M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
Mme Maryse Carrère. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, il est consternant et inquiétant qu’en 2025 notre assemblée doive encore légiférer pour lutter contre l’antisémitisme et le racisme.
Nos parents et grands-parents ont combattu ces idéologies mortifères, nos institutions ont été bâties sur le rejet de toute forme de discrimination, notre République s’est construite sur les valeurs d’égalité et de fraternité. Et pourtant, malgré des plans successifs et la mobilisation constante des pouvoirs publics et de nombre d’acteurs, ces fléaux persistent.
Alors que nous disposons d’un arsenal juridique qui devrait nous prémunir contre de telles dérives, la haine trouve encore des espaces pour s’exprimer, notamment dans nos établissements d’enseignement supérieur. Si des dispositifs de détection et de sanction existent dans la plupart des universités, force est de constater qu’ils ne suffisent pas ou plus à endiguer des phénomènes qui trouvent leur source à l’extérieur de leurs murs.
Il est insupportable que des étudiants ne puissent pas poursuivre leur formation dans de bonnes conditions en raison de leur origine, de leur confession ou de leur appartenance, réelle ou supposée, à un groupe. Il est tout aussi inacceptable que des professeurs ne puissent exercer sereinement leur mission d’enseignement et que des événements universitaires soient perturbés ou annulés en raison de menaces ou d’intimidations.
Ces incidents répétés portent atteinte non seulement à la dignité des personnes visées, mais aussi au bon fonctionnement de l’institution universitaire, qui doit redevenir ce qu’elle n’aurait jamais dû cesser d’être : un sanctuaire de la pensée critique, un rempart contre l’obscurantisme. La mission première de l’université est d’être un lieu d’exigence intellectuelle, de production et de transmission du savoir, un lieu d’émancipation.
Cette proposition de loi n’a donc nullement pour objectif d’établir une quelconque hiérarchie entre les différentes formes de haine et de discrimination qui minent notre société. Son but est d’identifier précisément ces phénomènes et de les nommer pour mieux les combattre.
Qu’il s’agisse d’antisémitisme, de racisme, d’homophobie ou de toute autre forme de discrimination, ces manifestations de violence et de haine sont intolérables. Elles doivent être combattues avec la même détermination, car c’est bien le même poison qui est à l’œuvre. Notre responsabilité est donc de former des esprits capables de déconstruire ces narratifs toxiques.
Dans ce cadre, la prévention ne peut se résumer à des mécanismes de signalement. Elle exige une approche globale et coordonnée, dont la formation constitue le pilier central. Elle doit s’inscrire dans un continuum éducatif, de l’école primaire à l’université.
Mes chers collègues, cette proposition de loi est une étape ; nous espérons qu’elle sera la dernière. Si des dispositifs existent et si cette proposition de loi vient utilement les compléter, ne relâchons pas notre vigilance. La lutte contre l’antisémitisme, le racisme et toutes les formes de violence et de haine exige une mobilisation constante de l’ensemble de la communauté nationale, afin que nous n’ayons plus à légiférer sur ces sujets.
Le groupe RDSE votera en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et RDPI, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. M. le président Laurent Lafon, renonce à son temps de parole pour permettre au texte d’être voté avant le terme du délai imparti. Je l’en remercie.
La parole est à M. Stéphane Piednoir. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Piednoir. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, au milieu des discriminations de toutes sortes, magma révélateur de la noirceur de l’âme humaine, l’antisémitisme tient une place singulière, en raison de sa dimension historique bien sûr, mais de manière renouvelée depuis les attentats du 7 octobre 2023.
J’ai une pensée pour les otages encore retenus dans la bande de Gaza, pour la famille Bibas et pour toutes les victimes du Hamas, coupable d’une barbarie qui ne sera ni pardonnée ni oubliée.
La sensibilité du sujet en France, mais aussi sur la scène internationale, est palpable. Sous couvert de positionnements politiques ou idéologiques, le débat s’embrase alors que le combat contre l’antisémitisme ne peut justement être un sujet de débat. La France reste et restera attachée à l’universalité des droits de l’homme.
Les universités ne sont pas des citadelles, elles sont partie intégrante de notre société, qui doit faire face – faire front, même ! – au péril séculaire de l’antisémitisme.
Depuis le 7 octobre 2023, le nombre d’actes de cette nature a doublé dans nos établissements d’enseignement supérieur. Nous ne pouvons tolérer l’intolérable : c’est un combat de tous les instants.
