Mme Annie Genevard, ministre. Le Gouvernement souhaite être habilité à légiférer par ordonnance afin d'améliorer les leviers mobilisables par les services de l'État à l'encontre des propriétaires ne prenant pas les mesures de lutte contre les organismes nuisibles de quarantaine.
La dissémination de ces ravageurs dangereux pour les cultures, peu présents sur le territoire, voire absents de ce dernier, doit être impérativement limitée, afin de minimiser leurs effets sur l'économie. C'est par exemple le cas de la flavescence dorée, que les viticulteurs connaissent bien – M. Cabanel le confirmera sans doute (M. Henri Cabanel opine.) –, car il s'agit d'une maladie mortelle pour la vigne. Je pense aussi au scarabée japonais, qui, heureusement, n'a encore jamais été détecté en France.
Afin de limiter la dissémination de ces ravageurs, il faut prendre des mesures de lutte collective le plus tôt possible après l'identification d'un foyer.
Ainsi, il faut arracher au plus vite les vignes malades et détruire les végétaux infestés. Pour obtenir des résultats, il est fondamental que tous les propriétaires concernés appliquent les bonnes mesures. En cas de défaillance, les services de l'État disposent de différents leviers pour les mettre en œuvre, mais malheureusement ces procédures n'aboutissent pas toujours.
En outre, la nature délictuelle du régime de sanctions en vigueur alourdit les procédures pénales et empêche la gradation entre les différents manquements.
L'ordonnance demandée permettrait d'adapter le dispositif de sanction pénale pour le rendre à la fois plus proportionné et plus opérationnel.
M. le président. Le sous-amendement n° 111, présenté par M. Cuypers, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Amendement 103, alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
, notamment en vue d'améliorer la lutte contre la flavescence dorée
La parole est à M. le rapporteur.
M. Pierre Cuypers, rapporteur. Nous ne sommes pas de grands adeptes des habilitations à légiférer par ordonnance. Toutefois, en l'occurrence, cela permettrait de traiter une problématique touchant la filière viticole : la propagation de la flavescence dorée.
Je propose donc un sous-amendement tendant à préciser ce point. Sous réserve de son adoption, la commission est favorable à l'amendement du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur le sous-amendement n° 111 ?
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Il s'agit d'un excellent amendement. Je n'ai qu'un regret, madame la ministre, c'est qu'une telle initiative n'ait pas été prise plus tôt : on aurait ainsi évité la propagation des scolytes à travers la forêt. On aurait évité le saccage forestier provoqué, dans les années 1950, par le bostryche.
C'est en procédant ainsi que nous serons les plus efficaces pour protéger la nature et la biodiversité.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 6.
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.
M. Laurent Duplomb. Avant tout, je remercie de leur travail notre rapporteur, Pierre Cuypers et la présidente de notre commission.
Madame la ministre, je tiens également à vous remercier. Voilà quelques mois que nous travaillons sur ce sujet. Au début, vous n'y croyiez pas et j'y croyais beaucoup. Puis vous y avez beaucoup cru, quand pour ma part je n'y croyais plus... (Sourires.)
Nos débats de ce soir marquent, pour moi, l'aboutissement de sept années de travail accomplis au Sénat. J'ai essayé, du mieux que j'ai pu, de démontrer que nous avions besoin d'évoluer sur certains sujets.
Certes, nous pouvons voir les choses différemment, mais je suis persuadé que ce texte ouvre une nouvelle page de l'agriculture française ; qu'il permettra de voir l'avenir de manière plus objective et plus rationnelle. Ainsi, nous donnerons des éléments de réponse à tous ceux qui, même si certains n'aiment pas que je le dise, travaillent 70 heures par semaine ; à ceux qui attendent des réponses, non pas pour travailler moins, mais pour travailler mieux, et continuer à travailler plus que les autres.
Voir que nous ouvrons une nouvelle perspective me fait énormément plaisir. Nous mettons enfin un coin dans la porte.
D'interdiction en interdiction, notre vision de l'agriculture française a été totalement déformée. Or, tout ce que nous voulons, c'est redevenir fiers : fiers de nos paysages, fiers de nos paysans, fiers de l'agriculture française. C'est ainsi que nous retrouverons une France forte. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Tissot. Sans surprise, comme nous l'avons annoncé lors de la discussion générale, les élus du groupe socialiste voteront contre cette proposition de loi.
