Sommaire

Présidence de Mme Sylvie Vermeillet

vice-présidente

Secrétaires :

M. Jean-Michel Arnaud,

Mme Nicole Bonnefoy.

Procès-verbal

Candidature à une éventuelle commission mixte paritaire

Financement de la sécurité sociale pour 2025

Suite de la discussion d'un projet de loi

Après l'article 3 quater (suite)

Article 4

Article 4 bis (nouveau)

PRÉSIDENCE DE Mme Anne Chain-Larché

vice-présidente

Après l'article 4 bis

Article 5

Après l'article 5

Article 5 bis (nouveau)

Article 5 ter (nouveau)

Article 5 quater (nouveau)

Après l'article 5 quater

Article 6

(À suivre)

Présidence de Mme Sylvie Vermeillet

vice-présidente

Secrétaires :

M. Jean-Michel Arnaud,

Mme Nicole Bonnefoy.

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quatorze heures trente.)

1

Procès-verbal

Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n'y a pas d'observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.

2

Après l’article unique (interruption de la discussion)
Dossier législatif : proposition de loi pour un démarchage téléphonique consenti et une protection renforcée des consommateurs contre les abus
Discussion générale (fin)

Candidature à une éventuelle commission mixte paritaire

Mme la présidente. J'informe le Sénat que la liste des candidats proposés par la commission des affaires sociales pour siéger au sein de l'éventuelle commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 a été publiée.

Cette liste sera ratifiée si la présidence n'a pas reçu d'opposition dans le délai d'une heure prévu par notre règlement.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi pour un démarchage téléphonique consenti et une protection renforcée des consommateurs contre les abus
 

3

Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025
Après l'article 3 quater (suite) (début)

Financement de la sécurité sociale pour 2025

Suite de la discussion d'un projet de loi

Mme la présidente. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, dont le Sénat est saisi en application de l'article 47-1, alinéa 2, de la Constitution, de financement de la sécurité sociale pour 2025 (projet n° 129, rapport n° 138, avis n° 130).

Dans la discussion des articles, nous poursuivons, au sein du titre Ier de la deuxième partie, l'examen des amendements tendant à insérer un article additionnel après l'article 3 quater.

DEUXIÈME PARTIE (SUITE)

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L'ÉQUILIBRE GÉNÉRAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L'EXERCICE 2025

TITRE Ier (suite)

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025
Après l'article 3 quater (suite) (fin)

Après l'article 3 quater (suite)

Mme la présidente. L'amendement n° 408 rectifié, présenté par M. Menonville, Mme Antoine, MM. S. Demilly et Henno, Mme Saint-Pé, MM. Levi et Kern, Mme O. Richard, MM. Pillefer, Courtial et Delcros, Mme Jacquemet, MM. Bleunven et Capo-Canellas, Mmes Perrot, Billon et Romagny et M. Duffourg, est ainsi libellé :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du A du I, après la seconde occurrence des mots « code général des impôts », sont insérés les mots « et des dispositifs mentionnés aux 1° et 2° du présent A » ;

2° Après le premier alinéa du même A sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :

« Le montant mentionné au premier alinéa est également établi en tenant compte des dispositifs d'étalement appliqués aux produits suivants :

« - Plus-values à court terme imposées selon les modalités de l'article 39 quaterdecies du code général des impôts ;

« - Profit résultant d'une indemnité d'assurance-vie imposé selon les dispositions de l'article 38 quater du même code ;

« - Subventions d'équipements imposées dans les conditions de l'article 42 septies dudit code. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Franck Menonville.

M. Franck Menonville. Cet amendement tend à rétablir l'assiette originelle des cotisations sociales des exploitants agricoles.

Pour simplifier le calcul des cotisations sociales, afin de l'établir sur une assiette unique, et pour améliorer les droits en matière de retraite des exploitants agricoles, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 a réformé l'assiette des cotisations sociales des travailleurs indépendants.

Or les dispositions de l'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale relatives à l'assiette des exploitants agricoles, dont l'entrée en vigueur est prévue en 2026, sont source de grandes inquiétudes, car elles prévoient une assiette sociale plus large que celle qui est actuellement appliquée.

En effet, certains mécanismes fiscaux, pourtant pris en compte dans la détermination de l'assiette sociale, n'ont pas été reconduits, tels que l'étalement fiscal à court terme de certaines indemnités versées à l'entreprise dans le cadre d'un contrat d'assurance sur la vie ou des subventions d'équipement.

Aussi, afin de ne pas pénaliser les exploitants, cet amendement vise donc à rétablir l'assiette originelle.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je remercie Franck Menonville d'avoir appelé notre attention sur la question des assiettes de cotisation des exploitants agricoles.

Cet amendement vise à maintenir l'assiette en vigueur en 2024. Pascale Gruny avait déposé un amendement identique ; elle l'a toutefois retiré, dans la mesure où Mme la ministre devrait annoncer qu'un autre article répond précisément à cette proposition.

Vous l'avez dit, la réforme issue de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 n'a pas reconduit l'étalement fiscal à court terme de certaines indemnités versées à l'entreprise dans le cadre d'un contrat d'assurance sur la vie et des subventions d'équipement. Le sujet est pour autant d'une grande complexité ; aussi, même s'il est quelque peu cavalier d'entamer notre discussion de cet après-midi en sollicitant l'avis du Gouvernement sur cet amendement, c'est ce que j'entends faire. Madame la ministre, nous vous saurions gré de bien vouloir nous apporter votre éclairage sur cette question.

Mme la présidente. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre du travail et de l'emploi. Monsieur Menonville, votre amendement vise à permettre la prise en compte, dans le calcul de l'assiette des cotisations sociales des non-salariés agricoles, de l'étalement fiscal des subventions d'équipement et des plus-values à court terme réalisées lors de la perception d'indemnités d'assurance à la suite d'un sinistre.

Le Gouvernement s'était effectivement engagé auprès des professionnels agricoles, au printemps dernier, à corriger une erreur matérielle de la loi de financement de la sécurité sociale de l'année précédente afin de rétablir cette exonération sociale des plus-values de cession à court terme exonérées fiscalement, en rétablissant le droit actuellement applicable.

L'article 5 bis, qui sera examiné aujourd'hui, a été introduit à l'Assemblée nationale par un amendement du Gouvernement visant à reprendre l'ensemble de ces demandes et à maintenir à droit constant la prise en compte dans l'assiette sociale de l'étalement des plus-values d'équipements.

Ainsi, les objectifs légitimes de votre amendement sont d'ores et déjà satisfaits. En conséquence, monsieur le sénateur, je vous demande de bien vouloir le retirer ; à défaut, l'avis du Gouvernement serait défavorable.

Mme la présidente. Quel est maintenant l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Même avis, madame la présidente !

Mme la présidente. Monsieur Menonville, l'amendement n° 408 rectifié est-il maintenu ?

M. Franck Menonville. Non, je le retire, madame la présidente, dans la mesure où il sera satisfait par les mesures annoncées ; je remercie à cet égard Mme la rapporteure générale ainsi que Mme la ministre.

Mme la présidente. L'amendement n° 408 rectifié est retiré.

Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 460, présenté par M. Le Gleut, n'est pas soutenu.

L'amendement n° 739 rectifié, présenté par M. Chantrel, Mmes Conway-Mouret et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Bourgi et Ros, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Ziane et Lurel, Mme Bélim, M. Féraud, Mme Harribey, M. Gillé, Mme Brossel, MM. Fagnen, Darras, Michau, Mérillou et Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Roiron, Mme Blatrix Contat, M. Jeansannetas, Mme G. Jourda, MM. Vayssouze-Faure et M. Weber, Mme Monier, MM. P. Joly, Marie, Tissot, Durain et Chaillou, Mme Artigalas, MM. Redon-Sarrazy, Ouizille, Pla, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le chapitre 6 du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Après le I ter de l'article L. 136-6, il est inséré un I quater ainsi rédigé :

« I quater. – Par dérogation aux I et I bis du présent article, ne sont pas redevables de la contribution les personnes, fiscalement domiciliées dans un pays autre que ceux mentionnés au premier alinéa du I ter du présent article, qui relèvent en matière d'assurance maladie d'une législation d'un pays étranger et qui ne sont pas à la charge d'un régime obligatoire de sécurité sociale français.

« Pour l'application du premier alinéa du présent I quater aux gains mentionnés à l'article 150-0 B bis du code général des impôts et aux plus-values mentionnées au I de l'article 150-0 B ter du même code, la condition d'affiliation à un autre régime obligatoire de sécurité sociale s'apprécie à la date de réalisation de ces gains ou plus-values. » ;

2° Après le I ter de l'article L. 136-7, il est inséré un I quater ainsi rédigé :

« I quater. – Par dérogation aux I et I bis du présent article, ne sont pas redevables de la contribution les personnes, fiscalement domiciliées dans un pays autre que ceux mentionnés au premier alinéa du I ter du présent article, qui relèvent en matière d'assurance maladie d'une législation d'un pays étranger et qui ne sont pas à la charge d'un régime obligatoire de sécurité sociale français.

« L'établissement payeur mentionné au 1 du IV du présent article ne prélève pas la contribution assise sur les revenus de placement dès lors que les personnes titulaires de ces revenus justifient, selon des modalités définies par décret, des conditions définies au premier alinéa du présent I quater.

« En cas de prélèvement indu par l'établissement payeur, ce dernier peut restituer le trop-perçu à la personne concernée et régulariser l'opération sur sa déclaration ou la personne concernée peut solliciter auprès de l'administration fiscale la restitution de la contribution prélevée par l'établissement payeur.

« La contribution assise sur les plus-values mentionnées au 2° du I du présent article n'est pas due dès lors que les personnes titulaires de ces plus-values justifient, selon des modalités définies par décret, des conditions définies au premier alinéa du présent I quater. »

II. – À la première phrase du I de l'article 16 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale, les mots : « au I ter » sont remplacés par les mots : « aux I ter et I quater ».

III. – Le présent article s'applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2022 et aux plus-values réalisées au titre de cessions intervenues à compter de cette même date.

IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Yan Chantrel.

M. Yan Chantrel. Cet amendement est très simple et la Haute Assemblée l'a adopté quatre fois d'affilée, lors de la discussion des précédents projets de loi de financement de la sécurité sociale. Il vise à corriger une inégalité de traitement entre nos compatriotes établis hors de France, mise en lumière par la décision de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) de 2019, qui a sanctionné notre pays.

La France assujettissait en effet nos compatriotes à la contribution sociale généralisée (CSG) et à la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS), alors même que ceux-ci ne peuvent bénéficier de la sécurité sociale de notre pays. Une sanction européenne a donc été prononcée à l'encontre de la France.

À la suite de cet arrêt, nos compatriotes résidant au sein de l'Espace économique européen et en Suisse n'ont plus été assujettis à la CSG-CRDS.

Toutefois, le Gouvernement n'a pas étendu cette mesure à nos compatriotes établis en dehors de l'Union européenne, créant ainsi une situation profondément injuste. Ce qui vaut pour nos compatriotes résidant au sein de l'Espace économique européen doit également valoir pour ceux qui n'y résident pas.

Cet amendement a été adopté chaque année par l'ensemble des groupes de cet hémicycle. Il revient cette année devant nous afin que nous puissions mettre un terme à cette inégalité fiscale et sociale qui frappe nos compatriotes établis hors de France.

Mme la présidente. L'amendement n° 1174 rectifié, présenté par Mme Renaud-Garabedian, M. Ruelle et Mme Briante Guillemont, est ainsi libellé :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le I bis de l'article L. 136-6 est complété par les mots : « et qui ne justifient pas d'une affiliation antérieure d'au moins dix années à un régime obligatoire français d'assurance maladie, qu'elles soient consécutives ou non » ;

2° Le I bis de l'article L. 136-7 est complété par les mots : « qui ne justifient pas d'une affiliation antérieure d'au moins dix années à un régime obligatoire français d'assurance maladie, qu'elles soient consécutives ou non ».

II. – Le présent article s'applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2025 et aux plus-values réalisées au titre de cessions intervenues à compter de cette même date.

III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian.

Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Les Français non résidents installés hors d'Europe sont redevables, sur les revenus fonciers encaissés en France, de la CSG et de la CRDS, alors que nos compatriotes vivant en Europe en sont exonérés.

Chaque année, nous menons le même combat pour mettre un terme à cette inacceptable iniquité fiscale ; chaque année, malheureusement, vos prédécesseurs s'y opposent pour des raisons budgétaires.

C'est pourquoi l'amendement que je présente cette année est différent : il tend à imposer aux non-résidents, qu'ils soient français ou étrangers, une affiliation préalable à un régime français obligatoire d'assurance maladie pendant au moins dix ans.

Cette condition permet d'exclure les investisseurs immobiliers étrangers et de garantir l'exonération de la CSG et de la CRDS aux seuls Français de l'étranger qui, pour beaucoup, ont vécu en France avant leur départ et remplissent donc cette condition d'affiliation antérieure.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je reconnais la constance de nos collègues qui portent ces amendements, en effet régulièrement adoptés tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, malgré, généralement, un avis défavorable de la commission et du Gouvernement. Pour autant, je souhaite rappeler les raisons qui nous ont toujours conduits à émettre un avis défavorable sur de tels amendements.

La première tient au fait que la CSG et la CRDS sont non pas des cotisations ouvrant des droits, mais des impôts, qui n'en créent pas. Si nous commençons à en exonérer les Français vivant hors de l'Union européenne, où nous arrêterons-nous ? Pourquoi ne pas les exonérer également de l'impôt sur le revenu ? Après tout, ils utilisent moins les routes ou les écoles françaises… La question mérite d'être posée, sans ironie aucune : elle touche, au fond, au périmètre de nos exonérations. Cependant, je sais que cet argument ne convaincra pas plus que les années précédentes les auteurs de ces amendements.

J'insiste donc sur un deuxième argument : il n'est pas du tout évident qu'il soit juridiquement possible d'exonérer les Français sans exonérer également les étrangers. Par exemple, on peut subordonner l'exonération à l'assujettissement à un régime français obligatoire d'assurance maladie, mais le lien entre cette condition et l'exonération de CSG ou de CRDS n'est pas manifeste. Pour cette raison, il est douteux qu'une telle disposition survive à un recours devant le juge constitutionnel. Pourrons-nous vraiment expliquer à nos compatriotes que tel ou tel étranger fortuné, voire très fortuné, est exonéré de CSG et de CRDS sur ses investissements en France ?

Le troisième argument, essentiel dans le contexte actuel, est d'ordre financier : le coût de cette mesure s'élèverait à environ 300 millions d'euros. Compte tenu de la situation financière de la sécurité sociale, nous ne pouvons nous permettre un tel écart. Cette mesure serait véritablement perçue comme un cadeau fiscal accordé à certains de nos compatriotes qui, même s'ils ne sont pas tous très aisés, le sont suffisamment pour tirer des revenus de leur patrimoine en France, et seront donc nécessairement considérés comme aisés par l'opinion publique.

C'est pourquoi la commission émet, une nouvelle fois, un avis défavorable sur ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Même avis !

Mme la présidente. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, pour explication de vote.

Mme Hélène Conway-Mouret. Permettez-moi de remercier tout particulièrement nos collègues Yan Chantrel et Évelyne Renaud-Garabedian, qui viennent d'exposer avec une grande clarté l'ensemble des arguments en faveur de cet amendement. Je ne les reprendrai donc pas.

Cependant, je tiens à vous rappeler que si les sénateurs socialistes représentant les Français établis hors de France défendent cette mesure avec constance, chaque année, sans jamais avoir été entendus, c'est parce que nous souhaitons corriger une injustice sociale qui persiste.

En 2019, l'État français a certes mis sa législation en conformité avec le droit européen, mais, ce faisant, il a créé une inégalité de traitement entre, d'une part, les Français établis dans l'Espace économique européen et en Suisse et, d'autre part, les Français résidant dans le reste du monde.

Madame la rapporteure générale, la CSG et la CRDS sont des contributions sociales, auxquelles les Français établis dans ces États tiers sont assujettis, sans pour autant bénéficier des prestations sociales que ces contributions ouvrent. Ils sont d'ailleurs souvent contraints de s'affilier à un régime de sécurité sociale dans leur pays de résidence, quand un tel régime existe. Nos compatriotes sont donc, de fait, soumis à une double cotisation.

Mon groupe a toujours été favorable à ce que tous les Français contribuent à l'effort national, en fonction de leurs capacités, mais il a aussi toujours combattu toutes les formes d'inégalité, et celle dont il est question ici est flagrante.

Nous formons donc le vœu que cet amendement, souvent adopté dans notre hémicycle, soit définitivement adopté et retenu en commission mixte paritaire, car il n'a pas été, jusqu'à présent, adopté à l'Assemblée nationale, afin que l'égalité entre tous nos compatriotes soit ainsi rétablie.

Mme la présidente. La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian, pour explication de vote.

Mme Évelyne Renaud-Garabedian. La France a toujours considéré la CSG et la CRDS, auxquelles sont assujettis les non-résidents, français ou étrangers, sur les revenus fonciers encaissés en France, comme un impôt destiné à subvenir aux charges publiques.

Or l'arrêt européen évoqué précédemment par notre collègue indique qu'il s'agit en réalité d'une cotisation sociale finançant les organismes de sécurité sociale.

En effet, la CSG finance la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam), la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf), le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) et la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), tandis que la CRDS finance la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades). Dès lors, pourquoi faire financer par des non-résidents ces caisses de cotisations sociales, alors même que ceux-ci ne jouissent pas des droits qui y sont associés ?

Vous vous êtes interrogée sur l'opportunité d'accorder cette facilité à des personnes disposant de biens immobiliers et considérées comme aisées. C'est précisément la raison pour laquelle l'amendement que j'ai présenté cette année impose une cotisation préalable à une caisse d'assurance maladie pendant une dizaine d'années. Il vise donc non pas de purs investisseurs immobiliers, mais des investisseurs présents en France et dont les activités ne se limitent pas à l'immobilier.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 739 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1174 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 648, présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Bourgi et Ros, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Ziane et Lurel, Mme Bélim, M. Féraud, Mme Harribey, M. Gillé, Mme Brossel, MM. Fagnen et Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Darras, Michau, Mérillou et Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Roiron, Mme Blatrix Contat, MM. Jeansannetas, Vayssouze-Faure et M. Weber, Mme Monier, MM. P. Joly, Marie, Tissot, Durain et Chaillou, Mme Artigalas, MM. Redon-Sarrazy, Ouizille, Pla et Uzenat, Mme G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 1° du I de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale est remplacé par un six alinéas ainsi rédigés :

« 1° Comme suit pour les revenus d'activité mentionnés aux I et II de l'article L. 136-1-1 et assujettis à la contribution sociale mentionnée à l'article L. 136-1 :

« a) À 8,9 % pour les revenus bruts annuels compris entre 0 et 23 000 € ;

« b) À 9,2 % pour les revenus bruts annuels compris entre 23 000 et 83 000 € ;

« c) À 11,2 % pour les revenus bruts annuels compris entre 83 000 et 103 000 € ; »

« d) À 13,2 % pour les revenus bruts annuels supérieurs à 103 000 € ; »

« …° À 9,2 % pour les revenus de remplacements assujettis à la contribution sociale mentionnée au même article L. 136-1. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Mme Annie Le Houerou. Cet amendement vise à instaurer une CSG progressive sur les revenus d'activité.

Actuellement, le taux de CSG sur ces revenus est unique et s'élève à 9,2 %. Nous proposons de renforcer ce taux uniquement pour les ménages les plus aisés, c'est-à-dire ceux dont les revenus annuels excèdent 82 432 euros. Parallèlement, l'amendement tend à prévoir une légère baisse du taux pour les revenus annuels inférieurs à 11 294 euros.

Cette mesure répond à un double objectif : renforcer la justice sociale et contribuer au redressement des comptes de la sécurité sociale. Elle apporterait ainsi 100 millions d'euros de recettes supplémentaires, sans imposer un seul euro de cotisation en plus aux ménages modestes. Les comptes de la sécurité sociale en ont assurément besoin.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement a pour objet d'instaurer une CSG progressive sur les revenus d'activité.

Une telle réforme revêt une ampleur considérable et s'avérerait politiquement explosive, pour ne rapporter finalement que 100 millions d'euros, une somme limitée, au regard de la réaction politique attendue.

La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 648.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 358 rectifié, présenté par M. Dhersin, Mmes O. Richard, Muller-Bronn et Demas, M. S. Demilly, Mme Saint-Pé, MM. Bleunven et Canévet, Mmes Perrot, Sollogoub et Patru, MM. Verzelen, Longeot et Delcros et Mme Billon, est ainsi libellé :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au 2° du II de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale, les mots : « les pensions de retraite, et » sont supprimés.

La parole est à M. Franck Dhersin.

M. Franck Dhersin. Je vous présente cet amendement après mûre réflexion ; j'ai conscience d'aborder un sujet politiquement sensible, mais il me semble essentiel d'évoquer la question de la juste répartition de la charge fiscale.

Qui, dans cet hémicycle, peut m'expliquer la différence entre un retraité au Smic et un actif au Smic ? Il n'y en a aucune : tous deux font face à des difficultés permanentes pour boucler leurs fins de mois. Or l'actif voit son salaire amputé de 9,2 % de CSG et de CRDS, soit de 165 euros par mois, ce qui est gigantesque, quand le retraité bénéficie, lui, d'un taux de CSG à 0 % pour une pension au niveau du Smic.

L'inégalité va encore plus loin : les retraités les plus aisés, dont la pension excède 2 500 à 3 000 euros par personne, bénéficient d'un taux de CSG inférieur à celui des actifs, fixé à 8,3 % au lieu de 9,2 %. Cet avantage fiscal injuste, ne répondant, selon la Cour des comptes, à aucune logique de politique publique, rapporte 1 000 euros par an à un retraité percevant une pension de 2,5 fois le Smic, comparativement à ce que paie un actif.

Je ne vois aucune justification à ce que les retraités, notamment les plus aisés d'entre eux, bénéficient d'une règle dérogatoire au droit commun, alors que notre système social souffre d'un déficit que nous devons absolument résorber.

Cet amendement vise donc à aligner le taux de CSG des retraités les plus riches sur celui des actifs, qui sont, eux, tous logés à la même enseigne. Il s'agit d'un amendement de justice fiscale qui permet de rapporter 1,3 milliard d'euros et ainsi de combler une partie du déficit des branches vieillesse et maladie.

Madame la rapporteure générale, je suis curieux de savoir pour quelles raisons la commission des affaires sociales a émis un avis défavorable sur un amendement tendant à offrir à la fois davantage de justice fiscale et plus de recettes pour réduire notre déficit…

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il est vrai que la commission a émis un avis défavorable sur votre amendement, mon cher collègue, et ce pour une raison précise : l'article 23 du PLFSS, qui sera examiné un peu plus tard, concerne également les retraités et leur demande déjà un effort, avec une moindre revalorisation et un report de l'indexation, même si tout le monde sera finalement indexé au 1er janvier.

Nous avons donc considéré que la demande formulée dans cet amendement s'ajoutait aux mesures que nous entendions déjà leur imposer.

J'entends bien cet esprit de justice entre actifs et retraités, mais si nous commencions à examiner cela avec précision, en nous penchant, par exemple, sur le montant moyen des pensions et des salaires, le débat serait infini.

Ces taux ont été instaurés à des moments différents, certains d'entre eux ont été revalorisés, d'autres non, certains d'entre eux ont été réindexés, d'autres non. Il est vrai qu'actifs et retraités sont traités différemment, mais nous pouvons l'accepter dès lors que l'écart n'est pas trop important. Or, en l'occurrence, il se situe entre 8,3 % et 9,2 %.

Mon cher collègue, vous posez une question et je vous réponds qu'il s'agit assurément d'une piste à explorer.

M. Franck Dhersin. C'est déjà ça !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Pour autant, en l'état actuel des choses, nous avons préféré émettre un avis défavorable, car les retraités sont déjà concernés par les efforts demandés dans l'ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Je partage les observations de Mme la rapporteure générale. Au travers de votre amendement, vous nous invitez à cesser de considérer l'ensemble des retraités comme un bloc homogène, de même que les salariés ne constituent pas un bloc homogène.

Néanmoins, monsieur le sénateur, une hausse de 1,7 point de la CSG a déjà été appliquée au 1er janvier 2018 à l'ensemble des revenus, y compris aux revenus de remplacement. Cette mesure visait à améliorer le pouvoir d'achat des actifs en baissant, en échange, les cotisations chômage et maladie et en faisant davantage contribuer les personnes inactives au financement de la protection sociale. Le Gouvernement ne souhaite pas faire évoluer ce taux, dans un contexte où des efforts sont déjà demandés aux retraités, en particulier à ceux dont les tranches de revenus sont visées par votre amendement.

Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, j'émettrais un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Dhersin, l'amendement n° 358 rectifié est-il maintenu ?

M. Franck Dhersin. Absolument, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Cet amendement cible symboliquement le cœur de ce qu'est ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Madame la ministre, contrairement à ce que vous affirmez, M. Dhersin ne considère pas les retraités comme un bloc homogène ; c'est tout le contraire !

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. C'est exactement ce que j'ai dit !

M. Bernard Jomier. Je crains plutôt que vous ne travestissiez la réalité : il affirme que les retraités aisés, à situation égale, paient moins que les travailleurs, et que c'est injuste. C'est précisément le sens du budget que vous nous présentez. Vous refusez obstinément, de façon idéologique et totalement fermée, de réclamer la moindre contribution aux personnes les plus aisées.

De plus, face à un déficit abyssal que vous ne réduisez pas, malgré les engagements que vous prenez année après année, vous tapez sur les usagers : vous prenez l'argent sur les consultations, sur les médicaments, sur les personnes qui travaillent et qui sont malades ; il faut bien sûr lutter contre la fraude, mais cela existe.

En revanche, vous entendez épargner les personnes dont les revenus sont les plus élevés, au point de rejeter absolument toutes les propositions, y compris des membres de votre majorité, ou plutôt de la majorité sénatoriale, qui se contentent de constater cette injustice.

Plus vous persisterez dans cette voie de l'injustice, moins vous réglerez les problèmes du pays, plus vous exacerberez les tensions sociales et plus vous démontrerez la médiocrité de votre pilotage de la sécurité sociale. Ce que vous propose M. Dhersin n'a rien d'excessif ni de déraisonnable, mais il s'agit d'un marqueur politique, que nous approuverons. (M. Franck Dhersin applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. En refusant cet amendement, vous privez la sécurité sociale de 1,2 milliard d'euros de recettes supplémentaires.

Vous prétendez que tous les retraités connaîtront une baisse de pouvoir d'achat, à partir de 1 766 euros ; les autres aussi, d'ailleurs, mais on y reviendra. En revanche, vous vous opposez à ce que l'on demande une contribution à ceux d'entre eux qui perçoivent plus de 8 000 euros de retraite, soit deux fois et demie le salaire moyen, comme vous l'avez indiqué.

La lecture du livre de Thomas Piketty révèle pourtant que ces retraités sont les détenteurs des patrimoines les plus importants : si l'on examine non pas les revenus, mais la répartition du patrimoine, les personnes ayant ces niveaux de vie, avec des pensions de 8 000 euros, ont accumulé un patrimoine substantiel et, de ce fait, leur niveau de vie surpasse largement celui d'un salarié touchant 1 766 euros, dont il est permis de douter qu'il puisse se constituer un patrimoine notable au moment de partir à la retraite.

S'opposer à cette mesure traduit ainsi un refus obstiné de faire contribuer à l'effort de solidarité les plus riches, ceux qui ont les revenus les plus élevés, les patrimoines les plus importants, pour, au contraire, taper sur les salariés qui touchent 1 766 euros, qui sont des travailleurs pauvres et dont vous organisez la baisse du pouvoir d'achat.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote.

Mme Annie Le Houerou. Mon collègue Bernard Jomier a également très bien expliqué la situation : à l'heure où la sécurité sociale affiche un déficit tel qu'il met véritablement en péril le système lui-même, nous défendons les principes d'égalité et de fraternité, selon lesquels chacun doit contribuer en fonction de ses moyens et bénéficier en fonction de ses besoins.

C'est pourquoi nous voterons cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 358 rectifié.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 46 :

Nombre de votants 340
Nombre de suffrages exprimés 313
Pour l'adoption 131
Contre 182

Le Sénat n'a pas adopté.

Mme Nathalie Goulet. Ce n'est pas juste !

Mme la présidente. L'amendement n° 359 rectifié, présenté par M. Dhersin, Mmes O. Richard et Demas, M. S. Demilly, Mme Saint-Pé, MM. Bleunven et Canévet, Mmes Sollogoub et Patru, MM. Verzelen, Longeot et Chasseing et Mme Billon, est ainsi libellé :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa du III bis de l'article L. 136-8 du code de la sécurité sociale, le taux : « 6,6 % » est remplacé par le taux : « 8,3 % ».

La parole est à M. Franck Dhersin.

M. Franck Dhersin. Je persiste et signe, mes chers collègues ! (Ah ! sur les travées du groupe UC.)

La logique qui a présidé à la rédaction de cet amendement est en effet la même que celle de l'amendement n° 358 rectifié, examiné précédemment.

Comme le Conseil des prélèvements obligatoires et la Cour des comptes – excusez du peu, madame la ministre –, je suis convaincu que la niche sociale sur la CSG n'est pas équitable.

Qui peut m'expliquer la différence entre un retraité et un actif touchant chacun 1 800 euros ? Un actif gagnant 1 800 euros par mois paie 210 euros de CSG, contre 119 euros pour un retraité percevant le même revenu, soit un écart de 90 euros chaque mois. Comment justifier une telle différence, madame la ministre ? Si l'on ajoute à cela que les 50 % des retraités les plus aisés sont très majoritairement propriétaires de leur résidence principale – le crédit grâce auquel ils ont acquis ce bien étant le plus souvent soldé lors de leur départ à la retraite –, je suis certain que ces retraités aisés comprennent tout à fait qu'ils doivent contribuer au financement de notre système de protection sociale.

J'estime pour ma part que les retraités dont les pensions sont situées entre le quatrième et le septième déciles doivent contribuer à la même hauteur que les actifs au financement de notre système de protection sociale. Je ne vois pas de justification au fait que des gens bénéficiant d'un même niveau de revenu contribuent différemment au financement de la sécurité sociale. Il s'agit du reste d'une entorse à l'exigence de juste répartition fiscale. On ne peut pas faire reposer l'entièreté de l'effort sur des actifs, qui subissent déjà des prélèvements extrêmement lourds – plus lourds que jamais – sur le fruit de leur travail.

Par cet amendement, je propose donc de rehausser le taux de CSG perçu sur les pensions de retraite situées entre le quatrième et le septième déciles, afin de le faire passer de 6,6 % à 8,3 %. Une telle disposition accroîtra l'équité fiscale entre les retraités et les actifs, tout en rapportant aux organismes de sécurité sociale environ 1,5 milliard d'euros de recettes supplémentaires, somme qui participera à la réduction des déficits des branches vieillesse et famille.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Votre démonstration est remarquable, mon cher collègue, et une telle disposition ferait en effet beaucoup de bien aux caisses de la sécurité sociale. (Exclamations sur les travées des groupes SER.)