Alors que les dispositifs de lutte actuellement en place sont insuffisants, ce texte vise à répondre au besoin impératif de protection face à la résurgence alarmante des actes antisémites au sein de nos établissements d’enseignement supérieur.
C’est tout l’enjeu de la mission menée par mes collègues Pierre-Antoine Levi et Bernard Fialaire. Je salue la qualité de leur travail et l’importance des auditions qui ont été menées.
La tâche n’est pas aisée et, à l’instar de ce qui a été fait par le passé pour d’autres formes de discriminations, disposer d’un référent bien identifié peut faciliter la dénonciation.
Certes, ce combat a des spécificités. Il n’est cependant pas isolé. Il doit s’appuyer sur une mécanique commune de lutte contre la haine et les violences, qui s’expriment trop fréquemment.
Rappelons que l’antisémitisme n’est pas une opinion : c’est un délit. La liberté académique a parfois bon dos. Elle se heurte au droit, et c’est heureux. Je veux souligner le courage de s’opposer à des conférences animées par ceux qui alimentent l’antisémitisme dans notre pays, qui prennent ouvertement des positions antijuives et qui se placent dans le prolongement des trop fréquents débordements au sein de Sciences Po. Ne laissons pas la gangrène antisémite s’instiller profondément, comme jadis, dans le corps de notre République.
Dès lors, il relève de la responsabilité des chefs d’établissement et des présidents d’université de prendre des mesures disciplinaires à l’encontre de ceux qui sont coupables d’actes antisémites. Je plaide pour une fermeté absolue en la matière. À ce titre, je vous proposerai un amendement visant à prendre des dispositions plus opérationnelles.
En outre, il relève de notre responsabilité de garantir à tous les étudiants et personnels un environnement d’étude propice à l’élévation intellectuelle, sans distinction relative à l’origine ou à la religion, dans ces hauts lieux de formation, de recherche et de diffusion des connaissances.
À l’évidence, cette proposition de loi ne résoudra pas tout, mais il est de notre devoir de lui donner une issue favorable. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, RDPI et INDEP. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi relative à la lutte contre l’antisémitisme dans l’enseignement supérieur
Chapitre Ier
Formation à la lutte contre l’antisémitisme dans les établissements d’enseignement
M. le président. L’amendement n° 6, présenté par M. Ros, Mme Monier, M. Kanner, Mme Brossel, M. Chantrel, Mme Daniel, M. Lozach, Mme S. Robert, M. Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Dans l’intitulé de cette division
Après le mot :
contre
insérer les mots :
le racisme et
La parole est à M. David Ros.
M. David Ros. Je serai bref, car le temps est compté. Bernard Fialaire a rappelé que le travail allait bien au-delà de l’antisémitisme et qu’il s’étendait au racisme et aux différentes luttes contre les discriminations.
Aussi, cet amendement vise simplement à introduire davantage de cohérence dans l’intitulé du chapitre Ier de la proposition de loi. Tel sera également l’objet de mon dernier amendement sur l’intitulé de la proposition de loi.
L’adoption de ces amendements n’aurait aucune incidence sur la nature du texte.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre-Antoine Levi, rapporteur. Comme Pierre Ouzoulias l’a excellemment dit, l’antisémitisme n’est pas un racisme comme les autres.
Nous avons décidé de préciser spécifiquement dans l’intitulé de ce chapitre que son objet est la lutte contre l’antisémitisme dans l’enseignement supérieur. Nous souhaitons le conserver en l’état : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 6.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 1er
Le code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Après la quatrième phrase de l’article L. 121-1, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ils assurent une formation à la lutte contre l’antisémitisme et le racisme, les discriminations, les violences et la haine. » ;
2° (nouveau) Au début du 3° de l’article L. 123-2, les mots : « À la lutte contre les discriminations » sont remplacés par les mots : « À la lutte contre l’antisémitisme et le racisme, les discriminations, les violences et la haine » ;
3° À la deuxième phrase du neuvième alinéa de l’article L. 721-2, les mots : « contre les discriminations » sont remplacés par les mots : « contre l’antisémitisme et le racisme, les discriminations, les violences et la haine » ;
4° (nouveau) Le chapitre Ier du titre VI du livre VII de la troisième partie est complété par un article L. 761-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 761-2. – Les établissements d’enseignement supérieur assurent une formation à la lutte contre l’antisémitisme et le racisme, les discriminations, les violences et la haine. » ;
5° (nouveau) L’article L. 811-3-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ils bénéficient à ce titre d’une formation à la lutte contre l’antisémitisme et le racisme, les discriminations, les violences et la haine. »
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er est adopté.)
