M. le président. Je vous rappelle que, pour cette mission, la conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à une heure trente.
En conséquence, nous devons terminer l'examen aux alentours de quinze heures trente-cinq de passer à l'examen de la mission « Régimes sociaux et de retraite ».
Neuf amendements sont à examiner.
anciens combattants, mémoire et liens avec la nation
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », figurant à l'état B.
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation |
1 901 882 102 |
1 905 972 102 |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
1 816 528 043 |
1 820 618 043 |
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale |
85 354 059 |
85 354 059 |
dont titre 2 |
1 589 256 |
1 589 256 |
M. le président. L'amendement n° II-2179, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
|
51 477 474 |
|
51 477 474 |
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
|
51 477 474 |
|
51 477 474 |
SOLDE |
- 51 477 474 |
-51 477 474 |
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée. Comme je viens de l'expliquer dans mon propos liminaire, j'ai souhaité, en conscience, que mon ministère participe à l'effort budgétaire indispensable à la continuité de l'État. J'ai voulu que cette trajectoire budgétaire soit soutenable pour garantir la souveraineté de la Nation et la préservation de son modèle politique et social.
Cela signifie que nous ne touchons pas au réarmement engagé depuis 2017 et conforté par la loi de programmation militaire (LPM) 2024-2030, sur laquelle nous avons tous longuement travaillé. Nous faisons porter cet effort sur le programme 169, en réduisant de 51,5 millions d'euros les autorisations d'engagement et les crédits de paiement. Nous nous sommes appuyés sur les travaux conduits depuis le dépôt du projet de loi de finances au mois d'octobre dernier.
Premièrement, la répartition fondant le remboursement à la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) par le ministère des armées de soins hospitaliers au profit de grands invalides de guerre n'est plus d'actualité. Après des études menées par la direction de la sécurité sociale, la Cnam et la direction du budget, l'actualisation a fait émerger des économies de l'ordre de 50 millions d'euros.
Deuxièmement, les dynamiques démographiques à venir allégeront les charges liées aux pensions militaires d'invalidité et aux allocations de reconnaissance du combattant.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le savez, c'est la troisième fois que je me présente devant vous pour défendre le budget de cette mission. Les deux précédentes années, j'ai réussi à maintenir les crédits sans avoir à procéder à des économies afin de pouvoir prendre de nouvelles mesures – celles-ci seront maintenues.
Avec cet amendement, nous tirons les conclusions des travaux qui ont été menés, dans un contexte où j'ai refusé toute amputation du programme 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale ». Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous l'assure, cette baisse de crédits n'affectera aucun bénéficiaire, ce qui était évidemment ma ligne rouge.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Je tiens tout d'abord à remercier tous ceux qui se sont exprimés sur cette mission.
L'amendement du Gouvernement, que la commission des finances n'a pas examiné d'un point de vue technique, vise à prévoir la réduction d'environ 51 millions d'euros des crédits du programme 169, qui concentre plus de 95 % des crédits de la mission. En revanche, les crédits du programme 158, lequel est hautement symbolique, ne sont pas réduits.
Compte tenu des enjeux importants auxquels nous devons faire face, nous sommes sensibles aux économies qui peuvent être faites. En l'occurrence, comme vous l'avez rappelé fort justement, madame la ministre, dans un esprit de solidarité, cette réduction ne pénalise absolument pas les ayants cause, qu'il s'agisse de pensions militaires d'invalidité ou d'allocations de reconnaissance du combattant.
Cet amendement va le sens de la sincérisation du budget de cette mission, dont les crédits s'élèvent globalement à presque 2 milliards d'euros.
Je rappelle, par ailleurs, que des mesures fiscales ont été prises pour aider certaines personnes seules ; je pense notamment à la demi-part fiscale dont bénéficient les titulaires de la carte d'ancien combattant, et dont peuvent bénéficier leurs veufs et veuves.
