme, nuire à l’attractivité de la fonction publique et freiner l’engagement des cadres dirigeants dans les collectivités territoriales.

Dans ce contexte, madame la ministre, pourriez-vous nous indiquer quelles mesures sont envisagées afin de mieux encadrer le champ des responsabilités des gestionnaires publics et leur assurer une protection juridique adaptée ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Juliette Méadel, ministre déléguée auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ville. Monsieur le sénateur Fabien Genet, je vous remercie d’appeler l’attention du Gouvernement sur l’attente forte des gestionnaires publics sur ce sujet, au regard du nouveau régime de responsabilité qui est entré en vigueur.

Pour commencer, je rappelle que le ministre Laurent Marcangeli s’est engagé à renforcer la protection fonctionnelle des agents publics, raison pour laquelle le Gouvernement a soutenu la proposition de loi déposée par la députée Violette Spillebout.

Ce texte vise à permettre à l’administration de porter plainte au nom de l’agent victime, à étendre la protection fonctionnelle à titre conservatoire pour les ayants droit de l’agent et à octroyer la protection fonctionnelle à l’agent entendu librement dans le cadre d’une procédure pénale.

Par ailleurs, comme vous le rappelez, en l’état actuel du droit, la protection fonctionnelle n’est pas accordée aux agents publics en cas de procédure devant les juridictions financières, dans la mesure où l’agent n’est ni victime d’attaques ni mis en cause dans une procédure civile ou pénale. Le Conseil d’État l’a confirmé dans une décision du 29 janvier 2025, tout en soulignant qu’« il est toujours loisible à l’administration de lui apporter un soutien, notamment par un appui juridique, technique ou humain dans la préparation de sa défense ».

Le président de section honoraire au Conseil d’État Christian Vigouroux, dans son récent rapport intitulé Sécuriser laction des autorités publiques dans le respect de la légalité et des principes du droit, souligne qu’un éventuel élargissement de l’octroi de la protection fonctionnelle en cas de procédure devant les juridictions financières nécessiterait une réflexion approfondie, notamment eu égard aux objectifs mêmes de la réforme visant à renforcer la responsabilité financière des agents publics et aux conséquences en matière budgétaire.

Tout en reconnaissant l’attente exprimée de plus en plus fortement sur le terrain face aux mises en cause des gestionnaires publics, le Gouvernement est bien conscient que les contours de cette forme complémentaire de protection requièrent une expertise pointue.

Les services du Premier ministre ont engagé une réflexion sur le sujet et proposeront ultérieurement, en concertation avec la Cour des comptes, une approche adaptée sur ce sujet.

M. le président. La parole est à M. Fabien Genet, pour la réplique.

M. Fabien Genet. Merci, madame la ministre, de votre réponse très précise et très technique, même si je ne suis pas sûr qu’elle soit de nature à rassurer complètement nos directions générales.

Je répète que le Gouvernement a souhaité, par voie d’ordonnance, réformer les contrôles afin de les renforcer, mais sans préciser la notion de faute grave, laissant au juge le soin de la définir.

L’actualité montre qu’il est parfois bon que ce soit le législateur ou le Gouvernement qui définisse la portée d’une infraction, et non le juge, précisément pour que les gens puissent connaître la règle avant de commencer à jouer.

délais de traitement et de paiement des dossiers « maprimerénov’ » et « certificats d’économies d’énergie »

M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny, auteure de la question n° 189, transmise à Mme la ministre auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement.

Mme Anne-Sophie Romagny. Ma question porte sur les délais ou plutôt sur les retards de traitement et de paiement des dossiers relatifs à MaPrimeRénov’ et aux certificats d’économies d’énergie (C2E). Les mesures contradictoires prises ces dernières années en matière de rénovation énergétique ont poussé les particuliers et les personnes morales à différer leurs projets. J’avais déjà posé cette question en avril 2024, mais je n’avais pas obtenu de réponse du Gouvernement. Or la situation est loin de s’être améliorée depuis lors.

Les délais d’instruction des dossiers liés à MaPrimeRénov’ et aux C2E ont été allongés au-delà des deux mois promis, augmentant d’autant les délais de paiement. Ces délais allongés sont sans nul doute le résultat de primes complexes, dont les montants et les modes d’attribution sont modifiés tous les deux mois.

Documents aléatoires à fournir, manque de formation des instructeurs, rejet du dossier en raison de l’omission du tampon encreur, demande d’attestation d’adressage en complément de la taxe foncière, version obsolète du formulaire Espace conseil France Rénov’ (ECFR), manque d’efficience des opérations de contrôle des travaux réalisés sont autant d’exemples kafkaïens qui retardent les délais d’instruction.

Ces retards administratifs affectent la trésorerie des entreprises du bâtiment et leur capacité financière au point de conduire les artisans à s’interroger sur la viabilité de leurs entreprises.

Madame la ministre, comment le Gouvernement entend-il réduire ces délais d’instruction et de paiement afin d’améliorer la situation et de soutenir la compétitivité de nos entreprises artisanales ?

Les représentants des entreprises du bâtiment, telles que la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) ou la Fédération française du bâtiment (FFB), pourront vous proposer des solutions simples et pragmatiques.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Juliette Méadel, ministre déléguée auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ville. Madame la sénatrice Anne-Sophie Romagny, je vous réponds au nom de ma collègue Valérie Létard.

Depuis son lancement en 2020, MaPrimeRénov’ a permis de financer les travaux dans plus de 2,4 millions de logements, ce qui représente 11,7 milliards d’euros d’aides publiques. Ces chiffres témoignent d’une forte montée en puissance du dispositif.

Dans un contexte de forte demande, marqué par l’élargissement des bénéficiaires en 2021, la réforme des aides en 2024 et la mise en place du régime des services votés en ce début d’année 2025, certains dossiers n’ont effectivement pas pu aboutir dans les délais habituels. Toutefois, ces situations restent en nombre limité au regard des 540 000 dossiers instruits en moyenne chaque année par l’Agence nationale de l’habitat (Anah).

Par ailleurs, l’Anah a renforcé de manière significative sa politique de lutte contre la fraude. L’intensification des contrôles a permis de sécuriser le parcours des ménages, mais a pu également provoquer un allongement des délais d’instruction et de traitement des dossiers.

Aujourd’hui, l’Anah se mobilise activement pour fluidifier les parcours des usagers, en mettant en place une équipe dédiée aux situations les plus complexes. Les dossiers en difficulté font l’objet d’un suivi individualisé, d’une analyse systématique des difficultés remontées et d’un accompagnement des usagers. L’agence met également en place une démarche proactive d’identification des dossiers en difficulté avant leur signalement et, enfin, une sécurisation globale des plateformes.

Je vous confirme donc que le Gouvernement met en œuvre tous les moyens nécessaires pour assurer la qualité et la rapidité du traitement et de l’instruction des dossiers.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny, pour la réplique.

Mme Anne-Sophie Romagny. Je vous remercie, madame la ministre, de porter une grande attention à cette question. La viabilité des entreprises de nos artisans est en jeu.

Permettez-moi de vous remettre une liste de dysfonctionnements et d’aberrations administratives qui pourraient facilement être corrigés. Je n’ai pas pu tous les citer – la liste fait quatre pages ! –, mais les exemples sont parlants. Faisons preuve de pragmatisme : peut-être une réunion avec les artisans et les entreprises du bâtiment…

M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Anne-Sophie Romagny. … permettrait-elle de trouver des améliorations ? (Mme Anne-Sophie Romagny remet une liste à Mme la ministre déléguée.)

compétence « mobilité » des communautés de communes

M. le président. La parole est à Mme Florence Lassarade, auteure de la question n° 401, adressée à M. le ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation.

Mme Florence Lassarade. Ma question porte sur la compétence « mobilité » des communautés de communes.

La loi d’orientation des mobilités (LOM) du 24 décembre 2019 a instauré une couverture nationale par une autorité organisatrice de la mobilité. Elle a offert aux communautés de communes la possibilité d’assumer cette compétence jusqu’au 31 mars 2021. Au-delà de cette date, celles qui n’ont pas pris de décision en ce sens ont vu cette compétence automatiquement transférée aux régions.

Les choix des communautés de communes ont été contrastés : certaines ont décidé de conserver la compétence « mobilité », tandis que d’autres l’ont laissée à la région.

Une nette différence géographique est observée : dans les Pays de la Loire, la Bretagne, la Normandie, le Grand Est et les Hauts-de-France, plus de 80 % des communautés de communes ont choisi d’exercer cette compétence. En revanche, en Auvergne-Rhône-Alpes, en Provence-Alpes-Côte d’Azur et en Nouvelle-Aquitaine, elles sont moins de 30 %. En Occitanie, seules trois communautés de communes ont conservé cette responsabilité, toutes les autres l’ayant transférée à la région.

Le fait que de nombreuses communautés de communes aient choisi de ne pas exercer cette compétence s’explique par plusieurs raisons : la crise sanitaire, le report des élections municipales, mais aussi la réticence de certaines régions souhaitant garder cette prérogative et un manque de temps pour évaluer les enjeux d’une telle prise de compétence.

Une modification de la LOM permettrait aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de délibérer de nouveau sur la prise de la compétence « mobilité », en rouvrant au profit des communautés de communes la possibilité d’engager un nouveau travail sur celle-ci pendant un temps déterminé suffisamment long pour fixer finement le contenu des services concernés. Il s’agit de permettre aux territoires de se rendre compétents, lorsqu’ils le souhaitent, à leur rythme et selon leurs besoins.

Madame la ministre, je souhaiterais connaître la position du Gouvernement sur cette proposition.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Juliette Méadel, ministre déléguée auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ville. Madame la sénatrice Florence Lassarade, comme vous l’indiquez, en application de l’article 8 de la loi du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités, la délibération de l’organe délibérant des communautés de communes ayant souhaité devenir autorité organisatrice de la mobilité (AOM) devait intervenir avant le 31 mars 2021. À défaut, c’est la région qui devenait AOM sur le ressort territorial de la communauté de communes concernée à compter du 1er juillet 2021.

Depuis cette date, une communauté de communes qui n’aurait pas pris la compétence « mobilité » ne peut plus, si sa position évolue, se la voir transférer par la région.

Le Gouvernement partage votre constat sur le caractère contrasté des choix effectués par les communautés de communes dans le cadre de la LOM. Les établissements publics de coopération intercommunale qui n’ont pas conservé la compétence « mobilité » se trouvent, en effet, en difficulté lorsque, ultérieurement, ils souhaitent voir se développer une offre de mobilité sur leur territoire.

L’outil qu’est la délégation de compétences, même s’il offre une souplesse dans l’exercice des compétences à l’échelon local, ne permet pas toujours de répondre aux enjeux de manière satisfaisante.

Rouvrir aux communautés de communes la possibilité de devenir AOM conduirait néanmoins à revenir sur une organisation territoriale de la gouvernance « mobilité » encore trop récente et, par ailleurs, voulue par les acteurs locaux qui ont eu, comme vous le rappeliez, l’opportunité et le temps de choisir.

En outre, cela nécessiterait éventuellement de prévoir des transferts de lignes de transport existantes et qui répondent aux besoins des populations en matière de mobilité.

Le Gouvernement réfléchit toutefois à la possibilité de permettre aux établissements publics de coopération intercommunale de délibérer de nouveau sur la prise de la compétence « mobilité », en la rouvrant au profit des communautés de communes. En tout état de cause, cela nécessitera, au préalable, une discussion avec les régions et les EPCI.

M. le président. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour la réplique.

Mme Florence Lassarade. Je vous remercie d’avoir pris le sujet en considération, madame la ministre.

À l’époque où il a fallu prendre une décision sur cette compétence, j’étais élue d’une commune. Je l’ai vu, les décisions ont été prises dans la précipitation. Or la précipitation n’est pas une bonne chose dans de tels cas !

objectifs triennaux de la loi « solidarité et renouvellement urbains » et crise immobilière

M. le président. La parole est à M. Éric Dumoulin, auteur de la question n° 433, adressée à Mme la ministre auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée du logement.

M. Éric Dumoulin. Madame la ministre, ma question porte sur les difficultés d’application de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU), actualisée par la loi dite Duflot 1.

L’atteinte des objectifs triennaux de 25 % de logements sociaux fixés par l’article 55 de la loi SRU se révèle, dans de nombreux cas, irréalisable, voire chimérique.

De nombreuses villes carencées sont en effet confrontées à une situation paradoxale : alors que beaucoup ont achevé leur développement urbanistique ou disposent d’une configuration spécifique – les espaces constructibles y sont rares, voire inexistants –, elles sont soumises à des obligations chiffrées et à des délais de réalisation inatteignables.

Mais ce n’est pas tout ! La crise immobilière qui frappe très durement le secteur vient encore compliquer la situation, laquelle est aggravée par une flambée des coûts de construction, des taux d’intérêt plus élevés, qui freinent les investissements, et une raréfaction marquée des financements publics comme privés.

Nombre d’opérateurs se désengagent ainsi purement et simplement de projets immobiliers pourtant largement avancés, certains ayant même déjà obtenu un permis de construire par la collectivité.

Dans ce contexte, les objectifs de la période triennale 2023-2026, qui va bientôt s’achever, sont d’ores et déjà compromis et se révèlent, plus encore qu’avant, totalement déconnectés de la réalité au regard de la crise immobilière que je viens d’évoquer.

Madame la ministre, quelles mesures envisagez-vous de prendre pour ne pas aggraver, voire pour alléger les pénalités qui seront dues par les communes carencées dans le cadre de cette période triennale, a fortiori dans un contexte de grande tension budgétaire, qui nous concerne tous ?

D’une manière plus générale, envisagez-vous de faire évoluer cette législation afin de mieux prendre en compte les spécificités territoriales, et ce très au-delà des contrats de mixité sociale ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Juliette Méadel, ministre déléguée auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ville. Monsieur le sénateur Éric Dumoulin, l’article 55 de la loi SRU a créé, vous le savez, un dispositif qui permet d’orienter chaque année près de 50 % de la production de logements sociaux vers les communes aujourd’hui déficitaires, dans un objectif de mixité sociale. Nous restons attachés à l’enjeu essentiel de développement d’une offre sociale équilibrée sur le territoire.

La trajectoire de rattrapage a été adaptée en 2022, dans la loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, dite loi 3DS.

D’une part, la révision du mode de calcul des trajectoires a conduit à réduire les objectifs triennaux. D’autre part, la loi 3DS a ouvert la possibilité d’abaisser encore les objectifs dans le cadre des contrats de mixité sociale. Ainsi, sur les 1 153 communes déficitaires à l’échelon national, 353 contrats de mixité sociale ont été signés, dont 187 permettant un abaissement de l’objectif.

Les préfets prennent en compte le volontarisme de la commune, tout comme les difficultés qui s’imposent à elle. Ces considérations seront reconduites pour l’analyse du bilan 2023-2025.

Il est vrai que nous assistons, avec la baisse récente des taux d’intérêt, à une reprise de la construction. Il nous faut amplifier ce rebond pour relancer durablement la construction et la production sociale, notamment dans les communes déficitaires. C’est le sens des mesures que Valérie Létard a portées dans la loi de finances pour 2025, comme vous l’avez vu. C’est aussi le sens de la feuille de route qu’elle a signée avec les fédérations du logement social au mois de février dernier.

projet de port industriel à vigneux-sur-seine

M. le président. La parole est à M. Laurent Lafon, auteur de la question n° 440, transmise à M. le ministre auprès du ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé des transports.

M. Laurent Lafon. Madame la ministre, j’attire votre attention sur un projet qui suscite une vive inquiétude dans le Val-de-Marne et dans l’Essonne : le port industriel de Vigneux-sur-Seine, porté par l’établissement public Haropa Port, placé sous la tutelle de la direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités (DGITM) du ministère des transports.

L’objectif affiché est clair : développer l’axe Seine, renforcer l’activité industrielle et portuaire. Pourtant, sur le terrain, l’opposition est forte. Le maire d’Ablon-sur-Seine, Éric Grillon, ainsi que de nombreux élus et habitants, dénonce les effets négatifs de ce projet de plateforme multimodale à vocation régionale sur les rives de Vigneux-sur-Seine et du pont de franchissement entre Vigneux-sur-Seine et Athis-Mons.

Trois préoccupations majeures émergent.

D’abord, la mobilité. Le réseau routier est déjà saturé. L’implantation de ce port multimodal, couplée à la construction du pont reliant Vigneux à Ablon, risque d’aggraver la situation : davantage de trafic, plus de congestion. La circulation accrue des poids lourds, les nuisances sonores, la pollution de l’air et de l’eau, les lumières nocturnes, ainsi que les manœuvres des bateaux auront des conséquences pour les riverains, à quelques mètres seulement de leurs habitations.

Ensuite, l’environnement. Nous parlons ici de l’une des plus belles rives naturelles de la Seine en Île-de-France. Ce projet entraînera la destruction et l’artificialisation de plus de 50 hectares de zones humides et d’espaces naturels classés, ainsi que la déforestation de 30 hectares en bord de Seine.

Enfin, la concertation. Elle est largement insuffisante. Un projet d’une telle ampleur ne saurait être préparé sans un dialogue approfondi avec les élus locaux et les habitants.

Madame la ministre, comment le Gouvernement entend-il, sur ce dossier, concilier développement économique et impératifs écologiques ?

Peut-on envisager de revoir l’ampleur du projet, d’en adapter la conception afin de limiter ses impacts et de préserver cette zone naturelle essentielle à l’environnement ?

Surtout, face aux mobilisations citoyennes et à l’inquiétude parfaitement légitime des élus locaux, quelles garanties concrètes le Gouvernement peut-il offrir pour assurer une véritable concertation avant d’engager un projet aux conséquences néfastes et irréversibles ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Juliette Méadel, ministre déléguée auprès du ministre de laménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ville. Monsieur le sénateur Lafon, le ministre chargé des transports, Philippe Tabarot, comprend les inquiétudes que le projet de Vigneux-sur-Seine suscite dans votre territoire. Il m’a chargée de vous apporter les précisions suivantes.

Haropa Port, le grand port fluviomaritime de l’axe Seine, est en effet propriétaire d’un terrain d’environ 110 hectares sur la commune de Vigneux-sur-Seine, dans l’Essonne. Si ce terrain avait été acquis dans les années 1990 avec l’objectif d’y développer une plateforme industrielle portuaire sur sa totalité, je peux vous assurer que ce projet initial n’est plus d’actualité.

En effet, le nouveau schéma directeur environnemental de la région d’Île-de-France (Sdrif-E), adopté par le conseil régional le 11 septembre 2024, redéfinit complètement l’aménagement de cette zone. Il prévoit désormais une urbanisation à vocation industrielle et multimodale limitée à 35 hectares le long de la voie ferrée, soit moins d’un tiers de la surface initiale. Plus important encore, il garantit la préservation d’une armature verte en bord de Seine sur la majeure partie du terrain.

Cette nouvelle orientation pose les bases d’un projet plus équilibré, qui concilie les enjeux de développement économique et de préservation écologique, en phase avec les défis actuels.

En ce qui concerne vos interrogations sur la concertation, je peux vous indiquer qu’Haropa Port est actuellement en phase de réflexion préalable. Une fois le nouveau Sdrif-E en application, une concertation approfondie sera engagée avec l’ensemble des acteurs du territoire. Cette démarche permettra d’entendre et de prendre en compte les préoccupations légitimes que vous relayez, qu’il s’agisse des impacts sur le cadre de vie, des nuisances potentielles ou des enjeux de circulation.

Le ministre chargé des transports et son cabinet restent à votre disposition pour suivre l’évolution de ce dossier, qui revêt une importance particulière pour votre territoire.

non-application de la charte sociale européenne dans les outre-mer

M. le président. La parole est à Mme Audrey Bélim, auteure de la question n° 400, adressée à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Mme Audrey Bélim. Monsieur le ministre délégué, j’attire votre attention sur l’exclusion des outre-mer français du périmètre de la Charte sociale européenne.

Rédigée au début des années 1960, la Charte sociale européenne garantit des droits fondamentaux en matière de santé, de logement, d’éducation, d’emploi et de protection sociale. Or, lors de la signature de ce traité international, la France a choisi d’exclure ses territoires ultramarins de son champ d’application. Cette situation perdure depuis plus de soixante ans !

Aucune modification n’a été apportée pour inclure nos trois millions de concitoyens ultramarins. Pourtant, l’extension de la portée de ce texte aux territoires ultramarins ne nécessiterait qu’une simple notification adressée par le gouvernement français au Secrétaire général du Conseil de l’Europe.

D’autres pays européens comptant des territoires ultramarins ont fait des choix différents. À titre d’exemple, les Pays-Bas appliquent la Charte à la partie néerlandaise de l’île de Saint-Martin, alors que la partie française de cette même île en est exclue.

La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) a qualifié cette situation d’« inacceptable » dans un avis adopté à l’unanimité. En mars 2024, une réclamation collective contre la France a été déposée devant le Comité européen des droits sociaux (CEDS) par plusieurs associations de défense des droits humains. La semaine dernière, le CEDS a jugé irrecevable une réclamation, au motif que la France n’a pas déclaré qu’elle étendait l’application de la Charte aux outre-mer.

Cette exclusion pose une question fondamentale d’égalité des droits entre les citoyens de l’Hexagone et ceux des outre-mer, particulièrement dans un contexte où les spécificités de nos territoires, notamment La Réunion, nécessitent une protection sociale renforcée.

Quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour mettre fin à cette discrimination historique et pour étendre enfin l’application de la Charte sociale européenne aux territoires ultramarins ? Il s’agit ainsi de garantir l’égalité des droits pour l’ensemble des citoyens français, quel que soit leur lieu de résidence, à Saint-Denis, Cayenne ou Paris.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de la francophonie et des partenariats internationaux. Madame la sénatrice, chère Audrey Bélim, je m’y engage devant vous, la Charte sociale européenne et sa garantie des droits économiques et sociaux seront bientôt appliquées uniformément à l’ensemble du territoire national. Une demande sera formulée au Conseil de l’Europe pour en étendre l’applicabilité aux départements et régions d’outre-mer. Une simple demande suffira. Enfin, une consultation préalable sera menée dans les collectivités d’outre-mer.

Les récents rapports d’information du Sénat, dont je salue la qualité légendaire, sur l’action de l’État outre-mer ou sur la gestion de l’eau potable et de l’assainissement en outre-mer illustrent l’ampleur des défis auxquels ces territoires sont confrontés, qui en appellent à un investissement public soutenu.

C’est précisément le sens de l’action du Gouvernement : le budget des outre-mer a été revalorisé de 11 % en autorisations d’engagement et de 6 % en crédits de paiement par rapport au budget initial. L’effort total s’élève à près de 25 milliards d’euros, malgré un contexte budgétaire particulièrement contraint.

J’ajoute que, si la Charte ne comporte pas d’effet direct, les réclamations ne pouvant être introduites que par des organismes habilités, cette procédure non contraignante contribue, tout comme les voies de recours nationales et internationales déjà existantes, au principe de l’État de droit, qui guide notre action en France métropolitaine, en outre-mer et, je tiens à vous l’assurer, dans le monde.

manque de statistiques fiables des infanticides

M. le président. La parole est à Mme Laurence Harribey, auteure de la question n° 362, adressée à M. le ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Laurence Harribey. Monsieur le ministre délégué, il y a plus d’un an, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) mettait en exergue le fait que les enfants tués par leurs parents ne faisaient l’objet d’aucun recensement précis en France et alertait sur une situation inquiétante.

Le dernier rapport sur les morts violentes d’enfants au sein des familles date de 2018. Il dénombrait 363 victimes entre 2012 et 2016, soit un décès tous les cinq jours. Ce chiffre alarmant ne reflète qu’une partie du phénomène, car il ne tient compte ni du « chiffre noir » des néonaticides non révélés ni des enfants victimes du syndrome du bébé secoué non diagnostiqué.

Des morts sont donc ignorées, faute d’autopsie sur les corps d’enfants présupposés morts naturellement ou accidentellement. Le manque de données fiables, dû à des absences ou à des erreurs de diagnostic, laisse à penser que le nombre de morts d’enfants est en réalité plus important.

En 2022, le Gouvernement affichait dans son plan de lutte contre les violences faites aux enfants l’objectif louable de disposer de données en vue d’une meilleure prévention des infanticides. Malheureusement, rien n’a évolué depuis.

Monsieur le ministre délégué, quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre pour améliorer le recensement statistique des enfants tués par leurs parents ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de la francophonie et des partenariats internationaux. Madame la sénatrice, chère Laurence Harribey, en effet, les statistiques qui sont à la disposition du ministère de la justice ne permettent pas, à ce jour, d’évaluer le nombre d’enfants tués par leurs parents, qu’il s’agisse d’atteintes volontaires à la vie ou de violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner.

Toutefois, la circulaire du 28 mars 2023 relative à la politique pénale en matière de lutte contre les violences faites aux mineurs isole précisément dans le champ infractionnel retenu les seuls ascendants directs par rapport aux autres personnes ayant autorité et comprend des directives visant à mieux appréhender et traiter, sur un plan judiciaire, les morts violentes de mineurs liées à une infraction volontaire commise dans la sphère familiale ou institutionnelle.

Cette circulaire invite, par ailleurs, les parquets généraux à informer de manière systématique la direction des affaires criminelles et des grâces de la survenance de tels drames, y compris dans les cas de syndrome du bébé secoué ou de mort en lien avec le suicide des parents.

Elle vise également à mettre en œuvre un retour d’expérience systématique sur ces décès, l’objectif étant d’analyser a posteriori chaque infanticide commis dans la sphère familiale, de retenir les éléments pertinents en matière de prévention et de traitement judiciaire de ces drames, afin de les pérenniser et d’identifier les axes d’amélioration à travailler.

Cette circulaire encourage aussi la conclusion de partenariats renforcés avec le milieu médical pour favoriser le signalement des morts violentes d’enfants au sein des familles pouvant notamment être en lien avec le syndrome du bébé secoué.

Comme vous le voyez, sur ce sujet très grave, nous poursuivons nos efforts. Je vous remercie de votre engagement à cet égard, madame la sénatrice.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Harribey, pour la réplique.

Mme Laurence Harribey. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour ces éléments qui montrent que ce problème est pris en considération.

Je propose que le Gouvernement établisse un bilan officiel permettant de connaître les améliorations à apporter. Je pense également qu’il conviendrait, comme vous l’avez laissé entendre, d’engager une réflexion sur certaines requalifications pénales afin de mieux « coller » à la spécificité criminologique de certains actes commis. Nous sommes prêts à travailler en ce sens.

téléconsultation médicale des personnes placées en garde à vue

M. le président. La parole est à M. Édouard Courtial, auteur de la question n° 372, adressée à M. le ministre d’État, garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Édouard Courtial. Monsieur le ministre délégué, l’Oise est à l’avant-garde d’une innovation qui pourrait améliorer le déroulement des gardes à vue.

Depuis le 20 février dernier, et pour la première fois sur le territoire français, les personnes dont la garde à vue est prolongée au sein de la compagnie de gendarmerie de Senlis peuvent utiliser une borne de télémédecine si elles souhaitent bénéficier d’une consultation médicale. Ce dispositif avait été rendu possible par la loi du 20 novembre 2023 d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027.

Ce qui paraissait être une bonne idée à l’époque l’est tout autant aujourd’hui ! En effet, le dispositif permet d’améliorer le quotidien de tous, en particulier celui des forces de l’ordre.

Le recours à la téléconsultation médicale pour les personnes placées en garde à vue est une aubaine, et ce d’autant plus pour des territoires ruraux comme l’Oise, qui sont frappés par la désertification médicale et la saturation des services d’urgence hospitaliers.

En effet, ce dispositif garantit le droit de toute personne de consulter un médecin dans les meilleurs délais. Il est également – et surtout – utile pour les forces de l’ordre, auxquelles il permet de gagner un temps précieux.

Auparavant, pour que les gardés à vue puissent consulter un médecin, les gendarmes de Senlis devaient effectuer un trajet de vingt minutes pour se rendre aux urgences de Creil, attendre sur place, puis faire le trajet retour. Dispensés de ce trajet, ils bénéficient aujourd’hui de temps supplémentaire pour s’occuper d’autres missions, telles que la lutte contre la criminalité organisée, véritable fléau qui empoisonne la vie de tous les Français.

Nos concitoyens profitent aussi de ce dispositif qui, en limitant les déplacements des gardés à vue, diminue le risque de potentielles évasions.

Alors que les bornes de télémédecine apportent une aide précieuse aux gendarmes tout en améliorant les conditions d’accès à la santé des personnes gardées à vue, il est étonnant que ce genre de dispositif n’existe que dans l’Oise, à Senlis. La France, et tout particulièrement les zones rurales, aurait beaucoup à gagner en utilisant de telles bornes.

Ma question est simple : l’État compte-t-il étendre le recours à la téléconsultation médicale par les personnes placées en garde à vue ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de la francophonie et des partenariats internationaux. Monsieur le sénateur, cher Édouard Courtial, vous le savez, l’article 63-3 du code de procédure pénale a été complété par la loi n° 2023-1059 du 20 novembre 2023 d’orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027, et par le décret n° 2024-1041 du 18 novembre 2024 relatif aux modalités de réalisation de l’examen médical à distance en cas de prolongation de garde à vue.

Cette modification avait pour but de prévoir la possibilité de réaliser l’examen médical de comptabilité avec la garde à vue en cas de prolongation de la mesure, par vidéotransmission ou tout autre moyen de télécommunication audiovisuelle, et ce même si aucun examen médical n’est intervenu au cours des vingt-quatre premières heures. Ces dispositions sont applicables depuis le 21 novembre 2024.

Le recours à la téléconsultation pour l’examen médical de comptabilité avec la garde à vue suppose l’installation préalable de bornes de télémédecine au sein des services de police et de gendarmerie. Le ministère de la justice est favorable au déploiement de ces bornes qui relèvent, en premier lieu, du ministère de l’intérieur, lequel est – soyez-en certain – très sensibilisé sur ce sujet.

problèmes d’immatriculation des motos de collection auprès des services de l’agence nationale des titres sécurisés

M. le président. La parole est à Mme Else Joseph, auteure de la question n° 347, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

Mme Else Joseph. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, je croyais fort naïvement que le monde des collectionneurs était préservé de la bureaucratie et de son univers kafkaïen ! Or je découvre que même les paisibles collectionneurs de motos se heurtent à un parcours compliqué de nature à les dissuader de s’adonner à un plaisir de l’âme : la collection, un loisir sain et une belle occupation pour beaucoup de Français.

Au début, il s’agit simplement d’accomplir des formalités et d’obtenir la fameuse carte grise. Mais cette quête vous fait devenir vert de rage et rouge de colère lorsque le site de l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) ne reconnaît pas le véhicule !

Après des clics en série, on se dit : « Autant utiliser le téléphone ! » Mais nos interlocuteurs sont aux abonnés absents. Enfin, même lorsque l’on retourne sur internet, le numéro d’immatriculation n’est toujours pas reconnu… Tous ces clics et ces couacs démontrent l’absurdité d’une démarche que l’on croyait pourtant fort simple.

Le rendez-vous « en présentiel » ne donne rien non plus : les tentatives auprès de France Services, tout comme le rendez-vous en préfecture, se révèlent vains. J’ai eu l’impression d’être dans Les 12 travaux dAstérix, à la recherche du formulaire 104 ! Et je découvre que, même sur le web, on peut se perdre dans un dédale sans fin… Le paradis des collectionneurs devient alors un enfer ; un comble pour des personnes qui veulent tout faire pour rester dans la légalité.

Monsieur le ministre, que pouvez-vous répondre à ces patients collectionneurs de motos, qui aimeraient pouvoir paisiblement immatriculer leur véhicule auprès de l’ANTS ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de la francophonie et des partenariats internationaux. Madame la sénatrice, chère Else Joseph, certains véhicules anciens, parmi lesquels figurent des motos de collection, disposent toujours d’une immatriculation délivrée avant 2009, dans un format que les plus anciens d’entre nous ont bien connu.

Certaines opérations, telles qu’un changement de titulaire ou d’adresse, nécessitent au préalable de réaliser une conversion qui peut dans certains cas – je vous le concède – dérouter l’usager. Mais un parcours guidé permet aujourd’hui aux usagers de réaliser ces opérations sur le portail ants.gouv.fr.

Près de 10 000 opérations concernant des véhicules de collection ont été réalisées en 2024, et 2 707 d’entre elles ont impliqué des conversions, toutes réalisées jusqu’à leur terme. Parmi celles-ci, le nombre de cas signalés de personnes en difficulté est resté très marginal.

Pour autant, le problème que vous évoquez, madame la sénatrice, fera l’objet d’une attention particulière de la part de l’agence France Titres, anciennement ANTS, qui dispose d’un service efficace de soutien aux usagers, notamment au travers de son centre d’appels ; et vous le connaissez bien, madame la sénatrice, puisqu’il est implanté à Charleville-Mézières ! Cette agence met tout en œuvre pour réduire les délais d’attente et améliorer la qualité du service qu’elle assure auprès de l’ensemble des usagers.

Enfin, le système d’immatriculation des véhicules (SIV), qui est en cours de refonte pour mieux répondre aux besoins des usagers et des professionnels de l’automobile, sera déployé de façon progressive entre 2025 et 2027.

Nous espérons donc que les difficultés que vous avez évoquées seront bientôt résolues.

M. le président. La parole est à Mme Else Joseph, pour la réplique.

Mme Else Joseph. Je suis preneuse d’un tutoriel pour m’initier à cette méthode qui a l’air assez simple ! Mais je ne sais pas si toutes les difficultés se concentrent dans les Ardennes, ou si l’on en rencontre dans d’autres régions de France… Certains collectionneurs m’ont également fait part de leur souhait de conserver leur ancienne immatriculation.

Quoi qu’il en soit, je vous remercie, monsieur le ministre, de vos réponses concrètes, pratiques et rapides à mes questions. Celles-ci n’ont rien à voir – je rassure tout le monde – avec la plateforme ANTS de Charleville-Mézières, laquelle fonctionne très bien !

nouvelles gendarmeries dans l’aisne

M. le président. La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen, auteur de la question n° 358, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

M. Pierre-Jean Verzelen. Monsieur le ministre, le 2 octobre 2023, le Président de la République annonçait la création de 238 brigades de gendarmerie. Ainsi, dans le département de l’Aisne, trois brigades vont être créées, deux brigades fixes à Saint-Gobain et Aubenton et une brigade mobile à Neuilly-Saint-Front.

Depuis lors, ces communes se sont organisées pour trouver des terrains et prévoir des locaux pour accueillir les gendarmeries, mais aussi les logements des gendarmes et de leurs familles. Les bailleurs et les investisseurs, pour le volet immobilier, sont prêts, et les services immobiliers de la gendarmerie ont validé les trois projets.

Ma question est très simple : quand ces dossiers seront-ils officiellement signés et quand les travaux pourront-ils démarrer ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de la francophonie et des partenariats internationaux. Monsieur le sénateur, cher Pierre-Jean Verzelen, le Président de la République a annoncé la création de 239 nouvelles brigades de gendarmerie d’ici à 2027. Ainsi, en 2024, les 80 premières brigades ont été créées dans 64 départements métropolitains et 8 départements ou collectivités d’outre-mer.

Pour 2025, la volonté du Gouvernement est de poursuivre le plan de déploiement de ces nouvelles brigades, bien que le calendrier de création des unités ne soit pas encore totalement arrêté, afin de tenir compte notamment des contraintes budgétaires et des autorisations à recruter qui seront accordées. Une priorisation sera envisagée pour les 27 départements qui n’ont pas bénéficié de la création d’une brigade en 2024, dont l’Aisne.

Comme vous l’indiquez, trois projets de création de brigades ont été retenus dans votre département : deux brigades fixes, à Saint-Gobain et Aubenton, et une brigade mobile, à Neuilly-Saint-Front. L’État, pleinement conscient des interrogations des élus locaux, veille à accompagner ces projets dans la durée. L’implication des collectivités locales est un facteur clé de réussite pour l’installation de ces brigades.

Le ministre de l’intérieur, qui suit ce dossier avec la plus grande attention, fera des annonces officielles dans les prochaines semaines. Tels sont, monsieur le sénateur, les éléments qu’il souhaitait vous apporter sur ce sujet sensible et important.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen, pour la réplique.

M. Pierre-Jean Verzelen. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre délégué. J’ai bien compris qu’il existait des complexités budgétaires et que le ministre de l’intérieur allait bientôt s’exprimer. Mais il y va de la parole de l’État : dès lors que le Président de la République annonce qu’il y aura des gendarmeries dans certaines communes, celles-ci – vous l’avez compris – ont besoin de visibilité.

section aérienne de gendarmerie de limoges

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet, auteure de la question n° 411, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

Mme Isabelle Briquet. Monsieur le ministre délégué, ma question porte sur le fonctionnement et, surtout, sur le devenir de la section aérienne de gendarmerie nationale (SAG) de Limoges. Comme celle d’Égletons, en Corrèze, et celle de Bayonne, dans les Pyrénées-Atlantiques, celle-ci devra fermer temporairement, à plusieurs reprises, au cours de l’année 2025, afin que soient réalisées des interventions de maintenance sur la flotte vieillissante d’hélicoptères Écureuil utilisée par ces forces.

Vous le savez, ces fermetures suscitent de vives inquiétudes, tant le rôle joué par les femmes et les hommes de ce service public en matière de maintien de l’ordre et de secours aux personnes est important dans nos territoires ruraux comme urbains.

Il y a peu, François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur, a répondu à mon collègue député de la Haute-Vienne, Stéphane Delautrette, que de nouveaux hélicoptères étaient commandés et qu’ils seraient « normalement » – j’insiste sur ce mot ! – livrés dans les prochains mois.

Au regard du contexte international, de la dégradation des finances publiques et de l’annulation de 8 milliards d’euros de crédits, à ce jour, dans le budget pour 2025, pouvez-vous m’assurer que ces nouveaux matériels seront bien livrés, que la SAG de Limoges en bénéficiera rapidement, et me confirmer que la pérennité de ladite section n’est en rien menacée ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de la francophonie et des partenariats internationaux. Madame la sénatrice, vous l’avez souligné, la flotte aérienne de la gendarmerie est vieillissante et nécessite une vigilance particulière en termes de maintenance. En 2025, les forces aériennes doivent subir une augmentation de la fréquence des visites périodiques ; aussi davantage d’hélicoptères EC145 sont-ils indisponibles.

Plus anciens, les hélicoptères Écureuil seront progressivement réformés : la manœuvre générale de retrait du service a débuté et devrait être achevée en 2029.

Dans ce contexte, la gendarmerie se trouve contrainte de prendre des mesures de gestion. Des sections aériennes seront fermées temporairement, dont celle de Limoges, le temps de conduire les opérations de maintenance obligatoires et de garantir au mieux la sécurité des vols et le contrat opérationnel des forces de gendarmerie.

Pour remédier à cette situation, des redéploiements de machines entre les sections aériennes permettront dans un premier temps de préserver au mieux leur fonctionnement. Par ailleurs, un renouvellement de la flotte est entrepris pour une parfaite adaptation aux besoins opérationnels. Je vous confirme que seize hélicoptères de nouvelle génération – H160 et H145-D3 – sont commandés pour remplacer les appareils Écureuils réformés.

L’affermissement de la tranche conditionnelle du contrat d’acquisition des appareils H145-D3 d’ici à 2027, au profit du ministère de l’intérieur, permettra notamment de préserver la capacité « hélicoptère de sécurité publique ».

Tels sont les précisions que M. le ministre de l’intérieur tenait à vous apporter.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour la réplique.

Mme Isabelle Briquet. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre, et j’espère pouvoir bientôt partager votre optimisme. En effet, le renouvellement de la flotte est un impératif pour assurer la disponibilité des moyens aériens et leur adéquation aux besoins opérationnels.

Sur le terrain, les élus locaux sont très attachés à la gendarmerie, à sa présence dans les territoires et à l’entièreté de ses missions. Plus tôt les hélicoptères seront disponibles, plus vite ils seront opérationnels sur le terrain. Nous n’aurons plus, alors, à nous poser de questions sur la pérennité de nos sections aériennes de gendarmerie.

urgence d’une solution pour reloger la direction départementale de la police nationale de l’ariège

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, auteur de la question n° 427, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

M. Jean-Jacques Michau. Monsieur le ministre, je souhaite de nouveau attirer l’attention du ministre de l’intérieur sur la situation préoccupante des locaux de la direction départementale de la police nationale (DDPN) de l’Ariège, à Foix. Aujourd’hui dispersées sur trois sites vétustes et inadaptés, ces infrastructures ne permettent plus aux quatre-vingt-dix agents de remplir efficacement leurs missions.

Problèmes de salubrité, manque d’espace de travail, non-conformité aux normes de sécurité incendie et d’accessibilité, stationnement insuffisant : toutes ces contraintes pèsent sur les conditions de travail des policiers et compromettent leur sécurité. Malgré des travaux ponctuels, ces interventions coûteuses ne règlent pas les problèmes structurels.

Face à cette situation, le projet de relocalisation dans les anciens locaux de la Banque de France, à Foix, constitue une opportunité unique. Ce bâtiment sécurisé et fonctionnel permettrait de regrouper l’ensemble des services, tout en optimisant les coûts à long terme.

Ce bâtiment, de nouveau disponible à la vente, représente une opportunité qu’il convient de saisir sans tarder. Un retard dans la prise de décision risquerait de compromettre le projet, au détriment des agents et des habitants du département de l’Ariège.

Alors que ce projet bénéficie d’un large soutien local, je souhaite savoir si l’État compte acheter dès cette année ces locaux et engager rapidement des travaux, afin de permettre aux agents de la police nationale de l’Ariège d’accomplir leurs missions dans des conditions optimales.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de la francophonie et des partenariats internationaux. Monsieur le sénateur, cher Jean-Jacques Michau, chaque jour, les policiers s’engagent sur le terrain pour protéger les Français : ils méritent de bénéficier de locaux dignes d’un service public moderne et respectueux de ses agents.

L’amélioration du parc immobilier est une attente forte et légitime de très nombreux policiers, car trop de commissariats sont encore inadaptés et vétustes. C’est notamment le cas des locaux, qui sont de plus exigus, de la direction départementale de la police nationale (DDPN) de l’Ariège, à Foix, même si des travaux sont régulièrement effectués.

Tous les acteurs concernés, policiers comme élus, conviennent de la nécessité d’un relogement. Vous l’avez dit, le bâtiment récemment libéré par la Banque de France pourrait certainement accueillir l’ensemble des services de la DDPN. Des échanges, qui portent tant sur le volet technique que sur le volet financier, ont lieu entre la Banque de France et nos services déconcentrés. Ce n’est qu’une fois que ces points auront été examinés que nous pourrons étudier la possibilité d’engager des disponibilités budgétaires.

Monsieur le sénateur, dans l’attente d’une véritable opération de relogement, le Gouvernement fera tout ce qui est possible pour que les policiers de Foix puissent travailler dans des conditions acceptables.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, pour la réplique.

M. Jean-Jacques Michau. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, mais j’insiste sur l’urgence de ce dossier. Trouver une solution concrète témoignerait de l’engagement de l’État à assurer tant la sécurité des Ariégeois que de bonnes conditions de travail aux fonctionnaires.

délais de livraison d’un hélicoptère de modèle h145 au bénéfice de la section aérienne de gendarmerie de briançon-villar-saint-pancrace

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, auteur de la question n° 432, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

M. Jean-Michel Arnaud. Monsieur le ministre, ma question porte sur les délais de livraison d’un hélicoptère de modèle H145 à la section aérienne de gendarmerie (SAG) de Briançon-Villar-Saint-Pancrace, situé dans le département dont je suis l’élu, les Hautes-Alpes.

Au début de l’année 2024, le ministre de l’intérieur a passé une commande globale de quarante-deux hélicoptères, dont six au bénéfice des forces aériennes de la gendarmerie nationale, auxquelles un premier appareil a été livré en novembre dernier. La section aérienne de gendarmerie de Briançon possède depuis 2008 un appareil Écureuil 145, dont l’usage, du fait de ses caractéristiques techniques limitées, est de moins en moins opérant.

Le peloton de gendarmerie de haute montagne (PGHM) de Briançon est aujourd’hui la deuxième drop zone de France. Il réalise plus de mille missions aériennes chaque année, dont certaines demandent un grand professionnalisme et du matériel performant. Je pense ainsi à l’opération du 24 décembre dernier, l’évacuation de 240 skieurs bloqués sur un télésiège en panne à la station de Superdévoluy dans le département des Hautes-Alpes.

Vous l’aurez compris, la livraison de ce nouvel hélicoptère H145, plus puissant que la machine actuelle, est nécessaire pour élargir le spectre des opérations de secours réalisables. En effet, son moteur, beaucoup plus puissant que celui de l’Écureuil, autorise, par exemple, l’emport d’un nombre supérieur de personnels, mais aussi de davantage de matériel. Ce nouvel appareil est également souhaitable parce qu’il facilitera les interventions en cas de vents traversiers, qui sont fréquents en haute altitude dans le département des Hautes-Alpes.

Les délais de livraison de ces nouveaux appareils s’étalent jusqu’à l’année 2028, mais la SAG de Briançon doit impérativement être prioritaire, d’autant que l’hélistation en question héberge aussi le centre de vol en montagne dédié à la formation du personnel.

Monsieur le ministre, pouvez-vous m’indiquer dans quel délai ce nouvel hélicoptère, tant attendu dans le département des Hautes-Alpes, sera livré à Briançon ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de la francophonie et des partenariats internationaux. Monsieur le sénateur, cher Jean-Michel Arnaud, la flotte aérienne de la gendarmerie nationale est vieillissante : elle requiert une vigilance particulière en termes de maintenance et nécessite un renouvellement significatif.

Un marché d’acquisition de H145 D3 a été notifié. Il comprend une tranche ferme de six appareils et une tranche complémentaire de vingt-deux appareils.

Sur les six premiers hélicoptères, deux sont financés dans le cadre des accords de Sandhurst et seront affectés à la force aérienne nord pour lutter contre l’immigration irrégulière dans la zone de la Manche et de la mer du nord.

Les quatre autres seront répartis de la manière suivante : le premier sera affecté à la section aérienne de gendarmerie de Chamonix en 2026 ; un autre, livré en 2027, sera positionné au centre national d’instruction ; les deux derniers seront affectés à la section aérienne de Cayenne à la fin 2027 et au début 2028.

Il n’est donc pas prévu, pour le moment, de doter la section aérienne de gendarmerie de Briançon d’un H145 D3 avant 2028, si ce n’est ponctuellement.

Convaincus de la nécessité de renouveler le parc des EC145, en particulier dans les unités de haute montagne telles que Briançon, où les conditions de vol et d’engagement opérationnel peuvent être particulièrement difficiles, nous travaillons à ce que la tranche complémentaire des vingt-deux H145 D3 soit affermie avant 2027.

Le ministre de l’intérieur me charge de vous indiquer que la demande de la section aérienne de gendarmerie de Briançon sera alors étudiée en priorité, en raison de l’activité opérationnelle intense que vous avez, à juste titre, évoquée.

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Arnaud, pour la réplique.

M. Jean-Michel Arnaud. Monsieur le ministre, votre réponse ne me satisfait pas totalement.

Je précise que le site de Briançon sera l’un des clusters des jeux Olympiques (JO) de 2030. Les personnels ont besoin de s’entraîner avec ce nouvel hélicoptère non seulement pour leurs opérations habituelles, mais aussi pour des interventions en lien avec les personnels du centre hospitalier de Briançon, et ce dans des délais qui leur permettent d’être prêts pour cet événement à rayonnement national et international que sont les JO.

J’invite donc le ministre Retailleau à accélérer la décision d’affecter l’un de ces hélicoptères à Briançon.

prolifération des commerces de blanchiment d’argent à paris

M. le président. La parole est à Mme Agnès Evren, auteure de la question n° 438, adressée à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

Mme Agnès Evren. Monsieur le ministre, à Paris, les riverains, les collectifs et les associations sont excédés par la prolifération d’ongleries, de barber shops ou encore d’épiceries de nuit qui ne sont en rien des petits commerces de proximité. Ces établissements, particulièrement concentrés dans le nord-est de la ville, sont bien souvent les vitrines d’un système de blanchiment d’argent, au service du crime organisé.

Ils alimentent l’insécurité, entraînent des nuisances permanentes et fragilisent notre tissu économique local en instaurant une concurrence déloyale avec le commerce traditionnel.

Pourtant, que fait la maire de Paris ? Rien ! Pis, elle ferme les yeux. Par dogmatisme ou par lâcheté, Mme Hidalgo refuse d’agir. Elle laisse les réseaux criminels s’installer, prospérer, s’enraciner dans nos quartiers.

La proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic prévoit notamment la possibilité, pour un maire, de demander la fermeture administrative d’un commerce suspecté de blanchiment. Mais encore faut-il que les maires se saisissent de cette faculté…

Au-delà de la proposition de loi, le Gouvernement entend-il – enfin ! – donner des moyens aux élus locaux qui sont prêts à agir, là où d’autres abandonnent sciemment leurs quartiers à la loi du plus fort ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de la francophonie et des partenariats internationaux. Madame la sénatrice, le blanchiment d’argent est un pan du narcotrafic, contre lequel le ministre de l’intérieur est, vous le savez, pleinement mobilisé.

La proposition de loi relative au narcotrafic, adoptée à l’unanimité au Sénat et à une large majorité à l’Assemblée nationale, facilitera les fermetures administratives de commerces ayant un lien avec le trafic de stupéfiants.

Le travail mené par la commission d’enquête, créée à la demande du groupe Les Républicains, dont le président était Jérôme Durain et le rapporteur Étienne Blanc, a permis d’aboutir à un texte transpartisan.

La circulaire du ministre de l’intérieur du 12 février dernier relative au dispositif « Villes de sécurité renforcée » met en exergue le rôle des élus locaux, qui sont des partenaires essentiels en matière de sécurité.

Ces élus peuvent mener des actions contre les commerces litigieux grâce à leurs pouvoirs de police et leur droit de préemption commerciale. Ils peuvent également faire des signalements et participer aux conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD) et aux groupes de partenariat opérationnel.

Sur instruction du ministre, le préfet de police de Paris a déjà mis au jour du travail dissimulé, des emplois d’étrangers sans titre et de la fraude fiscale. Il continuera son action pour déposséder les délinquants de leur patrimoine, saisir leurs biens et ceux de leur entourage. Le texte sur le narcotrafic l’y aidera.