Je ne reviendrai pas sur chacun des points clivants de ce texte : il y en a trop – j'ai même envie de dire qu'il n'y a que cela.
Au sujet de la réautorisation des néonicotinoïdes, je le disais ici même en octobre 2020, lors de l'examen du projet de loi relatif aux conditions de mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques en cas de danger sanitaire pour les betteraves sucrières : accorder une dérogation pour la filière de la betterave sucrière, ce serait ouvrir la boîte de Pandore. Aujourd'hui, nous sommes allés plus loin encore : je le regrette amèrement et sincèrement, au-delà de toute considération politique. (M. Laurent Duplomb s'exclame.)
Nous parlons tout de même d'un produit, l'acétamipride, qualifié par le directeur scientifique agriculture de l'Inrae, devant notre commission des affaires économiques il y a moins de deux ans, de « chlordécone de l'Hexagone ».
Aujourd'hui, sur les travées de la droite, il n'a quasiment jamais été question ni de santé ni d'environnement – je ne sais même pas si vous avez prononcé ces termes ! Vous vous appuyez uniquement sur des arguments économiques et de compétitivité. Vous prétendez défendre les paysans, mais en réalité vous négligez leur santé.
Au sujet de l'environnement, au moins, vous êtes sincères : vous ne prétendez même pas vouloir le préserver.
Enfin, madame la ministre, je regrette la méthode retenue par le Gouvernement. En déposant plus d'une quinzaine d'amendements à la dernière minute, vous avez court-circuité notre travail. Il conviendrait vraiment, à l'avenir, de mieux travailler sur les textes que nous examinerons.
En cohérence avec les positions exprimées au cours du débat, les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain s'opposeront à cette proposition de loi.
M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.
M. Daniel Salmon. Contrairement à M. Duplomb, je ne pense pas que l'on tourne une page : à mon sens, nous continuons la même.
Le modèle sous-tendu par cette proposition de loi est celui des dernières décennies : un modèle qui a vidé nos campagnes de tous ses habitants, à commencer par ses paysans, et de sa biodiversité.
Les mots eux-mêmes ont changé. Nous sommes passés de la ferme à l'exploitation agricole, et ce terme n'est pas anodin : aujourd'hui, on exploite bel et bien les agriculteurs, car travailler 70 heures pour un salaire de misère, c'est se faire exploiter. On exploite les sols. On exploite les ressources. Ce modèle est tout sauf durable, et je regrette sincèrement que l'on poursuive dans cette voie.
On a parlé d'environnement : on ne doit ni opposer nature et agriculture ni sacrifier l'une à l'autre. Nous avons tous conscience que notre environnement est essentiel pour que, demain, l'agriculture puisse encore vivre dans ce pays.
Nous en reparlerons lors de l'examen du projet de loi d'orientation agricole. Si l'on veut encourager les jeunes et les moins jeunes à devenir agriculteurs, il faut leur proposer un autre modèle : un modèle réenchanté, un modèle qui donne envie.
M. Jean-Marc Boyer. C'est sûr…
M. Daniel Salmon. Cela ne se fera pas avec cette proposition de loi, qui perpétue l'industrialisation de l'agriculture.
M. Laurent Duplomb. Oh là là…
M. Daniel Salmon. Nous avons parlé de paysages : avec un tel texte, on va poursuivre l'agrandissement, la dévastation des paysages et la destruction de ce qui fait l'essence du monde rural, à savoir l'agriculture.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour explication de vote.
Mme Nicole Bonnefoy. Chers collègues de la droite sénatoriale, ce soir, nous avons beaucoup parlé de normes, qu'elles soient environnementales ou sanitaires ; et ces mêmes normes ont souvent été mises en cause.