M. Franck Dhersin. En les abondant de 1,5 milliard d'euros !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Néanmoins, nous devons respecter l'épure budgétaire à laquelle nous avons travaillé pour intégrer l'ensemble des sujets ; nous avons mené de nombreuses négociations, notamment sur l'article 23, avec le Gouvernement. Celles-ci ont abouti à une forme de compromis, au regard duquel votre proposition arrivant en quelque sorte en sus, mon cher collègue, nous ne pouvons pas l'intégrer dans le jeu à ce stade.

M. Christian Redon-Sarrazy. Bref, tout est décidé d'avance !

Mme Raymonde Poncet Monge. Il reste 16 milliards d'euros de déficit !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Comme pour l'amendement n° 358 rectifié, l'avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Monsieur le sénateur, nous avons déjà fait le choix, dans ce PLFSS, de moduler la revalorisation des pensions en fonction du niveau de vie des retraités.

Mme Annie Le Houerou. Ce n'est pas suffisant !

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Cet équilibre a été difficile à trouver et nous ne souhaitons pas, à ce stade, demander d'effort supplémentaire aux retraités.

Mme Émilienne Poumirol. On se demande ce que l'on fait ici !

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, à défaut de quoi l'avis du Gouvernement serait défavorable.

Toutefois, comme Mme la rapporteure générale et comme un certain nombre de chercheurs, j'estime qu'il nous faudra réinterroger le financement de notre protection sociale ; simplement, cela ne peut se faire au détour d'un amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Franck Dhersin, pour explication de vote.

M. Franck Dhersin. Poursuivons donc cette discussion, madame la ministre, puisque vous ouvrez le débat. Je regrette donc que vous me demandiez de retirer mon amendement et je ne le ferai pas.

Mme la présidente. Je précise d'ores et déjà, mes chers collègues, que cet amendement sera mis aux voix par scrutin public.

La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.

Mme Céline Brulin. Les arguments de l'auteur de cet amendement sont d'autant plus convaincants que nous cherchons tous à résorber le déficit annoncé de la sécurité sociale.

J'indique néanmoins que, pour ma part, je vois une différence entre les retraités et les salariés : ces derniers cotisent, notamment pour financer les pensions des retraités.

Mme Pascale Gruny. Qui ont financé celles des retraités d'avant !

Mme Céline Brulin. Notre système de protection sociale a été construit ainsi.

Si je ne vois aucun inconvénient à ce que l'on cherche des solutions appropriées à l'époque que nous vivons, prenons garde toutefois que celles-ci mettent à mal un système de solidarité qui est déjà attaqué de toutes parts et dont les fondements mêmes sont de moins au moins opérants, pour ne pas dire de plus en plus sabotés.

En outre, contrairement à ce que certains essaient de nous faire croire, ce débat a le mérite de montrer que les accords qui ont été passés, sans doute dans les couloirs, ne rendront pas du tout les choses indolores pour nos retraités. Comme vous l'avez indiqué clairement, madame la rapporteure générale – je vous rejoins, hélas ! sur ce point –, ce PLFSS emportera une perte de pouvoir d'achat pour de très nombreux retraités de notre pays.

Enfin, vous avez évoqué des négociations qu'il convenait de ne pas remettre en cause, madame la rapporteure générale. Je ne sais pas avec qui vous négociez, très certainement avec le Gouvernement, mais en tout cas pas avec les retraités, car leurs organisations syndicales dénoncent unanimement la façon dont ils sont malmenés. (M. Mickaël Vallet applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je ne comprends pas votre raisonnement, madame la rapporteure générale. Vos « plus » et vos « moins » ne font pas un équilibre, puisque, si j'ai bonne mémoire, ils conduiront tout de même à un déficit de la sécurité sociale de 16 milliards d'euros en 2025. Vos « plus » sont donc tellement insuffisants au regard des « moins » qu'ils ne servent pour ainsi dire à rien.

Quant à vous, madame la ministre, vous arguez que les retraités sont déjà mis à contribution. Or un smicard est aujourd'hui un travailleur pauvre. Écoutez les Restos du Cœur : leurs bénévoles voient arriver des publics qu'ils n'avaient jamais vus auparavant, notamment des travailleurs au Smic, dont les dépenses contraintes ont augmenté plus rapidement que leurs revenus.

Il est par ailleurs faux de dire que les retraités ne seront mis à contribution que si leur pension est supérieure au Smic. Comme nous le démontrerons, la revalorisation des pensions sera calculée sur la moitié de l'inflation, en retenant non pas l'inflation constatée au 1er janvier 2025, qui s'établira entre 2,1 % et 2,3 %, mais l'inflation présumée au 1er juillet 2025, qui sera moindre. Tous les retraités perdront donc du pouvoir d'achat.

Vous ne pouvez donc pas dire que vous pouvez en demander plus à ces retraités sur le fondement de cette revalorisation. Vous pouvez en demander plus à tous ceux qui, tout en haut des déciles, perçoivent des pensions de plus de 8 000 euros, ce qui équivaut presque à une retraite de sénateur. Telle est du reste peut-être la raison pour laquelle vous ne voulez pas que ces pensions soient davantage taxées, mes chers collègues, je peux le comprendre ! (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) De fait, les retraités concernés sont minoritaires.

Mme la présidente. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Raymonde Poncet Monge. Ces retraités, qui bénéficient d'un taux de remplacement de 57 %, percevaient des revenus très élevés lorsqu'ils étaient actifs.

Mme la présidente. Votre temps de parole est écoulé, madame Poncet Monge !

La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.

M. Alain Milon. Je m'efforcerai d'être moins excessif que l'oratrice précédente…

M. André Reichardt. Cela ne sera pas difficile !

M. Alain Milon. En effet, mon cher collègue ! (Sourires.)

La CSG a été instaurée en contrepartie d'une diminution du taux de cotisation maladie pour ceux qui étaient en activité. Le taux actuel de CSG auquel les salariés sont actuellement soumis est certes très élevé, mais il était encore plus élevé lorsque les retraités d'aujourd'hui étaient en activité. Lorsqu'il a été fixé, le taux de CSG applicable aux pensions de retraite visait donc justement à rétablir une forme d'équité entre les salariés actuels et les salariés d'hier, qui sont aujourd'hui retraités.

Je ne suis donc absolument pas en accord avec votre proposition, mon cher collègue. Nous pourrons éventuellement la réexaminer plus tard, lorsque les salariés qui paient un taux de cotisation moins fort seront à la retraite, mais aujourd'hui, je m'y refuse. (Très bien ! sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.

Mme Anne Souyris. Pourquoi refusez-vous que les retraités paient pour les actifs, monsieur Milon ? À sa création, la CSG a été mise en place de manière solidaire, à un taux unique, qui contribuait à en simplifier la gestion.

Ce n'est que dans un second temps que des taux différenciés ont été instaurés. Or ces taux différenciés emportent clairement aujourd'hui des inégalités fiscales de droit commun, auxquelles M. Dhersin propose simplement de remédier.

La proposition du Gouvernement sur les retraites et leur revalorisation est, au contraire, une disposition d'exception injuste qui, comme Mme Poncet Monge l'indiquait, défavorisera les plus pauvres par rapport à l'impôt. À l'inverse, cet amendement vise à rétablir une justice fiscale pérenne et à reconstruire notre contrat de solidarité.

Comment refuser de progresser vers un tel équilibre ? Qui, parmi les retraités percevant une pension de 8 000 euros par mois, refuserait de voir son taux de cotisation aligné avec celui des actifs ? Telles sont les questions qui nous sont posées, mes chers collègues.

Pour sa part, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires (GEST) votera cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. En 2017, en ma qualité de rapporteur général de la commission des affaires sociales, j'avais suggéré au Premier ministre d'aligner les taux de CSG des salariés et des retraités, ce qui eût été bien plus simple que le bricolage par lequel les taux ont alors été relevés, comme Alain Milon l'a expliqué.

Je souscris donc pleinement à la proposition de Franck Dhersin : il me paraît légitime d'avoir le même taux. Je le rappelle, à l'origine, la CSG reposait sur le principe d'un taux unique pour tout le monde. On a ensuite instauré un abattement pour les toutes petites retraites ; cela peut le concevoir, mais, ce faisant, on a introduit le ver dans le fruit, alors que cet impôt était simple et égalitaire.

Comme Mme la ministre et Mme la rapporteure générale, j'estime qu'il nous faut revoir le système d'imposition. Je suggère par exemple d'évaluer l'abattement de 10 % pour frais professionnels des retraités, car je doute que ces derniers en supportent réellement. En tout état de cause, il convient de tout remettre à plat afin d'aller vers plus d'égalité et de justice, et le plus tôt sera le mieux.

Mme la présidente. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour explication de vote.

Mme Silvana Silvani. Je rejoins ma collègue Céline Brulin : on ne peut pas comparer les salariés aux retraités, ce n'est pas la même chose ; les retraités ont cotisé et mérité leur retraite.

Nous venons par ailleurs d'avoir l'éclatante confirmation qu'un effort sera également demandé à des retraités qui ont cotisé et qui sont arrivés au bout de leur carrière.

Vous nous indiquez enfin, madame la rapporteure générale, que des négociations ont eu lieu et que des accords ont été trouvés, manifestement en dehors de cet hémicycle. Vous nous confirmez donc que, comme je le redoutais hier lors de la discussion générale, notre discussion n'est qu'une parodie de débat.

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour explication de vote.

M. Laurent Burgoa. Je souhaite revenir sur les propos de notre collègue Poncet Monge.

Je vous le dis calmement mais très sincèrement, ma chère collègue : vos propos, qui s'apparentent à de la démagogie, n'honorent pas le Sénat. (Protestations sur les travées des groupes SER et GEST.)

Il est important de donner des informations exactes. La démocratie est un bien trop précieux et ce type de propos en sape les fondements. Les élus que sont les maires et les parlementaires sont déjà suffisamment vilipendés sans que l'on diffuse de fausses informations, qui plus est en plein Congrès des maires.

Permettez-moi donc de corriger vos propos, ma chère collègue. Un sénateur en retraite perçoit une pension moyenne non pas de 8 000 euros, mais de 2 000 euros.

Mme Raymonde Poncet Monge. Un travailleur au Smic ne gagne pas 2 000 euros !

M. Laurent Burgoa. Ce n'est donc qu'au bout de quatre mandats, ce qui est loin d'être le cas le plus fréquent, qu'un sénateur retraité percevra une pension de 8 000 euros.

Par ces propos, que certains partis populistes pourraient endosser, vous n'honorez pas le Sénat, ma chère collègue. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Féret, pour explication de vote.

Mme Corinne Féret. Comme cela a été rappelé, un retraité a derrière lui une histoire et toute une vie de salarié. On ne peut donc pas le comparer à un actif.

Cet amendement tend toutefois à corriger une injustice en demandant un effort à ceux qui ont beaucoup, ou du moins davantage que la moyenne, quand ce PLFSS fait reposer les efforts sur tous : augmentation du ticket modérateur, augmentation de la part non remboursée des médicaments, journée de travail gratuit au nom de la solidarité, etc.

Par cet amendement, il est proposé que la solidarité passe par le relèvement du taux de CSG pour ceux dont les pensions se situent entre le quatrième et le septième déciles. Il s'agit donc de pensions élevées. Pour autant, le taux qui est proposé – 8,3 % – reste inférieur au taux auquel l'ensemble des salariés sont assujettis, qui s'établit à 9,2 %.

Pour ma part, je considère que l'effort doit être supporté par ceux qui ont le plus de moyens et dont je ne doute pas qu'ils pourront le consentir sans difficulté.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Cet amendement de repli vise à relever le taux de CSG des pensions élevées à 8,3 %. En ce qui me concerne, j'estime que tout me monde doit faire un effort pour redresser le pays. Je voterai donc cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 359 rectifié.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 47 :

Nombre de votants 343
Nombre de suffrages exprimés 318
Pour l'adoption 132
Contre 186

Le Sénat n'a pas adopté.

L'amendement n° 842, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I –. A. – Il est institué une contribution additionnelle sur les bénéfices des sociétés redevables de l'impôt sur les sociétés prévu à l'article 205 du code général des impôts qui réalisent un chiffre d'affaires supérieur à 750 000 000 euros.

B. – La contribution additionnelle est due lorsque le résultat imposable de la société pour l'exercice considéré au titre de l'impôt sur les sociétés précité est supérieur ou égal à 1,25 fois la moyenne de son résultat imposable des exercices 2017, 2018 et 2019.

C. – La contribution additionnelle est assise sur le résultat imposable supplémentaire réalisé par rapport à 1,25 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités. La contribution additionnelle est calculée en appliquant à la fraction de chaque part de résultat imposable supérieur ou égale à 1,25 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités le taux de :

1° 20 % pour la fraction supérieure ou égale à 1,25 fois et inférieure à 1,5 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités ;

2° 25 % pour la fraction supérieure ou égale à 1,5 fois et inférieure à 1,75 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités ;

3° 33 % pour la fraction supérieure ou égale à 1,75 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités.

II –. A. – Pour les redevables qui sont placés sous le régime prévu aux articles 223 A ou 223 A bis du même code, la contribution additionnelle est due par la société mère. Elle est assise sur le résultat d'ensemble et la plus-value nette d'ensemble définis aux articles 223 B, 223 B bis et 223 D dudit code, déterminés avant imputation des réductions et crédits d'impôt et des créances fiscales de toute nature.

B. – Le chiffre d'affaires mentionné au I du présent article s'entend du chiffre d'affaires réalisé par le redevable au cours de l'exercice ou de la période d'imposition, ramené à douze mois le cas échéant et, pour la société mère d'un groupe mentionné aux articles 223 A ou 223 A bis du même code, de la somme des chiffres d'affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe.

C. – Les réductions et crédits d'impôt et les créances fiscales de toute nature ne sont pas imputables sur la contribution additionnelle.

D. – Sont exonérées de la contribution prévue au présent I, les sociétés dont la progression du résultat imposable par rapport à la moyenne des exercices 2017, 2018 et 2019 résulte d'opérations de cession ou d'acquisition d'actifs, pour la fraction du résultat imposable de l'exercice concerné.

III. – Les produits de la contribution exceptionnelle mentionnée au I du présent article sont reversés à l'institution mentionnée à l'article L. 222-1 du code de la sécurité sociale.

IV. – Les dispositions du présent article entrent en vigueur à compter de la publication de la présente loi et sont applicables jusqu'au 31 décembre 2026.

V. – Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d'évaluation provisoire de l'application du présent article avant le 31 décembre 2025 et un rapport d'évaluation définitif au plus tard le 31 juillet 2027.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Au cours des trois dernières années, l'inflation a été démultipliée par ce que les économistes nomment une boucle prix-profit, qui a fait exploser les taux de marge des entreprises de certains secteurs, notamment de l'agroalimentaire et des transports maritimes.

Le Fonds monétaire international (FMI) lui-même a conclu que l'inflation était due pour 45 % à l'augmentation des profits depuis le début de l'année 2022. La plupart des études convergent désormais autour de ce constat.

Les chercheurs Axelle Arquié et Malte Thie du Centre d'études prospectives et d'informations internationales (Cepii) relèvent que les taux de marge des industries agroalimentaires sont passés de 28 % à 48 % entre 2021 et 2023. De fait, sur certains produits, les marges s'établissent entre 30 % et 60 %.

Cette boucle prix-profit dans le secteur agroalimentaire et les surmarges induites ont des répercussions très concrètes sur les personnes les plus précaires, qui, compte tenu de la part de l'alimentation dans les budgets des ménages modestes, subissent de plein fouet une hausse substantielle et injustifiée des prix depuis deux ans.

Selon le Secours populaire, en 2024, un Français sur trois ne sera pas parvenu à faire trois repas par jour. Selon l'Insee, la part des personnes en situation de privation matérielle et sociale ne cesse d'augmenter : de 12 % de la population, elle est passée à 13,1 % en 2023, l'augmentation des taux de marge étant le principal vecteur de la paupérisation de la population.

Par cet amendement, il vous est en conséquence proposé de créer une contribution sur les bénéfices de ces distributeurs afin de financer la sécurité sociale.

Les Restos du Cœur voient affluer un public qui ne se remet pas de l'inflation des années 2000-2022. Ce constat fait partie des raisons qui me poussent à défendre une telle proposition.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Chaque année, nous débattons de l'opportunité d'instaurer une telle taxe additionnelle sur les bénéfices des sociétés, ma chère collègue.

Faut-il taxer les bénéfices, qui sont un véritable moteur pour notre économie ? J'estime pour ma part que nos industries, et plus généralement notre économie, doivent être aussi productives et bénéficiaires que possible, car c'est ainsi que nous conserverons de l'activité et de l'emploi dans nos territoires.

En ce qui concerne l'agroalimentaire, j'estime que les entreprises ne font pas toutes leurs choux gras de l'augmentation des prix. Certaines entreprises du secteur agroalimentaire, que je connais, ne sont pas aussi florissantes que vous le dites. Une analyse plus fine conduirait à mon sens à nuancer vos propos en fonction des territoires et des entreprises elles-mêmes. Un certain nombre de nos collègues spécialistes des questions agricoles et agroalimentaires pourraient sans doute nous éclairer.

En tout état de cause, dans un contexte d'économie en berne, il ne paraît pas judicieux d'ajouter une surtaxe à l'impôt sur les sociétés, qui taxe déjà les bénéfices.

La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Ce PLFSS instaure une taxe exceptionnelle et temporaire pour les entreprises dont le chiffre d'affaires excède 1 milliard d'euros. Le Gouvernement estime en effet que tout le monde doit participer à l'effort de redressement des comptes publics, d'autant que, lors de la crise covid et lors de la crise énergétique qu'a emportée la guerre en Ukraine, ces entreprises ont pu bénéficier des différentes protections mises en œuvre par l'État.

Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. J'entends vos contre-arguments relatifs aux entreprises du secteur agroalimentaire qui sont en difficulté, madame la rapporteure générale, mais je vous invite à lire le dispositif de l'amendement, qui ne vise que les entreprises qui, durant les trois années durant lesquelles nous avons connu de l'inflation, et, partant, des surmarges et un phénomène de boucle prix-profit identifiés par le FMI, ont vu leurs bénéfices augmenter de plus de 25 %. Les entreprises en difficulté ne sont donc pas visées. Certaines entreprises ont en effet profité de la situation pour démultiplier, et parfois même doubler leur taux de marge.

Lorsque, par le passé, nous avons connu un phénomène de boucle prix-salaire, et que l'échelle mobile des salaires était appliquée, alors on vous entendait, mes chers collègues ! Vous considériez en effet que ça n'allait pas du tout, car les salaires étaient seulement indexés sur l'inflation. En revanche, en période de boucle prix-profit, on ne vous entend plus, tant il est vrai qu'il n'existe pas d'échelle mobile pour remédier aux difficultés qu'emporte ce phénomène !

Encore une fois, les entreprises en difficulté ne sont pas concernées. Seules sont visées celles dont le bénéfice a augmenté de 25 % ou plus en trois ans, c'est-à-dire les « pauvres » entreprises dont la marge est passée de 30 % à 50 %. En tout état de cause, je ne peux pas vous laisser dire que les entreprises qui sont en difficulté seront mises à mal. Tel n'est pas du tout l'objet de cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Chatillon, pour explication de vote.

M. Alain Chatillon. Je démens vos propos, madame Poncet Monge. J'ai été chef d'entreprise dans l'agroalimentaire et je ne vois pas dans quelle entreprise vous avez vu cela ; vous dites des bêtises !

Le véritable problème de nos entreprises et de notre pays tient à la forte baisse de l'âge de départ en retraite et à l'effondrement du temps de travail.

Nous subissons aujourd'hui les conséquences de cinq années de mauvaise gestion, au cours desquelles les problèmes de fond n'ont en réalité pas été pris en compte.

En outre, alors que dans d'autres pays européens, notamment l'Allemagne, l'âge de la retraite est fixé à 67 ans, nous travaillons cinq ans de moins en France. Quant au temps de travail, il faudrait l'augmenter de trois à quatre heures pour l'ensemble des salariés, en prévoyant bien évidemment de ne pas imposer ces heures supplémentaires. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

M. Fabien Gay. Nous soutiendrons l'amendement de notre collègue écologiste, car il vise non pas les petites et moyennes entreprises en difficulté – il ne s'agit pas du tout de cela ! –, mais les superprofits de la grande distribution.

Dites-nous donc qui va mal dans la grande distribution ! Auchan, c'est-à-dire la famille Mulliez ? Carrefour ? Lidl ? Aldi ? Leclerc ?

M. Fabien Gay. Qui va mal, parmi ceux-là ? Ah ! Peut-être pas les familles qui détiennent le capital, mais les salariés, oui ! Depuis la crise covid, ils n'ont jamais lâché, ils n'ont pas vu l'ombre d'une augmentation de salaire et ils sont en train de payer la crise en subissant une vague de licenciements, comme c'est le cas à Auchan.

En revanche, les entreprises de la grande distribution ont réalisé des profits, et même des superprofits, comme le dit l'auteur de cet amendement. Et elles ont touché dans le même temps beaucoup d'argent public – c'est le cas pour Auchan –, dont il faudrait savoir à quoi il a servi. En tout cas, il n'a pas servi à maintenir l'emploi, puisque l'on vient d'annoncer une vague de licenciements.

Pour les salariés de la grande distribution, c'est donc la triple peine : ils n'ont pas d'augmentation de salaire, ils paient de l'impôt et celui-ci sert à les licencier.

En réalité, vous ne voulez pas toucher aux superprofits, fût-ce de manière infime. Mais nous ne confondons pas tout. Nous le savons bien, 68 000 entreprises sont défaillantes, notamment des TPE-PME (très petites, petites et moyennes entreprises) ; c'est une vraie question et nous la traiterons. Mais, pour l'instant, ce n'est pas d'elles qu'il s'agit ; il s'agit des cinq ou six entreprises qui, depuis la crise, ont beaucoup profité. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE–K, SER et GEST.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. À ceux d'entre vous qui auraient des doutes, je rappelle que, dans le cadre de la loi de finances, le Gouvernement a fait une proposition qui vise à instaurer une contribution exceptionnelle temporaire sur les bénéfices des très grandes entreprises.

Le dispositif serait ciblé sur les très grandes entreprises, à savoir celles dont le chiffre d'affaires réalisé en France est supérieur ou égal à 1 milliard d'euros et qui sont redevables de l'impôt sur les sociétés. Son champ s'étendrait donc bien au-delà du secteur de la grande distribution.

Je vous invite donc à voter cette disposition lors de l'examen du projet de loi de finances. La contribution est conçue pour être temporaire et exceptionnelle, afin de participer au redressement des finances publiques. Le dispositif est plus large que celui que vous proposez dans cet amendement, ainsi que dans le suivant.

Mme la présidente. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.

Mme Céline Brulin. Madame la ministre, voilà deux fois que vous nous expliquez le dispositif de cette taxation, en précisant bien chaque fois qu'elle ne sera que temporaire.

De plus, sauf erreur de ma part, la mesure que vous évoquez figurera dans le projet de loi de finances, qui porte sur le budget de l'État. Et il est tout à fait normal, cela nous convient parfaitement, que l'on mette ces entreprises à contribution pour renforcer le budget de l'État.

Toutefois, pour l'heure nous examinons le budget de la sécurité sociale. Est-il inconsidéré que les entreprises que nos collègues ont citées…

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Vous voulez donc les taxer deux fois ?

Mme Céline Brulin. Oui, je pense qu'elles peuvent être taxées deux fois, sachant que les Français auront à subir le déremboursement de leurs consultations médicales et de leurs médicaments, la non-revalorisation de leur pension de retraite, l'augmentation du tarif de leur complémentaire santé, voire des heures supplémentaires travaillées pour rien, et je pourrais continuer longuement cette addition !

Il ne nous paraît donc pas incongru que des entreprises qui réalisent des superprofits contribuent à renforcer le budget de la sécurité sociale, qui est notre système de protection sociale et de solidarité nationale.

On nous dit sans cesse que la pyramide des âges fait qu'il devient de plus en plus compliqué d'assurer la retraite de chacun. Ce n'est pas complètement faux, donc trouvons donc de nouvelles ressources pour la protection sociale ; et cet amendement en propose une.

Ce n'est pas sans une certaine inconséquence que l'on caricature ainsi le débat. Nous ne sommes pas tous d'accord sur la manière de trouver de nouvelles ressources et il est légitime que nous en débattions, de manière démocratique. Permettez-le donc ! Vous ne pouvez pas toujours résoudre les problèmes – et celui auquel nous sommes confrontés est bien réel – en brandissant comme seule et unique solution celle qui nous conduit à toujours plus de déficits. Nous devons trouver de nouvelles ressources : débattons-en sereinement !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 842.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 1101, présenté par Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le chapitre 7 du titre III du livre I du code de la sécurité sociale est complété par une section 15 ainsi rédigée :

« Section …

« Contribution sociale exceptionnelle sur les bénéfices des sociétés pétrolières

« Art. L. 137-42. – I. – 1° Est instituée une contribution additionnelle sur les bénéfices générés par les activités domestiques d'exploration et d'exploitation de gisements d'hydrocarbures et de raffinage des sociétés productrices de pétrole redevables de l'impôt sur les sociétés prévu à l'article 205 du code général des impôts qui réalisent un chiffre d'affaires supérieur à 750 000 000 euros.

« 2° La contribution additionnelle est due lorsque le résultat imposable de la société pour l'exercice considéré au titre de l'impôt sur les sociétés précité est supérieur ou égal à 1,25 fois la moyenne de son résultat imposable des exercices 2017, 2018 et 2019.

« 3° La contribution additionnelle est assise sur le résultat imposable supplémentaire réalisé par rapport à 1,25 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités. La contribution additionnelle est calculée en appliquant à la fraction de chaque part de résultat imposable supérieur ou égale à 1,25 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités le taux de :

« a) 20 % pour la fraction supérieure ou égale à 1,25 fois et inférieure à 1,5 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités ;

« b) 25 % pour la fraction supérieure ou égale à 1,5 fois et inférieure à 1,75 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités ;

« c) 33 % pour la fraction supérieure ou égale à 1,75 fois le résultat imposable moyen des trois exercices précités.

« II. – 1° Pour les redevables qui sont placés sous le régime prévu aux articles 223 A ou 223 A bis du code général des impôts, la contribution additionnelle est due par la société mère. Elle est assise sur le résultat d'ensemble et la plus-value nette d'ensemble définis aux articles 223 B, 223 B bis et 223 D du même code, déterminés avant imputation des réductions et crédits d'impôt et des créances fiscales de toute nature.

« 2° Le chiffre d'affaires mentionné au I du présent article s'entend du chiffre d'affaires réalisé par le redevable au cours de l'exercice ou de la période d'imposition, ramené à douze mois le cas échéant et, pour la société mère d'un groupe mentionné aux articles 223 A ou 223 A bis dudit code, de la somme des chiffres d'affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe.

« 3° Les réductions et crédits d'impôt et les créances fiscales de toute nature ne sont pas imputables sur la contribution additionnelle.

« 4° Sont exonérées de la contribution prévue au présent I, les sociétés dont la progression du résultat imposable par rapport à la moyenne des exercices 2017, 2018 et 2019 résulte d'opérations de cession ou d'acquisition d'actifs, pour la fraction du résultat imposable de l'exercice concernée.

« 5° La contribution additionnelle est reversée sans rang de priorité aux branches mentionnées à l'article L. 200-2 du code de la sécurité sociale ».

II. – Les dispositions du présent article entrent en vigueur à compter de la publication de la présente loi et sont applicables jusqu'au 31 décembre 2025.

III. – Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d'évaluation provisoire de l'application du I du présent article avant le 31 juillet 2025 et un rapport d'évaluation définitif au plus tard le 31 juillet 2026.

La parole est à Mme Anne Souyris.

Mme Anne Souyris. Vous le savez, depuis le début de la guerre en Ukraine, les profits des entreprises pétrolières ont explosé. TotalEnergies a ainsi enregistré un profit de 19,8 milliards d'euros en 2023.

En plus de profiter des crises, les entreprises pétrolières sont aussi des faiseuses de crises. En effet, qu'il s'agisse de la crise climatique, de la crise environnementale ou des crises sanitaires, il y a toujours un coût. Ainsi, dans son rapport de juillet 2015, la commission d'enquête sur le coût économique et financier de la pollution de l'air avait établi que celui-ci s'élevait au moins à 3 milliards d'euros par an. Au travers de ces coûts, les entreprises pétrolières sont la cause d'une crise permanente. Il est donc juste qu'elles contribuent financièrement à la prise en charge sanitaire des crises qu'elles provoquent.

À l'heure où la Ville de Paris s'engage résolument dans la transformation de la capitale, dans le cadre de son nouveau plan Paris santé environnement et de son nouveau plan Climat, je regrette que le Gouvernement ait abandonné les déterminants environnementaux de la santé, dont le changement climatique et la santé planétaire. C'est la raison pour laquelle nous présentons cet amendement. Rappelons, en effet, que chaque année le climat est responsable de 223 000 morts dans les aires urbaines européennes, selon la revue The Lancet Planetary Health.

Cet amendement vise donc à mettre en place une contribution exceptionnelle sur les superprofits réalisés par les entreprises pétrolières, afin de financer notre sécurité sociale. En résumé, nous sommes pour l'instauration d'un principe « empoisonneur-payeur », afin que la sécurité sociale soit aussi financée par ceux qui nuisent à notre santé.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Permettez-moi de revenir sur mon intervention précédente, dans laquelle s'était glissée une erreur. En effet, votre amendement, madame Poncet Monge, visait à taxer les superprofits des entreprises agroalimentaires, ce qui m'a aussitôt rappelé des situations difficiles dans certains endroits du territoire.

Quant au débat, madame Brulin, nous le laissons se tenir. En réalité, il revient chaque année à peu près dans les mêmes termes, car ce sont des positions politiques qui s'opposent. Certains voudraient taxer plus pour financer la sécurité sociale et tenter de résorber le déficit. Je comprends cela, mais nous souhaitons proposer autre chose. Toutefois, nous laissons toute sa place au débat, puisque nous vous écoutons et que nous respectons vos propositions. Ensuite, il nous faut trouver un compromis et faire en sorte qu'une majorité se dégage.

Dans l'amendement qui vise à taxer les sociétés pétrolières, faut-il comprendre que les marges indiquées sont faites en France ? En effet, chacun sait que les entreprises pétrolières qui ont pignon sur rue, dans notre pays, sont plutôt des filiales que des maisons mères, et s'arrangent ainsi pour ne pas payer tous les impôts qui pourraient leur être appliqués. En réalité, dans une logique d'optimisation, les grands groupes choisissent de se positionner dans tel ou tel pays et c'est à cela qu'il faut réfléchir. À force d'ajouter toujours plus de taxes, on risque de créer un vrai repoussoir pour les entreprises qui souhaiteraient s'installer en France.