Madame la sénatrice, vous pouvez compter sur l’engagement du ministre de l’intérieur et de l’ensemble des forces de l’ordre pour lutter contre le blanchiment et le narcotrafic en général.

M. le président. Nous en avons terminé avec les réponses à des questions orales.

Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à dix-huit heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à dix-huit heures trente, sous la présidence de M. Pierre Ouzoulias.)

PRÉSIDENCE DE M. Pierre Ouzoulias

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

3

Livre blanc de la commission européenne sur la défense

Débat organisé à la demande du groupe Les Républicains

M. le président. L’ordre du jour appelle le débat, organisé à la demande du groupe Les Républicains, sur le livre blanc de la Commission européenne sur la défense.

Dans ce débat, le Gouvernement aura la faculté, s’il le juge nécessaire, de prendre la parole immédiatement après chaque orateur pour une durée de deux minutes ; l’auteur de la question disposera alors à son tour du droit de répartie pendant une minute.

Monsieur le ministre, vous pourrez donc, si vous le souhaitez, répondre après chaque orateur, une fois que celui-ci aura retrouvé une place dans l’hémicycle.

Dans le débat, la parole est à M. Pascal Allizard, pour le groupe auteur de la demande.

M. Pascal Allizard, pour le groupe Les Républicains. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, évoquer les questions de défense en Europe était iconoclaste. En dehors des préoccupations en matière d’élargissement, de marché unique, de zone euro et d’accords commerciaux, point de salut ! Aujourd’hui, les Européens sont rattrapés par une réalité violente.

Face à nous, des États ont tout misé sur la puissance, considérant que les traités et principes internationaux sont des barrières de papier. Je le rappelle, trois des cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU ont adopté des comportements problématiques.

Dès 2008, la Russie a mené une guerre éclair en Géorgie, puis s’est attaquée à l’Ukraine en 2014 et 2022.

La Chine se dote rapidement de tous les moyens économiques, technologiques et militaires pour bouleverser l’ordre mondial à son profit.

Enfin, l’attitude des États-Unis inquiète. Donald Trump a accéléré le processus de divergence entre les partenaires transatlantiques et se concentre sur ses objectifs : la Chine et l’Iran. Son obsession pour l’Arctique le conduit à vouloir mettre la main sur le Groenland. Pour défendre ses intérêts globaux, le président américain semble disposé à sacrifier l’Ukraine, et peut-être la sécurité de l’Europe.

Depuis quelque temps, l’Europe réagit, mais les États membres ne se posent pas tous la question de la défense dans les mêmes termes. La plupart considèrent que la défense de l’Europe relève de l’Otan et du parapluie nucléaire américain, d’où leurs faibles investissements nationaux.

La défense relève bien de la souveraineté des États membres. Néanmoins, l’Union n’est pas restée inactive, elle a tenté de donner progressivement corps, en son sein, à une autonomie stratégique européenne.

Les différentes initiatives qui ont été mises en œuvre appellent des observations, dont la première concerne la temporalité. En effet, l’horizon de préparation est 2030. Ce changement d’approche et d’échelle implique une mobilisation rapide qui semble optimiste, au regard notamment de la complexité des sujets, du nombre de domaines capacitaires identifiés comme prioritaires et de l’ampleur des efforts à conduire pour faciliter la mobilité militaire.

La mobilisation de moyens financiers extraordinaires est impérative. La Commission évoque un plan de 800 milliards d’euros qui correspond essentiellement à de la dette des États, voire à de la dette commune. Il ne faudrait pas que ces mécanismes deviennent un moyen de contrôle par Bruxelles de la défense des États membres.

Le livre blanc rappelle aussi la nécessité d’encourager les financements privés au profit des entreprises de défense, en particulier des PME. C’est la reconnaissance d’un problème longtemps occulté. Pour suivre le sujet depuis plusieurs années, je connais les difficultés pratiques rencontrées par de nombreuses entreprises et je ne suis pas certain que toutes les réticences des acteurs financiers soient durablement levées.

Les défis industriels et économiques sont immenses pour produire des volumes importants, à moindre coût, tout en sécurisant et en diversifiant les filières d’approvisionnement. La future politique de stocks sera, elle aussi, très coûteuse. Si l’accroissement des dépenses militaires se confirme, il doit se faire au profit des entreprises européennes, dans un cadre de coopération renforcée. Encore faut-il que les Européens produisent plus et, surtout, qu’ils achètent davantage européen, et qu’ils aient donc intérêt à coopérer !

Or, jusqu’à présent, la situation est largement profitable aux États-Unis qui, sous couvert d’interopérabilité avec l’Otan, imposent leurs standards et créent ainsi des dépendances. On voit bien actuellement l’attitude ambiguë de plusieurs pays qui, malgré les annonces américaines, persistent à maintenir d’importantes commandes aux États-Unis, ce qui crée à leur égard une dépendance pour encore deux décennies. J’ajoute que les coopérations européennes n’ont pas toujours été fructueuses – il faut bien le dire –, certaines ayant abouti à des échecs, des retards ou des surcoûts.

Par ailleurs, rien de précis n’est dit concernant la préférence communautaire. L’expérience montre que certaines acquisitions ont été faites à l’étranger en dépit de l’existence de solutions européennes équivalentes et compétitives. C’est évidemment troublant, et il ne faut pas s’imaginer que les Américains vont abandonner le marché européen, alors qu’un afflux de crédits est imminent. Et je ne parle pas de la Corée du Sud ou d’Israël.

Les questions de concurrence intracommunautaire et les règles d’exportations hors Union européenne ne sont pas non plus à négliger.

J’accueille en général les initiatives de la Commission, et de son actuelle présidente, avec une certaine prudence. Sa propension à se mêler de tout, à interpréter avantageusement les traités et à surréglementer est avérée.

La Commission est aussi à l’origine de la taxonomie européenne, dont le classement conduit à ne pas reconnaître comme durables les activités liées à la défense, quand les concurrents étrangers bénéficient, eux, d’un large soutien public et privé. Il faudra voir comment, sur la taxonomie et d’autres contraintes européennes, les choses évoluent concrètement puisque des simplifications sont annoncées.

Je note que peu de développements sont consacrés au Royaume-Uni. Quelle sera sa place exacte ? En dehors de la France, c’est la seule autre puissance nucléaire, membre permanent du Conseil de sécurité, qui dispose d’un spectre large de compétences et de capacités, ainsi que d’une réelle expérience du combat.

La France a eu la clairvoyance de conclure, par les accords de Lancaster House en 2010, un partenariat de défense avec le Royaume-Uni, qui demeure après le Brexit. C’est un premier pas concluant, une initiative bilatérale qui pourrait servir de modèle à une plus grande échelle.

Les États-Unis laisseront-ils les autorités britanniques jouer un rôle comme elles l’entendent ?

Néanmoins, ce réveil est tout de même le signe positif d’une prise de conscience des enjeux de sécurité en Europe. Il faudra veiller à préparer la guerre de demain : ce sera probablement une guerre de haute intensité, mais peut-être aussi une multiplication d’actions indirectes et multichamps, en « zone grise », sous le seuil de conflictualité, donc difficiles à attribuer, auxquelles il est plus compliqué de répondre.

Mes chers collègues, nous devrons faire preuve de pragmatisme et d’innovation, travailler à quelques États en fonction des domaines et à partir des besoins opérationnels, nous défaire des lourdeurs administratives, porter une attention particulière à la chaîne de sous-traitance, mais également renforcer les ressources humaines, militaires et industrielles, sans lesquelles rien ne sera possible. Je note que déjà certains industriels européens font venir de la main-d’œuvre d’Asie.

Pour conclure, nous sommes clairement à un tournant de l’Histoire. À nous, Français et Européens, de saisir cette opportunité pour compter sur la scène internationale du XXIe siècle sans devenir la proie des nouveaux empires ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, RDSE et RDPI.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. Monsieur le sénateur Allizard, je commencerai par votre conclusion : oui, nous sommes à un moment de bascule historique pour notre continent, compte tenu, d’une part, de la menace que fait peser la Russie sur l’ensemble de nos démocraties, notamment en menant une guerre d’agression contre l’Ukraine, et, d’autre part, des incertitudes sur l’avenir de la relation transatlantique et la garantie de sécurité américaine.

Ce moment doit être l’opportunité pour notre pays, pour notre continent, de prendre notre destin en main et d’investir massivement dans notre réarmement.

Vous avez abordé de nombreux sujets qui seront d’actualité dans les semaines à venir et que nous aurons l’occasion d’évoquer au cours de notre débat.

Parmi les priorités que vous avez évoquées, nous partageons bien évidemment votre point de vue sur la nécessité d’une préférence européenne. Les financements consacrés au réarmement doivent permettre, d’une part, de donner de la visibilité à nos industriels pour qu’ils augmentent leurs capacités et, d’autre part, de garder le savoir-faire technologique et la maîtrise de l’usage des exportations des armements.

J’aurai l’occasion de revenir sur ces questions lors de mes différentes réponses ; je m’arrêterai donc là à ce stade. Nous aurons des échanges sur la gouvernance et les objectifs à atteindre grâce aux instruments que nous développerons ensemble, en Européens, pour répondre au nouveau contexte géopolitique.

M. le président. La parole est à M. Pascal Allizard, pour la réplique.

M. Pascal Allizard. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse. Plutôt que de l’Europe de la défense, je préfère parler de la défense de l’Europe. S’il y a l’Europe en tant qu’Union européenne, il y a aussi la géographie de l’Europe : comme je l’ai souligné, il ne faut pas oublier nos voisins britanniques et norvégiens, et d’autres encore.

Nous devons avoir une approche réellement collective, à l’échelle des États – puisque ce domaine relève de leur compétence –, mais en incluant l’Union européenne bien évidemment, sans oublier l’Otan. Même si nous avons parfois des réserves sur cette organisation, elle a mené un travail extrêmement important : ce serait une erreur de ne pas s’en servir.

M. le président. Dans la suite du débat, la parole est à M. Jean-Pierre Grand. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et RDPI.)

M. Jean-Pierre Grand. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ces dernières semaines, des négociations se sont tenues en Arabie saoudite entre l’Ukraine, les États-Unis et la Russie, sans l’Union européenne. Cette situation est aussi révoltante que paradoxale, l’Europe étant concernée en premier chef par le conflit en Ukraine.

Si Vladimir Poutine s’attaque aujourd’hui à l’Ukraine, nous pouvons imaginer que, demain, la Pologne, l’Estonie, la Lituanie, la Lettonie ou la Finlande, qu’il ne faut, bien sûr, pas oublier, pourraient subir le même sort.

Rappelons quelques faits. À l’automne 2021, plusieurs mois avant l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la Pologne, mais aussi la Lituanie, pays résolument tournés vers le camp occidental et attachés à l’Union européenne, sont victimes d’une attaque hybride menée par la Russie et la Biélorussie.

Quel en était le principe ? Exercer une pression migratoire ingérable à leurs frontières. L’Europe s’est mobilisée, notamment avec Frontex, mais certainement pas suffisamment. Pourquoi ? Parce que les fondements mêmes de l’Union européenne ont été ceux d’une union économique. Ils ont été ceux d’une union pour la paix par la prospérité et non, pour reprendre les mots d’Ursula von der Leyen au sujet de l’Ukraine, de la paix par la force.

Les bouleversements géopolitiques de ces dernières années nous obligent à changer d’approche. Une prise de conscience collective avait eu lieu au cours du premier mandat de Donald Trump, lors duquel des mesures importantes ont été prises, comme la mise en place du Fonds européen de la défense en 2021.

La guerre en Ukraine a ensuite donné lieu à de nombreuses initiatives, comme la boussole stratégique et une redéfinition du rôle de l’Union européenne sur la scène internationale. La réélection de Donald Trump à la tête des États-Unis, son rapprochement avec la Russie et sa décision de suspendre les aides américaines à l’Ukraine nous obligent à aller plus loin.

C’est dans ce contexte que la Commission européenne a dévoilé en mars dernier le très attendu livre blanc sur la défense européenne. Si l’Otan reste la pierre angulaire de la défense collective de l’Europe, l’Union a désormais le devoir d’assurer sa propre sécurité. Le soutien à l’industrie européenne de la défense est un point majeur de ce livre blanc.

Partant du constat que trop peu d’initiatives communes européennes voient le jour en ce domaine, la Commission européenne a identifié plusieurs secteurs critiques dans lesquels des projets réunissant au moins deux pays européens doivent être menés. Tel est par exemple le cas de la défense aérienne et antimissile, ou encore de l’intelligence artificielle.

Afin de mieux préparer l’Europe aux scénarios les plus pessimistes, la Commission européenne préconise d’améliorer les mobilités militaires en constituant des stocks et en renforçant nos frontières extérieures, notamment avec la Russie et la Biélorussie.

Enfin, le soutien à l’Ukraine est au cœur de ce livre blanc, qui prévoit une assistance militaire accrue et une plus grande intégration des industries de défense européenne et ukrainienne.

Ces mesures s’accompagnent bien évidemment de propositions financières ambitieuses. C’est tout le sens du plan ReArm Europe, qui a été présenté par la Commission européenne au début du mois de mars et validé sur le principe par l’ensemble des États membres lors du Conseil européen du 6 mars dernier.

Les dispositifs proposés dans ce plan visent à mobiliser jusqu’à 800 milliards d’euros pour notre défense. Le plan prévoit notamment une dérogation au pacte de stabilité et de croissance qui permettra aux États membres de dépenser davantage pour leur défense sans être visés par une procédure de déficit public excessif.

Afin de financer les dépenses militaires, la Commission propose également d’octroyer aux États une facilité d’emprunt garantie par le budget européen, dont le montant pourra atteindre jusqu’à 150 milliards d’euros.

La mobilisation de la Banque européenne d’investissement (BEI) est également un point clé du plan.

Considérant l’ensemble de ces éléments, le groupe Les Indépendants – République et Territoires soutient les mesures préconisées dans le livre blanc de la Commission européenne. Nous veillerons cependant à ce que ces préconisations soient suivies d’effets.

Je rappelle que lors des Conseils européens des 6 et 20 mars dernier, les vingt-sept États membres ne sont pas parvenus à un consensus sur l’Ukraine à cause de la Hongrie. Demain, il est possible que d’autres États membres bloquent les décisions.

N’oublions pas que pendant des années, les États membres se sont divisés sur les questions de défense, certains États souhaitant s’en remettre pleinement à l’Otan, d’autres en appelant au développement d’une véritable défense européenne. Quel est votre sentiment sur ce sujet, monsieur le ministre ?

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, notre groupe estime que la défense européenne est plus que jamais nécessaire. À nous, Européens, de nous unir et d’être au rendez-vous pour que l’Europe ne sorte pas de l’Histoire. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et RDPI.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. Monsieur le sénateur, vous avez mentionné les différents outils qui ont été présentés par la Commission européenne lors du Conseil extraordinaire du 6 mars : la possibilité d’exclure les dépenses de défense du calcul du déficit public des États membres et, partant, d’éviter qu’une procédure de déficit excessif ne soit engagée par la Commission européenne, le plan Safe (Security Action For Europe), par lequel la Commission européenne accordera 150 milliards d’euros de prêts aux États membres, ainsi que la réallocation de certains fonds tels que le fonds de cohésion vers les dépenses de défense.

Ces mesures que la France et ses partenaires appelaient de leurs vœux marquent une étape décisive dans le réarmement de notre continent. Il faudra toutefois aller plus loin et rehausser nos ambitions sur le long terme.

Cela peut passer par l’utilisation d’autres fonds pour abonder le budget de la défense, comme le Mécanisme européen de stabilité, un fonds assurantiel qui a été créé lors de la crise financière.

Nous pourrions également contracter un grand emprunt pour la défense, comme nous avons su le faire lors de la crise du covid-19. Face à ce défi existentiel, les États européens étaient en effet parvenus à mettre de côté leurs différences et à surmonter des tabous historiques pour créer 750 milliards d’euros de dette commune afin de relancer notre économie.

Face au nouveau défi existentiel auquel nous sommes confrontés, sachons mettre nos forces en commun et investir dans notre défense. Il s’agit de l’un des axes prioritaires que la France défendra avec ses partenaires, à commencer par le prochain chancelier allemand.

Je reviendrai sur d’autres points dans la suite du débat, monsieur le sénateur, mais je souhaite préciser qu’au-delà de l’Union européenne, nos partenaires britanniques et norvégiens, entre autres, doivent naturellement être partie prenante de la défense de notre continent et de la définition de l’identité stratégique européenne.

Nous travaillons déjà avec le Premier ministre Starmer à la définition des garanties de sécurité qui permettront d’assurer demain une paix juste et durable en Ukraine. Il va de soi que nous aurons intérêt à travailler avec tous nos partenaires européens, au-delà de l’Union européenne.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Ruelle. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Luc Ruelle. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, un nouveau livre blanc de la défense était nécessaire ; il était attendu depuis longtemps.

Il était nécessaire, parce que le contexte géopolitique a profondément changé depuis 2022, date de la parution de la feuille de route dite boussole stratégique.

Ce livre blanc était également nécessaire parce que nous devons impérativement prendre le virage d’une véritable défense européenne.

Ce document très attendu, qui aurait dû tracer les grandes lignes d’une politique commune pour les années à venir et promouvoir une indispensable autonomie stratégique, est au fond décevant.

Sur la forme d’abord, ce document en quatre-vingt-neuf points est le summum ce que peut produire la bureaucratie européenne : manque de structuration, nombreuses redondances, évidences, banalités, assertions parfois irréalistes, etc.

Sur le fond ensuite, ce document ne propose aucun axe sérieux nouveau en matière de défense européenne, entretenant une confusion quant à la création d’une véritable industrie de défense, ainsi qu’en matière de conduite des opérations militaires.

Plus précisément, ce livre blanc manque de portée et de cohérence. Le document propose des mécanismes pour améliorer la coopération et la coordination interétatiques en vue d’un marché unique, mais il ne prévoit aucune structure claire et incitative visant à faire converger les actions politiques des États.

La mutualisation des budgets de défense des États pour des acquisitions conjointes, fer de lance du programme Edip (European Defence Industry Programme), n’est pas mentionnée.

Manquent également des solutions de financement novatrices et communes.

Le document propose certes un investissement colossal de 800 milliards d’euros, mais, dans les faits, 150 milliards d’euros seraient à la charge des États, sans prise en compte de leur capacité d’endettement nationale. Pour les 650 milliards d’euros restants, aucune réelle solution de financement n’a été avancée.

La seule option financière nouvelle est la possibilité, pour les États membres, de renoncer à la TVA dans le cadre de l’instrument Safe, ce qui représenterait des montants ridiculement faibles.

Il aurait fallu aller plus loin, en envisageant par exemple la défiscalisation totale de l’ensemble des filières de production de la défense. Une solution sérieuse consisterait notamment à modifier la taxonomie européenne afin de permettre au système financier de soutenir l’industrie de la défense.

À ces deux écueils majeurs, j’ajouterai deux critiques encore plus problématiques, car révélatrices des options philosophiques qui sous-tendent notre défense européenne.

La première tient au fait que le réarmement européen ne vient qu’en réaction au conflit russo-ukrainien et que le cadre stratégique proposé a pour vocation première d’intégrer l’Ukraine dans l’architecture de sécurité européenne, en l’associant aux initiatives de l’Union, d’une part, et en agrégeant l’industrie de défense ukrainienne à l’écosystème de défense européen, d’autre part.

Les dispositifs proposés dans ce livre blanc, tout comme dans le programme Edip, dont je fus rapporteur au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées en décembre dernier, semblent davantage circonstanciels et court-termistes que pensés dans une perspective de renforcement durable et qualitatif de notre base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE).

Entendez-moi bien, monsieur le ministre, mes chers collègues, je m’interroge non pas sur notre aide militaire à l’Ukraine, que je ne remets pas en cause, mais sur la pertinence d’une stratégie européenne de défense structurée autour de ce soutien.

La seconde critique porte sur la mention, en toutes lettres dans le livre blanc, du fait que l’Otan demeure la pierre angulaire de la défense collective de l’Union européenne. S’il est incontestable que l’Union européenne ne peut pas se passer de manière immédiate de l’Otan et s’il est évident qu’une articulation et une coopération entre l’Europe de la défense et l’Otan sont nécessaires, faire de l’Alliance atlantique, et donc, en creux, des États-Unis le centre de gravité géostratégique de la défense européenne me paraît être une grave erreur, notamment en raison de l’imprévisibilité de la politique américaine.

Le livre blanc aurait dû proposer clairement un repositionnement des responsabilités entre l’Union européenne et les États membres. La vocation de l’Union européenne est d’organiser efficacement le marché unique de la défense. Les États membres, eux, doivent assurer la gestion des personnels et des opérations militaires au travers, par exemple, d’une alliance entre les États disposant déjà de capacités militaires opérationnelles, en y incluant notamment le Royaume-Uni et la Norvège. Il s’agit de la seule voie vers une autonomie stratégique.

À rebours d’une telle démarche, ce livre blanc laisse entrevoir une manœuvre supplémentaire de l’Union européenne pour accaparer des compétences exclusives des États en s’octroyant des prérogatives opérationnelles sur le plan militaire.

M. le président. Votre temps de parole est écoulé, mon cher collègue.

La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. En tant que ministre délégué chargé des affaires européennes, je ne puis qu’approuver vos commentaires stylistiques sur le jargon de la Commission européenne et les redondances propres à certains de ses documents, monsieur le sénateur Ruelle.

Je vous trouve en revanche sévère en ce qui concerne les modalités d’élaboration et la gouvernance des dispositifs que vous citez. L’objectif du livre blanc comme des instruments que nous avons développés est de concentrer nos efforts d’investissement dans les domaines capacitaires dans lesquels nous sommes en retard, voire dépendants des États-Unis, afin de corriger cette situation à l’horizon de cinq à dix ans : cyber, drones, capacités de frappe en profondeur, munitions, satellites. En ce qui concerne les satellites, nous constatons le rôle essentiel que joue Starlink pour la protection de l’Ukraine.

L’objectif est donc bien de fixer et de hiérarchiser des priorités afin d’être en mesure d’investir en commun.

Par ailleurs, il ne s’agit pas, comme on a pu le dire, d’une fédéralisation de l’instrument de défense par la Commission européenne, puisque l’objectif est bien, au contraire, de mettre en commun les priorités et les dépenses afin de faciliter les investissements, de sorte que les États membres puissent conserver un outil militaire souverain, celui-ci étant au cœur de la souveraineté de chaque État. Il n’est donc nullement question d’entraver la souveraineté des États membres.

Je vous rejoins pleinement en ce qui concerne la modification de la taxonomie, que le Gouvernement soutient, monsieur le sénateur. Comme vous le savez, nous avons d’ores et déjà obtenu la modification du mandat de la Banque européenne d’investissement afin de financer l’effort de défense. Il faut que les établissements bancaires se conforment à ce changement de culture et soutiennent les efforts de défense. Tel doit être l’objet de la taxonomie.

Or au nom de critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) qui paraissent bien décalés avec les enjeux auxquels nous sommes confrontés, les institutions financières, notamment privées, sont aujourd’hui trop frileuses dans le soutien qu’elles apportent à nos PME et à nos start-up dans le domaine de la défense.

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et RDSE.)

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis ce soir pour débattre du livre blanc de la Commission européenne sur la défense. Je remercie le groupe Les Républicains de cette initiative utile.

Avant d’aller plus loin, permettez-moi de déplorer vivement, amèrement, qu’un tel document, si important dans le contexte que nous connaissons, ne soit disponible dans sa version intégrale sur le site de la Commission européenne qu’en anglais. C’est insupportable, et cela suffit, monsieur le ministre, mes chers collègues !

L’Union européenne n’est démocratique que si elle est compréhensible pour chacun de ses 450 millions d’habitants, et pour cela, elle doit s’adresser à eux dans leur langue, qui est du reste une langue officielle de l’Union.

Je souhaite donc que vous puissiez relayer ce coup de gueule, pardon, ce carton rouge que j’adresse à la Commission européenne, monsieur le ministre. Lorsque la France avait assumé la présidence de l’Union européenne, avec un de vos prédécesseurs, Clément Beaune, j’avais missionné Christian Lequesne, qui nous avait remis des propositions très concrètes afin de faire du multilinguisme une réalité dans la vie des institutions bruxelloises, en particulier post-Brexit.

J’en viens au fond du débat et à ce livre blanc. Puisqu’il s’agit d’un livre blanc, terme qui, dans notre pays, est employé depuis 1972 pour désigner les documents qui fixent notre stratégie de défense, permettez-moi tout d’abord d’indiquer ce que ce livre blanc n’est pas.

Il n’est pas un document fixant une chimérique stratégie supranationale de défense européenne. Il n’est pas, non plus, une feuille de route qui poserait les bases d’une armée européenne intégrée. Cela va sans dire dans cet hémicycle, mais comme on le dit, cela va tout de même mieux en le disant.

Mal en a pris à ceux qui, dans les années 1950, imaginaient confier les clés de la défense des pays fondateurs de l’Europe à un ministre de la défense commun, à la tête d’une armée commune, sous le commandement supérieur – tenez-vous bien, mes chers collègues – des forces atlantiques en Europe. Il ne s’agit donc pas d’en revenir à cette position.

Et pour être tout aussi clair, rappelons que notre politique de défense repose sur les piliers fondamentaux que sont la revue nationale stratégique, qui a pris la suite des livres blancs, une loi de programmation militaire (LPM) et des lois de finances qui, chaque année, traduisent les ambitions de notre programmation. Ce triptyque existe et continuera d’exister.

Après avoir évoqué ce que n’était pas ce livre blanc, j’en viens donc à ce qu’il est.

Il constitue tout d’abord une reconnaissance des positions que la France porte avec constance depuis de nombreuses années. Dès septembre 2017 – le président Patriat s’en souvient (M. François Patriat le confirme.) –, dans son premier discours de la Sorbonne, le Président de la République affirmait qu’au fondement de la communauté politique est la sécurité. « Nous vivons en Europe […] un désengagement progressif et inéluctable des États-Unis », constatait-il déjà, précisant immédiatement qu’« en matière de défense, notre objectif doit être la capacité d’action autonome de l’Europe, en complément de l’Otan ».

Que d’énergie a-t-il fallu déployer pour faire accepter à tous les États européens ce qui paraît aujourd’hui une trivialité, une lapalissade, une évidence : le concept d’autonomie stratégique européenne, qui a été gravé dans le marbre de la boussole stratégique européenne durant la présidence française de l’Union, en 2022 !

Ce livre blanc, qui accompagne le plan ReArm de l’Union européenne, est aussi une validation du choix effectué par la France en 2017, et même – rendons grâce à nos prédécesseurs – dès 2012, d’augmenter les crédits budgétaires alloués à la défense.

Grâce aux deux dernières lois de programmation militaire, le budget de la défense est passé de 34 milliards d’euros à 51 milliards d’euros. Fort de sa dissuasion nucléaire à double dimension, notre pays a consolidé son modèle d’armée complet. Les commandes ont été passées, et les matériels, renouvelés.

Ce livre blanc est aussi la conséquence d’un réveil stratégique des pays européens, qui ont enfin ouvert les yeux sur les menaces conventionnelles ou hybrides qui pouvaient peser sur chacun d’eux. Le réveil est brutal pour ceux qui avaient mis tous leurs œufs dans le même panier transatlantique, moquant la volonté française d’autonomie européenne comme un ersatz de gaullisme suranné, dans ces années 2000 qui fleuraient bon la fin de l’Histoire.

Mais le retour au réel est là. La guerre durable en Ukraine a fait prendre conscience de la dépendance sécuritaire en matière de renseignement, du caractère désormais imprévisible de l’allié américain, qui suspend l’aide américaine à l’Ukraine, mais donne des cartouches à Vladimir Poutine pour différer tout cessez-le-feu véritable.

Si le mur de Berlin est tombé en 1989, si le rideau de fer a bien été démantelé – tout cela est exact –, nous ne sommes pas entrés dans l’ère de la paix perpétuelle chère à Emmanuel Kant pour autant. Quelque trente-cinq ans plus tard, force est de constater que de nouveaux murs, peut-être invisibles, menacent de diviser nos sociétés à coups d’infox et d’influence, sapant la cohésion nationale comme européenne.

Dans ce contexte, le livre blanc est un bon début : il est un « starter » au sens mécanique du terme. Il permettra aux États membres d’amorcer un rattrapage, grâce aux 150 milliards d’euros de prêts du dispositif Safe et aux 650 milliards d’euros de dépenses nationales additionnelles qui seront en partie exemptées du respect des règles européennes sur la dette et le déficit. Ces investissements contribueront à enclencher une dynamique de résorption du déficit capacitaire européen.

Il nous faut pour cela – j’en forme le vœu – éviter toute forme de complexification. Parmi les normes, il en est une qui me paraît toutefois défendable : il s’agit de la norme en vertu de laquelle les armements qui seront commandés doivent être européens. Il importe que la position de la France soit entendue : il faut exiger que la valeur totale d’un système d’armement soit non pas à 65 %, mais à 80 % d’origine européenne. C’est juste du bon sens !

Il importe enfin d’encourager les jeunes pousses et les PME, qu’elles produisent pour le marché civil ou qu’elles soient duales.

Si j’ai commencé en décernant un carton rouge à la Commission, je terminerai en lui donnant un feu vert. Oui, il est temps de mettre les bouchées doubles en matière d’investissements de défense, et il est heureux que la Commission européenne, sans se substituer aux États membres, mette en place avec ce livre blanc des outils pour les y aider. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP et RDSE, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. Je vous remercie, monsieur le sénateur Lemoyne. Vous avez raison de rappeler que depuis 2017 et le discours du Président de la République à la Sorbonne, la France porte avec constance l’ambition d’une autonomie stratégique pour l’Union européenne face à un monde qui devient compétitif, face aux menaces et aux interrogations qui pèsent sur l’avenir de la garantie de sécurité américaine.

Avant d’ailleurs le président Donald Trump, le président Barack Obama avait évoqué le pivot vers l’Asie, reprochant aux élites européennes d’être des passagers clandestins et d’avoir mis en danger la sécurité de l’Europe par leur inaction en Syrie après le franchissement de la ligne rouge ou en 2014, lorsque l’agression de l’Ukraine par la Russie a débuté.

Une telle ambition suppose que les Européens investissent massivement non seulement dans leur défense et leur outil militaire, mais aussi dans la résorption de leurs dépendances technologiques tant en matière de réseaux sociaux, car le rôle que jouent TikTok ou X dans l’espace public européen est aujourd’hui démesuré, que d’intelligence artificielle ou de quantique.

Il nous faut également réindustrialiser notre continent, rehausser nos ambitions sur le plan de la compétitivité et de la souveraineté économique en soutenant nos entreprises, nos start-up et nos PME, et parachever le marché unique par l’union des marchés de capitaux et par l’élaboration du « vingt-huitième régime » de droit des affaires.

Telle est la très haute ambition, celle d’une Europe souveraine et capable de se défendre, que nous portons pour l’Europe. De nombreux partenaires qui étaient sceptiques ou interrogatifs nous rejoignent aujourd’hui, car ils comprennent qu’il est urgent d’agir. Nous allons canaliser cette énergie et continuer à avancer dans les prochains mois afin de rendre l’Europe plus forte. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour la réplique.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Je vous remercie de vos réponses, monsieur le ministre.

Permettez-moi de compléter mon propos précédent. Des chantiers industriels et technologiques majeurs sont devant nous. Si certaines de nos entreprises sont des pépites, nous savons qu’elles peuvent être vulnérables financièrement. Il nous faut donc adopter une véritable stratégie d’intelligence économique pour préserver ce tissu industriel et éviter le pillage de nos brevets.

Je salue à cet égard le travail remarquable accompli par la direction de l’industrie de défense de la direction générale de l’armement (DGA), sous la direction d’Alexandre Lahousse. Restons toutefois vigilants, mes chers collègues, car le service de l’information stratégique et de la sécurité économiques (Sisse) nous indique que les sujets d’alerte sont de plus en plus nombreux, s’agissant notamment de nos alliés. Suivez mon regard… (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE.)

M. le président. La parole est à M. André Guiol. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. André Guiol. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous débattons aujourd’hui du livre blanc de la défense européenne à l’horizon 2030.

La situation internationale nous pousse à mieux prendre en charge notre souveraineté dans ce domaine, en assurant l’autonomie stratégique que la France prône depuis des années et qui a récemment été mise à l’agenda à la suite des abandons du président Trump.

L’opportunité d’une telle initiative est avérée. En vingt ans, la part de l’Europe dans les dépenses militaires mondiales est passée de 27 % à moins de 16 %. Dans le même temps, la part de la Chine a doublé. La Russie, malgré un appareil productif fragilisé, consacre encore plus de 6 % de son PIB à la défense.

Pendant ce temps, l’Europe a réduit ses arsenaux, sous-investi dans ses capacités et parié sur l’attraction des dividendes de la paix.

Depuis que la Russie constitue une menace existentielle pour l’Europe, la réalité est limpide. La compétition entre puissances ne se cache plus derrière les traités. La Russie transforme le champ de bataille de l’Ukraine en laboratoire d’une guerre d’attrition. La Chine étend patiemment ses réseaux logistiques, de l’Indo-Pacifique à la Méditerranée. Et les États-Unis, désormais dirigés par une administration désignée par Donald Trump, lequel assume une lecture purement transactionnelle des alliances, nous rappellent que l’article 5 du traité de Washington n’est plus une promesse inconditionnelle.

Dans ce contexte, la France, seule puissance nucléaire de l’Union, a évidemment un rôle à jouer. Sans renier l’indépendance de la doctrine nucléaire, elle peut contribuer à la sécurité des Européens par une concertation stratégique approfondie.

Nos intérêts vitaux ont une dimension européenne. Il est donc légitime que nos partenaires soient associés à une réflexion sur les conditions dans lesquelles notre dissuasion contribue à la stabilité du continent. Cette réflexion commune n’équivaut ni à un partage ni à une délégation ; elle constitue la marque d’une responsabilité et d’une confiance sans faille à l’égard de la souveraineté européenne.

Si le livre blanc n’aborde pas encore le partage de la dissuasion nucléaire, il devra cependant, à terme, intégrer cette réalité.

Force est de constater que depuis la publication de ce document, le 19 mars dernier, la Commission assume un discours de puissance. Elle identifie des lacunes, propose des leviers, et surtout, elle structure un effort budgétaire coordonné. Il s’agit d’une avancée que le groupe du RDSE soutient sans ambiguïté.

La clause dérogatoire du pacte de stabilité permettra aux États membres d’augmenter temporairement leurs dépenses militaires jusqu’à 1,5 % du PIB. Si ce levier est indispensable, sa mise en œuvre doit s’inscrire dans le cadre d’un suivi solide, afin d’éviter que cette clause ne serve qu’à requalifier des dépenses déjà budgétisées.

Dans cet esprit, il nous semble que la création de l’instrument Safe, qui autorise la Commission à lever 150 milliards d’euros sur les marchés pour financer les investissements de défense, est le plus ambitieux des mécanismes du livre blanc.

Le groupe du RDSE y est d’autant plus favorable qu’il plaide depuis longtemps pour un emprunt européen commun au service de l’autonomie stratégique. Le principe de cette dette mutualisée pour financer les achats conjoints est une avancée politique majeure que nos partenaires européens des pays dits frugaux commencent à entendre.

Le livre blanc de la défense propose enfin de mobiliser l’épargne privée via la Banque européenne d’investissement. Cette stratégie ne nous semble pas immédiatement pertinente eu égard à la préservation du modèle social qui est le nôtre.

Avant de solliciter l’épargne des Françaises et des Français, il serait judicieux d’explorer les mécanismes de contribution des entreprises les plus aisées, en premier lieu celles du secteur de la défense, qui bénéficieraient directement de ces investissements.

Mes chers collègues, ce débat est l’occasion de clarifier ce que nous attendons du livre blanc, qui ne doit pas être qu’un simple catalogue capacitaire. Au RDSE, nous souhaitons qu’il permette d’engager une réflexion stratégique et planifiée. N’ayons pas peur de faire de ce texte un instrument politique. Il nous faudra en effet répondre aux difficultés militaires ou industrielles de nos programmes européens à la peine, tels que les programmes relatifs au futur char et à l’avion de chasse européen du futur, mais aussi lever les divergences qui se sont exprimées s’agissant de la conception d’un bouclier antimissile sûr, harmonisé et souverain.

L’enjeu est de bâtir un système de défense cohérent, inscrit dans un continuum défensif, du bouclier du ciel européen à une dissuasion dont il conviendra de définir le degré d’intégration. La fin de la guerre froide a dangereusement déséquilibré cet ensemble complexe et évolutif.

Nous saluons enfin les mesures en faveur de l’Ukraine, notamment l’intégration de son industrie dans les chaînes européennes.

Cette solidarité ne doit toutefois pas masquer l’essentiel : nous devons préparer l’Europe aux scénarios de haute intensité. Cela suppose de constituer des stocks, de bâtir des corridors logistiques protégés et d’élaborer une défense réelle des frontières orientales, mais également de mieux nous prémunir contre les attaques cyber et de mieux réagir aux guerres hybrides, qui sont désormais aussi commerciales.

Ce livre blanc ne doit donc pas en rester au stade de la déclaration d’intention. Il doit déboucher sur une programmation claire, cohérente et suivie. Le groupe du RDSE soutiendra tous les instruments budgétaires et industriels qui permettront d’ancrer cette dynamique dans les politiques publiques des États. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. J’ai peu de choses à ajouter à votre exposé, monsieur le sénateur Guiol. Il me paraît important de favoriser les coopérations industrielles. Les projets s’accumulent, si bien que certains armements européens sont aujourd’hui redondants. Il convient donc de définir des domaines capacitaires dans lesquels nous devons investir en commun, afin de mutualiser les efforts des entreprises de plusieurs États membres et, partant, d’éviter ces redondances et cette complexité.

Permettez-moi de rebondir sur l’intégration de l’Ukraine dans ces instruments. Une armée ukrainienne robuste, forte et indépendante sera, à terme, la meilleure garantie de sécurité pour l’Ukraine.

Cela suppose que nous formions des partenariats dans le cadre d’Edip ou des instruments que nous avons développés. Cela passe aussi par le prêt préfinancé grâce aux intérêts générés par les avoir gelés de la Russie, prêt auquel les Européens contribuent à hauteur de 20 milliards d’euros. Cet emprunt doit prioritairement financer les besoins militaires de l’Ukraine afin de rapprocher au maximum cet État de nos industries de défense européennes.

Je souhaite enfin dire un mot de la préférence européenne en matière de défense, évoquée précédemment. Le maintien de cette préférence passe non seulement par une exigence élevée quant à la proportion de composants européens dans les systèmes d’armement que nous achetons, mais aussi par la maîtrise de ce que l’on appelle l’autorité de conception. Comme l’a indiqué le sénateur Lemoyne, au-delà de la question industrielle, la souveraineté est aussi affaire d’usage, d’exportation de ces armements et des savoir-faire technologiques qu’ils emportent. Or j’observe que nos partenaires sont de plus en plus nombreux à souscrire à notre position relative aux usages de nos systèmes d’armement par les Américains.

M. le président. La parole est à M. André Guiol, pour la réplique.

M. André Guiol. Je vous remercie de vos explications, monsieur le ministre. En tant qu’ancien de la DGA, je suis sans doute plus sensible à la fabrication des armes à l’échelon européen. Force est de constater qu’au cours des dernières années, nous avons enregistré d’importants échecs, notamment avec le char franco-allemand, l’avion du futur, qui connaît de nombreuses difficultés, ou, plus récemment, avec les hélicoptères, et j’en passe.

Le sujet qui me préoccupe le plus est toutefois le bouclier européen. Deux écoles s’affrontent actuellement : les Allemands, qui sont associés aux Américains et aux Israéliens, d’une part, et la France, qui a développé avec les Italiens un produit qui me paraît intéressant, d’autre part.

J’estime pour ma part qu’il nous faut travailler ensemble afin d’élaborer un dispositif multicouche qui nous permette de conserver notre souveraineté européenne en la matière.

M. le président. La parole est à M. François Bonneau. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. François Bonneau. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’Union européenne a tout d’une grande puissance. Elle est peuplée par 450 millions d’habitants et dotée d’un PIB de 18 000 milliards d’euros, ce qui en fait la deuxième économie mondiale. Les pays européens dominent les classements de développement humain, nos écoles attirent le monde entier et nos cultures influencent bien au-delà de nos frontières.

Je le répète, l’Union européenne a tout d’une grande puissance, n’ayant rien à envier à ses grands compétiteurs internationaux.

Néanmoins, s’il est un domaine dans lequel cette grande puissance reste un colosse aux pieds d’argile, c’est la défense. Depuis 1945, les États européens ont privilégié la protection des États-Unis, pays allié, mais lointain, plutôt que d’investir dans leur propre défense, sans pour autant considérer leur éventuel retrait. Le général de Gaulle disait : « Les États n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts. » C’est aussi vrai pour l’allié américain.

Aujourd’hui, les yeux de Washington sont rivés sur le Pacifique et la Chine, alors que l’isolationnisme américain ressurgit violemment. Outre-Atlantique, on s’interroge : « Pourquoi mourir pour l’Europe ? Nos dollars doivent-ils financer la défense des Européens ? » L’actuel président américain semble avoir tranché.

Le constat pour l’Europe est sévère : nous avons accumulé un trop grand retard dans nos politiques militaires et nous ne sommes pas en mesure de faire face aux menaces qui nous entourent.

La France a depuis longtemps fait le choix d’une autonomie stratégique, se dotant de l’arme nucléaire et d’une armée complète pouvant être déployée partout autour du monde. Cependant, elle ne peut concourir dans la course à l’armement que les superpuissances américaines, chinoises ou russes se livrent.

Nos nombreuses tentatives pour structurer une politique de défense commune au sein de l’Union sont longtemps restées lettre morte, nos partenaires européens privilégiant la protection américaine. Pourtant, le constat du renforcement et de l’autonomisation nécessaires de nos forces armées semble aujourd’hui faire consensus. Si les Européens veulent la paix, ils doivent désormais se préparer à la guerre.

Ce réveil brutal de la guerre en Europe, nous aurions dû l’anticiper dès le 24 février 2022, avec la violation russe du territoire ukrainien, au mépris de toute légalité internationale.

Qui peut croire que la Russie s’arrêtera à l’Ukraine, alors qu’elle renforce massivement son armée, sa marine et son industrie d’armement ? Qui peut croire que le dictateur du Kremlin n’attaquera pas l’Europe si elle est faible et délaissée par les États-Unis ? Qui peut croire qu’abandonner nos alliés ukrainiens au sort que leur réserve Vladimir Poutine garantira la paix sur notre continent ?

Restons éveillés : la Russie s’arme contre nous et les États-Unis préparent dans notre dos les conditions d’une paix inacceptable pour l’Ukraine, dont nous ferons inévitablement les frais. Si nous voulons nous protéger, mais aussi protéger nos valeurs, nos idées, nos acquis sociaux et sociétaux, l’ensemble des vingt-sept membres de l’Union européenne doivent mener une politique de réarmement, de Lisbonne à Tallinn, de Stockholm à Athènes.

Soulignons les initiatives de nos partenaires européens, notamment l’Allemagne, qui planifie d’ores et déjà des investissements massifs pour la défense. Ces efforts salutaires outre-Rhin sont décisifs pour accompagner et soutenir le mouvement collectif de renforcement militaire.

Cependant, ce réarmement européen ne sera pas immédiat, tant le retard est grand. La majorité des armées européennes se sont structurées comme des forces de soutien à l’armée américaine, non comme des forces de projection indépendantes. La dotation matérielle de ces mêmes armées dépend de la BITD américaine. Enfin, notre coordination stratégique doit être renforcée, prenant acte des forces et des faiblesses des armées de chaque État membre.

Le livre blanc pour la défense, publié le 19 mars 2025 par la Commission européenne, apporte une réponse à ces nombreux défis à l’horizon de 2030. Pour financer la préparation stratégique des États membres, l’Union européenne se dotera d’un nouvel instrument appelé Sécurité et action pour l’Europe (Safe), correspondant à des prêts garantis par le budget de l’Union à hauteur de 150 milliards d’euros sur quatre ans pour les investissements militaires et technologiques des États membres.

Par ailleurs, comme lors de la crise du covid-19, l’Union activera la clause de sauvegarde du pacte de stabilité et de croissance pour une hausse équivalant à 1,5 % du PIB du budget de la défense de chaque État membre. Cette souplesse permettrait une croissance sur quatre ans d’environ 650 milliards d’euros pour les investissements dans la défense. Au total, 800 milliards d’euros d’investissements pour la préparation de la défense seraient donc projetés sur quatre ans.

Ce livre blanc cible aussi les priorités européennes pour notre résilience stratégique : les armes aériennes, aéroportées, l’artillerie, les stocks de munitions, les drones, la logistique, l’innovation technologique et la protection des infrastructures. Veillons néanmoins à ce que ces armes soient bien fabriquées sur notre sol, tout en respectant la souveraineté des États.

La Commission entend renforcer ses liens stratégiques avec le Royaume-Uni, la Norvège, le Canada, la Turquie, mais aussi auprès des États voisins de l’Union, ainsi qu’auprès de ses partenaires dans l’Indo-Pacifique, tout en rappelant que la stratégie de défense européenne ne peut se passer de l’Otan, pierre angulaire de notre coordination.

Enfin, elle précise que les relations avec les États-Unis doivent être entretenues, mais conscientes. Les intérêts américains ne convergent pas et ne convergeront pas toujours avec les nôtres. La question du Groenland en est un parfait exemple, et les forces militaires des États de l’Union européenne doivent être en mesure de dissuader les ambitions expansionnistes du 47e président des États-Unis.

Dans un monde qui se réchauffe, d’un point de vue non seulement climatique, mais aussi géopolitique, les Européens doivent redoubler d’efforts pour se doter d’une force militaire multiple, apte à dissuader comme à opérer, résiliente et capable de défendre nos intérêts et nos valeurs.

Avec la chute de l’Union soviétique et la domination incontestée des États-Unis, nous, Européens, avons cru naïvement à la fin de l’Histoire. Nous avons cru en un monde de paix sous la protection du gendarme américain, où nous pourrions devenir les rentiers des dividendes de la paix. Nous y avons cru et nous avions tort.

Les jours de paix se couchent à l’ouest ; la nuit tombe à l’est, entraînant avec elle son lot de guerres et d’incertitudes. Spectateurs de ce sinistre crépuscule, nous devons unanimement encourager les initiatives de l’Union européenne pour une meilleure coordination stratégique, industrielle et logistique de notre défense.

Ensemble, nous sommes plus forts. C’est pourquoi le livre blanc pour la préparation de la défense publié par la Commission européenne est un pas en avant historique pour dissuader nos adversaires, sans oublier le réarmement moral qu’il nous faudra conduire. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et RDPI.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. Monsieur le sénateur Bonneau, vous avez mentionné l’Otan et vous n’avez pas été le premier à le faire. J’en profite donc pour rappeler que les efforts que nous entreprenons visent à renforcer le pilier européen de l’Otan et à renforcer l’interopérabilité de nos armements avec ceux qui sont définis par l’Otan. D’ailleurs, les domaines capacitaires qui sont inclus dans le livre blanc correspondent peu ou prou à ceux qui avaient été identifiés par l’Alliance.

Néanmoins, sur le plan politique, vous l’avez rappelé, se posent des questions quant à la garantie de sécurité américaine et à la posture des États-Unis au sein de l’Otan, en particulier au moment où l’on voit les États-Unis, avec la question du Groenland, menacer l’intégrité territoriale d’un État souverain, membre de l’Union européenne et de l’Otan, le Danemark.

Il n’y a donc pas d’incompatibilité, à terme, entre l’objectif de renforcement de l’autonomie stratégique des Européens et de réduction de leur dépendance et celui du rééquilibrage de l’alliance par un partenariat plus moderne, un renouvellement de la relation transatlantique, si les États-Unis font le choix, comme nous l’espérons, de rester ancrés dans la sécurité du continent européen. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. François Bonneau, pour la réplique.

M. François Bonneau. Monsieur le ministre, le temps presse, cela n’a échappé à personne. En cette matière, l’Europe doit montrer le meilleur d’elle-même, comme on a pu le voir lors de crises où elle a montré sa capacité à intervenir rapidement. En revanche, elle ne doit pas retomber dans ses travers de réglementation, de normes et de rigidités en tous genres, qui ne feraient que gêner cet effort absolument indispensable. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Philippe Folliot. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume.

Mme Michelle Gréaume. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes amenés, à l’occasion de la publication de ce livre blanc, à débattre de la stratégie globale de l’Union européenne en matière de défense.

Ce document traduit un aveuglement et une incompréhension sur les causes des conflits actuels. Pis, la Commission européenne ne tire pas les leçons du passé. Le bilan de trente ans d’élargissement de l’Otan vers l’Est et la nécessité d’une évolution des discussions sur notre sécurité collective en Europe sont ignorés, alors que notre continent s’enfonce dans l’escalade des tensions avec notre voisin russe.

De même, la plupart des Européens considèrent qu’ils n’ont autre choix que de continuer la guerre, alors que l’objectif doit être une paix négociée, qui ne soit pas une capitulation de l’Ukraine. Nous sommes contraints de constater, mes chers collègues, après trois années de conflit, que la stratégie guerrière laisse derrière elle un bilan dramatique de morts et de sacrifices.

Alors que, au printemps 2022, à Istanbul, Kiev accepte la neutralité et que, en contrepartie, Moscou concède un retrait de ses troupes des territoires occupés depuis février 2022, les pays occidentaux les plus préoccupés par le cas de Poutine ont préféré livrer des armes à l’Ukraine, plutôt que de répondre favorablement aux garanties de sécurité demandées par celle-ci.

En induisant Kiev en erreur avec la livraison d’armes, cette stratégie présente un risque. À l’occasion d’un accord de paix ressemblant davantage à un accord de capitulation, ces armes pourraient tomber dans les mains d’un régime ukrainien revanchard et souhaitant reconquérir par la force les territoires perdus, avec le risque de déclencher à terme un nouveau conflit régional.

Le livre blanc souhaite avancer vers l’Europe puissance, mais ce document mal conçu se confronte à des contradictions. Le chapitre sur nos partenariats stratégiques en est la preuve. L’Union européenne souhaite un renforcement des coopérations en accord avec nos valeurs, mais se vautre dans des deals inadmissibles avec la Turquie d’Erdogan, qui enferme le maire d’Istanbul, ou avec l’Inde de Modi, qui multiplie les actes discriminatoires et autoritaires dans son pays.

