M. Gérald Darmanin, garde des sceaux. Au travers de cet amendement, nous souhaitons rétablir une disposition forte, à dimension potentiellement polémique, proposée par le président du groupe Ensemble pour la République de l’Assemblée nationale, mais dans une rédaction légèrement différente de la sienne. Il s’agit d’introduire une procédure d’audience unique en comparution immédiate, avec une possibilité pour le mineur de renoncer au délai de dix jours évoqué précédemment par le rapporteur.

À la différence de Mme Carrère-Gée, nous prévoyons que seuls les mineurs de plus de 16 ans soient concernés par cette mesure, conformément d’ailleurs à l’article initialement proposé par Gabriel Attal.

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 3 rectifié est présenté par Mme Vérien, MM. J.M. Arnaud et Bitz, Mme Florennes, MM. Marseille et Parigi, Mmes Patru, Tetuanui et Guidez, MM. Delahaye et Mizzon, Mmes de La Provôté, Billon, Herzog et Jacquemet, M. Lafon, Mmes Romagny, Housseau et Sollogoub, MM. Delcros et Duffourg et Mme Devésa.

L’amendement n° 10 rectifié est présenté par Mme Ramia, M. Rohfritsch, Mme Schillinger, MM. Patriat, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, M. Patient, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud et Théophile.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le code de la justice pénale des mineurs est ainsi modifié :

(Supprimé)

1° bis (nouveau) L’article L. 423-7 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lors de la présentation prévue au 2° du présent article, lorsque le procureur de la République saisit le tribunal pour enfants aux fins de jugement en audience unique dans les conditions prévues au 1° et au a du 2° de l’article L. 423-4 et qu’il fait comparaître le mineur devant le juge des libertés et de la détention en application du 2° de l’article L. 423-9 pour qu’il soit statué sur son placement en détention provisoire, il peut demander au mineur, en présence de son avocat, s’il consent expressément à renoncer au délai de dix jours avant la comparution devant le tribunal pour enfants. Le tribunal pour enfants entend, le cas échéant, les représentants légaux dûment convoqués. Si ces conditions sont réunies, le mineur peut être convoqué, selon la procédure d’audience unique en comparution immédiate, le jour même ou, à défaut, à la première audience utile du tribunal pour enfants. » ;

1° ter (nouveau) Le 1° de l’article L. 423-8 est complété par les mots : « , sauf dans le cas de l’audience unique en comparution immédiate prévue au dernier alinéa de l’article L. 423-7 » ;

(Supprimé)

La parole est à Mme Dominique Vérien, pour présenter l’amendement n° 3 rectifié.

Mme Dominique Vérien. Je retire cet amendement de rétablissement de l’article 4 au profit de l’amendement de Mme Carrère-Gée, madame la présidente.

Mme la présidente. L’amendement n° 3 rectifié est retiré.

La parole est à Mme Salama Ramia, pour présenter l’amendement n° 10 rectifié.

Mme Salama Ramia. Cet amendement vise à rétablir l’article 4 dans la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale. Il s’agit d’instaurer une nouvelle procédure de comparution immédiate à audience unique, afin de garantir une réponse pénale plus rapide et mieux adaptée.

Ce dispositif, strictement encadré, ne concernera que les mineurs de plus de 16 ans déjà condamnés pour des infractions graves passibles de plus de sept ans de prison et en état de récidive légale. Il s’agirait donc d’une procédure exceptionnelle, réservée aux situations où le trouble à l’ordre public exige une réaction immédiate.

Les mineurs pourront alors être déférés le jour même, ce qui garantira une justice plus efficace et plus lisible pour nos concitoyens. Parce qu’une sanction juste est une sanction qui intervient sans délai, nous faisons le choix d’une justice à la fois rapide et rigoureuse.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Francis Szpiner, rapporteur. Ma chère collègue, votre amendement n° 10 rectifié visant à rétablir le texte initial de l’article, dont vous venez de décrire le dispositif, est inapplicable : il faudrait que le mineur soit en situation de récidive.

Or cette notion implique d’avoir épuisé toutes les voies de recours pour un délit ayant entraîné une condamnation à plus de sept ans d’emprisonnement. En pratique, il aura donc atteint la majorité quand il s’agira de le juger : cela me paraît totalement impossible !