Or, comme nous l'avons dit, les normes protègent l'environnement et la santé, à commencer par celle des exploitants, de leurs salariés et de leur famille. Surtout, elles sont l'unique argument pour s'opposer, par exemple, à un accord entre l'Union européenne et le Mercosur. Lorsqu'elles auront disparu, comme vous le souhaitez, plus rien ne fera obstacle à un libre-échange débridé. Les agriculteurs réaliseront sans doute, à ce moment-là, qu'ils ont été trompés – mais il sera un peu tard. Vous en serez tenus responsables.
Nous avons aussi beaucoup parlé d'économie, ce soir, en disant qu'il fallait lever les contraintes. Pour ma part, je vous parlerai des familles, même si d'aucuns diront sans doute qu'il ne faut pas évoquer ces sujets…
Des familles réclament au Gouvernement d'agir enfin contre un cluster de cancers pédiatriques découvert dans la plaine d'Aunis, près de La Rochelle. Au nom du principe de précaution, elles demandent un moratoire sur les pesticides. Elles ont financé elles-mêmes une étude, qui a conclu à la présence de pesticides dans l'organisme de soixante-dix enfants.
Tous les enfants sont touchés, y compris par des pesticides aujourd'hui interdits. Au-delà de ce moratoire, les parents veulent plus d'agriculteurs, parce que ces derniers sont responsables. En revanche, ils veulent moins de pesticides. Et que leur répondez-vous, avec cette proposition de loi ? Que vous en voulez plus, y compris des produits jusque-là interdits du fait de leur dangerosité, parce que votre modèle agricole, votre modèle économique en ont besoin. (Mme Anne-Sophie Romagny manifeste son désaccord.) Vous en porterez aussi la responsabilité.
M. le président. La parole est à M. Vincent Louault, pour explication de vote.
M. Vincent Louault. Je vous remercie à mon tour, madame la ministre, parce que, comme Laurent Duplomb, je n'y croyais plus. Nous avons beaucoup travaillé avec vos équipes, que je tiens à saluer également, de même que celles de Mme la ministre chargée de la transition écologique.
Il n'est jamais facile de faire des concessions, qui plus est pour des personnalités très fortes, comme nous le sommes tous au Sénat. Je remercie d'autant plus Pierre Cuypers pour l'excellente tenue de ces débats.
Mon père a quitté le Sénat pour une seule raison : il avait abouti à cette conclusion que, dans notre pays, il était devenu presque impossible de faire quoi que ce soit – ne serait-ce que desserrer un boulon... Il est donc rentré chez lui, tranquille, à 74 ans, alors qu'il aurait pu briguer un mandat de plus.
Je suis d'autant plus fier, ce soir, d'avoir pu desserrer quelques boulons en faveur de l'agriculture. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – M. le rapporteur et M. Yves Bleunven applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.
M. Henri Cabanel. Ce texte a évolué depuis sa version initiale, qui posait quelques difficultés aux membres du RDSE – à moi en particulier. La commission a pris soin de l'améliorer. Quant à Mme la ministre, elle est parvenue à nous rassurer, et je l'en remercie.
Nous n'arriverons pas à concilier les convictions des uns et des autres, mais, je le répète, notre groupe n'en est pas moins à la recherche du juste équilibre.
Or, ce juste équilibre, nous l'avons trouvé au fil de nos débats, entre l'économie, l'environnement et la santé. Je reste convaincu que s'il y a une asymétrie entre ces trois curseurs, cela ne peut pas fonctionner.
Il faut avancer doucement et préserver cet équilibre : il me semble que nous y sommes arrivés ce soir, même si des interrogations demeurent.
Les doutes que nous avions sur l'Anses ont été levés – je pense en particulier à la réintroduction des néonicotinoïdes. En revanche, il faudrait conditionner l'apport en eau à un diagnostic des sols, bien souvent appauvris par des décennies de chimie. Sur des sols non restructurés en matière organique, l'irrigation est inefficiente ; j'espère que nous en reparlerons et que nous trouverons des solutions.
Les élus du RDSE voteront en grande majorité pour ce texte.
M. le président. La parole est à M. Bernard Buis, pour explication de vote.
M. Bernard Buis. Plus de la moitié des sénateurs ont cosigné cette proposition de loi de nos collègues Laurent Duplomb et Franck Menonville, que je tiens à remercier.
De même, je remercie M. le rapporteur et Mme la ministre de leur sens de l'écoute et de leurs propositions constructives, tout au long de la soirée.