Enfin, on constate une stabilité des crédits de cette mission, qui préservent la notion, fondamentale, de respect dû aux anciens combattants.
À titre personnel, je suis favorable à cet amendement qui vise à procéder à la sincérisation budgétaire.
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.
M. Vincent Delahaye. Cet amendement vise a priori à réaliser des économies.
Si j'ai bien compris, madame la ministre, il s'agit de supprimer le décalage qui existait entre les soins dont bénéficient les grands invalides et les facturations qui étaient établies jusqu'à présent par la Cnam, écart qui se serait accumulé sur plusieurs années.
Je voudrais être certain de ne pas me tromper. Si l'on supprime 51 millions d'euros correspondant aux facturations de la Cnam, le déficit de la sécurité sociale va augmenter.
Il s'agirait donc, dans un objectif de clarification, de supprimer ces facturations en trop, ce qui aura pour effet de diminuer les recettes de la branche maladie de la sécurité sociale. Madame la ministre, pouvez-vous me confirmer que mon raisonnement est bon ?
Tout comme les membres du groupe Union Centriste, je voterai en faveur de cet amendement. Pour autant, je n'ai pas vraiment saisi, en écoutant les propos de la ministre et du rapporteur spécial, s'il s'agissait d'un transfert. Étant un défenseur de la vérité des prix, je préfère que le déficit soit réellement là où il doit être, c'est-à-dire au niveau de la branche maladie, plutôt que dans le budget de l'État.
M. le président. La parole est à M. Akli Mellouli, pour explication de vote.
M. Akli Mellouli. Je ne reprendrai pas les propos qui ont été tenus sur le respect dû au monde combattant.
À mon sens, ce projet de loi de finances prend un tour inquiétant : dans un prétendu souci de sincérisation, on n'arrête pas de donner des coups de rabot. Ainsi, sur toutes les lignes budgétaires, on nous fait le coup de la sincérisation à la baisse !
Puisque le débat sur la première partie a été tronqué et que l'on doit reprendre l'examen du projet de finances, il nous faudrait valider toutes les réductions de crédits que nous propose le Gouvernement.
Pourtant, alors que tant Mme la ministre que les différents orateurs ont fait état de l'indispensable travail de mémoire qu'exigeait la situation de notre pays et de la société française, où l'on voit d'anciens relents resurgir, on nous dit qu'il faut aussi réduire les crédits dans ce domaine. C'est incohérent !
Puisque ce projet de budget devient totalement insincère, le groupe GEST votera contre cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vais essayer de vous apporter davantage d'explications.
Je vous l'ai dit, pendant deux ans, j'ai tenu à maintenir le budget de cette mission afin de mener de nouvelles actions. Toutefois, par solidarité gouvernementale, il faut contribuer à l'effort. C'est pourquoi, tout au long de cette semaine, j'ai travaillé avec mon équipe pour trouver des millions d'euros et où faire des économies.
C'est par des mesures d'actualisation qui n'avaient pas été réalisées depuis une dizaine d'années qu'il a été possible de réaliser ces économies, lesquelles, de fait n'en sont pas vraiment.
Nous avons aujourd'hui la capacité de travailler sur cette actualisation avec la direction du budget, la Cnam et la sécurité sociale. Je peux donc vous confirmer qu'il s'agit non pas d'un report de dette sur la sécurité sociale, mais simplement d'une actualisation, car le budget alloué ne correspondait pas à la réalité.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Mes chers collègues, alors que nous avons repris nos travaux sur ce projet de budget, nous découvrons, mission après mission, des amendements du Gouvernement. En l'occurrence, on apprend qu'une actualisation n'a pas été faite pendant dix ans... Dont acte.
Je ne mets pas en doute la sincérité de vos propos, madame la ministre, mais les personnes concernées réagiront peut-être.
Il y a tout de même là un sujet ! Pour ma part, je m'interroge : doit-on poursuivre la procédure budgétaire comme si de rien n'était ?