Chapitre II
Prévention, détection et signalement des actes antisémites survenant dans l’enseignement supérieur
Article 2
I. – Le code de l’éducation est ainsi modifié :
1° L’article L. 712-2 est ainsi modifié :
a) Le 10° est ainsi rédigé :
« 10° Il installe, sur proposition conjointe du conseil d’administration et du conseil académique, une mission “égalité et diversité” chargée de la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la lutte contre le racisme et l’antisémitisme et de la prévention et du traitement des actes de violence, de discrimination et de haine ; »
b) (Supprimé)
2° La section 4 du chapitre IX du titre Ier du livre VII de la troisième partie est ainsi rétablie :
« Section 4
« Lutte contre les actes de discrimination et de violence
« Art. L. 719-10. – Les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel créent en leur sein une mission “égalité et diversité” chargée de la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre l’antisémitisme et le racisme, les discriminations, les violences et la haine.
« Ils veillent à ce que la mission “égalité et diversité” dispose des moyens humains et financiers nécessaires à son fonctionnement.
« Ils désignent en son sein un référent qualifié dédié à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme et chargé de la prévention, de la détection et du traitement des actes racistes et antisémites.
« Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret.
« Art. L. 719-11. – Les missions “égalité et diversité” assurent le fonctionnement d’un dispositif de signalement des actes d’antisémitisme, de racisme, de discrimination, de violence et de haine garantissant l’anonymat des victimes et des témoins. Les signalements sont recueillis par des personnes disposant d’une qualification, d’une formation ou d’une expertise adéquate. Ils sont transmis au président de l’université et font l’objet d’un traitement statistique.
« Tout membre du personnel ayant connaissance d’un acte d’antisémitisme, de racisme, de discrimination, de violence ou de haine survenu dans l’établissement ou affectant son fonctionnement le signale sans délai au moyen du dispositif mentionné au premier alinéa. »
II. – Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret.
III. – Les conséquences financières résultant pour l’État du présent article sont compensées, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
M. le président. L’amendement n° 13, présenté par MM. Levi et Fialaire, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. Alinéa 8
Rédiger ainsi cet alinéa :
Lutte contre les actes d’antisémitisme, de racisme, de discrimination, de violence et de haine
II. Alinéa 12
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 3 rectifié, présenté par Mmes Ollivier, de Marco et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 14
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 719-…. - Les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel assurent la diffusion auprès des étudiants, des enseignants-chercheurs, des enseignants, des chercheurs et des membres du personnel d’une information claire et accessible sur l’existence de la mission “égalité et diversité” et du référent mentionnés à l’article L. 719-10, et sur le fonctionnement du dispositif de signalements des actes d’antisémitisme, de racisme, de discrimination, de violence et de haine mentionné à l’article L. 719-11. Cette information précise la possibilité pour les victimes et les témoins de bénéficier de l’anonymat. »
La parole est à Mme Mathilde Ollivier.
Mme Mathilde Ollivier. Par cet amendement, nous proposons que les établissements fournissent aux étudiants, aux enseignants et aux membres du personnel une information sur l’existence des dispositifs de lutte contre l’antisémitisme.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Fialaire, rapporteur. Cet amendement vise à instaurer le principe d’une information claire et accessible de l’ensemble de la communauté universitaire sur la mission « égalité et diversité », le référent « racisme et antisémitisme » et le dispositif de signalement anonyme.
À première vue, il ne nous avait pas semblé utile d’inscrire cette obligation dans le texte. Néanmoins, nous partageons l’objectif des auteurs de cet amendement : avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Philippe Baptiste, ministre. Le Gouvernement partage également l’objectif des auteurs de cet amendement. Toutefois, il s’agit d’un dispositif réglementaire, raison pour laquelle je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, je me verrai contraint d’émettre un avis défavorable.
M. le président. Madame Ollivier, l’amendement n° 3 rectifié est-il maintenu ?
Mme Mathilde Ollivier. Je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 12, présenté par MM. Levi et Fialaire, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 14
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Le second alinéa du V de l’article L. 841-5 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il fixe également la fraction du produit de la contribution affectée au fonctionnement de la mission mentionnée à l’article L. 719-10 et du dispositif mentionné à l’article L. 719-11. »
La parole est à M. Pierre-Antoine Levi.
M. Pierre-Antoine Levi, rapporteur. Il s’agit d’un amendement d’appel, car il faut bien parler des financements.
Nous le retirons, monsieur le président – mais l’appel est lancé ! (Sourires.)