Enfin, parler de « situation fragile » à Gaza, comme le font les auteurs de ce livre blanc, c’est méconnaître ou, pis, ignorer le génocide commis au mépris du droit international et reconnu par l’ONU. Ce « deux poids deux mesures » dans nos condamnations participe de l’effondrement du droit international et renforce l’envie de nos adversaires de le contourner.

Aussi, ce double standard est une manière pour Poutine d’utiliser nos incohérences et de continuer son œuvre funeste avec l’opinion derrière lui, alors qu’il faut détacher la société russe de son emprise.

En réalité, derrière ces valeurs progressistes se cache le grand retour de l’idéologie atlantiste. La Commission estime que, pour reconstruire la défense européenne, une étroite collaboration avec l’Otan est nécessaire, ajoutant même que la course aux armements permettrait d’accéder à une autonomie stratégique européenne.

Laissez-moi douter, monsieur le ministre, face à une Allemagne, une Pologne et un Royaume-Uni projetant d’acheter des missiles et avions américains pour des milliards d’euros au détriment de l’industrie européenne… Cette référence répétée à l’Otan permet surtout d’accorder des Européens divisés en fixant le cap depuis Washington. La France est forcée de marcher au pas. Pourtant, et vous le savez, les États-Unis de Trump et Vance, par leurs actes hostiles, ne sont plus nos alliés.

Même sans les États-Unis, l’Europe surpasse la Russie dans presque tous les domaines. Les États membres de l’Union dépensent déjà 460 milliards d’euros par an pour la défense, soit quatre fois plus que la Russie. La motivation de ces 800 milliards d’euros supplémentaires répond donc à un impératif non pas sécuritaire, mais idéologique.

Alors que le secteur automobile européen est en difficulté et que l’Allemagne entre en récession pour la troisième année consécutive, l’ère du réarmement d’après Mme von der Leyen apparaît comme la solution miracle.

Nous disons non à cette politique de surarmement, qui nous précipite vers l’escalade avec la Russie plutôt que vers la paix. Utiliser la situation actuelle pour perpétuer des rivalités économiques et militaires dans ce contexte n’est pas responsable.

Nous appelons à reprendre la voie de la diplomatie et à réaffirmer l’influence de la France, comme nous réclamons la restauration des moyens de notre diplomatie. Nous ne pouvons pas donner à notre jeunesse la guerre comme seul horizon, alors que les défis sociaux et environnementaux se multiplient. Ce choix politique de surarmement entraînerait surtout une casse sociale et le retour de l’austérité pour obéir à la Banque centrale européenne (BCE) de Mme Lagarde.

Dans ce contexte, quelles dépenses au juste seront sacrifiées sur l’autel de cette politique belliciste, monsieur le ministre ? Les écoles, les hôpitaux, les commissariats ?

Enfin, mes chers collègues, j’attire votre attention sur la méthode : notre Parlement n’a jamais pu se prononcer sur les projets de la Commission européenne, qui n’a aucune légitimité démocratique ni compétence en la matière, alors que nous sommes, dans cet hémicycle, élus au suffrage universel, avec la confiance des citoyens et des territoires.

Votre chemin n’est décidément pas le nôtre. Si nous voulons la paix, alors préparons la paix, une paix juste et un avenir serein pour nos enfants !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. Madame la sénatrice Gréaume, quelle inversion des valeurs et quelle inversion des responsabilités ! On ne préparera pas la paix par la soumission, le défaitisme ou le renoncement.

Vous nous parlez du risque d’une Ukraine revancharde, d’une escalade engagée par les Européens face à la Russie, mais observez la situation depuis le 24 février 2022 : alors que la France avait courageusement porté la voix de la diplomatie à Moscou et à Kiev, c’est la Russie qui a choisi de tourner le dos à cette dernière et d’agresser l’Ukraine et les Ukrainiens, qui défendent courageusement leur liberté, leur souveraineté et notre sécurité.

Il y a deux ou trois semaines à peine, c’est le président Zelensky qui a accepté le principe d’une trêve de trente jours, proposition à laquelle le président russe n’a toujours pas répondu. Pis, il continue l’escalade sur le terrain avec des frappes régulières contre les villes ukrainiennes et maintient des objectifs maximalistes, comme la neutralisation de l’Ukraine, sa démilitarisation, le renversement du président Zelensky… C’est l’effacement de l’Ukraine en tant que nation indépendante que vise la Russie.

C’est nous qui sommes ciblés par l’escalade et les menaces permanentes de la Russie avec ses sabotages, ses attaques cyber, ses ingérences, ses menaces contre la souveraineté et les frontières des États européens souverains depuis la fin de la guerre froide.

Alors, ne confondons pas les responsabilités, ne nous autoflagellons pas ! Oui, l’Europe sera toujours du côté de la paix et de la liberté, mais, pour défendre la paix, il faut être capable de défendre nos intérêts et il faut être capable de dissuader l’agresseur. (M. François Patriat applaudit.)

M. Roger Karoutchi. Tout à fait !

M. Christian Cambon. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Guillaume Gontard. Monsieur le président, monsieur le ministre, le 19 mars dernier, la Commission européenne a présenté la déclinaison plus opérationnelle du plan Réarmer l’Europe : ce livre blanc de la défense européenne.

Alors que le recours à l’article 122 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne exclut le Parlement européen de tout droit de regard, ce que nous déplorons évidemment, il est important et bienvenu de pouvoir tenir ici un débat démocratique.

Dans les grandes lignes, nous approuvons l’effort engagé par l’Union européenne et ses membres pour démultiplier notre soutien à l’Ukraine et construire les conditions d’une réelle autonomie stratégique continentale. Dans le détail, nous formulerons commentaires, réserves et propositions.

Avec 650 milliards d’euros de dépenses à la seule charge des États membres, le plan Réarmer l’Europe laissait à penser que nous allions vers davantage de défense de l’Europe, certes, mais pas vers davantage d’Europe de la défense. Si le livre blanc ne bouscule pas ces équilibres, en raison d’une trajectoire budgétaire européenne trop rigide jusqu’en 2027, il apporte quelques éléments intéressants.

Ainsi, le programme Safe prévoit 150 milliards d’euros levés par l’Union européenne sous forme d’emprunts mutualisés, qui ne pourront être décaissés que pour effectuer des achats groupés entre plusieurs pays et auprès de notre industrie européenne de défense, puisque 65 % des crédits devront être consommés pour l’achat de produits ou de composants européens.

Monsieur le ministre, nous voyons toute l’influence de la France dans la fixation de cette ambition. Me référant à notre débat lors de l’examen du budget, je me satisfais de cette jauge, qui est ambitieuse, sans être trop rigide, vu l’urgence du contexte et l’ampleur du progrès à accomplir.

Nous saluons également l’ouverture de ce mécanisme à l’Ukraine, qu’il s’agisse de la mutualisation des achats entre l’Ukraine et des pays de l’Union ou de la possibilité de comptabiliser la BITD ukrainienne avec celle de l’Union. Compte tenu de la montée en puissance de cette dernière, depuis une décennie, cette évolution est tout à fait bienvenue.

Nous croyons cette disposition à même de faire évoluer dans le bon sens des habitudes nationales très ancrées et d’avancer collectivement vers un réflexe essentiel : acheter européen quand une solution européenne existe.

Nous notons la tentative de définir des besoins capacitaires et des priorités d’investissement européens. C’est un premier pas, qu’il faudra articuler avec la définition trop souvent autocentrée des besoins nationaux. En ce sens, je n’ai pas le sentiment que le travail de réactualisation de notre revue nationale stratégique intègre suffisamment cette dimension des besoins collectifs de l’Union. J’espère une inflexion en ce sens dans la mouture finale que le Gouvernement présentera avant l’été.

J’ajouterai un mot sur l’intelligence artificielle et les drones autonomes mentionnés par le livre blanc, car certaines tournures de phrase nous inquiètent. Nous tenons à rappeler ici notre opposition totale à toute évolution de la législation européenne en matière de drones, dans la mesure où celle-ci interdit l’utilisation de toute arme autonome capable de tuer un être humain sans décision explicite d’un autre être humain. Dans la même logique, nous appelons l’Union à se doter d’une législation relative à l’utilisation de l’intelligence artificielle, incluant particulièrement ses utilisations militaires.

En ce qui concerne les mécanismes de financement de cet effort considérable, nous restons sur notre faim, quand nous ne sommes pas inquiets. En attendant des financements directs à partir de 2027 dans le prochain cadre budgétaire pluriannuel, nous sommes pour le moment contraints de recourir à l’emprunt, donc à la dette, dette collective et dette de chaque État, permise grâce à un assouplissement temporaire du pacte de stabilité.

Cet assouplissement pour les seules dépenses de défense est insuffisant. Il faut réformer intégralement le pacte de stabilité et y inclure les dépenses essentielles des États : la défense, la transition écologique, la justice sociale, les investissements d’avenir. Nous demandons également des investissements européens dans tous ces domaines stratégiques.

Nous le répéterons systématiquement : les dépenses militaires ne doivent pas entrer en concurrence avec nos autres dépenses essentielles. L’autonomie stratégique européenne n’existera pas sans transition ni sobriété énergétiques pour arrêter notre dépendance aux énergies fossiles et à l’uranium russe. Elle n’existera pas non plus si des populations paupérisées par l’affaiblissement de nos filets de protection sociale placent l’extrême droite alliée de Poutine au pouvoir.

À l’échelle européenne, comme à l’échelle nationale, pour financer notre effort militaire, il faut des ressources complémentaires et de la justice. Ainsi, il est inenvisageable que ces milliards d’euros d’argent public enrichissent éhontément les actionnaires des industries de défense. Il faut encadrer leurs futurs dividendes.

Enfin, et nous vous proposerons cette mesure dans le cadre de notre espace réservé en juin prochain, mes chers collègues, il faut mettre nos compatriotes les plus aisés à contribution, par exemple en instaurant une taxe minimale sur les hauts patrimoines, comme le propose Gabriel Zucman. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. Monsieur le sénateur Gontard, je vous remercie d’avoir évoqué l’influence exercée par la France dans les débats autour de la reconnaissance de la préférence européenne dans les instruments développés, que ce soit Safe – le prêt de 150 milliards d’euros –, ou Edip (Programme pour l’industrie de la défense), qui fait aujourd’hui l’objet de discussions au sein du trilogue, entre le Parlement, la Commission et le Conseil européen.

Vous avez mentionné la question des drones. Il n’est pas question de revenir sur l’interdiction des drones autonomes, qui pourraient frapper sans avoir reçu l’autorisation d’un être humain.

Plus généralement, vous le savez, le développement de l’intelligence artificielle, en particulier de ses usages, fait l’objet d’un encadrement réglementaire de la part de l’Union européenne avec le règlement européen sur l’intelligence artificielle (AI Act) qui sera mis en œuvre dans les prochaines années. Celui-ci vise précisément à harmoniser les règles de l’intelligence artificielle sur le marché européen et à susciter des financements et des investissements, tout en encadrant, notamment, son usage sur le plan éthique ou militaire.

Vous avez mentionné le cadre financier pluriannuel. Bien sûr, nous défendrons une ambition haute pour le budget de l’Union européenne, en particulier son volet militaire, auquel j’ajouterai le spatial, tout en respectant la règle de préférence européenne et en continuant de soutenir la compétitivité, l’innovation et la décarbonation de notre continent.

En effet, le rapport Draghi estime que nous devons fournir un effort d’investissement de près de 800 milliards d’euros par an pour rattraper notre retard sur nos concurrents, en particulier les États-Unis, dans le domaine de la tech, de l’intelligence artificielle, du quantique, de la défense ou encore de la décarbonation.

Cet effort passera par des instruments publics, par le cadre financier pluriannuel, par de nouvelles ressources propres de l’Union européenne, dont celle-ci devra se doter pour rembourser notamment le grand emprunt Next Generation EU, mais aussi par la libération des financements privés.

Sur ce point, monsieur le sénateur, je ne vous rejoindrai pas dans certaines de vos propositions, car ce n’est pas en taxant plus et en imposant plus de contraintes à nos entreprises que nous permettrons à l’épargne privée qui, aujourd’hui, franchit l’Atlantique pour aller aux États-Unis – à hauteur de 300 milliards d’euros par an – de se porter vers nos besoins d’investissement, vers nos start-up, vers nos PME.

C’est au contraire en faisant de notre continent le plus attractif et le plus compétitif au monde, en simplifiant nos règles, en unifiant nos marchés de capitaux,…

M. le président. Il faut conclure, monsieur le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué. … et en soutenant nos entrepreneurs et nos innovateurs que nous pourrons défendre notre souveraineté. (M. François Patriat applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour la réplique.

M. Guillaume Gontard. Monsieur le ministre, la question n’est pas de taxer plus. Il s’agit de savoir comment financer cette nouvelle orientation, vers une défense européenne, mais pas seulement. La question de la défense est aussi celle de notre souveraineté, donc de la transition écologique, dont on sait qu’elle apportera une réponse à notre autonomie énergétique. Qui met-on à contribution pour financer cela ?

Une contribution juste me paraît évidemment un élément essentiel. Faire participer les plus grandes fortunes à un niveau qui peut être très bas – le taux de la taxe Zucman est de 2 % – me paraît tout simplement juste. Si on ne le fait pas, on risque d’ouvrir la porte en grand à des organisations politiques que l’on ne souhaite pas voir accéder au pouvoir, ce qui mettrait notre armée dans des mains très dangereuses pour notre avenir. (M. Jacques Fernique applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Didier Marie. (Mme Hélène Conway-Mouret applaudit.)

M. Didier Marie. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il aura fallu les violations du droit international par la Russie, l’arrivée de Trump au pouvoir, son imprévisibilité, ses menaces de désengagement militaire, la mise à l’écart de l’Union européenne des négociations sur l’avenir de l’Ukraine, la multiplication des ingérences dans nos processus démocratiques, pour que l’idée d’une Europe de la défense prenne enfin forme.

Nous pensions être à l’abri, jusqu’à ce que le parapluie américain, qui nous protégeait tout en nous vassalisant, menace de se refermer, et nous prenons conscience que l’appartenance à l’Otan n’est plus une garantie de sécurité fiable. Qui peut croire aujourd’hui, après le choc des droits de douane, que M. Trump activera l’article 5 du traité de l’Atlantique Nord si un pays membre était attaqué ?

Après des mois d’alerte sur la nécessité et l’urgence d’une autonomie stratégique européenne, la présentation d’un livre blanc pour la défense est bienvenue. Certes, depuis l’agression de l’Ukraine par M. Poutine, les États membres de l’Union européenne ont réalisé un effort de réarmement sans précédent, mais un effort dans l’urgence, réalisé en ordre dispersé, qui a mis en évidence nos carences, la fragmentation de la BITD européenne, des problèmes d’interopérabilité et, surtout, une dépendance aux importations américaines.

Nous vivons un moment de bascule, qui nous oblige à faire preuve de volonté et de courage politique. Nous devons en urgence renforcer nos capacités de dissuasion. L’Europe est riche, développée et stable. Pour reprendre l’expression du commissaire européen à la défense, M. Kubilius, les 450 millions d’Européens ne devraient pas dépendre des 350 millions d’Américains pour se défendre contre 150 millions de Russes. Nous devons assurer notre autonomie, notre défense, notre puissance, et cela passe par une véritable politique coordonnée de défense.

Bien qu’il ait été publié tardivement, le plan présenté par la présidente von der Leyen a le mérite d’être lucide sur le contexte géopolitique et démontre une prise de conscience des menaces existantes et de la nécessité d’un réveil européen en ayant pour ambition une autonomie stratégique de l’Europe d’ici à cinq ans.

Si de nombreux points quant à la proposition de créer un marché européen de défense sont à discuter et préciser, la volonté de faciliter la circulation des biens de défense au sein de l’Union, d’alléger les charges administratives et le développement de programmes européens conjoints pour certains projets de défense spécifiques sont à souligner.

Ce livre blanc n’est qu’une première étape vers l’autonomie que la Commission, il faut le dire, aurait dû franchir bien plus tôt.

Ce livre blanc arrive tard, mais il propose aussi trop peu. En effet, nous attendons de la Commission qu’elle joue le rôle de facilitatrice en s’assurant que les États membres investissent prioritairement dans du matériel européen – à cet égard, le plan ReArm Europe et les 150 milliards d’euros de prêt du programme Safe sont bienvenus, mais insuffisants –, mais nous avons besoin de beaucoup plus d’argent, et l’on peut regretter les tergiversations des États membres à l’égard d’un emprunt commun de 500 milliards d’euros associé à une préférence européenne.

De même, on peut regretter l’absence de consensus pour utiliser les 200 milliards d’euros d’avoirs russes gelés, qui devraient dès à présent permettre à l’Ukraine de résister, de compléter son armement et de préparer sa reconstruction. N’oublions pas que l’Ukraine est notre première ligne de défense et que, dans le face-à-face américano-russe, elle a plus que jamais besoin de la solidarité et de l’aide européennes.

Ces financements que nous appelons de nos vœux permettraient par ailleurs de ne pas franchir la ligne rouge de l’utilisation des fonds de cohésion pour financer l’effort de défense. L’exigence d’une sécurité et d’une souveraineté militaire ne peut en aucun cas se faire au détriment de la solidarité territoriale, de nos piliers sociaux et de la lutte pour le climat. Nous ne pourrons pas construire une Europe puissante en fragilisant les territoires et les Européens par plus d’inégalités.

Ce livre blanc et ReArm Europe sont une première étape. Ils attestent une volonté et pointent des priorités : dépenser mieux et ensemble pour combler nos lacunes capacitaires, renforcer notre dissuasion grâce aux technologies de rupture, élargir nos partenariats, améliorer la mobilité militaire, agréger les commandes et intégrer la BITD ukrainienne. Tout cela va dans le bon sens, mais il faut accélérer et adopter rapidement le programme Edip, le programme pour l’industrie européenne de défense.

Dans le contexte géopolitique actuel, fait de menaces hybrides, ce livre blanc ne peut être la seule stratégie. La réponse aux défis sécuritaires doit nécessairement être globale. La mise en place d’un bouclier démocratique européen en fait aussi partie, pour défendre nos valeurs et la place de l’Europe dans le monde.

Nous attendons des dirigeants européens, en particulier de vous, monsieur le ministre, qu’ils prennent leurs responsabilités et apportent une réponse forte et cohérente à la hauteur des enjeux. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. Monsieur le sénateur Marie, vous avez parlé d’un programme nécessaire, mais insuffisant. Je partage votre exigence et votre ambition.

Le programme ReArm Europe va effectivement dans le bon sens, celui d’un renforcement durable de notre BITDE. Mais il faudra en effet aller plus loin. C’est d’ailleurs ce que nous avons demandé à la Commission européenne. C’est la raison pour laquelle nous avons évoqué, notamment, la possibilité d’un emprunt commun.

Nous l’avons fait durant la crise du covid-19 face à une menace existentielle pour les économies et les sociétés européennes. Beaucoup nous disaient alors que nous allions nous diviser, nous déchirer, revenir à des solutions nationalistes et affaiblir la réponse collective de notre continent. Au contraire, nous avons su nous unir et emprunter pour relancer nos économies.

Nous faisons face aujourd’hui à un autre moment existentiel. Soyons là encore capables de surmonter ces tabous, de prendre des décisions historiques et d’emprunter pour investir en commun dans notre défense.

C’est l’ambition de la France. Nous voyons de plus en plus de nos partenaires nous rejoindre. Je note par exemple qu’un amendement en ce sens a recueilli une majorité de soutiens au sein du Parlement européen. Les positions évoluent.

Vous avez mentionné les avoirs gelés de la Russie. Aujourd’hui, nous utilisons les profits d’aubaine générés par ces avoirs gelés immobilisés en Europe pour financer, avec les membres du G7, les Américains et les Européens, un prêt de 50 milliards d’euros à l’Ukraine. Nous avons demandé aussi aux institutions européennes d’en accélérer le décaissement, pour pouvoir faire face aux besoins militaires des Ukrainiens.

Il y a urgence : nous devons avancer plus vite. Tels sont le message et l’ambition que la France porte à Bruxelles.

M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour la réplique.

M. Didier Marie. Monsieur le ministre, vous l’avez souligné, un emprunt commun est nécessaire. Mais il faudra le rembourser. Cela pose la question – M. Gontard y a fait référence – des ressources propres. Soyons un peu imaginatifs en la matière.

L’Ukraine est en difficulté. La Russie accentue la pression. Nous le voyons bien, la situation sur le front est vraiment difficile. Les Ukrainiens ont urgemment besoin d’être renforcés. Je trouve donc opportun d’utiliser ces 200 milliards d’euros d’avoirs gelés pour accompagner l’Ukraine immédiatement.

M. le président. La parole est à M. Stéphane Ravier.

M. Stéphane Ravier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà cinq ans déjà, durant la crise du covid-19, chaque État européen a défendu ses intérêts, quitte à marcher sur son voisin. Puis, la Commission non élue de Bruxelles a contracté des dettes pour relancer l’économie et réindustrialiser. Cinq ans plus tard : toujours rien !

Aujourd’hui, Mme von der Leyen présente un livre blanc pour contracter 810 milliards d’euros de nouvelles dettes dans l’intention de nous réarmer dans les cinq prochaines années. Et nous devrions la croire ? Comme nombre de Français, comme saint Thomas, je ne crois que ce que je vois. Or tout ce que nous voyons, c’est la dette qui enfle et la pression fiscale qui devient insupportable, sans aucun investissement stratégique à l’horizon !

Les bonnes intentions couchées sur ce papier ne peuvent résister à la réalité. Quand Bruxelles parle de préférence européenne dans la production d’armements, elle n’impose qu’un seuil de 65 % des composants provenant d’Europe, ce qui nous laisse notamment dépendants des procédures Itar (International Traffic in Arms Regulations) américaines à l’export.

De plus, le livre blanc de Bruxelles ouvre les achats conjoints avec le Royaume-Uni, le Canada ou l’Australie, alors que ces derniers nous ont humiliés en annulant le contrat qui devait être historique de douze sous-marins nucléaires voilà quatre ans à peine, même s’ils s’en mordent quelque peu les doigts aujourd’hui.

Vous parlez d’indépendance vis-à-vis des États-Unis, monsieur le ministre ? Mais dix des vingt-sept pays de l’Union européenne continuent à acheter des armes aux Américains, notamment des avions de chasse F-35 !

Vous parlez de collaboration des industries de défense européennes ? On constate que 100 milliards d’euros sont consacrés aux futurs avions de combat franco-allemands système de combat aérien du futur (Scaf), aujourd’hui dans l’impasse !

Vous parlez de souveraineté militaire et de patriotisme ? Vous ne contrôlez même pas les investissements étrangers qui viennent piller ce qui nous reste de vivier industriel ! Et l’on voit aujourd’hui l’entreprise française LMB Aerospace, qui équipe nos hélicoptères, nos Rafales et nos porte-avions, passer sous pavillon américain…

Quand les auteurs de ce livre blanc parlent de « rapport de force », ils ne l’assument qu’envers l’Est de l’Europe. C’est la totale soumission quand il s’agit du Sud, d’où proviennent les menaces, islamistes ou d’États agressifs comme l’Algérie, ainsi que la délétère déferlante migratoire. Preuve, s’il en est, que la Commission ne parvient toujours pas à concilier les intérêts des Estoniens en même temps que ceux des pays latins !

Bref, quand on parle de réarmer, il nous incombe déjà de pointer du doigt ceux qui ont désarmé. Or, en la matière, nous ne pouvons pas vous faire confiance, à vous qui avez refusé d’entendre le général de Villiers, ni à la Commission européenne, qui s’est construite sur la naïve idée de la fin de l’Histoire et des dividendes de la paix.

Monsieur le ministre, ne pensez-vous pas que nous avons moins besoin d’un livre blanc de la Commission européenne sur la défense que d’un livre bleu-blanc-rouge pour protéger et développer l’excellente base industrielle de défense française et accorder des moyens à notre armée, qui est et doit rester aux ordres de Paris, et non pas soumise à un conglomérat berlino-bruxellois ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. Monsieur le sénateur Ravier, c’est une grande émotion que d’entendre vos leçons sur la naïveté, vous qui vous réjouissiez de l’élection de Donald Trump, le même qui menace aujourd’hui nos intérêts économiques, ceux de nos agriculteurs, de nos viticulteurs et de nos entreprises avec les droits de douane massifs imposés à l’économie européenne !

Il est aussi frappant de vous entendre parler de naïveté quand vous et vos alliés politiques avez prôné l’alliance avec Vladimir Poutine. Vous avez vous-même participé à l’observation électorale des élections truquées en Russie,…

M. Stéphane Ravier. Pas plus qu’à Marseille !

M. Benjamin Haddad, ministre délégué. … pour légitimer le régime de Vladimir Poutine !

Je vous le dis sans naïveté et avec lucidité, monsieur le sénateur : oui, nous réarmons notre continent. Oui, nous sortons de la naïveté commerciale. Oui, nous sommes capables de défendre nos intérêts et d’assumer des rapports de force. Oui, nous sommes aussi capables de nous protéger face aux défis migratoires !

En effet, même vos alliés politiques le constatent aujourd’hui en Europe : la meilleure réponse face au défi migratoire, c’est évidemment la coopération européenne. C’est évidemment la mise en œuvre du pacte asile et migration, qui permettra une première sélection des demandeurs d’asile aux frontières de l’Union européenne. C’est évidemment la mutualisation de nos instruments sur les visas, sur l’aide au développement et sur la conditionnalité des accords commerciaux. Et c’est évidemment le fait d’assumer des rapports de force à l’échelon européen. Même des pays comme l’Italie de Mme Meloni le demandent aujourd’hui !

Sans naïveté, et avec une grande lucidité face aux menaces, face aux défis, nous faisons effectivement le choix européen ! (Mme Hélène Conway-Mouret et M. Didier Marie applaudissent.)

M. le président. La parole est à Mme Marta de Cidrac. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Marta de Cidrac. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’Union européenne a dévoilé le 19 mars dernier un document politique majeur, son livre blanc pour une défense européenne, accompagné du plan d’action ReArm Europe. Il s’agit de renforcer l’autonomie stratégique de l’Union et de soutenir les capacités de défense de ses États membres.

Au travers de ce texte, la Commission acte ce que beaucoup d’entre nous constatent ici depuis des années : l’ère des dividendes de la paix est bel et bien révolue ; et, sans base industrielle solide, il ne peut y avoir de puissance stratégique.

Face aux nouvelles menaces, à la guerre qui fait rage en Ukraine, à la fragilité croissante de l’ordre international et à la perspective du désengagement américain, l’Europe n’a d’autre choix que de se préparer et de s’armer sans déposséder les États membres de leurs prérogatives régaliennes.

Le livre blanc le dit clairement, les investissements européens dans la défense étaient insuffisants, fragmentés et souvent inefficaces. Beaucoup ont nourri le consortium militaro-industriel américain, nos voisins et alliés considérant le parapluie états-unien comme éternel et hésitant sur les solutions européennes existantes, pour ne pas dire les solutions françaises. L’Europe ne peut plus et ne doit plus confier sa sécurité aux États-Unis, un allié qui n’a comme boussole que ses seuls intérêts. L’heure est à la prise de conscience et à la correction, et c’est tant mieux !

Pour assurer sa propre sécurité, l’Europe ne pourra faire l’économie d’une harmonisation des standards et des procédures, harmonisation qui sera indispensable pour une mise en place efficace d’une interopérabilité entre États membres.

Toutefois, dans cette nouvelle ambition européenne, qui passe par le soutien à l’Ukraine ou encore par la consolidation de l’industrie européenne de défense, la France a un rôle central à jouer en tant que puissance nucléaire disposant de compétences reconnues et d’un véritable tissu industriel. Oui, la France est un acteur militaire important au sein de l’Union et au sein de l’Otan.

Avec le plan ReArm Europe, la Commission propose plus de 800 milliards d’euros mobilisables répartis autour de trois axes : un effort budgétaire national coordonné, via la clause dérogatoire du pacte de stabilité ; la création de l’instrument Safe, capable de lever jusqu’à 150 milliards d’euros sur les marchés pour financer des achats conjoints ; la mobilisation de la Banque européenne d’investissement et de l’épargne privée pour structurer un écosystème industriel de défense pérenne.

Ce plan constitue une avancée majeure dans la maturation stratégique de l’Union. Il est à la fois une réponse à l’urgence, en soutenant concrètement l’Ukraine, et une vision de long terme, en favorisant l’innovation et l’autonomie stratégique.

Toutefois, permettez-moi, mes chers collègues, de formuler trois conditions indispensables à sa réussite.

Tout d’abord, l’Europe ne pourra pas se contenter d’un empilement de contributions nationales. Il faudra de la cohérence, de la mutualisation et de la lisibilité budgétaire.

Ensuite, le renforcement de notre base industrielle et technologique de défense ne doit pas être sacrifié sur l’autel des achats rapides ou des intérêts particuliers. Le soutien à l’innovation, aux PME et aux capacités critiques doit être central. Surtout, nous devons garantir que chaque euro investi ira bien à la BITDE, et non vers des industries étrangères.

Enfin, ce plan ne pourra pas réussir sans une volonté politique forte, constante et partagée entre les États membres. La France, membre permanent du Conseil de sécurité, nation-cadre en Europe, a une responsabilité historique dans cette dynamique.

Ce livre blanc ne règle pas tout – il ne remplace ni l’Otan ni nos responsabilités nationales –, mais il marque un tournant, un sursaut, une déclaration d’intention forte, celle d’une Europe qui veut non plus subir, mais choisir. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. Madame la sénatrice de Cidrac, je partage fondamentalement votre constat et vos propositions. Vous avez insisté sur trois éléments.

Le premier est la nécessité d’une cohérence dans les projets industriels. S’il faut évidemment respecter la souveraineté des États membres, il convient d’apporter plus de lisibilité pour nos industriels et de nous prémunir contre les risques de redondance industrielle. Vous avez évidemment raison sur ce point. Cela fait d’ailleurs partie des objectifs du plan Safe et du livre blanc.

Le deuxième est le renforcement à long terme de notre BITDE en soutenant nos innovateurs et nos start-up. Nous avons tellement de pépites en France ! Je pense notamment à l’intelligence officielle et au quantique. Faisons en sorte de leur donner les moyens de se développer, de se financer et d’être véritablement compétitives à l’échelle internationale.

Les retards et les dépendances que nous avons aujourd’hui dans d’autres secteurs sont liés au fait que nous avons raté quelques-uns des tournants technologiques des décennies précédentes.

Pour ne pas être en situation de dépendance capacitaire, nous devons à la fois combler nos lacunes actuelles et faire en sorte de ne pas en avoir à l’avenir. Il faut donc soutenir des écosystèmes de recherche et d’innovation. Pourquoi ne pas développer des Darpa (Defense Advanced Research Projects Agency) – vous savez, il s’agit de cette agence du Pentagone qui est à l’origine d’innovations technologiques comme le GPS ou encore internet – à l’européenne.

Renforçons les outils européens dont nous disposons. Je pense par exemple à European Innovation Council, cette agence qui doit investir dans l’innovation en Europe, mais qui pourrait être renforcée, notamment dans ses financements. J’ai également fait référence tout à l’heure au mandat de la Banque européenne d’investissement.

Le troisième élément que vous avez évoqué, c’est la volonté politique. Vous avez évidemment raison, madame la sénatrice. La France a une responsabilité et un rang particuliers à tenir. Elle est une puissance dotée de l’arme nucléaire et un membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies. Elle défend depuis 2017 l’ambition de l’autonomie stratégique et elle continuera de le faire.

M. le président. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)

Mme Hélène Conway-Mouret. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce livre blanc européen, le premier du genre, n’est pas un simple document ; il est l’affirmation d’une volonté politique d’avancer ensemble.

Néanmoins, l’ambition ne suffit pas. Encore faut-il nous en donner les moyens. Les dépenses de défense des États membres ont, certes, augmenté de 31 % depuis 2021, mais le compte n’y est toujours pas. Si chacun a jusqu’à présent investi selon ses propres priorités, le moment est venu de mutualiser nos efforts.

Il est possible de structurer une véritable BITDE grâce à des coopérations industrielles bilatérales ou multilatérales. Je pense à l’accord CaMo (capacité motorisée) avec la Belgique ou au système de défense antiaérienne Mamba avec l’Italie. Mais un obstacle persiste : celui de la concurrence intra-européenne entre nos industriels, qui s’ajoute à la concurrence internationale.

Monsieur le ministre, n’est-ce pas le moment d’envisager un marché intégré ou, en tout cas, de revoir les règles de notre marché intérieur pour aligner nos ambitions stratégiques sur nos pratiques économiques ? Face aux géants qui nous entourent, l’Union est un puissant levier pour faciliter les coopérations, renforcer l’interopérabilité, réduire les coûts, mais aussi soutenir les infrastructures à double usage pour la mobilité militaire et les communications.

M. le ministre Lecornu a déclaré que l’argent du contribuable européen ne peut pas être dépensé « pour produire sous licence des équipements américains ». Je partage son point de vue. Il y va en effet de la souveraineté de l’Europe.

Cette souveraineté passe d’abord par la réduction de nos dépendances. Où en sommes-nous de la désitarisation de nos matériels ? Pourrons-nous encore dépendre d’un standard de liaison de données tactiques de l’Otan, alors que des solutions européennes pourraient émerger ? Que faisons-nous pour sécuriser nos accès aux matériaux critiques et renforcer une main-d’œuvre européenne ?

Sur le plan financier, nombre de nouvelles initiatives vont dans le bon sens. Je voudrais néanmoins vous alerter sur la révision du Fonds européen de développement régional (Feder). Le danger serait qu’il subventionne des usines produisant du matériel américain exporté vers les États-Unis, comme c’est déjà le cas dans le domaine civil.

Ce livre blanc nous invite à penser l’après, un avenir sous la forme d’une alliance européenne étendue au Royaume-Uni et à la Norvège, fondée sur l’acquis otanien et articulée autour des forces de dissuasion franco-britanniques, des moyens terrestres allemands et polonais et des capacités navales espagnoles, grecques ou italiennes.

Dans ce paysage, la France peut être le moteur de la défense européenne, du fait non seulement de son modèle d’armée complet, de l’excellence de son industrie, mais surtout de sa dissuasion nucléaire entièrement indépendante, potentielle clé de voûte de la sécurité du continent, à condition de prendre des engagements politiques et stratégiques plus fermes. Cela signifie aussi prendre des mesures concrètes et tangibles avec nos partenaires.

Monsieur le ministre, au-delà des missions de réassurance de l’Otan, n’est-il pas temps d’adosser notre garantie de sécurité au déploiement de troupes et de capacités, par exemple en Pologne ?

Nos lacunes restent nombreuses en matière de commandement, de défense solaire, de renseignement satellitaire, de frappe dans la profondeur ou encore de guerre électronique. Les combler exigera des investissements colossaux pour soutenir l’Ukraine aujourd’hui et assurer notre sécurité demain. Ces enjeux dépassent les capacités d’un seul pays. Ce livre blanc devra donc irriguer nos politiques nationales. Ces conclusions seront-elles intégrées dans la prochaine Revue nationale stratégique, en lien avec les stratégies de défense de nos partenaires ?

Monsieur le ministre, de retour d’un déplacement à Washington, je peux vous affirmer que les Américains s’organisent. Ils sont prêts à produire et à exporter pour renforcer leur industrie et créer des emplois chez eux. Et nous, Européens, quel est notre cap ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Jacques Fernique applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. Madame la sénatrice Conway-Mouret, je vous remercie de vos questions précises. Vous soulignez des exigences et des ambitions que nous devons avoir dans les prochaines années, tout en signalant des points de vigilance.

Toutefois, c’est avec prudence que j’aborderai la question du marché intégré de la défense. Nombre de sénateurs ont évoqué les risques – d’ailleurs, il s’agit non pas de risques, mais de faits avérés – de duplication et de redondance entre les systèmes d’armement.

Songeons à tous les systèmes de missiles ou de tanks qui existent. Il peut y avoir des standards en Europe, mais le marché de l’industrie de l’armement n’est pas tout à fait une industrie comme les autres. Dès lors, l’aligner sur les règles concurrentielles régissant aujourd’hui les aides d’État, alors qu’il s’agit en premier lieu d’un instrument de souveraineté adossé à la politique des États membres, ne nous paraît pas idoine.

Trouvons un équilibre entre, d’une part, la désignation des domaines capacitaires dans lesquels nous avons des dépendances et nous devons investir, et, d’autre part, le respect de ce que ces industries représentent en termes de souveraineté pour les États membres.

Vous avez mentionné un certain nombre de dépendances, en particulier dans le renseignement. C’est la raison pour laquelle j’ai souligné l’importance du spatial, qui est parfois quelque peu occulté quand on parle de la chose militaire ; il est d’ailleurs aussi dans le portefeuille du commissaire Kubilius.

Songeons au rôle que joue aujourd’hui Starlink, avec les menaces d’Elon Musk de le débrancher ; il y a aussi un débat en Italie sur l’utilisation de ce fournisseur d’accès. Il est urgent de déployer le système Iris et d’en accélérer le déploiement pour réduire au maximum nos dépendances.

Je vous rejoins sur la question des matériels américains. En effet, il s’agit non pas simplement d’avoir des entreprises américaines ou des entreprises américaines sous pavillon européen, hormis des joint-ventures qui viendraient produire en Europe – en l’occurrence, nous considérons que cela relève de la préférence européenne –, mais bien de garder l’autorité de conception et, a minima, 65 % de composants européens du début à la fin dans les produits finis.

M. le président. Il faut conclure, monsieur le ministre.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué. Il s’agit évidemment de soutenir notre BITDE et l’industrie européenne et de ne pas recréer de dépendances.

M. le président. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, pour la réplique.

Mme Hélène Conway-Mouret. Monsieur le ministre, je vous ai interrogé sur le marché intégré non pas parce que j’y crois, mais parce que je souhaitais entendre votre réponse sur cette question importante.

Je remercie le groupe Les Républicains d’avoir été à l’initiative de ce débat. Je crois en effet qu’il y a une inquiétude croissante chez nos compatriotes. Il y a eu l’Ukraine ; il y a maintenant l’incertitude liée à l’éloignement des Américains.

Nous avons, me semble-t-il, besoin d’entendre des engagements fermes de la part du Gouvernement sur les coopérations renforcées que nous pouvons avoir avec nos partenaires. Je pense notamment à la question qui est, je crois, la plus politique, à savoir celle de la dissuasion nucléaire. À mon sens, nous avons besoin d’un vrai débat sur la manière dont la France peut éventuellement apporter à l’échelle du continent une dissuasion nucléaire qui, de fait, nous protégerait collectivement.

Nous devons aussi – cela a été abordé par un grand nombre de mes collègues – nous donner les moyens de nos ambitions ; il me paraît également essentiel d’avoir ce débat.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Belrhiti. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme Catherine Belrhiti. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous débattons aujourd’hui d’une question cruciale pour l’avenir de la sécurité et de la souveraineté de l’Europe : le livre blanc de la Commission européenne sur la défense. Ce document présente des pistes pour renforcer les capacités militaires européennes et coordonner la défense sur notre continent.

Cependant, il est essentiel de garder à l’esprit que la défense reste une compétence régalienne des États. Nous partageons l’idée qu’une Europe de la défense plus forte est nécessaire, mais nous avons des réserves sur certaines propositions.

Nous ne remettons pas en cause la nécessité d’un renforcement des capacités de défense au sein de l’Union européenne, mais nous estimons que ce renforcement ne doit pas signifier la dilution de la souveraineté des États membres. La défense, la gestion des forces armées et la sécurité doivent relever du contrôle des autorités nationales. La Commission européenne doit se limiter à un rôle de soutien et de coordination, sans interférer dans les choix stratégiques de chaque pays.

Cela dit, ce livre blanc soulève des enjeux importants pour l’avenir de l’industrie de défense européenne. Nous devons garantir à l’Europe une capacité d’innovation et de production militaire autonome, indépendamment des fournisseurs étrangers. Il est inconcevable que 80 % des dépenses européennes en matière de défense soient encore allouées à des équipements produits en dehors de l’Union, comme le soulignent les auteurs du rapport de la commission de l’industrie, de la recherche et de l’énergie de 2023. Cette situation expose l’Europe à des dépendances stratégiques dangereuses.

De plus, nous appelons de nos vœux l’introduction de critères de préférence européenne dans les actes d’achat de matériel et défense, afin de soutenir prioritairement nos entreprises et technologies locales. Il s’agit non pas d’un protectionnisme à outrance, mais d’une mesure pragmatique visant à garantir l’autonomie stratégique de l’Europe. Si nous voulons une Europe forte, il est impératif que notre industrie de défense soit renforcée et compétitive sur la scène mondiale.

Cependant, la coopération avec nos alliés, en particulier au sein de l’Otan, reste un axe stratégique fondamental. L’Europe doit pouvoir agir en coordination avec ses partenaires, mais il est essentiel de ne pas confondre cette coopération avec une intégration supranationale. Chaque État membre doit garder le contrôle sur ses décisions en matière de sécurité.

Pour conclure, nous soutenons une Europe de la défense forte et compétitive, mais il est impératif que cette Europe ne se transforme pas en une Union imposant une vision uniforme de la défense. La défense doit rester sous le contrôle exclusif de chaque pays, afin d’assurer une Europe autonome, forte et respectueuse de ses États souverains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. Madame la sénatrice, nous avons en effet parlé de la préférence européenne, mais je tiens à souligner combien nous partageons évidemment cette exigence de vigilance quant à la souveraineté des États membres dans la définition de la politique de défense à l’échelon européen.

Conclusion du débat

M. le président. En conclusion du débat, la parole est à M. le ministre délégué.

M. Benjamin Haddad, ministre délégué auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères, chargé de lEurope. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de ce débat de qualité, qui nous a permis d’approfondir les questions liées au plan ReArm Europe et au livre blanc de la Commission européenne sur le réarmement de notre continent.

Alors que, nous le voyons, nombre de nos partenaires sont en train d’évoluer sur la préférence européenne, la dépendance vis-à-vis des États-Unis et l’appréciation de la menace, nous avons tous un rôle à jouer pour accompagner ce débat européen. Et je sais que vous contribuez, au sein des groupes d’amitié, dans les enceintes de dialogue interparlementaire ou encore dans les différentes réunions et les forums de think tanks, à faire entendre la voix de la France et sa perspective singulière de soutien à l’autonomie stratégique.

Nous voyons évoluer les positions de nos partenaires allemands, polonais et baltes. Vous pouvez compter sur le soutien du Gouvernement et sur mon soutien personnel à cet égard.

Voilà quelques jours, j’étais à Sarajevo, en Bosnie-Herzégovine, un pays dont l’unité et l’ordre constitutionnel sont aujourd’hui menacés par les visées sécessionnistes de M. Dodik en Republika Srpska. Encore un terrain au cœur du continent européen où la Russie tente, par ses ingérences, d’allumer des contre-feux pour promouvoir l’instabilité et le chaos directement à nos frontières !

Nous commémorerons cette année les 30 ans du génocide de Srebrenica et des accords de Dayton-Paris, qui ont mis fin à la situation en Bosnie.

Si j’évoque ce déplacement, c’est parce qu’il est d’usage d’entendre dans le débat public que la guerre serait de retour sur notre continent depuis le 24 février 2022 et l’invasion de la Russie en Ukraine. Mais la vérité est que nous, Européens, avons été dans une forme de déni de la guerre et de la violence pendant des décennies.

La guerre n’avait pas disparu du continent pendant des décennies, mais notre Europe était divisée par le rideau de fer avec des dizaines de millions de citoyens sous oppression soviétique et communiste, cet « Occident kidnappé », comme l’appelait Milan Kundera, derrière le rideau de fer.

Puis, dans les années 1990, il y a eu ce que nous avons cru être des anachronismes, le retour de vieilles haines, la guerre dans les Balkans, où nous avons dû attendre l’arrivée des États-Unis pour pouvoir mettre fin à un génocide sur notre sol.

En 2008, ce fut l’agression de la Russie contre la Géorgie. En 2014, à la suite du mouvement démocratique pro-européen du Maïdan, ce fut l’attaque de la Russie contre le Donbass et l’annexion de la Crimée. Et, bien entendu, il y a eu voilà trois ans la guerre contre l’Ukraine, avec la menace que fait porter la Russie sur l’ensemble de nos démocraties par ses ingérences, ses sabotages, ses attaques cyber, ses menaces, ses remises en question des frontières et des souverainetés des États libres issus de la fin de la guerre froide.

À cela s’ajoutent aujourd’hui les interrogations sur l’avenir de la garantie de sécurité américaine et de la relation transatlantique. Ce mouvement de fond structurel dépasse là encore la personne de Donald Trump, les administrations précédentes ayant déjà entamé leur pivot vers l’Asie et affiché des tendances au protectionnisme et à l’unilatéralisme.

Face à ce défi, la France porte toujours le même message, celui de l’autonomie stratégique de notre continent et de la nécessité de notre réarmement. Ce dernier doit être matériel – le plan ReArm n’en est qu’une étape –, mais aussi moral. Trop longtemps, l’Europe a ignoré sa puissance et sa force. Trop longtemps, elle a ignoré la réalité de la violence à ses frontières et celle des rapports de force imposés par ses partenaires et par ses compétiteurs.

Notre Europe a permis la plus longue période de paix que nous ayons connue sur notre continent, si bien qu’une guerre est aujourd’hui inenvisageable entre deux pays membres de l’Union européenne.

Toutefois, cette paix durable ne nous a peut-être pas préparés à comprendre que nos adversaires et nos rivaux pouvaient toujours nous désigner comme leurs ennemis – c’est ce qu’a fait la Russie – et choisir la guerre et l’agression quand nous aurions préféré qu’ils usent de diplomatie.

Face à ce défi, face à ce retour des conflictualités et des rivalités géopolitiques, faisons le choix de l’union de notre continent. Faisons le choix du réarmement et de la défense collective de nos intérêts, de nos valeurs et de notre sécurité. (Mme Hélène Conway-Mouret applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour le groupe auteur de la demande. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Dominique de Legge, pour le groupe Les Républicains. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 3 juillet 2013, notre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées publiait un rapport intitulé Pour en finir avec lEurope de la défense.

Dans sa note de synthèse, elle qualifiait l’Europe de la défense d’« idée séduisante parce qu’ambiguë » et de « fatras conceptuel », tout en concédant que son bilan n’était « pas nul ». Dénonçant « une impasse conceptuelle », elle n’en concluait pas moins : « La défense commune européenne est une impérieuse nécessité, aujourd’hui hors de portée. »

Où en sommes-nous douze ans plus tard ? Les tensions et les conflits se multiplient dans le monde. La guerre, avec le conflit ukrainien, est aux portes de l’Europe, tandis que les alliances nées au lendemain de la Seconde Guerre mondiale sont questionnées. Plus que jamais, la question de la défense commune européenne est d’actualité. Mais pour avancer, encore faut-il poser le problème dans des termes clairs et sortir du concept général pour préciser le mode opératoire.

La première question à se poser est de savoir si l’on parle de l’Europe de la défense, laissant à penser qu’il s’agit d’une action communautaire, ou de la défense de l’Europe, ce qui renvoie à une union d’États qui se reconnaissent comme constituant un ensemble ayant des intérêts communs en raison de leur histoire, de leurs valeurs et de leur géographie.

Dans le premier cas, il s’agit d’aller vers une Europe fédérale, dans le second, de construire une Europe des États ; rien de bien nouveau, en quelque sorte, depuis le débat sur la Communauté européenne de défense…

Le livre blanc ne répond pas formellement à cette question, mais, très clairement, la Commission se propose d’aider les États à identifier les insuffisances et priorités capacitaires, sans préciser d’ailleurs par rapport à quels objectifs précis, ou encore à faciliter l’efficacité, l’interchangeabilité et l’interopérabilité.

Or, en l’état des traités, mes chers collègues, je suis désolé de le dire, la Commission n’a formellement ni mandat, ni compétence, ni légitimité pour mettre en place une politique européenne de la défense, donc pour pointer des insuffisances, édicter des priorités ou définir des normes.

Il est à noter d’ailleurs que c’est par le prisme de ses prérogatives dans le domaine de la politique industrielle que la Commission tente de fédérer des initiatives autour des industries de défense, en laissant croire qu’il existerait une BITD européenne, ce qui est un abus de langage.

C’est un abus de langage, parce que non seulement l’industrie de la défense – vous l’avez dit, monsieur le ministre – ne s’inscrit pas dans une logique de marché et de libre concurrence, mais aussi parce que ses clients sont in fine les États, au travers des états-majors, et que, à ce jour, il n’y a pas d’État européen.

C’est sans doute là que se situent les limites du projet Edip, qui peut apparaître, à bien des égards, avant tout comme un outil au service d’une politique industrielle, plutôt que comme une réponse militaire, capacitaire et opérationnelle à l’urgence du moment.

En période de tension, l’heure n’est sans doute pas au montage de coopérations industrielles entre plusieurs pays, en espérant des retombées économiques pour chacun d’eux, mais davantage à la désignation de chefs de file en fonction des compétences disponibles.

De ce point de vue, on ne peut que s’inquiéter du fait que, selon le livre blanc, les dotations annoncées seront basées sur la demande et étayées par des plans industriels de défense nationale qui devront être approuvés par la Commission, selon des procédures dont la Commission a le secret et dont les principales caractéristiques de fonctionnement ne sont ni la simplicité ni la réactivité.

Si nous voulons mettre en place une défense commune de l’Europe, celle-ci ne peut qu’être pilotée au niveau politique, c’est-à-dire au niveau du Conseil, comme le préconisait déjà voilà douze ans notre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

Le deuxième point que je souhaite soulever est bien sûr celui du financement. Il y a trois mois, on ne parlait que de la dette publique de 3 300 milliards d’euros. Depuis un mois, on n’en parle plus, et les milliards d’euros sont de nouveau de sortie : 800 pour Mme von der Leyen, 100 pour le ministre Lecornu.

Les 800 milliards d’euros annoncés par Mme von der Leyen n’existent pas : ils correspondent, pour 650 milliards, à un assouplissement du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), qui conduirait les États à s’affranchir de la règle des 3 %. En d’autres termes, cette somme est composée, d’une part, d’une dette supplémentaire pour les États, et, d’autre part, de 150 milliards d’euros de facilités d’emprunt qu’il faudra bien rembourser d’une façon ou d’une autre.

En ce qui concerne la France, chacun sait que nous avons déjà explosé tous les compteurs. Augmenter les dépenses pour la défense est sans doute indispensable, mais peut-on accroître encore le déficit ? Poser la question, c’est déjà y répondre.

