M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour explication de vote.

Mme Marie-Do Aeschlimann. Je remercie M. le rapporteur spécial et Mme la ministre pour leurs explications sur les amendements que j’ai très brièvement présentés. Je veux rappeler les difficultés financières rencontrées par les départements pour accompagner les bénéficiaires du RSA.

Je prends néanmoins acte des précisions données par Mme la ministre et je retire les deux amendements.

M. le président. Les amendements nos II-495 rectifié ter et II-496 rectifié ter sont retirés.

Madame Romagny, les amendements nos II-534 rectifié bis et II-535 rectifié bis sont-ils maintenus ?

Mme Anne-Sophie Romagny. Non, je les retire, monsieur le président.

M. le président. Les amendements nos II-534 rectifié bis et II-535 rectifié bis sont retirés.

La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote.

Mme Pascale Gruny. Madame la ministre, mon département est aussi un territoire d’expérimentation du dispositif de contractualisation avec les départements. Lors d’une des multiples cérémonies de vœux auxquelles j’ai assisté, des représentants de France Travail m’ont signalé que les effectifs avaient déjà baissé.

J’ai été rapporteur sur le projet de loi pour le plein emploi : je peux vous dire que, sans accompagnement, on ne fera rien du tout. Dans mon territoire, les personnes concernées et les jeunes de manière générale sont très éloignés de l’emploi. Si les missions locales ne les accompagnent plus, ces jeunes vont rester de côté. Mon département a le taux le plus élevé d’illettrisme : les jeunes décrocheurs sont nombreux.

Je tiens à vous alerter, d’autant que je ne suis pas en faveur des sureffectifs, bien au contraire ! Je suis très attentive aux dépenses, mais sur ce sujet il faut faire attention, alors que nous sommes en train de perdre beaucoup d’emplois, comme nous l’avons vu lors de l’examen, il y a quelques instants, de la mission « Économie ».

M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.

Mme Corinne Féret. Madame la ministre, à l’occasion de l’examen de ces amendements, j’aimerais vous demander des précisions sur votre propos introductif, car peut-être n’ai-je pas tout compris.

Pour cette mission budgétaire, il était prévu, dans un premier temps, une économie de 2,6 milliards d’euros. Comme vous l’avez souligné, lors de la discussion de ce budget le 3 décembre dernier, le Sénat a « ajouté », en quelque sorte, 675 millions d’euros, soit une économie totale de 3,3 milliards d’euros.

Vous nous annoncez ce soir qu’il faut prévoir 800 millions d’euros d’économies supplémentaires. Faites l’addition vous-même : cela commence à faire beaucoup ! Nous pourrons le constater lorsque l’on évoquera, au travers des amendements, l’emploi et l’accompagnement de celles et ceux qui en ont plus besoin.

Je voudrais que vous précisiez un point sur lequel la réponse que vous avez donnée n’était pas assez claire. Le Premier ministre a écrit noir sur blanc qu’il annulait la suppression annoncée de cinq cents postes à France Travail, ce qui représentait 588 millions d’euros. Où sont passés ces 588 millions que vous « récupérez », si l’on peut dire ? On devrait les retrouver dans le budget. Si vous ne réintégrez pas ce montant dans le budget, alors cela signifie que vous faites encore plus de coupes.

Avec les chiffres que vous nous annoncez, tout est un peu embrouillé, surtout à cette heure-ci…

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Corinne Féret. Comme nous n’avons pas plus d’informations, nous avons besoin que vous nous apportiez des précisions.

M. le président. Mes chers collègues, je vous prie de respecter le temps de parole de deux minutes dont vous disposez.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Madame la ministre, pour rebondir sur l’intervention précédente, les cinq cents postes à France Travail ne sont pas supprimés : dont acte. Mais alors il va falloir optimiser fortement les postes !

En effet, comme vous le savez, pour assurer un accompagnement personnalisé et intensif durant la phase d’expérimentation, il a fallu diminuer de façon draconienne le portefeuille d’allocataires des conseillers. Maintenant, le dispositif se généralise et France Travail avait chiffré le nombre d’emplois à créer à huit cents, toutes choses égales par ailleurs. Non seulement on ne crée pas ces huit cents postes, mais vous vouliez même en supprimer cinq cents – vous faisiez fort !