M. le président. L’amendement n° 12 est retiré.
Je mets aux voix l’article 2, modifié.
(L’article 2 est adopté.)
Chapitre III
Procédure disciplinaire
Article 3
Le code de l’éducation est ainsi modifié :
1° (nouveau) L’article L. 712-6-2 est ainsi modifié :
a) Après la troisième phrase du dernier alinéa est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il précise les modalités de formation des membres de la section disciplinaire à la lutte contre l’antisémitisme et le racisme, les discriminations, les violences et la haine. » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de violence ou de faits d’antisémitisme, de racisme, de discrimination ou d’incitation à la haine, tout personne s’estimant lésée par les agissements de l’enseignant-chercheur ou de l’enseignant poursuivi et s’étant fait connaître est informée de l’engagement de poursuites disciplinaires, de leur déroulement et de leur issue selon des modalités précisées par décret en Conseil d’État. » ;
2° (nouveau) Le second alinéa de l’article L. 811-5 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il précise également les modalités de formation de ses membres à la lutte contre l’antisémitisme, le racisme, les violences, les discriminations et la haine. » ;
3° L’article L. 811-6 est ainsi modifié :
a) Au début, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le conseil académique constitué en section disciplinaire est compétent pour la poursuite des actes de fraude, des faits de violence, d’antisémitisme, de racisme, de discrimination, d’incitation à la haine et de tout fait de nature à porter atteinte à l’ordre, au bon fonctionnement ou à la réputation de l’établissement. En cas de faits de violence, d’antisémitisme, de racisme, de discrimination ou d’incitation à la haine, toute personne s’estimant lésée par les agissements de l’usager poursuivi et s’étant fait connaître est informée de l’engagement de poursuites disciplinaires, de leur déroulement et de leur issue selon des modalités précisées par décret en Conseil d’État. » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d’État précise les pouvoirs d’investigation dont dispose le président pour l’établissement des faits susceptibles d’être portés à la connaissance du conseil académique constitué en section disciplinaire. »
M. le président. L’amendement n° 1 rectifié, présenté par M. Piednoir, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer cinq alinéas ainsi rédigés :
…° Après l’article L. 811-5, il est inséré un article L. 811-5-… ainsi rédigé :
« Art. L. 811-5-…. – Dans chaque région académique, une section disciplinaire commune aux établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel est créée par le recteur de région académique.
« Elle est présidée par un membre de la juridiction administrative. Elle comprend des représentants de l’administration des établissements, des représentants du personnel enseignant et des représentants des usagers.
« Elle peut être saisie par l’autorité compétente pour engager les poursuites disciplinaires à l’égard des usagers d’un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel de la région académique. Elle exerce alors, en lieu et place de la section disciplinaire prévue à l’article L. 811-5, le pouvoir disciplinaire à l’égard des usagers.
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. Il précise notamment la composition de la section disciplinaire commune, qui respecte la parité entre les hommes et les femmes, les modalités de désignation de ses membres et ses règles de fonctionnement. » ;
La parole est à M. Stéphane Piednoir.
M. Stéphane Piednoir. Permettez-moi de prendre quelques instants pour présenter cet amendement important. Il concerne les sections disciplinaires des établissements, qui rencontrent certaines difficultés à se saisir des actes antisémites.
Par cet amendement, je propose l’instauration d’une autorité compétente pour engager des poursuites disciplinaires à l’égard des usagers d’une université. Cette instance serait placée sous l’autorité d’un magistrat professionnel. Cela permettrait aussi un dépaysement à l’échelle académique sur saisine du directeur de l’académie.
Il y aurait donc un double intérêt à constituer cette nouvelle commission disciplinaire. En effet, elle allégerait à la fois en nombre et en charge les commissions disciplinaires des établissements, qui peinent se saisir complètement de ces dossiers.
Les modalités de constitution et de réunion de cette nouvelle instance seraient fixées par décret.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Pierre-Antoine Levi, rapporteur. Cet amendement nous paraît très intéressant, car il apporte une réponse aux limites de la procédure disciplinaire que nous avons identifiées au cours de nos travaux, notamment l’inflation du nombre de dossiers, le changement de nature des faits examinés, le faible succès du dépaysement et la fragilité des procédures.
Pour y répondre, cet amendement reprend des pistes que nous avons identifiées dans notre rapport. Il tend à proposer une externalisation et une professionnalisation de la procédure disciplinaire sous la forme d’une faculté donnée aux présidents d’université.