Vous nous expliquez le travail que vous menez depuis deux ans – je ne doute pas de l'authenticité de votre engagement. Pourtant, depuis, il s'est passé des choses dans ce pays – élections législatives, censure du gouvernement… – et l'on continue, bon an mal an.
Je soumettrai donc à mon groupe une proposition relative à notre procédure budgétaire. En effet, nous ne pouvons pas voir arriver des amendements du Gouvernement que nous n'avons pas le temps d'étudier, et faire comme si de rien n'était. Les budgets des missions devraient être renvoyés en commission, afin que nous puissions les examiner à nouveau.
Pour notre part, nous n'avons pas le droit de faire des propositions. Alors que nous ne pouvons pas déposer de nouveaux amendements, on nous en soumet d'autres ! Va-t-on continuer à examiner les missions comme cela, avec des amendements gouvernementaux qui ne cessent de tomber, jusqu'à la réunion de la commission mixte paritaire ?
Cette situation nous met tous en difficulté, l'opposition sénatoriale comme la majorité.
Réfléchissons-y : poursuit-on le débat sur les missions sans rien dire ou les renvoie-t-on en commission pour qu'elles soient examinées de façon pluraliste, comme on sait le faire ici, au Sénat ?
M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.
M. Arnaud Bazin. Si j'ai bien compris, ces 50 millions d'euros prévus de façon récurrente n'étaient pas dépensés ; aujourd'hui on sincérise le budget de cette mission en les ôtant dudit budget.
C'est une sincérisation, et non une économie.
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Comme Pascal Savoldelli, je ne doute pas de votre sincérité et du travail que vous avez pu faire, madame la ministre.
Pour autant, depuis mercredi dernier, nous examinons les budgets des différentes missions et nous constatons que, deux heures avant l'ouverture de la séance, un nouvel amendement de suppression de crédits arrive. Je l'ai vécu jeudi dernier avec la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». C'est systématique !
Notre collègue Bazin vient de dire qu'il ne s'agissait pas d'une suppression de crédits, puisque ceux-ci n'étaient pas utilisés. Cela signifierait que nous avions, les années précédentes, des budgets insincères, puisque nous prévoyions des dépenses qui n'étaient pas réalisées.
Je ne doute pas de votre honnêteté, mais comment se fait-il qu'il n'y ait pas de suivi des dépenses réelles, année après année ? Finalement, on a systématiquement voté un budget comprenant 50 millions d'euros de trop ; j'entends bien que les grands invalides sont de moins en moins nombreux, donc que les remboursements d'actes chirurgicaux, ou autres, diminuent...
Avons-nous vraiment voté des dépenses de façon insincère, faute d'avoir contrôlé si elles avaient été consommées ou non ?
On nous présente depuis trois jours des réductions de crédits sous prétexte de sincérisation et de contrôle. Cet argument me dérange. Le groupe SER ne votera donc pas cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-1685 rectifié, présenté par M. Canévet, Mme Antoine, M. Delcros et Mmes N. Goulet et Vermeillet, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
|
7 000 000 |
|
7 000 000 |
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale dont titre 2 |
|
23 000 |
|
23 000 |
TOTAL |
|
7 023 000 |
|
7 023 000 |
SOLDE |
-7 023 000 |
-7 023 000 |
La parole est à Mme Sylvie Vermeillet.
Mme Sylvie Vermeillet. Compte tenu de l'adoption de l'amendement du Gouvernement, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° II-1685 rectifié est retiré.
L'amendement n° II-85 n'est pas défendu.
L'amendement n° II-32, présenté par M. Laménie, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
|
1 000 000 |
|
1 000 000 |
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
|
1 000 000 |
|
1 000 000 |
SOLDE |
- 1 000 000 |
- 1 000 000 |
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Puisque l'amendement du Gouvernement a été adopté et que des explications légitimes et sincères viennent de nous être apportées – je remercie sincèrement Mme la Ministre et mes collègues d'avoir tenu un langage de vérité, car il est important d'aborder ces sujets avec force, conviction et respect –, je retire cet amendement, qui était un amendement d'appel.