M. Francis Szpiner, rapporteur. En ce qui concerne l’amendement n° 48 rectifié sexies de Mme Carrère-Gée, j’appelle l’attention du Sénat sur le fait qu’une disposition instaurant une procédure de comparution immédiate pour des gamins de 13 ans ne passera jamais le cap du Conseil constitutionnel ! (Marques dapprobation sur les travées du groupe SER.)

Vous rendez-vous compte, mes chers collègues, de ce que vous apprêtez à voter ?

M. Francis Szpiner, rapporteur. Vous allez permettre le jugement en comparution immédiate de gamins de 13 ans, dans des délais rapides, comme on juge un majeur, sans proposer de mesures éducatives !

Actuellement, si des mineurs commettent des faits extrêmement graves de nature criminelle, ils relèvent déjà du juge d’instruction.

M. Francis Szpiner, rapporteur. S’il ne s’agit pas d’actes de nature criminelle, les faits visés dans l’amendement englobent tout le code pénal, puisque ce sont ceux qui sont passibles d’une peine, selon les cas, de trois ou cinq ans. Cela signifie donc que vous voulez purement et simplement supprimer la justice des mineurs !

C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable sur cet amendement. J’y insiste, mes chers collègues, vous devrez endosser la responsabilité de votre vote ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Et quand le Conseil constitutionnel vous renverra à vos chères études, nous verrons bien ce qu’il en est…

J’en viens à l’amendement n° 52 du Gouvernement. Pour commencer, je vous remercie, monsieur le garde des sceaux, d’être défavorable à l’amendement de Mme Carrère-Gée, qui vise à envoyer des gamins de 13 ans en comparution immédiate. (M. le garde des sceaux sourit.)

Néanmoins, sauf erreur de ma part, il me semble que vous n’avez pas introduit de limite d’âge dans votre dispositif, puisque vous parlez de « mineurs » sans autre précision ; mais il se peut que j’aie lu trop vite, c’est pourquoi je me tourne vers vous m’en assurer.

En tout état de cause, je le répète, si l’on veut juger un mineur rapidement, il est déjà possible de le faire. J’ai précédemment cité l’exemple de ce qui vient de se passer à Orléans : l’auteur de l’agression du rabbin dort déjà en prison, il sera jugé dans trois semaines, sans qu’il y ait eu besoin d’une procédure de comparution immédiate.

Par ailleurs, je le répète, s’il s’agit de faits criminels, on peut déjà, aujourd’hui, renvoyer le mineur devant un juge d’instruction, lequel a à sa disposition tous les moyens pour prononcer la détention et le contrôle judiciaire.

Bref, une telle mesure n’améliorera rien et ne permettra pas une justice plus rapide. Vous confondez, mes chers collègues, justice et justice expéditive. Ce n’est pas ma conception ! (Marques dassentiment sur les travées du groupe SER.)

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux. Monsieur le rapporteur, le Gouvernement entend ne viser, au travers de son amendement, que les mineurs de plus de 16 ans ; des articles spécifiques du code de la justice pénale des mineurs sont bien visés.

Il est vrai que nous ne l’avons pas expressément indiqué après chaque occurrence du mot « mineur », mais ce point peut être précisé en commission mixte paritaire. Je peux aussi rectifier mon amendement en séance dans ce sens. En tout état de cause, je vous le confirme, nous ne souhaitons viser que les mineurs de plus de 16 ans.

J’entends aussi votre interrogation sur l’amendement n° 10 rectifié de Mme Ramia, et donc sur la rédaction initiale de l’article dans la proposition de loi de M. Attal. Étaient en effet visées des situations assez exceptionnelles, dans lesquelles il y avait non pas réitération, mais récidive, c’est-à-dire des délits ayant donné lieu à une condamnation définitive.

Toutefois, monsieur le rapporteur, vous êtes trop fin juriste pour ignorer que tout le monde n’interjette pas appel ni ne se pourvoit en cassation.

M. Francis Szpiner, rapporteur. Avec une loi pareille, les avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation s’en donneront à cœur joie ! (Sourires.)

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux. Sans doute, cher maître… (Nouveaux sourires.)