Commençons déjà par payer nos fournisseurs, alors que nous avons 8 milliards d’euros de reports de charge. C’est l’un des préalables à la montée en puissance de leur production. Essayons aussi de respecter la loi de programmation militaire et les financements qui y sont attachés. Selon des responsables que j’ai récemment auditionnés, le programme 146, « Équipement des forces », aurait été amputé de près d’un milliard d’euros en 2024.

En conclusion, nous ne pouvons qu’approuver une initiative commune aux pays européens pour organiser leur défense. Il y a urgence et nécessité. Sachons transformer une crise en une chance pour bâtir un projet commun.

Pour autant, notre réponse ne peut pas se faire dans un cadre opérationnel, juridique et institutionnel approximatif et instable. Le moment est venu de répondre aux questions de fond : où se prennent les décisions, sous quelles formes et avec quelles procédures ?

La France est le seul pays de l’Union à disposer à la fois de l’arme nucléaire, d’une armée de projection et d’une véritable BITD, même si elle ne couvre pas tous les champs des besoins. Cela nous confère des responsabilités, mais aussi une force pour faire valoir nos intérêts.

Sachons nous montrer à la hauteur de nos ambitions pour notre pays et pour la liberté en Europe. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. Mes chers collègues, nous en avons terminé avec le débat sur le livre blanc de la Commission européenne sur la défense.

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Communication relative à une commission mixte paritaire

M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire est parvenue à l’adoption d’un texte commun.

Nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures cinquante-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures vingt-cinq, est reprise à vingt et une heures cinquante-cinq, sous la présidence de Mme Anne Chain-Larché.)

PRÉSIDENCE DE Mme Anne Chain-Larché

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

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Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Article 1er

Moyens de contrôle des sénateurs et droits des groupes politiques

Adoption d’une proposition de résolution dans le texte de la commission modifié

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification, présentée par M. Gérard Larcher et Mme Sylvie Vermeillet (proposition n° 332, texte de la commission n° 509, rapport n° 508).

Discussion générale

Mme la présidente. Dans la discussion générale, la parole est à Mme Sylvie Vermeillet, auteure de la proposition de résolution. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Sylvie Vermeillet, auteure de la proposition de résolution. Madame la présidente, mes chers collègues, le président Larcher, que je remercie sans réserve de la confiance qu’il m’a accordée, m’a confié en janvier 2024, voilà donc près d’un an et demi, une mission sur l’évolution du travail parlementaire, en ma qualité de présidente de la délégation du Bureau chargée du travail parlementaire et des conditions d’exercice du mandat de sénateur.

Cette mission m’a amenée à entendre l’ensemble des présidents de commission, de délégation et de groupe, mais aussi des personnalités extérieures, parmi lesquelles plusieurs de nos collègues du parlement italien.

De ces échanges fructueux sont ressorties dix-sept propositions, qui ont été adoptées par la conférence des présidents et qui peuvent être réparties selon quatre axes : conforter notre procédure législative pour renforcer le rôle du Parlement tout en préservant la qualité du débat parlementaire ; renforcer nos moyens de contrôle ; simplifier la gestion de l’agenda de nos collègues ; enfin, poursuivre l’adaptation de notre règlement aux évolutions de nos pratiques.

Plusieurs de ces 17 propositions sont déjà mises en œuvre par la conférence des présidents.

C’est le cas de la nouvelle organisation de nos mardis après-midi des semaines de contrôle, qui sont désormais consacrés aux travaux des délégations, des structures temporaires et des commissions. Il s’agit à la fois de renforcer le contrôle – vous êtes nombreux à estimer qu’il est plus efficace en commission et devant les délégations –, mais aussi de permettre à un plus grand nombre de nos collègues d’assister aux différentes réunions qui, jusqu’à présent, avaient tendance à se chevaucher.

C’est également le cas de la réorganisation de nos semaines sénatoriales : l’espace réservé du mercredi après-midi de la semaine d’initiative a été déplacé au mercredi de la semaine de contrôle, afin, d’une part, de permettre de poursuivre le mercredi, après les questions au Gouvernement, l’examen du texte qui n’aurait pas été achevé le mardi soir – autrement dit, cela évite de saucissonner le texte –, et, d’autre part, d’expérimenter la mise en place de deux espaces transpartisans.

Le premier espace a été mis en place le mercredi 19 mars dernier, avec l’examen de deux propositions de loi et d’une proposition de résolution, en application de l’article 34-1 de la Constitution, toutes trois adoptées à l’unanimité. Il s’agit là d’une occasion de valoriser et de faire prospérer les initiatives parlementaires faisant l’objet d’un large consensus au sein de notre assemblée, dans un esprit de coconstruction et de travail en bonne intelligence entre les différents groupes.

Le second espace transpartisan aura lieu le mercredi 14 mai prochain et connaîtra, je l’espère, le même engouement.

D’autres propositions nécessitent de modifier la loi organique du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution, ainsi que l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires.

Ces mesures visent, par exemple, à reconnaître un intérêt à agir aux présidents des commissions et des groupes politiques de l’Assemblée nationale et du Sénat en matière d’application des lois, ou encore à enrichir les dispositions relatives aux études d’impact et à soumettre les amendements du Gouvernement à une obligation de production d’étude d’impact. Elles devront être adoptées par l’Assemblée nationale pour pouvoir être mises en œuvre.

J’en viens maintenant aux mesures qui modifient notre règlement et qui sont soumises à votre approbation ce soir.

Plusieurs d’entre elles visent à conforter les droits des groupes politiques. Tel est le sens de l’article 2, qui attribue aux groupes la « propriété » de leurs postes au sein du Bureau, ainsi que des commissions et des structures temporaires.

En cas de changement de groupe, le sénateur concerné cesserait de plein droit d’appartenir à cette instance. Le groupe « propriétaire » du poste aurait le choix de nommer un sénateur à sa place ou de laisser le poste. Il s’agit là d’une demande forte qui a été exprimée par l’ensemble des groupes de notre assemblée. Il appartiendra au Bureau d’édicter cette même règle pour les présidences et pour le bureau des groupes d’études et des groupes d’amitié.

Plusieurs mesures portent par ailleurs sur le renforcement des missions de contrôle et s’inscrivent dans la continuité des conclusions de la mission de réflexion sur le contrôle sénatorial, dont notre collègue Pascale Gruny, alors vice-présidente du Sénat, était le rapporteur.

Ainsi, l’article 7 simplifie l’octroi des prérogatives de commission d’enquête aux commissions permanentes, en remplaçant le passage en séance publique par une procédure d’affichage et de ratification en l’absence d’opposition.

L’article 19 réécrit le chapitre XX du règlement, relatif aux affaires européennes. Il est notamment proposé de clarifier la rédaction actuelle en distinguant mieux la procédure à suivre, selon qu’une proposition de résolution européenne est engagée par la commission permanente, par la commission des affaires européennes ou par un sénateur.

En outre, les propositions de résolutions européennes déposées par les sénateurs ne seraient plus automatiquement examinées par la commission des affaires européennes, mais pourraient l’être à la demande d’un président de groupe ou de commission.

En complément, j’ai proposé qu’un vade-mecum vienne préciser les bonnes pratiques d’élaboration des propositions de résolution déposées au nom de la commission des affaires européennes, notamment le délai de mise à disposition du projet de texte du rapporteur aux autres membres de la commission, afin de leur permettre de proposer des amendements.

Ce vade-mecum pourrait également œuvrer dans le sens d’un renforcement des interactions entre la commission des affaires européennes et les commissions permanentes, en prévoyant une veille active alertant les sénateurs des initiatives législatives européennes susceptibles d’affecter le droit national.

Par ailleurs, la proposition de résolution comporte diverses dispositions destinées à sécuriser notre règlement. Par exemple, l’article 21 modifie l’article 96 du règlement, afin de renforcer le caractère collégial et contradictoire de la procédure de sanction en matière de censure : il transfère le pouvoir de proposition de cette sanction, qui emporte des conséquences financières importantes, du président du Sénat au Bureau. Il s’agit ici de tenir compte de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme, qui exige que le parlementaire sanctionné bénéficie de garanties procédurales.

Dans le même esprit, la présente proposition de résolution prévoit des mesures d’actualisation du règlement, pour le rendre plus conforme aux pratiques.

Je citerai notamment l’article 11, qui procède à une actualisation du rôle des secrétaires en cas de scrutin public ordinaire, pour tenir compte de la mise en place du système de scrutin électronique.

L’article 20 met en œuvre la réforme présentée par le comité de déontologie parlementaire et validée par le Bureau du Sénat en juillet 2023, en matière de cadeaux et de déplacements proposés aux sénateurs.

Enfin, plusieurs articles de la présente proposition de résolution suppriment des mesures obsolètes du règlement et corrigent des erreurs de coordination.

Ainsi, l’article 22 abroge l’article 106 du règlement relatif aux députations, qui permettait d’envoyer dans les cérémonies une députation, c’est-à-dire des membres de l’assemblée concernée tirés au sort. Cette disposition n’ayant jamais été utilisée depuis 1959, je vous propose de la supprimer.

La réflexion doit encore se poursuivre sur les outils qui pourraient nous être utiles demain si le développement de l’intelligence artificielle et un recours accru à cette technologie entraînaient une démultiplication du nombre d’amendements et si les outils du règlement du Sénat apparaissaient insuffisants pour y faire face.

Mes chers collègues, je vous rappelle l’exemple du Sénat italien, où un vice-président a déposé 83 millions d’amendements… (Sensation.)

Aujourd’hui, seul le Gouvernement peut agir face à une telle situation, avec les outils que la Constitution lui a confiés. Cela crée un biais qu’il nous faut résoudre : le Sénat doit pouvoir anticiper les grandes évolutions, mais aussi réagir rapidement aux enjeux plus immédiats. Il y va de notre responsabilité individuelle et collective, par-delà nos sensibilités distinctes.

En conclusion, je suis convaincue que ces mesures, qui ont été élaborées en tenant compte des observations qui m’ont été faites, sauront recueillir un consensus autour d’un objectif qui doit tous nous rassembler : l’amélioration des conditions du travail parlementaire.

Plus que jamais, le Sénat doit continuer d’incarner une assemblée efficace au service de tous nos concitoyens, qui ne transige jamais sur la qualité du débat et veille au respect de nos différences, tout en sachant transcender les clivages au nom de l’intérêt général.

Je remercie Mme le rapporteur de l’examen attentif et pertinent du texte auquel elle s’est livrée, comme toujours. Je remercie bien sûr, et sans réserve, l’équipe de la séance et le cabinet du président Larcher, qui m’ont accompagnée avec patience et bonne humeur depuis plus d’un an et qui méritent eux aussi votre soutien. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe GEST.)

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Muriel Jourda, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Madame la présidente, mes chers collègues – il n’y a pas de ministre, pour une fois ! (Sourires.) –, le travail de Sylvie Vermeillet, qui a duré de longs mois, est évidemment bien plus large que ce qui en ressort au travers de cette proposition de résolution visant à modifier le règlement, mais j’y reviendrai dans quelques instants.

Sylvie Vermeillet a veillé à ce que le texte qui nous est présenté revête un caractère consensuel. En effet, un certain nombre de mesures – notamment celles qui visaient à éviter que l’examen de 83 millions d’amendements, comme au parlement italien, ne vienne obstruer nos travaux – n’ont pas eu l’heur de convenir à tous. Nous nous contenterons donc d’aborder les mesures qui sont comprises dans cette proposition de résolution.

Au regard de l’heure avancée et des propos déjà tenus par l’auteure du texte, auxquels vous avez été extrêmement attentifs, je ne reviendrai pas dans le détail sur l’ensemble des dispositions.

Les deux propositions phares de ce texte portent, vous l’aurez compris, sur la « propriété » des postes et l’éclaircissement de la procédure relative aux propositions de résolution à la commission des affaires européennes, dont le travail se trouvera, de toute évidence, grandement facilité.

Nous avons supprimé en commission le dispositif visant à autoriser l’examen conjoint d’une proposition de résolution européenne par la commission permanente compétente et par la commission des affaires européennes. En effet, bien que cette proposition fût marquée au coin du bon sens, elle nous aurait contraints à imaginer un processus de vote aux modalités particulièrement complexes.

Nous l’avons donc abandonnée, tout en rappelant qu’une commission permanente et la commission des affaires européennes pouvaient très bien, d’un commun accord, unir leurs travaux.

À titre d’exemple, l’examen de la résolution du Sénat du 8 février 2023 sur l’avenir de l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex) avait donné lieu à une réunion commune à la commission des lois et à la commission des affaires européennes. Chaque commission conservera ses modalités de vote, mais nous pourrons tout de même travailler ensemble. Laissons donc un peu de souplesse !

Les autres mesures vous ont été présentées avec suffisamment de précisions. L’une d’entre elles intéressera tous les sénateurs : elle porte sur nos relations avec les tiers et sur les conditions dans lesquelles nous pouvons éventuellement, dans le cadre de notre travail et de façon assez restrictive, accepter les avantages et cadeaux qui peuvent nous être accordés. L’adoption d’un ou deux amendements devrait éclaircir les possibilités d’action dont nous disposons, dans le cadre des règles déontologiques qui s’imposent à nous. Nous y reviendrons bien sûr au cours de la discussion.

Différentes mesures d’une portée plus réduite vous sont enfin proposées. Nous les aborderons au fil de l’eau, de sorte que je ne crois pas utile de m’y attarder.

Je voudrais plutôt souligner l’état d’esprit dans lequel j’ai pu travailler. Il a été semblable, me semble-t-il, à celui qui a animé notre collègue Sylvie Vermeillet lorsqu’elle a établi ce texte : s’agissant de règles qui s’appliqueront à notre travail en commun, l’esprit de consensus m’est apparu nécessaire.

Ainsi, les mesures qui ne faisaient plus consensus et dont la suppression a été demandée seront mises aux voix. Comme je l’ai fait en commission, j’émettrai un avis de sagesse sur un certain nombre de propositions, et le Sénat statuera.

S’il est sain de retravailler les règles communes qui président à nos relations – vous verrez que des questions qui n’étaient nullement envisagées dans cette proposition de résolution ressurgiront à la faveur des multiples amendements qui ont été déposés –, il m’apparaît nécessaire de conserver une certaine souplesse. En effet, il serait sans doute contre-productif de vouloir par trop rigidifier le règlement.

M. Bruno Sido. Très bien !

Mme Muriel Jourda, rapporteur. C’est pourquoi, comme vous le constaterez, je serai assez défavorable – vous ferez ce que vous voudrez, mes chers collègues – à un certain nombre de propositions qui ont été formulées,…

Mme Muriel Jourda, rapporteur. … car elles me semblent trop rigides.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Il s’agit d’un règlement !

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Elles ne permettent pas cette souplesse qui fait l’agrément de nos relations sénatoriales.

M. Bruno Sido. Parfaitement !

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Voilà, mes chers collègues, ce que je voulais dire en préambule. Suffisamment d’amendements ont été déposés pour que nous puissions échanger plus avant. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Sautarel. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Stéphane Sautarel. Madame la présidente, mes chers collègues, cette proposition de résolution fait suite aux travaux, placés sous l’égide du président Larcher, de notre collègue Sylvie Vermeillet, vice-présidente du Sénat, dans le cadre de la délégation du Bureau chargée du travail parlementaire et des conditions d’exercice du mandat de sénateur.

Ces travaux visent principalement à renforcer le rôle du Parlement dans la procédure législative et à accroître les outils de contrôle des sénateurs. Ils s’inscrivent dans la poursuite de l’adaptation du règlement aux pratiques du fonctionnement de notre Haute Assemblée.

Ainsi, 17 propositions ont été adoptées en conférence des présidents. La présente proposition de résolution vise à inscrire dans le règlement du Sénat celles qui en relèvent et qui portent sur la clarification et la facilitation de nos travaux. Elles visent l’efficacité – c’est le maître mot de ce texte, me semble-t-il –, à l’issue d’un travail concerté, qui a dépassé les clivages des groupes.

Je ne reviendrai pas de manière détaillée sur les différentes mesures qui visent à modifier le règlement du Sénat : celles-ci ont déjà été fort bien présentées par Sylvie Vermeillet. J’indique d’ores et déjà que le groupe Les Républicains votera cette proposition de résolution, pour faire en sorte que nos travaux soient aussi efficaces que possible et qu’ils soient réalisés dans la sérénité qui caractérise notre assemblée et dans le respect des groupes politiques.

Je veux profiter de ce débat pour intervenir sur deux sujets : l’affirmation du parlementarisme, d’une part, et le risque, pour les élus, lié à la transparence absolue et à un contrôle exacerbé, d’autre part.

La proposition de résolution concerne en effet, pour l’essentiel, le travail parlementaire : la construction de la loi et le contrôle de sa mise en œuvre. La période récente a montré combien il était précieux de faire confiance au Parlement, plus particulièrement au Sénat, quand l’exécutif ne dispose pas d’une majorité absolue, situation qui risque de durer…

Notre Constitution montre chaque jour sa robustesse et sa souplesse. La Ve République est un régime parlementaire lorsque l’exécutif ne dispose pas d’une majorité à l’Assemblée nationale, et un régime présidentiel dans le cas contraire.

Dans le contexte actuel, le rôle et la place du Sénat sont renforcés. L’adoption du projet de loi de finances 2025 a parfaitement illustré cette situation, tout en en montrant les limites. On pourrait en énumérer plusieurs qui concernent aussi bien le Gouvernement, l’Assemblée nationale ou le Sénat, que la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (Lolf) elle-même.

Je me limiterai ici, dans le cadre du débat qui nous réunit, à évoquer quelques enjeux pour le Sénat. Il convient en effet d’accroître nos moyens d’investigation et de travail, aussi bien ceux du Sénat et de ses commissions que ceux de chaque sénateur, afin que nous puissions mieux légiférer, sans dépendre du Gouvernement. Nous manquons, en dépit de la grande qualité des services du Sénat, de moyens propres suffisants pour mesurer l’impact de telle ou telle proposition.

Par ailleurs, l’article 20 de la présente proposition de résolution me fait réagir sur la trajectoire de transparence et de contrôle de la vie politique et des élus dans laquelle nous sommes engagés et qui me semble très préoccupante.

Même l’ancien député René Dosière, qui s’est fait connaître comme le Monsieur Propre de l’utilisation de l’argent public, s’inquiétait de ce climat lorsqu’il déclarait : « Je suis très inquiet de la manière dont se passent les choses. La transparence, c’est un moyen de mieux faire fonctionner la démocratie quand il s’agit d’argent public. Mais la transparence sur la vie privée, c’est un régime dictatorial, ou moralisateur, enfin c’est l’enfer ! Il nous faut faire attention à cela ! » Or, mes chers collègues, la frontière est très poreuse entre les deux…

M. Bruno Sido. Absolument !

M. Stéphane Sautarel. Bien sûr, la probité en politique et dans l’engagement au service du bien commun est essentielle, et elle est fort heureusement largement répandue. Mais attention à l’effet de balancier, qui risque de dissuader beaucoup de nos concitoyens de s’investir dans la vie publique et qui jette toujours plus la suspicion, pour ne pas dire le soupçon, voire peut-être désormais un a priori de culpabilité, sur ceux qui s’engagent.

Jusqu’où faudra-t-il aller pour s’apercevoir que, quelles que soient les mesures que nous prendrons en la matière, celles-ci ne seront jamais suffisantes aux yeux de certains ? C’est à peine si nous ne devrions pas, chaque jour, nous excuser du coût de notre démocratie, et d’abord de celui de notre démocratie parlementaire !

Quand va-t-on s’apercevoir que faire de la politique, c’est se mettre à nu et dévoiler sa situation personnelle, laquelle ne relève en rien de l’engagement public ? C’est mettre en difficulté ses proches, leur créer des contraintes supplémentaires. C’est exposer sa vie d’avant et hypothéquer sa vie d’après.

Quoi qu’on fasse en matière de contrôle et de transparence, ce ne sera jamais assez. Quoi que l’on fasse en ce qui concerne la prise en charge des frais et les indemnités, ce sera toujours trop.

L’article 20 s’inscrit dans cette trajectoire, plutôt que de tenter d’aller vers un autre système, que l’air du temps n’autorise sans doute pas à envisager. Nous allons donc nous y résoudre.

Tel était, mes chers collègues, le message que je voulais exprimer, en m’extrayant du strict cadre de l’examen de cette proposition de résolution.

En conclusion, je rappelle que nous voterons ce texte, qui vise à renforcer l’efficacité, la souplesse et la transparence, dans un esprit de consensus. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme Patricia Schillinger. Madame la présidente, mes chers collègues, nous examinons ce soir une proposition de résolution importante, présentée par notre président Gérard Larcher et par Sylvie Vermeillet, dont je tiens à saluer le travail remarquable. Ce texte est en effet le fruit d’une réflexion que notre collègue a su conduire avec rigueur et ouverture, dans le cadre de ses fonctions de présidente de la délégation du Bureau chargée du travail parlementaire et des conditions d’exercice du mandat de sénateur.

Cette démarche s’est appuyée sur une concertation approfondie avec l’ensemble des présidents de groupe, de commission et de délégation, selon une méthode respectueuse de nos équilibres. Cela mérite d’être souligné.

Issue de cette réflexion collective, cette proposition de résolution n’est pas qu’une simple révision technique de notre règlement. Son examen intervient à un moment qui est loin d’être anodin : le Sénat se doit d’être pleinement conscient de son rôle dans l’espace démocratique.

Dans un contexte où le politique est mis en cause, où la confiance se délite, où la parole publique est attendue au tournant, nous devons plus que jamais nous montrer à la hauteur de nos missions.

Dans une configuration institutionnelle où le Gouvernement ne dispose pas à l’Assemblée nationale d’une majorité clairement établie, le Sénat voit son rôle renforcé. Il est communément admis que les débats sont souvent plus apaisés dans cette chambre, qu’il est possible d’aboutir à des compromis et, plus largement, que l’examen des textes a lieu avec une certaine sérénité.

Cette capacité à nous extraire des logiques partisanes constitue notre force. Elle fonde la légitimité de notre rôle de contrôle, un rôle que nous devons pleinement assumer.

Cette proposition de résolution répond clairement aux enjeux. Elle renforce les prérogatives des commissions, facilite l’octroi des pouvoirs d’enquête, introduit des créneaux de contrôle plus lisibles et permet d’auditionner à mi-parcours les personnalités nommées au titre de l’article 13 de la Constitution. Ces outils ne sont pas de simples accessoires institutionnels : ils traduisent une exigence de transparence, de rigueur et d’évaluation qui est au cœur d’une démocratie vivante.

Le texte va plus loin : il conforte les droits des groupes politiques, en reconnaissant leur rôle structurant dans la répartition des responsabilités, et clarifie des points essentiels pour éviter que nos règles ne deviennent un frein à l’efficacité du travail parlementaire. Il modernise, simplifie, sécurise et supprime ce qui est devenu obsolète.

Dans un État de droit, le Parlement n’est pas un spectateur. Il est un acteur, un garant, parfois un garde-fou. Quand les équilibres institutionnels sont fragiles, comme c’est le cas de nos jours, le rôle du Sénat devient central.

Ce texte, par les outils qu’il met à notre disposition, nous permettra, s’il est adopté, de jouer ce rôle avec plus de force, plus de clarté et plus de responsabilité.

Si, à première vue, il semble relever de l’entre-soi et n’intéresser que les seuls sénateurs, il sert en réalité l’intérêt de tous. Il tend en effet à renforcer la démocratie, en permettant au Sénat de mieux remplir ses fonctions de contrôle et de représentation et, en définitive, de mieux servir nos concitoyens.

Le groupe RDPI votera donc cette proposition de résolution,…

M. Antoine Lefèvre. Très bien !

Mme Patricia Schillinger. … qui renforce notre institution, honore le travail collectif et répond aux attentes de nos concitoyens, qui souhaitent pouvoir compter sur des parlementaires utiles, exigeants et pleinement engagés dans l’exercice de leurs missions.

Toutefois, je rappelle aussi que les parlementaires travaillent jusqu’à des heures tardives : je crois, mes chers collègues, que nous devrons un jour modifier notre règlement pour nous attaquer à la question du travail de nuit, que l’examen de textes de loi à rallonge nous impose ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE, UC et Les Républicains.)

M. Bruno Sido. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Masset. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Michel Masset. Madame la présidente, mes chers collègues, le parlementarisme est l’acte fondateur de la démocratie moderne. Il constitue à la fois une promesse, celle que la volonté générale guide à tout instant les décisions de la Nation, et une exigence, celle de disposer de représentants libres, éclairés, capables de traduire l’intérêt général en émettant des opinions, des votes des arbitrages.

La proposition de résolution s’inscrit dans cet héritage. Il s’agit d’améliorer la qualité du travail parlementaire aussi bien dans le vote de la loi que dans nos missions de contrôle de l’action du Gouvernement.

Je le dis en préambule, les vingt-deux articles de cette proposition de résolution qui visent à modifier le règlement du Sénat vont dans le bon sens. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)

J’en retiendrai deux parmi les plus significatifs.

L’article 2 attribue aux groupes politiques la « propriété » de leurs postes au sein des instances du Sénat, notamment au sein du Bureau. Voilà une bonne mesure, sous réserve que le principe de la répartition des postes à la représentation proportionnelle soit bien respecté. En effet, le droit de « propriété » ne vaut que tant que les effectifs des groupes n’évoluent pas de façon substantielle durant le triennat.

Quant à l’article 19, le groupe du RDSE n’y est pas opposé. Nous souhaitons toutefois le maintien pour les groupes de la faculté de demander à la commission de se prononcer dans le délai d’un mois, pour permettre à certains textes d’être adoptés rapidement.

Mon groupe renouvellera, ce soir, les propositions qu’il a formulées en commission, faute d’avoir obtenu des réponses convaincantes.

Alors que l’article 17 bis de notre règlement prévoit qu’un délai de deux semaines doit s’écouler entre l’examen d’un texte en commission et son examen en séance, cette règle n’est quasiment jamais respectée. Nous voulons qu’elle le soit.

Ainsi, lors de la conférence des présidents du 19 mars dernier, deux textes ont bénéficié du délai normal de deux semaines, tandis que dix-huit autres ont fait l’objet de la dérogation : l’exception est devenue la règle, au détriment d’un examen serein des textes de loi.

La lecture des conclusions des commissions mixtes paritaires (CMP) intervient également trop souvent dans un délai contraint, parfois le lendemain de la réunion. Dans ces conditions, comment pouvons-nous appréhender correctement un texte en navette ?

En ce qui concerne la composition des CMP, quel argument peut-on opposer à ce que tous les groupes soient représentés ? Je rappelle que l’Assemblée nationale est parvenue à trouver un équilibre, grâce aux postes de suppléants. Le Sénat doit tenir compte de la multiplication des groupes politiques.

Comme je l’ai indiqué, le groupe du RDSE soutient la proposition de résolution, mais nous nous interrogeons : suffira-t-elle à améliorer profondément notre travail ?

Depuis la dissolution, il n’y a plus qu’une majorité relative à l’Assemblée nationale. Dans ces conditions, le Gouvernement et les corps intermédiaires reportent sur le Sénat leurs attentes. La démocratie parlementaire doit vivre dans la délibération, la transparence et l’efficacité, laquelle n’est pas synonyme de précipitation.

Au fond, le débat que nous avons aujourd’hui soulève une question plus fondamentale : ne faudrait-il pas réfléchir à de nouveaux ajustements constitutionnels ?

« Un constat s’impose en effet : depuis quelques années et à son corps défendant, la machine parlementaire s’est emballée ; elle tourne à plein régime, de jour comme de nuit […] Mais, chacun a pu le constater, l’excès de ces activités imposées n’est pas synonyme d’efficacité. » Ces propos sont ceux de Jacques Toubon, alors garde des sceaux, lors de l’examen de la réforme constitutionnelle de 1995.

Trente ans se sont écoulés, mais, comme en atteste la proposition de résolution que nous examinons aujourd’hui, il faut toujours faire mieux pour renforcer notre système démocratique, qui en a bien besoin aujourd’hui ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Olivia Richard. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Olivia Richard. Madame la présidente, mes chers collègues, cent textes en cent jours : tel est, selon le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, le beau bilan de l’activité du Parlement.

Je ne sais pas si nous devons nous féliciter de ce qu’il convient plutôt d’appeler une suractivité parlementaire, mais, en tout cas, cela suffit à me convaincre que l’amendement tendant à supprimer les votes par scrutin public par groupe n’est pas bienvenu.

Bien entendu, nos votes doivent rester personnels et il nous revient d’être particulièrement vigilants dans les consignes de vote que nous transmettons à nos groupes. Cependant, il est illusoire de croire que nous pouvons, avec les moyens insuffisants qui sont les nôtres, prendre une part active ou même éclairée à l’ensemble des travaux parlementaires. Nous ne pouvons pas et même nous ne devons pas être partout.

Le texte dont nous débattons ce soir contient des propositions consensuelles. Je salue Sylvie Vermeillet, vice-présidente de la délégation du Bureau du Sénat chargée du travail parlementaire et des conditions d’exercice du mandat de sénateur. Elle a mené un travail fouillé pendant plus d’un an.

Ce texte comporte des avancées notables, je tiens à le souligner. Il en va ainsi de la clarification de la procédure par laquelle une commission permanente peut déposer une proposition de résolution européenne. Les commissions permanentes pourront se saisir au fond, ce qui, là encore, me semble très intéressant pour améliorer notre connaissance des sujets européens.

Ensuite, nous avons noté avec intérêt les dispositions visant à attribuer aux groupes la « propriété » de leurs postes au sein du Bureau du Sénat et des commissions. À vrai dire, dans la mesure où ces postes sont attribués à la proportionnelle des groupes, cela semble couler de source. Cette règle mérite toutefois d’être écrite.

De nombreux amendements ont été déposés sur ce texte. Leur examen nous permettra de mener d’intéressants débats. Même s’ils ne devaient pas être adoptés, ils nourriront notre réflexion dans la perspective de prochaines évolutions de notre règlement, que notre président souhaite régulièrement actualiser.

Nous parlerons certainement beaucoup ce soir des droits des groupes minoritaires. Il est toujours aisé, pour la majorité, de faire l’impasse sur ce sujet : à ses yeux, il n’est jamais urgent.

À cet égard, je voudrais rappeler que les droits des groupes minoritaires et la place qui leur est faite disent quelque chose de notre chambre. Nous nous honorons de parvenir à des consensus lorsque c’est possible – l’espace transpartisan en est une bonne illustration.

Lorsque ce n’est pas possible, la qualité de nos échanges, emprunts de respect, est montrée en exemple. On voit sur certains sujets d’autres majorités se former, et cela participe de la vitalité de nos travaux. Gardons à l’esprit que la majorité d’aujourd’hui peut devenir la minorité de demain.

Alors que nous procédons à une modernisation du règlement du Sénat, je vous soumets, mes chers collègues, deux réflexions.

La première concerne l’application du régime des présences obligatoires aux sénateurs des Français de l’étranger. Ces derniers, en effet, se voient soumis aux mêmes règles de présence que les sénateurs des départements de métropole. Cela prête à sourire lorsque l’on connaît la taille de notre circonscription : tout simplement le monde !

Nos élus, les conseillers des Français de l’étranger, font un travail de terrain, et nous les accompagnons de notre mieux à distance. Mais rien, nous le savons, ne saurait remplacer les déplacements. Ils ont besoin de notre présence, et nous avons besoin d’aller au contact de leurs réalités, qui sont très diverses. Le système actuel ne nous laisse que quatre jours pour partir, en incluant le week-end. Je dois donc faire des choix entre mes enfants et les élus. Plusieurs de mes collègues sont dans la même situation, même si nous ne sommes pas majoritaires.

Ma seconde observation a trait à nos délégations. Celles-ci constituent un vivier de ressources. Par définition, nos délégations sont thématiques. Leurs membres y acquièrent rapidement des compétences, dont ils font bénéficier la commission permanente dans laquelle ils ou elles siègent.

Ainsi, je me suis dit plusieurs fois que chaque sénateur gagnerait à suivre un stage au sein de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, présidée par Dominique Vérien, dont les travaux sont très éclairants sur l’état de la société.

C’est pourquoi je me suis réjouie de la création d’une mission commune entre la commission des lois et la délégation aux droits des femmes, dont je salue les deux présidentes, sur la prévention de la récidive en matière d’infraction sexuelle. Certes, une telle initiative n’était pas inédite, mais cela reste rare : ces regards croisés sont tout à fait enrichissants.

La légitimité du Sénat repose notamment sur les compétences de ses membres. Ne négligeons donc aucune modalité de travail qui nous permettrait d’en gagner, en utilisant, plutôt que d’en créer, les structures existantes.

Ce texte est l’aboutissement d’un travail important, dans tous les sens du terme, et je tiens à réitérer mes félicitations à notre collègue Sylvie Vermeillet.

Le groupe Union Centriste votera ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Madame la présidente, mes chers collègues, il n’est jamais anodin de débattre d’une réforme du règlement du Sénat, même à une heure tardive, car ce document garantit le fonctionnement démocratique de notre institution.

L’ambition première de cette réforme nous avait inquiétés, car, une nouvelle fois, la majorité de notre assemblée affichait une volonté forte de rationalisation du travail parlementaire, c’est-à-dire, en langage décodé, une volonté de réduction du droit d’amendement et du temps d’expression des parlementaires.

Les ambitions de ce texte ont été revues à la baisse, grâce, selon nous, à deux éléments : d’une part, une prise en compte, presque inédite, des remarques émises par les différents groupes – c’est un facteur positif que nous saluons – et, d’autre part, une évolution de la situation politique, qui confère au Parlement une responsabilité nouvelle.

Le président du Sénat le sait bien, à chaque réforme du règlement, notre groupe souligne l’incongruité que représente le fait, pour une assemblée parlementaire, de voter elle-même la réduction de ses prérogatives, ce qui favorise ainsi le pouvoir exécutif.

D’année en année, déposer un amendement est devenu un exercice difficile. D’année en année, développer une argumentation construite est devenu une gageure, tant le temps de parole est restreint. Sur ce dernier point, nous avons souvent alerté sur le fait que la restriction des discussions pouvait paradoxalement alimenter le dépôt d’amendements. Surtout, le débat démocratique se retrouve abaissé et la confrontation des idées mise en berne.

Lors des élections législatives qui ont suivi la dissolution de l’Assemblée nationale, le 9 juin dernier, Emmanuel Macron a été mis en forte minorité, plus fortement encore qu’en juin 2022.

La configuration nouvelle place, de fait, le Parlement au centre du jeu, même si, comme François Bayrou l’a confirmé sans ambages, la tentation de le contourner est grande.

La recherche de majorités texte par texte exige un débat approfondi et l’expression précise de chaque groupe. Le rôle important, voire décisif, du Sénat dans l’adoption des textes exige également que nous ayons ici, au Palais du Luxembourg, un débat renforcé.

J’ai relevé ainsi, avec un certain étonnement, que l’on voulait réduire les possibilités d’expression contre les conclusions d’une commission mixte paritaire, en écartant, par exemple, la possibilité de déposer une question préalable à leur encontre.

Voilà qui est d’autant plus inquiétant que la configuration actuelle des CMP se révèle favorable au Gouvernement, alors même que le Gouvernement ne dispose pas de majorité à l’Assemblée nationale… La multiplication des CMP conclusives au terme d’une procédure accélérée exige, pour le moins, un véritable débat sur le travail effectué par les quatorze parlementaires qui légifèrent dans des conditions de transparence bien modestes.

Dans ce contexte éruptif, il était donc difficile de corseter plus encore le travail parlementaire. La démocratie est en crise et il faudra se pencher, dans de proches délais, sur notre Constitution. Le mouvement d’hyperprésidentialisation, accéléré par Emmanuel Macron, a causé des dégâts considérables sur le plan institutionnel et sur la confiance du peuple dans notre système politique.

Les épisodes successifs que nous avons vécus depuis juillet dernier nous poussent à nous interroger sur le rapport de nos institutions avec les réalités de notre pays. Je pense notamment au maintien au pouvoir d’un gouvernement démissionnaire durant cinquante jours, alors qu’il était totalement illégitime politiquement, ou au vote d’un budget censuré, qui avait été présenté par un pouvoir battu aux élections.

La discussion sur le règlement du Sénat peut ainsi paraître anecdotique, voire technique, dans le grand désordre ambiant. Il s’agit là pourtant d’une vision trompeuse, car c’est dans les articles du texte qui régit nos travaux que se trouvent, selon nous, les clés d’une restauration des prérogatives parlementaires.

Nous proposerons donc quelques amendements – bien loin des millions déposés au Parlement italien… –, pour défendre la démocratie parlementaire. Et nous nous abstiendrons lors du vote sur cette proposition de résolution. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Guy Benarroche. Madame la présidente, mes chers collègues, élu sénateur il y a plus de quatre ans, j’ai pu apprécier la qualité des échanges que nous avons lors de nos différents travaux, en partie grâce aux règles qui régissent le fonctionnement de notre institution. J’ai pu aussi, durant ce court laps de temps, observer certaines problématiques liées notamment à l’appartenance à un groupe d’opposition. Je me réjouis donc que ce texte vise, au-delà des enjeux de clarification et de simplification, à s’atteler à la question des droits des groupes politiques.

Membre du groupe de réflexion du Bureau du Sénat sur l’organisation de nos travaux, j’ai pu, de manière plus précise, mettre l’accent sur les difficultés qui pèsent sur l’action parlementaire, notamment celle des plus petits groupes.

Le texte que nous étudions vise à mettre en œuvre plusieurs recommandations qui ont été adoptées à la suite des travaux menés par notre collègue Sylvie Vermeillet pour améliorer les conditions d’exercice du travail parlementaire. Il s’agit d’un texte transpartisan. Lors de sa préparation, l’ensemble des groupes a été auditionné, et je tiens à saluer la méthode employée par notre rapporteure.

Je me réjouis aussi que ce texte permette, en son article 2, d’accéder à une demande du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires relative à la sécurisation des places attribuées aux groupes au sein des commissions et du Bureau du Sénat.

Mon groupe accueille très favorablement l’article 20 sur le renforcement des obligations déontologiques. Celles-ci pourraient être accrues : je pense notamment aux obligations déclaratives relatives aux voyages offerts par des groupes d’intérêt public ou des États étrangers.

Cependant, en dépit de son titre, qui mentionne l’objectif de « conforter les droits des groupes politiques », la proposition de résolution est en réalité assez maigre sur ce sujet. Elle pourrait aussi aller plus loin en ce qui concerne l’amélioration du statut et du cadre de travail des collaborateurs.

Tout d’abord, je souhaiterais rappeler que les parlementaires ne pourraient guère agir sans le concours de ceux qui les accompagnent au quotidien, au-delà des services de l’administration. Nous avons tous conscience ici, sur toutes les travées, que le travail de nos collaborateurs nous permet de faire le nôtre au mieux. Je déplore donc que l’on porte trop peu d’attention à leurs conditions de travail et de rémunération dans nos discussions, ici comme au sein d’autres instances. (M. Antoine Lefèvre sexclame.)

J’ai longtemps été le seul représentant de mon groupe à la commission des lois. En cas d’absence de ma part, quelle qu’en soit la raison – une grippe, un retard de train, etc. –, aucun conseiller parlementaire de mon groupe ne pouvait assister aux réunions de cette commission, où sont pourtant examinés les rapports et les amendements. Cela rend le travail parlementaire très compliqué.

Le groupe GEST déposera ainsi des amendements visant à permettre la participation des collaborateurs des groupes à certaines réunions de commission, même en l’absence de sénateurs du groupe.

M. Guy Benarroche. Une telle évolution serait particulièrement utile pour les petits groupes comme le nôtre.

Nous défendrons aussi des amendements tendant à remédier à certaines difficultés des groupes minoritaires. Ainsi, depuis que je suis sénateur, je n’ai jamais été rapporteur au sein de ma commission. Nous proposerons donc un système d’attribution des rapports plus équilibré et plus transparent, ainsi que la possibilité d’être remplacé en commission.

J’évoque la question de la répartition des postes de rapporteurs, car il s’agit d’un vrai sujet. Je tiens d’ailleurs à remercier les administrateurs du Sénat, dont le travail est précieux. Il n’en demeure pas moins que le rapport de la commission, souvent voté le mercredi, n’est souvent disponible à l’ensemble des commissaires et des sénateurs que le vendredi, ce qui est souvent trop tard pour servir de base sérieuse de réflexion pour l’écriture des amendements, dont le délai limite de dépôt est souvent fixé au lundi.

Nous proposerons donc d’améliorer l’accès aux documents, tels que les questionnaires des auditions des rapporteurs ou le rapport lui-même.

Notre groupe présentera aussi, en coordination avec nos collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, un amendement essentiel sur les modalités du scrutin public, afin d’éviter qu’un seul sénateur, de la majorité ou de l’opposition, ne puisse voter pour l’ensemble de son groupe.

Ce texte, mes chers collègues, présente des avancées, et nos amendements ont pour objet d’en proposer d’autres, qui sont attendues de longue date.

Notre groupe salue toutes ces propositions, qu’elles concernent nos règles de fonctionnement et nos processus, afin de faciliter le travail des sénateurs et de leurs collaborateurs, qu’elles visent à garantir une meilleure représentativité des groupes minoritaires ou encore qu’elles tendent à consolider le fonctionnement démocratique du Sénat grâce à une modification de ses scrutins.

Nous serons attentifs à ce que notre débat puisse aboutir, comme cela a été le cas pour la rédaction du texte initial, à un consensus large, afin d’améliorer le fonctionnement de notre institution et de donner une place plus juste aux groupes politiques minoritaires.

Nous voterons ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Kerrouche. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)

M. Éric Kerrouche. Madame la présidente, mes chers collègues, le changement, c’est maintenant. (Sourires sur les travées du groupe SER.) En tout cas, en ce qui concerne notre règlement, le changement, c’est ce soir !

Je serai direct : ce texte est acceptable dans son ensemble, dans la mesure où il ne contient pas réellement d’atteinte aux moyens d’action des sénateurs. Nous ne nous y opposerons donc pas.

Quatorze articles sur les vingt-deux que comporte cette proposition de résolution ne présentent pas, à nos yeux, d’enjeu particulier, même s’ils sont nécessaires. L’attribution aux groupes de la « propriété » de leurs postes au sein du Bureau du Sénat et des commissions permanentes est une avancée, parce que nous avons connu en la matière des situations dysfonctionnelles.

Comme il a été longuement travaillé, tant par le groupe de travail sur le travail parlementaire et les conditions d’exercice du mandat de sénateur que par le comité de déontologie parlementaire du Sénat, l’article 20 nous semble constituer un bon équilibre.

Toutefois, d’autres dispositions suscitent chez nous davantage de réserve, voire de véritables interrogations. En outre, certains thèmes qui nous sont chers n’ont pas été évoqués. Nous souhaitons que nous en débattions ce soir. C’est dans cette perspective que nous avons déposé différents amendements.

Je souhaite attirer particulièrement l’attention sur trois sujets : la défense de la commission des affaires européennes du Sénat, la défense des droits de l’opposition et la promotion de la parité.

Nous sommes, pour le moins, dubitatifs sur la réécriture du règlement proposée à l’article 19, qui est consacré aux affaires européennes. Hormis quelques précisions rédactionnelles bienvenues, mais secondaires, cette réécriture aurait pu et dû mettre en avant le rôle de la commission des affaires européennes, qui n’a cessé de croître au fil des années à mesure que les enjeux européens prenaient une place grandissante.

Pourtant, la réécriture proposée, à force de détails et de répétitions, aboutira à rendre les procédures plus complexes, alors que le règlement actuel nous semble explicite. Cette nouvelle rédaction donne à penser que la commission des affaires européennes ne pourrait se saisir que par défaut, par dérogation, en cas de non-saisine de la commission permanente sur un texte européen. Voilà qui risque de diminuer son importance de manière tout à fait inopportune.

Cette commission a su s’imposer au fil des années, par la qualité de son travail et par sa crédibilité. Cette instance est écoutée, aussi bien au sein du Sénat qu’au niveau européen. Elle constitue un atout que nous devons préserver, mais aussi, je crois, renforcer, parce qu’elle est indispensable.

Je voudrais aussi évoquer un autre sujet qui nous est cher, particulièrement au Sénat, celui des droits des groupes d’opposition. Actuellement, l’attribution de la présidence de la commission des finances au premier groupe d’opposition relève d’un gentlemans agreement.

Toutefois, verba volant, scripta manent ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Si seuls demeurent les écrits, il nous semble nécessaire, sans faire de procès d’intention, que cette évolution démocratique soit enfin inscrite « en dur » dans notre règlement, comme c’est le cas à l’Assemblée nationale.

La parité réelle est un autre objectif qui guide la boussole du groupe socialiste. Nous souhaitons ainsi que, lorsque les groupes désignent des candidats en nombre pair pour le Bureau du Sénat, ils proposent autant de femmes que d’hommes à ces fonctions. Et si la désignation est en nombre impair, alors l’écart ne doit pas être de plus d’un. Nous devrions pouvoir y survivre collectivement.

De même, nous voudrions une parité dans les présidences de commission.

Je souhaite évoquer un dernier point : le vote par assis et levé. Cette modalité de vote, qui pouvait apparaître comme une stigmatisation des personnes à mobilité réduite, a été abolie à l’unanimité à l’Assemblée nationale. Des amendements identiques de mes collègues Marie-Pierre de La Gontrie et Guy Benarroche ont pour objet de faire de même, contrairement à votre amendement, madame le rapporteur, que vous avez déposé tardivement et qui ne nous semble pas pertinent.

M. Olivier Paccaud. À moi, si !

M. Éric Kerrouche. La pratique sénatoriale du scrutin public constitue une dernière et importante anomalie : elle autorise un unique sénateur à voter pour l’ensemble des membres de son groupe.

Cette modalité de vote est de toute évidence contraire à l’article 27 de la Constitution, qui dispose : « Le droit de vote des membres du Parlement est personnel. La loi organique peut autoriser exceptionnellement la délégation de vote. Dans ce cas, nul ne peut recevoir délégation de plus d’un mandat. » Il nous semble essentiel de revenir à la stricte application de ce texte, comme le font déjà nos collègues de l’Assemblée nationale.

M. Éric Kerrouche. Enfin, nous souhaitons instaurer une règle de révision du crédit dédié aux collaborateurs.

Avec la fin des majorités absolues à l’Assemblée nationale, notre chambre a retrouvé une place centrale dans nos institutions. Cependant, nos équipes sont notoirement trop peu nombreuses pour faire face à celles de l’exécutif et leurs rémunérations bien trop contraintes, alors même que notre besoin d’expertise s’intensifie. Il paraît donc indispensable que l’enveloppe des crédits affectés à la rémunération des collaborateurs soit a minima indexée sur l’inflation.

Pour conclure, je confirme que nous adhérons globalement à la philosophie de ce texte. Cette mise à jour est nécessaire, mais nous souhaitons mettre l’accent sur des sujets qui nous paraissent essentiels dans un parlement moderne : les droits de l’opposition, la parité, l’égalité et la transparence.

« Il n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour », disait le poète. À défaut, nous attendons un peu de compréhension. Ainsi, en fonction du sort réservé à certains de nos amendements, nous voterons pour ce texte. Sinon, nous nous abstiendrons. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe GEST.)

Mme la présidente. La parole est à M. Christopher Szczurek.

M. Christopher Szczurek. Madame la présidente, madame la présidente de la commission des lois, mes chers collègues, c’est un honneur, en tant que délégué de la réunion administrative des sénateurs n’appartenant à aucun groupe (Rasnag), d’évoquer avec vous les règles qui régissent notre institution.

Notre règlement est bien plus qu’un simple recueil de procédures : il est la colonne vertébrale de notre travail législatif, et sa modification doit être faite avec parcimonie et mesure. À ce titre, il me faut saluer le travail de concertation parfaitement œcuménique mené par la vice-présidente Sylvie Vermeillet.

Vous le savez comme moi, nous ne sommes plus seulement dans une crise de confiance : nous faisons face à une défiance généralisée, profonde et installée de nos concitoyens à l’encontre du Parlement, des politiques et de la politique en général.

Le règlement du Sénat, loin d’être une simple formalité technique ou procédurale, doit conforter tant l’efficacité de notre travail législatif que les droits des législateurs, qu’ils appartiennent à la majorité ou à l’opposition.

Ainsi, à l’instar de nos collègues, nous saluons l’évolution bienvenue de l’article 2, avec la clarification apportée à la notion de « propriété » politique des sièges dans les commissions du Sénat. Cette mesure peut, sur le papier, apparaître comme une réponse logique à certaines pratiques parfois ambiguës.

Pour le reste, je sais que l’un des principaux enjeux de cette réforme du règlement était de tenter de fluidifier les débats et de rationaliser le temps en hémicycle.

J’imagine que personne n’oserait dire que nous travaillons trop : aucun de nos compatriotes ne le comprendrait, et à raison… Simplement, il a pu arriver que les débats s’éternisent de manière artificielle, en particulier à l’occasion des projets de loi de finances, que ce soit en 2023 ou en 2024. Ce temps, nous devrions parfois le passer sur le terrain, aux côtés des élus locaux et de nos concitoyens ; c’est aussi notre mission, au-delà du simple travail législatif.

Le véritable problème se situe ailleurs, et j’ai déjà pu m’en ouvrir auprès de vous, mes chers collègues : la réponse n’est pas réglementaire. Elle relève plutôt de la discipline individuelle et collective. La place de plus en plus importante qu’ont prise les réseaux sociaux dans le suivi de la vie politique a modifié nos pratiques, parfois en bien, puisqu’elle démocratise a priori l’accès à l’information, mais souvent en mal, puisqu’elle fait la part belle aux égos et à la tentation de multiplier le nombre d’amendements pour faire des vidéos et remplir les profils Facebook et Twitter.

Un parlementaire me confiait que, entre 2005 et 2025, le nombre d’amendements sur les projets de loi de finances avait été multiplié par dix.

Nous connaissons également l’autre cause de cette inflation : l’absence de majorité à l’Assemblée nationale fait de notre chambre une institution désormais centrale dans le travail législatif et nous avons tendance à rejouer les matchs. Nous ne pouvons que nous en réjouir, mais nous devons aussi regarder en face les dérives que cette situation peut entraîner. Je ne jette évidemment la pierre à personne, puisque nous cédons tous, à des degrés divers, à de mauvaises pratiques, mais nous voyons bien que l’inflation législative n’est pas toujours utile ni désintéressée.