Ce texte, dont l'examen arrive à son terme au Sénat, a été sensiblement amélioré, et le juste équilibre trouvé répond à une attente de nos agriculteurs. Reste maintenant à apporter de nouvelles réponses au travers du projet de loi d'orientation agricole, dont nous débattrons bientôt dans cette enceinte, en espérant que nos collègues députés les reprennent en grande partie.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour explication de vote.
M. Franck Menonville. Madame la ministre, en tant que coauteur du présent texte, je tiens moi aussi à vous remercier de votre écoute tout au long de ce travail, avant le passage en commission comme en séance publique.
Vous avez eu à cœur de trouver un équilibre et de garantir la solidité de cette proposition de loi.
Laurent Duplomb et moi-même avons rédigé ce texte à la suite de nombreux travaux du Sénat. Nous savions que certains points étaient perfectibles. À ce titre, je salue le travail remarquable de notre rapporteur, Pierre Cuypers, et la confiance témoignée par la présidente de notre commission, Dominique Estrosi Sassone.
Chers collègues, je vous remercie également toutes et tous : même s'il existe des clivages, bien naturels, dans notre hémicycle, nos échanges ont été constructifs. Nous avons su suivre une ligne de crête et mener, ce faisant, un travail utile, nécessaire et attendu par nos agriculteurs.
Bref, merci pour nos agriculteurs ; merci pour notre agriculture. La semaine prochaine, nous compléterons notre travail législatif avec le projet de loi d'orientation agricole, chargé de renforcer notre souveraineté alimentaire – il s'agit là d'un enjeu essentiel – et d'assurer le renouvellement des générations. La suppression de normes à laquelle nous avons procédé aujourd'hui permettra de faciliter le métier d'agriculteur ; mais nous devons encore œuvrer en ce sens.
Enfin, ce travail ne doit pas être qu'agricole : tous les maillons de la chaîne économique de notre pays doivent faire l'objet d'un effort de simplification. (Applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Ce texte est effectivement assez important, car, dans l'ensemble, il permet de donner à l'agriculture française les atouts qu'offrent les règles européennes.
Madame la ministre, vous avez largement contribué à apaiser nos débats : soyez-en remerciée.
L'ambition que nous caressons est d'accroître encore les atouts de nos campagnes pour que, demain, les paysans remplissent davantage l'assiette des Français. Année après année, cette dernière s'est vidée des produits de nos territoires.
Parler de « modèles agricoles », comme on l'a beaucoup fait ce soir, c'est au fond méconnaître ce qu'est l'agriculture ; c'est méconnaître sa richesse humaine.
L'agriculture, ce sont des femmes et des hommes qui, s'ils travaillent tous à leur manière, suivent les mêmes règles, pour les mêmes productions, et en visant le même objectif : offrir des produits de qualité, respectueux de la santé humaine. Nos agriculteurs – faut-il le rappeler ? – ne sauraient mettre sur le marché des produits non conformes.
Je remercie Laurent Duplomb, Franck Menonville et M. le rapporteur. Ce texte offre une chance supplémentaire à nos territoires. Il nous permettra de reconquérir des parts de marché en créant de la valeur ajoutée. Surtout, il nous permettra d'agir plus efficacement encore pour préserver la santé de nos concitoyens et nourrir la population française.
M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour explication de vote.
M. Gérard Lahellec. Je salue avec respect le travail accompli au cours des dernières semaines par M. le rapporteur, par Mme la ministre et ses services, ainsi que par les auteurs de cette proposition de loi.
Toutefois, en focalisant nos débats sur la question des normes, nous risquons fort de nous tromper de colère.
La colère existe et les attentes sont fortes dans nos fermes, sur les plans économique et social. Mais, à mon sens, la cause de ces difficultés dépasse très largement le sujet des normes.
Parmi les questions qui se posent, il en est une, centrale : le faible retour de la valeur ajoutée à la ferme, chez ces gens qui travaillent 70 heures par semaine. Je n'aurai pas l'outrecuidance de me comparer à eux, étant issu d'une petite ferme : le travail est plus dur dans les grandes exploitations, ce qui d'ailleurs devrait nous interpeller.