M. le président. L'amendement n° II-32 est retiré.
L'amendement n° II-968 rectifié, présenté par M. Fernique, Mmes Belrhiti et Drexler, MM. Kern, Khalifé et Klinger, Mme Muller-Bronn, M. Reichardt, Mmes Schalck et Schillinger et M. M. Weber, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Reconnaissance et indemnisation des orphelins des incorporés de force d'Alsace et de Moselle pendant la Seconde Guerre mondiale
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
|
29 410 094 |
|
29 410 094 |
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale dont titre 2 |
|
|
|
|
Reconnaissance et indemnisation des orphelins des incorporés de force d'Alsace et de Moselle pendant la Seconde Guerre mondiale |
29 410 094 |
|
29 410 094 |
|
TOTAL |
29 410 094 |
29 410 094 |
29 410 094 |
29 410 094 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Jacques Fernique.
M. Jacques Fernique. Notre Nation a une dette à l'égard de l'Alsace-Moselle. Tel est l'objet de cet amendement transpartisan qu'ont signé onze sénatrices et sénateurs de ces trois départements.
Il y a dette parce qu'il y a eu manquement, d'abord du fait de l'abandon face à l'annexion de fait datant de 1940 : les citoyens français d'Alsace-Moselle ont été laissés à leur terrible sort. Cette réalité a longtemps été occultée. Cette injustice s'est prolongée parce que des décennies ont passé avant qu'il soit admis qu'il s'agissait bien d'une annexion, et non d'une occupation.
De cette annexion a résulté le crime de masse qu'a été l'incorporation de force. Toute une population masculine entre 17 et 36 ans fut contrainte, contre sa conscience nationale, à porter les armes sous un uniforme qu'elle détestait. On imposa à ces hommes le statut de traître et, pour les survivants et leurs proches, il a fallu vivre avec cet opprobre. Les apparences étaient contre eux et ils ont préféré se taire, alors que, comme l'écrit l'historien Jean-Laurent Vonau, il aurait fallu crier au monde entier la vérité du crime qu'ils avaient enduré.
Des 130 000 enrôlés de force, 40 000 ne sont pas revenus. Qui sait qu'au total, à l'échelle du pays, un Français sur cinq morts durant la Seconde Guerre mondiale est un Alsacien-Mosellan ?
L'Allemagne, sans clairement reconnaître le crime, a versé 250 millions de deutschemarks en 1981 pour les survivants, mais rien pour les orphelins.
La France, enfin, en 2010, a rendu leur dignité aux incorporés de force par la voix du président Nicolas Sarkozy. Cette reconnaissance nationale qu'ils n'étaient pas des traîtres vient d'être renouvelée par le président Emmanuel Macron à Strasbourg le 23 novembre dernier, avec les mots justes qu'il fallait.
Il revient à présent à la représentation nationale de concrétiser cette reconnaissance en faisant ce geste pour les enfants qui ont été privés de leur père. Quelque 3 500 de ces orphelins, très âgés, sont encore vivants, et nous le leur devons avant qu'il n'y en ait plus un seul.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Cet amendement important est soutenu par nos collègues de Moselle et d'Alsace.
Il est vrai que les orphelins des malgré-nous sont exclus de cette définition, alors qu'ils ont incontestablement un besoin de reconnaissance et de conservation de cette mémoire. C'est nécessaire, voire indispensable.
Certes, les malgré-nous ont été assimilés aux anciens combattants en 1945. Leurs orphelins sont pupilles de la Nation et peuvent bénéficier de l'action sociale de l'Office national des combattants et des victimes de guerre (ONaCVG) – j'en profite pour saluer le travail de cette structure dans nos territoires et départements respectifs.