Ce sont des choses sur lesquelles, malheureusement, aucun règlement intérieur ou aucun projet de résolution n’aura de prise réelle. Pour autant, nous n’avons aucune raison de nous opposer à ce texte, qui préserve de manière bienvenue les droits de la Rasnag. Nous le voterons donc. (M. Joshua Hochart applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dany Wattebled.

M. Dany Wattebled. Madame la présidente, madame le rapporteur, mes chers collègues, dans le contexte politique troublé que notre pays connaît actuellement, le rôle du Parlement, singulièrement celui du Sénat, revient au premier plan.

Pour mener à bien ses missions, le Sénat doit veiller en permanence à l’efficacité des dispositions de son règlement. La proposition que nous examinons aujourd’hui vise à adapter nos règles de fonctionnement aux exigences contemporaines de l’action parlementaire, dans un esprit de continuité, d’efficacité et de responsabilité.

Fruit d’un travail mené, sur l’initiative du président du Sénat, Gérard Larcher, par notre collègue Sylvie Vermeillet, cette proposition de résolution découle d’observations formulées sur le travail parlementaire et les conditions d’exercice du mandat sénatorial.

Notre groupe tient à saluer la méthode qui a été employée. Nous avons apprécié l’écoute accordée aux contributions de l’ensemble des présidents de groupe, de commission et de délégation.

Le texte qui nous est soumis contient des dispositions techniques, parfois complexes, qui visent toutes à permettre à notre assemblée de mieux exercer ses missions, dans un environnement institutionnel et politique en constante mutation.

Afin de renforcer nos outils de contrôle, il est prévu de simplifier la procédure conférant à une commission permanente les pouvoirs d’une commission d’enquête, ou encore de fluidifier la désignation des membres des commissions mixtes paritaires.

La procédure d’examen des propositions de résolution européennes (PPRE) fait l’objet d’un article important. Les trois régimes prévus en fonction de la catégorie à laquelle appartient l’auteur de cette PPRE apporteront davantage de clarté, de souplesse et d’efficacité. Il nous semble que ces dispositions sont pragmatiques et qu’elles concourront utilement à la qualité du débat parlementaire.

Une attention particulière a également été portée aux droits des groupes politiques. Le texte clarifie notamment l’attribution des sièges dans les organes du Sénat, en assurant une meilleure lisibilité lors des changements d’appartenance politique. De telles dispositions contribueront également à garantir une représentation plus fidèle des équilibres internes.

Par ailleurs, plusieurs articles visent à améliorer la lisibilité et la cohérence de notre règlement. C’est notamment le cas des ajustements liés à l’évolution des outils de vote, ou encore d’une révision des modalités de prise de parole en séance. Toutes ces mesures faciliteront notre fonctionnement sans en altérer l’équilibre.

Le texte propose un encadrement renforcé de la déontologie parlementaire en matière de cadeaux et de déplacements proposés aux sénateurs, reprenant en cela les préconisations du comité de déontologie parlementaire du Sénat.

Comme il est déjà précisé dans le code de conduite, les sénateurs ne peuvent accepter un cadeau offert par un représentant d’intérêts lorsque sa valeur est supérieure à 150 euros. La suppression du régime dérogatoire pour les déclarations d’invitation à des manifestations culturelles ou sportives sur le territoire national dans une perspective de transparence, afin de faire progresser la probité, est aussi à saluer.

Enfin, cette proposition de résolution vise à effectuer un toilettage nécessaire, en supprimant certaines dispositions devenues obsolètes ou redondantes. Cela participe pleinement à l’objectif de simplification.

En définitive, cette proposition ne constitue ni une rupture ni une simple mise à jour formelle. Elle s’inscrit dans une démarche d’amélioration continue au service de notre institution. Conscient de ses responsabilités et soucieux de son image, le Sénat se donne ainsi les moyens de renforcer son efficacité.

Vous l’avez compris, mes chers collègues, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera en faveur de l’adoption de ce texte, afin de permettre au Sénat d’être mieux armé pour exercer pleinement les missions que lui confie la Constitution. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Belrhiti. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Catherine Belrhiti. Madame la présidente, madame le rapporteur, mes chers collègues, nous débattons ce soir d’une proposition de résolution qui vise à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, à conforter les droits des groupes politiques et à introduire diverses mesures de clarification et de simplification du règlement du Sénat.

Ce texte s’inscrit dans une démarche de modernisation et d’amélioration continue de notre institution, en vue de rendre nos travaux législatifs plus efficaces, plus transparents et mieux adaptés aux enjeux contemporains.

Je tiens à saluer tout particulièrement le travail effectué par la sénatrice Muriel Jourda, rapporteur de cette proposition de résolution, qui a su, avec diligence et rigueur, mettre en lumière les réformes nécessaires.

L’une des mesures les plus marquantes est la simplification de la procédure d’élection du président du Sénat en cas de vacance de cette fonction. En évitant de repasser par le bureau d’âge, cette réforme nous permettra de gagner en rapidité, tout en préservant la rigueur de nos processus. Cette simplification, loin de dénaturer la procédure, vise au contraire à la rendre plus fluide et mieux adaptée aux réalités du terrain.

Ensuite, la centralisation de la recevabilité des propositions de commission d’enquête au sein de la commission des lois mérite d’être saluée. En confiant explicitement cette compétence à celle-ci, nous assurons une meilleure transparence et une plus grande cohérence de la gestion des demandes. Ce renforcement du contrôle parlementaire est un progrès tangible pour notre institution.

La réforme du renouvellement des commissions spéciales est également un élément essentiel de ce texte. Elle introduit une souplesse bienvenue dans notre organisation interne. Jusqu’à présent, les commissions spéciales se reconstituaient de plein droit après chaque renouvellement du Sénat. Désormais, nous n’aurons besoin que d’une validation par la conférence des présidents.

La simplification des nominations des membres des commissions mixtes paritaires (CMP) est un autre point important de cette proposition. Actuellement, la procédure de nomination peut sembler trop complexe et lourde. En confiant cette tâche au seul président de la commission compétente, nous simplifierons ce processus, permettant ainsi un gain de temps et d’efficacité. Une telle mesure s’inscrit dans une logique d’adaptation du règlement à nos pratiques actuelles, pour mieux répondre aux exigences du travail parlementaire.

En matière de déontologie, la proposition fait également des avancées notables. En clarifiant les règles concernant les cadeaux et les déplacements offerts aux sénateurs, elle renforce la transparence et la confiance que nos concitoyens doivent avoir en nous.

La réécriture des dispositions concernant la commission des affaires européennes est à mes yeux importante. Cette réforme vise à rendre plus fluide l’examen des propositions de résolution européennes, en permettant un traitement conjoint avec la commission compétente sur le fond. Cela renforce non seulement l’efficacité de notre travail, mais aussi notre capacité à répondre aux enjeux européens, qui sont de plus en plus complexes.

Enfin, la proposition visant à confier au Bureau, et non plus uniquement au président du Sénat, la responsabilité de proposer des sanctions en cas de dérive d’un sénateur est un gage de collégialité et de transparence dans le fonctionnement de notre institution. Cette mesure participe de notre volonté de garantir une éthique irréprochable au sein de notre assemblée.

En conclusion, je dirai que cette proposition de résolution répond aux préoccupations exprimées par nos collègues sénateurs. C’est pourquoi je la soutiens pleinement et j’appelle chacun d’entre nous a l’adopter. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification

Discussion générale
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Après l’article 1er

Article 1er

Après le mot : « Sénat », la fin de l’alinéa 5 de l’article 2 du Règlement est ainsi rédigée : « par une élection au scrutin secret à la tribune. Six secrétaires dépouillent le scrutin et le Président de séance en proclame le résultat. L’élection a lieu selon la procédure prévue à l’alinéa 4. Pendant cette vacance, l’intérim est assuré par le premier vice-président dans l’ordre de préséance.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er.

(Larticle 1er est adopté.)

Article 1er
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Article 2

Après l’article 1er

Mme la présidente. L’amendement n° 2, présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’alinéa 3 de l’article 2 bis du règlement est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Pour les groupes dont la représentation à ces fonctions est en nombre pair, les présidents de ces groupes proposent un nombre de femmes et d’hommes dans le strict respect de la parité. Pour les groupes dont la représentation à ces fonctions est en nombre impair, au-delà de trois, l’écart entre le nombre de femmes et d’hommes ne doit pas être supérieur à un. »

La parole est à Mme Corinne Narassiguin.

Mme Corinne Narassiguin. Cet amendement a pour objet de garantir une parité effective au sein du Bureau de notre assemblée. Les groupes ayant un nombre pair de représentants au Bureau du Sénat auraient l’obligation de présenter un nombre égal d’hommes et de femmes, ceux qui auraient un nombre impair de représentants devant quant à eux garantir que l’écart entre les hommes et les femmes n’est pas supérieur à un.

Nous souhaitons uniquement garantir, avec des modalités simples et faciles à mettre en œuvre, que la parité soit toujours assurée dans notre Bureau.

Il me semble que ce principe fait consensus parmi nous. Aujourd’hui, l’objectif est atteint, puisqu’il y a douze femmes pour treize hommes au sein du Bureau, ce qui montre que c’est bel et bien possible dans les faits. Néanmoins, nous le savons, en matière d’égalité entre les femmes et les hommes, si les progrès ne sont pas garantis par les textes, les régressions sont toujours possibles. Il s’agit donc de cranter ce principe dans notre règlement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. L’avis de la commission sera défavorable, mes chers collègues. Évidemment, personne n’est ici hostile à la parité dans un organe comme le Bureau du Sénat, moi pas plus qu’un autre.

Il me semble tout de même que les règles relatives à la parité qui ont été introduites voilà quelques années avaient pour but de permettre aux élus d’être dans les mêmes proportions selon les sexes,…

Mme Muriel Jourda, rapporteur. … que leurs électeurs, c’est-à-dire, grosso modo, une moitié d’élus hommes et une moitié d’élues femmes.

Ces textes ont permis aux femmes de progresser en politique, alors qu’elles y étaient tout de même assez moyennement représentées. En réalité, la parité est destinée à s’inscrire dans les mœurs. C’est bel et bien le cas, comme Mme Narassiguin l’a souligné, puisque sur les vingt-cinq membres du Bureau du Sénat, il y a douze femmes. Sachant que l’effectif total est un nombre impair, nous avons donc quasiment atteint la parité au Bureau.

Cela signifie que, au Sénat à tout le moins, nous avons réussi assez facilement à faire entrer dans les mœurs la parité. (Exclamations sur les travées du groupe SER.) C’est très bien. Les textes ont atteint leurs objectifs, et nous n’avons pas besoin, me semble-t-il, d’aller plus avant en prescrivant la parité d’une façon très rigide. Comme je l’ai dit dans mon propos liminaire, la souplesse doit s’imposer dans nos relations. Le but étant atteint, ne le gravons pas dans le marbre a posteriori.

J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.

M. Éric Kerrouche. Si je comprends bien Mme la rapporteure, comme c’est fait ou comme cela se fait tout seul, il ne faut rien toucher ! Mais si c’est fait et si cela ne pose aucune difficulté, faisons en sorte de stabiliser cette règle dans le temps en l’inscrivant dans le règlement comme une obligation.

Par ailleurs, je m’inscris en faux, tout ne s’est pas fait naturellement au Sénat. En 1998, il y avait 5 % de femmes dans cet hémicycle ; il y en a actuellement environ 37 %. Nous avons encore du chemin à parcourir, notamment sur le mode de scrutin. L’idée est de garantir que, aux postes de responsabilité, il y ait une parité. Comme vous l’avez si bien dit, madame la rapporteure, ce n’est pas compliqué à faire. Alors, faisons-le ; nous ne nous en porterons pas plus mal.

M. Jean-François Husson. De grâce, un peu de liberté !

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je veux juste souligner que nous avons atteint la parité au Bureau, alors que nous sommes à peu près 37 % de femmes dans cette assemblée, ce qui est déjà bien. (Exclamations sur les travées du groupe SER.) Et nous y sommes arrivés sans aucun changement du règlement. Continuons donc sur notre lancée spontanément. (Très bien ! sur les travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE-K.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie. (Marques dimpatience sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. J’ai apprécié le cri du cœur de Mme le rapporteur, qui nous explique que 37 % de femmes sénatrices, c’est déjà bien…

M. Bruno Sido. Ce n’est pas ce qu’elle a dit !

M. Jean-François Husson. Ne déformez pas ses propos !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Mes chers collègues, je vous suggère de rester zen, car la soirée risque d’être assez longue. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Vous verrez tout au long de ce débat, comme nous l’avons vu lors des travaux en commission, que Mme le rapporteur opposera systématiquement cet argument : cela se fait déjà, pourquoi l’inscrire dans le règlement ?

C’est d’ailleurs avec cet argument que certains se sont opposés, dans un premier temps, à la constitutionnalisation de l’interruption volontaire de grossesse (IVG). (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Je sais comment vous intéresser, mes chers collègues. C’est un vrai plaisir !

Si cela se fait déjà, ce n’est pas la peine de l’inscrire dans le règlement, et si vous y êtes défavorables, ce n’est pas non plus la peine. Tout au long de ce texte, nous constaterons que tout ce qui relève du soutien à la parité n’est pas accepté, comme tout ce qui a trait aux droits des minorités.

Je rappelle que les nominations dans des organismes qui procèdent du président du Sénat imposent à tous les groupes de faire des propositions respectant la parité. Par exemple, si le groupe Les Républicains a présenté un homme, le groupe SER doit présenter une femme. Nous connaissons tous cette règle.

Si une telle règle s’impose pour les organismes extraparlementaires ou autres, je constate que vous ne voulez l’inscrire nulle part. Ce soir, nous notons donc que le Sénat ne veut pas soutenir la parité. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – Nouvelles protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Somon. Quel raisonnement biaisé !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 2.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 1er
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Après l’article 2

Article 2

Le Règlement est ainsi modifié :

1° Après l’alinéa 8 de l’article 2 bis, il est inséré un alinéa 8 bis ainsi rédigé :

« 8 bis. – Le sénateur qui cesse d’appartenir au groupe dont il faisait partie lors de sa nomination comme membre du Bureau cesse de plein droit d’appartenir à celui-ci. Le groupe fait connaître au Président du Sénat le nom du candidat qu’il propose et il est pourvu au remplacement selon la même procédure. » ;

2° Après l’alinéa 7 de l’article 8, il est inséré un alinéa 7 bis ainsi rédigé :

« 7 bis. – Le sénateur qui cesse d’appartenir au groupe dont il faisait partie lors de sa nomination comme membre d’une commission permanente cesse de plein droit d’appartenir à celle-ci. Le président du groupe fait connaître au Président du Sénat le nom du candidat qu’il propose et il est pourvu au remplacement selon la même procédure. Si ce groupe indique qu’il ne désigne pas de candidat, le président du nouveau groupe auquel appartient le sénateur ou, le cas échéant, le délégué des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe, fait connaître au Président du Sénat le nom du candidat qu’il propose et il est pourvu au remplacement selon la même procédure. – (Adopté.)

Article 2
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Article 3

Après l’article 2

Mme la présidente. L’amendement n° 80, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Gontard et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’alinéa 1 de l’article 13 du règlement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …. – Le bureau des commissions permanentes se réunit à l’initiative de leur président, au moins deux fois par an. »

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Même si nombre de commissions fonctionnent déjà de cette façon, voire un peu mieux, nous proposons que les bureaux des commissions permanentes se réunissent au moins deux fois par an.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. M. Dossus l’a dit très justement, les choses se passent déjà ainsi. (Marques dironie sur les travées des groupes SER et GEST.) Encore une fois, ne rigidifions pas notre fonctionnement.

J’émets donc un avis défavorable.

M. Bruno Sido. Très bien !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 80.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 82, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Gontard et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 13 ter du règlement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …. – Les groupes d’opposition et les groupes minoritaires peuvent formuler des propositions d’auditions auprès des présidents de chaque commission. »

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Nous souhaitons que les groupes d’opposition et les groupes minoritaires puissent formuler des propositions d’audition auprès des présidents de chaque commission.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. C’est déjà ce qui se fait. Avis défavorable. (Protestations sur les travées des groupes SER et GEST.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Épisode n° 2 : c’est ce qui se fait, pourquoi l’écrire ?

Lorsque nous demandons une audition, nous n’y avons pas forcément droit. Voilà un an – Corinne Narassiguin pourra en témoigner –, nous avons demandé l’audition du Premier président de la Cour des comptes sur le rapport que cette dernière venait de réaliser au sujet des contrôles d’identité. Cela n’a jamais pu se faire : c’est bête, non ?

M. Stéphane Piednoir. Il s’agit d’une demande et non d’une obligation !

Mme Audrey Linkenheld. Précisément ! On voit que vous suivez…

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Il faut le demander gentiment, c’est cela ?

Il serait bon que, parfois, les présidents de commission acquiescent aux demandes. Il se trouve que tel n’est pas le cas.

M. Stéphane Piednoir. Les nôtres ne sont pas toujours exaucées non plus…

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 82.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 79, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Gontard et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’alinéa 3 de l’alinéa 15 ter du règlement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …. – Les comptes rendus d’auditions des rapporteurs sont diffusés auprès du secrétariat général de chaque groupe. »

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Nous souhaitons que les comptes rendus d’audition des rapporteurs, ou au moins les grilles d’entretien, soient diffusés auprès des secrétariats généraux de groupe, de sorte que les groupes, particulièrement les groupes minoritaires, bénéficient d’un peu plus de transparence sur les rapports.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Les comptes rendus d’audition n’existent pas. Vous le savez, ce sont non pas les rapporteurs, mais les administrateurs qui devraient s’en charger. Or le rythme et l’importance de nos travaux sont tels qu’ils n’auraient pas le temps de les établir. J’y insiste, il n’y en a jamais eu. Vous comprenez bien qu’il serait compliqué de transmettre des éléments que nous n’avons pas.

La commission émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 79.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 2
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Après l’article 3

Article 3

Le Règlement est ainsi modifié :

1° L’alinéa 2 de l’article 6 ter est ainsi modifié :

a) Après la référence : « 5 », sont insérés les mots : « à 7 » ;

b) La seconde occurrence du mot : « et » est remplacée par le signe : « , » ;

c) Après le mot : « membres », sont insérés les mots : « et au fonctionnement » ;

2° L’alinéa 3 de l’article 8 ter est ainsi modifié :

a) Au début, les mots : « Lorsqu’elle n’est pas saisie au fond d’une proposition tendant à la création d’une commission d’enquête, » sont supprimés ;

b) Les mots : « émet un avis sur la conformité de cette proposition avec les » sont remplacés par les mots : « se prononce sur la recevabilité d’une proposition tendant à la création d’une commission d’enquête au regard des » ;

3° L’article 22 ter est ainsi modifié :

a) (nouveau) L’alinéa 2 est ainsi rédigé :

« 2. – La commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale se prononce sur la recevabilité de cette demande au regard des dispositions de l’article 6 de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 précitée. En dehors des jours où le Sénat tient séance, la recevabilité est appréciée par le président de cette commission après consultation de ses membres. » ;

b) (Supprimé – (Adopté.)

Article 3
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Article 4

Après l’article 3

Mme la présidente. L’amendement n° 3, présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le règlement est ainsi modifié :

1° L’article 6 ter est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …. – Au terme de leurs travaux, ces commissions d’enquête et ces missions d’information procèdent à un vote sur le rapport établi en leur nom et, le cas échéant, en autorisent la publication. » ;

2° L’article 8 ter est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …. – Au terme de leurs travaux, les commissions d’enquête créées en application du présent article procèdent à un vote sur le rapport établi en leur nom et, le cas échéant, en autorisent la publication. » ;

3° L’article 20 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Au terme des travaux d’une mission d’information, la commission se prononce par un vote sur l’adoption de son rapport et décide en conséquence de la publication de celui-ci. » ;

4° L’article 21 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …. – Au terme des travaux d’une mission d’information constituée en application de l’alinéa 1, les commissions intéressées se prononcent par un vote commun sur l’adoption de son rapport, et décident en conséquence de la publication de celui-ci. »

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Il s’agit de prévoir explicitement dans le règlement que les rapports des commissions d’enquête et des missions d’information font l’objet de deux votes distincts, portant l’un sur l’approbation des recommandations, l’autre sur la publication du rapport.

En effet, il y a toujours un flou sur ce point dans notre fonctionnement. Notre règlement mérite d’être clarifié à cet égard, d’autant que les pratiques sont différentes selon les commissions ou les circonstances. Il importe donc d’avoir une règle claire et intelligible.

Pour faire suite aux propos de Mme le rapporteur en commission, je rappelle qu’un amendement similaire avait été déposé par le groupe RDPI lors de la précédente révision du règlement. Il avait été précisé à cette occasion que Mme Pascale Gruny, alors vice-présidente chargée de ces questions, allait travailler sur le sujet. Rien n’a été fait depuis lors,…

M. Jean-François Husson. C’est à cause de la dissolution ! (Sourires.)

M. Éric Kerrouche. … donc nous vous proposons d’avancer ce soir.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Dans la pratique, nous votons les propositions, puis leur publication. Les deux vont de pair : voter les propositions sans les publier n’aurait pas de sens.

Notre pratique me paraît tout à fait convenable, et je vous propose, mes chers collègues, de ne pas en changer.

La commission émet donc un avis défavorable.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Mais pourquoi ne pas l’inscrire dans le règlement ?

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 3.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 81, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Gontard et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 6 ter du règlement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …. – Au terme de ses travaux, chaque groupe a le droit d’inclure une contribution au sein de ces commissions d’enquête et de ces missions d’information. »

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Il s’agit encore une fois d’inscrire un usage établi dans le règlement.

Nous proposons ainsi que chaque groupe puisse inclure une contribution dans les rapports de commission d’enquête ou de mission d’information.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. En effet, c’est une pratique qui existe, mais qui n’est pas dans le règlement. C’est ce que nous faisons, et il continuera d’en être ainsi. Laissons les choses en l’état.

La commission émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 81.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 74, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Gontard et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 7 du règlement est ainsi modifié :

1° À la première phrase du dernier alinéa, après le mot : « membre », il est inséré le mot : « permanent » ;

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Chaque membre titulaire d’une commission permanente dispose d’un sénateur membre suppléant appartenant au même groupe, ou à la réunion des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe pour ces derniers. Le sénateur suppléant peut remplacer le sénateur titulaire lors de l’ensemble des réunions et des votes de la commission. »

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Cet amendement vise à créer un système de suppléance pour les réunions ou les votes de commission.

Chaque membre titulaire d’une commission permanente disposerait d’un suppléant appartenant à son groupe, qui pourrait le remplacer lors de l’ensemble des réunions et des votes de la commission.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Toutes les commissions se réunissant en même temps, en principe, votre système signifierait que l’on viderait une commission au profit d’une autre, le suppléant n’étant de surcroît pas coutumier des affaires de la commission du sénateur qu’il remplace… Je sais que cette pratique a cours ailleurs, mais je ne suis pas sûre qu’elle soit pertinente.

J’émets donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 74.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 3
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Article 5

Article 4

Le début de la dernière phrase de l’alinéa 1 de l’article 8 bis du Règlement est ainsi rédigé : « Sauf décision contraire de la Conférence des Présidents, elle est… (le reste sans changement). – (Adopté.)

Article 4
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Après l’article 5

Article 5

L’article 8 quater du Règlement est ainsi modifié :

1° L’alinéa 2 est ainsi rédigé :

« 2. – Une liste de candidats des représentants du Sénat est établie par le président de la commission compétente après consultation des présidents de groupe. Il la transmet au Président du Sénat. Il est procédé à l’affichage de cette liste. » ;

2° La première phrase de l’alinéa 5 est complétée par les mots : « soit immédiatement, soit au début de la première séance suivant l’expiration du délai précité ».

Mme la présidente. L’amendement n° 4, présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 3, dernière phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Cette liste est aussitôt affichée et notifiée aux sénateurs par voie électronique.

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. L’objet de cet amendement est de prévoir dans le règlement que la liste des membres des commissions mixtes paritaires (CMP) soit communiquée aux sénateurs par voie électronique.

Avec les changements que nous nous apprêtons à voter, les nominations en CMP ne seront désormais plus annoncées en commission, et le président de la séance publique n’indiquera plus à l’ouverture de la séance qu’il a été procédé à l’affichage de cette liste. À trop vouloir simplifier les procédures, il pourrait arriver que les sénateurs n’aient plus connaissance de la liste affichée et ne puissent donc plus s’y opposer, puisque c’est de droit, dans un délai d’une heure.

Aujourd’hui, Mme le rapporteur nous l’a rappelé en commission, l’instruction générale du Bureau (IGB) prévoit que toute mesure de publicité par voie d’affichage peut être effectuée sous forme électronique. Néanmoins, ce type de publicité n’est que facultative aux termes de cette même IGB. Aussi, nous voudrions le rendre obligatoire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. D’une part, ce sujet relève de l’IGB et non pas du règlement. D’autre part, l’amendement est trop parcellaire, car il ne vise que les CMP. Si nous voulons fixer une règle, ce qui ne m’apparaît pas nécessaire eu égard à ce qui figure déjà dans l’IGB, il faut l’étendre à l’ensemble des affichages.

La commission émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 4.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 5.

(Larticle 5 est adopté.)

Article 5
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Article 6

Après l’article 5

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 34, présenté par Mme M. Carrère, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme Conte Jaubert, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et MM. Roux et Ruel, est ainsi libellé :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 8 quater du règlement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …. – La désignation des représentants du Sénat dans les commissions mixtes paritaires s’efforce de reproduire la configuration politique de celle-ci et assure, sous réserve que le groupe qui dispose du plus grand nombre de sièges de titulaires conserve au moins un siège de suppléant, que chaque groupe dispose d’au moins un siège de titulaire ou de suppléant. »

La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Les changements du paysage politique et l’abaissement du seuil d’effectif ont conduit à multiplier les groupes politiques au Sénat.

Nous avions cinq groupes en 2008, six en 2014 et 2011, sept en 2017 et huit depuis 2020. Cette évolution soulève une difficulté en particulier : un groupe est actuellement privé de poste au sein des commissions mixtes paritaires. Bien que notre règlement mentionne à différents articles le principe de la représentation à la proportionnelle, il me semble que nous sommes ici en présence d’une atteinte au pluralisme.

Par ailleurs, le groupe concerné ne dispose pas d’informations sur les modifications du texte opérées par la commission mixte paritaire avant l’examen de ses conclusions en séance, qui a souvent lieu un ou deux jours après la convocation de cette réunion. Il est tout à fait courant, en effet, que le calendrier soit aussi serré.

Malgré la qualité du travail des administrateurs des deux assemblées et leur très bonne volonté, du temps est nécessaire pour communiquer le rapport législatif. Dans ces conditions, cet amendement a pour objet que tous les groupes bénéficient au moins d’un poste de suppléant au sein de la CMP. Il s’agit là de conforter les droits des groupes politiques, conformément à l’intitulé de la proposition de résolution.

L’objet de l’amendement reprend tout simplement le règlement de l’Assemblée nationale, qui, forte de ses onze groupes, a su s’adapter. Si elle l’a fait, quel peut être l’argument pour s’y opposer ici, au Sénat ?

Mme la présidente. L’amendement n° 36, présenté par Mme M. Carrère, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme Conte Jaubert, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et MM. Roux et Ruel, est ainsi libellé :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 8 quater du règlement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …. – Les groupes ne disposant pas d’un poste de suppléant dans la commission mixte paritaire disposent d’un poste d’observateur sans droit de parole et sans droit de vote. »

La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Cet amendement de repli vise à répondre à la difficulté de la représentation politique des groupes.

Nous proposons de compléter la composition de la CMP par un siège d’observateur, sans droit de parole et de vote, pour le ou les groupes ne disposant pas d’un poste de suppléant. Tous les groupes seraient ainsi informés a minima dans les plus brefs délais du texte issu des travaux de cette réunion.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Ma chère collègue, je comprends parfaitement votre position sur la présence en CMP des groupes ultraminoritaires, si je puis m’exprimer ainsi.

Les dispositions que vous défendez posent néanmoins quelques problèmes. Tout d’abord, le nombre de groupes susceptibles d’être créés n’étant pas limité, nous pourrions nous retrouver avec des règles de calcul extrêmement complexes. Ensuite, l’ajout d’un siège de suppléant ou la création d’un siège d’observateur – après tout, pourquoi ne pas l’envisager ?– ne pourrait se faire qu’en accord avec l’Assemblée nationale, et non de manière unilatérale.

M. Christian Cambon. Tout à fait !

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 34 et 36.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 34.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 36.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 5, présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’alinéa 1 de l’article 13 du règlement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …. – Les présidences des commissions assurent une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes. »

M. Éric Kerrouche. Manque de chance, madame le rapporteur : le Sénat ne fait pas déjà ce que nous proposons au travers du présent amendement ! (Sourires sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.) En effet, nous demandons de prévoir dans le règlement que les présidences des commissions assurent une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes.

Si nous arrivons à atteindre la parité pour la composition du Bureau, ainsi que vous l’avez indiqué, madame le rapporteur, pourquoi n’y arriverions-nous pas pour les présidences des commissions permanentes ? Seules deux sur sept sont présidées par des femmes. Il doit être possible de faire quelque chose…

Il suffirait que nous nous mettions d’accord. Encore une fois, c’est juste une question de volonté.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il me semble au contraire que les deux choses sont très différentes : les groupes présentent des listes pour la composition du Bureau, mais, dans les commissions, les décisions sont prises de façon isolée, chaque commission élisant son président.

Je ne vois pas comment, sans porter atteinte au droit de vote de chacun, nous pourrions décider de la répartition des présidences de commissions, alors que celles-ci sont déterminées indépendamment par chaque commission.

Par ailleurs, certains de nos choix n’ont rien à voir avec le fait d’être un homme ou une femme. Par exemple, depuis que je suis sénatrice, j’ai observé que la présidence du groupe communiste était toujours féminine et celle du groupe socialiste toujours masculine. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Mickaël Vallet. Et la présidence du Sénat ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Mes chers collègues, je ne critique pas ces choix, mais il semblerait que vous ayez trouvé plus de qualité, qui à un homme, qui à une femme. C’est ainsi, et il me semble qu’il doit en rester ainsi.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 5.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 6, présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’alinéa 4 de l’article 13 du règlement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …. – Ne peut être élu à la présidence de la commission des finances qu’un sénateur appartenant à un groupe s’étant déclaré d’opposition. »

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Nous arrivons ici à un point essentiel : par cet amendement, il s’agit de prévoir que la commission des finances ne peut être présidée que par un sénateur ou une sénatrice appartenant à un groupe d’opposition.

Nous pouvons nous gargariser, nous payer de mots, dire que le Sénat est la chambre de la démocratie, que nous nous respectons et que nous nous apprécions, ce qui est sans doute une vérité au demeurant, ce qui est certain, c’est que cette disposition, imposée à l’Assemblée nationale, je le rappelle, par Nicolas Sarkozy,…

M. Éric Kerrouche. … ne repose au Sénat que sur un gentlemans agreement. (M. Bruno Sido proteste.)

Nous souhaitons que cette disposition soit inscrite dans le dur du règlement, car, sans faire de procès d’intention, nous ne savons pas comment les choses peuvent évoluer d’ici à une dizaine d’années. Il nous apparaît que cette inscription serait une garantie collective.

En revanche, ne pas accepter cette évolution reviendrait à remettre en cause l’image que nous nous donnons collectivement, selon laquelle les membres du Sénat se respectent et savent travailler en bonne intelligence.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il faut revenir aux raisons pour lesquelles les choses se font ainsi.

Nommer à la présidence de la commission des finances un membre de l’opposition signifie que l’on y désigne non pas un représentant de l’opposition parlementaire, mais un représentant de l’opposition au Gouvernement. (Protestations sur les travées du groupe SER.)

Mme Muriel Jourda, rapporteur. De fait, le rôle du président de la commission des finances est de contrôler l’action du Gouvernement.

Si, à l’Assemblée nationale, le président de la commission des finances appartient toujours à l’opposition au Gouvernement, au Sénat, l’opposition peut parfaitement être de la même couleur politique que le Gouvernement. Dans ce cas, quel sens y aurait-il à rigidifier cette règle en nommant systématiquement un membre de l’opposition sénatoriale, qui pourrait avoir la même couleur politique que le Gouvernement ?

Nous ne savons pas ce que l’avenir nous réserve, et nous devons bien nous garder de rigidifier la solution actuellement retenue par le Sénat.

La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

MM. Jean-François Husson et Bruno Sido. Très bien !

M. Mickaël Vallet. Et la séparation des pouvoirs ?

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.

M. Éric Kerrouche. Madame le rapporteur, ce sont des arguties. Vous le savez bien, votre raisonnement est complètement spécieux. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Non !

M. Éric Kerrouche. Parlons-nous de l’opposition sénatoriale ou de l’opposition au Gouvernement ? L’amendement vise à préciser explicitement qu’il faut appartenir à un groupe de l’opposition sénatoriale pour obtenir la présidence de la commission des finances.

Mes chers collègues, permettez-moi de prendre un exemple pour vous éclairer : je vous le rappelle, c’est sur ce fondement que, en octobre 2011, notre collègue Philippe Marini, membre du groupe UMP, a été élu à cette présidence. Il n’était pas à l’époque dans l’opposition au gouvernement Fillon, mais il siégeait bien au Sénat dans un groupe d’opposition.

Il est donc impossible de se tromper dans l’interprétation de la rédaction que nous proposons.

En revanche, madame le rapporteur, je constate que vous faites preuve de mauvaise volonté sur ce point pourtant essentiel à l’équilibre du travail que nous menons ensemble. Ainsi, vous adressez véritablement un très mauvais signal en ce qui concerne notre travail collectif. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.

M. Patrick Kanner. Madame le rapporteur, votre interprétation est fausse, et j’apprécierais que vous le reconnaissiez.

Si la présidence de la commission des finances était assurée par un membre de l’opposition au Gouvernement, votre groupe aurait dû la prendre il n’y a pas si longtemps, lorsque vous apparteniez à l’opposition au Gouvernement ! Madame le rapporteur, vous vous êtes trompée. Cela peut arriver à tout le monde, mais j’aimerais que vous le reconnaissiez.

Même si votre groupe votait contre cet amendement lors du scrutin public que nous avons demandé, nous aimerions que votre erreur d’interprétation ne puisse faire jurisprudence : c’est bien le premier groupe d’opposition à la majorité sénatoriale qui assure la présidence de la commission des finances. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Répondez, madame le rapporteur !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 6.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 254 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 320
Pour l’adoption 114
Contre 206

Le Sénat n’a pas adopté.

Après l’article 5
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Après l’article 6

Article 6

À l’alinéa 2 de l’article 15 du Règlement, les mots : « , des membres excusés » sont supprimés.

Mme la présidente. L’amendement n° 7, présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Cet amendement a pour objet de supprimer l’article 6, qui lui-même tend à faire disparaître la mention au Journal officiel des membres excusés lors des réunions de commission. En effet, si cette disposition était adoptée, on ne pourrait plus distinguer les membres excusés de ceux qui sont simplement absents.

Il nous semble que cette modification du règlement se ferait au détriment des sénateurs et du Sénat, alors que le règlement de l’Assemblée nationale indique bien que les noms des membres dont l’absence est excusée « sont publiés au Journal officiel le lendemain de chaque réunion, ainsi que par voie électronique », dans un souci de transparence et d’information.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Sagesse.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 7.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 6.

(Larticle 6 est adopté.)

Article 6
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Article 7

Après l’article 6

Mme la présidente. L’amendement n° 38, présenté par Mme M. Carrère, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme Conte Jaubert, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et MM. Roux et Ruel, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 15 bis du règlement, il est inséré un article 15… ainsi rédigé :

« Art. 15… – Les sénateurs élus outre-mer peuvent participer en visioconférence aux réunions de commission permanente dont ils sont membres lorsqu’il n’y a pas de demande de huis clos. La participation en visioconférence ne leur permet pas d’exercer leur droit de vote ni d’être prise en compte comme une présence en commission. »

La parole est à M. Michel Masset.

M. Michel Masset. Compte tenu de l’éloignement géographique et des contraintes de transport, il est souvent difficile pour les sénateurs ultramarins d’être physiquement présents chaque semaine en commission.

Contrairement à l’Assemblée nationale, où les réunions de commission sont retransmises en direct et accessibles en différé, les réunions de commissions du Sénat ne bénéficient pas de telles diffusions.

Par conséquent, lorsqu’un sénateur ultramarin ne peut être présent à une réunion, il doit attendre la publication de son compte rendu. En découle pour lui un retard préjudiciable, d’autant que, dans la grande majorité des cas, il ne s’écoule qu’une semaine entre l’examen d’un texte en commission et son passage en séance.

Nous proposons donc, par cet amendement, que les sénateurs ultramarins puissent assister aux réunions de leurs commissions en visioconférence. Cette mesure vise à améliorer leur accès aux travaux préparatoires des textes de loi et à mieux prendre en compte les contraintes spécifiques qui s’imposent à eux.

Nous prévoyons néanmoins deux limites strictes : les sénateurs participant par visioconférence ne pourraient pas voter sur les textes examinés en commission et leur participation à distance ne serait pas assimilée à une présence effective.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. On peut réfléchir à une mesure de ce type, je le reconnais, mais les sénateurs d’outre-mer bénéficient déjà d’un régime dérogatoire. Surtout, je crains que, en normalisant le recours à la visioconférence, nous ne conduisions à dématérialiser notre présence en commission.

La commission a donc émis un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 38.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 9, présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’alinéa 5 de l’article 16 du règlement est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il est procédé à ces désignations de manière à assurer une représentation équilibrée des groupes politiques ».

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Cet amendement a pour objet d’assurer que les désignations de rapporteurs se fassent dans le respect de la représentation équilibrée des groupes politiques.

Nous connaissons les arguments qui s’opposent à un tel objectif, mais certaines commissions s’efforcent d’assurer une juste répartition des groupes en la matière, tandis que d’autres ne le font pas. L’adoption de cet amendement permettrait d’homogénéiser les pratiques au sein de la Haute Assemblée.

La représentation équilibrée des groupes est mise en œuvre lors de la rédaction des rapports budgétaires. Qu’est-ce qui empêcherait sa généralisation ?

Mme la présidente. L’amendement n° 76, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Gontard et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le règlement est ainsi modifié :

L’alinéa 5 de l’article 16 est complété par une phrase ainsi rédigée : « À la fin d’une session parlementaire, au sein de chaque commission, le nombre de rapporteurs de chaque groupe est proportionnel au nombre total des membres de ce groupe au sein de la commission. »

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Dans le même esprit, nous souhaitons que le nombre de rapporteurs soit proportionnel au total des membres du groupe au sein de la commission. En effet, cette pratique a cours dans la commission des finances, mais pas nécessairement ailleurs.

Pour renforcer les chances offertes aux groupes minoritaires, nous proposons d’ajouter cette disposition dans notre règlement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. La commission s’est montrée défavorable à ces deux amendements. (Protestations sur les travées du groupe SER.)

Nommer un rapporteur, ce n’est pas seulement assurer la stricte représentation institutionnelle des groupes, me semble-t-il. C’est un acte politique. À ce titre, il n’est pas pertinent de prendre en compte une représentation strictement proportionnelle.

J’émets donc un avis défavorable sur ces deux amendements.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ces amendements sont motivés par la grande disparité, que nous avons déjà fait remarquer au président du Sénat, des modalités de désignation des rapporteurs dans les différentes commissions. En tant que membre de la commission des lois, je connais particulièrement le problème.

Il y a une disparité totale : nous ne sommes même pas nommés rapporteurs des textes que nous déposons pour les examiner lors de nos niches parlementaires, voire lors des espaces transpartisans.

Je le répète, nous constatons ce soir que ni la parité ni le respect des droits de l’opposition ne sont moteurs dans ce Sénat que vous voulez présenter, madame le rapporteur, comme s’adaptant nécessairement à la modernité.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 9.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 76.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 56, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’alinéa 5 de l’article 16 du règlement est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsqu’une proposition de loi est examinée dans le cadre d’un ordre du jour réservé à un groupe de l’opposition ou minoritaire, le rapporteur en est membre sauf décision contraire du groupe. »

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Par cet amendement, nous souhaitons prévoir dans le règlement du Sénat que, lorsqu’une proposition de loi est examinée dans le cadre d’un espace de l’ordre du jour réservé à un groupe minoritaire ou d’opposition, son rapporteur est un membre de ce groupe, sauf si le groupe en question en décide autrement.

Cette disposition nous semble aller dans le sens de la révision constitutionnelle de 2008, qui avait créé les espaces réservés pour les groupes minoritaires ou d’opposition.

En outre, cela permettrait aux groupes de mener le travail approfondi nécessaire à l’examen des textes qu’ils ont déposés.

Enfin, il s’agit de répondre à l’ambition exprimée dans l’intitulé de cette proposition de résolution, qui vise à « conforter les droits des groupes politiques ». Très sincèrement, mes chers collègues, à la lecture de l’ensemble du texte, on cherche encore l’évolution en la matière…

Mme la présidente. L’amendement n° 8, présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’alinéa 5 de l’article 16 du règlement est complété par une phrase ainsi rédigée : « Pour les propositions de lois inscrites à l’ordre du jour à l’initiative d’un groupe d’opposition ou d’un groupe minoritaire, le rapporteur est désigné parmi les membres du groupe de l’auteur du texte, si le président de ce groupe en fait la demande. »

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Je donnerai quelques arguments supplémentaires allant dans le même sens.

Comment expliquer que les choses changent d’une commission à l’autre ? Le droit de priorité accordé au groupe à l’origine de l’inscription du texte à l’ordre du jour pour désigner un rapporteur prolongerait d’une certaine manière le gentlemans agreement selon lequel les textes examinés lors des niches parlementaires ne peuvent être dénaturés à l’occasion de leur passage en commission.

Madame le rapporteur, quelles seraient les difficultés réelles posées par une position minoritaire du rapporteur par rapport à la commission ? L’institution n’y verrait certainement aucun problème, alors que cela représenterait une avancée pour les droits de l’opposition.

Mme la présidente. L’amendement n° 75, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Gontard et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’alinéa 5 de l’article 16 du règlement est complété par une phrase ainsi rédigée : « Pour les propositions de loi inscrites à l’ordre du jour à l’initiative d’un groupe d’opposition ou d’un groupe minoritaire, le rapporteur est désigné parmi les membres du groupe qui dispose de l’initiative si le Président de ce groupe en fait la demande. »

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Le groupe auquel appartiennent les auteurs d’un texte examiné lors d’une niche parlementaire doit pouvoir désigner le rapporteur dudit texte.

Cela permettrait de renforcer l’initiative parlementaire : mener des auditions et planifier les travaux revient à approfondir les textes déposés, qui sont parfois rédigés sommairement et améliorés ensuite par le travail du rapporteur.

Ces amendements sont donc importants pour renforcer les droits des groupes politiques, mais aussi, plus globalement, l’initiative et le travail parlementaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Nécessairement, la commission va émettre sur ces amendements le même avis que sur les amendements précédents. En effet, le sujet est le même : la représentation exacte des groupes politiques lors de la nomination des rapporteurs sur les propositions de loi, qui est éminemment politique.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je me permets toutefois de rappeler quelques règles.

Premièrement, lorsqu’un groupe minoritaire dépose une proposition de loi, jamais le texte n’est modifié au stade de l’examen en commission sans l’accord de son auteur. La volonté politique du groupe ayant déposé le texte est donc respectée, de sorte que la version initiale du texte puisse être étudiée lors de son examen en séance.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Deuxièmement, dans les espaces transpartisans, le groupe auteur de la proposition de loi peut choisir entre disposer du poste de rapporteur ou d’un temps d’expression de dix minutes lors de la discussion générale, réservé à l’auteur du texte. (Exclamations sur les travées du groupe CRCE-K.) Les rapports ne sont donc attribués au groupe minoritaire que lorsque celui-ci le réclame.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces trois amendements.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Madame le rapporteur, je n’ai pas de souci avec le fait majoritaire, que j’ai toujours respecté. Toutefois, si nous pouvons être en désaccord, nous ne pouvons pas invoquer des arguments vides de sens.

Ces amendements ont pour objet les espaces réservés, et non les espaces transpartisans, dont nous n’avons eu qu’une seule expérience. Madame le rapporteur, je veux bien que l’on considère que l’on dispose déjà d’une jurisprudence à leur propos, mais je ne sais pas d’où sort cette règle selon laquelle on peut choisir entre le poste de rapporteur ou les dix minutes d’expression prévues pour l’auteur de la proposition de loi.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Ce n’est pas la mienne !

Mme Cécile Cukierman. Il faut donc bien distinguer ces deux espaces.

La politique, ce n’est pas à la carte ! Nous pouvons être en désaccord, mais il ne s’agit pas de savoir si l’on peut jaser dix minutes de plus à la tribune. La question est la suivante : veut-on donner aux groupes d’opposition et aux groupes minoritaires le droit total de travailler en profondeur un texte, en disposant du poste de rapporteur et des moyens adéquats qu’il offre, pour continuer d’affiner et d’approfondir les propositions qui sont faites ?

Madame le rapporteur, vous l’avez très bien rappelé, la jurisprudence en vigueur au Sénat assure que, en pareil cas, le texte ne peut être réécrit en commission sans l’accord du groupe qui l’a déposé.

Mme Cécile Cukierman. Mes chers collègues, permettez-moi de faire un peu d’ironie à cette heure tardive : l’histoire récente montre que des rapporteurs peuvent ne pas être d’accord avec leurs groupes… (Sourires sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)

La vie politique et démocratique mérite mieux que cela. Oui, le choix d’un rapporteur est éminemment politique. Toutefois, lorsqu’on incarne le fait majoritaire, il est éminemment politique de respecter l’opposition et les minorités ! (Applaudissements sur des travées des groupes CRCE-K et GEST.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je le rappelle, une précédente réforme du règlement, intervenue il y a quelques années, a modifié le cadre du droit des groupes à demander la création d’une commission d’enquête. En effet, auparavant rien n’assurait que le poste de rapporteur serait réservé au groupe formulant cette demande.

Mme Nathalie Goulet. Il n’était question que du temps de parole à la tribune. Le poste de président de telles commissions est certes important, mais c’est surtout le rapport qui compte.

Il a fallu revoir le règlement pour assurer au groupe ayant demandé la création d’une commission d’enquête la possibilité de disposer du poste de rapporteur. Auparavant, cette désignation obéissait à des règles d’ancienneté, mais variait aussi selon le groupe auquel on appartenait ou les pressions politiques.

Nous étudions à présent un cas similaire : lorsqu’une proposition de loi émane d’un groupe, celui-ci peut vouloir en assurer le rapport, comme il est prévu pour les commissions d’enquête.

Mmes Marie-Pierre de La Gontrie et Cécile Cukierman. Très bien !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 56.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 8.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 75.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 87 rectifié, présenté par MM. Masset et Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme Conte Jaubert, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Guiol, Mme Jouve, M. Laouedj, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa de l’article 16 du règlement est ainsi rédigé :

« Le Bureau du Sénat détermine les conditions dans lesquelles au moins un collaborateur par groupe politique, désigné au sein du secrétariat du groupe politique ou un collaborateur de sénateur, peut assister aux réunions des commissions permanentes, des commissions spéciales et de la commission des affaires européennes ainsi qu’aux auditions des rapporteurs. »

La parole est à M. Michel Masset.

M. Michel Masset. Mes chers collègues, la plupart de nos réunions de travail ne sont pas retransmises en vidéo. Le Sénat préserve cette habitude, notamment dans les commissions permanentes, afin d’assurer des discussions apaisées et constructives.

Toutefois, cette pratique comporte également des effets de bord. En effet, nous sommes parfois éloignés du contenu de certaines réunions auxquelles nous n’avons pu assister en raison de nos agendas chargés.

Dans nos départements, nous pouvons compter sur la présence de nos collaborateurs aux réunions auxquelles nous ne pouvons assister. Ils peuvent alors nous rendre compte de leur contenu, ce qui nous permet de nous investir dans les dossiers importants des territoires, malgré les contraintes de nos agendas.

Au Sénat, les auditions des rapporteurs renforcent les connaissances du Parlement sur les sujets dont il se saisit et permettent de légiférer en connaissance de cause. Nos collaborateurs en sont pourtant exclus.

Nous proposons donc de garantir la présence d’un collaborateur de chaque groupe politique ou d’un sénateur lors des réunions des commissions et des auditions des rapporteurs. Cette mesure permettrait de renforcer l’information commune au sein des groupes et la transparence des travaux de notre assemblée. Elle préserverait également l’égalité entre les groupes politiques.

Mme la présidente. L’amendement n° 73, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Gontard et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa de l’article 16 du règlement est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Un collaborateur par groupe politique peut assister aux réunions des commissions permanentes, des commissions spéciales et de la commission des affaires européennes. Ce collaborateur peut être un membre nommément désigné du secrétariat d’un groupe politique ou un collaborateur nommément désigné d’un sénateur membre de la commission.

« Le Bureau du Sénat prévoit les obligations applicables aux collaborateurs autorisés à assister à ces réunions et auditions. »

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 29 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, MM. Cabanel, Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et MM. Roux et Ruel, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le dernier alinéa de l’article 16 du règlement est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Un membre, nommément désigné, du secrétariat de chaque groupe politique peut assister aux réunions plénières des commissions permanentes ou spéciales et de la commission des affaires européennes.

« Le Bureau du Sénat détermine les obligations qui leur sont applicables. »

La parole est à M. Christian Bilhac.

M. Christian Bilhac. Les petits groupes rencontrent des difficultés pour assister à toutes les réunions. Il est en effet plus facile d’assurer la présence d’un groupe politique lorsque celui-ci compte quinze membres dans une commission que lorsqu’il n’en compte que deux. Or la charge de travail est la même : tous les collaborateurs des groupes doivent réaliser le travail législatif de la même manière.

Madame le rapporteur, vous m’objecterez peut-être que les comptes rendus de ces réunions sont publiés. Certes, mais souvent, ils arrivent après l’examen du texte en séance publique…

Vous m’objecterez peut-être également que ces réunions sont retransmises sur le site du Sénat. Or tel n’est pas toujours le cas.

Il s’agit d’une question d’égalité. Cela ne représente qu’une chaise dans chaque salle de réunion : nous ne demandons pas grand-chose !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Mes chers collègues, ces questions relèvent de l’instruction générale du Bureau, non du règlement du Sénat.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. On peut ricaner en avançant que ce ne sont que des questions de procédure, mais c’est ainsi. Mes chers collègues, je vous invite à réitérer votre demande aux membres du Bureau, dont nombre d’entre eux sont d’ailleurs présents ce soir.