Enfin, je forme le vœu que nos débats à venir n'éludent pas les questions de fond auxquelles nous sommes confrontés, tout en évitant d'alimenter le clivage entre les considérations environnementales et la ferme.
Nos agriculteurs sont les aménageurs de l'espace. Ils souhaitent continuer à l'être, me semble-t-il.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. M. Laurent Duplomb a affirmé qu'il était fier du travail qu'il avait réalisé. Certes. Pour ma part, fier, je ne peux pas l'être au vu du résultat obtenu et de l'orientation qui a été votée.
Nous avons établi un constat commun : l'agriculture se trouve dans une situation très grave, très dure, très complexe. Nous avons de manière succincte analysé les raisons ayant conduit à cette situation. Pourtant, nous persistons dans une fuite en avant : nous ne comprenons pas ce qui se passe et nous poursuivons dans la même voie.
Dès lors, je doute fort que nous ayons ce soir rendu service aux agriculteurs, aux paysans de notre pays qui travaillent dur et qui font vivre nos territoires et nos villages, et qu'en prenant cette orientation nous les ayons véritablement aidés.
Tout d'abord, en autorisant de nouveau au moins trois néonicotinoïdes, nous commettons une grave erreur.
Mme Anne-Sophie Romagny. Non, un seul !
M. Guillaume Gontard. Nous savons qu'il s'agit de produits dangereux pour la santé, pour l'environnement et pour l'eau. Nous aurions pu choisir d'autres solutions et je ne suis pas fier de ce vote.
Je ne suis pas fier non plus que nous soyons revenus sur la concertation, la consultation et les enquêtes publiques, lesquelles me semblent pourtant constituer le cœur même du sujet. Si nous voulons véritablement parvenir à partager des projets et à les faire accepter, il nous fallait au contraire renforcer ces procédures.
Enfin, alors que l'eau, notre bien commun, est indispensable et constitue aujourd'hui un enjeu crucial, nous avons abordé la question par le petit bout de la lorgnette, en nous obstinant à vouloir toujours consommer davantage, sans jamais chercher à remettre en cause le modèle actuel.
M. le président. La parole est à Mme Kristina Pluchet, pour explication de vote.
Mme Kristina Pluchet. Je tiens à mon tour à remercier mes collègues Laurent Duplomb et Franck Menonville, ainsi que M. le rapporteur et Mme la ministre de ce premier pas accompli ce soir afin de répondre aux revendications de l'immense majorité des agriculteurs.
Je souhaite également exprimer ma gratitude à tous ces agriculteurs qui, cet automne, ont manifesté dans le calme et mis en lumière que nous étions allés beaucoup trop loin dans la surenchère normative.
D'une certaine manière, parce que cette revendication est partagée par les collectivités et par l'ensemble des entreprises, ils ont permis d'amorcer le long chemin de la simplification pour tous dans ce pays.
Vive le bon sens paysan ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Vincent Louault applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente de la commission des affaires économiques. Permettez-moi à mon tour de remercier très chaleureusement les auteurs de cette proposition de loi, MM. Laurent Duplomb et Franck Menonville, épaulés par M. Vincent Louault, ainsi que le rapporteur M. Pierre Cuypers, qui endossait pour la première fois ce rôle au banc des commissions. Bravo, mon cher collègue, pour ce rapport de qualité et pour les débats apaisés que vous avez su mener.
Mes remerciements vont également à Mme la ministre ainsi qu'à ses équipes. Je n'oublie pas les services de la commission des affaires économiques, qui ont accompli un travail remarquable, travail qu'ils vont poursuivre jusqu'à la fin du mois de février, la commission devant examiner plusieurs autres textes consacrés à l'agriculture.
Madame la ministre, je tiens à saluer très sincèrement votre engagement, votre courage, votre soutien et votre écoute. Vous avez permis que ce texte mette en débat de véritables sujets, parfois des irritants, en revenant notamment sur des surtranspositions de droits et de règles européennes qui contraignent lourdement les agriculteurs et obèrent la compétitivité de l'agriculture. C'était nécessaire.