L’avis est donc favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de trois amendements et d’un sous-amendement faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 11, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 8 et 9
Remplacer ces alinéas par neuf alinéas ainsi rédigés :
a) Au début, sont ajoutés huit alinéas ainsi rédigés :
« Sont passibles d’une sanction disciplinaire tous faits constitutifs d’une faute disciplinaire, et notamment :
« a) La méconnaissance des dispositions législatives et réglementaires ou du règlement intérieur de l’établissement ;
« b) Les actes de fraude ou de tentatives de fraude ;
« c) Les faits de violence ou de harcèlement ;
« d) Les actes antisémites, racistes, discriminatoires ou d’incitation à la haine ou à la violence ;
« e) Les faits susceptibles de porter atteinte à l’ordre, au bon fonctionnement de l’établissement ou au bon déroulement des activités qui y sont organisées.
« Les faits commis en dehors de l’établissement sont passibles d’une sanction disciplinaire lorsqu’ils présentent un lien suffisant avec l’établissement ou les activités qu’il organise.
« Pour les faits relevant du c) et du d), toute personne victime des agissements de l’usager poursuivi et s’étant fait connaître est informée de l’engagement de poursuites disciplinaires, de leur déroulement et de leur issue selon des modalités précisées par décret en Conseil d’État. » ;
La parole est à M. le ministre.
M. Philippe Baptiste, ministre. Il s’agit pour le Gouvernement d’appréhender de façon objective l’ensemble des comportements potentiellement fautifs et susceptibles d’être traités par les commissions disciplinaires.
Cet amendement vise à dresser une liste de l’ensemble des comportements fautifs, en intégrant, bien évidemment, les actes antisémites de manière explicite.
M. le président. Le sous-amendement n° 15, présenté par Mmes Ollivier, de Marco et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Amendement n° 11, alinéa 5
Supprimer les mots :
des dispositions législatives et réglementaires ou
La parole est à Mme Mathilde Ollivier.
Mme Mathilde Ollivier. Nous avons déposé ce sous-amendement peu avant le début de la séance, afin de supprimer la possibilité pour les établissements de l’enseignement supérieur de lancer des poursuites judiciaires pour toute atteinte aux dispositions nationales de nature législative ou réglementaire.
Ce point est particulièrement important à nos yeux. Nous constatons, ces derniers temps, une tendance inquiétante à la para-judiciarisation dans les commissions disciplinaires.
Aussi cette partie de votre amendement nous pose-t-elle problème, monsieur le ministre.
M. le président. L’amendement n° 4, présenté par Mmes Ollivier, de Marco et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Alinéa 9, première phrase
Remplacer les mots :
, au bon fonctionnement ou à la réputation de l’établissement
par les mots :
et au bon fonctionnement de l’établissement
La parole est à Mme Mathilde Ollivier.
M. le président. L’amendement n° 9, présenté par M. Ros, Mme Monier, M. Kanner, Mme Brossel, M. Chantrel, Mme Daniel, M. Lozach, Mme S. Robert, M. Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Remplacer les mots :
, au bon fonctionnement ou à la réputation de l’établissement
par les mots :
ou au bon fonctionnement de l’établissement
La parole est à M. David Ros.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Fialaire, rapporteur. L’amendement n° 11 du Gouvernement a pour objet une réécriture globale des motifs de saisine de la section disciplinaire de l’article 3. Il vise à proposer une liste non exhaustive des faits constitutifs d’une faute disciplinaire.
Cette rédaction présente selon nous plusieurs avantages.
Elle reprend en effet la mention explicite des faits d’antisémitisme, de racisme, de discrimination ou d’incitation à la haine ou à la violence que nous avons adoptée en commission.
Elle supprime la notion d’atteinte à la réputation de l’établissement, ce qui correspond à l’objet des amendements nos 4 et 9 de Mme Ollivier et de M. Ros.
Elle introduit par ailleurs plusieurs précisions qui pourraient donner des outils supplémentaires aux présidents d’établissement afin de répondre aux faits de violence et de haine, en visant le respect du règlement intérieur de l’établissement, les atteintes portées au bon déroulement des activités qui y sont organisées, ainsi que les faits survenus à l’extérieur de l’établissement, mais présentant un lien avec la vie universitaire. Il était important de le souligner.
Enfin, l’alinéa relatif à l’information des victimes est réécrit pour en assurer la cohérence avec ces modifications.
Pour l’ensemble de ces raisons, la commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 11 et un avis défavorable sur le sous-amendement n° 15 ainsi que sur les amendements nos 4 et 9, dont les objets seraient satisfaits par l’adoption de l’amendement du Gouvernement.