J’entends qu’il est difficile pour les membres des plus petits groupes de se trouver partout à la fois. Pour autant, il ne me semble pas souhaitable d’ouvrir aux collaborateurs la possibilité d’assister aux réunions, car cela ferait courir le risque que plus aucun sénateur ne s’y rende. Il faut être attentif à ce problème.

L’instruction générale du Bureau prévoit que les collaborateurs des groupes peuvent assister aux réunions des commissions et les collaborateurs des sénateurs aux auditions des rapporteurs. Mes chers collègues, je vous renvoie à cette instance.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ne nous racontons pas d’histoires : le problème se pose pour les groupes que l’on appelle, de manière peu sympathique, les petits groupes.

Lors de l’examen de la proposition de résolution en commission, certains ont expliqué qu’il était déjà formidable que deux membres de ces petits groupes appartiennent à une commission ; l’un d’entre eux pouvait bien être présent. Mais, par exemple, deux des trois membres du groupe RDPI appartenant à la commission des lois sont des sénateurs d’outre-mer. De fait, notre collègue Patricia Schillinger, que je salue, est parfois seule pour assister aux réunions.

Alors que certains collaborateurs des groupes politiques sont déjà présents lors des réunions de commission, Mme le rapporteur nous explique que la décision relève du Bureau. Mais il en est ainsi parce que le règlement le prévoit, mes chers collègues ! Si nous modifions l’article 16 du règlement par ces amendements, le problème est réglé.

Madame le rapporteur, nous en revenons au point que j’exprimais tout à l’heure : vous ne voulez pas que les petits groupes, qui peuvent tout de même appartenir à la majorité – je le précise au passage –, puissent travailler dans de bonnes conditions.

Vous leur refusez d’obtenir le poste de rapporteur des textes qu’ils déposent, donc le soutien d’un administrateur, qui travaillerait avec eux. Ils ne peuvent pas disposer d’une bonne connaissance du programme des auditions, qu’ils découvrent le vendredi pour la semaine suivante. Ils n’ont pas communication des questionnaires préparatoires aux auditions ni des réponses des personnes entendues, et le compte rendu des auditions ne leur est pas envoyé.

Voilà comment la droite sénatoriale considère que les groupes politiques doivent travailler dans notre assemblée !

Le problème ne se pose pas pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, car nous avons la chance de disposer de plusieurs représentants dans chaque commission. Mais nous soutenons cette demande qui a vocation à ce que les membres des petits groupes, qui sont sénateurs au même titre que chacun d’entre nous, puissent travailler dans des conditions un peu moins difficiles (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – MM. Christian Bilhac et Michel Masset applaudissent également.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 87 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 73.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 29 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 30 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme Conte Jaubert, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et MM. Roux et Ruel, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase de l’alinéa 1 de l’article 17 bis du règlement, les mots : «, sauf dérogation accordée par la Conférence des Présidents » sont supprimés.

La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. L’article 17 bis du règlement est clair : « Deux semaines au moins avant la discussion par le Sénat d’un projet ou d’une proposition de loi, sauf dérogation accordée par la Conférence des Présidents, la commission saisie au fond se réunit. » Pourtant, nous constatons tous que l’exception est devenue la règle : la plupart des textes sont débattus en séance publique une semaine seulement après leur examen en commission.

La conférence des présidents du 19 mars dernier en témoigne : un délai d’une semaine a été prévu pour dix-huit textes et seulement deux ont bénéficié de deux semaines. Or le délai dérogatoire d’une semaine, qui est devenu d’usage courant, ne laisse que trois jours ouvrables pour déposer des amendements et étudier le texte : l’exigence de qualité, qui doit être la nôtre, est parfois difficile à respecter dans des délais aussi contraints.

Par ailleurs, cette situation est surtout défavorable aux plus petits groupes, qui ne disposent souvent ni des ressources humaines nécessaires ni d’un canal « rapporteur » pour gérer des délais aussi rapprochés entre les examens en commission et en séance publique.

De façon quelque peu rigide, certes, cet amendement vise à imposer le respect de la règle générale afin de permettre aux sénateurs et aux groupes d’examiner les textes et d’exercer leur droit d’amendement dans de meilleures conditions.

Mme la présidente. L’amendement n° 27, présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase de l’alinéa 1 de l’article 17 bis du règlement, après le mot : « Présidents » sont ajoutés les mots : « pour les textes pour lesquels le Gouvernement a engagé la procédure accélérée ».

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Nous proposons une version plus souple de l’amendement qui vient d’être présenté.

Le principe d’un délai de deux semaines entre les examens en commission et en séance publique est systématiquement remis en cause. En témoigne l’examen de la présente proposition de résolution, qui n’avait rien de particulièrement urgent, sauf peut-être l’urgence à contraindre l’opposition au travers des refus qui nous sont systématiquement opposés…

Ce délai de deux semaines n’est pas une disposition de confort : il s’agit de permettre aux sénateurs de travailler sur les textes. Cette disposition n’a pas vocation à s’appliquer tout le temps : un délai plus court se comprend dans le cadre de la procédure accélérée. Pour autant, les deux semaines doivent rester la norme et il n’est pas tolérable que l’exception devienne la règle.

Mme la présidente. L’amendement n° 31, présenté par Mme M. Carrère, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme Conte Jaubert, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et MM. Roux et Ruel, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase de l’alinéa 1 de l’article 17 bis du règlement, après le mot : « dérogation », il est inséré le mot : « exceptionnelle ».

La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Il s’agit d’un amendement de repli : nous proposons d’affirmer que la dérogation permise à l’article 17 bis du règlement du Sénat, qui autorise un délai d’une semaine entre l’établissement du texte de la commission et la discussion en séance publique, a un caractère exceptionnel.

Bien qu’aucun ministre ne soit présent ce soir, il serait également bienvenu que le Gouvernement soit sensible à cette exigence lors de l’établissement de l’ordre du jour.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Le règlement prévoit en effet un délai de deux semaines entre les examens du texte en commission et en séance publique, mais il permet aussi de déroger à cette règle par une décision de la conférence des présidents, ce qui est chose courante.

Pour reprendre le propos de Mme Carrère, faut-il introduire plus de rigidité ? Je ne le pense pas. Nous avons besoin de cette souplesse.

Rappelons-nous les textes qui ont été adoptés pendant la pandémie, même si ce ne sont pas les souvenirs que j’affectionne le plus : nous avions dû agir dans l’urgence, c’était une nécessité.

En outre, le Gouvernement dispose, sur le fondement de l’article 48 de la Constitution, de prérogatives en matière d’ordre du jour, notamment pour y inscrire des textes, auxquelles il me paraît difficile de déroger.

Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe SER.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Il me semble qu’aucun groupe n’a émis de grandes critiques. Même si nous ne sommes pas d’accord, il faut débattre avec des arguments à la hauteur.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. C’est charmant !

Mme Cécile Cukierman. Prendre la période du covid-19 pour justifier un avis défavorable ne peut que conduire à l’immobilisme. Cette période était exceptionnelle : j’en veux pour preuve que nous avons alors adopté des lois d’urgence !

Ne nous référons pas à notre manière de légiférer durant la pandémie pour rédiger notre règlement. Sans faire preuve d’un optimisme débordant, une période comme celle du covid-19 est plutôt rare durant un mandat sénatorial.

Par ailleurs, la question du délai de quinze jours s’inscrit dans la lignée de tous les débats précédents. Même en l’absence de projets de loi, les textes se succèdent : sur une même semaine, nous pouvons examiner quatre ou cinq propositions de loi, ce qui pose des difficultés.

Je reprends la remarque de Guy Benarroche en discussion générale : en 2011, année de ma première élection au Sénat, personne ne s’inquiétait que le rapport ne soit publié que le vendredi avec les conséquences que cela emporte sur le dépôt des amendements avant lundi midi. Le délai de deux semaines était respecté, ce qui permettait aux sénateurs de travailler sur le texte en commission avant que les groupes ne prennent connaissance des comptes rendus et ne débattent des amendements de séance à déposer.

La question du délai a une réelle incidence : les quinze jours faciliteraient beaucoup nos travaux. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, RDPI et RDSE.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 30 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 27.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 31.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 55, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 17 bis du règlement est ainsi modifié :

1° À la deuxième phrase de l’alinéa 1, les mots : « applicable ni aux amendements du Gouvernement, ni aux sous-amendements » sont remplacés par les mots : « pas applicable aux sous-amendements » ;

2° À la troisième phrase de l’alinéa, les mots : « ne sont pas » sont remplacés par le mot : « sont ».

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Nous proposons que le Gouvernement soit lui aussi tenu à un délai pour le dépôt de ses amendements. Inutile de développer : nous avons tous en tête des exemples de dépôt tardif d’amendements gouvernementaux de plusieurs pages, qui pourraient faire l’objet d’un projet de loi à eux seuls. L’avantage de ce mode opératoire, c’est qu’il dispense de toute réalisation d’étude d’impact, ce qui rend toute expertise impossible. Il s’agit bien ici de renforcer les pouvoirs du Parlement et non ceux de l’exécutif.

Par ailleurs, cet amendement tend également à prévoir la publication des amendements déclarés irrecevables par la commission. Le rejet d’un amendement constitue un acte politique dont il doit être fait état dans les comptes rendus de nos travaux. Nous pourrions ainsi souligner ce que la majorité sénatoriale accepte ou non.

Mme la présidente. L’amendement n° 10, présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le règlement est ainsi modifié :

1° La troisième phrase de l’alinéa 2 de l’article 17 bis est supprimée ;

2° La seconde phrase de l’alinéa 1 de l’article 45 est supprimée.

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Nous reprenons la seconde mesure développée à l’instant par Cécile Cukierman.

Pourquoi y aurait-il une différence de traitement entre les amendements déclarés irrecevables au titre de l’article 45, mis en distribution, et ceux qui le sont au titre de l’article 40, non mis en distribution ? Déposer un amendement, même s’il sera déclaré irrecevable par la suite, n’en demeure pas moins une initiative parlementaire : il doit donc en être fait état publiquement.

Cette publication nous permettrait de comprendre les raisons pour lesquelles l’article 40 est opposé à certains amendements et de relever d’éventuelles inflexions de jurisprudence. Si les amendements disparaissent à chaque fois, les variations ne sont pas connues.

Mme la présidente. L’amendement n° 65 rectifié, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La seconde phrase de l’alinéa 1 de l’article 45 du règlement est supprimée.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Dès lors que les amendements sont déclarés irrecevables, ils ne sont pas publiés. Or les irrecevabilités relèvent souvent d’une décision politique, qui ne diffère pas des autres décisions politiques prises au sein de notre assemblée. En ce sens, cette décision doit être connue.

En publiant les amendements en question, les parlementaires pourront justifier des actions menées dans le cadre de leur mandat auprès de celles et de ceux qui les sollicitent.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Ces amendements visent à astreindre le Gouvernement au respect d’un délai de dépôt d’amendement en vue de l’examen des textes en commission. J’imagine mal que le règlement intérieur du Sénat limite un droit d’amendement qui se fonde sur la Constitution. Le moment est peut-être venu de rappeler que le Conseil constitutionnel exercera un contrôle sur le texte que nous adopterons ce soir.

Pourquoi y a-t-il une différence de traitement entre les amendements qui sont déclarés irrecevables sur le fondement de l’article 40 de la Constitution et ceux qui le sont sur le fondement de l’article 45 ?

Pour ce qui concerne l’article 40, la recevabilité des amendements est contrôlée soit par le président de la commission saisie au fond avant leur examen en vue d’établir le texte de la commission, soit par le président de la commission des finances avant leur examen en séance publique.

En ce qui concerne la recevabilité au titre de l’article 45, c’est la commission qui décide elle-même, sur proposition du rapporteur.

Il est donc normal que les amendements qui ont été déclarés irrecevables sur le fondement de l’article 40 ne soient pas mis en distribution et que ceux qui seront peut-être déclarés irrecevables sur le fondement de l’article 45 apparaissent encore : la commission décidera de leur sort.

Le Conseil constitutionnel a rendu une décision claire à ce sujet en censurant une disposition semblable aux propositions des auteurs de ces amendements. En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 55, 10 et 65 rectifié.

Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

M. Thomas Dossus. Si le Gouvernement devait respecter les délais auxquels nous sommes nous-mêmes astreints, son droit d’amendement ne serait pas entravé. L’objectif est d’empêcher les amendements « sur table ». Nous avons tous le souvenir de la dernière séquence budgétaire, assez baroque, où nous devions examiner des amendements déposés dans la nuit, portant sur plusieurs centaines de millions d’euros, sans que la commission ait réellement pu se réunir.

Je me souviens d’un autre de ces amendements sur table, déposé par une ministre lors de l’examen de la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables. Il s’agissait des zones d’accélération des énergies renouvelables, un dispositif que personne n’avait compris, mais que nous avions adopté. Aujourd’hui, nous en subissons tous les conséquences dans nos territoires, où les élus locaux rencontrent les plus grandes difficultés à déployer ces usines à gaz.

Nous légiférons mal dans les conditions actuelles, nous le voyons tous. Il serait de bon aloi d’améliorer les conditions de rédaction de la loi.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Madame le rapporteur, au cours des débats, notamment budgétaires, énormément de questions se posent sur la jurisprudence des irrecevabilités au titre de l’article 40. Ce n’est peut-être pas le bon moment, ni le bon texte, ni le bon jour, ni la bonne heure pour cela, mais il faudra bien, peut-être par le biais de l’instruction générale du Bureau, que la commission des finances finisse par lisser l’interprétation dudit article qui peut varier d’un texte à l’autre ou d’un auteur à l’autre…

Des amendements qui se ressemblent comme des frères peuvent être déclarés recevables pour certains et irrecevables pour d’autres. Nous connaissons tous cette situation qui entraîne des déconvenues et suscite des incompréhensions.

Vous avez mentionné une décision du Conseil constitutionnel qui s’opposerait à l’adoption de l’amendement n° 10. Pourtant, il doit bien exister un moyen de conserver une trace de ces amendements, ne serait-ce que pour lisser la jurisprudence en la matière.

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Monsieur Dossus, les règles relatives aux sénateurs relèvent d’une loi organique – ce n’est pas une question de bonne volonté ! –, qui ne s’applique pas au Gouvernement.

Madame Goulet, lorsque le président de la commission des finances prend une décision au titre de l’article 40, il la motive par écrit. Nous connaissons donc précisément les raisons pour lesquelles l’irrecevabilité est prononcée. La jurisprudence est-elle pour autant uniforme ? Je suis dans l’incapacité de l’affirmer. Je présume que les mêmes causes produisent les mêmes effets.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 55.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 10.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 65 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 89, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. Gontard, G. Blanc, Dantec, Dossus et Fernique, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la première phrase de l’alinéa 3 de l’article 17 bis du règlement, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ce rapport est publié le jour de son adoption en commission. »

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Puisque cette assemblée a été incapable de sanctuariser le délai de quinze jours entre l’examen du texte en commission puis en séance, donnons-nous les moyens de rendre les délais convenables en publiant le rapport de la commission le jour même de la réunion.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Comment ferions-nous pour publier le rapport le même jour que la réunion, alors qu’il comprend, en sus des travaux de la commission, les comptes rendus des débats ? Pour les réunions qui ont lieu le mercredi, le rapport est généralement publié le vendredi.

En revanche, le jour même d’une réunion, nous disposons du texte à examiner et de l’Essentiel, synthèse assez complète : nous ne sommes donc pas totalement dépourvus de base de travail.

J’y insiste : le compte rendu, qui fait partie intégrante du rapport, est publié un jour et demi après la réunion. Il me paraît difficile de faire mieux.

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

M. Thomas Dossus. Les services du Sénat sont très performants : nous aurons dans la nuit le compte rendu de nos débats de ce soir. Ils savent aller vite. La vraie question est celle des moyens.

Quand le rapport est publié le vendredi et que le délai de dépôt des amendements expire le lundi midi, nos collaborateurs doivent travailler le week-end. Ce n’est pas acceptable si nous voulons assurer la qualité du travail législatif.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 89.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 85 rectifié, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l’alinéa 3 de l’article 44 bis du règlement, le mot : « et » est remplacé par le mot : « ou ».

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. D’année en année, la chasse aux cavaliers législatifs, du fait d’une application toujours plus stricte de l’article 45 de la Constitution, se renforce. À présent, le dépôt d’amendement se fait dans un cadre extrêmement strict, précisé dans les vade-mecum fournis en amont de chaque débat. Ainsi, les propositions formulées au cours de l’examen sont écartées des débats.

C’est la raison pour laquelle nous proposons de préciser à l’article 44 bis du règlement que « les amendements sont recevables s’ils s’appliquent effectivement au texte qu’ils visent ou, en première lecture, s’ils présentent un lien, même indirect, avec le texte en discussion ».

Le cumul des deux conditions prévaut actuellement, contrairement à ce qui se faisait auparavant, ce qui restreint excessivement le champ du dépôt d’amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. L’article 44 bis du règlement pose deux conditions cumulatives pour apprécier l’irrecevabilité au titre de l’article 45 de la Constitution : les amendements doivent « s’appliqu[er] effectivement au texte qu’ils visent et […] présent[er] un lien, même indirect, avec le texte en discussion »

Le remplacement du « et » par un « ou » permettrait le dépôt d’un amendement sans lien, direct ou indirect, avec le texte, ce qui est contraire à l’article 45 de la Constitution.

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 85 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 88 rectifié, présenté par MM. Masset et Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire et Gold, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, M. Laouedj, Mme Pantel et MM. Roux et Ruel, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’alinéa 8 de l’article 44 bis du règlement, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« …. – L’auteur d’un amendement déclaré irrecevable sur le fondement de l’alinéa 3 du présent article peut demander, deux fois par session, la justification écrite de cette décision au Bureau de la commission ayant prononcé l’irrecevabilité. À cette occasion, l’auteur de l’amendement peut être entendu par le Bureau de la commission qui peut modifier sa décision.

« …. – Le groupe politique dont est membre l’auteur d’un amendement déclaré irrecevable sur le fondement de l’alinéa 3 du présent article peut demander, deux fois par session, le réexamen de cette décision par la Conférence des Présidents. Réunie à cet effet, avant l’examen en commission ou en séance du texte sur lequel l’amendement porte, la Conférence des Présidents statue en dernier ressort sur l’irrecevabilité de l’amendement et rend une décision motivée. »

La parole est à M. Michel Masset.

M. Michel Masset. Nous sommes nombreux dans cet hémicycle à avoir déjà reçu, avec étonnement, des décisions d’irrecevabilité sur le fondement de l’article 45 de la Constitution. Depuis le renforcement du contrôle parlementaire voulu par la conférence des présidents en 2019, elles se sont multipliées sans que le règlement évolue.

À l’heure actuelle, il n’y a aucune obligation d’explication des décisions d’irrecevabilité. Le périmètre indicatif, diffusé en amont d’un examen, n’apporte pas l’éclairage suffisant pour comprendre les choix qui ont conduit à le fixer.

Par cet amendement, un sénateur pourrait demander deux fois par session, pour ne pas engorger nos commissions, une explication écrite renforcée. Cela permettra à l’auteur de l’amendement concerné de mieux comprendre les raisons de cette irrecevabilité et à nos commissions de faire preuve de transparence pour faire ainsi échec à d’éventuels procès en partialité.

Le manque de pluralisme est consubstantiel au fonctionnement des assemblées : les décisions sont prises par la majorité. Cette règle assure le bon fonctionnement démocratique du Sénat. Néanmoins, certaines décisions doivent davantage inclure les groupes d’opposition.

Comme vous l’aurez compris, mes chers collègues, je propose de réfléchir collectivement à de nouvelles règles pour une meilleure acceptabilité des irrecevabilités, qui sont nécessaires au bon déroulement de nos débats législatifs.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Même si j’entends votre demande, mon cher collègue, pourquoi deux fois par session plutôt que trois ? Par ailleurs, lorsqu’une explication est sollicitée au sujet d’une décision d’irrecevabilité au titre de l’article 45 – des débats peuvent avoir lieu en commission sur ce sujet, y compris sur le périmètre du texte –, la discussion figure dans les comptes rendus des débats.

En outre, vous faites de la conférence des présidents une instance d’appel des décisions des commissions prises sur la base de l’article 45 ; or tel n’est pas son rôle, qui se résume essentiellement à établir l’ordre du jour de notre assemblée.

Je comprends votre souci, mais la procédure que vous souhaitez mettre en œuvre n’est pas véritablement applicable : avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 88 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 63 rectifié, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la première phrase de l’alinéa 1 de l’article 45 du règlement, sont insérées deux phrases ainsi rédigées : « Le président de la commission, par un avis écrit et précisément motivé, avertit l’auteur de l’amendement potentiellement irrecevable. Une nouvelle rédaction conforme à l’article 40 de la Constitution peut être présentée soit une heure avant l’examen du rapport en commission soit à l’ouverture de la discussion générale en séance publique. »

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Par cet amendement, mon groupe réitère une proposition qu’il avait déjà formulée à l’occasion de la dernière réforme du règlement, faute d’avoir constaté la moindre amélioration en matière de respect du droit d’amendement du fait de la multiplication des irrecevabilités au titre de l’article 40 de la Constitution.

Nous assistons même à une banalisation de l’éviction, qui peut concerner jusqu’à 20 % des amendements déposés, voire plus, sur les textes d’une certaine portée normative.

Notre proposition est raisonnable. Mon groupe n’avait-il pas été jusqu’à inscrire à l’ordre du jour d’une de ses niches parlementaires la suppression de l’article 40 de la Constitution ? À l’heure où certains appellent à un renouveau du Parlement, il nous paraît indispensable de donner aux élus toute leur place en garantissant leur droit d’amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Madame Cukierman, votre amendement est satisfait sur un point : comme je l’indiquais tout à l’heure, toutes les décisions d’irrecevabilité prises par le président de la commission des finances au titre de l’article 40 de la Constitution sont motivées, ce qui permet, lorsque cela est possible, de trouver une solution avant l’examen en séance.

Par contre, nous ne pouvons systématiquement demander à la commission de proposer une rédaction de substitution. Parfois, il n’y a tout simplement pas de solution : ce que souhaite l’auteur de l’amendement tombe sous le coup de l’article 40 et il n’est pas possible d’y remédier.

Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Soit je ne comprends pas ce que j’ai écrit, soit, madame la rapporteure, nous ne nous comprenons pas.

Je ne demande pas une réécriture de l’amendement en cas d’irrecevabilité.

Vous assurez que les irrecevabilités au titre de l’article 40, que nous apprenons par mail, sont motivées. Mais je vous assure qu’un sénateur a beaucoup de chance s’il reçoit réellement une justification !

Ce qui serait intéressant, ce serait de disposer d’une véritable expertise pour comprendre pourquoi l’adoption de tel amendement engagerait une dépense publique, par exemple. Nous connaissons tous ce cas de figure. Le vrai problème, c’est l’absence de recours réel.

Malgré vos propos, madame la rapporteure, la motivation reste virtuelle. Il y a un peu plus de dix ans, des membres de la commission des finances siégeaient encore en séance de telle sorte que nous pouvions les interroger sur les raisons d’une irrecevabilité. Ils étaient alors en mesure d’exposer l’avis de la commission des finances, même s’ils ne le partageaient pas.

Si la motivation des décisions d’irrecevabilité était obligatoire, cela demanderait un peu plus de temps. La commission y réfléchirait alors à deux fois et il y en aurait peut-être moins. (M. Loïc Hervé applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. À ma connaissance – je ne suis pas spécialiste, mais suffisamment de membres de la commission concernée sont présents pour le confirmer –, le président de la commission des finances, depuis 2014, précise dans un rapport toute la jurisprudence en la matière. Dès lors que l’un de nos collègues pose une question relative à l’application de l’article 40, il lui est toujours apporté une réponse. Je persiste donc à penser que cet amendement est en partie satisfait.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 63 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 64 rectifié, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la première phrase de l’alinéa 7 de l’article 45 du règlement, sont insérés deux phrases ainsi rédigées : « Si l’irrecevabilité est constatée, elle doit être présentée à l’auteur de l’amendement par courrier comportant une argumentation. Cette irrecevabilité est susceptible de recours. »

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Nous proposons qu’un courrier soit adressé à l’auteur d’un amendement déclaré irrecevable au titre de l’article 41 de la Constitution, qui détermine la répartition entre les domaines réglementaire et législatif.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Le président du Sénat statue sur les décisions d’irrecevabilité au titre de l’article 41 de la Constitution, relatif au respect des domaines respectifs du règlement et de la loi. Je ne vois pas comment rendre cette réalité compatible avec les dispositions de cet amendement.

Par conséquent, la commission y est défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 64 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 66 rectifié, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la troisième phrase de l’alinéa 2 de l’article 46 bis du règlement, les mots : « et de rédaction globale de l’article » sont supprimés.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Il existe plusieurs moyens de réduire le temps de parole en séance publique – nous venons d’en voir quelques-uns.

Il est possible d’augmenter le nombre de déclarations d’irrecevabilité, ce qui n’est pas réalisable sur une proposition de résolution relative au règlement.

Il est aussi possible d’agir sur l’organisation du débat d’amendements. Là encore, au fil des années, un certain nombre de changements sont intervenus.

La discussion des amendements de suppression d’un article se fait dorénavant à part, de même que pour les amendements de réécriture globale. Ainsi, s’ils sont adoptés, tous les autres amendements déposés sur l’article tombent sans même être présentés.

Une nouvelle fois, je renvoie chacun à ses propres expériences en la matière. C’est une arme puissante aux mains de la majorité, quelle qu’elle soit. Je n’oserai rappeler la facilité avec laquelle nos débats ont été significativement accélérés au moment de la réforme des retraites.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Comment se passe la discussion d’un article ? Nous examinons d’abord les amendements de suppression, ce qui est logique, puis ceux de rédaction globale et enfin les autres, le cas échéant. Si les premiers sont adoptés, de facto tous les amendements restant en discussion tombent.

Cette procédure donne une certaine clarté aux débats qu’une discussion commune de l’ensemble des amendements – de suppression, de rédaction globale et de ceux qui modifient l’article – ne permettrait pas. Cette méthode doit donc être préservée.

Je ne sais pas quand cette modification a été mise en œuvre, mais j’y vois plus une recherche de clarté qu’une volonté de malice : avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Lors de l’examen de la loi de finances pour 2025, nous avons eu un problème : un amendement de la présidente Vermeillet s’est trouvé mal placé. Alors qu’il était question de faire apparaître sur le dérouleur télévisé les amendements susceptibles de faire tomber tous les autres, nous ne disposions pas de document papier pour vérifier leur exactitude.

Il a fallu une suspension de séance pour ce faire et remettre ainsi l’amendement Vermeillet à la place idoine… Il s’agit donc d’un vrai problème qu’il nous faudra bien régler.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 66 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 6
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Article 8

Article 7

L’article 22 ter du Règlement est ainsi modifié :

1° A (nouveau) L’alinéa 1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cette demande est transmise au Président du Sénat. » ;

1° (Supprimé)

2° L’alinéa 2 bis est ainsi rédigé :

« 2 bis. – Lorsque sa recevabilité a été constatée, la demande est aussitôt affichée et notifiée au Gouvernement et aux présidents de groupes et de commissions. Elle est considérée comme adoptée si, dans un délai expirant à minuit le lendemain de cette publication, le Président du Sénat n’a été saisi d’aucune opposition par le président d’une commission permanente ou le président d’un groupe. Le Président en informe le Sénat lors de la plus prochaine séance. » ;

3° (nouveau) L’alinéa 3 est ainsi rédigé :

« 3. – Si une opposition a été formulée dans les conditions prévues à l’alinéa 2 bis, un débat sur la demande est inscrit d’office à la suite de l’ordre du jour du premier jour de séance suivant l’annonce faite au Sénat de l’opposition. Au cours de ce débat, peuvent seuls prendre la parole le Gouvernement, l’auteur de l’opposition et le président de la commission qui a présenté la demande. – (Adopté.)

Article 7
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Après l’article 8

Article 8

Le Règlement est ainsi modifié :

1° L’article 28 est ainsi modifié :

a) À l’alinéa 1, le mot : « reproduites » est remplacé par le mot : « redéposées » ;

b) L’alinéa 2 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les propositions de loi et les propositions de résolution dont tous les signataires ont cessé d’exercer leur mandat de sénateur deviennent caduques. » ;

2° L’article 65 est ainsi modifié :

a) L’alinéa 2 est ainsi modifié :

– à la première phrase, le mot : « votée » est remplacé par le mot : « adoptée » et, après le mot : « définitive », sont insérés les mots : « ou toute proposition de loi transmise par l’Assemblée nationale et rejetée par le Sénat » ;

– la dernière phrase est supprimée ;

b) L’alinéa 3 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque le Sénat est saisi d’un projet ou une proposition de loi rejeté par l’Assemblée nationale et qu’il le rejette, le projet ou la proposition est définitivement rejeté. »

Mme la présidente. L’amendement n° 23, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer les mots :

tous les signataires ont cessé d’exercer leur

par les mots :

le premier signataire a cessé d’exercer son

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. L’article 8 prévoit que les propositions de loi et les propositions de résolution dont tous les signataires ont cessé d’exercer leur mandat deviennent caduques.

L’objet de cet amendement de simplification est qu’il en aille de même dès lors que le premier signataire n’est plus sénateur : c’est une mesure de bon sens.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Rendre caduque une proposition de loi au motif que son premier signataire n’exerce plus son mandat, ce n’est pas de la simplification : c’est une atteinte au droit d’initiative parlementaire, le cas visé étant celui où d’autres signataires se sont associés au texte déposé.

J’émets donc, au nom de la commission, un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je vais le retirer, mais l’hypothèse dont il est question – tous les cosignataires perdent leur mandat en même temps –, c’est comme un strike au bowling ! (Sourires.)

Mme la présidente. L’amendement n° 23 est retiré.

Je mets aux voix l’article 8.

(Larticle 8 est adopté.)

Article 8
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Article 9

Après l’article 8

Mme la présidente. L’amendement n° 26, présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 8

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 29 du règlement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« … – La réunion de la Conférence des Présidents fait l’objet d’un compte-rendu publié sur le site internet du Sénat. »

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Cet amendement vise simplement à préciser que les comptes rendus des réunions de la conférence des présidents sont rendus publics.

Il y va de la bonne information des citoyens. Les comptes rendus du Bureau, eux, sont mis en ligne ; on ne comprend guère que tel ne soit pas le cas pour la conférence des présidents, organe politique, dont les travaux méritent d’être publiés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il me paraît difficile d’en décider au détour d’un amendement. (Mme Marie-Pierre de La Gontrie ironise.)

Précisément, les réunions de la conférence des présidents ne sont pas publiques. Les discussions qui ont lieu en son sein n’ont donc pas vocation à faire l’objet d’un compte rendu publié. Les résultats des travaux de cette instance, eux, sont bel et bien rendus publics, sous la forme d’un ordre du jour.

Faute d’un ample consensus sur ce sujet, nous devons nous en tenir là : avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 26.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 8
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Après l’article 9

Article 9

Le Règlement est ainsi modifié :

1° À l’alinéa 7 de l’article 29 bis, après le mot : « demande », sont insérés les mots : « du Président du Sénat, » ;

2° Au début de l’alinéa 4 de l’article 29 ter, sont ajoutés les mots : « Sauf s’il a été demandé par le Président du Sénat, » – (Adopté.)

Article 9
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Article 10

Après l’article 9

Mme la présidente. L’amendement n° 11, présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’alinéa 5 de l’article 29 bis du règlement est complété par une phrase ainsi rédigée : « Par dérogation à l’article 32, alinéa 3, la durée globale du temps dont disposent les groupes d’opposition et groupes minoritaires est calculée selon le principe suivant : un jour de séance équivaut à la somme des heures correspondant aux séances du matin, de l’après-midi et du soir. »

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Il s’agit toujours de nous montrer constructifs en traitant, en l’espèce, la question du calcul du temps dévolu aux espaces réservés.

Ces derniers sont attribués par tranches de quatre heures, la référence étant le « jour de séance », mais sans que le soir soit pris en compte.

L’objet de cet amendement est donc d’inclure le soir dans le calcul du temps alloué aux espaces réservés.

Pourquoi le temps des niches est-il calculé uniquement par référence à la journée, sans prendre en compte le soir, qui peut durer longtemps, comme nous le constatons aujourd’hui ?

Mme la rapporteure, en commission, indiquait qu’« il est assez logique que la majorité dispose d’une part prépondérante de l’ordre du jour et non l’opposition », laissant entendre qu’avec le nouveau mode de calcul proposé la minorité disposerait de davantage de temps que la majorité. Madame la rapporteure, je n’ose croire que tel est votre raisonnement ; en tout état de cause, j’attends une démonstration de votre part.

À défaut d’accepter cet amendement, puisque vous n’êtes pas d’humeur partageuse depuis le début de l’examen de ce texte, prenez au moins l’engagement de faire réaliser une simulation du temps qui serait alloué aux groupes minoritaires et d’opposition si d’aventure le soir était pris en compte dans le calcul. À votre bon cœur !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je ne suis pas d’humeur partageuse, vous n’êtes pas d’humeur consensuelle : que voulez-vous, c’est ainsi.

Jamais je n’ai prétendu que soudain, si votre proposition était retenue, l’opposition disposerait d’un temps supérieur à celui dont bénéficie la majorité. Je dis seulement – et je maintiens – qu’une majorité, quelle qu’elle soit, doit disposer d’une part prépondérante de l’ordre du jour.

Or la façon dont vous souhaitez que nous calculions désormais la durée des niches, outre qu’elle n’est pas très cohérente avec ce que dit le règlement de la répartition des jours de séance, accroîtrait d’une façon quelque peu anormale le poids relatif desdites niches.

Je vous demande donc, mes chers collègues, de rejeter cet amendement, comme nous l’avons déjà fait en 2021, s’agissant d’une proposition dont nous sommes saisis de façon récurrente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 11.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 9
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Après l’article 10

Article 10

À l’alinéa 10 de l’article 29 ter du Règlement, après la seconde occurrence du mot : « commission », sont insérés les mots : « mixte paritaire ou, à défaut, un représentant de la commission » – (Adopté.)

Article 10
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Article 11

Après l’article 10

Mme la présidente. L’amendement n° 32, présenté par Mme M. Carrère, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme Conte Jaubert, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et MM. Roux et Ruel, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l’alinéa 3 de l’article 33 du règlement, après le mot : « personnelle » sont insérés les mots : « , toute atteinte à la laïcité, ».

La parole est à M. Michel Masset.

M. Michel Masset. La laïcité est une valeur à laquelle le RDSE, ancien grand groupe du Sénat, est attaché. Inscrite dans notre Constitution, elle est au fondement de notre régime républicain.

Dans la vie civile, on observe de plus en plus d’atteintes à la laïcité. Le Parlement doit rester à l’abri de cette dérive. Aussi notre règlement doit-il être plus ferme, afin que les sénateurs respectent scrupuleusement ce principe.

La laïcité est évoquée au sein du chapitre XXV du règlement du Sénat, consacré aux obligations déontologiques des sénateurs. Nous proposons qu’il y soit fait référence au sein du chapitre XII, consacré à la tenue des séances.

Il s’agit non pas de porter atteinte à la liberté d’expression, mais de mieux fonder la possibilité pour le président de séance d’interrompre un éventuel débordement, tel que la lecture littérale et inappropriée d’un texte religieux.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Le règlement, je le rappelle, prévoit déjà que les sénateurs sont tenus d’exercer leur mandat dans le respect du principe de laïcité.

J’ajoute une précision d’importance : lorsque le règlement du Sénat a été soumis au Conseil constitutionnel, celui-ci a émis une réserve d’interprétation, considérant que la laïcité ne saurait avoir pour effet ni pour objet de porter atteinte à la liberté d’opinion et de vote des sénateurs. C’est en réalité le prosélytisme religieux qui peut et doit être interdit dans une assemblée.

La portée juridique d’une interdiction de « toute atteinte à la laïcité » en séance publique paraît assez peu maîtrisée. Je propose donc que nous en restions au règlement tel qu’il est actuellement rédigé, qui nous intime d’exercer notre mandat dans le respect du principe de laïcité : avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 32.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 10
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Article 12

Article 11

Le Règlement est ainsi modifié :

1° À la fin de la première phrase de l’alinéa 5 de l’article 33, les mots : « dépouillent les scrutins » sont remplacés par les mots : « dépouillent ou contrôlent les scrutins par bulletins » ;

2° L’article 56 est ainsi modifié :

a) L’alinéa 1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les résultats d’un scrutin par bulletins sont contrôlés par les secrétaires. » ;

b) À l’alinéa 3, les mots : « constaté par les secrétaires et » sont supprimés – (Adopté.)

Article 11
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Article 13

Article 12

À la première phrase de l’alinéa 5 de l’article 36 du Règlement, les mots : « à la tribune ou » sont supprimés.

Mme la présidente. L’amendement n° 57, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. S’il n’y a pas de raison d’inscrire dans le règlement une référence à ce qui se fait déjà, je ne vois pas non plus pourquoi il faudrait y supprimer la référence à ce qui ne se fait pas.

Certes, personne ici n’a d’exemple d’un rappel au règlement à la tribune. Mais nous ne savons pas de quoi demain sera fait : je ne le souhaite pas, et je ne doute pas que nous ferons tout, collectivement, pour que cela n’arrive pas, mais nous pourrions être un certain nombre de présidents de groupe, en 2027, à devoir faire des rappels au règlement en arborant une forme de solennité que seule permet l’intervention à la tribune.

En tout état de cause, je ne vois pas pourquoi on supprimerait une disposition qui ne dérange aujourd’hui personne.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je ne pense pas trahir l’intention de l’auteure de la proposition de résolution en disant que le toilettage du règlement consiste précisément à supprimer ce qui ne sert à personne.

Cela étant, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement de Mme Cukierman.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 57.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 12 est supprimé.

M. Didier Marie. C’est le premier amendement adopté !

Mme Cécile Cukierman. Allons-y pour un premier rappel au règlement à la tribune ! (Sourires.)

Article 12
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Article 14

Article 13

À l’alinéa 2 de l’article 38 bis du Règlement, le mot : « analytique » est remplacé par le mot : « abrégé » – (Adopté.)

Article 13
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Article 15

Article 14

L’article 38 bis du Règlement est ainsi modifié :

1° Les alinéas 4 et 5 sont ainsi rédigés :

« 4. – Il devient définitif si le Président n’a été saisi par écrit d’aucune opposition ou d’aucune demande de rectification vingt-quatre heures après sa publication au Journal officiel. Les contestations sont soumises au Bureau, qui statue sur leur prise en considération lors de sa plus prochaine réunion après que l’auteur a été entendu par le Bureau.

« 5. – Si la contestation est prise en considération par le Bureau, la rectification du procès-verbal est soumise au Sénat par le Président au début de la première séance suivant la décision du Bureau au Sénat qui statue sans débat. » ;

2° L’alinéa 6 est abrogé.

Mme la présidente. L’amendement n° 70, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Gontard et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Nous souhaitons supprimer cet article dit de simplification dont nous ne saisissons pas vraiment la portée simplificatrice…

La procédure proposée en cas de contestation du procès-verbal de la séance précédente pose deux problèmes.

D’une part, alors que, selon la procédure actuelle, le Bureau se réunit immédiatement après l’ouverture de la séance suivant celle dont le procès-verbal donne lieu à contestation, la nouvelle procédure prévoit d’attendre la prochaine réunion du Bureau. Ainsi une contestation pourrait-elle rester en suspens pendant plusieurs jours, voire plusieurs semaines.

D’autre part, la nouvelle procédure laisse au Bureau la faculté de refuser de soumettre à la séance publique une demande de rectification du procès-verbal, quand la procédure actuelle prévoit que le Sénat se prononce systématiquement sur la décision du Bureau.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Mon cher collègue, vous dites ne pas saisir la portée simplificatrice de l’article dont vous demandez la suppression.

La voici : s’agissant de contestations qui peuvent arriver, mais qui en réalité ne se produisent jamais, soit l’on prévoit qu’il faut réunir le Bureau en urgence, soit l’on acte qu’il est sensiblement plus simple d’attendre la prochaine réunion du Bureau.

Voilà pourquoi cet article 14 paraît tout à fait justifié. Voilà pourquoi aussi j’émets, au nom de la commission, un avis défavorable sur cet amendement de suppression.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 70.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 58, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3, seconde phrase

Rédiger ainsi cette phrase :

Les contestations sont soumises au Bureau qui examine immédiatement la proposition de rectification, de modification après avoir entendu son auteur.

II. – Alinéa 4

Rédiger ainsi cet alinéa :

« 5. – À la reprise de la séance qui suit la réunion du Bureau, le président fait connaître la décision du Bureau et soumet le procès-verbal au Sénat qui statue sans débat. » ;

III. – Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Réunir le Bureau du Sénat pour délibérer d’une contestation du procès-verbal est évidemment une bonne chose, puisqu’il s’agit d’une instance collégiale et pluraliste.

En revanche, renvoyer à plus tard la délibération du Sénat tout entier nous apparaît étonnant : nous considérons qu’il faut conserver la spontanéité des décisions prises en séance publique.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Au bénéfice des arguments déjà exposés à propos de l’amendement précédent, l’avis de la commission est défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 58.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 14.

(Larticle 14 est adopté.)

Article 14
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Article 16

Article 15

Le Règlement est ainsi modifié :

1° À l’alinéa 1 et à la seconde phrase de l’alinéa 5 de l’article 39, les mots : « alinéa 3 » sont remplacés par les mots : « alinéa 2 » ;

2° À l’alinéa 4 de l’article 45, les mots : « l’article L.O. 111-3 » sont remplacés par les mots : « la section 1 du chapitre I bis du titre Ier du livre Ier » ;

3° Au 3° de l’article 59, les mots : « (troisième partie) » sont supprimés – (Adopté.)

Article 15
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Après l’article 16

Article 16

L’alinéa 4 de l’article 42 du Règlement est ainsi modifié :

1° À la deuxième phrase, les mots : « en séance publique » sont remplacés par le mot : « générale » ;

2° À la fin de la troisième phrase, les mots : « avant la présentation du rapport de la commission saisie au fond » sont remplacés par les mots : « après les rapporteurs des commissions compétentes » ;

3° La dernière phrase est supprimée.

Mme la présidente. L’amendement n° 59, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Chacun peut avoir son avis sur le Conseil économique, social et environnemental (Cese) ; loin de moi, à cette heure tardive, l’idée d’ouvrir ce débat.

De là à ne plus prévoir que le Cese puisse intervenir devant le Sénat, je trouve cela un peu excessif : c’est se priver d’une ressource qui peut être utile. À l’heure où, sous prétexte de simplification, les députés suppriment à tour de bras, j’y verrais un mauvais signal.

Je n’en fais pas non plus une affaire d’État. Cela dit, dans un pays dont le Premier ministre lance des « conclaves » pour relancer le dialogue social et prétend respecter les partenaires sociaux, une telle mesure inscrite noir sur blanc dans notre règlement pourrait donner le sentiment, à qui lirait le compte rendu de nos débats, que le Sénat verse dans l’autosatisfaction.

Nous sommes certes des gens exceptionnels,…

M. Antoine Lefèvre. Ce n’est pas faux… (Sourires.)

Mme Cécile Cukierman. … mais il pourrait être intéressant, à l’occasion, que nous soyons éclairés par l’avis du Cese…

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il est curieux d’observer comme on finit par s’attacher à des choses qui n’arrivent jamais et par vouloir les préserver.

Il ne s’agit pas de supprimer la possibilité pour le Cese d’intervenir dans l’hémicycle. Une telle possibilité existe bel et bien.

Dans quel cas le Cese a-t-il accès à l’hémicycle ? Pour exposer devant le Sénat l’avis général du Conseil sur un texte qui lui est soumis. Cela s’est passé une fois en quinze ans : un représentant du Cese est venu en séance publique et a donné, pendant la discussion générale, un avis lui-même général sur le texte en discussion, après quoi il a quitté l’hémicycle.

Ce qui est proposé à l’article 16, c’est d’inscrire sous cette forme, dans le règlement, la procédure prévue à cet effet : le Cese a vocation à donner son avis non pas sur chaque amendement, mais dans le cadre de la discussion générale, comme cela se fait – assez rarement, je le redis – dans la pratique. La dernière fois – c’était en 2017 –, nous avions procédé ainsi et cela, me semble-t-il, n’avait pas ému grand monde.

Cela étant, comme le dit notre collègue Cécile Cukierman, ce n’est pas une affaire d’État : la commission s’en remet donc à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 59.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 13 est présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 71 est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Gontard et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 2 et 4

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Éric Kerrouche, pour présenter l’amendement n° 13.

M. Éric Kerrouche. Dans le même esprit que ce qui vient d’être exposé, nous proposons de maintenir la possibilité pour un représentant du Cese de s’exprimer devant le Sénat sur un texte dont il est saisi.

J’ai compris votre argumentaire, madame la rapporteure, mais j’ai du mal à suivre la logique qui est la vôtre au gré des différents avis que vous émettez.

Vous nous dites que cet article vise uniquement à mettre notre règlement en cohérence avec la pratique. Si tel est bien le cas, alors il fallait tout à l’heure mettre le règlement en cohérence avec la pratique pour ce qui est de l’élection à la présidence de la commission des finances. Il me semble que vos arguments sont à géométrie variable…

Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus, pour présenter l’amendement n° 71.

M. Thomas Dossus. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il ne faut pas confondre les cas où il s’agit de mettre le règlement en cohérence avec la pratique et ceux où le règlement ne renvoie tout simplement à aucune pratique.

On parle ici de choses qui ne se passent jamais ou qui se produisent une fois en quinze ans. Dans ce genre de cas, j’estime que l’on peut sans préjudice modifier la procédure applicable.

Avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 13 et 71.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 16.

(Larticle 16 est adopté.)

Article 16
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Article 17

Après l’article 16

Mme la présidente. L’amendement n° 60, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 16

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’alinéa 5 de l’article 29 ter du règlement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La demande par deux présidents de groupe d’attribution de deux heures de discussion générale des textes soumis au Sénat et pour des textes inscrits à l’ordre du jour est de droit. »

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Afin de renforcer l’intelligence de nos débats, il s’agit de porter, à la demande de deux présidents de groupe, d’une heure à deux heures le temps consacré à la discussion générale. (Exclamations ironiques sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Vous proposez qu’il devienne possible de porter à deux heures la durée de la discussion générale…

Je ne suis pas certaine qu’il soit opportun d’allonger la discussion générale, qui occupe déjà une part assez importante, me semble-t-il, de la séance publique. En pratique, lorsque les groupes le demandent en conférence des présidents, un allongement du temps de discussion générale est déjà accordé pour les textes dont on peut estimer qu’ils revêtent une importance particulière : avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. La conférence des présidents n’est pas une instance qui se réunit d’un claquement de doigts.

En outre, elle n’est pas exempte de rapports de force et le fait majoritaire y produit ses effets… Non, aujourd’hui, un tel allongement du temps de discussion générale ne peut être demandé ni débattu en conférence des présidents !

Soit on autorise un tel aménagement, dès lors qu’il est demandé par deux présidents de groupe, comme c’est le cas pour d’autres dispositions, soit on ne l’autorise pas. Mais il n’est pas vrai que ma proposition soit satisfaite.

Par ailleurs, libre à vous de vous offusquer devant pareil amendement, mes chers collègues. Je rappelle simplement que, lorsque le temps de parole sur les articles était fixé à cinq minutes par orateur, il y avait beaucoup moins d’amendements et nous ne siégions ni plus ni moins qu’aujourd’hui.

On peut continuer de croire qu’allonger le temps de la discussion générale serait nécessairement allonger le temps des débats, mais il y a une chose qui ne peut être supprimée : c’est le droit d’amendement.

Ce qui ne peut pas être dit à tel moment du débat finira donc par l’être à tel autre moment. (Mme Nathalie Goulet hoche la tête en signe dapprobation.) Heureusement, d’ailleurs, car c’est ce qui fait la force et la richesse d’un système démocratique : rendre impossible la négation en son sein des oppositions ! Vous pouvez trouver cela exaspérant, vous pouvez trouver qu’il est tard et, du reste, nous aimerions tous pouvoir parler moins, mais une chose reste certaine : la majorité sera toujours majoritaire au moment de voter et l’opposition aura toujours le droit de s’exprimer.

Mes chers collègues, nous vous soumettons cette proposition. Qu’il ne soit pas opportun de l’adopter, je n’aurai aucun problème à l’admettre et ce ne sera pas si grave. Mais réfléchissez bien : lorsque les orateurs pouvaient s’exprimer cinq minutes sur chaque article – le groupe Les Républicains était déjà majoritaire –, cela réglait bien des problèmes : il y avait moins d’amendements identiques présentés par plusieurs sénateurs expliquant chacun la même chose ! Chaque sénateur pouvait porter la voix de son département et expliquer sa position.

M. Pierre Ouzoulias. Tout à fait !

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour explication de vote.

M. Olivier Paccaud. Je me permets simplement de rappeler à notre collègue et présidente de groupe Cécile Cukierman que chacun d’entre nous a la possibilité, sur chaque article et avant la discussion des amendements, de prendre la parole pour compléter ce qui a été dit en discussion générale. Nous le faisons régulièrement.

Mme Cécile Cukierman. Avant, c’était cinq minutes !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 60.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 35, présenté par Mme M. Carrère, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme Conte Jaubert, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et MM. Roux et Ruel, est ainsi libellé :

Après l’article 16

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’alinéa 8 de l’article 42 du règlement est complété une phrase ainsi rédigée : « La lecture des conclusions d’une commission mixte paritaire ne peut pas avoir lieu moins d’une semaine après la réunion de la commission mixte paritaire concernée. ».

La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Cet amendement vise à faciliter les conditions d’examen des projets ou propositions de loi au cours de la navette. Il arrive régulièrement que la lecture en séance des conclusions d’une commission mixte paritaire (CMP) intervienne deux à trois jours seulement après la réunion de la CMP, et même parfois le lendemain.

Cette organisation n’est pas la plus propice à la clarté des débats, dans la mesure où les sénateurs n’ont pas le temps matériel de prendre connaissance des modifications intervenues en CMP.

Comme nous l’avons souligné en présentant les amendements nos 34 et 36, cette situation est particulièrement préjudiciable aux groupes qui ne disposent pas d’un siège en CMP ni ne bénéficient du canal « rapporteur ». En attendant la publication du rapport de la commission mixte paritaire, il faut bien souvent s’en remettre à la presse pour avoir des informations sur des textes de toute première importance. C’est un comble !