En tout état de cause, il ne faut pas dire que, parce qu’on ne supprime finalement pas les postes, on ne touche à rien ! On empêche tout de même la création d’emplois qui doivent permettre d’assurer les mêmes conditions que celles de votre expérimentation, dont vous dites – à juste titre – que les résultats sont positifs.

C’est la même chose pour le budget. L’expérimentation a montré qu’une personne accompagnée coûte 900 euros. En maintenant le même budget, alors que le nombre de personnes concernées augmentera de façon massive, vous optimisez là encore !

En outre, je serais tentée de dire que, pour les personnes qui ont été accompagnées, il fallait surtout lever les freins à l’emploi. Or, comme le montre la théorie du no bridge, il n’est pas certain que les collectivités territoriales aient les capacités pour lever ces freins à l’emploi en matière de logement, de mobilité et de santé – il faut des médecins ! – pour les quatre cent mille personnes que vous avez évoquées, comme elles ont pu le faire pour un échantillon de soixante-quinze mille personnes.

Nous restons donc dans un cadre qui est très défavorable à l’atteinte des objectifs de la loi Plein emploi, parce que les conditions de l’expérimentation – en termes tant de budget que de volume de portefeuille des conseillers – étaient tout à fait exceptionnelles.

M. le président. Madame Lubin, l’amendement n° II- 1069 rectifié est-il maintenu ?

Mme Monique Lubin. Je le maintiens par principe, compte tenu de toutes les coupes que subiront par ailleurs les départements.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Je veux apporter des éclaircissements sur mon propos introductif.

Le 3 décembre dernier, le Gouvernement a proposé de diminuer de 675 millions d’euros le budget de la mission qui était déjà en baisse de 2,6 milliards d’euros ; cet amendement a été adopté. Le Sénat a également adopté, sur l’initiative du rapporteur spécial et de la rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, des amendements de baisse de crédits allant jusqu’à 1,3 milliard d’euros. Si on cumulait toutes ces diminutions, on arriverait à une baisse totale d’environ 4,6 milliards d’euros.

Nous souhaitons limiter cette diminution après les discussions que nous avons eues avec vous sur le volume des baisses de crédits et sur les secteurs dans lesquels elles doivent être appliquées. Avec l’amendement de 800 millions d’euros que le Gouvernement avait déposé, la baisse totale des crédits de la mission aurait été de 4,1 milliards, tandis que le Sénat a adopté une baisse de 4,6 milliards d’euros.

J’ai préféré, pour des raisons de procédure, retirer cet amendement afin que vous puissiez avoir la discussion en commission mixte paritaire. Voilà quels sont les enjeux du débat aujourd’hui.

Ensuite, pour répondre à Mme Poncet Monge sur la suppression des postes à France Travail, sujet qui avait déjà fait l’objet d’un débat le 3 décembre, je veux rappeler l’augmentation, tout à fait justifiée, de 10 % des effectifs de cet organisme durant les dix dernières années, alors que le chômage était plutôt en baisse. Le ratio d’accompagnement s’est donc largement amélioré.

Je rappelle également la logique du réseau national pour l’emploi que nous sommes en train de mettre en place. Il comprend France Travail, mais pas seulement ! Il s’agit de créer, enfin, dans notre pays un collectif de l’emploi, avec tous les acteurs concernés, lesquels font du très bon travail : France Travail, les missions locales, Cap emploi, les conseils départementaux, les régions bien sûr, sans oublier les communes – nous allons peut-être parler aussi des maisons de l’emploi.

En termes de gouvernance, ce collectif est nécessaire. Aux effectifs de France Travail s’ajoutent – il faut le dire – les dix mille conseillers des missions locales et les vingt mille conseillers départementaux qui interviennent en matière d’insertion. Celles et ceux qui se sont intéressés à l’expérimentation telle qu’elle a commencé il y a deux ans dans l’Aveyron voient que tout cela est très concret. Un agent de France Travail et un agent du conseil départemental reçoivent ensemble un bénéficiaire du revenu de solidarité active (RSA) et décident de qui s’en occupera en fonction du profil de cette personne : a-t-elle un profil professionnel ? Est-elle proche ou, au contraire, éloignée de l’emploi et du monde du travail ?