Est-il judicieux de taxer les bénéfices des entreprises ? Là encore, la question se pose car, pour ma part, je souhaite que les entreprises réussissent en France, de manière à créer de l'emploi. J'émets donc un avis défavorable sur cet amendement et je le ferai de nouveau sur les mesures de même nature, car elles ne correspondent pas à la position que soutient la majorité sénatoriale.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1101.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 232 rectifié ter, présenté par Mme Lubin, M. M. Weber, Mme S. Robert, MM. Pla et Bourgi, Mme Artigalas, MM. Tissot, Redon-Sarrazy et Fagnen, Mme Bonnefoy, MM. Kerrouche et Ziane, Mmes Monier, Carlotti et Conconne, M. Montaugé, Mme Linkenheld et MM. Cardon, Stanzione et P. Joly, est ainsi libellé :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa de l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Ces cotisations sont pour partie à la charge de l'employeur et pour partie à la charge du salarié. Leur taux est fixé comme indiqué dans le tableau suivant :

Cotisation plafonnée

Cotisation plafonnée

Cotisation déplafonnée

Cotisation déplafonnée

Cotisation déplafonnée

Cotisation déplafonnée

Sur la part de la rémunération dans la limite du plafond prévu au premier alinéa du présent article

Sur la part de la rémunération dans la limite du plafond prévu au premier alinéa du présent article

Sur la totalité de la rémunération

Sur la totalité de la rémunération

Sur la part de la rémunération strictement supérieure à quatre fois le plafond prévu au premier alinéa du présent article

Sur la part de la rémunération strictement supérieure à quatre fois le plafond prévu au premier alinéa du présent article

Employeur

Salarié

Employeur

Salarié

Employeur

Salarié

8,55 %

6,90 %

2,02 %

0,40 %

1,78 %

1,60 %

 »

La parole est à Mme Monique Lubin.

Mme Monique Lubin. Cet amendement a pour objet de créer, au profit de la branche vieillesse, une surcotisation sociale sur les revenus supérieurs à quatre fois le plafond annuel de la sécurité sociale, soit à 8 700 euros net par mois environ.

Vous me répondrez sans doute, mes chers collègues, qu'il s'agit encore d'une taxe et que mon amendement est de même nature que les précédents. Au bout d'un moment, vous finirez par nous brocarder, comme on l'a vu faire à l'Assemblée nationale, en disant que du côté gauche de l'hémicycle on ne sait que proposer des taxes et des impôts supplémentaires, et faire l'addition finale.

Par ailleurs, vous avez dit comprendre parfaitement, madame la rapporteure générale, que nous cherchions à proposer de nouvelles recettes pour la sécurité sociale, mais que nos propositions ne correspondaient pas aux vôtres, ce que j'entends. Toutefois, les recettes – dans tous les sens du terme – que nous proposons ne vous conviennent jamais. Dès lors qu'il s'agit de demander un effort supplémentaire à ceux qui pourraient vraiment le fournir, cela ne fonctionne jamais. En revanche, toutes les recettes qui consistent, comme l'ont dit plusieurs de mes collègues, à solliciter toujours plus les retraités, les salariés ou les malades, fonctionnent, pour ainsi dire, plein pot. Il faudrait quand même que, de temps en temps, vous arriviez à mixer les solutions.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Pour ce qui est de mixer les solutions, je n'ai pas fait beaucoup d'avancées, j'en conviens.

Toutefois, l'équilibre de la branche vieillesse nous inquiète tout comme vous, madame Lubin, car cette branche, déjà déficitaire, le sera encore un peu plus au cours des prochaines années.

Pour faire face au vieillissement de la population, nous avons proposé, au Sénat, une contribution de solidarité par le travail, solution dont je sais qu'elle ne convient pas aux sénateurs siégeant à la gauche de l'hémicycle. Compte tenu du « mur du vieillissement », de la montée en charge des maladies chroniques, de la nécessité de privilégier le maintien à domicile et de prévoir l'accompagnement des personnes âgées dans les Ehpad, dont nous savons les difficultés, il s'agit d'inviter chacun à contribuer un peu pour renforcer le budget de la branche autonomie, en fournissant sept heures de travail supplémentaires.

Le problème se pose aussi pour la branche vieillesse, comme vous l'avez très bien dit, chère collègue. Cependant, l'avis de la commission est défavorable sur votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Madame la sénatrice, une telle disposition reviendrait à alourdir pour de nombreux actifs le taux de prélèvement dont ils s'acquittent déjà, pour un total de 1,5 milliard d'euros. Nous examinerons au cours des débats un article portant sur la question des allègements généraux, qui prévoit qu'une partie des économies obtenues reviendra à la branche vieillesse et à la branche maladie. Je vous suggère de réintroduire le sujet au moment de l'examen de cet article.

Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.

M. Olivier Henno. Nous sommes au cœur d'un débat très intéressant et je salue le travail de la rapporteure générale.

Au groupe Union Centriste, nous sommes attachés au principe de stabilité fiscale et nous considérons que le tissu économique français n'est pas assez solide pour subir les chocs, les uns après les autres. Quelque 66 000 entreprises sont en faillite dans notre pays et plusieurs questions se posent, qu'il s'agisse du coût du travail ou du coût de l'énergie, auxquelles nous devons être attentifs.

Nous sommes d'accord aussi – et c'est un point commun avec nos collègues de la gauche de l'hémicycle – pour dire que la sécurité sociale est en danger si l'on maintient le déficit à une telle hauteur.

Toutefois, les amendements de nos collègues pourraient finir par nous retourner le cerveau, en quelque sorte (M. Bernard Jomier ironise.), et il faut remettre l'église au milieu du village. Par conséquent, la différence qui nous oppose à eux tient à ce que, pour nous, la régulation des dépenses est un devoir. Nous dépensons trop dans ce pays, que ce soit pour le budget de l'État ou pour celui de la sécurité sociale. La part du PIB que nous consacrons à nos dépenses de santé est supérieure de deux points à celle de tous les autres pays de l'OCDE. Sommes-nous pour autant mieux soignés ?

Certes, nous ne sommes pas hostiles à l'idée de préserver la justice fiscale, mais notre premier devoir, que ce soit dans le cadre du PLF ou dans celui du PLFSS, reste de contrôler notre niveau de dépense, et de réguler la dépense sociale et la dépense fiscale. Voilà ce que les Français attendent de nous. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Je ne me fais aucun souci pour le cerveau d'Olivier Henno : il n'est pas retourné et il fonctionne très bien, je le sais. (Sourires.)

Toutefois, la part des dépenses de santé dans le PIB est moindre en France qu'en Allemagne et qu'aux États-Unis. Ce que vous venez de dire n'est donc pas tout à fait juste, cher collègue.

Par ailleurs, vous ne faites pas que réguler les dépenses. En effet, Mme la rapporteure générale a ouvert le débat sur la journée de solidarité, que vous n'appelez d'ailleurs plus ainsi, car on a bien compris que les arbitrages au sein du socle commun étaient compliqués. La journée de solidarité impliquait que l'on supprime un jour férié soit d'origine religieuse, soit lié à la fin d'un conflit et à la commémoration des anciens combattants. Vous y avez renoncé et vous avez proposé la solution des sept heures de travail supplémentaires. Mais de quoi s'agit-il ? Les 2,5 milliards d'euros de recettes que vous prévoyez de dégager ne viendront pas d'une réduction de dépenses, mais plutôt d'une réduction des salaires ! Car vous allez faire perdre du salaire aux salariés du pays. Telle est la réalité que recouvre ce surcroît de sept heures de travail. Comment en serait-il autrement ?

J'ai entendu dire que cela représentait cinq minutes supplémentaires par jour, mais cela ne change rien. En réalité, vous ne faites qu'habiller la décision que vous avez prise, parce que vous n'osez pas supprimer un jour férié. Assumez donc ce choix !

Encore une fois, mes chers collègues, cette mesure ne supprimera aucune dépense sociale. Et tout le problème est là, car vous n'arrivez pas à supprimer des dépenses, ce qui n'est d'ailleurs pas étonnant compte tenu de la situation que vous connaissez comme nous sur le bout des doigts, qu'il s'agisse des hôpitaux exsangues ou des Ehpad en difficulté. Mais vous ne voulez pas vous attaquer aux recettes ! Et quand M. Dhersin propose une mesure, somme toute très modérée, qui compense en petite partie une injustice, vous levez les bras au ciel et vous dites : « Il a raison, mais, désolé, nos arbitrages ne vont pas dans ce sens. »

Voilà ce qu'est le débat au Sénat ! On peut bien se moquer de ce qui se passe à l'Assemblée nationale, mais quand on réagit comme vous le faites, le débat est tronqué ! (Mmes Annie Le Houerou et Émilienne Poumirol applaudissent.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.

Mme Monique Lubin. Madame la rapporteure générale, la réponse que vous m'avez faite résume parfaitement ce que nous vivons : vous vous opposez à ce que nous proposons ; à la solidarité de ceux qui ont les revenus les plus élevés, vous opposez un travail supplémentaire gratuit de tous les salariés, y compris ceux qui gagnent le Smic ou qui ont des métiers difficiles. Croyez-vous que les Français accepteront toujours de se plier à ce principe ? Ils ne l'acceptent déjà plus, comme l'a montré le résultat des dernières élections.

Monsieur Henno, nous avons en effet une différence fondamentale : nous estimons qu'il faut travailler sur les recettes et vous sur les dépenses. Mais quelles dépenses faut-il réduire selon vous ? Honnêtement, croyez-vous que les Français seront heureux d'entendre que le niveau de remboursement des médicaments va encore diminuer ? Certes, la baisse sera moins forte que ce qui était prévu, mais on a bien compris la technique qui consiste à annoncer le pire pour que l'on se réjouisse de ne pas l'atteindre.

M. Laurent Duplomb. Ça, c'est ce que fait la gauche !

Mme Monique Lubin. Quoi qu'il en soit, le tarif des mutuelles finira par augmenter et ce sont toujours les mêmes qui auront le plus de difficultés à la fin du mois. En réalité, réduire les dépenses, c'est réduire la qualité de la prise en charge de la santé de nos concitoyens. Est-ce vraiment cela que vous voulez ? (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

Vous hochez la tête, chers collègues, mais c'est pourtant ce qui se passe au quotidien et c'est ainsi que les Français le vivent. Cela vaut non seulement pour la santé, mais également dans d'autres domaines. Ainsi, dans le cadre du PLF, quand vous diminuerez les subventions aux départements, ceux-ci devront réduire leurs aides aux familles. Au bout du bout, c'est toujours le citoyen qui paie…

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. La proposition des auteurs de cet amendement reste très modeste. Dans la mesure où le plafond mensuel de la sécurité sociale s'élève à 3 900 euros, en quoi une surcotisation sur les revenus supérieurs à quatre fois ce plafond pourrait-elle faire peur ?

Nous voulons organiser une solidarité équitable – et non pas égale –, au contraire de ce que vous faites quand vous prévoyez des ponctions égales, qui touchent autant les petits travailleurs que ceux dont les revenus sont importants. Encore une fois, cette surcotisation ne constituerait qu'une recette très modeste. Soit on veut trouver des ressources, soit on ne le veut pas.

Je suis désolée de vous le dire, la dynamique des dépenses n'est pas tellement en cause. Prenons l'exemple des retraites. Ceux qui défendaient un régime par points voulaient que les dépenses de retraite se maintiennent autour de 14 % du PIB. Nous y sommes et ce seuil pivot n'a pas été dépassé. Par conséquent, la dynamique des dépenses n'est pas en cause, sauf à vouloir que les gens ne vieillissent pas. En revanche, face à l'augmentation du volume des dépenses – ce qui n'est pas la même chose que leur dynamique – il faut trouver des recettes. C'est ce que nous vous proposons de faire, mais vous le refusez.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. À cet instant du débat, je voudrais revenir sur deux ou trois principes que j'ai évoqués dans la discussion générale.

Tout d'abord, nous examinons ce PLFSS dans une situation complexe puisque, depuis presque dix ans, il n'y a pas eu de réforme de fond, qui aurait pu nous conduire à porter un regard différent sur la gestion de la santé, de la dépendance et de la prévoyance. Si cela avait été le cas, nous ne nous retrouverions pas aujourd'hui à chercher des recettes ou des coups de rabot à donner. Quelle que soit l'issue des débats que nous avons dans le cadre de l'examen de ce PLFSS, si nous ne lançons pas de réformes de fond, nous aurons le même débat l'année prochaine.

Ensuite, il me semble que, d'une façon générale, nous discutons « par tuyau », puisque nous examinons les amendements les uns après les autres, mais en portant un regard global sur le débat financier pris dans son ensemble, c'est-à-dire sur le PLFSS et sur le PLF, on se rend compte que tout le monde participe à l'effort. Les entreprises le font, ceux qui ont les plus gros chiffres d'affaires le font aussi, tout comme les salariés ou les assurés. Certains considéreront que l'effort devrait peser plus lourd d'un côté que de l'autre, mais c'est un autre débat. Quoi qu'il en soit, l'effort pèse de manière collective sur l'ensemble des acteurs et il est rendu nécessaire par le manque de réformes, qui a créé la situation dans laquelle nous sommes.

Les réformes doivent permettre d'avoir des services plus pertinents pour résoudre les difficultés de l'hôpital, notamment en ce qui concerne l'accès aux soins et la dépendance. Elles doivent aussi permettre de rendre la dépense publique plus efficiente et donc de faire des économies dans ce domaine.

En ce qui concerne la recherche de recettes supplémentaires, notre logique – je l'ai dit – est de faire participer tout le monde.

Sur les sept heures de travail supplémentaires, monsieur Jomier, vous êtes suffisamment assidu dans la vie politique pour avoir fait une lecture précise du texte de notre amendement. Celui-ci est très clair : l'attribution de ces heures se fera librement, dans le cadre d'une discussion entre les partenaires sociaux, au sein des entités et des branches. C'est une liberté que nous instaurons et il est fondamental pour nous d'offrir cette souplesse. De plus, vous aurez bien lu que la contribution financière concernera les employeurs et non les salariés. Certes, les salariés donneront du temps de travail, mais ils ne subiront aucune perte de revenus. C'est ainsi qu'a été rédigé notre amendement.

En réalité, ce qui nous oppose, c'est que de notre côté nous considérons que c'est la valeur du travail qui doit apporter de la rémunération aux salariés et des recettes à nos services publics, et non la valeur fiscale. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. Madame la rapporteure générale, monsieur le président de la commission, vous avez décidé d'ouvrir dès maintenant le débat sur les fameuses sept heures de travail.

Si je comprends bien ce que vient de nous dire le président de la commission, ce sont les entreprises qui paieront et non les salariés, même s'ils travaillent sept heures de moins ; pardonnez-moi, mais ce n'est pas cohérent.

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Lisez le texte de notre amendement !

Mme Laurence Rossignol. Il est vrai que vous prenez quelques arrangements avec le vocabulaire pour faciliter votre réflexion. En effet, vous parlez de « coût du travail » comme on parle du « coût de l'énergie », alors que cela n'est pas exactement la même chose, et vous ne parlez jamais de « rémunération du travail », terme qui est le plus approprié, pour couvrir le salaire direct et le salaire indirect. C'est ainsi que vous en arrivez à dire tout en même temps que les gens travailleront sept heures pour contribuer à l'effort et que ces sept heures non rémunérées seront pour la solidarité. Il y a donc bien une baisse, non du coût du travail, mais de la rémunération du travail.

Quand vous dites que les salariés doivent participer à l'effort et se serrer les coudes, nous disons qu'ils ne doivent pas tous contribuer de la même façon à l'effort. Ils doivent y contribuer de manière progressive, en fonction de leur rémunération. C'est le principe de l'impôt que nous appliquons. L'impôt étant progressif, la participation doit l'être également.

Si votre amendement est adopté, la rémunération des salariés baissera inéluctablement, car les entreprises ne pourront pas dégager la somme qui leur sera demandée sans prendre sur les salaires. Par conséquent, ce que vous proposez dans ce PLFSS, c'est de baisser les salaires, et il faut que vous l'assumiez.

Mme Annie Le Houerou et M. Bernard Jomier. Voilà !

Mme Laurence Rossignol. Quel que soit le sens dans lequel vous tournerez le problème, cela ne peut fonctionner que comme cela. Sinon, votre affaire ne tourne pas, car d'où pourrait venir l'argent ?

Les gens travailleront sept heures de moins, les entreprises donneront de l'argent à la sécurité sociale, et il n'y aurait aucune répercussion sur les salaires ? Dans ce cas, pourquoi les salariés travailleraient-ils sept heures de moins puisque ce ne sont pas eux qui doivent cotiser ? Ce que vous racontez n'a pas de sens. Assumez donc : vous voulez baisser la rémunération du travail. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Sept heures de plus ! Lisez au moins notre amendement !

Mme la présidente. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour explication de vote.

Mme Silvana Silvani. On ne cesse de dire et de répéter que, compte tenu de la situation, chacun doit contribuer et participer. On évite chaque fois de terminer la phrase en précisant qu'il le fera « à la hauteur de ses possibilités », mais admettons… Et nous pourrions à la limite être d'accord avec un tel constat, mais nous sommes mardi, il est seize heures, nous avons démarré hier l'examen du PLFSS et, depuis hier, vous avez déjà refusé les contributions sur les retraites élevées, sur les retraites chapeaux, sur les superprofits réalisés par la grande distribution, et je pense que la liste risque de s'allonger. Ainsi, « chacun doit contribuer », mais la liste de ceux qui, selon vous, doivent vraiment le faire est loin d'être claire…

De plus, monsieur le président de la commission, si je suis d'accord avec ce que vous avez dit sur le manque de réformes, est-ce vraiment aux citoyens de payer pour cela et pour l'absence de perspectives des gouvernements successifs qui en a été la cause ?

M. Christian Bruyen. C'est à qui, alors ?

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 232 rectifié ter.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 646 est présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Bourgi et Ros, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Ziane et Lurel, Mme Bélim, M. Féraud, Mme Harribey, M. Gillé, Mme Brossel, MM. Fagnen et Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Darras, Michau, Mérillou et Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Roiron, Mme Blatrix Contat, MM. Jeansannetas, Vayssouze-Faure et M. Weber, Mme Monier, MM. P. Joly, Marie, Tissot, Durain et Chaillou, Mme Artigalas, MM. Redon-Sarrazy, Ouizille, Pla et Uzenat, Mme G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L'amendement n° 955 rectifié est présenté par Mmes Brulin, Silvani, Apourceau-Poly et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 241-5 du code de la sécurité sociale est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Il est instauré un malus, fixé par voie réglementaire, sur les cotisations des employeurs dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles pour les entreprises n'ayant pas pris les mesures nécessaires pour éliminer un risque avéré de maladie professionnelle.

« La détermination de l'effort de l'employeur en matière de prévention et de lutte contre les maladies professionnelles se fait sur la base de critères définis par voie réglementaire à partir du bilan social de l'entreprise, défini aux articles L. 2312-28 à L 2312-33 du code du travail. »

La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l'amendement n° 646.

Mme Annie Le Houerou. Cet amendement vise à relever les taux des cotisations dues au titre de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) pour les entreprises présentant une sinistralité anormalement élevée.

Cette nouvelle tarification des risques professionnels permettrait de dégager des fonds pour réparer, évaluer et, surtout, prévenir les risques professionnels. Elle contribuerait ainsi à promouvoir la santé au travail.

La mise en place d'un tel malus figure du reste parmi les propositions du rapport parlementaire « Maladies professionnelles dans l'industrie : mieux connaître, mieux reconnaître, mieux prévenir ».

Même si la branche AT-MP était à l'équilibre, voire excédentaire par le passé, ce ne devrait plus être le cas à l'avenir si l'on parvenait à une meilleure réparation des préjudices subis par les victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles. Avec la rapporteure pour la branche, Marie-Pierre Richer, nous avons ainsi travaillé pour trouver le juste équilibre entre réparation et prévention.

Toutefois, pour, d'une part, garantir le financement à terme de la branche AT-MP et faire en sorte qu'elle ne contribue pas à augmenter le déficit de la sécurité sociale, et, d'autre part, agir sur la prévention et exhorter les entreprises à investir dans l'amélioration des conditions de travail, nous devons mettre en place des mécanismes incitatifs en faveur de la prévention. Tel est l'objet de cet amendement.

Je précise que le dispositif de notre amendement a fait l'objet d'une expérimentation dans le secteur du bâtiment et des travaux publics et qu'il a prouvé toute son efficacité : les efforts de prévention dans ce secteur ont bel et bien payé.

Mme la présidente. La parole est à Mme Céline Brulin, pour présenter l'amendement n° 955 rectifié.

Mme Céline Brulin. Cet amendement, identique au précédent, vise à augmenter le taux de cotisation patronale versée au titre du financement de la branche AT-MP pour les entreprises qui enregistrent un niveau de sinistralité élevé.

Selon nous, le très mauvais classement de la France en ce qui concerne les accidents du travail, notamment les accidents mortels, n'est pas une fatalité. Il est essentiel de faire plus de prévention et de faire en sorte que les entreprises s'engagent dans cette voie ; beaucoup d'entre elles le font d'ores et déjà, mais certaines doivent être responsabilisées si l'on veut qu'elles en fassent davantage.

Notre dispositif permettrait de dégager des moyens pour renforcer le travail de prévention et mieux réparer les préjudices subis par les victimes d'accidents du travail.

Tout comme vous nous proposez de dérembourser les médicaments – pour notre part, nous n'y sommes pas favorables, vous le savez –, au motif qu'il faudrait responsabiliser les patients – sous-entendu : ils consomment peut-être un peu trop de médicaments, alors, en en augmentant le coût, ils seront incités à en consommer moins –, nous vous proposons de responsabiliser les entreprises. Vous nous parlez d'efforts partagés : avec cet amendement, nous faisons précisément en sorte que les efforts soient mieux partagés.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Tout d'abord, je veux rappeler que des amendements similaires avaient été présentés lors de l'examen des deux précédents projets de loi de financement de la sécurité sociale et que, chaque fois, la commission comme le Gouvernement avaient émis un avis défavorable.

Ensuite, je tiens à vous dire, mes chers collègues, qu'il existe déjà un certain nombre de dispositifs destinés à inciter les entreprises à faire des efforts, parce que, je suis d'accord avec vous, il faut absolument évaluer la réalité des efforts de prévention mis en œuvre par chaque entreprise pour anticiper une éventuelle hausse du nombre des accidents du travail ou l'apparition d'un certain mal-être au travail.

En premier lieu, la tarification AT-MP est déjà calculée en fonction du nombre de sinistres survenus dans les entreprises ou dans leur secteur d'activité, et de leur coût moyen : ainsi, en moyenne, plus de 70 % du montant des cotisations dépend de la sinistralité des entreprises.

En second lieu, et même si vous pouvez estimer que c'est insuffisant, les caisses d'assurance retraite et de santé au travail (Carsat) peuvent imposer des majorations de cotisations – une sorte de malus – aux entreprises qui présentent des risques exceptionnels, notamment lorsqu'elles ne respectent pas les règles d'hygiène et de sécurité ou n'observent pas les mesures de prévention édictées par la caisse.

Le malus supplémentaire que vous proposez de créer n'est donc pas nécessaire ; la commission émet donc un avis défavorable sur vos deux amendements identiques.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 646 et 955 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Les deux amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° 686 rectifié est présenté par Mmes Canalès et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Bourgi et Ros, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Ziane et Lurel, Mme Bélim, M. Féraud, Mme Harribey, M. Gillé, Mme Brossel, MM. Fagnen et Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Darras, Michau, Mérillou et Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Roiron, Mme Blatrix Contat, MM. Jeansannetas et Vayssouze-Faure, Mme G. Jourda, M. M. Weber, Mme Monier, MM. P. Joly, Marie, Tissot, Durain et Chaillou, Mme Artigalas, MM. Redon-Sarrazy, Ouizille, Pla, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L'amendement n° 819 est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa de l'article L. 242-7 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Des cotisations supplémentaires sont en particulier imposées aux entreprises donneuses d'ordre lorsqu'une entreprise sous-traitante dépasse un taux de sinistralité fixé par décret. »

La parole est à Mme Marion Canalès, pour présenter l'amendement n° 686 rectifié

Mme Marion Canalès. Avec cet amendement, nous souhaitons aborder la problématique des accidents du travail, en particulier dans le secteur de la sous-traitance.

De nos jours, 38 % des entreprises ont recours à la sous-traitance pour un montant total d'environ 372 milliards d'euros, selon l'Insee. Or l'étude menée par la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) en mars 2023 démontre une surexposition aux accidents du travail des salariés de la sous-traitance, une surexposition qui touche en particulier les salariés intérimaires et qu'un décret paru le 5 juillet dernier vise à traiter en partie en redéfinissant la répartition des coûts des accidents du travail et des maladies professionnelles entre les entreprises de travail temporaire et les entreprises donneuses d'ordre.

Nous considérons qu'il faut s'inspirer de ce décret pour renforcer la culture de la prévention dans les entreprises ayant recours à la sous-traitance.

Tel est l'objectif de cet amendement : créer un levier supplémentaire pour faire baisser le nombre encore trop élevé d'accidents du travail, notamment liés à la sous-traitance. L'enjeu consiste aussi à garantir une égalité réelle, puisque, comme le soulignait rapport sénatorial relatif à la santé des femmes au travail, le phénomène de la sous-traitance joue un rôle majeur dans les difficultés que rencontrent de nombreuses travailleuses.

Dès lors, nous proposons non pas de déresponsabiliser les entreprises de sous-traitance, mais de fournir un cadre plus strict aux entreprises qui sous-traitent, afin de renforcer le principe de prévention et de faire reculer le nombre des accidents du travail dans ce secteur.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l'amendement n° 819.

Mme Raymonde Poncet Monge. Comme vient de le rappeler ma collègue, une étude conduite par la Dares en 2023 montre que les salariés des entreprises sous-traitantes sont surexposés aux risques professionnels, tant physiques qu'organisationnels.

Selon cette étude, en effet, dans les entreprises qui ne travaillent pas pour un donneur d'ordre, le taux d'accidents du travail reconnu par la Caisse nationale de l'assurance maladie est de 2,9 % en moyenne, alors que ce taux s'élève à 5,5 % dans les entreprises dont la part du chiffre d'affaires dépendant d'un donneur d'ordres est comprise entre 10 % et 49 %.

D'après une autre étude de la Dares parue en 2023, l'étendue des risques est d'autant plus importante que près de 43 % des salariés font partie d'une chaîne de sous-traitance en France et que 27 % d'entre eux travaillent dans un établissement preneur d'ordre. D'une certaine façon, les entreprises donneuses d'ordre externalisent les risques d'accidents de travail et de maladies professionnelles.

Ces données démontrent l'importance d'une responsabilisation des entreprises donneuses d'ordre pour changer la donne, tant les entreprises ayant recours à la sous-traitance se désintéressent souvent des accidents de travail ou des maladies professionnelles survenus chez leurs sous-traitants.

Aussi, cet amendement tend à contraindre les entreprises donneuses d'ordre à mieux prévenir les accidents du travail chez leurs sous-traitants. Pour ce faire, nous prévoyons d'augmenter le montant des cotisations qu'elles versent au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, dès lors que leur sous-traitant présente un taux de sinistralité élevé, qui dépasse un seuil fixé par décret.

Nous proposons, plutôt que de taxer les sous-traitants, de taxer l'entreprise donneuse d'ordre. Il s'agit de dissuader les entreprises de recourir à la sous-traitance lorsqu'elles le font dans le seul but d'externaliser le risque d'accidents du travail ou de mieux protéger les salariés des entreprises sous-traitantes.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Vous notez à juste titre, mes chères collègues, que la Dares a produit une étude extrêmement intéressante sur le sujet ; j'ajouterai que d'autres articles tout aussi passionnants sont venus enrichir notre réflexion.

Vous faites également observer avec raison que le recours à la sous-traitance est très courant dans certains secteurs d'activité et qu'une part significative des accidents du travail concerne des salariés d'entreprises extérieures.

C'est du reste pourquoi le code du travail n'est pas muet sur le sujet – sans oublier les très nombreux travaux parlementaires menés autour de cette problématique : il prévoit ainsi que le responsable de l'entreprise utilisatrice doit assurer la coordination générale des mesures de prévention des risques professionnels qu'il prend et de celles que prennent l'ensemble des responsables des entreprises extérieures intervenant dans son établissement. En cas de risques spécifiques liés à la présence de salariés de différentes entreprises sur un même site, les entreprises concernées doivent aussi établir un plan de prévention.

Vous pourriez m'opposer que ces dispositions ne sont pas toujours respectées, certes, mais un certain nombre de protocoles contraignants ont tout de même déjà été mis en place.

Enfin, dans ce cadre, les Carsat peuvent, notamment en cas de risques liés aux interférences induites par la sous-traitance, enjoindre à l'entreprise utilisatrice de prendre des mesures de prévention. En cas d'inobservation des mesures prescrites, les Carsat peuvent imposer à l'entreprise utilisatrice le paiement de cotisations supplémentaires.

Compte tenu du droit en vigueur et de la surveillance propre à ce secteur, la commission est défavorable à ces deux amendements identiques.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 686 rectifié et 819.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L'amendement n° 1319 rectifié, présenté par Mme de Marco, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 382-4 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, après le mot « diffusion », sont insérés les mots « , la représentation » ;

2° Au second alinéa, après les occurrences du mot « la diffusion » sont insérés les mots : « , de la représentation ».

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. En France, les artistes et les auteurs tirent l'essentiel de leurs revenus du droit d'auteur, qui est défini par le code de la propriété intellectuelle.

Une rémunération n'étant pas un salaire à proprement parler, une affiliation des artistes auteurs au régime général a été progressivement mise en place, sur le fondement d'une conversion du montant du droit d'auteur en nombre d'heures au Smic horaire.

Mes chers collègues, comme vous le savez, la rémunération de nos artistes auteurs est extrêmement faible. En 2017, 53 % des artistes graphiques et plastiques ont perçu moins de 8 703 euros de revenus artistiques. C'est pourquoi, en 2020, le rapport de Bruno Racine recommandait d'étendre le périmètre des activités accessoires qui leur permettraient d'atteindre plus facilement le seuil d'affiliation au régime général.

Le code de la propriété intellectuelle prévoit explicitement l'existence d'un droit de représentation, qui justifierait de rémunérer les artistes visuels lors des expositions ou les auteurs lors des salons.

Cet amendement vise donc à favoriser la rémunération du droit de représentation des artistes auteurs et à aligner son régime social sur celui du droit d'auteur sur la base du barème prévu par le ministère de la culture, même si celui-ci n'est toujours pas appliqué.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission n'a pas l'expertise nécessaire pour analyser cet amendement. Aussi demande-t-elle son avis au Gouvernement.

Mme la présidente. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Madame la sénatrice, la représentation consiste en la diffusion et l'exploitation publiques d'une œuvre artistique. Aujourd'hui, les artistes jouissent du droit de percevoir une rémunération en contrepartie de cette représentation.

Dans les faits, la représentation est cependant très peu déclarée, si bien que les artistes qui ont des œuvres diffusées se voient rarement verser la contribution que les diffuseurs leur doivent. Le rendement de l'imposition supplémentaire que vous proposez risque d'être faible, car la difficulté à laquelle nous sommes confrontés actuellement est celle d'un manque d'application du droit et d'un trop faible contrôle de cette contribution.

Le Gouvernement est donc défavorable à votre amendement.

Mme la présidente. Quel est maintenant l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1319 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 1320 rectifié, présenté par Mme de Marco, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 382-10 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 382–… ainsi rédigé :

Article L. 382–… – Un décret en Conseil d'État prévoit les conditions particulières de prise en considération des cotisations versées au régime général d'assurance vieillesse pour les personnes mentionnées à l'article L. 382-1 pour la liquidation des prestations, en raison des graves dysfonctionnements intervenus dans la gestion de l'organisme en charge de la sécurité sociale des auteurs entre le 1er janvier 1977 et le 1er janvier 2019.

La parole est à Mme Monique de Marco.