Nous proposons en conséquence que soit respecté un délai minimal d’une semaine entre la réunion de la commission mixte paritaire et la lecture de ses conclusions.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Vous proposez un délai d’une semaine entre la réunion de la CMP et la lecture de ses conclusions.

J’entends vos arguments, mais il arrive qu’il faille aller plus vite et, surtout, il arrive que le Gouvernement souhaite aller plus vite, ce qui est parfaitement son droit, consacré à l’article 45 de la Constitution. Je ne vois pas que l’on s’y oppose par le règlement du Sénat : avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 35.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 14, présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 16

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l’alinéa 9 de l’article 42 du règlement, les mots : « et au Gouvernement » sont remplacés par les mots : « , au Gouvernement et à un orateur contre ».

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Actuellement, lorsque le Gouvernement décide de recourir au vote bloqué, qui contraint le Sénat à se prononcer par un seul vote sur tout ou partie du texte en discussion, ne peuvent intervenir sur chaque amendement qu’un orateur pour, le rapporteur et le Gouvernement.

Autrement dit, depuis 2015, il n’est plus permis à un orateur d’opinion contraire d’expliquer sa position sur chaque amendement, ce qui me paraît être une régression : les sénateurs ne peuvent plus émettre une opinion contraire que lors des explications de vote sur l’ensemble du texte ou des dispositions faisant l’objet du vote bloqué. Ainsi devient-il impossible, en deux minutes, de présenter son point de vue sur l’ensemble des mesures concernées.

Cette situation porte atteinte, selon nous, aux droits des parlementaires, raison pour laquelle nous vous proposons d’y remédier.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. On a recours au vote bloqué quand des amendements sont déposés en nombre au seul motif – disons-le clairement – de faire obstruction. Dès lors, permettre à chaque sénateur de s’exprimer sur chaque amendement, c’est permettre l’obstruction.

La logique du vote bloqué est précisément d’y parer : avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 14.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 16
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Après l’article 17

Article 17

Le Règlement est ainsi modifié :

1° Après la première phrase de l’alinéa 12 de l’article 42, est insérée une phrase ainsi rédigée : « La question préalable, les motions préjudicielles ou incidentes et les motions tendant au renvoi en commission ne sont pas recevables. » ;

2° L’article 50 bis est complété par un alinéa 6 ainsi rédigé :

« 6. – Aucune motion n’est recevable sur les propositions de résolution déposées en application de l’article 34-1 de la Constitution. »

Mme la présidente. L’amendement n° 61, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. J’ai souligné en discussion générale le travail accompli par Sylvie Vermeillet, vice-présidente du Sénat et auteure de la proposition de résolution, et par Muriel Jourda, rapporteure et présidente de la commission des lois, pour tenir compte des remarques des différents groupes dans la phase d’élaboration de ce texte.

Cependant, certaines dispositions continuent de nous étonner : ainsi est-il prévu de supprimer la faculté de déposer des motions de procédure sur une proposition de résolution et, pour ce qui est des conclusions d’une CMP, de limiter cette faculté aux seules exceptions d’irrecevabilité constitutionnelle.

Combien de fois de telles procédures ont-elles été utilisées ? Comme elles ne le sont pas régulièrement, pourquoi vouloir les supprimer ? Je rappelle que notre objectif est de renforcer les droits des groupes et de simplifier le règlement, non d’en réduire le nombre de pages !

Je le dis d’autant plus que se développe fortement, ces derniers temps, une nouvelle pratique parlementaire, qui consiste à ajouter en CMP des dispositions qui n’ont pas été débattues par les assemblées. Ce fut le cas, très récemment, sur la proposition de loi visant à restreindre les conditions d’application du droit du sol à Mayotte.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Permettez-moi, mes chers collègues, un petit rappel sur les motions qui peuvent être déposées : la question préalable, dont l’objet est de rejeter l’ensemble du texte ; les motions préjudicielles ou incidentes, dont l’objet est de subordonner un débat à une ou plusieurs conditions en rapport avec le texte en discussion ; les motions tendant au renvoi à la commission ; l’exception d’irrecevabilité, dont l’objet est de faire reconnaître que le texte en discussion est contraire à une disposition constitutionnelle.

De quoi parlons-nous ? De la possibilité d’opposer de telles motions soit aux conclusions d’une commission mixte paritaire soit à une proposition de résolution déposée sur le fondement de l’article 34-1 de la Constitution.

Or, chacun le sait ici, quand nous sommes saisis des conclusions d’une CMP, nous ne pouvons qu’accepter ou rejeter le texte – il n’y a pas d’autre possibilité – par un vote unique. Sur les propositions de résolution déposées en application de l’article 34-1 de la Constitution, de la même façon, le Sénat a vocation à se prononcer par un vote unique.

La seule motion qui ait du sens sur de tels textes, c’est donc l’exception d’irrecevabilité, dont l’objet, je l’ai dit, est de faire reconnaître que le texte en discussion est inconstitutionnel. En l’espèce, les autres motions, que j’ai énumérées, n’ont aucun sens. Cette règle est au demeurant, dans la pratique, de tradition constante : la seule motion qui peut être discutée est bien l’exception d’irrecevabilité.

Il est donc proposé de mettre notre règlement en conformité avec ce qui a du sens du point de vue de la procédure : restons-en là.

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 61.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 69, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Gontard et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Dans le même esprit, nous proposons que les questions préalables, les motions préjudicielles ou incidentes et les motions tendant au renvoi à la commission continuent d’être recevables dans le cadre de la lecture des conclusions d’une commission mixte paritaire.

Certains textes, faut-il le rappeler, ont une trajectoire parlementaire assez complexe.

Prenons le projet de loi de simplification de la vie économique, dont l’examen en séance publique commence demain à l’Assemblée nationale – un festival d’amendements fourre-tout attend nos collègues députés. Il a commencé d’être étudié au Sénat il y a bientôt un an. En un an, nous avons vécu une dissolution, une nouvelle Assemblée nationale a été élue et deux gouvernements sont tombés. Il est donc à craindre que le texte qui sortira de la chambre basse ne soit plus du tout conforme à l’esprit dans lequel nous l’avons examiné au printemps dernier. Autrement dit, si une commission mixte paritaire parvient à se mettre d’accord sur ce projet de loi, le texte qui nous reviendra sera d’une tout autre nature que celui dont nous avons débattu.

Aussi avons-nous besoin de pouvoir déposer des motions pour faire droit à ce genre de circonstances et, le cas échéant, faire tomber le texte dont nous sommes saisis.

Mme la présidente. L’amendement n° 15, présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

La question préalable, les motions préjudicielles ou incidentes et les

par le mot :

Les

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Voici un léger complément aux deux amendements qui viennent d’être présentés : pour ce qui est des lectures de conclusions de CMP, nous admettons qu’une motion de renvoi à la commission n’a pas de pertinence ; en revanche, il faut conserver la possibilité de déposer une question préalable ou des motions préjudicielles ou incidentes.

La modification inscrite à l’article 17 restreindrait inutilement les droits des parlementaires, tout cela pour gagner dix minutes : c’est évitable.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. À même esprit, comme le disait M. Dossus, même réponse : avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 69.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 15.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 17.

(Larticle 17 est adopté.)

Article 17
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Article 17 bis (nouveau)

Après l’article 17

Mme la présidente. L’amendement n° 39, présenté par Mme M. Carrère, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme Conte Jaubert, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et MM. Roux et Ruel, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l’alinéa 3 de l’article 23 bis du règlement, après les mots : « aux outre-mer », sont insérés les mots : « ainsi qu’à une mission temporaire dont il a été chargé par le Gouvernement ».

La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Le règlement du Sénat prévoit des dérogations aux modalités d’application de la retenue sur indemnité de fonction pour les sénateurs qui, chargés d’une mission officielle, ne peuvent être présents en séance.

Cependant, ces dérogations ne couvrent pas les sénateurs chargés par le Gouvernement d’une mission temporaire. Or ces missions, qui leur sont confiées par décret, s’inscrivent pleinement dans le travail parlementaire et contribuent à l’élaboration des politiques publiques. Elles exigent du temps, de l’engagement et des déplacements sur le terrain qui rendent souvent impossible la présence dans l’hémicycle et en commission.

Il est donc légitime d’étendre le champ de ces dérogations aux sénateurs chargés de telles missions. Cet amendement s’inscrit dans une démarche d’équité et de reconnaissance du travail parlementaire sous toutes ses formes.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Les parlementaires peuvent être en mission pour le Sénat, c’est normal.

En revanche, lorsqu’ils sont en mission pour le Gouvernement, ce n’est pas illégal, mais cela ne peut pas durer : je rappelle qu’au bout de six mois, si l’on reste au service du Gouvernement, on perd son mandat de sénateur.

Nous sommes le pouvoir législatif et non le pouvoir exécutif : il ne faut pas mélanger les deux !

La commission est défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 39.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 62, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’alinéa 10 de l’article 29 ter du règlement est complétée par une phrase ainsi rédigée : « La demande d’organisation par deux présidents de groupe d’une discussion générale d’une durée minimale de quarante-cinq minutes sur le texte élaboré par une commission mixte paritaire est de droit. »

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Nous proposons, dans le même esprit que précédemment, que l’organisation, à la demande de deux présidents de groupe, d’une discussion générale d’une durée minimale de quarante-cinq minutes sur le texte élaboré par une commission mixte paritaire soit de droit.

Je ne reviens pas sur les arguments que j’ai déjà exposés.

Les procédures d’urgence se multiplient, et avec elles les CMP. De surcroît, il arrive fréquemment, désormais, qu’un texte soit réécrit en CMP et qu’il finisse ainsi par contenir des dispositions qui n’auront pas été débattues par les assemblées.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Ma chère collègue, vous proposez qu’il devienne possible de porter à quarante-cinq minutes la durée minimale de discussion sur les conclusions d’une CMP.

La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Le problème que je soulève n’est pas dérisoire : il ne s’agit pas d’un quart d’heure de discussion en plus ou en moins.

Tout le monde a en tête la façon dont sont répartis les temps de parole. À trop réduire le temps consacré à débattre, on encourage les caricatures : contraindre les oppositions à ne s’exprimer que très brièvement, c’est les conduire à caricaturer les positions auxquelles elles s’opposent.

Si telle est la direction que vous souhaitez prendre, soit, mes chers collègues : pas de problème ! Il y a bien d’autres manières pour l’opposition de s’exprimer. Mais, je l’ai déjà dit, il fut un temps, qui n’est pas si ancien, où d’autres dispositions régissaient le temps de parole des sénateurs. Au bout du compte, nous ne siégions pas plus, il y avait moins d’amendements et nos débats étaient un peu plus constructifs.

On peut continuer dans cette voie, mais, à ce rythme, le Sénat ne pourra bientôt plus se gargariser d’être différent de l’autre chambre !

M. Antoine Lefèvre. Il y a de la marge…

Mme Cécile Cukierman. Et nous en serons réduits, les uns et les autres, à caricaturer les propos de nos collègues.

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je souhaite tout de même rappeler que, lors de la lecture des conclusions de CMP, tous les groupes ont le même temps de parole. Il ne s’agit pas de brider un groupe d’opposition en lui accordant une durée moindre pour s’exprimer.

Enfin, je me demande si le fait que les amendements étaient moins nombreux lorsque nous disposions de cinq minutes pour les présenter ne doit pas davantage au cumul des mandats, qui était alors encore possible. Mais ce n’est qu’une hypothèse…

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 62.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 12 rectifié, présenté par Mme de La Gontrie, M. Kerrouche, Mmes Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le règlement est ainsi modifié :

1° À l’alinéa 3 de l’article 38, la deuxième phrase est ainsi rédigée : « En cas de doute, l’épreuve est renouvelée. » ;

2° À l’article 53, les mots : « par assis et levé, » sont supprimés ;

3° À la première phrase de l’alinéa 3 de l’article 54, les mots : « par assis et levé » sont supprimés ;

4° L’alinéa 3 de l’article 56 bis est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les sénateurs dans l’incapacité de se rendre à la tribune prennent part au scrutin public depuis leur siège en remettant leur bulletin à un huissier. » ;

5° À l’alinéa 1 de l’article 96, les mots : « par assis et levé » sont remplacés par les mots : « à main levée ».

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Cet amendement vise à rayer du règlement du Sénat toute mesure discriminatoire et stigmatisante en supprimant la possibilité de vote « par assis et levé » lors des scrutins organisés dans l’hémicycle.

Comme vous le savez, mes chers collègues, une loi a été votée en 2005 pour permettre la plus grande accessibilité, en France, des personnes handicapées à l’ensemble des fonctions, notamment électives.

L’Assemblée nationale s’est saisie de ce sujet, sur l’initiative de Sébastien Peytavie et de Yaël Braun-Pivet, et a voté à l’unanimité la suppression du vote par « assis et levé » il y a quelques semaines.

Nous vous proposons aujourd’hui de faire de même. Il ne s’agit pas d’utiliser des périphrases pour désigner les élus en situation de handicap ; il s’agit simplement d’exclure du règlement du Sénat toute source de stigmatisation de ces personnes.

Mme la présidente. L’amendement n° 72 rectifié, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Gontard et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le règlement est ainsi modifié :

1° À l’alinéa 3 de l’article 38, les mots : « assis et levé » sont remplacés par les mots : « scrutin électronique des présents » ;

2° L’article 53 est ainsi modifié :

a) Les mots : « par assis et levé » sont remplacés par les mots : « au scrutin électronique des présents » ;

b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Le Bureau détermine les modalités de publication des résultats des scrutins électroniques des présents. » ;

3° À l’alinéa 3 de l’article 54, les mots : « par assis et levé » sont remplacés par les mots : « au scrutin électronique des présents » ;

4° À l’alinéa 1 de l’article 96, les mots : « par assis et levé » sont remplacés par les mots : « au scrutin électronique des présents ».

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Comme l’a été très bien dit ma collègue Marie-Pierre de La Gontrie, il s’agit véritablement d’œuvrer à l’égalité d’accès et à la dignité des élus handicapés.

Notre amendement est quasiment identique à celui qu’elle vient de présenter, à une petite distinction près : puisque le vote par assis et levé n’est pas un scrutin public, nous proposons de le remplacer par un vote électronique anonymisé.

Il importe de bien comprendre que c’est un amendement de modernité et de mise à jour de nos procédures aux fins d’améliorer l’accessibilité. Je pense que l’on peut, à cet effet, s’autoriser à entrer dans un nouveau monde en permettant le vote électronique par boîtier.

À mes yeux, ce dernier ne rigidifierait rien ; au contraire, il ferait avancer un peu nos procédures.

Mme la présidente. L’amendement n° 90, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 53 du règlement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 2. – À l’invitation du Président, le sénateur qui se trouve dans l’incapacité physique, permanente ou temporaire, d’exprimer son vote selon la modalité applicable fait connaître son vote par toute manifestation compatible avec cette incapacité. »

La parole est à Mme le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements nos 12 rectifié et 72 rectifié.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Mes chers collègues, je vous invite, sur le sujet, à préférer le dispositif de mon amendement à ceux des deux amendements qui viennent d’être présentés.

Je crois qu’il y a une confusion entre les buts et les moyens. Le but est de permettre à tout sénateur de voter, quels que soient son état physique, si je puis dire, et son éventuel handicap.

On peut, malheureusement, être durablement handicapé, mais il arrive aussi qu’on le soit temporairement. On ne peut pas supprimer chaque modalité de vote, parce que tel ou tel de nos collègues est susceptible d’avoir telle ou telle incapacité, y compris temporairement.

Je m’explique : si l’on supprime le vote par assis et levé en pensant à celui qui ne peut pas se lever, va-t-on supprimer le vote à main levée, parce que l’un de nos collègues peut avoir les bras immobilisés ? Cela peut toujours arriver, ce n’est pas une hypothèse d’école.

Je dois dire que je ne parviens pas à comprendre cette façon de procéder.

Il me semble que le but est de permettre le vote, pour lequel les moyens sont divers : il y a le vote par assis et levé, le vote à main levée, le scrutin à la tribune, le scrutin public, le scrutin en salle des conférences… Nous ne pouvons pas nous arrêter à l’incapacité de tel ou tel de nos collègues pour déterminer les moyens susceptibles d’être utilisés.

J’entends dire que le vote par assis et levé serait discriminant, parce que certains ne pourraient pas se lever.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je n’ai pas vocation à parler au nom des personnes en fauteuil roulant, mais il s’avère que, comme beaucoup d’entre vous, je travaille depuis des années, dans mon département – le Morbihan –, avec un élu en fauteuil : je ne l’ai jamais entendu demander que l’on renonce à faire quoi que ce soit au motif que lui-même ne pouvait pas le faire. Je ne l’ai jamais entendu dire qu’il était offensé parce que nous marchions quand lui ne pouvait plus marcher.

Je crois donc qu’il faut en revenir au but premier, à savoir permettre de déterminer la manière dont un sénateur peut exprimer son vote, alors qu’il est physiquement empêché de le faire compte tenu de la modalité de vote retenue à ce moment.

C’est la raison pour laquelle je propose, par cet amendement, qu’un sénateur empêché vote de la façon qui semblerait la plus appropriée, sur invitation du président de séance, lequel peut aussi l’interroger simplement sur le sens de son vote. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.

M. Éric Kerrouche. Je suis accablé, madame la rapporteure, par votre position. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Olivier Paccaud. Cela faisait longtemps !

M. Éric Kerrouche. Je vous le dis très tranquillement, si vous ne vous rendez pas compte que la procédure que vous proposez de mettre en œuvre créera une nouvelle stigmatisation, c’est assez triste. (Mêmes mouvements.)

Et je veux dire à ceux de nos collègues que notre amendement fait manifestement réagir…

M. Loïc Hervé. Ils en ont le droit !

M. Éric Kerrouche. … que je ne comprends pas en quoi notre proposition poserait un problème ici, alors que l’Assemblée nationale a voté à l’unanimité peu ou prou le même amendement. Où est la difficulté ?

On nous propose encore une fois une solution qui ne met pas tout le monde au même niveau, ce qui n’est pas tolérable. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)

M. Antoine Lefèvre. Et à la tribune ?

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Madame la rapporteure, je suis moi aussi quelque peu consterné.

Nous fêtons les 25 ans de la loi de 2005.

M. Olivier Paccaud. Les 20 ans !

M. Guillaume Gontard. Oui, les 20 ans.

Relisez cette loi : elle vise à l’inclusion et à l’accessibilité pour tous et pour toutes et à éviter toute stigmatisation. Or Mme la rapporteure nous propose tout l’inverse, puisqu’il s’agit de trouver une solution en fonction du handicap de la personne. C’est de fait stigmatisant : une telle démarche est à l’opposé de tout le processus qui a été mis en place pour aborder l’inclusion de manière globale et la rendre universelle.

Nous connaissons les problèmes d’accessibilité de notre hémicycle pour ceux qui auraient certains problèmes de santé.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Non ! Il est accessible !

M. Guillaume Gontard. Cela dit, des travaux sont en cours pour y remédier.

Nous proposons là quelque chose de très simple à mettre en place, à l’instar de ce qui a été voté à l’Assemblée nationale. Je pense que le Sénat devrait aussi être capable de le faire.

Il me paraît relativement simple, quand il y a un doute, de faire voter les sénateurs de manière anonyme au moyen des petites tablettes qui sont installées sur nos pupitres. Voilà ce que nous proposons et qui me paraît résoudre totalement le problème.

En revanche, la solution de Mme la rapporteure ne me semble absolument pas acceptable en ce qu’elle va à rebours de toute notion d’inclusion.

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

M. Pierre Ouzoulias. Je m’exprime en tant que vice-président du Sénat.

Lorsque l’on préside la séance, la procédure de vote par assis et levé est très utile pour réveiller l’hémicycle. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.) C’est ce qui permet, quand plus personne ne lève la main, de rappeler aux collègues qu’il faut tout de même faire un geste pour manifester un vote.

Par ailleurs, on peut utiliser une formule simple – je l’ai fait en tant que président de séance –, à savoir : « Que ceux qui peuvent se lever se lèvent. » C’est la formule donnée par le speaker lors des matchs de rugby – j’en suis un spectateur régulier –, notamment pour les hymnes nationaux.

Ceux qui ne peuvent pas se lever pourraient exprimer leur opinion par les moyens qu’ils souhaitent, en particulier par l’intermédiaire de l’huissier, qui peut transmettre leur vote au président. Je ne vois pas en quoi la formule « Que ceux qui peuvent se lever se lèvent » pourrait poser problème et être stigmatisante. Au reste, je ne crois pas que le rugby soit un sport extrêmement stigmatisant.

M. Pierre Ouzoulias. On peut donc rester en l’état et maintenir le vote par assis et levé, chacun comprenant bien que les personnes qui ne peuvent pas se lever ne se lèvent pas. (Vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Un sénateur du groupe Les Républicains. C’est du bon sens !

Mme la présidente. La parole est à M. Michaël Weber, pour explication de vote.

M. Michaël Weber. Je suis désolé, mais je ne crois pas que ce soit du bon sens ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Nous avons bien remarqué que, depuis le début de nos débats, Mme la rapporteure ne fait pas preuve d’une grande ouverture d’esprit quant aux amendements que nous avons déposés. (Exclamations sur les mêmes travées.)

C’est un fait incontestable !

M. Olivier Paccaud. Cessez de donner des leçons de morale, c’est insupportable !

M. Michaël Weber. Puisque vous m’interpellez directement et me parlez de morale, monsieur Paccaud, la moindre des choses serait de se tourner vers la personne qui a défendu l’amendement pour lui répondre, ce qui, je tiens à le préciser, n’est pas arrivé depuis le début de l’examen du texte.

M. Cédric Perrin. C’est stigmatisant…

M. Michaël Weber. J’en reviens au sujet de ces amendements.

Une unanimité s’est faite à l’Assemblée nationale pour supprimer le vote par assis et levé ; or je n’ai pas le sentiment que les députés et les sénateurs soient des êtres fondamentalement différents. Il me semble que l’on pourrait donner le même exemple aujourd’hui.

Franchement, madame la rapporteure, il me paraît un peu court que vous vous fondiez sur le cas d’une personne en situation de handicap que vous connaissez et qui ne se plaint pas de sa situation.

Pour ma part, je pense que la proposition que vous faites conduirait à une stigmatisation accrue. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Il faudra que la personne en situation de handicap fasse état de celui-ci pour pouvoir voter : ce n’est pas acceptable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote. (Marques dimpatience sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Marie-Pierre de La Gontrie garde un temps de silence, suscitant des exclamations sur les mêmes travées.)

M. Max Brisson. Cinéma !

Mme la présidente. Veuillez laisser l’oratrice s’exprimer, mes chers collègues !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Merci, madame la présidente.

Nous avons tous ici présidé des assemblées.

M. Cédric Perrin. Elle va nous donner des leçons !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Cher collègue, je ne suis pas certaine, au vu du succès de vos amendements dans cet hémicycle, que vous puissiez vous-même vous sentir autorisé à donner des leçons. Vous savez très bien de quoi je parle.

Nous avons tous ici présidé des assemblées – je le dis à Pierre Ouzoulias, que je remercie de son soutien. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Max Brisson. Intimidation !

Mme Agnès Evren. Il est pragmatique !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Lorsque nous avons une difficulté, nous pouvons demander que les mains soient levées de manière plus visible. D’ailleurs, je remercie Mme la présidente de l’avoir fait à deux reprises ce soir, plutôt que d’avoir demandé un vote par assis et levé.

Si vous refusez notre amendement, on saura, dans les jours qui viennent, que la droite sénatoriale ne veut pas supprimer une mesure discriminante de son règlement (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.), quand l’Assemblée nationale a su le faire à l’unanimité, ce qui, vous en conviendrez, est assez rare.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Je suis contente que vous soyez nombreux dans l’hémicycle ce soir : cela vous donne le courage de grommeler… Assumez ce que vous êtes en train de faire !

Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, pour explication de vote.

Mme Sylvie Vermeillet. J’écoute avec beaucoup d’attention et d’intérêt les débats de ce soir et je suis ravie des différentes contributions que j’ai pu entendre.

Cela étant dit, cette question n’a jamais été abordée au cours des auditions auxquelles j’ai procédé durant six mois : aucun groupe ne l’a soulevée.

M. Mathieu Darnaud. Ce sont des amendements de dernière minute !

Mme Sylvie Vermeillet. L’Assemblée nationale a voulu débattre du sujet. Soit, cela nous donne l’occasion d’en discuter.

Pour ce qui me concerne, je remercie Mme la rapporteure de son amendement.

Chers collègues, vous parlez beaucoup de stigmatisation ; mais ne stigmatisons pas le seul handicap qui consiste à ne pas pouvoir se lever. L’ouverture d’esprit dont nous devons faire preuve ici oblige à essayer de s’adapter à tout type de handicap, qu’il soit permanent ou temporaire, comme Mme la rapporteure l’a parfaitement souligné.

Une collègue de notre groupe ne pouvait temporairement plus utiliser ses bras à la suite d’un accident de ski. Dans sa situation, la fin du vote par assis et levé n’aurait eu aucun sens.

En réalité, aucun handicap n’empêche d’être parlementaire : nous pourrions, demain, avoir un collègue sourd ou muet. Il faudra bien que l’on s’adapte ; c’est tout le sens de l’amendement de Mme la rapporteure.

Ne pouvant fournir une réponse technique à tous les handicaps, trouvons une solution réactive et adaptable. C’est l’esprit de l’amendement et je crois que c’est la bonne mesure. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 12 rectifié.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 255 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 320
Pour l’adoption 114
Contre 206

Le Sénat n’a pas adopté.

Je mets aux voix l’amendement n° 72 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 90.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de résolution, après l’article 17.

L’amendement n° 33 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme Conte Jaubert, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et MM. Roux et Ruel, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’alinéa 5 de l’article 46 bis du règlement, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« 5 bis. – Par dérogation à l’alinéa 5, sous réserve des explications de vote, lorsque plusieurs membres d’un même groupe présentent des amendements identiques, le Président donne la parole à l’un des signataires du premier amendement appelé dans l’ordre de discussion. »

La parole est à M. Michel Masset.

M. Michel Masset. Lorsque plusieurs membres d’un même groupe présentent des amendements identiques, nous proposons que la parole soit donnée à un seul signataire.

Cet amendement vise à préserver la qualité de nos débats, tout en rationalisant nos discussions. En concentrant les interventions, nous gagnons en efficacité sans sacrifier la richesse des échanges.

Nous le savons tous, la qualité d’un débat se mesure non pas au nombre d’interventions, mais à leur pertinence. L’objectif n’est bien évidemment pas de restreindre le droit d’amendement, qui est constitutionnel, mais d’éviter les répétitions inutiles qui ralentissent le travail législatif et nuisent parfois à la clarté du débat.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je sais que les amendements sur la rationalisation du temps de parole ont un succès divers suivant les groupes.

La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Permettez que je m’étonne : il me semble que le droit d’amendement individuel est constitutionnel. Je m’excuse auprès de nos collègues du RDSE de la souligner, mais si nous adoptions cet amendement, nous remettrions en cause ce principe.

Je suis quelque peu surprise que la commission, d’habitude si prudente sur les questions constitutionnelles, n’émette pas un avis défavorable sur cet amendement.

Si j’étais impertinente, je dirais que l’objectif de rationaliser drastiquement le temps de parole paraît enfin au grand jour ! J’y insiste, il existe 50 000 autres façons de réduire le nombre d’amendements et de redonner du temps de parole. In fine, le nombre d’amendements est la seule chose qui restera…

Nombre de collectivités locales ont, par la voie de leur règlement intérieur, cherché à s’engager dans cette voie. Comme le montre la jurisprudence, abondante sur ce sujet, elles s’y sont cassé les dents.

Chaque membre d’un même groupe peut déposer le même amendement. C’est d’ailleurs une pratique assez peu courante, ce dont nous pouvons nous féliciter.

Quoi qu’il en soit, je pense que la commission aurait dû émettre un avis défavorable sur cet amendement au regard de son caractère inconstitutionnel.

Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je ne partage pas votre interprétation : cet amendement vise la prise de parole, non la possibilité de déposer des amendements, qui demeure intacte.

Mme Cécile Cukierman. Je ne suis pas d’accord !

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. C’est un fait, la commission a émis peu d’avis favorables depuis le début de la soirée, sinon quelques avis de sagesse sur des amendements qui visaient tous à restreindre le temps de parole.

Cela pose tout de même un problème. Il me semblait que, dans le travail, que je trouve assez remarquable, réalisé par Sylvie Vermeillet, toutes les tentatives pour réduire le droit d’amendement et le temps de parole avaient soigneusement été mises de côté, ce qui avait permis d’aboutir à un texte dont la base était assez consensuelle.

Les seuls avis de sagesse qui ont été émis portent sur des amendements qui visent précisément à revenir sur ces orientations. Je trouve cela regrettable, comme je déplore qu’aucun des amendements – ou quasiment aucun – présentés n’ait été adopté, alors que certains d’entre eux comportaient des dispositions intéressantes et de bon sens.

Je regrette que l’on ne soit pas capable de faire confiance au travail parlementaire. Le règlement est justement fait pour cela ! Sur la base qui avait été définie par le travail de Sylvie Vermeillet, nous aurions pu avoir un débat un peu plus constructif et Mme la rapporteure et la commission auraient pu se montrer un peu plus favorables à un certain nombre de dispositifs qui me paraissaient intéressants.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 33 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 37 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme Conte Jaubert, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et MM. Roux et Ruel, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le règlement est ainsi modifié :

1° À l’alinéa 13 de l’article 47 ter, après les mots : « alinéa 5 » sont insérés les mots : « et la durée globale du temps dont disposent les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ne peut excéder trente minutes » ;

2° L’alinéa 2 de l’article 47 decies du règlement est complété par une phrase ainsi rédigée : « En cas de retour à la procédure normale, la durée globale du temps dont disposent les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ne peut excéder trente minutes, sauf décision contraire de la Conférence des Présidents. »

La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Les projets de loi autorisant la ratification ou l’approbation d’une convention internationale sont par nature essentiellement techniques, raison pour laquelle ils sont très souvent examinés selon une procédure simplifiée.

Il arrive régulièrement qu’un groupe demande le retour à la procédure normale pour qu’il y ait un débat plus approfondi, ce qui est parfaitement légitime. Toutefois, nous proposons de fixer la durée de la discussion générale à trente minutes.

Il s’agit non pas de remettre en cause le droit des parlementaires à débattre des conventions internationales, mais de rationaliser le débat, dans le souci d’une meilleure organisation de nos travaux.

Je reviens un instant sur notre amendement précédent, qui concernait les amendements identiques déposés par les sénateurs d’un même groupe : ce sont aussi des amendements qu’ils pourraient cosigner.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. L’amendement n° 37 a pour objet de limiter à trente minutes la durée de la discussion générale sur les projets de loi de ratification et d’approbation des conventions internationales.

C’est une initiative que je trouve intéressante : sagesse.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 37 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de résolution, après l’article 17.

L’amendement n° 40 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, M. Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme Conte Jaubert, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et MM. Roux et Ruel, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la troisième phrase de l’alinéa 1 de l’article 47 quinquies du Règlement, le mot : « sept » est remplacé par le mot : « cinq » et le mot : « cinq » par le mot : « quatre »

La parole est à M. Michel Masset.

M. Michel Masset. La procédure de législation en commission (LEC) a été instaurée pour alléger nos débats en séance publique tout en garantissant un examen approfondi des textes en amont.

Cet amendement s’inscrit dans cette logique d’efficacité : il tend à ajuster le temps de parole en séance publique en le réduisant légèrement, de sept à cinq minutes pour le rapporteur et de cinq à quatre minutes pour les groupes.

L’essentiel du travail ayant déjà été mené en commission, ces adaptations permettraient de rationaliser nos échanges.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il s’agit, là encore, de rationaliser le temps de parole : avis de sagesse.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 40 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de résolution, après l’article 17.

L’amendement n° 18 rectifié ter, présenté par Mmes N. Goulet et Billon, MM. Longeot et Parigi, Mmes Saint-Pé et Sollogoub et M. Cambier, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À l’alinéa 3 de l’article 47 decies du Règlement, les mots : « met directement » sont remplacés par les mots : « , après les explications de vote, met ».

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. L’examen en forme simplifiée des conventions fiscales internationales ne donne lieu ni à explication de vote ni à débat.

Je propose que, pour les conventions complexes, sur lesquelles le Sénat ne peut intervenir qu’en votant pour ou contre ou en s’abstenant, nous permettions qu’il y ait au moins des explications de vote.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Vous semblez indiquer, ma chère collègue, que l’examen simplifié des conventions fiscales est une procédure antidémocratique, mais il s’avère que, depuis la session 2017-2018, les conventions fiscales sont systématiquement adoptées via la procédure normale. Il y a bien une discussion générale et un débat sur ces conventions : avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 18 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 54 est présenté par Mme de La Gontrie, M. Kerrouche, Mmes Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° 84 est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Gontard et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le règlement est ainsi modifié :

1° La première phrase de l’alinéa 1 de l’article 56 est complétée par les mots : « dans les conditions prévues à l’article 63 A » ;

2° Avant l’article 63, il est inséré un article 63 A ainsi rédigé :

« Art. 63 A. – 1. – Le vote des sénateurs est personnel.

« 2. – Toutefois, leur droit de vote peut être délégué. Chaque délégataire ne peut être porteur que d’une seule délégation. Cette délégation de vote est rédigée conformément aux dispositions prévues à l’article 64. »

La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour présenter l’amendement n° 54.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Lorsque je suis devenue sénatrice, quelle ne fut pas ma surprise, lors du premier scrutin public ordinaire qui s’est tenu après mon élection, de constater qu’une seule personne votait pour l’ensemble de son groupe. Je n’avais jamais eu affaire à une telle modalité de vote, quelles qu’aient été les assemblées dont j’ai pu être membre.

Étant novice, je me suis plongée dans le règlement du Sénat. J’ai noté que celui-ci prévoyait notamment qu’une seule délégation par parlementaire était possible en commission ou pour les scrutins à la tribune. En revanche, je n’y ai rien trouvé sur le scrutin public ordinaire.

Je me suis donc référée à notre texte fondateur : la Constitution. Je rappelle les termes de son article 27 : « Le droit de vote des membres du Parlement est personnel. La loi organique peut autoriser exceptionnellement la délégation de vote. Dans ce cas nul, ne peut recevoir délégation de plus d’un mandat. »

Notre amendement vise donc simplement à mettre en conformité le règlement du Sénat avec la Constitution.

Le règlement doit prévoir un scrutin public ordinaire qui garantisse le vote individuel et une délégation auprès d’un collègue au maximum.

J’indique que la pratique assez étrange à laquelle notre amendement vise à mettre un terme, et que tout nouvel élu découvre avec surprise, a également existé à l’Assemblée nationale. En 1993, Philippe Séguin, qui la présidait alors, a décidé qu’il n’était plus possible de ne pas respecter la Constitution ; je propose au Sénat d’opérer la même modification, tant d’années plus tard, sachant que ce point recueillera toute l’attention du Conseil constitutionnel.

Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus, pour présenter l’amendement n° 84.

M. Thomas Dossus. J’ai ressenti le même étonnement que ma collègue lorsque je suis arrivé au Sénat : cette pratique m’a semblé, à moi aussi, particulièrement étrange, voire saugrenue.

Je souhaite rappeler le contenu de nos premiers échanges sur ce texte. Ceux-ci portaient notamment sur la pratique consistant à empêcher nos collègues d’outre-mer d’assister aux réunions de commission en visioconférence ou nos collaborateurs d’être présents lors de réunions de commission auxquelles nous ne pouvons pas nous-mêmes nous rendre…

Qui a assisté, un jeudi matin, à une séance prévue dans une niche parlementaire sait bien que le scrutin public autorise la désertion des travées de l’hémicycle, notamment celles de la majorité sénatoriale, qui se mobilise très peu, mais qui sait qu’elle pèsera toujours ! (MM. Loïc Hervé et Stéphane Piednoir protestent.) Elle sait en effet qu’elle peut compter sur cette procédure contraire à la Constitution pour garantir sa majorité…(Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

C’est un fait, mes chers collègues. Venez en séance un jeudi matin et vous vous en rendrez compte ! Cette pratique est très problématique, car elle affaiblit nos débats.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Le scrutin public ordinaire est-il conforme à la Constitution ?

Nous aimons tous ici – moi comme les autres – évoquer la conformité à la Constitution et nous avons tous un avis sur cette question. Or il ne s’agit pas ici d’avoir un avis : je le rappelle, le règlement du Sénat, qui prévoit le scrutin public ordinaire, est toujours passé sous les fourches caudines du Conseil constitutionnel, qui l’a validé. Point d’inconstitutionnalité de notre règlement sur ce point.

M. Loïc Hervé. Fin du débat !

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Par ailleurs, mes chers collègues, si je comprends votre étonnement sur cet usage – nous en avons tous fait l’expérience –, j’observe que l’on s’y fait assez vite… Ainsi, depuis le début du présent débat, vous avez vous-même, à deux reprises, demandé que l’on recoure au scrutin public. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC.) Peut-être était-ce de votre part la manifestation d’une forme de nostalgie avant que celui-ci ne soit supprimé ? Je constate, quoi qu’il en soit, que l’utilisation de cette modalité anticonstitutionnelle ne vous a pas dérangés.

Je tiens à dire, plus sérieusement, que le scrutin public est utile à tout le monde, à la majorité comme à l’opposition – c’est bien pour cette raison que vous avez précédemment demandé que l’on vote de cette façon un peu plus tôt dans notre débat. Il permet sans doute – on ne va pas dire le contraire – de pallier une présence parfois fluctuante, mais aussi de trancher clairement des enjeux politiques. C’est ce que nous faisons tous, régulièrement. Ne serait-ce que pour cette dernière raison, il convient de conserver le scrutin public ordinaire.

La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements identiques. (Très bien ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Masset, pour explication de vote.

M. Michel Masset. Peut-être pourrions-nous, par commodité, réfléchir à un système de report de scrutin pour certains votes devant recueillir, du fait de leur importance, toute l’attention de notre assemblée, et qui auraient lieu à des horaires incitatifs.

Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

M. Thomas Dossus. Si nous demandons le scrutin public, madame la rapporteure, c’est parce que nous n’avons pas d’autre choix pour obtenir la publicité des votes. (Ah ! sur des travées des groupes UC et Les Républicains.) Il n’existe aucune autre modalité permettant de faire voter les seuls sénateurs présents dans l’hémicycle, en prenant connaissance de leur nom et de leur vote.

Nous demandons des scrutins publics pour savoir qui vote quoi dans cet hémicycle. Or, au cours de la présente séance, des absents ont « voté » sur tel ou tel article de cette proposition de résolution. Ils seront inscrits comme tels, alors qu’ils n’ont pas nécessairement donné de délégation de vote.

Telle est la raison pour laquelle nous contestons la constitutionnalité de cette procédure.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Il est vrai – cela a été dit – que chacun d’entre nous, en arrivant pour la première fois dans l’hémicycle du Sénat, a été surpris par cette procédure. Pour autant, il y a plusieurs manières de considérer le recours au scrutin public. (M. Jean-Michel Arnaud opine.)

Notre objectif n’est pas ici de remettre en cause l’argument fondé sur le fait majoritaire. Je ne suis pas naïve et je sais bien évidemment que le scrutin public est un moyen pour certains de s’assurer que le vote ira bien dans le sens politique voulu par une majorité, même si celle-ci n’est pas présente en nombre. Cela peut en effet poser une difficulté en termes de publicité des votes, mais je rappelle que tout citoyen peut savoir, en regardant nos travées, qui est présent en séance et qui est absent.

Le scrutin public présente, en revanche, un avantage, non pas pour modifier le rapport de forces – pour ma part, ce n’est jamais à cette fin que j’ai souhaité y recourir –, mais parce que des sujets, éminemment politiques, nécessitent notre engagement. Or, lors de certains débats, il n’y a pas suffisamment de sénateurs en séance pour voter, parce qu’untel passe un coup de fil en salle des conférences ou parce que tel autre est allé aux toilettes… On peut en rire, mais si les groupes d’opposition utilisent le scrutin public, c’est bien pour que les votes soient enregistrés et donc assumés par toutes et tous.

Même si nous entendons et partageons les réserves qui viennent d’être exprimées par les auteurs de ces amendements identiques, nous ne voulons pas en arriver à la situation en vigueur à l’Assemblée nationale, où un certain nombre de députés ne participent au cours de leur mandat qu’à quelques scrutins publics.

Nous voterons contre ces amendements identiques. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-Michel Arnaud applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.

Mme Audrey Linkenheld. Je tiens à préciser de nouveau quel est notre objectif.

Nous remettons en cause, au travers de cet amendement, non pas le principe même du scrutin public, mais ses modalités d’application. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous y avons eu recours un peu plus tôt dans ce débat, selon les modalités qui sont aujourd’hui en vigueur.

Pour autant, nous souhaiterions qu’à l’avenir, dans notre assemblée, les modalités de cette procédure de scrutin soient les mêmes que celles qui sont appliquées depuis le siècle dernier, c’est-à-dire depuis 1993, à l’Assemblée nationale. Lorsqu’un scrutin public y est demandé, c’est non pas une personne qui vote pour l’ensemble de son groupe, mais chacun de ceux qui sont présents qui votent pour eux-mêmes. Et cela fonctionne !

Je précise que, dans ce type de cas, nos collègues députés sont prévenus de l’imminence du scrutin public. Ceux qui sont dans les couloirs, aux toilettes ou à la buvette ont donc le temps de revenir rapidement pour participer à ce scrutin (M. Loïc Hervé en doute.), ce qui permet de faire savoir clairement à nos concitoyens qui a voté quoi sur tel sujet, et ce dans le plein respect de la Constitution. Chacun vote pour soi-même, en disposant éventuellement d’une délégation de vote.

Je pense pouvoir dire que cette pratique, qui existe depuis des années à l’Assemblée nationale, n’a pas eu pour conséquence de vider les bancs de son hémicycle. Et ce n’est pas parce que nous l’adopterons au Sénat que nos travées seront bondées… Je ne pense pas qu’il y aura de changement à cet égard, mais au moins respecterons-nous la Constitution.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Je souhaite tout d’abord répondre à Mme la rapporteure, qui a invoqué un argument inexact : le Conseil constitutionnel n’a jamais validé cette modalité de vote, tout simplement parce qu’il n’a pas été saisi de la conformité à la Constitution des modalités inscrites dans les modifications de notre règlement intérieur.

Vous me rétorquerez qu’il nous suffit de ne pas voter ce soir sur ce point et que l’affaire sera faite… Eh bien, pas forcément ! Je vous livrerai la suite des épisodes plus tard…

M. Loïc Hervé. C’est du teasing !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Quoi qu’il en soit, le Conseil constitutionnel aura à se prononcer sur ce point.

Permettez-moi, ensuite, de citer les propos, figurant au Journal officiel, tenus le 28 septembre 1993 par Philippe Séguin, alors président de l’Assemblée nationale, lequel s’était fondé sur l’article 27 de la Constitution pour décider d’instaurer ce scrutin à l’Assemblée nationale : « La décision d’appliquer désormais les dispositions constitutionnelles en ce domaine procède du souci de renforcer la crédibilité de notre assemblée, de lui donner toute la place qu’elle occupe dans nos institutions. Le vote personnel marque une nouvelle étape. Il n’a d’équivalent réel dans aucun autre parlement. »

Je vous laisserai méditer, enfin, sur la teneur d’une proposition de résolution qui avait été déposée sur ce sujet par l’un de vos anciens collègues, Jean Louis Masson, ainsi que sur les propos d’une sénatrice, Jacqueline Gourault, devenue, par la grâce d’heureuses circonstances, membre du Conseil constitutionnel. Celle-ci disait, le 15 décembre 2009 dans notre hémicycle, à la suite d’un scrutin : « Cette affaire m’incite à reprendre une idée à laquelle je crois profondément (Marques dimpatience sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Je poursuis ma citation : « Si ce vote avait eu lieu au Sénat par une seule personne et non pas par paquet, cela n’existerait pas. » Réfléchissez-y !

M. Laurent Somon. C’est tout réfléchi !

Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote.

Mme Pascale Gruny. C’est à mon tour de vous renvoyer la balle, chers collègues siégeant de l’autre côté de notre hémicycle : pourquoi n’avoir pas fait adopter cette disposition lorsque Jean-Pierre Bel était président du Sénat, bien après 1993 ? (On opine sur les travées du groupe Les Républicains.) Vous étiez pourtant aux manettes, mais vous ne l’avez pas fait ! (Exclamations sur les travées du groupe SER.)

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’était il y a longtemps, je n’étais pas au Sénat !

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 54 et 84.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 256 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 329
Pour l’adoption 84
Contre 245

Le Sénat n’a pas adopté.

M. Mathieu Darnaud. Quel succès ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

Après l’article 17
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Article 18

Article 17 bis (nouveau)

À la première phrase des alinéas 1 et 3 et à l’alinéa 2 de l’article 47 bis du Règlement, après le mot : « rectificative », sont insérés les mots : « ou de fin de gestion ». – (Adopté.)

Article 17 bis (nouveau)
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Article 19

Article 18

À l’alinéa 1 de l’article 72 du Règlement, après les mots : « commission mixte », il est inséré le mot : « paritaire ». – (Adopté.)

Article 18
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Après l’article 19

Article 19

Le chapitre XX du Règlement est ainsi modifié :

1° L’article 73 quater est ainsi modifié :

a) Les deux dernières phrases de l’alinéa 1 sont ainsi rédigées : « Elle instruit ces textes et peut transmettre aux commissions permanentes ses analyses les concernant. Elle assure l’information du Sénat sur les autres documents émanant des institutions de l’Union européenne. » ;

b) Les alinéas 2 et 3 sont ainsi rédigés :

« 2. – Peuvent déposer une proposition de résolution européenne en application de l’article 88-4 de la Constitution :

« 1° La commission permanente compétente dans les conditions prévues à l’article 73 quinquies A ;

« 2° La commission des affaires européennes dans les conditions prévues à l’article 73 quinquies B ;

« 3° Tout sénateur dans les conditions prévues à l’article 73 quinquies C.

« 3. – Les propositions de résolution européenne déposées en application de l’alinéa 2 du présent article visent les documents émanant des institutions de l’Union européenne sur lesquels elles portent. » ;

c) Sont ajoutés des alinéas 4 et 5 ainsi rédigés :

« 4. – Le président de la commission compétente peut désigner un de ses membres pour participer, avec voix consultative, à l’examen par la commission des affaires européennes d’un projet ou d’une proposition d’acte, d’un document émanant d’une institution de l’Union européenne ou d’une proposition de résolution européenne. Le président de la commission des affaires européennes peut désigner un de ses membres pour participer de droit, avec voix consultative, à l’examen par la commission permanente compétente d’une proposition de résolution européenne.

« 5. – La commission des affaires européennes peut exercer les compétences attribuées aux commissions saisies pour avis dans le cadre de l’examen en séance publique d’une proposition de résolution européenne. » ;

2° Après le même article 73 quater, sont insérés des articles 73 quinquies A à 73 quinquies C ainsi rédigés :

« Art. 73 quinquies A. – 1. – Dans les quinze jours suivant la diffusion par la commission des affaires européennes d’un projet ou d’une proposition d’acte soumis au Sénat en application de l’article 88-4 de la Constitution, la commission permanente compétente peut décider de se saisir de ce texte et en informe le Sénat.

« 2. – Lorsqu’elle s’est saisie d’un texte mentionné à l’alinéa 1 du présent article, la commission permanente compétente dispose d’un délai d’un mois à compter de cette saisine pour déposer une proposition de résolution européenne portant sur ce texte. En vue de l’examen de cette proposition, la commission fixe un délai limite pour le dépôt des amendements qui peuvent être présentés par tout sénateur. Le rapport de la commission ainsi que la proposition de résolution européenne qu’elle a adoptée ou, en cas de rejet, le résultat de ses travaux sont déposés et publiés séparément.

« 3. – Par dérogation à l’alinéa 1 de l’article 73 quinquies C, dans ce délai d’un mois ou postérieurement au dépôt de la proposition de résolution européenne par la commission permanente compétente dans les conditions mentionnées à l’alinéa 2 du présent article, toute proposition de résolution européenne déposée en application de l’article 73 quinquies C portant principalement sur un texte européen dont la commission permanente s’est saisie lui est directement envoyée. Lorsque la commission permanente décide d’examiner la proposition de résolution européenne qui lui a été envoyée en application du présent article, l’examen de la proposition se fait selon la procédure prévue aux alinéas 5 et 9 à 11 de l’article 73 quinquies C.

« 4. – Au plus tard dans un délai de trois jours francs à compter de la date de la publication du texte adopté par la commission permanente, le Président du Sénat, le président d’un groupe, le président d’une commission permanente, le président de la commission des affaires européennes ou le Gouvernement peut demander à la Conférence des Présidents que la proposition de résolution européenne soit inscrite à l’ordre du jour du Sénat. En l’absence de demande dans le délai précité, la proposition de résolution européenne adoptée par la commission permanente devient résolution du Sénat.

« 5. – Sans préjudice des droits des groupes minoritaires et d’opposition et du Gouvernement qu’ils tiennent en application de l’article 48 de la Constitution, si, dans les sept jours francs qui suivent cette demande, la Conférence des Présidents, saisie de la demande mentionnée à l’alinéa 4 du présent article, ne propose pas ou si le Sénat ne décide pas, dans ce même délai, son inscription à l’ordre du jour, la proposition de résolution européenne adoptée par la commission permanente devient résolution du Sénat. Si l’inscription à l’ordre du jour est décidée, le texte de la proposition de résolution européenne adopté par la commission permanente est examiné en séance publique.

« Art. 73 quinquies B. – 1. – La commission des affaires européennes informe dans les meilleurs délais la commission permanente compétente de son intention de se saisir d’un texte européen soumis au Sénat en application de l’article 88-4 de la Constitution relevant de la compétence de cette dernière.

« 2. – La commission des affaires européennes peut déposer une proposition de résolution européenne sur tout texte européen mentionné à l’article 88-4 de la Constitution, à l’exception de ceux pour lesquels une commission permanente s’est préalablement saisie dans les conditions mentionnées à l’article 73 quinquies A. Cette proposition de résolution européenne est envoyée à la commission permanente compétente.