Vous avez permis de dégager des compromis intelligents et exigeants afin de persévérer dans cette voie et de rassurer le monde agricole, qui nous a regardés ce soir.
Ces acteurs, que le Sénat a su écouter, ont trouvé en vous une interlocutrice de qualité qui entend agir de concert avec eux pour faire de notre agriculture une fierté nationale.
Merci également d'avoir engagé la procédure accélérée, ce qui n'allait pas de soi. Cela permettra un examen très rapide de ce texte par l'Assemblée nationale.
Comme je l'ai indiqué, nous entamons une longue séquence législative consacrée à l'agriculture : jeudi, nous examinerons une proposition de loi en faveur de la préservation et de la reconquête de la haie, sur l'initiative de M. Salmon, et, la semaine prochaine, une proposition de loi portant diverses mesures visant à adapter le fonctionnement des instances de gouvernance des chambres d'agriculture et de la mutualité sociale agricole, concernant la démocratie agricole.
Je pense surtout, madame la ministre, au PLOA, pour lequel vous vous êtes tant battue et qui a été malheureusement suspendu et repoussé. Vous avez inlassablement réclamé son inscription à l'ordre du jour, car vous entendiez honorer les engagements pris devant le monde agricole.
Ainsi, du 4 au 14 février prochain, nous aurons l'occasion de débattre de nouveau de tous ces sujets. Je sais que tous ensemble, sénateurs et Gouvernement, nous pourrons continuer à œuvrer contre le découragement et le désarroi des agriculteurs, ainsi qu'à lutter contre l'inflation normative, dans un esprit de respect mutuel, tout en affirmant nos convictions, comme l'ont fait ce soir MM. Laurent Duplomb et Franck Menonville.
Pour autant, monsieur Lahellec, j'ai bien compris que notre attention ne saurait se limiter aux normes. Bien d'autres enjeux devront être abordés, lors de l'examen du PLOA, voire à l'occasion de la discussion d'autres textes, car tous ces sujets ne pourront figurer dans ce seul projet de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDPI et INDEP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Annie Genevard, ministre. Monsieur le président, je tiens à vous remercier pour votre présidence de séance et, à mon tour, exprimer ma satisfaction à cette heure avancée.
Au travers de ce texte, nous avons évoqué des sujets difficiles sur lesquels on nous promettait les foudres de tout le monde.
M. Vincent Louault. Tout à fait !
Mme Annie Genevard, ministre. Je remercie les auteurs de cette proposition de loi, MM. Laurent Duplomb et Franck Menonville, qui n'ont pas ménagé leur peine et qui ont mis tout leur tempérament pour défendre ce texte, épaulés par M. Vincent Louault avec son sens de la métaphore fleurie et son tempérament non moins marqué. (Sourires sur les travées du groupe INDEP.)
Je remercie M. le rapporteur, cher Pierre Cuypers, de sa contribution, ainsi que Mme la présidente de la commission des affaires économiques du Sénat, qui n'a eu de cesse de nous soutenir dans cette démarche visant à rapprocher des points de vue que l'on nous disait inconciliables.
J'exprime également ma sincère gratitude à tous ceux qui ont œuvré au bon accompagnement de ce texte et à la recherche de solutions : les services de la commission des affaires économiques, ceux de mon ministère, mais aussi ceux du ministère de la transition écologique.
En effet, sur les six articles que comportait ce texte, cinq ont été travaillés avec le ministère de la transition écologique en vue de dégager des solutions d'équilibre.
Ma conviction profonde est qu'opposer environnement et agriculture constitue une impasse. C'est la raison pour laquelle nous avons accompli ce travail visant à définir des voies de passage avec ce ministère. Certes, celles-ci sont plus complexes, peut-être moins tonitruantes, mais elles apporteront des solutions extrêmement attendues par les agriculteurs.
Ce soir, j'en suis convaincue, nous avons tous ensemble fait œuvre utile pour eux. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE, UC et Les Républicains.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
J'ai été saisi de trois demandes de scrutin public émanant, la première, du groupe Les Républicains, la deuxième, du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain et, la troisième, de la commission des affaires économiques.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 181 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l'adoption | 233 |
Contre | 109 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Vincent Louault applaudit également.)