Toutefois, il est des cas dans lesquels un jeune est condamné pour un fait délictuel à l’âge de 16 ans et est déjà libéré définitivement à 17 ans ou 17 ans et demi, surtout si le code de la justice pénale des mineurs est bien appliqué – avec un jugement intervenant dans les neuf mois, comme c’est le cas actuellement, et demain dans les six mois.

Ces cas sont peu nombreux – je vous le concède volontiers –, ce qui renforce l’argumentation en faveur de notre amendement. La mesure ne concernera finalement que peu de personnes, et ne conduit donc pas à une généralisation de la comparution immédiate des mineurs. J’aurais aimé profiter de tels moyens lors des émeutes urbaines de 2023, lorsque j’étais ministre de l’intérieur et Éric Dupond-Moretti garde des sceaux.

À l’époque, dans un contexte d’hyperviolences, j’avais donné des instructions pour procéder à des interpellations systématiques. Nous avions constaté que l’âge moyen des individus interpellés s’élevait à 16 ans ou 17 ans, qu’ils étaient souvent réitérants et parfois récidivistes. Nous aurions alors aimé pouvoir apporter une réponse plus rapide. Cela nous aurait permis : soit de ne pas avoir à relâcher des gamins en proie à cette hyperviolence, représentant un danger pour eux-mêmes et pour la société, et d’éviter l’effet mimétique ; soit de les faire dormir en prison. Car comparution immédiate ne signifie pas forcément incarcération. Ce genre de mesures peut donc être protecteur.

Le dispositif tel qu’il est actuellement rédigé est-il parfait ? La réponse est non. Pour les raisons que vous avez évoquées, monsieur le rapporteur, il ne révolutionnera pas la justice des mineurs, mais il constituera un point d’appui intéressant. C’est pourquoi je propose de rétablir l’article 4 de la proposition de loi, dans une meilleure rédaction.

En ce qui concerne l’amendement de Mme Carrère-Gée, je partage une grande partie des propos de M. le rapporteur : il ne me paraît ni constitutionnel – c’est même certain ou presque – ni même raisonnable de prévoir qu’un individu de 13 ans passe en comparution immédiate pour les délits visés, lesquels sont très nombreux.

J’appelle votre attention sur un point, mesdames, messieurs les sénateurs : vous proposez de passer de rien – avant 13 ans, il n’y a pas de responsabilité pénale – à la comparution immédiate dès cet âge.

M. Marc-Philippe Daubresse. À 13 ans, on est responsable !

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux. Certes, mais la question n’est pas là, monsieur le sénateur : il s’agit non pas de dire qu’à 13 ans on n’est pas du tout responsable, mais de savoir si l’on permet une comparution immédiate dès cet âge. Le Sénat tranchera dans le sens qu’il entend…

En tout état de cause, je ne peux pas émettre un avis favorable sur l’amendement n° 48 rectifié sexies, en tout cas dans sa rédaction actuelle.

Aussi, madame Carrère-Gée, et madame Vérien, puisque vous avez retiré votre amendement au profit de celui de votre collègue, discutons soit de la borne d’âge, ne serait-ce que pour rendre cette disposition constitutionnelle – sans cela, l’ensemble de la comparution immédiate pour les mineurs, c’est-à-dire l’ensemble de l’article 4, tombera –,…

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux. J’entends dire « tant mieux » derrière moi… (Sourires.)

Mme Laurence Harribey. Nous allons voter l’amendement de Marie-Claire Carrère-Gée ! (Nouveaux sourires.)

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux. Discutons donc soit de la borne d’âge, disais-je, soit de la question de la récidive, pour retenir plutôt la notion de réitération ; cela posera aussi des questions de constitutionnalité, mais différentes.

Je propose donc, pour éviter de renvoyer cette question à la commission mixte paritaire, que Mme Carrère-Gée rectifie son amendement en ce sens. Si elle refuse la borne de 16 ans, peut-être pourrait-elle envisager 15 ans, mais, honnêtement, proposer une comparution immédiate pour des jeunes de 13 ou 14 ans me paraît déraisonnable.

Je le répète, aujourd’hui, il n’existe rien d’autre que le dispositif décrit par M. le rapporteur en matière criminelle, lequel est d’ailleurs important ; donc ne passons pas de zéro au maximum…

M. Olivier Paccaud. Mais ne restons pas à zéro !

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux. C’est bien ce que je propose, monsieur le sénateur Paccaud.