« 3. – Après l’expiration du délai limite qu’elle a fixé pour le dépôt des amendements, la commission permanente compétente examine la proposition de résolution européenne ainsi que les amendements, qui peuvent être présentés par tout sénateur. Le rapport de la commission permanente ainsi que la proposition de résolution européenne qu’elle a adoptée ou, en cas de rejet, le résultat de ses travaux sont déposés et publiés séparément.

« 4. – Si, dans un délai d’un mois suivant la transmission d’une proposition de résolution européenne déposée au nom de la commission des affaires européennes, la commission permanente n’a pas déposé son rapport et si ni le Gouvernement, ni un groupe minoritaire ou d’opposition n’a demandé que le Sénat se prononce sur cette proposition en séance dans le cadre de l’ordre du jour qui lui est réservé, le texte déposé au nom de la commission des affaires européennes est considéré comme adopté par la commission permanente.

« 5. – Dans le délai d’un mois mentionné à l’alinéa 4, le président de la commission permanente informe, le cas échéant, le président de la commission des affaires européennes et le Président du Sénat que sa commission n’examinera pas le texte déposé au nom de la commission des affaires européennes. La proposition déposée au nom de la commission des affaires européennes est alors considérée comme adoptée par la commission permanente à compter de la date de publication au Journal officiel de la notification de la décision de cette commission.

« 6. – Au plus tard trois jours francs à compter de la publication du texte d’une proposition de résolution européenne adopté par la commission permanente ou à compter du jour où cette proposition est considérée comme adoptée par la commission permanente ou, en cas de rejet par cette dernière, à compter du dépôt du résultat des travaux par la commission permanente ou à compter du jour où la proposition est considérée comme rejetée par la commission permanente, le Président du Sénat, le Gouvernement, le président d’un groupe, le président d’une commission permanente ou le président de la commission des affaires européennes peut demander à la Conférence des Présidents l’inscription de cette proposition de résolution européenne à l’ordre du jour du Sénat. En l’absence de demande dans le délai précité, le texte adopté ou considéré comme adopté par la commission permanente devient résolution du Sénat ou, à défaut, le texte rejeté ou considéré comme rejeté par la commission permanente devient définitivement rejeté par le Sénat.

« 7. – Sans préjudice des droits des groupes minoritaires et d’opposition et du Gouvernement qu’ils tiennent en application de l’article 48 de la Constitution, si, dans les sept jours francs qui suivent cette demande, la Conférence des Présidents, saisie de la demande mentionnée à l’alinéa 6 du présent article, ne propose pas ou si le Sénat ne décide pas, dans ce même délai, son inscription à l’ordre du jour, le texte adopté ou considéré comme adopté par la commission permanente devient résolution du Sénat ou, à défaut, le texte rejeté par la commission permanente est définitivement rejeté par le Sénat.

« 8. – Si l’inscription à l’ordre du jour est décidée avant que la commission permanente n’ait statué sur la proposition de résolution européenne, la commission examine ce texte dans les conditions prévues à l’alinéa 3.

« 9. – Le texte de la proposition de résolution européenne adopté ou considéré comme adopté par la commission permanente ou, en cas de rejet du texte par la commission permanente, le texte déposé au nom de la commission des affaires européennes est examiné en séance publique.

« Art. 73 quinquies C. – 1. – Tout sénateur peut déposer une proposition de résolution européenne. Elle est envoyée à la commission des affaires européennes, à l’exception de celles directement envoyées à une commission permanente en application de l’alinéa 3 de l’article 73 quinquies A.

« 2. – Lorsque la commission des affaires européennes décide d’examiner la proposition de résolution européenne déposée en application de l’alinéa 1 du présent article, elle fixe le délai limite pour le dépôt des amendements, qui peuvent être présentés par tout sénateur. Le rapport de la commission des affaires européennes ainsi que la proposition de résolution européenne qu’elle a adoptée ou, en cas de rejet, le résultat de ses travaux sont déposés et publiés séparément.

« 3. – Lorsque le président d’une commission permanente ou le président d’un groupe le demande au président de la commission des affaires européennes, la commission des affaires européennes dépose son rapport et examine, dans les conditions prévues à l’alinéa 2, la proposition de résolution européenne dans le délai d’un mois à compter de la date de réception de cette demande. Cette demande ne peut intervenir qu’après publication de la proposition de résolution européenne.

« 4. – Le texte adopté par la commission des affaires européennes ou, en cas de rejet, le texte initial de la proposition de résolution européenne est ensuite envoyé à la commission permanente compétente.

« 5. – Après l’expiration du délai limite qu’elle a fixé pour le dépôt des amendements, la commission permanente compétente examine la proposition de résolution européenne ainsi que les amendements, qui peuvent être présentés par tout sénateur. Le rapport de la commission permanente ainsi que la proposition de résolution européenne qu’elle a adoptée ou, en cas de rejet, le résultat de ses travaux sont déposés et publiés séparément.

« 6. – Si, dans un délai d’un mois suivant la transmission d’une proposition de résolution européenne adoptée par la commission des affaires européennes, la commission permanente n’a pas déposé son rapport et si ni le Gouvernement, ni un groupe minoritaire ou d’opposition n’a demandé que le Sénat se prononce sur une proposition de résolution européenne en séance dans le cadre de l’ordre du jour qui lui est réservé, le texte adopté par la commission des affaires européennes est considéré comme adopté par la commission permanente. En cas de rejet du texte par la commission des affaires européennes, le texte est considéré comme rejeté par la commission permanente à l’issue de ce même délai d’un mois.

« 7. – Dans le délai d’un mois mentionné à l’alinéa 6, le président de la commission permanente informe, le cas échéant, le président de la commission des affaires européennes et le Président du Sénat que la commission a décidé de ne pas examiner le texte adopté par la commission des affaires européennes. Le texte adopté par la commission des affaires européennes est alors considéré comme adopté par la commission permanente à compter de la date de publication au Journal officiel de la notification de cette décision de la commission.

« 8. (Supprimé)

« 9. – Au plus tard trois jours francs à compter de la publication du texte d’une proposition de résolution européenne adopté par la commission permanente ou à compter du jour où cette proposition est considérée comme adoptée par la commission permanente ou, à défaut, à compter du dépôt du résultat des travaux par la commission permanente ou à compter du jour où la proposition est considérée comme rejetée par la commission permanente, le Président du Sénat, le Gouvernement, le président d’un groupe, le président d’une commission permanente ou le président de la commission des affaires européennes peut demander à la Conférence des Présidents l’inscription de cette proposition de résolution européenne à l’ordre du jour du Sénat. En l’absence de demande dans le délai précité, le texte adopté ou considéré comme adopté par la commission permanente devient résolution du Sénat ou, à défaut, le texte rejeté ou considéré comme rejeté par la commission permanente devient définitivement rejeté par le Sénat.

« 10. – Sans préjudice des droits des groupes minoritaires et d’opposition et du Gouvernement qu’ils tiennent en application de l’article 48 de la Constitution, si, dans les sept jours francs qui suivent cette demande, la Conférence des Présidents, saisie de la demande mentionnée à l’alinéa 9 du présent article, ne propose pas ou si le Sénat ne décide pas, dans ce même délai, son inscription à l’ordre du jour, le texte adopté ou considéré comme adopté par la commission permanente devient résolution du Sénat ou, à défaut, le texte rejeté ou considéré comme rejeté par la commission permanente est définitivement rejeté par le Sénat.

« 11. – Si l’inscription à l’ordre du jour est décidée avant que la commission permanente n’ait statué sur la proposition de résolution européenne, la commission examine ce texte dans les conditions prévues à l’alinéa 5. Le texte de la proposition de résolution européenne adopté ou considéré comme adopté par la commission permanente ou, en cas de rejet du texte par la commission permanente, le texte adopté par la commission des affaires européennes ou, à défaut d’adoption par cette dernière, le texte initial de la proposition de résolution européenne est examiné en séance publique. » ;

3° L’article 73 quinquies est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est supprimé ;

b) L’alinéa 1 est ainsi rédigé :

« 1. – À tout moment de la procédure d’examen d’une proposition de résolution européenne déposée en application des articles 73 quinquies A, 73 quinquies B ou 73 quinquies C, le président de la commission des affaires européennes ou le président de la commission permanente compétente peut demander que les délais prévus à ces mêmes articles soient suspendus au cours des semaines où le Sénat a décidé de ne pas tenir séance, conformément au deuxième alinéa de l’article 28 de la Constitution. » ;

c) Les alinéas 2 et 3 sont abrogés ;

d) L’alinéa 4 devient l’alinéa 2 et, après le mot : « européennes », sont insérés les mots : « adoptées par le Sénat » ;

4° L’article 73 sexies est ainsi modifié :

aa) Au début, est ajoutée la mention : « 1. – » ;

a) La première phrase est ainsi modifiée :

– les mots : « saisie au fond » sont remplacés par les mots : « permanente compétente » et les mots : « un président de » sont remplacés par les mots : « le président d’un » ;

– sont ajoutés les mots : « ou d’adapter le droit national au droit européen » ;

b) La seconde phrase est supprimée ;

c) Il est ajouté un alinéa 2 ainsi rédigé :

« 2. – Les observations de la commission des affaires européennes peuvent être présentées sous la forme d’un rapport d’information. Le rapporteur de la commission des affaires européennes peut en outre présenter ses observations à la commission permanente compétente et, sur décision de la Conférence des Présidents, en séance publique. » ;

5° L’alinéa 4 de l’article 73 septies est complété par une phrase ainsi rédigée : « En cas de rejet de la motion transmise par l’Assemblée nationale ou d’adoption à une majorité inférieure à celle des trois cinquièmes, le Président du Sénat en informe le président de l’Assemblée nationale. » ;

6° L’article 73 octies est ainsi modifié :

a) À l’alinéa 1, après le mot : « résolution », il est inséré le mot : « européenne » ;

b) L’alinéa 2 est ainsi modifié :

– après le mot : « résolution », la fin de la première phrase est ainsi rédigée : « européenne sur le fondement de l’article 88-6 de la Constitution. » ;

– après la même première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Cette proposition est envoyée à la commission des affaires européennes. » ;

– la seconde phrase est ainsi rédigée : « La commission des affaires européennes peut adopter une telle proposition de résolution européenne de sa propre initiative. » ;

– est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Seules sont recevables les propositions de résolution européenne déposées sur le fondement de l’article 88-6 dans les huit semaines suivant la transmission du projet d’acte législatif dans les langues officielles de l’Union ou la publication de l’acte législatif. » ;

c) À la première phrase de l’alinéa 3, les mots : « proposition de résolution » sont remplacés par les mots : « telle proposition de résolution européenne » et les mots : « compétente au fond » sont remplacés par les mots : « permanente compétente » ;

d) La seconde phrase du même alinéa 3 est ainsi modifiée :

– les mots : « compétente au fond » sont remplacés par le mot : « permanente » ;

– après le mot : « statué », sont insérés les mots : « avant l’expiration du délai de huit semaines à compter respectivement de la transmission du projet d’acte législatif dans les langues officielles de l’Union ou de la publication de l’acte législatif » ;

– après la dernière occurrence du mot : « commission », la fin est ainsi rédigée : « permanente la veille du dernier jour du même délai de huit semaines. » ;

e) L’alinéa 5 est ainsi modifié :

– après le mot : « procédure, », sont insérés les mots : « le Président du Sénat, le Gouvernement, » ;

– après le mot : « groupe », la fin est ainsi rédigée : « , le président d’une commission permanente ou le président de la commission des affaires européennes peut demander à la Conférence des Présidents son inscription à l’ordre du jour du Sénat. » ;

f) Après le même alinéa 5, sont insérés des alinéas 5 bis et 5 ter ainsi rédigés :

« 5 bis. – Si l’inscription à l’ordre du jour est décidée avant que la commission permanente n’ait statué sur la proposition de résolution européenne, la commission examine ce texte ainsi que les amendements qui peuvent être présentés par tout sénateur.

« 5 ter. – Lorsque l’inscription à l’ordre du jour est décidée, le texte de la proposition de résolution européenne adopté ou considéré comme adopté par la commission permanente ou, en cas de rejet du texte par la commission permanente, le texte adopté par la commission des affaires européennes ou, à défaut d’adoption par cette dernière, le texte initial de la proposition de résolution européenne est examiné en séance publique. La commission des affaires européennes peut exercer les compétences attribuées aux commissions saisies pour avis. » ;

g) (Supprimé)

h) À l’alinéa 7, les mots : « les résolutions » sont remplacés par les mots : « toute résolution » ;

i) À l’alinéa 8, après le mot : « résolution », il est inséré le mot : « européenne » ;

7° L’article 73 nonies est ainsi modifié :

a) À l’alinéa 1, les mots : « huit semaines » sont remplacés par les mots : « deux mois » ;

b) À l’alinéa 2, après le mot : « résolution », il est inséré le mot : « européenne » ;

8° L’article 73 decies est ainsi modifié :

a) L’alinéa 1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « La commission des affaires européennes peut formuler des observations sur une telle modification, qui peuvent être présentées sous la forme d’un rapport d’information. » ;

b) À la première phrase de l’alinéa 2, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « six » ;

c) À la seconde phrase de l’alinéa 4, le mot : « une » est remplacé par le mot : « la ».

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Rapin, sur l’article.

M. Jean-François Rapin. Puisque l’article 19 de cette proposition de résolution concerne la commission des affaires européennes et son fonctionnement, je tiens à remercier les présidentes Sylvie Vermeillet et Muriel Jourda pour leur écoute. En effet, nombre des dispositions figurant dans cet article ont été proposées par des membres de ladite commission, notamment son président.

L’objectif de l’article 19 est clair : il vise à renforcer la capacité du Sénat à faire entendre sa voix dans le processus de négociation européenne et à améliorer la manière dont le Sénat prend en compte le cadre réglementaire européen lorsqu’il légifère. C’est une nécessité.

Cet article conduit naturellement à renforcer la commission des affaires européennes, laquelle a été consacrée dans la Constitution lors de la révision constitutionnelle de 2008. Elle a pour mission d’instruire les textes soumis au Sénat en application des articles 88-4 et 88-6 de la Constitution, d’informer le Sénat sur les autres documents, mais aussi – je le rappelle – de contribuer directement au dialogue politique avec la Commission européenne par le biais des avis politiques, qu’elle est la seule à pouvoir adopter.

J’ai entendu les remarques formulées par Éric Kerrouche lors de la discussion générale et je sais que certains s’interrogent sur les rapports entre la commission des affaires européennes et les commissions permanentes.

La force de la commission des affaires européennes réside dans sa composition transversale, qui lui permet de bénéficier de l’expertise des collègues appartenant aux différentes commissions, et ce de façon équilibrée.

L’article 19 permettra aussi de trouver un équilibre satisfaisant pour l’examen des propositions de résolution européenne (PPRE) déposées par un sénateur. Celles-ci ne seront plus examinées automatiquement par la commission des affaires européennes, qui ne sera plus tenue de les étudier dans un délai d’un mois. C’était un souhait de ma part, tout comme la possibilité d’accélérer la procédure d’adoption d’une position du Sénat.

Je veux aussi relever que la commission des affaires européennes, qui peut déjà être consultée sur un projet de loi ou une proposition de loi ayant pour objet de transposer un texte européen en droit national, pourra désormais l’être sur les textes de loi visant à adapter le droit national au droit européen.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, sur l’article.

M. Didier Marie. L’article 19, relatif à la commission des affaires européennes, nous pose question. Nous nous interrogeons sur les intentions et la valeur ajoutée de cet article, qui vise à réécrire le chapitre XX de notre règlement.

En première approche, nous nous sommes interrogés sur la finalité de cet article. S’agissait-il, ou non, de renforcer le rôle de la commission des affaires européennes ?

Nous aurions pu penser que l’objectif était de renforcer significativement ce rôle. En effet, nous avons pu constater au cours des dernières années la place majeure et grandissante que prenaient les enjeux européens, ainsi que le nombre important de textes européens à traiter et contrôler.

Mais cet article met surtout en lumière le rôle des commissions permanentes dans les procédures européennes, notamment une disposition quasiment tombée en désuétude : la préemption des textes européens, au titre de l’article 88-4 de la Constitution, par la commission permanente concernée – une disposition qui n’existe pas à l’Assemblée nationale.

Si la réécriture proposée était adoptée, la commission des affaires européennes ne se saisirait que par dérogation, par défaut, faute de la saisine d’un texte par une commission permanente. Cette rédaction introduit, nous semble-t-il, une ambiguïté qui pourrait entraîner un glissement de la priorité d’examen des propositions de résolution de la commission des affaires européennes vers les commissions compétentes au fond.

Si nous partageons, par ailleurs, le souhait de clarifier et de rationaliser les procédures, la rédaction proposée, qui comprend neuf pages et quatre-vingts alinéas, contre trois pages et trente-quatre alinéas dans la version précédente, n’aura certainement pas pour résultat de simplifier les procédures. Vous souhaitiez, madame la rapporteure, un règlement souple ; et nous observons en l’occurrence, à votre corps défendant, une certaine forme de rigidité.

Le président Rapin l’a souligné, la commission des affaires européennes est une instance écoutée tant au Sénat qu’au niveau européen, qui a su s’imposer par son travail et sa crédibilité. Elle a acquis de nouveaux droits dans le processus législatif européen et une consécration institutionnelle. Il nous semble indispensable que le règlement du Sénat aille dans le sens d’un renforcement des droits de cette commission. C’est la raison pour laquelle nous proposerons un certain nombre d’amendements à cet article.

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 91, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 11, première phrase

Après le mot :

participer

insérer les mots :

de droit

II. – Alinéa 19

Supprimer les mots :

relevant de la compétence de cette dernière

III. – Alinéa 23, première phrase

Remplacer cette phrase par deux phrases ainsi rédigées :

Dans le délai d’un mois mentionné à l’alinéa 4, la commission permanente peut décider qu’elle n’examinera pas le texte déposé au nom de la commission des affaires européennes. Son président en informe le Président du Sénat et le président de la commission des affaires européennes.

La parole est à Mme le rapporteur.

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision rédactionnelle.

Mme la présidente. L’amendement n° 67, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 12

Supprimer cet alinéa.

II. – Alinéa 23

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Nous souhaitons, par cet amendement, alerter sur le poids excessif conféré à la Commission européenne et souligner qu’il est nécessaire que les propositions de résolution européenne s’appuient sur le vote des commissions permanentes concernées, voire sur celui qui a été exprimé en séance publique.

Mme la présidente. L’amendement n° 42, présenté par MM. Marie et Kerrouche, Mmes Linkenheld et Blatrix Contat, MM. Bourgi, Chaillou et Durain, Mmes Harribey, de La Gontrie et Narassiguin, M. Roiron, Mme Daniel, M. Jomier, Mme G. Jourda, M. M. Weber et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Remplacer les mots :

peut exercer

par le mot :

exerce

La parole est à M. Didier Marie.

M. Didier Marie. Il s’agit, par cet amendement, d’affirmer la place de la commission des affaires européennes dans la procédure législative qui la concerne au premier chef. On peut considérer que celle-ci est pleinement légitime à exercer systématiquement les compétences attribuées aux commissions saisies pour avis lorsqu’une PPRE est examinée en séance publique.

Son avis paraît aujourd’hui indispensable au regard de ses compétences, des enjeux européens et de la complexité de ces derniers. Il semble donc logique qu’elle ait les mêmes droits que les commissions compétentes saisies pour avis.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 67 et 42 ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Les auteurs respectifs de ces deux amendements ont des objectifs totalement inverses.

En effet, l’amendement n° 67 vise à supprimer la possibilité pour la commission des affaires européennes d’exercer les compétences des commissions pour avis lors de l’examen des propositions de résolution européenne, quand l’amendement n° 42 tend à instaurer l’obligation pour ladite commission d’exercer ces compétences.

Aujourd’hui, la commission des affaires européennes dispose de la faculté d’exercer les compétences des commissions pour avis lors de l’examen des PPRE. Si cela convient au président de la commission des affaires européennes, je propose d’en rester là.

La commission est donc défavorable à ces deux amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Rapin, pour explication de vote.

M. Jean-François Rapin. L’un des amendements vise à accorder à la commission des affaires européennes un poids moindre, l’autre un poids plus important. Je vais suivre, pour ma part, l’avis de Mme le rapporteur.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.

M. Didier Marie. L’amendement n° 91 présenté par Mme la rapporteure vise à introduire deux modifications : celle qui concerne l’alinéa 11 est dans la droite ligne de ce que nous préconisons, puisqu’il s’agit de prévoir une possibilité de droit, pour la commission permanente, de désigner pour avis, ce qui ne pose pas de problème de fond ; quant à celle qui vise l’alinéa 19, de précision rédactionnelle, elle va dans le bon sens.

Nous voterons donc cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 91.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 67 n’a plus d’objet.

Je mets aux voix l’amendement n° 42.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 47 rectifié, présenté par MM. Marie et Kerrouche, Mmes Linkenheld et Blatrix Contat, MM. Bourgi, Chaillou et Durain, Mmes Harribey, de La Gontrie et Narassiguin, M. Roiron, Mme Daniel, M. Jomier, Mme G. Jourda, M. M. Weber et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 14

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigé :

Avant l’expiration de ce délai, la commission permanente peut faire connaître au Sénat qu’elle ne se saisira pas de ce texte.

La parole est à M. Didier Marie.

M. Didier Marie. Il s’agit, par cet amendement, de lever toute ambiguïté quant au droit de la commission des affaires européennes de se saisir des projets de textes européens au titre de l’article 88-4 de la Constitution.

Rappelons que cet article habilite la seule commission des affaires européennes pour l’examen au fond des projets de texte européen. Il vise également à corriger une redondance relative à la compétence de la commission permanente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. La commission était défavorable à la rédaction initiale de cet amendement, qui a été largement remanié depuis.

La commission ne s’étant pas réunie après cette rectification, et n’ayant donc pas examiné l’amendement, j’émettrai à titre personnel un avis favorable.

Il s’agit en effet d’une mesure de simplification visant à améliorer l’efficacité de la procédure : si la commission permanente ne compte pas se saisir d’un texte européen, il me paraît de bonne politique que la commission des affaires européennes puisse, quant à elle, le faire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 47 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 44, présenté par MM. Marie et Kerrouche, Mmes Linkenheld et Blatrix Contat, MM. Bourgi, Chaillou et Durain, Mmes Harribey, de La Gontrie et Narassiguin, M. Roiron, Mme Daniel, M. Jomier, Mme G. Jourda, M. M. Weber et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 28

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le Bureau de la commission des affaires européennes décide de l’examen de la proposition de résolution européenne ainsi déposée.

La parole est à M. Didier Marie.

M. Didier Marie. Il s’agit, par cet amendement, de préciser qui statue sur l’examen par la commission des affaires européennes d’une proposition de résolution européenne déposée par un sénateur. Il existe en effet trois façons d’examiner ces textes.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je ne crois pas qu’une telle précision soit nécessaire. En pratique et selon le droit commun, une commission est convoquée par le président ; la procédure se déroule de la même façon pour la commission des affaires européennes et son président précise quel est l’ordre du jour : avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.

M. Didier Marie. Il s’agit, en l’occurrence, de la faculté pour la commission des affaires européennes de décider si une proposition de résolution déposée par un sénateur à titre personnel peut être examinée ou non par la commission.

Nous souhaitons clarifier les choses, car le règlement ne précise pas qui prend cette décision : la commission dans son intégralité, son bureau ou son président ? Selon nous, ce doit être le bureau.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 44.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 68, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 43

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…) Après l’alinéa 3 de l’article 73 quinquies, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …. – Chaque groupe a droit à l’inscription à l’ordre du jour du Sénat d’une proposition de résolution européenne par année parlementaire. » ;

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Nous estimons qu’il est important, pour revivifier le débat sur les questions européennes, d’assurer que chaque groupe parlementaire, même minoritaire ou d’opposition, puisse inscrire, une fois par an, à l’ordre du jour du Sénat une proposition de résolution européenne, déposée par ses soins ou non.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il me semble, madame la présidente Cukierman, que cet amendement est déjà satisfait par le droit en vigueur.

Tout d’abord, chaque groupe a la faculté d’inscrire une proposition de résolution européenne dans le cadre de sa niche parlementaire.

Ensuite, la procédure d’adoption prévoit déjà que, lorsqu’une PPRE a été adoptée par la commission permanente, tout président de groupe dispose d’un délai de trois jours pour demander son inscription à l’ordre du jour, sous réserve que cette demande soit agréée par la conférence des présidents.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Mme Cécile Cukierman. Non seulement je ne retirerai pas cet amendement, mais j’aimerais que l’on me réponde sur le fond !

Si vous n’êtes pas d’accord avec nous sur un amendement, madame la rapporteure, vous le dites, mais ne nous opposez pas des arguments qui n’en sont pas. Un peu de respect ! Je ne suis pas assez idiote pour déposer un amendement visant à inscrire ce que je veux dans mes deux niches parlementaires de quatre heures annuelles. Je ne suis pas complètement à côté de la plaque !

Nous savons qu’il y a une volonté politique derrière cette proposition de modification du règlement. Alors, opposez-nous des avis défavorables, si vous le voulez, mais faites en sorte qu’ils soient du niveau des débats sénatoriaux !

Je n’y suis pour rien s’il a été décidé de commencer le débat en séance publique à dix-huit heures trente le mardi. Il est désormais une heure et demie du matin et, comme tout le monde, j’aimerais être au lit ! Si la séance avait débuté à quatorze heures trente, nous en aurions déjà terminé et nous serions tous de meilleure humeur… Mais puisque nous sommes dans la même galère, débattons sérieusement !

Ce que vous avez dit est inexact : je ne demande pas qu’intervienne, d’abord, un vote au sein de la commission des affaires européennes, ce qui signifierait qu’un groupe minoritaire serait forcément battu. Je vous rappelle qu’au sein de cette commission, les groupes sont représentés de façon proportionnelle, et c’est bien normal.

Encore une fois, on a le droit de ne pas être d’accord entre nous. On a aussi le droit de débattre de tout et n’importe quoi, durant la nuit, sur des sujets qui n’engagent à rien, de faire croire que tout est possible et que tout se négocie… Mais ce n’est pas vrai, heureusement !

Le président de la commission des affaires européennes a dit qu’il voulait conserver un équilibre au sein de notre règlement. Nous sommes donc en train de réaffirmer un certain nombre de principes, tout en modifiant les dispositions du règlement relatives à cette commission qui est – pardonnez-moi du mot – quelque peu bâtarde. Dans ce contexte, si vous n’êtes pas d’accord avec nos propositions, il vous suffit de nous dire non, mais ne nous répondez pas n’importe quoi !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 68.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 43, présenté par MM. Marie et Kerrouche, Mmes Linkenheld et Blatrix Contat, MM. Bourgi, Chaillou et Durain, Mmes Harribey, de La Gontrie et Narassiguin, M. Roiron, Mme Daniel, M. Jomier, Mme G. Jourda, M. M. Weber et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 52

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

…) Il est ajouté un alinéa 3 ainsi rédigé :

« 3. – La commission des affaires européennes peut, de sa propre initiative ou à la demande d’une commission permanente ou spéciale saisie au fond d’un projet ou d’une proposition de loi portant sur un domaine couvert par l’activité de l’Union européenne, formuler des observations sur toute disposition de ce projet ou de cette proposition. Ces observations peuvent être présentées sous la forme d’un rapport d’information. Ces observations peuvent être présentées devant la commission permanente ou spéciale saisie au fond du projet ou de la proposition de loi. La Conférence des présidents peut autoriser la commission des affaires européennes à présenter ses observations en séance publique. »

La parole est à M. Didier Marie.

M. Didier Marie. Cet amendement vise à permettre à la commission des affaires européennes de se saisir pour avis, sur sa propre initiative, sur tout projet de loi ou proposition de loi comportant une dimension européenne ou traitant de dispositions européennes majeures.

Un avis officiel de la commission des affaires européennes, sous la forme d’un rapport d’information, aurait été utile, par exemple, pour débattre de la présente proposition de résolution.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Le champ prévu par l’amendement me paraît un peu vaste, eu égard aux compétences de l’Union européenne. Une telle disposition conduirait à prévoir une intervention en séance publique de la commission des affaires européennes sur une grande partie des textes, ce qui n’est pas souhaitable.

Il est vrai que cette commission dispose d’une expertise particulière pour suivre les travaux des institutions de l’Union, mais les commissions permanentes sont tout aussi compétentes pour apprécier la dimension européenne des textes dont elles sont saisies : avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 43.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 45, présenté par MM. Marie et Kerrouche, Mmes Linkenheld et Blatrix Contat, MM. Bourgi, Chaillou et Durain, Mmes Harribey, de La Gontrie et Narassiguin, M. Roiron, Mme Daniel, M. Jomier, Mme G. Jourda, M. M. Weber et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 67

Supprimer les mots :

, le Gouvernement

La parole est à M. Didier Marie.

M. Didier Marie. Cet amendement a pour objet de supprimer la possibilité, introduite par la présente proposition de résolution, pour le Gouvernement de demander l’inscription en séance publique d’une proposition de résolution portant avis motivé au titre du principe de subsidiarité.

Rappelons que le Gouvernement a le droit de faire part, de son propre chef et en amont, de ses réserves au titre dudit principe.

Je souligne que la procédure d’examen au titre du respect du principe de subsidiarité est un droit dévolu par le traité de Lisbonne aux parlements nationaux. L’article 5 du traité sur l’Union européenne dispose ainsi, en son quatrième alinéa, que « les parlements nationaux veillent au respect du principe de subsidiarité conformément à la procédure prévue » au protocole n° 2 annexé au traité.

La procédure concernant les avis motivés au titre de l’article 88-6 de la Constitution vise à ce que ceux-ci soient transmis directement au président du Parlement européen, au président du Conseil de l’Union européenne et au président de la Commission européenne, contrairement aux résolutions européennes au titre de l’article 88-4 qui, elles, sont destinées au Gouvernement.

Cette possibilité d’inscription en séance accordée au Gouvernement serait, par conséquent, source de confusion et contraire à nos principes.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je n’en suis pas certaine, mon cher collègue !

Le Conseil constitutionnel a prévu clairement, me semble-t-il, que le Gouvernement avait le droit de demander qu’une assemblée se prononce sur une proposition de résolution européenne. Il me paraît donc difficile de l’en priver dans notre règlement.

Par ailleurs, que le Gouvernement puisse solliciter le Sénat sur un enjeu de cette nature, voilà qui ne me heurte pas.

L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Didier Marie, pour explication de vote.

M. Didier Marie. Il s’agit non pas de prévoir que le Gouvernement se dessaisisse de toute possibilité d’intervention devant le Parlement sur des questions européennes, mais d’appliquer le principe de subsidiarité, ce qui est complètement différent.

Le Gouvernement peut, au titre de ce principe et de l’article 88-6 de la Constitution, exprimer toutes les réserves qu’il souhaite. C’est ensuite au Parlement, au titre des traités, de se prononcer à cet égard.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 45.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 46, présenté par MM. Marie et Kerrouche, Mmes Linkenheld et Blatrix Contat, MM. Bourgi, Chaillou et Durain, Mmes Harribey, de La Gontrie et Narassiguin, M. Roiron, Mme Daniel, M. Jomier, Mme G. Jourda, M. M. Weber et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 71, seconde phrase

Remplacer les mots :

peut exercer

par le mot :

exerce

La parole est à M. Didier Marie.

M. Didier Marie. Il s’agit d’un amendement de cohérence avec celui qui porte sur l’alinéa 12. Il vise à donner à la commission des affaires européennes les mêmes compétences que les commissions saisies pour avis lorsqu’une proposition de résolution portant avis motivé doit être examinée en séance. Mais je connais déjà la réponse de la rapporteure…

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Cette faculté est prévue par le règlement. Il n’est pas ressorti des travaux que j’ai pu mener, et peut-être en est-il de même pour Mme Vermeillet, que cette faculté doive se transformer en obligation : avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 46.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 19, modifié.

(Larticle 19 est adopté.)

Article 19
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Article 20

Après l’article 19

Mme la présidente. L’amendement n° 24, présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 19

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 88 du règlement est ainsi rédigé :

« Art. 88. – 1. – Toute pétition ayant atteint un seuil de 50 000 signatures dans un délai de six mois est présentée à la Conférence des Présidents qui vérifie sa recevabilité.

« 2. – Toute pétition valide est transmise à la commission permanente compétente. Celle-ci désigne un rapporteur chargé d’en présenter le contenu et les enjeux et de proposer les suites à lui donner, sur lesquelles la commission permanente se prononce par un vote.

« 3. – Par dérogation, la Conférence des Présidents ou la commission permanente compétente peuvent décider de se saisir, dans des conditions définies par le Bureau, des pétitions n’ayant pas atteint le seuil mentionné au 1. »

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Cet amendement tend à abaisser à 50 000 le seuil de signatures nécessaires pour les pétitions. Je le rappelle, depuis le dernier renouvellement, une seule pétition, qui concernait les autoentrepreneurs et la réforme de la franchise en base de TVA, a atteint les 100 000 signatures. Depuis 2020, cinq pétitions seulement ont atteint ce seuil, soit à peine une par an.

En adoptant cet amendement, nous aurions davantage de latitude pour nous saisir de sujets que les citoyens souhaitent que nous traitions.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Les précisions relatives au seuil de signataires figurent dans l’instruction générale du Bureau et non dans le règlement. Il faut respecter ces différents instruments : avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 24.

(Lamendement nest pas adopté.)

Après l’article 19
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Après l’article 20

Article 20

L’article 91 quinquies du règlement est ainsi rédigé :

« Art. 91 quinquies. – 1. – Les sénateurs n’acceptent aucun cadeau, don, invitation ou avantage en nature proposé par un représentant d’intérêts et dont la valeur excède un montant fixé par le Bureau.

« 2. – Ne sont pas soumises à cette interdiction les invitations à des déplacements de travail proposées par un représentant d’intérêts.

« 3. – Les sénateurs déclarent au Bureau du Sénat les invitations à des déplacements ainsi que les cadeaux, dons et avantages en nature qu’ils ont acceptés, dès lors que leur valeur excède le montant mentionné au 1. La liste de ces invitations, cadeaux, dons et avantages en nature est rendue publique.

« 4. – Ne sont pas soumis à cette obligation déclarative les cadeaux d’usage et les déplacements effectués à l’invitation des autorités étatiques françaises ou dans le cadre d’un autre mandat électif. »

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 41, présenté par M. Bazin et Mme Harribey, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Après le mot :

intérêts

insérer les mots :

ou une personne menant des activités d’influence pour le compte d’un mandant étranger

II. – Alinéa 3

Remplacer les mots :

un représentant d’intérêts

par les mots :

une personne mentionnée au 1.

La parole est à M. Arnaud Bazin.

M. Arnaud Bazin. Conformément aux préconisations du comité de déontologie parlementaire approuvées par le Bureau du Sénat en juillet 2023, l’article 20 vise à interdire aux sénateurs d’accepter des cadeaux de plus de 150 euros offerts par les représentants d’intérêts, par cohérence avec le code de conduite applicable à ces derniers qui leur interdit cette pratique.

Entre-temps, la loi du 25 juillet 2024 visant à prévenir les ingérences étrangères en France a introduit un dispositif d’encadrement spécifique des activités d’influence réalisées pour le compte d’un mandant étranger, qui entrera en vigueur au plus tard le 1er juillet prochain.

Ce dispositif prévoit des obligations déontologiques renforcées pour les personnes agissant pour le compte d’un mandant étranger, par exemple des cabinets de conseil ou d’affaires publiques, à l’exception des personnels diplomatiques et des agents d’États étrangers agissant dans l’exercice de leurs fonctions, qui ne relèvent pas de cette catégorie.

Par cohérence, l’amendement tend à étendre l’interdiction d’accepter des cadeaux de plus de 150 euros aux personnes menant des activités d’influence pour le compte d’un mandant étranger.

Mme la présidente. L’amendement n° 53 rectifié, présenté par MM. J.M. Arnaud et Levi, Mmes Patru et Vérien, M. Laugier, Mme Herzog, M. Mizzon, Mme Florennes, M. Kern et Mme Billon, est ainsi libellé :

Alinéa 3

1° Au début, insérer les mots :

Dans les conditions prévues par le Bureau,

2° Remplacer les mots :

de travail

par les mots :

présentant un lien avec l’exercice du mandat

La parole est à M. Jean-Michel Arnaud.

M. Jean-Michel Arnaud. Il s’agit d’apporter une précision : la notion de déplacement « de travail » n’est en effet pas suffisamment définie, ce qui pourrait être source d’insécurité juridique pour les sénateurs.

L’amendement vise à renvoyer au Bureau du Sénat le soin de définir les invitations à des déplacements qui présentent un lien avec l’exercice du mandat.

Mme la présidente. L’amendement n° 83, présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer les mots :

de travail proposées par un représentant d’intérêts

par les mots :

proposés par un représentant d’intérêt dont le lien avec l’activité parlementaire est apprécié par le Comité de déontologie

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Mme Cécile Cukierman. Mon amendement relève du même esprit que les deux précédents : l’alinéa 3 nous semble juridiquement fragile. La notion de représentant d’intérêts est très large et peut être entendue de diverses manières. Il nous paraît important que le lien avec l’activité parlementaire puisse être apprécié par le comité de déontologie.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Cela a été largement expliqué, nous voulons mettre en conformité le règlement du Sénat avec la loi. C’est ce que fait l’amendement n° 41 de M. Bazin et Mme Harribey : l’avis est donc favorable.

Les amendements nos 53 rectifié et 83 visent un même but de clarification de l’alinéa 3. En effet, les débats en commission ont montré que les dispositions n’étaient pas très claires. J’ai une préférence pour l’amendement de M. Arnaud, qui tend à renvoyer la question devant le Bureau, tout simplement parce que cet organe a vocation à déterminer les règles générales, tandis que le comité de déontologie visé dans l’amendement de Mme Cukierman a plutôt vocation, me semble-t-il, à traiter des problèmes particuliers soulevés par les sénateurs. Le mécanisme de l’amendement n° 53 rectifié me paraît donc plus cohérent.

Je demande donc le retrait de l’amendement n° 83 au profit de l’amendement n° 53 rectifié.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.

M. Arnaud Bazin. Je m’empresse d’abord de dire qu’il est toujours positif de renvoyer les demandes de précision relatives à l’application des dispositions, quelles qu’elles soient, au Bureau, qui statue en toute sagesse.

Toutefois, je m’interroge sur l’utilité de l’amendement n° 53 rectifié. Remplacer la notion de déplacement « de travail » par celle de déplacement « présentant un lien avec le mandat » ne me paraît pas nécessaire.

La jurisprudence constante et ancienne du comité de déontologie a toujours su faire la différence dans les activités que peut englober la notion de déplacement entre ce qui relève du lien avec l’exercice du mandat et ce qui n’en relève pas – je pense, par exemple, à des déplacements de l’ordre de l’agrément personnel, par nature sans lien avec l’exercice du mandat. J’ai du mal à envisager que les précisions apportées par le Bureau s’écartent de cette jurisprudence.

Par ailleurs, si l’éthique définit les grands principes, la déontologie fixe les règles générales, lesquelles sont déclinées, comme l’a souligné Mme la rapporteure, in concreto, au cas par cas, en fonction du contexte. On ne peut raisonnablement espérer que les dispositions, aussi précises soient-elles, prévues par le Bureau échappent à cette réalité de terrain.

Je m’abstiendrai donc sur cet amendement.

Mme la présidente. Madame Cukierman, l’amendement n° 83 est-il maintenu ?

Mme Cécile Cukierman. Au regard des arguments très précis et sérieux apportés par Mme la rapporteure, je retire mon amendement au profit de celui de notre collègue Jean-Michel Arnaud. (Sourires.)

Mme la présidente. L’amendement n° 83 est retiré.

Je mets aux voix l’amendement n° 41.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 53 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 20, modifié.

(Larticle 20 est adopté.)

Article 20
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Article 21

Après l’article 20

Mme la présidente. L’amendement n° 77, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Gontard et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :

Après l’article 20

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La deuxième phrase de l’alinéa 2 de l’article 91 sexies du règlement est complétée par les mots : « et trois membres qualifiés indépendants extérieurs au Sénat ».

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Il est retiré, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 77 est retiré.

Après l’article 20
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Article 22

Article 21

À la fin de l’alinéa 1 de l’article 96 du Règlement, le mot : « Président » est remplacé par le mot : « Bureau ».

Mme la présidente. L’amendement n° 25, présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – L’alinéa 1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le Bureau se prononce par un vote nominatif dont les résultats sont publiés sur le site internet du Sénat. »

La parole est à M. Éric Kerrouche.

M. Éric Kerrouche. Il s’agit d’une petite mesure. L’article 21 prévoit que ce sera désormais le Bureau, et non plus le président du Sénat, qui proposera les sanctions contre un sénateur. Notre amendement tend à fixer les modalités de vote du Bureau du Sénat.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il s’agirait de publier les résultats du vote du Bureau dans le cadre de la mise en œuvre d’une procédure disciplinaire de censure. Le principe est, et doit rester, celui de la confidentialité de ces décisions : avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 25.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 21.

(Larticle 21 est adopté.)

Article 21
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Après l’article 22 (début)

Article 22

L’article 106 du règlement est abrogé – (Adopté.)

Article 22
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
Après l’article 22 (fin)

Après l’article 22

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 1 rectifié est présenté par M. Kerrouche, Mmes de La Gontrie, Narassiguin et Linkenheld, MM. Chantrel, Marie, M. Weber, Kanner, Bourgi, Chaillou et Durain, Mme Harribey, M. Roiron, Mmes Artigalas, Bélim, Blatrix Contat et Bonnefoy, M. Bouad, Mmes Briquet, Brossel et Canalès, M. Cardon, Mmes Conconne et Conway-Mouret, M. Cozic, Mme Daniel, MM. Darras, Devinaz et Éblé, Mme Espagnac, MM. Fagnen et Féraud, Mme Féret, MM. Fichet, Gillé, Jacquin, Jeansannetas, P. Joly et Jomier, Mmes G. Jourda et Le Houerou, M. Lozach, Mme Lubin, MM. Lurel, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Omar Oili, Ouizille et Pla, Mme Poumirol, MM. Raynal et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, M. Ros, Mme Rossignol et MM. Stanzione, Temal, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Vayssouze-Faure et Ziane.

L’amendement n° 78 est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, M. Gontard et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

L’amendement n° 86 est présenté par Mme Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 22

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 102 bis du règlement est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ce crédit augmente annuellement au minimum en fonction du taux prévisionnel d’évolution de la moyenne annuelle de l’indice des prix à la consommation des ménages, hors tabac, annexé au projet de loi de finances de l’année de versement, arrondi au demi-entier supérieur. »

La parole est à M. Éric Kerrouche, pour présenter l’amendement n° 1 rectifié.

M. Éric Kerrouche. J’ai évoqué cet amendement lors de mon intervention en discussion générale. Il s’agit de faire en sorte que l’enveloppe affectée aux crédits des collaborateurs soit a minima indexée sur l’inflation.

Depuis 2020, le salaire moyen des collaborateurs n’a augmenté que de 6 %, grâce à son alignement sur le point d’indice de la fonction publique, alors que l’inflation sur cette même période s’est élevée à 13,2 %.

Je l’ai dit, nous avons besoin d’expertise et de pouvoir traiter financièrement nos collaborateurs dans les meilleures conditions. Il faut donc que ces emplois soient attractifs et bien rémunérés.

Mme la présidente. La parole est à M. Thomas Dossus, pour présenter l’amendement n° 78.

M. Thomas Dossus. Il s’agit du même amendement que celui de M. Kerrouche. J’y insiste, le salaire moyen des collaborateurs n’a augmenté que de 6 % depuis 2020, tandis que l’inflation sur la même période s’est élevée à 13,2 %. On ne peut que constater le décalage.

Pour bien exercer son mandat, il faut avoir des collaborateurs efficaces. Au vu de la place prise par le Parlement ces dernières années, nous avons besoin d’avoir des équipes qui soient plus professionnelles et donc mieux payées.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l’amendement n° 86.

Mme Cécile Cukierman. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il me semble que ce sont des amendements d’appel que leurs auteurs vont retirer ; à défaut, l’avis sera défavorable.

En effet, chacun sait ici que le règlement ne prévoit pas ce type de mesures financières. Les arbitrages budgétaires relèvent des questeurs.

Mme la présidente. La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour explication de vote.

M. Antoine Lefèvre. Nous partageons tous la conviction des auteurs des trois amendements quant au fait que la démocratie parlementaire implique, pour son bon fonctionnement, de nous doter des moyens humains nous permettant d’exercer correctement nos mandats.

Nos collaborateurs sont des rouages indispensables au bon fonctionnement de l’institution sénatoriale. Ils doivent être en nombre suffisant et rémunérés à la hauteur des missions qui leur sont confiées.

Il me paraît cependant important de rectifier quelques-uns des chiffres qui viennent d’être énoncés. Depuis 2018, la rémunération moyenne des collaborateurs a progressé de 12,8 % quand, sur la même période, l’inflation a été de 13,9 %. Le différentiel est donc de 1 point seulement, et non de 7, comme le laissent penser les chiffres avancés par nos collègues.

Se placer juste après la dernière grande revalorisation de 10 % de l’enveloppe affectée aux crédits des collaborateurs pour apprécier la progression de leur rémunération comporte nécessairement un biais. Le Sénat n’a pas laissé le pouvoir d’achat des collaborateurs se dégrader sans prendre de mesures correctrices.

Depuis l’augmentation de cette enveloppe, intervenue fin 2018, nos collaborateurs ont bénéficié en 2022, puis en 2023, des augmentations du point de la fonction publique, comme les personnels du Sénat. Au total, 7,5 millions d’euros ont été investis depuis 2018 pour l’amélioration des rémunérations de nos collaborateurs.

En dehors de ces mesures strictement salariales, nous nous sommes attachés à protéger ces derniers des conséquences de l’inflation. Je citerai, par exemple, l’amélioration de la prise en charge de leurs frais de transport entre domicile et lieu de travail ou le choix que nous avons fait de prendre en charge sur la part employeur les augmentations de cotisations décidées ces dernières années par la mutuelle et la prévoyance.

Je sais que la comparaison du montant en valeur absolue de l’enveloppe affectée aux crédits de nos collaborateurs avec celle des collaborateurs des députés est souvent tentante pour expliquer que nous serions moins bien traités et que nos collaborateurs en souffriraient. La réalité est différente : à l’Assemblée nationale, nos collègues doivent financer sur leur enveloppe des dispositifs qui, chez nous, sont pris en charge par l’Association pour la gestion des assistants de sénateurs (Agas) de façon collective et s’ajoutent donc à notre crédit. Je pense au treizième mois, aux titres-restaurant, aux frais de transport, à la prévoyance, à la mutuelle ou encore à la médecine du travail.

Par ailleurs, certains dispositifs collectifs particulièrement plébiscités par nos collaborateurs n’existent pas à l’Assemblée nationale, comme le plan d’épargne retraite ou le plan d’épargne d’entreprise.

Au total, le Sénat dépense en moyenne 82 000 euros par an et par collaborateur, là où l’Assemblée nationale ne dépense que 59 000 euros.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1 rectifié, 78 et 86.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 257 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 337
Pour l’adoption 112
Contre 225

Le Sénat n’a pas adopté.

Vote sur l’ensemble

Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de résolution, je donne la parole à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.

M. Éric Kerrouche. Je le répète, nous étions dans une logique constructive quant à cette proposition de résolution. L’attitude de la rapporteure a consisté à dire que, quels que soient nos amendements – dont plusieurs ne semblaient pas complètement insensés –, il n’était pas possible de faire évoluer certaines parties du texte. Nous le regrettons.

Nous nous abstiendrons donc sur ce texte.

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Mon intervention sera de la même teneur.

Je l’ai déjà dit tout à l’heure, un intéressant travail de compromis a été mené pour modifier le règlement, en prenant soin de laisser de côté les éléments qui ne faisaient pas consensus. Nous étions parvenus à une base de travail correcte, laquelle nécessitait ensuite un travail parlementaire classique, c’est-à-dire des propositions de chaque groupe.

Les débats qui se sont tenus ce soir ne sont pas allés, me semble-t-il, dans le bon sens. Les seuls amendements qui ont reçu un avis de sagesse de Mme la rapporteure visaient à restreindre le temps de parole et le droit d’amendement, ce qui me semble contraire à la ligne que nous nous étions fixée.

Pour notre part, nous étions nous aussi plutôt enclins à voter cette proposition de résolution, mais après le débat que nous avons eu ce soir, nous nous abstiendrons.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet, pour explication de vote.

Mme Sylvie Vermeillet. Je voudrais remercier tous ceux qui ont contribué au résultat de ce soir : le président Larcher, qui a signifié sa volonté de modifier le règlement ; l’ensemble des groupes politiques, qui se sont exprimés durant des mois ; les présidents de commission et de délégation ; les services de la séance, que j’ai évoqués lors de la discussion générale ; les vice-présidents ; et enfin vous, mes chers collègues, qui avez participé ce soir à nos débats.

J’ai apprécié nos échanges. Nous aurons désormais un outil plus efficace au service de notre Haute Assemblée. Le règlement est en adaptation permanente : monsieur le président Gontard, monsieur Kerrouche, d’autres évolutions auront lieu.

Je resterai à l’écoute de tous pour que notre assemblée continue de travailler le mieux possible et que nous tentions collectivement de créer un outil qui permette au Sénat d’être ce qu’il est, c’est-à-dire, je le crois, admirable. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains et RDPI.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 258 :

Nombre de votants 341
Nombre de suffrages exprimés 241
Pour l’adoption 241
Contre l’adoption 0

Le Sénat a adopté.

En application du premier alinéa de l’article 61 de la Constitution, la résolution que le Sénat vient d’adopter sera soumise avant sa mise en application au Conseil constitutionnel.

Après l’article 22 (début)
Dossier législatif : proposition de résolution tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification
 

6

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 9 avril 2025 :

À quinze heures :

Questions d’actualité au Gouvernement

De seize heures trente à vingt heures trente :

(Ordre du jour réservé au groupe RDPI)

Proposition de loi relative à la reconnaissance de la responsabilité de l’État et à l’indemnisation des victimes du chlordécone, présentée par M. Dominique Théophile (texte n° 27, 2024-2025) ;

Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à améliorer le traitement des maladies affectant les cultures végétales à l’aide d’aéronefs télépilotés (texte de la commission n° 490, 2024-2025).

Le soir :

Débat sur la santé mentale, grande cause du gouvernement pour l’année 2025 : quels moyens pour en faire une priorité ?

Personne ne demande plus la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 9 avril 2025, à deux heures cinq.)

Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,

le Chef de publication

FRANÇOIS WICKER