J’y insiste, il n’a pas que France Travail ou les missions locales : nous aurons une vision à 360 degrés qui permet de travailler collectivement, de manière beaucoup moins cloisonnée qu’actuellement. C’est un point très important qui explique pourquoi nous ne supprimons pas d’effectifs à France Travail. Mais encore faut-il voir les choses dans une perspective historique, c’est-à-dire sur les dix dernières années, et en envisageant une gouvernance où, au niveau national comme au niveau local, les différents acteurs travaillent ensemble.

Enfin, pour les missions locales – nous en reparlerons –, les crédits concernant l’État restent tout de même à un niveau très élevé, de 600 millions d’euros. Par ailleurs, nous ne touchons pas au contrat d’engagement jeune (CEJ), que celles-ci gèrent aujourd’hui.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-1069 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les trois premiers sont identiques.

L’amendement n° II-131 rectifié est présenté par M. Parigi, Mmes O. Richard et Devésa, MM. Cambier, J.M. Arnaud et Kern et Mme de La Provôté.

L’amendement n° II-188 rectifié est présenté par Mme Lermytte, M. Wattebled, Mme L. Darcos, MM. Brault, A. Marc, Chasseing et Chevalier et Mme Bourcier.

L’amendement n° II-377 rectifié est présenté par MM. Grosvalet, Cabanel, Gold et Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

94 000 000

197 000 000

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

 0

 0

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

 0

 0

Soutien des ministères sociaux

dont titre 2

 0

94 000 000 

 0

197 000 000

TOTAL

94 000 000

94 000 000 

197 000 000

197 000 000 

SOLDE

 0

Les amendements nos II-131 rectifié et II-188 rectifié ne sont pas soutenus.

La parole est à M. Michel Masset, pour présenter l’amendement n° II-377 rectifié.

M. Michel Masset. Repérer, accueillir, informer, orienter et accompagner les jeunes avec un parcours personnalisé vers l’emploi : l’importance de ces objectifs devrait suffire à garantir aux missions locales, a minima, le maintien de leurs crédits pour l’année 2025. Le PLF prévoit pourtant une baisse de 5,8 % de leurs moyens.

À ce désengagement de l’État s’ajoute la baisse des subventions accordées par les acteurs locaux, notamment les départements ou les régions – mon collègue Philippe Grosvalet m’a cité le cas de la région Pays de la Loire.

Au nom d’une austérité budgétaire radicale, on brise notre tissu social.

Notre amendement vise à préserver les moyens d’action du réseau, afin de ne pas laisser sur le bord de la route des jeunes qui ont besoin de cette main tendue. La jeunesse, c’est l’avenir ; encore faut-il lui donner une chance.

M. le président. L’amendement n° II-974, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

94 000 000

 

197 000 000

 

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

 

94 000 000

 

197 000 00

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

 

 

 

 

Soutien des ministères sociaux

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

94 000 000

94 000 000

197 000 00

197 000 00

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Marianne Margaté.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° II-1085 rectifié est présenté par M. Gillé, Mmes Lubin et Canalès, MM. Jeansannetas, Ros, Uzenat et Redon-Sarrazy, Mme Harribey, M. Pla, Mme Féret, M. Kanner, Mmes Le Houerou, Poumirol et Conconne, MM. Jomier et Fichet, Mmes Rossignol, Linkenheld et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L’amendement n° II-1108 rectifié est présenté par Mme Romagny, MM. Cambier et Fouassin, Mmes O. Richard et Florennes, MM. Omar Oili et Chevalier, Mme Berthet, M. J.B. Blanc, Mmes Saint-Pé, Ramia, de La Provôté, Perrot, Gruny et Jacquemet et MM. Duffourg, J.M. Arnaud, Longeot, Pellevat et Parigi.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

50 000 000

 

167 000 000

 

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

 

 

 

 

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

 

 

 

 

Soutien des ministères sociaux

dont titre 2

 

50 000 000

 

167 000 000

TOTAL

50 000 000

50 000 000

167 000 000

167 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Corinne Féret, pour présenter l’amendement n° II-1085 rectifié.