Mme Monique de Marco. La mauvaise gestion de l'Agessa, l'Association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs, a placé ces derniers dans une situation de grande insécurité juridique au moment de faire valoir leurs droits à la retraite. Ainsi, pendant quarante ans, 190 000 auteurs n'auraient pas cotisé pour leur retraite, l'Agessa ne leur ayant jamais adressé d'appel à cotisations.

Ces graves dysfonctionnements ont fait l'objet de longues descriptions dans les rapports successifs des inspections générales des affaires sociales et des affaires culturelles en 2014 et en 2018, puis dans le rapport de Bruno Racine en 2020. Ils ont toutefois perduré après la fusion, en 2022, de l'Agessa et de la Maison des artistes. C'est par exemple sur ce motif que, le 20 décembre 2023, le tribunal judiciaire de Paris a condamné l'État à indemniser le prix Nobel de littérature, Jean-Marie Gustave Le Clézio.

Mes chers collègues, les réponses du ministère de la culture ne sont pas à la hauteur de la détresse financière des auteurs concernés. En 2017, un dispositif de rachat des trimestres a été mis en place, mais beaucoup le considèrent comme étant hors de portée de la plupart des auteurs aux revenus très modestes.

Certes, une commission d'action sociale de la sécurité sociale des artistes auteurs aide certains de ces artistes, sous conditions de ressources, à racheter leurs trimestres et prend en charge une partie de leurs cotisations, mais son bilan est relativement dérisoire.

C'est pourquoi cet amendement vise à reconnaître la responsabilité de l'État dans ce dossier et à imposer au ministère de la culture de prendre un décret prévoyant des mesures de compensation plus favorables aux auteurs lésés.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avec cet amendement, ma chère collègue, vous proposez qu'un « décret en Conseil d'État prévoi[e] les conditions particulières de prise en considération des cotisations versées au régime général d'assurance vieillesse [par les artistes auteurs] pour la liquidation des prestations, en raison des graves dysfonctionnements intervenus dans la gestion de l'organisme [chargé] de la sécurité sociale des auteurs entre le 1er janvier 1977 et le 1er janvier 2019. »

Pour rappel, l'Agessa n'existe plus depuis son remplacement par la « sécurité sociale des artistes auteurs ». Surtout, il ne me semble pas que le législateur puisse à ce point se dessaisir de ses prérogatives, en renvoyant à un décret en Conseil d'État la fixation des modalités de prise en compte de ces cotisations.

Il faudrait plutôt inscrire dans la loi les principales caractéristiques du mécanisme que vous souhaitez mettre en place, mais, en ce cas, votre amendement serait vraisemblablement déclaré irrecevable au titre de l'article 40 de la Constitution.

Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Madame la sénatrice, vous avez raison de rappeler les défaillances de l'Agessa et d'indiquer que l'État a décidé de transférer le recouvrement de l'ensemble des cotisations sociales des artistes auteurs à l'Urssaf Limousin.

Il convient également de souligner l'importance des efforts consentis par l'État, d'une part, pour aider à la mise en place du mécanisme de rachat de trimestres et, d'autre part, depuis 2022, pour aider financièrement les artistes via un certain nombre d'aides ; je pense notamment à l'aide exceptionnelle pour financer ces régularisations. Dans un décret publié très récemment, j'ajoute que l'État a réévalué le montant de cette aide au rachat de trimestres.

Au regard de l'ensemble de ces mesures, le Gouvernement est défavorable à votre amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1320 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 845, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant l'impact sur les comptes de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales de la mise en place d'une taxe sur les salaires versés aux agents contractuels au sein des services et établissements publics dont le produit est affecté à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales.

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale prévoit une augmentation du taux de cotisations dues par les employeurs publics à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), afin de dégager 2 milliards d'euros de recettes supplémentaires, lesquelles devront compenser le déficit du régime, qui est évalué à 2,5 milliards d'euros en 2024.

Ce déficit structurel élevé résulte essentiellement de la baisse désastreuse du nombre de fonctionnaires au fil des années. Pour garantir la continuité des services publics, cette baisse a été en partie compensée par une hausse importante du nombre de contractuels. Selon la Cour des comptes, le nombre d'agents contractuels a crû plus de 2,5 fois plus vite que celui de l'ensemble des agents publics, de sorte qu'en 2022 les contractuels représentaient 22 % de la totalité des effectifs de la fonction publique.

Si l'inspection générale des affaires sociales (Igas) considère qu'une affiliation des contractuels à la CNRACL poserait des difficultés opérationnelles majeures, elle préconise cependant de diversifier les sources de financement et recommande ainsi de songer à une compensation du manque de cotisations issu du recours à des agents contractuels par l'instauration d'un prélèvement au bénéfice de la CNRACL sur les salaires versés aux agents contractuels.

Ainsi, plutôt que d'envisager une augmentation des cotisations CNRACL chaque année, sans même chercher à traiter les causes du déficit constaté, une hausse qui ne ferait d'ailleurs qu'aggraver ledit déficit en décourageant l'embauche de fonctionnaires au profit de contractuels – ces salariés, rémunérés à moindre coût, représentent déjà une embauche sur cinq dans la fonction publique –, ce qui dégraderait encore davantage le ratio démographique de la caisse, nous proposons, au travers du présent amendement, de suivre les recommandations de l'Igas : nous appelons le Gouvernement à réaliser une étude évaluant l'impact financier d'une taxe sur les salaires des contractuels de la fonction publique, afin d'envisager la mise en œuvre de cette fiscalité au plus vite.

Hier, il me semble que vous n'étiez pas si loin de penser comme nous qu'une telle piste serait à considérer sérieusement.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. S'agissant d'une demande de rapport, je m'en tiendrai à la jurisprudence de la Haute Assemblée : avis défavorable. (Mme Céline Brulin s'exclame.)

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Madame la sénatrice, la recommandation n° 10 du rapport de l'Igas et de l'inspection générale des finances (IGF) dont vous faites mention, et qui a alimenté les discussions sur le redressement des comptes de la CNRACL, répond précisément à votre question sur les agents contractuels.

Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.

Mme Céline Brulin. Madame la rapporteure générale, je reconnais dans votre réponse la constance de la majorité sénatoriale au sujet des demandes de rapports ; je pourrais même dire que, dans une certaine mesure, je comprends cette jurisprudence du Sénat, car les demandes des rapports ne présentent aucun intérêt si le Gouvernement ne les remet finalement pas au Parlement.

Pour autant, nous sommes en train de débattre d'un sujet extrêmement important pour les collectivités locales et les hôpitaux, qui vont voir le taux des cotisations qu'ils versent à la CNRACL augmenter pendant trois ou quatre ans consécutifs, sans que, dans le même temps, on soit réellement proche de résoudre le problème structurel qui pèse sur la caisse.

Comme l'a indiqué notre collègue Raymonde Poncet Monge, il conviendrait d'approfondir le sujet et cessez de nous dire, madame la ministre, que l'Igas a déjà répondu à notre préoccupation : elle propose au contraire que les collectivités et les hôpitaux mettent en œuvre une taxe sur les salaires des contractuels pour abonder la CNRACL.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. À croire que nous n'avons pas lu le même rapport !

Mme Céline Brulin. Pourquoi ne pas creuser cette piste ? Si nous ne le faisons pas, nous risquons de continuer à débattre éternellement de ce sujet, parce que la situation des hôpitaux et des collectivités continuera de se dégrader, et que nous ne serons pas parvenus à résoudre le problème démographique auquel nous sommes confrontés et à rééquilibrer le ratio entre les différents types d'emplois dans les hôpitaux, les services départementaux d'incendie et de secours (Sdis) et les collectivités.

La rédaction d'un rapport sur l'impact d'une taxation des salaires versés à ces contractuels permettrait d'éclairer utilement nos débats pour maintenant et pour l'avenir.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 845.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 905 rectifié ter, présenté par MM. Canévet, Mizzon et Folliot, Mme Sollogoub, MM. Cambier, Fargeot, Delcros, Longeot et S. Demilly, Mme Gacquerre, MM. Courtial et Bleunven, Mme Antoine, M. Duffourg et Mme Havet, est ainsi libellé :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :

1° L'article 231 est ainsi modifié :

a) À la quatrième phrase du premier alinéa du 1, après le mot : « communaux, », sont insérés les mots : « des associations régies par la loi du 1er juillet 1901, des fondations, des fonds de dotation, » ;

b) Au second alinéa du 2 bis, le mot : « , associations » est supprimé ;

2° À l'article 1679 A du code général des impôts, les mots : « les associations régies par la loi du 1er juillet 1901, les fondations reconnues d'utilité publique, » sont supprimés.

II. – Le a du 1° du I s'applique à la taxe sur les salaires due à raison des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2025.

III. – La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. Comme beaucoup d'entre nous l'ont souligné depuis le début de l'examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, de nombreuses structures qui accueillent des établissements sociaux sont en difficulté. Il convient donc de trouver les solutions qui leur permettront d'alléger leurs charges et, donc, de revenir à meilleure fortune.

Parmi les mesures envisageables figure la possibilité de supprimer la taxe sur les salaires pour les structures à but non lucratif. Dès lors que ces structures n'ont pas pour objectif de faire du profit, il est naturel de veiller à ce qu'elles puissent continuer de fonctionner dans les meilleures conditions.

La Cour des comptes a déjà eu l'occasion d'étudier cette question et a appelé le Gouvernement, en 2018, à revoir les conditions d'assujettissement à la taxe sur les salaires. Compte tenu des difficultés auxquelles ces structures sont confrontées, il me semble que c'est le bon moment de mettre en place cette disposition, dont le coût s'élève à 200 millions d'euros, une perte de recettes qui serait très largement compensée par la disposition que je propose au III de mon amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Si l'objectif de notre collègue est parfaitement louable, l'heure est moins à la création de nouvelles niches sociales qu'à la suppression de celles-ci ! (Sourires.)

Par ailleurs, la commission n'a pas eu le temps de vérifier ce chiffrage de 200 millions d'euros.

La commission est par conséquent défavorable à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Cet amendement, s'il était adopté, pourrait coûter jusqu'à 2 milliards d'euros aux finances sociales,…

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. … alors que nous prévoyons déjà un déficit de près de 16 milliards d'euros pour l'année 2025.

Je vous rappelle également que le secteur associatif bénéficie déjà aujourd'hui d'un certain nombre de dispositions favorables : la réduction d'impôt au titre des dons des particuliers, dont le coût s'élève à près de 2 milliards d'euros pour les 5 millions de ménages concernés ; la réduction d'impôt au titre des dons faits par les entreprises à des œuvres ou à des organismes d'intérêt général, qui représente aussi un coût de l'ordre de 2 milliards d'euros.

Pour ces raisons, je vous demande, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, j'y serai défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Canévet, l'amendement n° 905 rectifié ter est-il maintenu ?

M. Michel Canévet. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 905 rectifié ter est retiré.

L'amendement n° 872 rectifié quater, présenté par M. Fichet, Mme Harribey, MM. Gillé et Bourgi, Mmes Bonnefoy et Bélim, MM. Chaillou, Devinaz, Féraud et Fagnen, Mmes Blatrix Contat et Lubin, MM. Lurel et Montaugé, Mme Poumirol, MM. Ros, Pla, Temal, Tissot, Uzenat, M. Weber et Redon-Sarrazy, Mmes Le Houerou, Artigalas et Conway-Mouret, MM. Bouad et Michau, Mmes Carlotti et Monier et MM. Ziane, Stanzione et P. Joly, est ainsi libellé :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – À la quatrième phrase du premier alinéa du 1 de l'article 231 du code général des impôts, après le mot : « communaux, » sont insérés les mots : « des établissements et services sociaux et médico-sociaux privés à but non lucratif mentionnés à l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles ».

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Jean-Luc Fichet.

M. Jean-Luc Fichet. Mon amendement s'inscrit dans la même veine que le précédent ; il s'agit de réparer une injustice. Il vise à généraliser les possibilités d'exonération de la taxe sur les salaires pour les établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS) privés à but non lucratif.

En effet, cette taxe représente une charge significative pour ces établissements, qui emploient un personnel nombreux et spécialisé, indispensable à la prise en charge des usagers.

Actuellement, le Bulletin officiel des finances publiques (Bofip) prévoit des exonérations spécifiques pour différents types de rémunération, ciblant principalement les associations et les organismes d'intérêt général. Les ESSMS, malgré leur mission d'intérêt public, ne bénéficient pas tous de cette exonération totale, ce qui crée une inégalité de traitement.

Dans un contexte économique difficile pour nos associations, cette taxe accroît encore davantage les charges qui pèsent sur des établissements qui sont déjà confrontés à une inflation qui fragilise durablement leur fonctionnement et à la problématique de l'augmentation de la rémunération de leur personnel.

En diminuant la charge fiscale des ESSMS, nous renforcerons leur capacité à remplir leur mission d'accompagnement des personnes les plus vulnérables, tout en garantissant la soutenabilité de leur modèle économique.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Au travers de cet amendement, mon cher collègue, vous portez une attention particulière aux ESSMS, ce qui est tout à fait louable.

Pour autant, comme je viens de le dire à Michel Canévet, notre objectif est davantage de réduire les niches sociales que d'en créer de nouvelles.

En outre, on ne voit pas bien l'intérêt de réduire les recettes de la sécurité sociale pour financer les ESSMS. C'est un jeu à somme nulle !

Pour ces raisons, la commission est défavorable à votre amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 872 rectifié quater.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 963, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, est ainsi libellé :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – À la quatrième phrase du premier alinéa du 1 de l'article 231 du code général des impôts, après le mot : « communaux, » sont insérés les mots : « des établissements publics de santé et des établissements publics d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, ».

II. – Le I s'applique à la taxe sur les salaires due à raison des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2025.

III. – La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Céline Brulin.

Mme Céline Brulin. Cet amendement vise également à exonérer des établissements – les hôpitaux, en l'occurrence – de taxe sur les salaires. Je rappelle qu'il a été décidé d'en exonérer les établissements publics de coopération culturelle (EPCC) et que la plupart des établissements publics le sont déjà, à l'instar des collectivités territoriales, des universités ou des centres communaux d'action sociale (CCAS).

Il nous semblerait logique, utile et sain que les hôpitaux et les Ehpad le soient aussi. Cela ôterait une lourde pression à ces établissements, pour lesquels le coût des dernières mesures salariales a été trop faiblement compensé et qui vont subir une augmentation du taux de cotisation à la CNRACL.

Par ailleurs, j'entends souvent dire dans cet hémicycle que les efforts doivent être partagés. Or les cliniques privées ont obtenu la suppression intégrale du coefficient de minoration des tarifs, qui avait été instauré pour compenser l'avantage fiscal puis social que leur avait conféré le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE). Il nous semble donc logique de répondre enfin à la demande de longue date et fort légitime des acteurs de l'hospitalisation publique.

Mme la présidente. L'amendement n° 1165 rectifié quater, présenté par Mme Harribey, MM. Gillé, Bourgi et Ros, Mme Poumirol, MM. M. Weber, Lurel, Chaillou et Temal, Mme Blatrix Contat, MM. Féraud, Uzenat, Pla, Redon-Sarrazy et Fagnen, Mmes Artigalas, Conway-Mouret et Bélim, MM. Bouad, Michau et Montaugé, Mmes Le Houerou, Carlotti et Monier et MM. Ziane et Stanzione, est ainsi libellé :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le dernier alinéa du 1 de l'article 231 du code général des impôts est complété par les mots : « , et pour les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes constitués sous la forme d'un établissement public autonome. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Laurence Harribey.

Mme Laurence Harribey. Cet amendement a été rédigé dans le même esprit que le précédent, mais il concerne un domaine plus spécifique : il vise à corriger une inégalité entre les Ehpad publics, selon qu'ils sont autonomes ou territoriaux.

Actuellement, les Ehpad publics territoriaux, directement rattachés aux collectivités territoriales, sont totalement exonérés de taxe sur les salaires, car ils ne sont pas dotés de la personnalité morale. A contrario, les Ehpad publics autonomes étant dotés de la personnalité morale, ils sont assujettis à cette taxe. Pourtant, ils n'entrent pas dans le champ concurrentiel, dans la mesure où ils sont habilités à 100 % à l'aide sociale, où ils font l'objet d'une gestion administrée et où ils ne fixent pas librement leurs tarifs.

De plus, ces deux types de structures sont soumis aux mêmes obligations en matière comptable, à la même gouvernance, aux mêmes conditions de tarification et de contrôle de gestion, aux mêmes règles sociales pour le personnel et à la même réglementation en matière de marché public.

Nous demandons donc de rétablir un parallélisme des formes entre Ehpad publics autonomes et Ehpad publics territoriaux.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.

L'amendement n° 963 coûterait 4 milliards d'euros. Actuellement, nous ne pouvons pas nous permettre une telle dépense.

Madame Harribey, j'ai écouté avec attention vos propos, et, si l'avis de la commission sur l'amendement n° 1165 rectifié quater est défavorable, je me pencherai personnellement sur le sujet. Vous décrivez une iniquité notoire. Je solliciterai le ministre des solidarités pour déterminer la manière d'y mettre fin.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Harribey, pour explication de vote.

Mme Laurence Harribey. Je voudrais que nous prenions acte de cette inégalité de statut. Je l'avais signalé à Geneviève Darrieussecq, qui avait admis par écrit l'existence d'un problème et s'était engagée à étudier la question. Depuis lors, rien n'a été fait. Le rendez-vous que nous devions avoir avec le ministre chargé des établissements pour voir comment avancer sur ce sujet n'a pas eu lieu.

C'est grave, car certains de ces établissements sont en grande difficulté. Nous risquons de payer très cher cette inégalité. Il ne s'agit pas de créer une niche fiscale ; il s'agit simplement de rétablir un parallélisme des formes, une égalité de traitement, entre les établissements publics autonomes et les établissements publics territoriaux, qui ont la même fonction et ont pour seule différence d'être ou non dotés de la personnalité morale.

Madame la ministre, je maintiens mon amendement et vous demande de prendre note de cette question pour qu'elle soit traitée sérieusement et effectivement.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Madame Harribey, j'appuie d'autant plus votre demande que j'ai eu l'occasion de déposer le même type d'amendements dans un contexte financier moins préoccupant. Mme la ministre me soufflait à l'instant que le coût de cette mesure serait d'environ 250 millions d'euros.

Sachez par ailleurs que, l'an dernier, lorsque a été déployé le fonds d'urgence pour les Ehpad, celui-ci a été fléché prioritairement vers les Ehpad publics autonomes, précisément pour répondre à la différence de traitement notoire que vous décrivez.

Il s'agit d'un véritable sujet et je serai de ceux qui animeront le débat pour faire avancer les choses.

Je précise qu'il existe tout de même une différence entre les établissements publics autonomes et les établissements publics territoriaux : en cas de grande difficulté, l'ARS est plus susceptible d'intervenir sur le secteur public autonome, alors que les établissements relevant des collectivités territoriales sont quelque peu laissés à eux-mêmes.

Il n'en reste pas moins que le problème est réel.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 963.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1165 rectifié quater.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements identiques.

L'amendement n° 608 rectifié bis est présenté par MM. Masset et Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, M. Laouedj, Mme Pantel et M. Roux.

L'amendement n° 747 est présenté par M. Michau, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Bourgi et Ros, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Ziane et Lurel, Mme Bélim, M. Féraud, Mme Harribey, M. Gillé, Mme Brossel, MM. Fagnen et Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Darras, Mérillou et Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Roiron, Mme Blatrix Contat, MM. Jeansannetas, Vayssouze-Faure et M. Weber, Mmes Monier et G. Jourda, MM. P. Joly, Marie, Tissot, Durain et Chaillou, Mme Artigalas, MM. Redon-Sarrazy, Ouizille, Pla, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L'amendement n° 798 rectifié est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.

L'amendement n° 906 rectifié est présenté par M. Canévet.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 2 bis de l'article 231 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Ils ne sont pas non plus applicables aux rémunérations versées par les établissements publics de santé, les établissements de santé privés à but non lucratif et les établissements sociaux et médico-sociaux publics ou gérés par des personnes morales de droit privé à but non lucratif. »

II. – La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Michel Masset, pour présenter l'amendement n° 608 rectifié bis.

M. Michel Masset. Cet amendement vise à donner des marges de manœuvre financières aux 27 500 structures associatives et fondations non lucratives du secteur social, médico-social et sanitaire en supprimant les deux taux majorés de la taxe sur les salaires, pour ne pour conserver qu'un taux unique de 4,25 %.

Il s'agit d'une mesure importante dans le contexte de manque d'attractivité du secteur.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, pour présenter l'amendement n° 747.

M. Jean-Jacques Michau. Je propose également de supprimer les taux majorés de la taxe sur les salaires pour les établissements publics de santé, les établissements de santé privés à but non lucratif et les établissements sociaux et médico-sociaux publics ou gérés par des personnes morales de droit privé à but non lucratif.

Nous souhaitons ne conserver qu'un taux unique de 4,25 %, afin de redonner des marges de manœuvre financières à ces structures et de permettre une revalorisation des salaires dans les secteurs sociaux et médico-sociaux.

J'ajoute que cet amendement a été élaboré avec le Centre français des fonds et fondations.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l'amendement n° 798 rectifié.

Mme Raymonde Poncet Monge. J'aimerais que l'on s'interroge parfois sur la logique d'une taxe, c'est-à-dire sur les incitations qu'elle engendre. L'assiette de la taxe sur les salaires repose sur la masse salariale, ce qui entraîne plusieurs effets pervers.

Tout d'abord, cette taxe, appliquée aux taux majorés, est un frein au regroupement et à la mutualisation des établissements et services médico-sociaux, qui sont un enjeu essentiel de la réforme des services autonomie à domicile (SAD). En effet, les établissements ont tout intérêt à rester indépendants pour que chacun d'entre eux profite de l'abattement de départ.

Ensuite, elle incite au recours au temps partiel, y compris subi, les tranches de taxe sur les salaires étant uniquement évaluées selon les montants des salaires versés, sans tenir compte de la durée du travail. Cet effet pervers était déjà relevé au sein du rapport Libault, publié en 2019, qui se fondait sur un référé de la Cour des comptes de 2018.

Enfin, la taxe sur les salaires, telle qu'elle est actuellement conçue, freine le développement de la qualité des prestations et réduit les marges de manœuvre des structures quant à la rémunération de leur encadrement intermédiaire.

Je vous entends dire que notre rôle étant de dégager des ressources, nous ne saurions créer de nouvelles niches sociales. Le problème, c'est que vous ne souhaitez pas non plus en supprimer ! Nous y reviendrons, mais il n'est prévu de supprimer que l'équivalent de 3 milliards d'euros de niches sociales.

Même si nous voulions en créer de nouvelles, nous ne pourrions le faire, car, grâce au quinquennat de M. Macron, le montant des exonérations de cotisations frôle le ratio de 14 % des recettes des organismes de sécurité sociale, seuil que nous ne sommes pas autorisés à dépasser en vertu de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027. En 2017, le coût des niches fiscales est passé…

Mme la présidente. Il faut conclure, chère collègue.

Mme Raymonde Poncet Monge. … de 33 milliards d'euros à 70 milliards d'euros, voilà pourquoi vous ne pouvez plus en créer !

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l'amendement n° 906 rectifié.

M. Michel Canévet. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je parle sous le contrôle de Mme la ministre, mais je crois que l'adoption de ces amendements identiques coûterait 1,3 milliard d'euros. Cela ne me semble pas constituer le bon moyen pour ramener les comptes sociaux à l'équilibre.

Par ailleurs, il est écrit dans l'objet de l'un de ces amendements que les dons baissaient en France. Ce n'est pas du tout le constat que je fais. Il me semble au contraire que les dons sont stables, voire en légère augmentation. Les Français sont très généreux, et les fondations nous le rappellent au travers de leurs rapports d'activité.

Mme Cathy Apourceau-Poly. C'est vrai, mais ce sont toujours les mêmes qui donnent !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 608 rectifié bis, 747, 798 rectifié et 906 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L'amendement n° 866 rectifié, présenté par M. Dhersin, Mmes Muller-Bronn et Demas, MM. S. Demilly, Olivier et Bleunven, Mmes Perrot, Sollogoub et Patru et M. Longeot, est ainsi libellé :

Après l'article 3 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport portant sur l'instauration progressive d'une part de capitalisation obligatoire dans le système de retraites français.

La parole est à M. Franck Dhersin.

M. Franck Dhersin. La France est le second pays de l'Union européenne en matière de dépenses de retraites, lesquelles s'élèvent à 13,4 % du PIB. Notre système de retraite est fondé à 98 % sur la répartition.

En outre, la France figure parmi les pays européens les plus généreux du point de vue du taux de remplacement. Cette générosité se traduit naturellement par des taux particulièrement élevés de cotisation retraite sur les salaires, ce qui grève la compétitivité de nos entreprises et empêche les chefs d'entreprise d'augmenter sensiblement les salaires.

Nous fonçons dans le mur sans vouloir l'assumer ! La démographie va nous placer dans une situation d'asphyxie financière. Malgré la dernière réforme des retraites, nous nous apercevons que le régime va rester durablement déficitaire, et que cela ira de mal en pis. Nous devons donc envisager la piste de l'instauration d'un pilier de retraite par capitalisation.

Imaginons une personne ayant perçu 100 euros de salaire durant toute une vie de travail ; pour financer un droit à pension de 75 euros par an pendant vingt-cinq, il faut qu'elle ait cotisé à hauteur de 28 % de son salaire dans le cadre d'une capitalisation à 4 % de rendement, alors qu'il faut qu'elle ait cotisé à 40 % de son salaire dans le cadre d'un système par répartition à 1 % de rendement. Nous pourrions donc à la fois cotiser moins et avoir de meilleures pensions si nous cessions collectivement de faire preuve de dogmatisme.

Le système de retraite par capitalisation a fait ses preuves dans la majorité des pays de l'OCDE. Actuellement, les retraités américains investissent massivement dans l'économie française par l'intermédiaire de BlackRock, Vanguard ou d'autres sociétés de gestion. Cette situation est absurde, mais elle est bien réelle !

La capitalisation pourrait à la fois permettre de sauver notre système de retraite, d'augmenter durablement le niveau des pensions versées et de faire financer notre économie par de grands fonds de pension qui investiraient dans nos entreprises.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Avis défavorable également.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 866 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 4

I. – Le I de l'article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° (nouveau) Au premier alinéa, après la seconde occurrence du mot : « sociale », sont insérés les mots : « dans sa rédaction en vigueur au 1er janvier 2024 » ;

2° À l'avant-dernier alinéa, la date : « 1er janvier 2019 » est remplacée par la date : « 1er mai 2024 » et le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 25 % ».

II. – Le 4° du III de l'article 8 de la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019 est abrogé.

III (nouveau). – Avant le 1er juillet 2025, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les évolutions du travail saisonnier agricole et l'amélioration des droits des travailleurs saisonniers agricoles. Ce rapport présente un état des lieux précis des spécificités du salariat saisonnier agricole et des dynamiques à l'œuvre, avec notamment une analyse statistique et juridique détaillée de l'ensemble des formes de travail saisonnier agricole, par secteur agricole et par branche professionnelle, de l'évolution de la sous-traitance ainsi qu'une analyse de l'ensemble des contournements du droit du travail relevés ou sanctionnés ces dernières années par les services de contrôle et par la justice. Il présente également des recommandations pour permettre à ces salariés de bénéficier d'une amélioration de leur statut, de leurs droits et de la mise en application de ces droits. Il présente les actions portant sur les enjeux actuels de la santé et de la sécurité au travail tels que le développement d'une culture de prévention, la priorisation de certains risques au travail, la promotion de la qualité de vie et des conditions de travail et l'adaptation aux conditions climatiques. Il recense aussi les différentes nationalités de travailleurs saisonniers issus de pays dépourvus de conventionnement avec la France. Ce rapport présente également un volet spécifiquement consacré aux territoires ultramarins.

Mme la présidente. L'amendement n° 282, présenté par MM. Durox, Hochart et Szczurek, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots : des cotisations à la charge du salarié dues au titre de l'assurance vieillesse, des régimes de retraite complémentaire légalement obligatoires mentionnés à l'article L. 921-4 du même code, de la contribution prévue au deuxième alinéa de l'article 37 de l'accord national interprofessionnel du 17 novembre 2017 relatif au régime AGIRC-ARRCO de retraite complémentaire, de la contribution sociale généralisée et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale II. – Après l'alinéa 2 Insérer deux alinéas ainsi rédigés : ...° Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : « Le salaire minimum interprofessionnel de croissance est diminué de 20,84 % pour les emplois visés au présent I. » ; III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé : … – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Joshua Hochart.

M. Joshua Hochart. Cet amendement est crucial pour l'avenir de nos exploitations agricoles. Il vise à exonérer de cotisations sociales salariales le travail saisonnier, pour répondre à une double urgence : réduire le coût de la main-d'œuvre pour nos agriculteurs et redonner de l'attractivité à ces métiers essentiels, mais exigeants.

Nos agriculteurs sont à bout ! Hier encore, ils le faisaient savoir sur les ronds-points de France. Ils font face à des charges écrasantes, à des prix de vente qui, souvent, ne couvrent même pas les coûts de production et à une concurrence déloyale amplifiée par des accords de libre-échange comme celui qui est envisagé avec le Mercosur, auquel nous nous sommes toujours fermement opposés. En effet, comment rivaliser avec des produits importés de pays où les normes environnementales et sociales sont inexistantes, quand, ici, nous demandons toujours plus à nos exploitants ?

S'il est adopté, cet amendement donnera une bouffée d'oxygène à nos agriculteurs : non seulement il permettra à ces derniers de recruter des saisonniers à un coût plus supportable, mais il donnera envie à des travailleurs de s'engager dans des missions saisonnières souvent peu attractives, car pénibles et mal rémunérées. Il s'agit d'une mesure de justice et de bon sens.

Permettez-moi d'exprimer tout mon soutien à les agriculteurs qui, dans le calme, expriment de nouveau leur détresse. Ils ne demandent pas l'aumône ; ils demandent simplement de pouvoir vivre dignement de leur travail !

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous entamons l'examen de l'article 4, qui porte sur dispositif d'exonération lié à l'emploi de travailleurs occasionnels et demandeurs d'emploi (TO-DE). Depuis 2019, nous demandons chaque année que soient pérennisées les exonérations liées à l'emploi de TO-DE. Aussi devons-nous nous réjouir que ce soit enfin le cas, au travers de l'article 4 du PLFSS.

Par ailleurs, vous noterez que le dispositif est étendu aux coopératives d'utilisation de matériel agricole (Cuma) et que l'assiette passe de 1,20 à 1,25 Smic. Cela représente un réel effort.

Celui que vous demandez, cher collègue, est considérable : vous souhaitez que les exonérations soient étendues aux cotisations de retraite complémentaire, à la CSG et à la CRDS. Ce serait très coûteux et reviendrait à supprimer la quasi-totalité du financement reversé à la protection sociale pour l'emploi d'un saisonnier agricole.

Ainsi, les articles 4 et 4 bis renforçant déjà le dispositif d'exonération TO-DE, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Pour autant, vous pointez un sujet que nous avons tous en tête et qui fait la une des journaux, à savoir la crise agricole. Nous ne sommes pas sans savoir les difficultés que traverse l'ensemble de la filière. Toutefois, nous estimons que le rôle de la commission des affaires sociales est de veiller à ce que l'amortissement des crises auxquelles sont confrontés les agriculteurs ne se fasse pas au détriment du financement de la protection sociale.