Je récapitule : soit vous adoptez l’amendement du Gouvernement ; soit Mme Carrère-Gée accepte de rectifier son amendement afin de modifier la borne d’âge, le quantum de peine encourue ou la condition de récidive, afin que ce ne soit pas applicable à des gamins de 13 ans, auquel cas j’accepterai de retirer mon amendement et d’émettre un avis de sagesse. Si ce n’est pas le cas, je maintiendrai mon amendement et le Sénat délibérera souverainement.

Quant à l’amendement n° 10 rectifié de Mme Ramia, il est pris entre celui du Gouvernement, dont la rédaction emporte ma préférence, et celui de Mme Carrère-Gée, si celle-ci accepte de le rectifier. Donc retrait ou, à défaut, avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Claire Carrère-Gée, pour explication de vote.

Mme Marie-Claire Carrère-Gée. D’abord, monsieur Darmanin, la disposition que vous proposez s’appliquera à tous les mineurs.

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux. Non.

Mme Marie-Claire Carrère-Gée. Si, je peux vous l’affirmer, monsieur Darmanin, elle permet la comparution immédiate de mineurs de plus de 13 ans.

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux. Mais non !

Mme Marie-Claire Carrère-Gée. En outre, vous parlez des mineurs âgés de 13 ans, comme si nous proposions de les faire tous passer en comparution immédiate, mais nous ne visons que les mineurs de plus de 13 ans déjà connus de la justice et qui ont commis des faits passibles de cinq ans d’emprisonnement, comme le vol avec violence. Ce sont donc des mineurs qui ont déjà vu un juge et qui ont commis des faits graves.

Cela étant, je suis favorable – je vous l’ai dit cet après-midi –, à l’élaboration d’une rédaction commune, mais ayons simplement conscience que votre amendement est identique au nôtre, même s’il est rédigé différemment. Si cela est possible, progressons ensemble.

Mme la présidente. Monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, il est minuit. Je propose de prolonger notre séance jusqu’à minuit et demi.

Il n’y a pas d’observation ?…

Il en est ainsi décidé.

La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux. Je souhaite simplement indiquer à Mme la ministre Carrère-Gée que la référence, au sein de mon amendement, aux articles L. 423-7 et L. 423-4 du code de la justice pénale des mineurs renvoie à l’audience unique, laquelle ne s’applique qu’aux plus de 16 ans.

Ne faites donc pas dire à mon amendement ce qu’il ne dit pas, madame la sénatrice. Je le répète, mon amendement ne s’applique pas aux moins de 16 ans : aussi n’est-il pas identique au vôtre.

Mme Frédérique Puissat. Je demande une suspension de séance, madame la présidente !

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à minuit, est reprise le mercredi 26 mars 2025, à zéro heure dix.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

La parole est à Mme Marie-Claire Carrère-Gée.

Mme Marie-Claire Carrère-Gée. Madame la présidente, je souhaite rectifier mon amendement n° 48 rectifié sexies dans le sens proposé, afin de favoriser l’adoption la plus large possible de la disposition.

Je remplace donc la borne de 13 ans par celle de 15 ans.

Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 48 rectifié septies, présenté par Mmes Carrère-Gée et Belrhiti, MM. Bruyen, Burgoa et Daubresse, Mmes Dumont, Evren et Garnier, M. Karoutchi, Mmes Lassarade et Lavarde, MM. Lefèvre et H. Leroy, Mmes M. Mercier et Micouleau, MM. Naturel, Reynaud et Anglars, Mmes Gruny, Imbert et P. Martin, M. Panunzi, Mme Puissat, MM. Sol et Saury, Mme Lopez, MM. Rojouan, P. Vidal, Somon et Delia, Mmes Bellurot et Ciuntu, MM. Husson et Paccaud, Mmes Valente Le Hir et Josende, MM. Meignen et Rapin, Mme Berthet, MM. Brisson et Sido et Mme Aeschlimann, et ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Le code de la justice pénale des mineurs est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 423-5, il est inséré un article L. 423-5-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 423-5-1. – En cas de saisine du tribunal pour enfants par procès-verbal lors d’un défèrement, le mineur âgé d’au moins quinze ans peut faire l’objet d’une procédure d’audience unique en comparution immédiate dans les conditions prévues par le présent article, dès lors qu’il :