Mme Corinne Féret. Il est proposé, au travers de cet amendement, de donner les moyens aux missions locales de mener leur action d’encadrement des plus jeunes et de porter plusieurs projets : le CEJ, les coopérations avec les lycées professionnels ou encore les parcours d’appui et d’orientation pour les jeunes.

Le rétablissement du budget de l’an passé est dès lors tout à fait primordial pour la préservation des moyens d’action des missions locales. Si ce maintien n’était pas acté, celles-ci seraient obligées de ralentir, pour des raisons budgétaires, les actions qu’elles mettent en place pour l’insertion des jeunes. Pour nous, cela n’est pas concevable dès lors que le budget 2025 prévoit déjà une baisse importante des moyens qui leur sont accordés.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny, pour présenter l’amendement n° II-1108 rectifié.

Mme Anne-Sophie Romagny. J’attire l’attention de mes collègues sur cet amendement transpartisan qui, en plus d’être identique à celui du groupe socialiste, a aussi été cosigné par des collègues du groupe Les Républicains, notamment Mme Gruny.

Mme la ministre va certainement le dire dans quelques instants, je relève que les crédits pour le CEJ n’ont pas été diminués. Mais les missions locales ont besoin d’un budget de fonctionnement suffisamment important pour mettre en place les heures que les jeunes doivent effectuer dans leur parcours d’engagement jeune.

Il faut, par exemple, louer régulièrement des salles pour organiser des ateliers. Et en ruralité, c’est difficile ! J’insiste sur ce point, car les infrastructures en zones rurales sont insuffisantes pour accueillir tous ces jeunes, vu le nombre d’heures qu’ils doivent faire.

Madame la ministre, le budget de fonctionnement des missions locales doit rester identique afin de leur permettre de mener à bien leurs missions. J’y insiste, nous parlons non pas des crédits engagés par l’État en matière de CEJ, mais bien du budget de fonctionnement des missions locales.

M. le président. L’amendement n° II-1091, présenté par Mmes Poncet Monge, Senée et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mme M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations dengagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Accès et retour à l’emploi

36 000 000

 

140 000 000

 

Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi

 

36 000 000

 

140 000 000

Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail

 

 

 

 

Soutien des ministères sociaux

dont titre 2

 

 

 

 

TOTAL

36 000 000

36 000 000

140 000 000

140 000 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Nous demandons également que les moyens des missions locales ne soient pas diminués.

Madame la ministre, vous avez évoqué les augmentations d’effectifs de France Travail depuis dix ans. Mais, depuis le 1er janvier, la loi Plein emploi s’applique et nous devons parler de ce qu’il faut faire pour la mettre en œuvre et atteindre ses objectifs.

Les missions locales font face aux effets que produit la réforme prévue dans cette loi, avec la généralisation de l’inscription des jeunes comme demandeurs d’emploi. La réforme s’applique et les moyens ne suivent pas : aucune augmentation des effectifs n’est prévue dans le PLF, alors qu’en parallèle le budget du CEJ baisse de 100 millions d’euros.

Pourtant, le travail des missions locales est d’autant plus important qu’elles jouent un rôle majeur et reconnu pour la réinsertion professionnelle des jeunes éloignés de l’emploi.

Selon la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), les jeunes qui mobilisent France Travail, le service public de l’emploi, correspondent à un profil relativement privilégié et sont souvent déjà en emploi, alors que les missions locales représentent une solution souvent préférée par les jeunes les moins favorisés et les jeunes ruraux, qui peuvent compter sur un maillage territorial très développé – je rappelle qu’il y a sept mille cinq cents missions locales.