Le PLFSS pour 2025 comporte pourtant, je le répète, trois avancées : l'extension des exonérations TO-DE ; les aides aux jeunes agriculteurs, âgés de 18 à 40 ans, qui pourront cumuler plusieurs types d'exonérations ; le calcul des pensions de retraite sur les 25 meilleures années. Aussi, même si je suis très sensible à ce qui se passe dans le monde agricole, je ne saurais aller aussi loin que vous le préconisez ; on ne peut pas tout avoir.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Mme la rapporteure générale a raison de saluer l'article 4, puisqu'il pérennise le dispositif d'exonération de cotisations patronales lié à l'emploi des travailleurs occasionnels-demandeurs d'emploi, dispositif qui devait prendre fin au 31 décembre 2025, et qu'il rehausse le plafond de rémunération donnant droit au niveau maximal d'exonération, le faisant passer de 1,20 à 1,25 Smic. Dans le contexte que nous connaissons, il convient de se féliciter de cette avancée.

Monsieur le sénateur, vous proposez d'étendre encore davantage cette exonération, qui s'appliquerait également aux cotisations et contributions salariales, avec un montant identique de ces prélèvements salariaux, ce qui serait neutre pour le salarié, mais offrirait un gain supplémentaire à l'employeur.

Au-delà des considérations de coût, le Conseil constitutionnel a souligné, le 6 août 2014, l'inconstitutionnalité d'une proposition similaire, consistant à instaurer une réduction dégressive de cotisations salariales, jugeant qu'elle méconnaissait le principe d'égalité.

Pour ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 282.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de onze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° 1137 rectifié bis est présenté par MM. Montaugé, Bouad, Gillé et Ros, Mme Blatrix Contat, MM. Roiron, M. Weber, Uzenat, Pla et Fagnen, Mme Artigalas, M. Stanzione et Mme Harribey.

L'amendement n° 1219 rectifié quater est présenté par M. Mérillou, Mme Bélim, M. Michau, Mme Monier et MM. Bourgi et Ziane.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

I – Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…°Au troisième alinéa, après la référence : « 1°, », est insérée la référence : « 2°, » et les mots : « , à l'exclusion des tâches réalisées par des entreprises de travaux forestiers, » sont supprimés.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l'amendement n° 1137 rectifié bis.

M. Franck Montaugé. Le dispositif TO-DE contribue à la réduction des coûts de production des exploitations agricoles françaises, renforçant ainsi leur compétitivité dans un contexte de concurrence internationale accrue et de pression sur les prix, que l'actualité nous rappelle par ailleurs. En facilitant le recours à des travailleurs saisonniers, il soutient également l'activité économique en zone rurale, car il apporte des bénéfices essentiels aux petites et moyennes exploitations agricoles.

Toutefois, ce dispositif ne s'applique pas aux salariés des entreprises de travaux et services agricoles, ruraux et forestiers (Etarf), lesquelles emploient environ 100 000 personnes dans notre pays, soit 15 % des salariés de la production agricole.

Cet amendement vise donc à étendre l'exonération liée à l'emploi de TO-DE aux Etarf. Cette mesure allégerait la charge financière d'environ 21 000 employeurs, qui pourraient réaliser une économie de 30 millions d'euros. Un tel élargissement du dispositif TO-DE contribuerait au maintien et à la création d'emplois en milieu rural. Il s'agit d'un sujet important et préoccupant dans bon nombre de territoires agricoles de notre pays.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, pour présenter l'amendement n° 1219 rectifié quater.

M. Jean-Jacques Michau. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Les six amendements suivants sont également identiques.

L'amendement n° 219 rectifié septies est présenté par MM. V. Louault, Chasseing, Capus, Médevielle, Chevalier et Grand, Mme Bourcier, M. Rochette, Mme L. Darcos, M. Wattebled et Mme Paoli-Gagin.

L'amendement n° 255 rectifié ter est présenté par MM. Pillefer, Cambier et Levi, Mme Housseau, MM. S. Demilly et Kern, Mmes Saint-Pé, Jacquemet et O. Richard, M. J.M. Arnaud, Mmes Sollogoub et Perrot, M. Courtial, Mmes Romagny et Antoine et MM. Hingray, Haye et Duffourg.

L'amendement n° 288 rectifié est présenté par M. Bonhomme.

L'amendement n° 501 rectifié ter est présenté par MM. Sautarel et Panunzi, Mme Jacques, MM. P. Vidal, H. Leroy et Genet, Mmes Drexler, Belrhiti et Demas, MM. Lefèvre, Mandelli, Anglars, J. B. Blanc et Bruyen, Mme Dumont, MM. Houpert, Belin, C. Vial et Klinger, Mme P. Martin et MM. Gremillet et Cuypers.

L'amendement n° 902 rectifié ter est présenté par MM. Canévet, Mizzon, Fargeot, Delcros et Longeot, Mme Gacquerre, M. Bleunven et Mme Havet.

L'amendement n° 1071 est présenté par Mme Bonnefoy.

Ces six amendements sont ainsi libellés :

I. – Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé

… Au troisième alinéa, les mots : « , à l'exclusion des tâches réalisées par des entreprises de travaux forestiers, » sont supprimés et après la référence : « L. 722-1, » est insérée la référence : « et au 1° de l'article L. 722-2 » ;

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l'amendement nos 219 rectifié septies.

M. Daniel Chasseing. Cet amendement de Vincent Louault, élaboré avec la Fédération nationale entrepreneurs du territoire, vise à permettre aux entreprises de travaux agricoles employeurs de main-d'œuvre de bénéficier, elles aussi, du dispositif TO-DE.

Cette mesure favorisera la compétitivité de cette profession. Alors que deux tiers de ses actifs sont des travailleurs saisonniers, elle est le seul acteur de la filière agricole à ne pas bénéficier du dispositif.

Le coût de cette mesure a été évalué à 17,7 millions d'euros nets par an, soit 32 millions d'euros brut, ce qui est bien loin des 80 millions d'euros brut mentionnés lors des débats à l'Assemblée nationale.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Pillefer, pour présenter l'amendement n° 255 rectifié ter.

M. Bernard Pillefer. Les 22 000 entreprises de travaux et services agricoles, ruraux et forestiers jouent un rôle essentiel pour l'ensemble de la filière agricole. Elles emploient 147 000 personnes et réalisent 7 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel.

Pourtant, parmi les acteurs de la filière agricole, elles demeurent les seules à ne pas bénéficier des exonérations patronales prévues par le dispositif TO-DE. Ce dernier, qui offre un véritable avantage à ceux qui en profitent, est actuellement réservé aux exploitants agricoles employeurs. Cela constitue une inégalité de traitement inadmissible au sein de la filière agricole, qui doit être corrigée.

Cet amendement vise donc à intégrer les Etarf au dispositif TO-DE. Cette mesure paraît pleinement justifiée par la nature saisonnière de leurs activités, qui sont liées aux cycles de la production animale et végétale. Durant ces périodes, les emplois saisonniers représentent près de 70 % de leurs effectifs.

Adopter cet amendement reviendrait à renforcer la compétitivité économique de l'agriculture française et à soutenir l'emploi et la pérennité de ces entreprises, qui structurent nos territoires ruraux. Mes chers collègues, je vous invite donc à voter en faveur de cet amendement, qui constitue une réponse nécessaire à une situation injuste.

Mme la présidente. La parole est à M. François Bonhomme, pour présenter l'amendement n° 288 rectifié.

M. François Bonhomme. Tout d'abord, je me réjouis de la pérennisation du dispositif d'exonération TO-DE. Cela fait suite à de nombreux débats relatifs au maintien de la compétitivité et de l'emploi des entreprises agricoles.

Nous sommes nombreux à défendre cet amendement, qui répond à une demande logique : étendre le dispositif à des entreprises qui, par leurs prestations forestières, agricoles et rurales, participent de fait aux mêmes cycles de production que les entreprises agricoles.

Je suis conscient que la pérennisation du dispositif représente déjà un effort financier important. Une première étape a été franchie, mais pouvez-vous, madame la rapporteure générale, nous éclairer sur le coût d'une extension du dispositif ? Si je puis comprendre les contraintes financières et budgétaires auxquelles nous sommes soumis, une telle extension devra être tôt ou tard sérieusement envisagée.

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour présenter l'amendement n° 501 rectifié ter.

M. Stéphane Sautarel. Cet amendement vise à étendre les exonérations TO-DE aux entreprises de travaux agricoles employeurs de main-d'œuvre, aux travaux d'amélioration foncière agricole, ainsi qu'aux travaux accessoires nécessaires à l'exécution des travaux précédents dans le champ de l'exonération. Je ne détaillerai pas plus avant mes arguments, mes collègues l'ayant déjà fait longuement.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l'amendement n° 902 rectifié ter.

M. Michel Canévet. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 1071 n'est pas soutenu.

Les trois amendements suivants sont identiques également.

L'amendement n° 242 rectifié est présenté par Mme Loisier, MM. Menonville, Gremillet, Canévet et Bacci, Mmes Jacquemet et Pluchet, M. S. Demilly, Mmes Berthet, Vermeillet et Guidez, M. Perrion, Mmes Lassarade et Morin-Desailly, M. Bleunven, Mmes Saint-Pé, Billon et O. Richard, MM. Hingray et J. M. Arnaud, Mme Sollogoub, MM. Delcros, Longeot et Chasseing, Mme Paoli-Gagin, MM. Cambier et Haye et Mmes Romagny et Antoine.

L'amendement n° 332 rectifié est présenté par M. Lurel, Mmes Conconne et Bélim, M. Fagnen, Mme G. Jourda et MM. M. Weber et Stanzione.

L'amendement n° 592 rectifié est présenté par MM. Masset, Bilhac et Cabanel, Mmes M. Carrère et Conte Jaubert, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Guiol, Mmes Jouve et Pantel et M. Roux.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

I. – Après l'alinéa 2

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…°Au troisième alinéa, les mots : « , à l'exclusion des tâches réalisées par des entreprises de travaux forestiers, » sont supprimés.

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour présenter l'amendement n° 242 rectifié.

Mme Anne-Catherine Loisier. Cet amendement a le même objectif que les précédents, mais est plus restrictif, puisqu'il ne vise que les entreprises de travaux forestiers.

Je rappelle que la France est un grand pays forestier, comptant plus de 17 millions d'hectares de forêts, mais seulement 7 000 entreprises de travaux forestiers, qui sont soumises à des difficultés grandissantes. Je pense aux intempéries, mais aussi aux normes environnementales en raison desquelles elles ne peuvent intervenir en forêt que quelques mois par an alors qu'elles doivent amortir des engins coûtant plusieurs centaines de milliers d'euros.

Nous assistons à de nombreuses défections, et des régions forestières sont actuellement en carence d'entreprises de travaux forestiers. Si, demain, ces entreprises venaient à disparaître – il s'agit d'un scénario dramatique, mais qui pourrait advenir –, nous n'aurions plus d'exploitations, plus de bois dans les scieries, plus de biomasse bois, plus de bois-énergie…

Je sais que la situation budgétaire est compliquée, mais j'attire l'attention de la commission sur ce que je considère comme une réelle injustice. Les entreprises de travaux forestiers sont confrontées à un véritable problème de travail saisonnier, alors que la masse de travaux et de besoins sur le territoire n'a jamais été aussi importante, compte tenu des dépérissements, que vous connaissez bien, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Victorin Lurel, pour présenter l'amendement n° 332 rectifié.

M. Victorin Lurel. Voici un amendement qui, à quelques exceptions près, fait l'unanimité et devrait rassembler le Sénat.

Je suis moi-même, aux côtés de Christian Klinger, rapporteur spécial de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et je sais que l'agriculture reste un enjeu central pour chaque groupe politique et pour chaque commission.

Je ne développerai pas davantage l'économie de cet amendement, je me contenterai de citer un rapport publié par la Cour des comptes en 2020 : « Les pratiques de fractionnement des contrats entre les travaux d'abattage, de débardage et de transport du bois […] sont également défavorables aux entreprises de travaux forestiers (ETF), qui ne peuvent souvent pas effectuer toutes les prestations de la forêt à l'usine ("rendu usine"), comme c'est la pratique dans d'autres pays. » La Cour était ainsi favorable à une extension du dispositif d'exonération TO-DE aux entreprises forestières.

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Masset, pour présenter l'amendement n° 592 rectifié.

M. Michel Masset. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je le disais précédemment, le PLFSS pour 2025 constitue un progrès dans la mesure où le dispositif TO-DE est pérennisé et étendu aux Cuma. Une extension aux Etarf coûterait 80 millions d'euros.

Les années précédentes, la commission des affaires sociales a déjà émis un avis défavorable sur des amendements similaires. Alors que la sécurité sociale est en grande difficulté financière, il me semble compliqué de ne pas faire de même.

Ces dispositions ont inspiré, sur de nombreuses travées, de brillants plaidoyers en faveur des entreprises de travaux agricoles, ruraux et forestiers (Etarf). Peut-être tels ou tels amendements identiques seront-ils adoptés, mais la commission confirme l'avis défavorable émis les années précédentes.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1137 rectifié bis et 1219 rectifié quater.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 219 rectifié septies, 255 rectifié ter, 288 rectifié, 501 rectifié ter et 902 rectifié ter.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 242 rectifié, 332 rectifié et 592 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 640 rectifié est présenté par M. Fichet, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Bourgi et Ros, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Ziane et Lurel, Mme Bélim, M. Féraud, Mme Harribey, M. Gillé, Mme Brossel, MM. Fagnen et Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Darras, Michau, Mérillou et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Blatrix Contat, MM. Jeansannetas, Vayssouze-Faure et M. Weber, Mme G. Jourda, MM. P. Joly, Marie, Tissot, Durain et Chaillou, Mme Artigalas, MM. Redon-Sarrazy, Ouizille, Pla, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L'amendement n° 930 est présenté par Mmes Silvani, Apourceau-Poly, Brulin et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'alinéa 3

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – Après le III du même article L. 741-16, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« … – Les employeurs ayant bénéficié de cette exonération sont tenus de garantir aux travailleurs occasionnels des conditions de logement digne, de participer à la prise en charge de leurs frais de transport, de mettre en place un plan de réexamen de la rémunération à la tâche ainsi que d'appliquer un plan canicule. Ils en fournissent la preuve aux organismes mentionnés à l'article L723-1 du présent code. Les employeurs ne satisfaisant pas à ces exigences ne bénéficient pas des dispositions du présent article. »

La parole est à M. Jean-Luc Fichet, pour présenter l'amendement n° 640 rectifié.

M. Jean-Luc Fichet. Le dispositif d'exonération lié à l'emploi de travailleurs occasionnels et demandeurs d'emploi (TO-DE) représente un coût non négligeable pour les finances publiques. Il est donc tout à fait légitime de soumettre cette exonération au respect d'un socle minimum de règles du droit du travail.

Cet amendement vise, d'une part, à garantir des conditions de travail à tout le moins décentes via des mécanismes de contrôle adaptés et, d'autre part, à assurer le respect du droit au repos hebdomadaire.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le Gouvernement a publié, en juillet dernier, un décret permettant aux entreprises agricoles, notamment en Champagne, de déroger à l'obligation d'accorder un jour de repos hebdomadaire. Or ce jour de repos est un acquis fondamental du droit du travail. C'est un gage de la dignité et de la santé des travailleurs.

À ce titre, de trop nombreux faits divers tragiques ont marqué l'actualité récente. En 2023, plusieurs saisonniers agricoles ont perdu la vie lors des vagues de canicule. En septembre de cette même année, quatre travailleurs saisonniers sont morts dans les vignes de Champagne. Et je passe sur les conditions de logement indignes régulièrement révélées par la presse…

Il convient de lutter contre ces dérives en réservant le bénéfice de l'exonération TO-DE aux employeurs respectant les règles élémentaires du droit du travail.

Mme la présidente. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour présenter l'amendement n° 930.

Mme Silvana Silvani. Dans une logique de protection des travailleurs et de contrôle des finances publiques, cet amendement vise à soumettre les aides versées au secteur agricole au respect d'un certain nombre de critères sociaux.

Les saisonniers agricoles, ces invisibles smicardisés et précarisés, sont souvent embauchés pour faire face à des pics d'activité dans des secteurs qui sont peu mécanisés, voire ne le sont pas du tout, et exigent de ce fait un surcroît de main-d'œuvre.

Dans la plupart des cas, les conditions de vie et de travail de ces saisonniers contreviennent aux stipulations de leur contrat. Un rapport parlementaire datant de 2015 cite ainsi un vaste contrôle portant sur 8 000 exploitations : aucun des dossiers examinés dans ce cadre n'était pleinement conforme au code du travail.

Ces manquements peuvent entraîner des accidents parfois mortels. À preuve, quatre vendangeurs champenois ont succombé à un malaise cardiaque en 2023.

Face à ces situations inadmissibles, face à ces drames humains, que dire du choix retenu par le Gouvernement ? Les exploitants ont obtenu par décret le droit de priver les salariés agricoles de leur jour de repos hebdomadaire, au moins une fois par période de trente jours, pour la récolte manuelle.

Nous proposons de soumettre l'exonération de cotisations patronales applicable pour l'emploi de travailleurs occasionnels-demandeurs d'emploi à l'existence d'un logement digne, à la protection des salariés lors des canicules, à la remise en cause de la rémunération à la tâche et à la prise en charge des frais de transport.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, les conditions de travail dans les exploitations agricoles doivent avant tout être conformes au droit en vigueur. À cet égard, il va sans dire que nous faisons nôtres les préoccupations que vous exprimez.

Toutefois, il ne nous semble pas judicieux de choisir comme levier les exonérations de cotisations patronales, lesquelles ont pour but de maintenir la compétitivité de l'agriculture française.

En outre, la mise en œuvre de telles dispositions supposerait de nombreuses opérations de contrôle de la part des caisses de la Mutualité sociale agricole (MSA). Ces mesures nous semblent donc difficilement applicables.

Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Selon nous, le dispositif TO-DE n'est pas le bon outil pour inciter les entreprises à prendre des mesures plus favorables aux salariés.

La conditionalité des aides est, à l'évidence, très difficile à mettre en œuvre ; on retrouve d'ailleurs ces difficultés opérationnelles à l'échelle des branches. Il nous paraît plus adéquat de renforcer les contrôles, en particulier ceux de l'inspection du travail, dans la continuité des efforts accomplis depuis quelques années.

Avis défavorable également.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 640 rectifié et 930.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L'amendement n° 931, présenté par Mmes Silvani, Apourceau-Poly, Brulin et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 3

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – Après le III du même article L. 741-16, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« … – Les sociétés de prestation de service internationales ne bénéficient pas des dispositions du présent article. »

La parole est à Mme Silvana Silvani.

Mme Silvana Silvani. Bien sûr, les dispositifs d'exonération sociale ont leur importance pour le monde agricole, mais nous déplorons qu'ils ne soient pas conditionnés, alors même que l'agriculture est marquée depuis plusieurs années par la progression du salariat hors du cadre familial et au-delà de l'emploi saisonnier.

Demain, le salariat sera prépondérant dans l'agriculture, comme il l'est déjà dans les autres secteurs économiques. C'est pourquoi nous estimons que le dispositif TO-DE ne doit pas seulement soutenir la compétitivité des exploitations agricoles. Il doit aussi et peut-être avant tout garantir des conditions de travail et des salaires décents aux nouveaux travailleurs de la terre.

Le travail agricole est de plus en plus souvent confié à des prestataires : entreprises de travaux ou groupements d'employeurs. Comme dans d'autres secteurs, le recours à la sous-traitance se développe dans des proportions considérables.

Nous sommes bel et bien face à un mécanisme de sous-traitance généralisée. L'agriculture voit ainsi déferler des entreprises de prestation de services internationales, lesquelles se rendent coupables de bien des dérives et profitent d'une main-d'œuvre étrangère qui, souvent, ignore ses droits : les hébergements collectifs se révèlent fréquemment insalubres, les conditions de travail sont indignes et les règles de sécurité sont bafouées, ce qui entraîne de nombreuses morts au travail.

En refusant à ces sociétés les exonérations TO-DE, on pourrait commencer à contrecarrer ce système.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Ma chère collègue, je le répète, nous faisons nôtres vos intentions, mais les sociétés dont il s'agit sont déjà exclues du bénéfice du dispositif TO-DE. J'ajoute qu'elles doivent respecter certaines obligations de déclaration auprès de la MSA et, surtout, le droit du travail. Quant à l'inspection du travail, elle reste compétente pour constater d'éventuels manquements.

En conséquence, la commission demande le retrait de cet amendement, qu'elle considère comme satisfait. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Madame la sénatrice, je vous confirme que votre amendement est satisfait.

L'exonération TO-DE bénéficie aux employeurs de la production agricole établis en France quand ils embauchent directement des travailleurs saisonniers.

Lorsque les sociétés internationales de prestation de services détiennent un établissement en France, leurs activités relèvent de travaux agricoles sous-traités, qui sont exclus du champ de ce dispositif ; et lorsqu'elles sont établies à l'international, mais emploient des salariés en France, c'est sous le régime des travailleurs détachés et elles sont également exclues du régime TO-DE.

À mon tour, je vous prie de bien vouloir retirer votre amendement, dont je comprends évidemment l'objet. Dans le cas contraire, j'émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Mme Émilienne Poumirol. Madame la rapporteure générale, madame la ministre, je tiens à revenir un instant sur les entreprises agricoles françaises, évoquées précédemment.

À ce titre, vous reconnaissez qu'il y a un problème, mais vous estimez que de telles restrictions seraient difficiles à mettre en œuvre.

Vous invoquez la compétitivité, mais le respect du droit du travail devrait être une règle absolue ! Si la solution que nous proposons ne peut pas être mise en œuvre, il faut à tout le moins augmenter les contrôles.

Au mois de juillet dernier, le Gouvernement lui-même a permis aux viticulteurs de faire travailler leurs salariés soixante-dix heures par semaine, dimanches compris, sans repos compensateur. Ces dérogations sont tout bonnement inacceptables.

On ne peut pas piétiner ainsi le code du travail. Toutes les entreprises, qu'elles soient agricoles ou non, doivent en respecter les règles, qu'importent les questions de compétitivité.

Mme la présidente. Madame Silvani, l'amendement n° 931 est-il maintenu ?

Mme Silvana Silvani. Oui, madame la présidente.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 931.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 119, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à supprimer une demande de rapport au Gouvernement portant sur les conditions de travail des saisonniers agricoles.

Mme Émilienne Poumirol. C'est pourtant un sujet important !

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Madame la rapporteure générale, lors des débats à l'Assemblée nationale, le Gouvernement s'est lui aussi prononcé contre cette demande de rapport, au motif que la question avait déjà fait l'objet d'un certain nombre de travaux. Vos collègues députés ayant insisté sur l'importance du sujet, nous avons conservé cette disposition dans le présent texte. Le Gouvernement s'en remet désormais à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 119.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 932, présenté par Mmes Silvani, Apourceau-Poly, Brulin et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 30 juin 2025, un rapport évaluant les effets des dispositifs d'exonération de cotisations sociales patronales des employeurs agricoles, en particulier le dispositif travailleurs occasionnels et demandeurs d'emploi.

La parole est à Mme Silvana Silvani.

Mme Silvana Silvani. Les exonérations générales de cotisations patronales, comme le dispositif TO-DE, avaient initialement pour objectifs d'améliorer la compétitivité des entreprises, de créer de l'emploi et de lutter contre le travail illégal.

En outre, le dispositif TO-DE, présenté à l'origine comme provisoire, est reconduit chaque année depuis 2010. Gabriel Attal, alors Premier ministre, s'était engagé à le pérenniser, avec un budget garanti à hauteur de 624 millions d'euros en 2025 et de 648 millions d'euros en 2026. Mais la dépense n'est pas maîtrisée et le coût du dispositif ne cesse d'augmenter.

De plus, les exonérations dont il s'agit sont captées par les plus grandes exploitations, celles qui pratiquent l'agriculture la plus intensive, qui totalisent le plus d'intrants et de capital ; celles, également, qui emploient le plus de main-d'œuvre précaire. Ces exploitations concourent à l'industrialisation de l'agriculture, au détriment de la protection sociale des paysans.

Mes chers collègues, le TO-DE n'a jamais été évalué ! Au travers de cet amendement, nous demandons en conséquence une évaluation digne de ce nom.

La rémunération des salariés agricoles stagne depuis plusieurs années, tandis que, dans le secteur, le recours à l'emploi précaire ne cesse d'augmenter. Chacun peut le constater. Le TO-DE a-t-il répondu à la crise structurelle que subit une partie du monde agricole ? Quels sont ses effets sur la compétitivité des différentes filières, la création d'emploi et la qualité de l'emploi en agriculture ? Ce sont là des enjeux cruciaux, aujourd'hui et plus encore demain, pour l'agriculture française, qui se doit d'attirer de nouveaux travailleurs.

Mme la présidente. L'amendement n° 453, présenté par M. Benarroche, Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… Avant le 1er juillet 2025, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant les effets des dispositifs d'exonération de cotisations sociales patronales des employeurs agricoles, en particulier le dispositif travailleurs occasionnels et demandeurs d'emploi.

La parole est à Mme Anne Souyris.

Mme Anne Souyris. J'abonde totalement dans le sens de Mme Silvani.

Pas moins de 2,06 milliards d'euros d'exonérations de cotisations sociales patronales ont été accordées à l'agriculture en 2022, et ce montant est en constante progression. Pourtant, l'efficacité de ces aides n'a, à ce jour, pas été évaluée.

L'emploi, qu'il soit salarié ou non, se réduit dans le secteur agricole. En parallèle, l'emploi salarié est frappé par une grande précarité. Il devient urgent de mesurer les effets concrets de ce dispositif, qu'il s'agisse de la compétitivité des filières, de la création d'emploi ou de la qualité des emplois proposés.

Si l'on veut des politiques publiques efficaces en faveur de l'emploi agricole, il est indispensable d'évaluer le TO-DE.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avis défavorable sur les deux amendements.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour explication de vote.

Mme Silvana Silvani. « Contrôler les dépenses », « réduire les dépenses », « travailler sur les dépenses »… Ces injonctions deviennent difficiles à soutenir quand on refuse encore et toujours de vérifier à quoi sert l'argent du TO-DE !

Je ne remets pas en cause ces exonérations en tant que telles ; mais il faut s'assurer qu'elles atteignent réellement leur but.

Mme Raymonde Poncet Monge. Il faut évaluer !

Mme Silvana Silvani. On ne peut pas sans cesse nous répéter qu'il faut contrôler les dépenses et refuser les évaluations !

M. Laurent Burgoa. Cela vaut aussi pour les dépenses sociales…

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Madame la sénatrice, la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale (Lolfss) adoptée en 2022 permet au Parlement d'évaluer les niches sociales tous les trois ans. J'estime donc que votre amendement est satisfait, et c'est pourquoi j'ai émis un avis défavorable.

Si vous souhaitez évaluer l'efficacité de ce dispositif, je vous invite à passer par ce biais…

Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous n'arrivons pas à obtenir les chiffres !

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Vous avez raison, nous devons renforcer l'évaluation des politiques publiques en France.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je suis étonnée que les représentants de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) n'interviennent pas sur ce sujet…

Madame la ministre, vous mentionnez l'évaluation prévue par la Lolfss, mais vous savez bien que ces dispositions sont mal appliquées et que nous sommes loin d'avoir, à ce titre, des évaluations correctes, que ce soit quantitativement ou qualitativement.

Je vous invite à lire ce que la Mecss a pu écrire à ce sujet. Les contrôles par tiers, censés aboutir en trois ans à une évaluation exhaustive, sont loin d'être satisfaisants.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Qu'en dit le président de la Mecss ?

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 932.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 453.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote sur l'article.

Mme Anne Souyris. Mes chers collègues, l'article 4 pérennise le dispositif TO-DE, qui reste effectivement nécessaire pour diverses exploitations agricoles. Certains producteurs peinent à recruter des travailleurs saisonniers. En outre, il faut tenir compte de la faiblesse des revenus agricoles, ainsi que des conséquences économiques des crises sanitaires, climatiques et géopolitiques ayant frappé le secteur pendant les deux dernières années.

Toutefois, depuis sa mise en œuvre en 2010, cette politique d'exonération de cotisations patronales dans le secteur agricole n'a jamais fait l'objet d'une réelle évaluation.

Le travail saisonnier agricole représente 250 000 à 300 000 salariés chaque année, soit un quart de l'ensemble des contrats saisonniers de notre pays.

Le TO-DE profite en premier lieu aux filières à haute intensité de main-d'œuvre – l'arboriculture, les maraîchages, la viticulture et les grandes cultures –, lesquelles ont recours à des contrats très concentrés dans le temps. J'ajoute que son coût total, qui, en 2023, s'élevait à 561 millions d'euros, n'est pas entièrement compensé pour la sécurité sociale.

Cette disposition propre au secteur agricole focalise le débat de la compétitivité de l'agriculture française sur le coût de la main-d'œuvre, mais comment juger de la compétitivité lorsqu'on élude les coûts environnementaux et sociaux, ainsi que les coûts pour la santé publique ?

Ces allégements ciblés de cotisations patronales peuvent créer une trappe à bas salaires. Elles peuvent encourager les exploitations à plafonner les traitements accordés à la limite haute retenue dans ce cadre.

Or quels résultats a-t-on obtenus ? Depuis 2010, le dispositif TO-DE a-t-il réellement permis de lutter contre le travail illégal et le recours aux travailleurs détachés ? A-t-il amélioré les performances économiques et sociales de l'agriculture française, notamment en assurant des créations d'emplois effectives ?

Madame la ministre, avant de pérenniser ce dispositif, ne pensez-vous pas qu'il serait judicieux d'en évaluer précisément les effets ?

Mme la présidente. Veuillez conclure.

Mme Anne Souyris. On pourrait, à tout le moins, opter pour la conditionalité…

Mme la présidente. Il faut conclure, chère collègue !

Mme Anne Souyris. Il convient de fixer des critères d'éligibilité financière, afin que ce dispositif profite aux exploitations en difficulté.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 4, modifié.

(L'article 4 est adopté.)

Article 4 bis (nouveau)

Le V de l'article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime est abrogé – (Adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures vingt,

est reprise à dix-sept heures trente-cinq, sous la présidence de Mme Anne Chain-Larché.)

PRÉSIDENCE DE Mme Anne Chain-Larché

vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

Après l'article 4 bis

Mme la présidente. L'amendement n° 299 rectifié, présenté par MM. Duplomb, Cuypers et Gremillet, Mme Chain-Larché, MM. J.M. Boyer et Klinger, Mme Imbert, M. D. Laurent, Mme Joseph, MM. Bonhomme et Pointereau, Mme Puissat, MM. Pellevat, Bacci, Bouchet et Sol, Mmes Demas et Richer, MM. J.P. Vogel, Anglars et P. Martin, Mme Gosselin, M. Brisson, Mmes Sollogoub, Goy-Chavent et Perrot, M. Panunzi, Mme Berthet, M. Khalifé, Mme Dumas, MM. de Nicolaÿ, J.B. Blanc et Mandelli, Mme Lassarade, MM. Karoutchi et de Legge, Mme Patru, M. Bruyen, Mme Dumont, M. C. Vial, Mme Micouleau, M. Courtial, Mmes M. Mercier, Gacquerre et Belrhiti, MM. Le Rudulier, Somon et Sido, Mmes Billon, Romagny et Pluchet, MM. Bleunven, E. Blanc, Paul et Saury, Mme Evren et M. Lefèvre, est ainsi libellé :

Après l'article 4 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L'article L. 741-16 du code rural et maritime est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« … – Les salariés travailleurs occasionnels et demandeurs d'emploi des sociétés coopératives agricoles et leurs unions qui se consacrent au conditionnement des fruits et légumes, telles que citées à l'article 1451 du code général des impôts, bénéficient des dispositions du présent article. »

II. – … – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Laurent Duplomb.

M. Laurent Duplomb. Cet amendement vise à étendre le dispositif TO-DE aux coopératives spécialisées dans la production de fruits et légumes.