« 1° A déjà fait l’objet d’une mesure éducative, d’une mesure judiciaire d’investigation éducative, d’une mesure de sûreté, d’une déclaration de culpabilité ou d’une peine prononcée dans le cadre d’une autre procédure et ayant donné lieu à un rapport datant de moins d’un an. Ce rapport est versé au dossier de la procédure par le procureur de la République ; s’il n’a pas déjà été déposé, ce magistrat peut le requérir à l’occasion du défèrement ;

« 2° Encourt une peine supérieure ou égale à cinq ans d’emprisonnement, pour le mineur âgé de quinze à seize ans, ou supérieure ou égale à trois ans d’emprisonnement, pour le mineur d’au moins seize ans.

« Lorsque les conditions prévues aux 1° et 2° sont réunies, le procureur de la République peut demander au mineur, en présence de son avocat, s’il consent à renoncer au délai de dix jours avant la comparution, sauf si ses représentants légaux, dûment convoqués, font connaître leur opposition. S’il y consent et en l’absence d’opposition des représentants légaux, le mineur est convoqué, aux fins de jugement en audience unique selon la procédure prévue par les articles L. 521-26 et L. 521-27, le jour même ou, à défaut, à la première audience utile du tribunal pour enfants qui doit intervenir dans un délai de cinq jours ouvrables.

« À peine de nullité, les formalités mentionnées au quatrième alinéa du présent article font l’objet d’un procès-verbal dont copie est remise au mineur et qui saisit le tribunal pour enfants.

« Si l’audience unique ne peut pas se tenir le jour même, et aussitôt après avoir procédé aux formalités précitées, le procureur de la République fait comparaître le mineur devant le juge des enfants ou le juge des libertés et de la détention, dans les conditions prévues à l’article L. 423-9, afin qu’il soit statué sur ses réquisitions tendant soit au placement sous contrôle judiciaire, soit au placement sous assignation à résidence avec surveillance électronique, soit au placement en détention provisoire du mineur jusqu’à l’audience.

« Les représentants légaux du mineur sont avisés de la décision du juge des enfants ou du juge des libertés et de la détention par tout moyen. »

2° La section 3 du chapitre Ier du titre II du livre V est complétée par un article L. 521-… ainsi rédigé :

« Art. L. 521-… – Lorsque le tribunal pour enfants est saisi aux fins de jugement selon la procédure de comparution rapide mentionnée à l’article L. 423-5-1 et que soit le mineur ne consent pas à être jugé sur le champ, soit ses représentants légaux s’y opposent, ou lorsque le tribunal constate que l’affaire n’est pas en état d’être jugée, le tribunal pour enfants, après avoir recueilli les observations du mineur et de son avocat ainsi que de ses représentants légaux, renvoie à une audience qui doit avoir lieu dans un délai qui ne peut être inférieur à dix jours, ni supérieur à un mois.

« Dans ce cas, le tribunal peut soumettre, jusqu’à la tenue de l’audience, le mineur à l’une des mesures de sûreté prévues par le titre III du livre III du présent code. »

Quel est l’avis de la commission ?

M. Francis Szpiner, rapporteur. C’est votre dernier mot, ma chère collègue ? (Sourires.)

Pour ma part, je reste défavorable à une telle mesure, mais je me réjouis que vous ayez choisi la borne de 15 ans plutôt que 16 ans, car, dans ces conditions, je suis certain que le Conseil constitutionnel rejettera cette disposition ; à 16 ans, cela pouvait se discuter…

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérald Darmanin, garde des sceaux. Je retire mon amendement n° 52 et j’émets un avis de sagesse sur l’amendement n° 48 rectifié septies.

Mme la présidente. L’amendement n° 52 est retiré.

La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.

Mme Marion Canalès. Ce débat porte sur l’accélération de la réponse pénale pour les mineurs, que vous appelez de vos vœux, madame Carrère-Gée, et qui est l’objet de votre amendement.