La Dares souligne que le service public de l’emploi est souvent inadapté pour les jeunes privés d’emploi depuis longtemps et dont la situation de précarité s’intensifie. La qualité de réinsertion des jeunes éloignés de l’emploi dépend majoritairement d’un accompagnement personnalisé global et rapproché. Il semble, par conséquent, nécessaire de permettre aux missions locales de maintenir a minima – j’insiste sur ce terme, car en réalité il faudrait les augmenter – leurs capacités d’action.

Pour toutes ces raisons, cet amendement vise à rehausser les crédits accordés aux missions locales. Car, madame la ministre, la coordination que vous avez évoquée, dont on attend qu’elle produise une certaine synergie, est chronophage et nécessite des effectifs.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Emmanuel Capus, rapporteur spécial. Ces amendements, qui viennent de toutes les travées, sont très importants et la commission des finances partage leur objectif. Avec la prédécesseure de Ghislaine Senée, Sophie Taillé-Polian, j’ai rédigé un rapport sur les missions locales, lesquelles jouent, comme l’ont dit les intervenants, un rôle majeur auprès d’un public particulièrement éloigné de l’emploi.

Pour autant, il ne vous a pas échappé, mes chers collègues, que nous sommes dans une situation budgétaire extrêmement contrainte. La commission des finances vous demande donc de retirer vos amendements, et cela pour trois raisons.

D’abord, parce que, s’il y a bien une diminution des crédits, elle porte principalement sur les crédits de paiement, en baisse de 22 %, et peu sur les autorisations d’engagement, qui restent stables.

Ensuite, parce que l’administration nous a assuré, sous le précédent gouvernement – mais je ne pense pas que cela ait changé –, que ces diminutions viseraient surtout les excédents de trésorerie de certaines missions locales, lesquelles ont été identifiées : elles ne toucheraient pas les missions locales les plus faibles.

Enfin, parce que, je le rappelle, la trajectoire financière des missions locales est passée de 372 millions en 2020 à 623 millions d’euros en loi de finances initiale pour 2024. On peut dire que cette trajectoire reste extrêmement positive.

Néanmoins, je le redis pour qu’il n’y ait pas de doute, la commission des finances reste particulièrement attachée aux missions locales et nous savons le rôle qu’elles peuvent jouer dans une période où la situation de l’emploi s’annonce délicate et où certaines régions vont elles-mêmes rencontrer des difficultés et se désengager.

Il nous semble cependant que la proposition du Gouvernement est relativement équilibrée, surtout si les CEJ gérés par les missions locales sont préservés.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Même avis que le rapporteur spécial.

M. le président. La parole est à M. Olivier Rietmann, pour explication de vote.

M. Olivier Rietmann. Je suivrai l’avis du rapporteur spécial et de la commission des finances.

Je vous invite cependant, madame la ministre, à la prudence. Oui, nous sommes dans une situation budgétaire difficile, mais les mesures dont nous parlons sont prises, alors même que nous sommes en train de sortir de la période durant laquelle la situation de l’emploi était positive. (Mme Raymonde Poncet Monge acquiesce.)

En effet, en matière d’emploi, les choses vont se durcir. Je le disais tout à l’heure : dans les entreprises de moins de dix salariés, mille deux cents emplois sont supprimés chaque semaine ; dans les PME, la situation n’est pas bonne ; les entreprises de taille intermédiaire (ETI) licencient. La perspective de croissance qui était de 1 % a été ramenée à 0,9 %, mais tout porte à croire qu’elle sera plus proche de 0,5 %. Quant au taux de chômage, il avoisinera 8 % à la fin de l’année.

Tous ces services – les missions locales, France Travail et l’environnement qui accompagne les personnes en difficulté et en perte d’emploi – vont être extrêmement sollicités d’ici à la fin de l’année. Même si la situation budgétaire est difficile, faites très attention de ne pas sous-estimer l’impact – je ne suis pas très optimiste – de l’année qui vient, laquelle sera terrible !

M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Romagny, pour explication de vote.

Mme Anne-Sophie Romagny. Monsieur le rapporteur spécial, j’entends que certaines missions locales peuvent avoir des trésoreries suffisantes et que toutes ne sont pas logées à la même enseigne.