Il est vrai que le dispositif proposé aura un coût financier de 29,4 millions d'euros ; pour autant, il faut toujours mettre en avant l'aspect humain. Par ailleurs, les éventuels bénéficiaires pourront faire le choix d'une indemnité sous forme de rente.
Sur cet amendement, la commission sollicite l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée. Monsieur le sénateur, je tiens tout d'abord à rappeler que les orphelins d'incorporés de force bénéficient du soutien de l'ONaCVG, comme vient de le dire M. le rapporteur spécial, en leur qualité de pupilles de la Nation. Ils ont exactement les mêmes droits à pension que les fils et filles des morts pour la France, et bénéficient d'aides de secours en cas de maladie, d'absence de ressources ou de difficultés momentanées.
Je rappelle également que ces orphelins ont reçu le versement d'une allocation unique financée par l'Allemagne, versée à leur mère ou bien à eux directement lorsqu'ils étaient orphelins de père ou de mère.
Toute mesure supplémentaire d'indemnisation des orphelins d'incorporés de force ne me paraît pas pertinente, d'autant qu'elle créerait une distorsion de situations avec les orphelins des autres morts pour la France.
Le Gouvernement est très attaché au périmètre actuel d'indemnisation des orphelins des victimes de la barbarie nazie, de la Shoah et de la déportation, pour laquelle l'État français a reconnu sa part de responsabilité, responsabilité qui doit rester singulière.
Pour autant, nous devons donner toute sa place à la mémoire des incorporés de force dans notre mémoire nationale, ce qui constitue une tâche d'ampleur. Nous devons y travailler résolument, en faisant figurer cet épisode dans les manuels scolaires, en soutenant la recherche historique et le développement d'activités mémorielles. J'ai d'ailleurs demandé à la Mission du 80e anniversaire des débarquements, de la Libération de la France et de la Victoire d'accentuer son soutien à des laboratoires de recherche, pour faire émerger des projets scientifiques sur ce thème.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Jacques Fernique, pour explication de vote.
M. Jacques Fernique. Madame la ministre, je m'attendais à l'argument sur le risque de distorsion de situations, lequel justifierait l'avis défavorable du Gouvernement.
Je tiens à dire combien la douleur liée à cette tragédie spécifique impose la reconnaissance de cette mémoire.
À Colmar, en 2010, la République, par la voix de Nicolas Sarkozy, disait aux incorporés de force, « à leurs familles, à leurs enfants [...], aux survivants de cette tragédie, [...] que ceux qui les ont abandonnés, ceux qui n'ont rien fait pour empêcher cette ignominie perpétrée contre des citoyens français, ont trahi les valeurs de la France, l'ont déshonorée ».
Le 23 novembre dernier, à Strasbourg, l'actuel Président de la République a dit, à juste titre, de ces enfants d'Alsace et de Moselle qu'ils furent mis « au service d'une cause qui les faisait esclaves » et qu'ils « comprirent parfois aussi dans leur rang des enfants perdus qui endossèrent la cause néfaste du Reich », ajoutant : « Il nous faut reconnaître les souffrances que les premiers subirent, celles que les seconds dans leur petit nombre causèrent. »
Madame la ministre, la reconnaissance des souffrances résultant de cet abandon de 1940 et de ce crime de masse commis de 1942 à 1945 devra aller au-delà des mots, même s'ils sont essentiels.
M. le président. Mes chers collègues, il nous reste cinq minutes pour examiner les quatre amendements restant en discussion.
L'amendement n° II-1626, présenté par Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Briquet, Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
6 000 000 |
6 000 000 |
||
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale dont titre 2 |
6 000 000 |
6 000 000 |
||
TOTAL |
6 000 000 |
6 000 000 |
6 000 000 |
6 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Émilienne Poumirol.