Je tiens à le préciser, le même amendement avait adopté par le Sénat dans le cadre du précédent PLFSS. Aussi, je souhaite qu'il puisse être voté de nouveau cette année.

Aujourd'hui, nous importons 70 % de nos fruits et 40 % de nos légumes, car, au-delà de la multiplication des interdictions, nous avons tout bonnement tué la compétitivité de la France concernant ces deux catégories de produits.

L'aide en faveur de l'emploi des travailleurs saisonniers que constitue le dispositif TO-DE a permis et permet encore d'éviter l'érosion de la production française. Le dispositif TO-DE a été étendu aux Cuma – il s'agit de regroupements d'agriculteurs destinés à acheter du matériel en commun –, afin d'aider les saisonniers qui y sont employés. Dès lors, comment justifier qu'il ne puisse pas profiter aux coopératives de production de fruits et légumes ? Pour rappel, les coopératives sont la propriété des agriculteurs.

Nous avons reçu des alertes sur la situation extrêmement préoccupante de la production des fruits et légumes dans notre pays. En effet, cela fait longtemps que nous ne sommes plus souverains et autonomes en ce domaine : nous devrions donc tout faire pour regagner nos capacités de production.

Mon amendement, dont l'adoption aurait pour effet d'étendre les exonérations du dispositif TO-DE aux seules coopératives de production de fruits et légumes et uniquement pour l'embauche de travailleurs saisonniers, améliorerait notre compétitivité et permettrait, je l'espère, de redonner ses lettres de noblesse à la production française.

Ce n'est ni un petit débat ni une petite question, madame la ministre.

Mme la présidente. Il faut conclure, cher collègue !

M. Laurent Duplomb. J'y insiste, le même amendement avait été adopté l'année dernière ; j'espère qu'il en sera ainsi cette année et que le nouveau gouvernement saura enfin entendre notre appel. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Notre collègue Duplomb nous demande d'étendre aux coopératives de fruits et légumes le dispositif TO-DE, qui s'applique déjà aux Cuma.

La production de fruits et légumes est une question importante, mais il me semble que vous visez les coopératives qui œuvrent au conditionnement de ces produits,…

M. Laurent Duplomb. C'est la suite logique de la production !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. … ce qui est légèrement différent.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Or, à l'heure actuelle, tous les exploitants qui produisent des fruits et légumes bénéficient d'exonérations de cotisations au titre du dispositif TO-DE.

M. Laurent Duplomb. Oui, mais uniquement pour ramasser les fruits et légumes !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous verrons quel vote se dessinera, mon cher collègue. Je n'ai nullement l'intention de vous ennuyer ou de remettre en cause votre amendement, mais j'estime simplement qu'il est important de mieux connaître les cas auxquels s'appliquera cette exonération supplémentaire.

M. Laurent Duplomb. Il s'agira seulement des saisonniers !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Encore une fois, le texte prévoit déjà une extension du dispositif TO-DE, et nous n'avons pas manqué de saluer cette avancée pérenne.

Je sais que l'avis défavorable que je m'apprête à émettre au nom de la commission ne recueillera pas l'unanimité dans l'hémicycle, mais il s'inscrit dans la droite ligne des propositions que nous avons formulées les autres années. (M. Laurent Duplomb agite le doigt en signe de dénégation.) Nous n'allons donc pas nous dédire.

Écoutons ce que la ministre va nous dire sur ce sujet. Quoi qu'il en soit, je suis presque sûre, monsieur le sénateur, que vous parviendrez à rallier une partie de nos collègues à votre amendement.

Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Je souhaite rappeler le principe, la raison d'être du dispositif TO-DE, qui a été conçu pour cibler spécifiquement les besoins des entreprises de production agricole primaire. Tout en étant fortement utilisatrices de main-d'œuvre saisonnière, ces dernières sont les plus exposées à la concurrence internationale.

Vous mentionnez les Cuma, qui, il est vrai, ont bénéficié de l'extension de ce dispositif après un vote de l'Assemblée nationale. Toutefois, les coopératives agricoles ont vocation à permettre aux agriculteurs de mutualiser leurs ressources et, contrairement aux exploitations agricoles, à embaucher des salariés de manière pérenne et favoriser ainsi l'emploi permanent.

Dès lors, exonérer de cotisations et de contributions sociales celles qui assurent la production de fruits et légumes pourrait les inciter à recourir à des contrats saisonniers. Cela conduirait alors à une forme de précarisation.

Pour l'ensemble de ces raisons, je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, le Gouvernement émettra un avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Je suis partagé entre mes deux voisines… (Sourires)

D'un côté, la rapporteure générale, dans une perspective de rigueur budgétaire, émet très logiquement un avis défavorable sur cette demande d'extension du dispositif TO-DE.

De l'autre, la ministre expose, à l'appui de son avis défavorable sur l'amendement, tous les arguments qui plaident en faveur de ce dernier !

M. Laurent Duplomb. Exactement !

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Cette activité subit une concurrence internationale complète – il suffit de considérer les chiffres de production en la matière – et les entreprises concernées embauchent certes des emplois permanents, mais également beaucoup de travailleurs saisonniers, en raison de la forte saisonnalité de leur activité.

En tant que président de la commission des affaires sociales, je ne peux raisonnablement pas contredire la rapporteure générale, avec qui je travaille dans le plus grand respect, mais sachez que, tôt ou tard, quelle que soit l'issue du vote, nous porterons un regard bienveillant sur cette disposition.

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. J'ai le sentiment que nous ne nous sommes pas compris, madame la ministre : je ne demande pas une exonération de charges sociales pour les salariés de coopérative qui sont recrutés de façon permanente, ce n'est pas mon sujet. Je ne demande pas que le salarié qui, par exemple, entretient le matériel de récolte ou place les pommes dans les frigos tout au long de l'année bénéficie du TO-DE.

En revanche, si la récolte est conditionnée à 80 % pour être vendue, cela nécessite forcément l'emploi de travailleurs saisonniers : les agriculteurs regroupés en coopérative ne vont pas garder sur douze mois un salarié chargé du conditionnement, alors qu'ils n'ont besoin de lui que pendant deux mois.

Je ne vous demande donc pas d'étendre l'exonération à tous les salariés des coopératives, cela n'aurait aucun sens, mais de tenir compte du fait que les salariés saisonniers embauchés pour conditionner des produits qui ne peuvent être vendus tels quels sont dans une situation comparable à celle des saisonniers faisant la récolte. Car il existe une multitude de fruits ou de légumes qui ne peuvent pas être vendus exactement dans l'état dans lequel ils sont à la récolte : ils doivent être emballés ou faire l'objet d'un premier tri.

Mais continuons de ne pas vouloir l'entendre et la production de fruits et légumes en France continuera de diminuer, parce que les Espagnols continueront de nous envahir avec leurs produits !

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. En effet, monsieur le sénateur, il y a eu un malentendu ; j'émets en réalité un avis de sagesse sur votre amendement. (Ah ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Duplomb. Merci, madame la ministre ! C'est la première fois que cela m'arrive en sept ans ! (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. J'ai l'habitude de me singulariser et je vais de nouveau le faire ici.

Le Sénat vient de refuser d'étendre le dispositif TO-DE aux travaux forestiers ; le côté gauche de l'hémicycle le déplore, d'autant que ce dispositif profite déjà aux Cuma.

Je ne peux qu'abonder dans le sens des propos de mon collègue Duplomb.

Il y a en Guadeloupe un certain nombre de coopératives de production agricole qui, au-delà des salariés permanents, emploient des travailleurs saisonniers. D'ailleurs, sans ces derniers, il n'y aurait pratiquement plus d'agriculture, dans ce département comme dans l'Hexagone. Pour éviter les dérives, car il y en aura nécessairement, il faudra sans doute mener plus de contrôles.

J'annonce en tout état de cause que, à titre personnel, je voterai cet amendement.

M. Laurent Duplomb. Très bien !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 299 rectifié, qui a fait l'objet d'un avis défavorable de la commission, légèrement modulé par son président, et d'un avis de sagesse du Gouvernement.

(L'amendement est adopté.) – (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 4 bis.

Article 5

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° La seconde phrase de l'article L. 613-1 est complétée par les mots : « du présent code ou à l'article L. 731-13 du code rural et de la pêche maritime » ;

2° Le II de l'article L. 621-3 est complété par les mots : « du présent code et à l'article L. 731-13 du code rural et de la pêche maritime ».

II. – L'article L. 731-13 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est supprimé ;

2° Au dernier alinéa, la seconde occurrence du signe : « , » est remplacée par le mot : « et » et les mots : « et les modalités d'exercice de l'option prévue au troisième alinéa du présent article » sont supprimés.

Mme la présidente. L'amendement n° 333 rectifié, présenté par M. Lurel, Mmes Bélim, Conconne et G. Jourda, M. Fagnen, Mme Monier et MM. M. Weber et Stanzione, est ainsi libellé :

I. – Après l'alinéa 5

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

…°Après la première occurrence du mot : « être », la fin de la dernière phrase du troisième alinéa est ainsi rédigée : « nouvellement installés dans la profession. »

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Victorin Lurel.

M. Victorin Lurel. L'article 5 doit favoriser le renouvellement des générations d'agriculteurs. En effet, notre agriculture a beaucoup vieilli, puisque c'est au sein de cette profession que l'on trouve les travailleurs les plus âgés de France.

L'article 5, tel qu'il est rédigé, va dans le bon sens, mais je suggère d'aller plus loin. Aux termes de cet article, les nouveaux exploitants agricoles âgés de 18 à 40 ans peuvent bénéficier d'un cumul d'exonérations de cotisations sociales. Je considère que cela devrait également s'appliquer aux agriculteurs de plus de 40 ans, qui représentent un tiers de nouveaux installés. D'ailleurs, 9 % de ces derniers sont en reconversion professionnelle ; elles ne sont donc pas issues du monde agricole.

Si nous refusons le bénéfice de ce dispositif aux individus de plus de 40 ans, il est certain que nous aurons du mal à renouveler les générations d'agriculteurs et à assurer la transmission des exploitations.

J'ignore ce que coûterait une telle extension au-delà de 40 ans, mais le coût de l'extension du dispositif TO-DE s'élevait, pour les entreprises forestières – amendement rejeté par la Haute Assemblée –, à 80 millions d'euros et pour les Cuma à 6 millions d'euros.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L'article 5 permet de cumuler l'exonération applicable aux agriculteurs dont l'âge est compris entre 18 et 40 ans – ce n'est déjà pas si mal – et les taux réduits de droit commun des cotisations reversées aux branches maladie et famille. Il s'agit là d'une réelle avancée.

Au travers de votre amendement, monsieur Lurel, vous proposez d'étendre le dispositif à tous les nouveaux agriculteurs, y compris ceux de plus de 40 ans.

Or, à l'heure actuelle, le dispositif concerne déjà 47 000 jeunes agriculteurs. L'élargir induirait une perte de recettes de l'ordre de 20 millions d'euros.

J'ajoute que l'ouverture de cette exonération à tous les nouveaux installés pourrait entraîner un effet d'aubaine. Des individus seraient susceptibles de s'installer comme agriculteurs uniquement pour bénéficier de l'ensemble de ces exonérations, alors que ce qui nous importe à tous, c'est le renouvellement des générations d'exploitants.

En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Il y a deux sujets : inciter au rajeunissement de la profession, objectif visé au travers de cet amendement, et amener plus de personnes à vouloir s'installer comme agriculteurs. Je pense qu'il ne faut pas confondre les deux.

L'incitation au rajeunissement, telle qu'elle figure dans l'article, a été évoquée par la rapporteure générale.

J'ajoute que l'aide à la création ou à la reprise d'une entreprise (Acre) s'applique aux agriculteurs et permet une exonération totale des cotisations reversées aux branches maladie, famille et retraite lorsque les revenus annuels sont inférieurs à 35 000 euros. Les nouveaux installés auxquels vous faites référence acquittent donc, en début d'activité, des montants de cotisations sociales déjà très faibles.

Pour l'ensemble de ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 333 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 5.

(L'article 5 est adopté.)

Après l'article 5

Mme la présidente. L'amendement n° 233 rectifié, présenté par MM. Pla, Bouad et Bourgi, Mmes Carlotti, Conconne et Conway-Mouret et MM. Michau, Stanzione et Vayssouze-Faure, est ainsi libellé :

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après l'article L. 241-13 du code de sécurité sociale, il est inséré un article L. 241-13-… ainsi rédigé :

« Art. L. 241-13-… – I. – Les cotisations à la charge de l'employeur dues au titre des assurances sociales et des allocations familiales, les cotisations dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, mentionnées à l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, à l'exception des cotisations à la charge de l'employeur dues au titre des régimes de retraite complémentaire légalement obligatoires, qui sont assises sur des gains et rémunérations tels que définis à l'article L. 242-1 du même code ou à l'article L. 741-10 du code rural et de la pêche maritime, font l'objet d'une exonération totale ou partielle dans les conditions prévues au II du présent article.

« II. – Cette exonération est assise au titre de l'année 2024 sur les revenus d'activité versés aux salariés mentionnés au 1° et du 6° au 10° de l'article L. 722-20 du code rural et de la pêche maritime exerçant leur activité principale dans le secteur culture de la vigne.

« Elle est appliquée sur le montant de cotisations et contributions sociales mentionnées au présent I restant dues après application de la réduction prévue au I de l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale ou de toute autre exonération de cotisations sociales ou de taux spécifiques, d'assiettes et de montants forfaitaires de cotisations, à hauteur de :

« a) 100 % pour les entreprises qui ont constaté une baisse de chiffre d'affaires en 2024 d'au moins 60 % par rapport à l'année précédente ;

« b) 50 % pour les entreprises qui ont constaté une baisse de chiffre d'affaires en 2024 d'au moins 40 % par rapport à l'année précédente ;

« c) 25 % pour les entreprises qui ont constaté une baisse de chiffre d'affaires en 2024 d'au moins 20 % par rapport à l'année précédente.

« Une remise peut être accordée par le directeur de l'organisme de recouvrement dont relèvent les travailleurs à ceux des employeurs dont l'activité a été réduite au cours de la période d'activité par rapport à la même période de l'année précédente et qui ne peuvent pas bénéficier du présent dispositif d'exonération. Le niveau de la remise ne peut excéder le sixième des sommes dues au titre de l'année 2024.

« III. – Les conditions de la mise en œuvre du présent article sont fixées par décret. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Sebastien Pla.

M. Sebastien Pla. Cet amendement fait écho aux propositions d'accompagnement de la filière viticole qu'a émises la ministre de l'agriculture il y a une quinzaine de jours, dans le département dont je suis élu, l'Aude. Elle proposait d'allouer une enveloppe de 20 millions d'euros destinée au financement de la MSA pour compenser les exonérations de charges exceptionnelles des exploitants victimes d'aléas climatiques.

Le secteur viticole, victime du changement climatique et des aléas géopolitiques, est en train de dévisser. La profession projette ainsi de détruire près de 30 000 hectares de vigne, représentant une valeur de 300 millions d'euros, ce qui entraînera une perte de recettes fiscales de 40 millions d'euros l'année prochaine. La filière viticole, affaiblie, aura quelques difficultés à s'en remettre.

Dans ce contexte, le présent amendement, que nous avions déjà voté l'année dernière, vise à permettre, en fonction des pertes subies au cours de l'année 2024, une exonération des cotisations sociales patronales sur l'année 2025.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je vous remercie de mettre en lumière les difficultés que connaît le monde viticole, mon cher collègue. Nous sommes tous concernés par les difficultés économiques que subissent certaines exploitations, accentuées par les événements climatiques d'ampleur qui ont dévasté, au cours des derniers mois, certaines terres viticoles. Je vous rejoins donc sur ce point, la filière se trouve aujourd'hui en grande difficulté, de manière contrastée selon les territoires.

Toutefois, je m'interroge sur la pertinence d'une exonération de cotisations sociales pour venir en aide à ces entreprises. Il me semble que c'est à l'État, et non à la sécurité sociale, d'intervenir par des mesures de nature économique, notamment en cas de catastrophe naturelle.

En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 233 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 234 rectifié, présenté par MM. Pla, Bouad et Bourgi, Mmes Carlotti, Conconne et Conway-Mouret et MM. Michau, Stanzione et Vayssouze-Faure, est ainsi libellé :

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Les cotisations dues au titre des prestations familiales, des accidents du travail et des maladies professionnelles, de l'assurance maladie, invalidité et maternité, de l'assurance vieillesse par les travailleurs relevant du régime de protection sociale défini à l'article L. 722-8 du code rural et de la pêche maritime, font l'objet d'une exonération totale ou partielle dans les conditions prévues au II du présent article.

II. – Cette exonération est accordée aux travailleurs non salariés agricoles mentionnés au 1° de l'article L. 722-1 du même code qui exercent leur activité principale dans le secteur culture de la vigne.

Cette exonération est appliquée à hauteur de :

1° 100 % pour les entreprises qui ont constaté une baisse de chiffre d'affaires en 2024 d'au moins 60 % par rapport à l'année précédente ;

2° 50 % pour les entreprises qui ont constaté une baisse de chiffre d'affaires en 2024 d'au moins 40 % par rapport à l'année précédente ;

3° 25 % pour les entreprises qui ont constaté une baisse de chiffre d'affaires en 2024 d'au moins 20 % par rapport à l'année précédente.

Les travailleurs non salariés agricoles mentionnés au 1° de l'article L. 722-1 dudit code qui ne bénéficient pas du présent dispositif d'exonération peuvent demander à bénéficier d'une remise partielle des dettes de cotisations et contributions mentionnées au I du présent article constituées au titre de l'année 2024 ou d'un échéancier de règlement sur trente-six mois. Le niveau de la remise ne peut excéder le sixième des sommes dues au titre de l'année 2024.

III. – Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret.

IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Sebastien Pla.

M. Sebastien Pla. Il s'agit du même dispositif, mais pour les travailleurs non salariés agricoles, qui sont les plus touchés, puisqu'ils sont cotisants solidaires.

Je souhaite répondre aux propositions formulées par la rapporteure générale consistant à financer l'aide aux agriculteurs par un autre biais. L'enveloppe de 20 millions d'euros qui est prévue sera à la main de la MSA, à laquelle sont versées les cotisations sociales acquittées par les professions agricoles. Par conséquent, c'est bien le budget général qui finance indirectement la sécurité sociale, via des mesures exceptionnelles. Or, pour financer ces exonérations, il faut à la MSA non pas 20 millions mais 40 millions d'euros. Il manque donc 20 millions d'euros, aux dires mêmes des responsables nationaux de la MSA, au regard de l'ampleur des pertes agricoles dans tous les secteurs d'activité, en particulier la viticulture.

Nous aurons l'occasion d'en reparler lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2025.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 234 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements identiques.

L'amendement n° 8 rectifié quater est présenté par M. Parigi, Mme Billon, M. Fargeot, Mmes N. Goulet et de La Provôté, MM. Laugier, Levi, Longeot et Menonville, Mme Patru, M. Duffourg et Mmes O. Richard et Antoine.

L'amendement n° 334 rectifié est présenté par MM. Lurel et Tissot, Mmes Conconne et Bélim, M. Fagnen, Mme G. Jourda et M. Stanzione.

L'amendement n° 367 rectifié bis est présenté par M. Michau, Mme Artigalas, M. Bouad, Mme Conway-Mouret, MM. Montaugé et Pla, Mme Poumirol, MM. Uzenat, Vayssouze-Faure, M. Weber, Redon-Sarrazy et Gillé, Mme Monier et MM. Bourgi, Chaillou et Mérillou.

L'amendement n° 1266 rectifié est présenté par Mme Nadille, MM. Lemoyne et Omar Oili, Mme Perrot, MM. Buis, Buval et Théophile, Mmes Schillinger, Ramia et Duranton et M. Fouassin.

Ces quatre amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – La sous-section 1 de la section 2 du chapitre Ier du titre III du livre VII du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 731-13-… ainsi rédigé : 

« Art. L. 731-13-… – Les personnes non salariées agricoles confrontées à des pertes d'activité liées à la fièvre catarrhale ovine sont exonérées des cotisations sociales mentionnées à l'article L. 731-10 dues au titre des rémunérations dues au titre de l'année 2024.

« Un décret détermine les conditions d'application et d'éligibilité de la présente exonération. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Paul Toussaint Parigi, pour présenter l'amendement n° 8 rectifié quater.

M. Paul Toussaint Parigi. À l'heure où l'agriculture souffre de nombreux maux, notamment de l'épidémie de fièvre catarrhale ovine (FCO), nous proposons une exonération temporaire de cotisations sociales, au titre des rémunérations perçues en 2024, pour les non-salariés agricoles qui s'en trouveraient affectés. Le présent amendement vise ainsi à compléter le dispositif annoncé récemment par le Gouvernement et à renforcer la réponse à une situation critique.

Les pertes financières sont considérables dans les élevages ovins qui, dans certaines régions, dont la Corse, représentent une activité essentielle pour l'économie locale. En exonérant nos agriculteurs des cotisations sociales, nous leur offrons un répit crucial, une bouffée d'air, alors que les charges s'accumulent et que la mortalité des animaux et la baisse de la production compromettent leur avenir.

C'est donc une mesure de solidarité, de protection et de soutien envers nos agriculteurs que je vous soumets ici.

Mme la présidente. La parole est à M. Victorin Lurel, pour présenter l'amendement n° 334 rectifié.

M. Victorin Lurel. Au travers de cet amendement, qui est identique, nous proposons une exonération temporaire de cotisations sociales. Il faut se mobiliser de toute urgence en faveur des éleveurs concernés et mieux prendre en compte leurs pertes financières importantes, notamment en Corse.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, pour présenter l'amendement n° 367 rectifié bis.

Mme la présidente. La parole est à Mme Solanges Nadille, pour présenter l'amendement n° 1266 rectifié.

Mme Solanges Nadille. Cet amendement vise à exonérer de cotisations sociales, de manière temporaire, les producteurs agricoles touchés par la crise de la filière de la canne à sucre. Cette exonération s'apparente à une aide exceptionnelle, qui ne s'appliquerait que pour les rémunérations de l'année 2024.

Je le rappelle, aux Antilles et à La Réunion, la filière de la canne à sucre est particulièrement importante d'un point de vue économique et culturel. Or elle subit une crise sans précédent depuis quelques années. Chaque récolte de la canne suscite en effet de nombreux blocages, des manifestations d'agriculteurs, de transporteurs ou de coupeurs de canne, signe de la crise permanente qui frappe cette filière moribonde.

En Guadeloupe, par exemple, le début de la campagne sucrière en 2024 a été marqué par une mobilisation massive des planteurs de canne pendant deux mois, afin d'obtenir une revalorisation du prix de la tonne. À l'appui de cet amendement, je signale qu'un rapport a été soumis au ministre de l'agriculture, notamment pour réviser ce prix. Nous attendons de nouveaux modes de fixation des prix, qui permettront enfin aux planteurs de canne de vivre dignement de leur travail. Les conditions d'éligibilité et d'application de cette mesure sont renvoyées à un décret.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je remercie nos collègues d'avoir déposé ces amendements identiques, qui mettent en relief les difficultés rencontrées par une autre branche, l'élevage, avec l'épizootie de FCO. Il s'agit d'un problème difficile à surmonter, sur le plan tant économique qu'humain. Je salue également notre collègue Nadille, qui nous a fait part de la situation actuelle de la production de canne à sucre.

Sachez que l'État vient souvent au secours des exploitations agricoles touchées par des difficultés énoncées, comme en cas d'événement climatique extrême. Encore une fois, c'est non pas à la sécurité sociale mais à l'État qu'il revient d'intervenir. Mme la ministre pourra sans doute préciser les mesures mises en place pour lutter contre la FCO et pour aider la filière de la canne à sucre. On ne peut pas demander aux caisses de sécurité sociale, qui sont déjà en grande difficulté, de remédier à ces problèmes. Quelque temporaires ou exceptionnelles qu'elles soient, de telles mesures entraîneraient une diminution des ressources dont dispose la sécurité sociale.

Tout à l'heure, on évoquait les accords conclus avec la MSA, dont j'aimerais d'ailleurs connaître la teneur. Il est vrai que, de temps en temps, lors de crises particulières, la MSA assure un accompagnement, via des dispositifs d'aide spécifique.

M. Victorin Lurel. Ce n'est pas suffisant !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Toutefois, ses caisses ne sont pas très riches ; je pense donc que ces dispositifs n'auront qu'un temps. (M. Victorin Lurel acquiesce.)

Par ailleurs, l'État accorde également des délais supplémentaires pour le règlement des cotisations, pour aider l'ensemble de ces filières.

La commission a donc émis un avis défavorable sur ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Mme la rapporteure générale a raison, ce n'est ni à la sécurité sociale ni à la MSA de remédier à la question de la FCO. Il existe en effet déjà des échéanciers de paiement de cotisations.

La question est de savoir ce que peut faire l'État. Le Gouvernement a déjà déployé un certain nombre de mesures pour venir en aide aux éleveurs qui sont touchés par cette épizootie. Je pense à la vaccination gratuite, mais aussi à la reconnaissance de la force majeure, afin que, dans le cadre de la campagne pour les aides allouées au titre de la politique agricole commune (PAC) pour 2025, les éleveurs ne subissent pas de réfaction sur leurs aides.

Mme la ministre Annie Genevard a en outre annoncé, le 14 novembre dernier, le lancement d'un dispositif exceptionnel de soutien à la trésorerie des agriculteurs, afin de remédier à leurs difficultés conjoncturelles dues à des aléas climatiques ou sanitaires. Cette aide prend la forme de prêts à moyen terme ou de consolidation. La ministre et la profession ont procédé à des échanges à la suite de son déplacement dans l'Aude.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Ce n'est en effet pas le bon levier.

Tout d'abord, les exonérations de cotisations sociales, à l'exception d'un montant de 3 milliards d'euros, sont compensées par le budget de l'État. Dans ces conditions, ce dernier a plus intérêt à agir directement pour aider les agriculteurs à faire face à ces incidents.

Ensuite, je rappelle que sans cotisation, il n'y a pas de droits contributifs. Certes, dans un premier temps, ils ne les verseront pas, mais les cotisations sont avant tout un salaire, non pas différé, mais socialisé, c'est une partie de la rémunération !

Le bon levier est donc l'action de l'État, qui assume de toute façon toujours le coût des exonérations compensées, et qui permet de préserver les droits contributifs des agriculteurs.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Pour ma part, je voterai l'amendement de M. Parigi, parce que la FCO est une véritable catastrophe pour les ovins, en Corse, mais aussi dans beaucoup d'autres départements. Nous importons actuellement nombre d'ovins en raison d'un cheptel insuffisant, qui est décimé. La FCO entraîne un préjudice parmi les bovins, mais c'est encore pire pour les ovins : la moitié des animaux touchés décèdent.

Certes, j'entends les propos de Mme la rapporteure générale, ce n'est sans doute pas à la sécurité sociale de contribuer, mais la MSA pourrait intervenir, avant d'être compensée dans un second temps. Car, ne l'oublions pas, l'État a été très en retard pour fournir des vaccins !

M. Daniel Chasseing. C'est incroyable : on a annoncé l'arrivée des vaccins pendant tout l'été, mais rien n'a suivi, d'où cette catastrophe.

Mme la présidente. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. Je suis profondément convaincu qu'il faut une aide urgente, mais je souscris aux observations de Mme la ministre et de notre collègue Poncet Monge : ce n'est pas à la sécurité sociale de fournir cette aide.

En revanche, au-delà des observations, je souhaite que l'État prenne de nouveaux engagements en faveur des exploitants, qui connaissent de graves difficultés.

Je retire mon amendement.

Mme la présidente. L'amendement n° 334 rectifié est retiré.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous sommes tous interpellés, dans nos départements, par les agriculteurs. Beaucoup d'entre nous avons adressé des questions écrites au Gouvernement au sujet de la fièvre catarrhale. Selon moi, le soutien du Gouvernement et de l'État doit être beaucoup plus fort.

Je pense, moi aussi, que ce n'est pas à la sécurité sociale de supporter des exonérations pour aider les agriculteurs à faire face à leurs difficultés. Je le rappelle, nous avons, à plusieurs reprises, dénoncé la prise en charge complète de la crise covid par le budget de la sécurité sociale, alors que cela aurait dû relever de l'État.

Nous ne voterons pas ces amendements, car c'est à l'État d'agir, madame la ministre, d'agir beaucoup plus pour ceux qui sont en difficulté.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, pour explication de vote.

M. Jean-Jacques Michau. J'entends ces propositions d'aide, mais je vous intime l'ordre d'aider le monde agricole et les éleveurs, de la manière que vous voudrez ! Je sais bien qu'il ne faut pas déshabiller la sécurité sociale, mais il ne faut pas non plus tuer les agriculteurs. Je vous en conjure : faites le nécessaire !

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.

M. Laurent Duplomb. Je n'ai pas pour habitude de faire le service après-vente du Gouvernement, mais sur la fièvre catarrhale, je veux tout de même recentrer le débat.

La ministre de l'agriculture a annoncé, au sommet de l'élevage, le déblocage d'un montant de 75 millions d'euros pour prendre en compte la FCO de sérotype 3 pour tous les cheptels, ovins comme bovins. Je vous le rappelle, les agriculteurs cotisent au fonds national agricole de mutualisation du risque sanitaire et environnemental (FMSE), qui prend en charge les indemnités compensant les pertes liées à des problèmes sanitaires.

La ministre vient par ailleurs d'annoncer, le 4 novembre, devant la commission des affaires économiques du Sénat, la possibilité d'employer ces 75 millions d'euros pour couvrir également la FCO de sérotype 8, jusqu'alors exclue du dispositif, pour les ovins. Ainsi, pour les ovins, les sérotypes 3, venant du nord, qui est émergent, et 8, que nous connaissons en France depuis 2007, sont couverts en totalité par ces 75 millions d'euros, de même que les bovins touchés par le sérotype 3. Quant au FMSE, alimenté par les contributions des agriculteurs et soutenu par l'État à hauteur de 65 %, il prendra en charge le sérotype 8 pour les bovins.

Franchement, dans ces conditions, dire que le Gouvernement n'en fait pas assez me paraît excessif. Je ne dis pas qu'il en fait trop, mais il a embrassé la problématique de la FCO et l'a traitée en élargissant du dispositif.

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !

M. Laurent Duplomb. Rendons à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ! Cette ouverture, selon moi, réglera le problème.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 8 rectifié quater, 367 rectifié bis et 1266 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L'amendement n° 1214, présenté par Mme Espagnac, est ainsi libellé :

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – La sous-section 1 de la section 2 du chapitre Ier du titre III du livre VII du code rural et de la pêche maritime est complété par un article L. 731-13-… ainsi rédigé :

« Art. L. 731-13-… – Les personnes non salariées des professions agricoles bénéficient d'une exonération des cotisations d'assurance maladie, invalidité et maternité et des cotisations de prestations familiales et d'assurance vieillesse agricole pour leurs revenus issus des activités de location de meublés de tourisme au sens de l'article L. 324-1-1 du code du tourisme et soumises au régime défini à l'article 50-0 du code général des impôts.