Là où certains de nos collègues voient de la fermeté, nous ne voyons qu’un renoncement aux principes à valeur constitutionnelle qui structurent la justice pénale des mineurs : des sanctions adaptées, des magistrats spécialisés, des procédures particulières. Bref, on veut aller plus loin, « plus vite, plus haut, plus fort »…

Le code de la justice pénale des mineurs a été adopté voilà quelques années à peine, principalement pour accélérer le jugement des mineurs, et il prévoyait déjà une procédure de jugement en audience unique. Quelle est donc la plus-value d’une telle disposition aujourd’hui ? Sur quels constats se fonde-t-on pour la proposer ? Quelle a été l’évaluation des dispositions de ce code ?

Surtout, que fait-on du principe de la primauté de l’éducatif, qui implique la connaissance de la personnalité et de la situation familiale du mineur ?

Tout cela nous semble incompatible et cette mesure n’apporte aucune plus-value. Nous voterons donc évidemment contre l’amendement n° 48 rectifié septies.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Je me suis demandé, en lisant l’exposé des motifs de l’amendement n° 48 rectifié septies, dans quelles hypothèses cette procédure de comparution immédiate pourrait être utilisée. On nous parle des vols avec violence ou encore des émeutes urbaines, mais, vous me le concéderez, mes chers collègues, nous n’en avons tout de même pas tous les trois mois – et heureusement !

En revanche, il y a une forme d’infraction pénale très courante chez les mineurs et qui nous préoccupe beaucoup : les infractions à caractère sexuel. Or, en la matière, même si je n’ai aucun conseil à donner à quiconque, peut-être serait-il opportun de faire preuve de cohérence entre nos différents travaux, par exemple entre les rapports de nos missions d’information et le texte que nous examinons aujourd’hui.

Lorsqu’un mineur commet une infraction sexuelle, il encourt une peine d’au moins trois ans. Par conséquent, il peut entrer dans le cadre de la comparution immédiate, surtout s’il réitère, auquel cas il suffit qu’il ait fait l’objet d’une déclaration de culpabilité. Comme en liberté, il peut commettre, en centre éducatif fermé, une telle infraction sur un autre mineur.

Or un mineur auteur de violences sexuelles est très probablement un mineur précédemment victime de violences sexuelles. Il est donc utile que se tiennent une audience de culpabilité, d’abord, et une audience de sanction, ensuite : l’intervalle permet de travailler à faire sortir ce que cet enfant a subi en tant que victime de façon à ce qu’il prenne conscience de ce qu’il a fait en tant qu’auteur.

Nous savons que, pour éviter la récidive, il faut d’abord que l’auteur d’une infraction ait conscience de ses actes : quand il a été victime, il faut donc qu’il le réalise. Avec la comparution immédiate de ces mineurs, mes chers collègues, vous êtes en train de créer une machine à récidiver en matière de violences sexuelles.

Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Laurence Rossignol. Monsieur le ministre, la délinquance des mineurs ne se réduit pas à mettre le feu à une bibliothèque !

Mme la présidente. La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse, pour explication de vote.

M. Marc-Philippe Daubresse. Je soutiens la position de Mme Marie-Claire Carrère-Gée. Nous sommes plusieurs à avoir cosigné son amendement après avoir été interpellés par le raisonnement de la commission : la première rédaction de la proposition de loi Attal était inapplicable car elle posait d’importants problèmes constitutionnels, comme l’a souligné, à raison, M. le rapporteur.

Nous le disions encore ce matin, Mme Josende apportera partiellement des réponses au travers de son amendement n° 36 rectifié quater sur l’audience unique, car l’enjeu est double.

En premier lieu, il faut être plus efficace, et plus rapidement.

En second lieu, l’expression « comparution immédiate » constitue une alerte : c’est un symbole important, qui peut faire changer un certain nombre de comportements. Telle est l’intention qui sous-tend notre amendement. Nous avons entendu beaucoup de choses sur les émeutes qui ont eu lieu il y a quelques mois : avec des comparutions immédiates, nous aurions pu changer la donne.

Nous souhaitons l’adoption de l’amendement n° 48 rectifié septies, et nous réjouissons de la position du garde des sceaux. Comme il l’a dit, nous discuterons de l’âge permettant une comparution immédiate lors de la commission mixte paritaire : 15 ans, 16 ans ? En tout cas, il est important que nous votions ce soir des dispositions aussi fondamentales que celles qui sont contenues dans cet amendement ou que le renversement du principe d’atténuation des peines.

Mme Laurence Rossignol. Les atténuations de peine, cela n’existe pas !

Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.