Mme Émilienne Poumirol. Madame la ministre, dans mon intervention liminaire, je n'ai pas évoqué la diminution des crédits destinés aux commémorations, car je sais bien que leur montant sera moins important en 2025 que l'année dernière, à l'occasion de laquelle nous avons célébré l'anniversaire de la Libération.
Cet amendement a trait aux retraites des veuves de harkis. En 2015, nous avons voté une rente viagère pour les veuves dont les époux étaient décédés à partir de 2016. L'loi introduit une différence entre les pensions des veuves, selon que leur mari est décédé avant ou après 2016, ce qui constitue une incongruité.
J'ai cru comprendre qu'un amendement à l'objet similaire avait été adopté l'année dernière. Si tel est le cas, je retirerai bien évidemment mon amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. L'amendement étant satisfait, la commission en demande le retrait.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée. Un amendement à l'objet similaire ayant bien été adopté l'année dernière, cet amendement est satisfait.
M. le président. Madame Poumirol, l'amendement n° II-1626 est-il maintenu ?
Mme Émilienne Poumirol. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-1626 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° II-533 rectifié est présenté par Mmes Micouleau et Richer, M. Allizard, Mmes Belrhiti, Berthet et V. Boyer, M. Bruyen, Mme Di Folco, MM. Genet et Gremillet, Mmes Joseph et Lassarade et MM. Michallet, Milon, Panunzi, Piednoir, Rietmann, Sol, Somon et P. Vidal.
L'amendement n° II-1625 est présenté par Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Briquet, Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L'amendement n° II-1743 est présenté par M. Benarroche.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, mémoire et liens avec la Nation |
92 290 |
|
92 290 |
|
Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale dont titre 2 |
|
92 290 |
|
92 290 |
TOTAL |
92 290 |
92 290 |
92 290 |
92 290 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Catherine Di Folco, pour présenter l'amendement n° II-533 rectifié.
Mme Catherine Di Folco. Il est défendu.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour présenter l'amendement n° II-1625.
Mme Émilienne Poumirol. Tous les ans, de façon répétitive, nous défendons cet amendement.
Jusqu'à présent, ils étaient vingt-sept ; ils ne sont plus que vingt-deux supplétifs de statut civil de droit commun de la guerre d'Algérie. Le Conseil constitutionnel a estimé que les demandes ou renouvellements de demande des supplétifs déposés entre le 5 février 2011 et le 19 décembre 2013 étaient éligibles à l'attribution de l'allocation de reconnaissance.
J'y insiste, cela concerne aujourd'hui vingt-deux supplétifs. Si l'on attend encore, ils finiront naturellement tous par mourir. La dépense serait de l'ordre de 92 000 euros ; les fédérations de rapatriés y sont, en particulier, très attachées.
M. Marc Laménie, rapporteur spécial. Certes, ce sujet, que nous examinons tous les ans, mérite respect et reconnaissance, mais notre volonté d'objectivité et de sincérisation du budget nous conduit à demander le retrait de ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Patricia Mirallès, ministre déléguée. Pour être tout à fait exacte, j'ai demandé le chiffre du dernier comptage : ces supplétifs ne sont plus que vingt.
Il se trouve que je n'ai aucun dossier en cours : je ne puis donc y répondre. Néanmoins, je suis le sujet, puisque des amendements similaires sont déposés chaque année.
Le gouvernement demande donc le retrait des amendements ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Madame Poumirol, l'amendement n° II-1625 est-il maintenu ?
Mme Émilienne Poumirol. Oui, monsieur le président, je maintiens cet amendement, car les associations de rapatriés nous proposent chaque année de le déposer.
Vous l'avez dit, madame la ministre, ces supplétifs ne sont plus que vingt. Il a été question de sincérisation du budget : la dépense pourrait facilement être englobée dans ce budget.
Cette mesure répond au devoir qui est le nôtre d'assurer reconnaissance et égalité. Il est de notre responsabilité de défendre les supplétifs encore en vie qui ont servi la France au moment de la guerre d'Algérie.