« Un décret détermine les conditions d'application et d'éligibilité de la présente exonération ».

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Frédérique Espagnac.

Mme Frédérique Espagnac. La récente adoption de la proposition de loi visant à renforcer les outils de régulation des meublés de tourisme à l'échelle locale a contribué à réduire l'avantage fiscal prévu pour le régime micro-BIC (bénéfices industriels et commerciaux), dans le but louable d'aligner les avantages fiscaux des locations de courte et de longue durées.

Les activités d'hébergement touristique en gîtes ruraux sont malheureusement concernées par cet abaissement de l'abattement fiscal de 71 % à 50 %, et l'abattement supplémentaire dont bénéficiaient jusqu'à présent les gîtes ruraux a été supprimé, malgré mes efforts en commission mixte paritaire.

Du fait de ces modifications, les agriculteurs qui exercent à titre complémentaire une activité de location de gîte rural vont se retrouver assujettis à un taux de cotisations sociales plus élevé.

Pour ne pas fragiliser l'activité touristique des territoires ruraux et surtout pour maintenir des revenus décents à nos agriculteurs, cet amendement tend à exonérer de cotisations sociales les revenus qu'ils tirent des activités de location des gîtes ruraux, lorsque les revenus générés bénéficient de l'abattement fiscal en micro-BIC prévu à l'article 50-0 du code général des impôts.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je remercie notre collègue de soulever ce problème, qui m'a moi-même interpellée et qui est né de la proposition de loi sur la location des meublés.

Il ne s'agit pas de remettre en cause ce texte, car nous savons bien que des zones touristiques sont saturées par les meublés ; ne touchons à la loi que d'une main tremblante, selon l'adage, car, en effet, surviennent parfois des effets de bord inattendus. En l'espèce, cette activité peut constituer un revenu supplémentaire pour les agriculteurs, mais s'ils sont taxés davantage, ils pourraient se détourner de ce choix.

N'ayant pu en évaluer la dimension juridique, je me tourne vers Mme la ministre pour demander l'avis du Gouvernement : cet amendement corrigerait-il les conséquences de la proposition de loi que nous avons récemment adoptée ?

Mme la présidente. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. La location diversifie les revenus des agriculteurs qui investissent dans des meublés de tourisme, ce qui leur permet de s'assurer un complément de ressources et de contrebalancer la variabilité des recettes liées aux productions agricoles. Dès lors, ces revenus sont partie intégrante des produits de l'exploitation et doivent, à ce titre, être soumis aux cotisations et contributions sociales.

Exonérer ces revenus uniquement lorsqu'ils sont perçus par des exploitants agricoles entraînerait une différence de traitement injustifiée par rapport aux autres travailleurs indépendants.

Je suis donc défavorable à votre amendement.

Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour explication de vote.

Mme Frédérique Espagnac. Tout d'abord, ces compléments de revenu bénéficient souvent aux femmes des agriculteurs présentes sur les exploitations.

Ensuite, avec un abaissement de l'abattement fiscal de 71 % à 50 %, ces revenus, désormais plus élevés, seront doublement pénalisés, du fait de cette réduction et de la taxation par la MSA. Ce double assujettissement n'a pas lieu d'être et crée une distorsion, d'où cet amendement.

Nous sommes quelques-uns à nous être battus, en commission mixte paritaire, pour maintenir cet avantage, et nous savons tous les effets collatéraux que cette décision aura sur nos territoires.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. J'ai bien suivi, il y a quelques mois, les débats autour de la proposition de loi mentionnée, et on voit bien qu'il y a un problème de coordination. Face à cela, il y a donc deux façons de réagir : soit on rejette l'amendement, mais alors il n'y a plus de vecteur pour continuer la discussion, soit on l'adopte et on renvoie à la commission mixte paritaire le soin de coordonner la réponse. (Mme Frédérique Espagnac acquiesce.)

Ainsi, après en avoir conféré avec la rapporteure générale, je suis en mesure d'indiquer que la commission s'en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement. Nous aurons alors la capacité, non pas de tout régler, mais d'opérer une coordination entre la proposition de loi et le PLFSS.

Il y aura là, madame la ministre, une mission à conduire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1214.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.

L'amendement n° 466 rectifié, présenté par M. Buval, Mme Ramia, M. Patient, Mme Phinera-Horth, M. Omar Oili et Mmes Duranton et Schillinger, est ainsi libellé :

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L'article L. 731-13 du code rural et de la pêche maritime est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« À titre expérimental pour une durée de cinq ans, les jeunes chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole, de moins de cinq hectares et domiciliés dans les collectivités régies par l'article 73 de la Constitution, bénéficient d'une exonération totale des cotisations d'assurance maladie, invalidité et maternité, à l'exception de la cotisation prévue pour financer les prestations mentionnées à l'article L. 732-4, et des cotisations de prestations familiales et d'assurance vieillesse agricole dont ils sont redevables pour eux-mêmes et au titre de leur exploitation ou entreprise. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Frédéric Buval.

M. Frédéric Buval. Dans un contexte particulièrement difficile pour nos agriculteurs, qui manifestent aujourd'hui sur tout le territoire pour défende le patrimoine agricole français, nos compatriotes des outre-mer seraient rassurés par l'adoption de cet amendement.

En effet, dans l'ensemble des collectivités d'outre-mer, qui sont des territoires éloignés ou insulaires, la souveraineté alimentaire est un enjeu majeur, lié à l'accompagnement des transitions écologiques et à la garantie d'un revenu décent aux agriculteurs. Or, depuis plusieurs dizaines d'années, en dépit du volontarisme des élus locaux, on assiste à une décroissance significative de la surface agricole utile en Martinique. Le nombre d'exploitations agricoles a en outre connu une baisse drastique, signe d'une concentration des terres et d'un abandon des petites exploitations.

Aussi, face à cette crise des vocations, il convient de donner un souffle nouveau à l'installation des jeunes agriculteurs, particulièrement en Martinique. En effet, les exploitations agricoles en outre-mer, en général de petite taille – cinq hectares en moyenne en Martinique –, engendrent trop peu de revenus pour inciter les jeunes générations à s'installer.

Pour renforcer la compétitivité et l'attractivité de notre agriculture, pour redonner l'envie d'entreprendre, il est donc nécessaire de simplifier le quotidien des jeunes agriculteurs et d'alléger leurs contraintes.

Tel est l'objet de cet amendement, inspiré des mesures préconisées par le syndicat des Jeunes agriculteurs, mais aussi des initiatives de la chambre d'agriculture et de la collectivité territoriale de la Martinique.

Je vous remercie, au nom des petits et les jeunes agriculteurs de la Martinique, mes chers collègues.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. L'expérimentation que vous proposez, monsieur Buval, existe déjà dans loi du 13 décembre 2000 d'orientation pour l'outre-mer, du moins pour les exploitations d'une taille inférieure à quarante hectares. Votre amendement semble donc déjà en partie satisfait, même si restent les exploitations plus grandes.

Je demande l'avis du Gouvernement sur cet amendement, mais, a priori, la commission est défavorable à cet amendement, pour cette raison.

Mme la présidente. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. C'est exact.

Vous proposez, monsieur le sénateur, une exonération de cotisations sociales, à titre expérimental, pour les jeunes chefs d'une exploitation agricole de moins de sept hectares en Martinique. Un dispositif d'exonération de trois cotisations de base – maladie, famille, vieillesse – existe déjà pour les exploitations inférieures à quarante hectares, ce qui concerne 98 % des exploitants agricoles ultramarins.

En conséquence, votre amendement doit être rejeté, car il est déjà satisfait.

Mme la présidente. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. Je comprends la réponse de la rapporteure générale et de la ministre, qui affirme que 98 % des exploitations sont éligibles, mais il convient de préciser qu'il s'agit de quarante hectares pondérés selon la spéculation pratiquée, c'est-à-dire selon l'activité.

Qu'est-ce que cela signifie ? Dans le cas de la production de bananes, par exemple, le coefficient est de quatre, ce qui signifie que dix hectares réels d'exploitation représentent quarante hectares pondérés. Certes, retenir l'hectare réel serait plus coûteux : si l'on produit des bananes, la surface considérée est multipliée par quatre et, si l'on produit des fleurs, sous ombrière ou sous serre, le coefficient est de seize ! Pour être affilié et reconnu comme agriculteur dans les outre-mer, le seuil est de deux hectares pondérés, soit d'un hectare réel de canne, par exemple.

Cela étant dit, il est vrai que l'amendement est déjà satisfait.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 466 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 1138 rectifié, présenté par MM. Montaugé, Bouad, Gillé, Roiron, M. Weber, Uzenat et Pla, Mme Harribey, MM. Redon-Sarrazy et Fagnen, Mme Artigalas, MM. Vayssouze-Faure et Stanzione, Mmes Carlotti et Monier et M. Mérillou, est ainsi libellé :

Après l'article 5

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après le V de l'article L. 741-16 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« …. – Lorsqu'elles réalisent plus de 75 % de leur chiffre d'affaires au titre d'activités issues des produits de la vigne tels qu'énumérés aux articles L. 665-1 à L. 665-9 du présent code, les sociétés coopératives agricoles définies aux articles L. 521-1 à L. 521-7 du même code bénéficient des mesures mentionnées au I du présent article. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Sebastien Pla.

M. Sebastien Pla. Cet amendement, rédigé avec mon collègue Franck Montaugé, est très attendu par la coopération agricole, en particulier par les caves coopératives. Il vise à étendre le dispositif d'exonération TO-DE aux caves et coopératives viticoles. Il s'agit donc, mutatis mutandis, de la même mesure que celle que proposait notre collègue Duplomb pour les coopératives de fruits et légumes, et que nous venons d'adopter.

Vous le savez, les vendanges durent deux à trois mois par an. Les responsables des caves coopératives ont recours à une main-d'œuvre saisonnière relativement importante aux mois d'août et de septembre, généralement, de jeunes étudiants qui viennent gagner quatre sous. Cette disposition leur permettra de consolider leur activité.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. On l'a dit précédemment : des progrès importants sont amorcés dans ce PLFSS, notamment avec la pérennisation du dispositif TO-DE, et son extension aux Cuma et même, désormais, aux coopératives de conditionnement de fruits et légumes.

Il s'agit ici de l'étendre encore davantage, d'où l'avis défavorable de la commission.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Sebastien Pla, pour explication de vote.

M. Sebastien Pla. Expliquez-moi la différence entre les coopératives fruitières et coopératives viticoles ! Ces dernières travaillent pendant deux mois et demi pour récolter les raisins, les vinifier et les transformer. Sans cette main-d'œuvre, cela ne fonctionne pas ! Ce que vous proposez est donc totalement incohérent, je suis désolé de vous le dire.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1138 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 5 bis (nouveau)

I. – Au deuxième alinéa de l'article L. 731-35 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « exerçant son activité à titre exclusif ou principal » sont supprimés.

II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Au 1° du I de l'article L. 136-3, après la référence : « 40 », sont insérés les mots : « et 42 septies » ;

2° Le I de l'article L. 136-4 est ainsi modifié :

a) Le A est complété par un 3° ainsi rédigé :

« 3° Les plus-values à court terme exonérées d'impôt sur le revenu en application des articles 151 septies et 238 quindecies du code général des impôts. » ;

b) Le premier alinéa du C est complété par les mots : « et à hauteur des rémunérations et des avantages personnels non déductibles des résultats de la société ou de la coexploitation qu'ils ont perçus ».

III. – Le VII de l'article 18 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 est ainsi modifié :

1° À la première phrase, les mots : « au titre des périodes courant à compter du 1er janvier » sont remplacés par les mots : « à compter de la régularisation prévue au troisième alinéa de l'article L. 131-6-2 du même code appliquée aux cotisations dues au titre de l'exercice » ;

2° Après la même première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il s'applique aux cotisations dues par les travailleurs indépendants mentionnés à l'article L. 613-7 dudit code au titre des périodes courant à compter du 1er janvier 2026. » ;

3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Pour le calcul des cotisations et des contributions dues au titre des années 2026 et 2027 par les travailleurs indépendants agricoles relevant du I de l'article L. 731-15 du code rural et de la pêche maritime, les caisses de mutualité sociale agricole mentionnées à l'article L. 723-1 du même code reconstituent les sommes mentionnées aux I et II de l'article L. 136-3 et aux I et II de l'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale dans leur rédaction résultant de la présente loi, à partir des revenus professionnels, déterminés en application des articles L. 731-14 à L. 731-16 du code rural et de la pêche maritime et de l'article L. 136-4 du code de la sécurité sociale dans leur rédaction antérieure à la présente loi, perçus par ces travailleurs indépendants au titre des années 2023 et 2024 et déclarés dans les conditions prévues à l'article L. 731-13- 2 du code rural et de la pêche maritime. Ces revenus sont majorés du montant des cotisations personnelles de sécurité sociale et du montant de la contribution prévue à l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale déductible de ces revenus, en application du I de l'article 154 quinquies du code général des impôts, dus par ces travailleurs indépendants agricoles au titre de chacune des années considérées. »

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, sur l'article.

Mme Annie Le Houerou. Je profite de l'examen de l'article 5 bis pour alerter le Sénat sur les exonérations d'assiette, c'est-à-dire de base, de cotisation. C'est un enjeu crucial pour le recouvrement des recettes de l'État et de la sécurité sociale, qui influe fortement sur l'équilibre budgétaire.

En effet, il existe de nombreuses exemptions d'assiette sur les cotisations sociales. Ces parts de revenu ne sont pas considérées dans le calcul des montants dus pour les cotisations et privent l'État et la sécurité sociale de recettes précieuses dans le contexte de déficit que nous connaissons.

Ces exemptions d'assiette sont motivées par la volonté de ne pas pénaliser certains secteurs ou types de revenus. Or cette disposition met à mal le principe simple de notre protection sociale, que nous défendons : un revenu crée un devoir de cotisation et ouvre un droit à la protection. Ces exemptions multiples et variées ne sont donc pas bienvenues par principe.

La diversité des formes d'exemption fait que peu d'évaluations globales ont été menées. Toutefois, le rapport Bozio-Wasmer, sur lequel le Gouvernement et la majorité sénatoriale se sont appuyés, en dresse le portrait, parlant ainsi des compléments de rémunération : « la perte d'assiette associée aux exemptions de cotisations et contributions sociales dont bénéficient ces versements est évaluée à un peu plus de 66 milliards d'euros en 2022 contre 58 milliards d'euros en 2021 ».

De plus, la prime de partage de la valeur, instaurée en 2022, a des conséquences assez analogues à celles des exemptions d'assiette, même si elle est plutôt considérée comme une exonération.

Les exemptions ont un double effet néfaste sur les finances publiques : direct, car elles ne donnent pas lieu au prélèvement de cotisations et contributions sociales, et indirect, parce qu'en réduisant le salaire pris en compte dans le calcul des exonérations, elles augmentent le taux d'exonération issu du calcul de la réduction générale et des taux réduits maladie et famille.

Mme la présidente. Il faut conclure.

Mme Annie Le Houerou. La conclusion du rapport que j'ai cité est simple : « les exonérations d'assiette ne se justifient généralement pas ».

Je souhaitais relayer ce point de vue, qui est aussi le nôtre : il faut supprimer ces exemptions d'assiette sur les cotisations sociales.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 5 bis.

(L'article 5 bis est adopté.)

Article 5 ter (nouveau)

La loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 est ainsi modifiée :

1° Après le VI de l'article 18, il est inséré un VI bis ainsi rédigé :

« VI bis. – Le II de l'article 28-1 de l'ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à l'amélioration de la santé publique, à l'assurance maladie, maternité, invalidité, décès et autonomie, au financement de la sécurité sociale à Mayotte et à la caisse de sécurité sociale de Mayotte est ainsi rédigé :

« “II. – Pour l'application du présent titre, les revenus d'activité des travailleurs indépendants non agricoles sont ceux assujettis dans les conditions prévues à l'article L. 136-3 du code de la sécurité sociale.” » ;

2° Au premier alinéa du I de l'article 26, les mots : « dix-huit mois » sont remplacés par les mots : « trois ans ».

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 672 est présenté par M. Lurel, Mmes Conconne, Bélim et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Bourgi et Ros, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Ziane et Féraud, Mme Harribey, M. Gillé, Mme Brossel, MM. Fagnen et Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Darras, Michau, Mérillou et Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Roiron, Mme Blatrix Contat, MM. Jeansannetas et Vayssouze-Faure, Mme G. Jourda, M. M. Weber, Mme Monier, MM. P. Joly, Marie, Tissot, Durain et Chaillou, Mme Artigalas, MM. Redon-Sarrazy, Ouizille, Pla, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L'amendement n° 917 est présenté par Mme Ramia.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Victorin Lurel, pour présenter l'amendement n° 672.

M. Victorin Lurel. Je persiste et je signe !

Cet article revient sur l'habilitation donnée l'an dernier au Gouvernement pour une période de dix-huit mois de légiférer par voie d'ordonnance. Si je peux accepter le 1° de l'article, qui étend à Mayotte la nouvelle assiette de la CSG pour les indépendants non agricoles, le 2° prolonge la durée de l'habilitation pour la porter à trois ans.

Mes chers collègues, je ne comprends pas que l'on délègue au Gouvernement le pouvoir du Parlement pendant trois ans, d'autant qu'il reste encore six mois à la durée initiale – les services ont déjà travaillé, je l'espère, pendant les douze mois écoulés – pour faire travailler au moins l'Igas et associer les parlementaires.

Je défendrai ultérieurement un autre amendement qui prouve que, en amont, on peut produire un travail parlementaire éclairé et de qualité. Ce n'est pas que je n'aie pas confiance dans les services des ministères, mais tout de même ! Pendant trois ans, on va concocter un texte, puis on va nous le soumettre – j'allais dire : nous le faire subir, voire nous l'infliger – et nous n'aurons alors pas le moyen de l'amender.

Je demande une étude d'impact. Nous sommes en train d'assister – du moins, me semble-t-il, car j'ai quelques soupçons – à une révolution systémique contre les exploitants agricoles et forestiers, je le dis très clairement ! Mme la ministre a affirmé hier soir que ce délai supplémentaire était nécessaire pour « articuler » les deux réformes, mais je ne sais pas ce que signifie ce mot. Vous avez parfaitement le temps, en dix-huit mois, de soumettre au Parlement un rapport en vue du PLFSS pour 2026, et la délégation sénatoriale aux outre-mer aura parfaitement le temps de fournir un travail suffisant.

Mme la présidente. L'amendement n° 917 n'est pas soutenu.

Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement tend à supprimer la transposition à Mayotte de la réforme de l'assiette sociale des travailleurs indépendants. Nous en avons déjà parlé hier : les transpositions sont la plupart du temps souhaitables et nous aspirons généralement à ce qu'elles soient rapides. Sur ce sujet particulier, en revanche, on sent plus de réserves.

Vous auriez souhaité une étude d'impact. Il est vrai que c'est généralement préférable, mais cet article est issu d'un amendement que le Gouvernement a présenté à l'Assemblée nationale.

Hier, vous avez proposé, madame la ministre, une méthode pour associer l'ensemble des élus des territoires. Je souhaite que cela puisse se faire, mais j'émets un avis défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Comme je l'ai indiqué hier, je souhaite articuler les deux discussions. C'est pourquoi le Gouvernement entend aligner le délai des deux habilitations prévues pour ces réformes importantes, afin de les coordonner au mieux.

Je me suis engagée, hier, ici même, à associer tous les parlementaires intéressés à la rédaction de ces ordonnances. Je renouvelle cet engagement. C'est pour cela que j'émets un avis défavorable sur votre amendement, monsieur Lurel.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 672.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 1187, présenté par Mme Ramia, MM. Omar Oili et Fouassin et Mmes Havet et Phinera-Horth, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

… – Avant le 1er juillet 2025, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l'état actuel de la convergence des droits sociaux à Mayotte. Ce rapport présente un état des lieux précis des régimes et dispositifs en matière de sécurité sociale, retraite légale et complémentaire par secteur incluant le régime applicable aux travailleurs indépendants non agricoles et les prestations sociales et familiales de toute nature. Le rapport remis détaille les étapes calendaires nécessaires pour procéder à une harmonisation des taux existants et rendre applicable l'ensemble des dispositions de droit commun à Mayotte dès 2027.

La parole est à M. Stéphane Fouassin.

M. Stéphane Fouassin. L'imbroglio juridique actuel rend illisible le droit social applicable à Mayotte, disséminé à travers des ordonnances, le code de la sécurité sociale applicable à Mayotte, le code de la santé publique et divers autres textes. Ce manque de clarté contribue au ralentissement de la convergence des droits sociaux à Mayotte.

Afin d'obtenir une égalité sociale réelle dès 2027, le rapport demandé au travers de cet amendement devra clarifier les écarts de taux existants et les dispositifs applicables, non applicables ou partiellement applicables, avec un calendrier concret pour parvenir à une harmonisation à l'horizon de 2027. C'est indispensable pour finaliser la départementalisation de Mayotte.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Sur les demandes de rapport, notre avis est toujours défavorable. Tous les objets ont de l'intérêt, mais les rapports demandés au Gouvernement représentent un travail colossal, car les demandes émanent de l'Assemblée nationale comme du Sénat. Il faudrait que les cabinets ministériels s'étoffent considérablement pour répondre à ces attentes.

Par ailleurs, des rapports sont régulièrement produits par la commission des affaires sociales, la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss), la Cour des comptes ou encore le Conseil économique, social et environnemental (Cese), dont le rôle, souvent remis en question, sera probablement interrogé une nouvelle fois dans le projet de loi de finances. Les inspections, également, rédigent des rapports que leur commande le Gouvernement.

Si le but est d'attirer l'attention sur cette question spécifique, sachez que j'y suis très sensible.

Cependant, mes chers collègues, vous ne serez pas étonnés de m'entendre émettre un avis défavorable sur les demandes de rapport.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Théophile, pour explication de vote.

M. Dominique Théophile. Madame la ministre, nous savons tous que 99,9 % des demandes de rapport sont refusées, mais il n'en demeure pas moins que 0,1 % d'entre elles sont acceptées.

Ainsi, j'avais moi-même fait adopter une demande de rapport, qui a conduit ensuite à la création de la faculté de médecine de plein exercice des Antilles, en Guadeloupe.

Mes chers collègues, cet amendement vise à finaliser la départementalisation de Mayotte. Ce n'est pas un enjeu de court terme. Vous évoquez la multitude d'interactions nécessaires à la production de ce rapport, mais sachez que nous ne sommes pas dans une course de vitesse.

Actuellement, l'application des dispositifs de sécurité sociale à Mayotte est un véritable désastre !

Je vous demande donc d'accepter cette demande de rapport. Revoyons néanmoins le délai de remise prévu, car il est vrai qu'il exigera un travail colossal. Seul le Gouvernement pourra le rédiger, et c'est ainsi que nous pourrons finaliser le processus de départementalisation à Mayotte.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 1187.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 5 ter.

(L'article 5 ter est adopté.)

Article 5 quater (nouveau)

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant la mise en œuvre de l'article 18 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024.

Ce rapport analyse plus largement la pertinence de définir l'assiette des cotisations sociales sur celle de la cotisation sociale généralisée, en évaluant l'impact budgétaire pour les organismes de sécurité sociale et par cas-type d'assuré.

Mme la présidente. L'amendement n° 120, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je propose de supprimer cet article, qui vise à demander un rapport…

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Cet article a été créé par un amendement adopté à l'Assemblée nationale. Il répond à une demande très forte des organisations professionnelles, notamment de l'Union des entreprises de proximité (U2P). Nous l'avons donc conservé.

Le Gouvernement s'en remet néanmoins à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote.

Mme Annie Le Houerou. Je sais que le Sénat n'aime pas les demandes de rapport. Pour autant, nous pensons que celui-ci est important. Sa logique rejoint celle que j'ai défendue au cours de mon intervention sur l'article 5 bis. Les exonérations d'assiette ne sont généralement pas justifiées et les seules exemptions totales d'assiette sont à l'origine, sur la seule année 2021, d'une perte de cotisations et de contributions de 13,24 milliards d'euros.

Dans le contexte que nous traversons, nous devrions nous pencher plus attentivement sur cette perte de recettes. En outre, comme l'a dit la ministre, cet article est soutenu par des organisations professionnelles. Créé par l'adoption d'un amendement d'un député socialiste, cet article a été repris dans le texte déposé au Sénat par le Gouvernement. Nous le soutiendrons, car il est plus qu'urgent de nous intéresser à ces exemptions.

Mme la présidente. La parole est à Mme Pascale Gruny, pour explication de vote.

Mme Pascale Gruny. Plutôt que d'alourdir les projets ou propositions de loi avec des demandes de rapport, qui sont, dans les faits, rarement produits – je le sais bien pour avoir participé au contrôle de l'application des lois –, il suffirait que Mme la ministre s'engage à faire cette analyse. Nous n'avons pas besoin d'inscrire la demande de rapport dans le projet de loi. (M. Bernard Jomier ironise.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. J'estime que ce rapport est nécessaire.

Il a fallu un rapport de la Cour des comptes pour mettre au jour la forte augmentation depuis 2018 – un doublement en fait ! – de la perte de recettes liées aux compléments de salaire, dans un ordre de grandeur comparable à celui de la hausse du déficit de la sécurité sociale.

Comme il n'est pas possible d'augmenter encore les exonérations de cotisations sociales, puisque nous avons atteint le plafond de 14 %, les cadeaux aux entreprises prennent désormais la forme d'exemptions d'assiette ! La perte de recettes qui en découle est ainsi passée de 9,9 milliards d'euros en 2018 à 19,3 milliards en 2023.

Le Gouvernement ne fait pas preuve de transparence. Il a fallu que la Cour des comptes inclue dans ses calculs la prime de partage de la valeur (PPV), qui n'apparaissait dans aucun document, pas même dans les annexes du PLFSS. Et pourtant, ce complément de salaire représente à lui seul une perte de recettes de 1,1 milliard d'euros pour la sécurité sociale !

Aussi, face à ce manque de transparence, et alors que la perte de recettes liées aux compléments de salaires a doublé entre 2018 et 2023, tandis que le déficit de la sécurité sociale augmentait fortement, ce rapport me paraît essentiel.

Mme la présidente. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. Je suis également attaché à l'inscription de ce rapport dans le PLFSS. Vous avez refusé tous nos amendements pour protéger les non-salariés agricoles (NSA) ultramarins.

Madame la ministre, je vous demande d'établir ce rapport et d'y intégrer la question des modes de calcul des cotisations des non-salariés agricoles d'outre-mer.

Nous voterons contre cet amendement de suppression.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 120.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, l'article 5 quater est supprimé.

Après l'article 5 quater

Mme la présidente. L'amendement n° 577 rectifié, présenté par MM. Gold et Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire et Grosvalet, Mmes Guillotin et Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

Après l'article 5 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 2° du III de l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « ainsi que les établissements publics de coopération intercommunale ayant pour objet l'action sociale ».

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Éric Gold.

M. Éric Gold. Cet amendement est adopté tous les ans au Sénat depuis 2021 avant d'être, chaque fois, sacrifié au cours de la navette parlementaire. Nous espérons que le nouveau gouvernement y sera plus favorable.

Notre objectif est toujours de récompenser les collectivités qui s'engagent dans l'action sociale, notamment dans le maintien des personnes à domicile.

L'amendement vise à mettre fin à une inégalité de traitement entre les services d'aide et d'accompagnement à domicile gérés par les centres intercommunaux d'action sociale (CIAS) et ceux dont la gestion relève directement des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).

Contrairement aux CIAS, les EPCI ne bénéficient pas de l'exonération de cotisations patronales de sécurité sociale sur la rémunération des aides à domicile.

Le gouvernement précédent avait à l'époque indiqué vouloir réserver l'exonération aux structures spécialisées. Nous vous proposons donc une exonération pour les EPCI ayant pour objet l'action sociale.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avec la même constance, la commission émet un avis favorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Michel Savin. Alors, le Gouvernement a-t-il changé d'avis ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. J'émets un avis défavorable, avec la même constance…

Les centres communaux ou intercommunaux sont spécialisés en matière d'aide sociale, alors que la vocation des EPCI est bien plus large. C'est la principale différence qui justifie notre position.

Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.

Mme Émilienne Poumirol. Madame la ministre, je ne comprends pas très bien votre argument. En effet, il existe aussi des syndicats intercommunaux d'action sociale (SIAS), dont c'est la seule vocation. En général, ces syndicats n'ont pas le statut de CIAS, parce que leur périmètre couvre plusieurs intercommunalités et qu'il est plus simple de procéder de la sorte.

Or la différence entre les exonérations de cotisations de ces différentes structures est incompréhensible.

Chaque année, nous déposons cet amendement pour que les EPCI, notamment les SIAS, et les CIAS soient traités de la même façon, puisque leur but est le même – faire vivre des services d'aide-ménagère à domicile et apporter des soins aux personnes âgées vulnérables. Seule leur structure juridique diffère.

Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Si l'avis de la commission est constant sur cet amendement, c'est qu'elle considère qu'il existe une véritable inégalité de traitement.

Certains EPCI disposent d'une compétence sociale, sans pour autant avoir mis en place un CIAS. Ils apportent ainsi des solutions d'accompagnement aux personnes âgées du territoire et rendent en réalité le même service.

M. Laurent Burgoa. Absolument !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. C'est cela qu'il faut prendre en compte. Or ces structures ne sont pas traitées de la même façon.

Nous devons nous montrer attentifs sur ce point, car tous les territoires ne vont pas mettre en place demain un CIAS. C'est en effet un engagement très lourd, et dans un contexte de forte contrainte budgétaire, il est peu probable que de nombreuses structures de ce type voient le jour rapidement.

Je souhaiterais donc que les EPCI soient traités de la même façon que les CIAS, lorsqu'ils exercent les mêmes missions. La population concernée s'accroît, les besoins sont immenses et, au fond, peu importe l'instance qui organise leur accompagnement. En tout cas, nous ne pouvons pas mettre des boulets aux pieds des EPCI !

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Il est difficilement acceptable que le vote répété du Sénat soit systématiquement battu en brèche d'autant qu'il s'agit d'un sujet d'importance, qui concerne un nombre croissant de personnes et de territoires fragiles.

Je peux éventuellement comprendre que votre position n'évolue pas, madame la ministre, mais vous devez prendre en compte le fait que la situation est de plus en plus difficile pour les territoires et les publics concernés. N'y voyez pas une forme d'obstination de notre part ! Si le Sénat vote systématiquement cette mesure, c'est parce que nous avons des raisons de le faire.

Il est grand temps que cette disposition soit conservée dans le texte final élaboré par la commission mixte paritaire.

Mme la présidente. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.

Mme Véronique Guillotin. Je voterai bien entendu l'amendement de mon collègue Éric Gold, mais j'en profite pour adresser un appel solennel au Gouvernement.

Nous savons que les besoins en soins à domicile vont fortement progresser en raison du vieillissement de la population. Nous ne parlons que de cela depuis le début de l'examen de ce texte !