Mais j’aimerais connaître les garanties qui nous permettent de dire qu’il ne s’agit pas d’une coupe budgétaire touchant l’ensemble des missions locales. Je le rappelle, des missions locales rurales sont en difficulté et les missions locales sont financées par les collectivités territoriales. Or il ne vous aura pas échappé que celles-ci ont moins de moyens que l’année dernière ou qu’il y a deux ans et qu’elles risquent de se désengager des missions locales.

Ce désengagement des collectivités territoriales risque de s’ajouter à celui de l’État. Je crains que les missions locales ne puissent pas mener à bien leurs missions. C’est la raison pour laquelle j’aimerais obtenir des garanties.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Pour revenir sur la situation économique, cela fait tout de même un moment qu’il y a des signaux faibles d’un retournement conjoncturel… Le ministère avance d’ailleurs comme argument une montée du chômage depuis le 1er janvier 2024, ce qui est étonnant, car, au moment de la dissolution, on nous disait que tout allait bien… Ce n’était pas le cas !

Nous avons alerté sur le risque récessif du budget. En effet, sous prétexte de contraintes budgétaires, on nous présente des budgets qui ont un effet récessif, lequel a été – je le rappelle – évalué à 0,8 point du PIB par l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).

Si je ne me trompe pas, le Sénat a adopté 1,3 milliard d’euros d’économies nouvelles… C’est ce que vous avez dit, madame la ministre, et vous avez voulu ramener ce montant, par un amendement que vous avez ensuite retiré, à 800 millions d’euros. Vous étiez donc prête à ouvrir un « crédit » de 521 millions d’euros : cela montre que nous avons une marge de manœuvre à cette hauteur pour nos divers amendements afin de rendre le budget moins récessif et moins antisocial.

M. le président. La parole est à M. Michel Masset, pour explication de vote.

M. Michel Masset. Je voudrais compléter les différentes interventions de mes collègues. Il y a un an, j’étais maire, président d’intercommunalité et vice-président chargé de l’économie dans mon département. Il faut savoir que, s’agissant des missions locales, les collectivités donnent ce qu’elles veulent et comme elles veulent. Certaines participent, d’autres pas du tout, selon qu’elles se portent bien ou non.

Je ne suis pas du tout convaincu quand j’entends dire que tout le monde ira mieux demain parce que certaines missions locales se portent bien. Les communes ont demandé aux intercommunalités de financer les missions locales à leur place, puisqu’elles avaient récupéré cette compétence ; et les départements se retirent.

Je reviens sur le propos d’Olivier Rietmann. Effectivement, on voit très bien que le nombre de demandeurs d’emploi, de personnes qui vont se retrouver au chômage demain, va augmenter. Hier, nous avions plutôt des postes à pourvoir et besoin de gens pour les occuper ; nous ne sommes plus dans cette situation aujourd’hui.

N’attendons pas que la situation soit critique, que nous soyons face au mur, pour réagir ! Je préférerais que les missions locales aient quelques réserves pour préparer l’avenir. Si l’on ajoute aux coupes sur l’apprentissage la suppression de l’accompagnement des missions locales, l’addition risque d’être lourde pour la jeunesse !

M. le président. La parole est à Mme Evelyne Corbière Naminzo, pour explication de vote.

Mme Evelyne Corbière Naminzo. J’ai bien entendu vos propos, madame la ministre. Vous avez évoqué les évolutions nationales sur les dix dernières années, notamment la baisse du chômage.

Pour ma part, je viens d’un territoire où le chômage est structurellement élevé, et bien supérieur à celui dans l’Hexagone. À La Réunion, le taux de chômage des jeunes est de 32 %, deux fois et demie supérieur à celui de l’Hexagone ; celui de la population générale est de 16,8 %. Notre collègue Masset vient de nous alerter quant au risque d’augmentation du chômage en 2025.

La situation en outre-mer est particulièrement alarmante. Nous sommes un territoire d’expérimentation de la loi Plein emploi et je m’inquiète des baisses de financement des missions locales. Comment allons-nous accompagner les jeunes si l’on dit, au niveau national, qu’il faut faire des économies et prendre des mesures d’austérité ? Quelles miettes restera-t-il aux territoires ultramarins ?