Cette mesure n'est pas très onéreuse : que l'accompagnement soit pris en charge par un EPCI ou un CIAS ne change pas grand-chose. C'est surtout une question d'équité, comme la rapporteure générale l'a dit. Il s'agit de permettre aux EPCI qui prennent en charge cette compétence d'accéder aux mêmes facilités que celles dont disposent les CCAS ou les CIAS.

Je voterai donc pour cet amendement et j'appelle l'ensemble de mes collègues à en faire de même.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Je partage l'avis de Mme Guillotin. À l'avenir, nous aurons besoin de beaucoup plus de personnel à domicile. Cela soulèvera des questions de financement et de gestion.

Nous comprenons donc mal la position du Gouvernement. Cet amendement est tout à fait positif. Pourquoi un CIAS et un EPCI n'auraient-ils pas droit aux mêmes exonérations, alors qu'ils exercent la même compétence ?

La mesure proposée par M. Gold me paraît donc bien à propos.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 577 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5 quater. (Applaudissements.)

L'amendement n° 933 rectifié, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, est ainsi libellé :

Après l'article 5 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 241-2 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« Art. L. 241-2. – I. – Les ressources des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont également constituées par des cotisations assises sur :

« 1° Les avantages de retraite, soit qu'ils aient été financés en tout ou partie par une contribution de l'employeur, soit qu'ils aient donné lieu à rachat de cotisations ainsi que les avantages de retraite versés au titre des articles L. 381-1 et L. 742-1, à l'exclusion des bonifications ou majorations pour enfants autres que les annuités supplémentaires ;

« 2° Les allocations et revenus de remplacement mentionnés à l'article L. 131-2 ;

« 3° Le produit de la contribution additionnelle à la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés, prévue par l'article L. 245-13 ;

« 4° Le produit de la contribution mentionnée à l'article L. 137-15.

« Des cotisations forfaitaires peuvent être fixées par arrêté ministériel pour certaines catégories de travailleurs salariés ou assimilés.

« Les cotisations dues au titre des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont à la charge des employeurs et des travailleurs salariés et personnes assimilées ainsi que des titulaires des avantages de retraite et des allocations et revenus de remplacement mentionnés aux 1° et 2° du présent I.

« II. – Les ressources des assurances maladie, maternité, invalidité et décès sont en outre constituées par une fraction égale à 38,81 % de l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services. »

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Par cet amendement, je vous propose d'apporter des recettes à la sécurité sociale – et pas des moindres ! (Ah ! sur des travées du groupe Les Républicains.)

Depuis hier, on entend chacun insister sur l'importance de la solidarité partagée. C'est précisément l'objet de mon amendement qui vise à rétablir l'intégralité des cotisations patronales supprimées à la suite de la mise en place du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE).

Voté en 2012 dans le sillage de la crise financière de 2008, le CICE a été créé dans le but de réduire le niveau global du coût du travail. Entre 2013 et 2017, ce crédit a représenté un coût de 90 milliards d'euros pour les finances publiques. Il aurait permis de créer entre 50 000 et 100 000 emplois, soit un coût extrêmement élevé par emploi…

Depuis 2019, le CICE a été transformé en exonération pérenne de cotisations sociales pour les entreprises, sans aucune condition. Ce dispositif a surtout servi à accroître les bénéfices et les disponibilités en trésorerie des grandes entreprises. Pire, il a contribué à aggraver la situation des comptes sociaux, puisqu'il représentera, en 2025, une perte de recettes de 37 milliards d'euros pour l'État et la sécurité sociale.

Il est temps de mettre fin à cette gabegie. Tel est le sens du présent amendement. Je ne doute pas que vous l'adopterez, puisque cela contribuera à renflouer les caisses de la sécurité sociale ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je salue la constance de nos collègues communistes. Cela fait en effet trois ans que vous déposez cet amendement, sur lequel la commission a toujours émis un avis défavorable.

Je reconnais néanmoins l'attention que vous consacrez à la question du financement de la sécurité sociale et il est vrai que l'adoption de cet amendement permettrait de lui apporter des recettes considérables.

Je salue votre constance d'autant qu'il est important que nous ayons un débat sur les ressources de la sécurité sociale, mais vous ne serez pas étonnés que je m'oppose à cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Mon avis est bien entendu défavorable. Pour que la sécurité sociale touche les recettes issues des cotisations, encore faut-il qu'il y ait de l'activité économique !

Le CICE, qui a été adopté dans les années 2010 sur l'initiative d'un gouvernement de gauche, participe de la nécessaire action que nous devons avoir dans notre pays sur le coût du travail pour développer l'emploi industriel, qualifié ou non, dans un objectif de compétitivité.

Nous débattrons par ailleurs de la question des allégements généraux de cotisations dans le cadre de l'article 6 de ce texte.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Le problème, madame la ministre, c'est que les économistes libéraux, qui ont autrefois soutenu le CICE, reconnaissent aujourd'hui que c'était une erreur.

L'instauration du CICE avait été assortie de la promesse de créer 1 million d'emplois industriels. On sait bien ce qu'il en a été dans les faits…

Surtout, les réductions d'impôts de production qui ont été décidées ces dernières années ont exactement le même objet que le CICE, à savoir faciliter l'emploi industriel. Si nous nous retrouvons finalement avec deux dispositifs, c'est bien parce que le premier est inefficace.

J'espère que Gilbert Cette ne sera pas renvoyé du Conseil d'orientation des retraites (COR), qu'il préside, pour les propos qu'il a tenus lors de son audition par la commission des affaires sociales. Il a en effet reconnu qu'au fond le CICE n'était ni pertinent ni efficace. Or ce crédit d'impôt représente, au total, une dépense de 90 milliards d'euros, alors même qu'il fait doublon avec la baisse des impôts de production !

Le président du COR le dit lui-même – la rapporteure générale pourra confirmer ses propos – et sa parole devrait avoir un certain poids.

Le CICE n'aurait permis la création que de 100 000 emplois : ce n'est pas très rentable ! Dans tous les cas, nous sommes bien loin du « 1 million d'emplois » qui figurait sur le pin's de l'ancien président du Mouvement des entreprises de France (Medef)…

La baisse des impôts de production représente de son côté une dépense de plusieurs dizaines de milliards d'euros, sans davantage de succès.

Je suis donc tout à fait favorable à la suppression du CICE.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Nous n'allons pas voter l'amendement de nos collègues communistes, mais nous voulons les remercier, davantage que de leur constance, comme le saluait à juste titre la rapporteure générale, d'avoir ouvert le débat sur les recettes et les exonérations. Sans cela, le gouvernement de Michel Barnier n'aurait sans doute pas ouvert ce dossier.

Sans anticiper sur le débat que nous aurons dans quelques minutes sur l'article 6, je veux déjà dire que différents rapports estiment qu'une partie des 90 milliards d'euros de dépenses que représente le CICE est sans effet sur l'emploi. Nous devons donc procéder à un travail d'évaluation du dispositif, comme la Mecss a commencé à le faire. Plutôt que de procéder ainsi, une série d'amendements seront défendus pour supprimer complètement l'article 6, par des sénateurs qui refusent d'entendre que la question des recettes et donc des exonérations doit être posée.

Les exonérations de cotisations sociales représentent une perte de recettes pour la sécurité sociale. En contrepartie, elles doivent avoir une véritable utilité. Et si elles n'en ont pas, supprimons-les !

Nos collègues communistes ont le mérite de promouvoir ce débat, avec une grande détermination, depuis des années. Pour notre part, nous ne souhaitons pas tirer un trait sur les 37 milliards d'euros du CICE, mais nous saluons leur constance.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.

M. Daniel Chasseing. Le CICE, qui a été créé pendant le mandat du président François Hollande, relevait sans doute du bon sens corrézien !

Certes, dans les premières années, le CICE n'a pas entraîné de créations d'emploi. Cependant, entre 2018 et 2024, le nombre d'entreprises créées a été en nette hausse, après une forte diminution entre 2012 et 2017.

Le CICE, qui a ensuite été transformé en une diminution des charges sociales, s'inscrit dans le cadre d'une politique de l'offre, qui était nécessaire, parce que le coût moyen de l'heure de travail était bien plus élevé en France qu'en Allemagne et que dans l'ensemble des autres pays développés.

Ce dispositif, en particulier depuis sa transformation, a permis de créer des entreprises et de renforcer l'emploi. Plus d'1 million d'emplois ont ainsi été créés et nous devons poursuivre cette politique de l'offre.

Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour explication de vote.

Mme Michelle Gréaume. C'est bien de la sécurité sociale dont il est question ici. Or nous risquons de perdre ce système de protection, car les recettes sont de moins en moins importantes.

C'est vrai : les communistes répètent constamment qu'il faut taxer les plus gros profits et arrêter de distribuer des exonérations, parce que, sans recettes, nous finirons par mourir !

Les entreprises profitent des exonérations sur les bas salaires, et cela a pour conséquence de tirer les salaires vers le bas ! Il faut s'en rendre compte.

Quand on s'attaque aux allocations chômage, quand on repousse l'âge de départ à la retraite, les gens basculent au RSA. Et tout cela représente, à la fin, de nouvelles dépenses. Au lieu d'augmenter ainsi les dépenses, préoccupons-nous des recettes.

Beaucoup de salariés français ne partent même plus en vacances ! Nous devons tous en prendre conscience. Voilà pourquoi il faut faire attention aux exonérations.

Mme la présidente. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.

Mme Céline Brulin. Nombre de mes collègues sont revenus sur l'efficacité toute relative du CICE, que certains vont jusqu'à qualifier d'échec. Il y a un débat, mais convenons que les créations d'emplois n'ont pas été au rendez-vous – ceux qui faisaient partie des plus convaincus le reconnaissent eux-mêmes.

Par ailleurs, de nombreuses autres aides publiques ont été mises en place. Je pense par exemple à la suppression ou à la baisse des impôts de production. On pourrait aussi évoquer l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (Arenh), pour ce qui concerne l'énergie.

Tout cela, nous disait-on, avait pour but de sauver notre industrie. Si nous ne baissions pas le coût du travail, de nombreux emplois risquaient d'être délocalisés.

Or, aujourd'hui, ces aides publiques ont pris la forme d'une boule de neige qui atteint des proportions très inquiétantes et qui n'est plus du tout maîtrisée au point que même les plus libéraux d'entre vous commencent à s'interroger sur l'efficacité de cette politique !

Et malgré cela, des emplois sont supprimés dans l'industrie. C'est une donnée que nous devons prendre en compte dans notre réflexion.

Inutile d'ajouter que le CICE et sa transformation en allégement de cotisations ont aussi contribué à « smicardiser » la France.

Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Céline Brulin. Posons-nous ces questions à la lumière de la situation que traverse notre pays, notamment son industrie.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Je tiens à rappeler plusieurs éléments, en partant des chiffres de l'Insee.

Ainsi, nous connaissons, depuis 2017, le taux d'activité le plus élevé jamais enregistré en France depuis 1975, date à partir laquelle cet indicateur est calculé. Grâce à plusieurs dispositifs, dont certains avaient été instaurés dans la période précédente, 2,5 millions d'emplois ont été créés.

Entre 2000 et 2017, 500 000 emplois industriels avaient été supprimés dans notre pays. Depuis 2017, 160 000 emplois net ont été créés chaque année. (Mme Michelle Gréaume proteste.) Tous ces chiffres proviennent de l'Insee. Vous pouvez avoir votre propre opinion, mais encore faut-il se fonder sur la réalité des chiffres !

Monsieur Jomier, le rapport Bozio-Wasmer a été commandé l'année dernière par la Première ministre Élisabeth Borne dans le cadre d'une conférence sur les bas salaires. C'est donc à l'initiative d'un gouvernement précédent que cette étude a été menée. L'article 6 que nous vous présentons s'inscrit dans la continuité de ce travail.

Je peux entendre vos critiques, mais, de grâce, restons objectifs sur les chiffres ! Quelque 2,5 millions emplois ont été créés dans notre pays et le taux d'activité n'y a jamais été aussi élevé, même s'il reste inférieur à la moyenne de l'Union européenne. Ainsi, l'insertion professionnelle des jeunes et des seniors reste un défi. Battons-nous pour améliorer leur situation ! Mais pour cela, il faut se fonder sur les vrais chiffres. (Mme Michelle Gréaume proteste.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 933 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 937 rectifié, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky, est ainsi libellé :

Après l'article 5 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le 6° du II de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale est abrogé.

La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Cet amendement a pour objet d'intégrer les rachats d'actions dans l'assiette des cotisations de la sécurité sociale.

En 2024, les rachats d'actions devraient atteindre un record, proche de 1 000 milliards de dollars, ce qui est le symbole des dérives du capitalisme financier. L'ancien Premier ministre, Gabriel Attal, avait d'ailleurs fustigé ces rachats, qui se font au détriment de l'investissement et des hausses de salaire, et il avait mis sur la table la possibilité de les taxer.

Le gouvernement de Michel Barnier a prévu de récupérer, au travers du projet de loi de finances, 200 millions d'euros, alors que les rachats d'actions ont atteint 30 milliards d'euros en 2023 en France.

Nous lui proposons de se donner réellement les moyens de sa communication, en intégrant ces rachats dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale. Ces nouvelles recettes permettraient de financer la prise en charge intégrale des frais liés au traitement des cancers, qui représentent en moyenne 1 500 euros par an.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous abordons, au travers de ces différents amendements, le sujet du financement de la sécurité sociale.

Notre collègue Poncet Monge évoquait précédemment l'économiste Gilbert Cette, que notre commission a auditionné. Nous avons également reçu, à l'occasion d'une autre audition, l'économiste Antoine Bozio et sans doute auditionnerons-nous Étienne Wasmer dans les prochaines semaines.

Lorsque l'on considère le « trou » de la sécu, on se pose la question suivante : le financement de la sécurité sociale doit-il reposer uniquement sur le travail ? Pour ma part, je souhaite que nous rencontrions d'autres économistes afin d'en débattre. Avec Raymonde Poncet Monge et d'autres collègues au sein de la commission, nous avons véritablement soif d'apprendre sur ce sujet !

C'est d'ailleurs l'un des enseignements, selon nous, du rapport Bozio-Wasmer : il convient de consulter davantage les économistes et de confronter nos idées. On peut toujours tout remettre en cause au travers d'amendements, mais il nous faut avancer ensemble et trouver comment financer la sécurité sociale de demain.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, je le qualifierai de PLFSS d'urgence. La situation de la sécurité sociale est en effet pour le Gouvernement une urgence, sur laquelle nous aussi nous essayons de travailler.

On cherche aujourd'hui à obtenir rapidement du rendement, mais nous devons également réfléchir sur les mécanismes profonds du financement de la sécurité sociale. Encore une fois, je suis partante pour poursuivre nos entretiens avec les économistes. Je rappelle, à cet égard, que le rapport Bozio-Wasmer, qui a été unanimement salué, a inspiré l'article 6 de ce PLFSS, mais que, pour autant, la proposition de ces deux économistes n'a pas été retenue.

J'y insiste, nous devons travailler pour demain. Nous ne pouvons pas laisser à la charge des jeunes générations nos retraites et nos frais de santé – soins et médicaments. J'ai de la peine pour les jeunes…

Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous aussi, nous avons de la peine pour eux !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il est vrai que chaque année nous avons un peu les mêmes débats, et j'en suis navrée.

Mme la présidente. Veuillez conclure, madame la rapporteure générale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Quoi qu'il en soit, j'ai envie d'apprendre et de comprendre, avec vous, comment nous pouvons financer la sécurité sociale de demain.

L'avis est défavorable sur cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Je rejoins les propos de Mme la rapporteure générale.

Le rapport Bozio-Wasmer nous a appris que nous menions depuis trente ans des politiques d'allégements généraux pour compenser le fait que c'est essentiellement le travail qui finance la protection sociale, ce qui est une singularité française.

D'un côté, on procède à des allégements généraux destinés à baisser le coût du travail, parce qu'il existe, quoi que l'on en dise, une corrélation entre coût du travail et emploi. De l'autre, on accorde, avec une très bonne intention, des primes d'activité pour compenser l'écart entre la rémunération brute à la charge de l'employeur et le revenu disponible net perçu par le salarié. Allégements généraux et primes d'activité, voilà ce qui jalonne notre histoire depuis trente ans !

La direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) l'a montré dans une étude publiée voilà trois semaines : pour que le revenu d'une femme qui élève seule ses enfants, est locataire et perçoit le Smic augmente de 100 euros, son employeur doit augmenter son salaire de 770 euros, et ce pour compenser, à la fois, la baisse de la prime d'activité, celle de l'aide personnalisée au logement (APL), ainsi que les différents effets de seuil liés aux allégements généraux. Le système est donc vraiment à bout de souffle !

L'article 6 dont nous allons commencer l'examen est une première étape. Pour autant, vous avez raison, madame la rapporteure générale, il va nous falloir discuter pour envisager un financement et une organisation pérennes de notre protection sociale, laquelle est un trésor national. Ce débat s'inscrit dans le cadre d'une économie ouverte, nous devons donc aussi prendre en compte les questions d'emploi et de maintien de la compétitivité de notre industrie.

Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Je suis sensible à cet amendement.

Je souhaite rappeler que le groupe Union Centriste avait déposé l'an dernier, lors de l'examen du projet de loi de finances, un amendement tendant à mettre en place un dispositif de taxation des rachats d'actions, lesquels posent à l'évidence des problèmes d'égalité et de justice sociale qui ont été mal évalués. Nous avons redéposé un amendement de ce type cette année.

Nous devrions tous être d'accord, mes chers collègues, pour mettre en place un tel dispositif. Vous pourrez compter sur notre groupe, extrêmement mobilisé sur ce sujet, pour le défendre.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote. (Marques d'impatience sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Raymonde Poncet Monge. L'article 6 traite effectivement des exonérations... (Protestations sur les travées du même groupe.)

Mme Dominique Estrosi Sassone. On n'y est pas encore !

Mme Raymonde Poncet Monge. ... et il fait partie des efforts demandés par le Gouvernement.

À l'exception de 3 milliards d'euros, les exonérations de cotisations sont compensées par le budget de l'État ; cela concerne donc aussi le projet de loi de finances et devrait y être inscrit. Mais en attendant, puisque cette mesure nous est soumise, il nous revient d'en discuter.

La fiscalité sur le rachat d'actions, comme celle sur la distribution d'actions gratuites, a été allégée depuis 2017. Les différents forfaits et contributions ont été abaissés, si bien que le rendement a baissé. J'ajoute qu'il est désormais possible de distribuer jusqu'à 15 % du capital social en actions gratuites.

Alors que les exonérations de cotisations, en dehors de la défiscalisation des heures supplémentaires, sont compensées, les exemptions quant à elles – 19 milliards d'euros en 2023 ! – ne le sont pas, en particulier pour les actions gratuites, ce qui a un impact sur la sécurité sociale.

Il faudrait donc aussi avoir cette discussion lors de l'examen du projet de loi de finances !

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 937 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 1089, présenté par Mme Espagnac, est ainsi libellé :

Après l'article 5 quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le deuxième alinéa de l'article L. 120-19 du code du service national est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ces prestations ne sont pas soumises à cotisations sociales ».

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Frédérique Espagnac.

Mme Frédérique Espagnac. La disposition que nous vous soumettons figure dans la proposition de loi, adoptée par le Sénat le 10 avril 2024, visant à renforcer le service civique.

Nous souhaitons inscrire dans la loi ce que pratique déjà, dans les faits, la sécurité sociale, laquelle ne perçoit pas de cotisations sociales sur les prestations versées aux volontaires du service civique par les organismes d'accueil.

Au travers de cet amendement, nous cherchons à atteindre deux objectifs : d'une part, sécuriser juridiquement les organismes d'accueil en garantissant que la sécurité sociale ne puisse pas changer sa pratique actuelle ; d'autre part, lever le frein à l'augmentation de la prestation de subsistance des volontaires, sur l'initiative des organismes d'accueil et sur leurs fonds propres, au-delà du minimum réglementaire fixé aujourd'hui à 114,85 euros – c'est un sujet que les organismes mettent eux-mêmes en avant.

Cette mesure serait sans impact sur les finances publiques dans la mesure où elle sécurise juridiquement une pratique. Le gage n'a donc pas d'autre finalité que de garantir la recevabilité financière de l'amendement et nous appelons le Gouvernement à le lever.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il est favorable, madame la présidente.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Le Sénat a en effet adopté en avril 2024, en première lecture de la proposition de loi visant à renforcer le service civique, cette mesure d'exonération qu'il nous apparaît important de sécuriser juridiquement.

L'avis est donc favorable.

Par ailleurs, je lève le gage.

Mme la présidente. Il s'agit donc de l'amendement n° 1089 rectifié.

Je le mets aux voix.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5 quater.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures dix, est reprise à dix-neuf heures quinze.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Article 6

I. – L'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi rédigé :

« I. – Font l'objet d'une réduction dégressive les cotisations à la charge de l'employeur dues au titre des assurances sociales et des allocations familiales, les cotisations dues au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, à hauteur du taux fixé par l'arrêté mentionné à la seconde phrase du deuxième alinéa de l'article L. 241-5, les contributions mentionnées à l'article L. 813-4 du code de la construction et de l'habitation, les cotisations à la charge de l'employeur dues au titre des régimes de retraite complémentaire légalement obligatoires mentionnés à l'article L. 921-4 du présent code ou créés par la loi, la contribution prévue à l'article L. 137-40 et les contributions à la charge de l'employeur dues au titre de l'assurance chômage prévues au 1° de l'article L. 5422-9 du code du travail, à hauteur d'un taux ne tenant pas compte de l'application des deuxième à dernier alinéas de l'article L. 5422-12 du même code.

« Cette réduction s'applique aux rémunérations ou gains qui, après prise en compte du montant de la prime de partage de la valeur prévue à l'article 1er de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat, sont inférieurs à un montant fixé par décret. Ce montant est compris entre le salaire minimum de croissance applicable au 1er janvier 2024 majoré de 60 % et le salaire minimum de croissance en vigueur majoré de 60 %. » ;

2° Le III est ainsi modifié :

a) À la deuxième phrase du deuxième alinéa, après la référence : « III », sont insérés les mots : « , majorés le cas échéant du montant de la prime de partage de la valeur mentionné au I, » ;

b) Après le mot : « lorsque », la fin de la seconde phrase du troisième alinéa est ainsi rédigée : « la rémunération mentionnée au quatrième alinéa du présent III atteint le montant fixé par le décret prévu au I. » ;

c) L'avant-dernier alinéa est ainsi modifié :

– la première phrase est complétée par les mots : « , majorée le cas échéant du montant de la prime de partage de la valeur mentionnée au I du présent article » ;

– la seconde phrase est supprimée ;

3° À la fin du premier alinéa du VI, les mots : « à l'article L. 241-18 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 241-18 et L. 241-18-1 ».

II. – Le I est applicable aux cotisations et contributions dues au titre des périodes d'activité courant à compter du 1er janvier 2024, à l'exception du 2°, qui s'applique aux primes de partage de valeur versées à compter du 10 octobre 2024.

III. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le 1er janvier 2025 :

a) Au premier alinéa de l'article L. 241-2-1, les deux occurrences du nombre : « 2,5 » sont remplacées par le nombre : « 2,2 » ;

b) Au premier alinéa de l'article L. 241-6-1, les deux occurrences du nombre : « 3,5 » sont remplacées par le nombre : « 3,2 » ;

c) Au premier alinéa du I de l'article L. 241-13, les mots : « assurances sociales » sont remplacés par les mots : « assurances vieillesse et veuvage, dans la limite du taux mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 241-3 diminué de deux points, de l'assurance maladie » ;

2° Le 1er janvier 2026 :

a) Les articles L. 241-2-1 et L. 241-6-1 sont abrogés ;

b) Au premier alinéa du I de l'article L. 241-13, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « quatre » et le taux : « 60 % » est remplacé par le taux : « 200 % ».

IV. – L'article L. 243-6-2 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) La première occurrence du mot : « sociales » est remplacée par les mots : « de sécurité sociale ou recouvrées par les organismes dans les conditions prévues au présent titre » ;

b) Les mots : « du ministre chargé de la sécurité sociale » sont remplacés par le mot : « ministérielles » ;

c) Les mots : « les organismes mentionnés aux articles L. 213-1, L. 225-1 et L. 752-4 » sont remplacés par les mots : « les organismes chargés du recouvrement » ;

2° Au II, après la première occurrence du mot : « articles », est insérée la référence : « L. 921-2-1, » ;

3° Le III est ainsi rédigé :

« III. – Le “Bulletin officiel de la sécurité sociale” présente sur un site internet l'ensemble des instructions et circulaires relatives à la législation applicable en matière de cotisations et de contributions de sécurité sociale et d'autres contributions recouvrées par les organismes mentionnés au I du présent article ou affectées à un organisme de sécurité sociale mentionné au II. »

V. – Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin de modifier les règles de calcul et de déclaration relatives aux réductions dégressives de cotisations patronales dont le bénéfice est cumulable avec les réductions prévues aux articles L. 241-2-1 et L. 241-6-1 du code de la sécurité sociale dans leur rédaction antérieure à la présente loi mais ne peut se cumuler avec les dispositions prévues à l'article L. 241-13 du même code, en vue de tenir compte des conséquences sur l'emploi de ces règles ainsi que des évolutions rendues nécessaires par l'entrée en vigueur du présent article afin de respecter les crédits votés dans la loi de finances pour l'année 2025. Ces modifications peuvent s'appliquer aux revenus d'activité versés à compter du 1er janvier 2025. L'ordonnance est prise dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi. Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de sa publication.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, sur l'article.

Mme Cathy Apourceau-Poly. En 2024, les exonérations et les exemptions de cotisations sociales ont représenté – faut-il le rappeler ? – 88 milliards d'euros. Chaque année, le coût des baisses de cotisations sociales augmente de 10 %.

Engagée depuis des décennies et maintenue coûte que coûte, comme un mantra, l'augmentation incontrôlée des exonérations de cotisations entraîne un double mouvement d'assèchement des recettes de la sécurité sociale et d'étatisation.

Chaque année, nous cherchons ici même, au Sénat, lors de l'examen des PLFSS, à faire en sorte que des compensations soient versées à la sécurité sociale via des transferts de recettes fiscales, principalement CSG et TVA. Ces compensations restent partielles et dénaturent notre modèle de protection sociale.

Pourtant, la politique d'exonération de cotisations sociales, justifiée par le « coût du travail », a démontré son inefficacité.

Le CICE a coûté 20 milliards d'euros et a créé ou sauvé seulement 100 000 emplois, ce qui représente pour chaque poste 200 000 euros d'argent public. Voilà un beau cadeau !

En 2023, les exonérations de cotisations représentaient 16 % des 486 milliards d'euros de l'excédent brut des entreprises. Les niches sociales ont donc des conséquences négatives très importantes sur les recettes de la sécurité sociale et, plus généralement, sur les finances publiques.

Le PLFSS pour 2025 porte une refonte des allégements de cotisations sociales directement inspirée par le rapport de la mission Bozio-Wasmer, publié le 3 octobre dernier. Il est ainsi prévu dans le présent article 6 de concentrer les allégements sur les niveaux de rémunération compris entre 1,3 Smic et 1,9 Smic, afin de récupérer 5 milliards d'euros. Pourtant, malgré cet effort apparent, la part des cotisations sociales dans le financement de la sécurité sociale continue de s'effondrer.

Néanmoins, nous prenons cet article pour ce qu'il est : un premier pas vers la remise en question des allégements de cotisations sociales. Nous voterons donc pour.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, sur l'article.

Mme Raymonde Poncet Monge. En esquissant une réforme des exonérations de cotisations, le Gouvernement entame enfin un débat nécessaire, car l'explosion de ces exonérations grève les comptes publics.

Actuellement, les exonérations en faveur de l'emploi s'élèvent à près de 91 milliards d'euros. Hors exemptions, elles sont plafonnées à 14 % des recettes de la sécurité sociale et on a désormais atteint ce maximum. Il n'est donc pas possible de prévoir d'autres niches…

Certes, la plupart de ces exonérations sont compensées à la sécurité sociale, mais le coût est énorme pour les finances publiques, alors même que leurs effets sur l'emploi n'ont jamais été démontrés au-delà de 2 Smic.

Même les économistes mandatés par le Gouvernement, MM. Bozio et Wasmer, n'ont pas réussi à démontrer l'effet positif des exonérations de cotisations sur l'emploi au-delà de 2 Smic ou sur la compétitivité des entreprises. C'est pourquoi le Conseil d'analyse économique a recommandé de remettre en cause les exonérations au-delà de 1,6 Smic.

Je l'évoquais précédemment, 3 milliards d'euros correspondant à la défiscalisation des heures supplémentaires ne sont même pas compensés à la sécurité sociale. Il faut y ajouter le coût des exemptions de cotisations sociales sur les compléments de salaire, lesquelles représentent un manque à gagner évalué par la Cour des comptes à 19 milliards d'euros en 2023 qui n'est pas compensé. Ce montant, qui a doublé depuis 2018, est à mettre en correspondance avec le retour du déficit de la sécurité sociale, et ce jusqu'en 2023.

Le budget de l'État et celui de la sécurité sociale gagneraient à ce que ces exonérations soient remises en cause et à ce qu'elles soient justement compensées pour la sécurité sociale, mais aussi à ce que les revenus exemptés soient intégrés dans l'assiette des cotisations.

Le présent article ne prévoit qu'un léger lissage des exonérations, pour un gain de 4 milliards d'euros, ramené à 3 milliards par la commission, alors que la mise en place d'un point de sortie des allégements de cotisations à 2 Smic rapporterait 8 milliards d'euros. Mes chers collègues, soyons sérieux et ambitieux !

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, sur l'article.

Mme Annie Le Houerou. Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain salue également ce premier effort de remise en cause de la politique d'exonération des cotisations. Pour autant, madame la ministre, nous devons aller plus loin.

En allégeant les exonérations pour les rémunérations allant jusqu'à 3,5 Smic et en supprimant la réduction de cotisations d'assurance maladie et d'allocations familiales, le présent article aura pour conséquence de diminuer de 4 milliards d'euros le montant des allégements de cotisations, qui est actuellement de 80 milliards.

Le rapport Bozio-Wasmer, commandé à l'issue de la conférence sociale du 16 octobre 2023, préconisait d'aller plus loin en diminuant les exonérations pour les rémunérations allant jusqu'à 2,5 Smic, ce qui permettrait de dégager 6 milliards d'euros.

Nous proposons d'aller encore plus loin en fixant le point de sortie des exonérations à 2 Smic, ce qui permettrait de dégager 8 milliards d'euros – un montant très précieux pour l'équilibre de nos comptes.

Rappelons que la sécurité sociale française repose sur un système simple : le travail crée un devoir de contribution pour la mutualisation des risques et ouvre un droit à la prise en charge solidarisée des aléas de la vie. Les politiques des gouvernements successifs d'Emmanuel Macron ont délégitimé ce fonctionnement et fragilisé le principe de solidarité et de mutualisation des risques.

M. Michel Savin. C'est vrai !

Mme Annie Le Houerou. Or c'est la base de notre système de sécurité sociale !

Nous voulons trouver l'équilibre, en supprimant les exonérations qui n'ont aucun impact sur l'emploi et sur la compétitivité de nos entreprises.

Vous l'avez dit, madame la ministre, notre sécurité sociale est un trésor national que nous devons protéger. Pour cela, il nous faut des recettes !

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, sur l'article.

M. Daniel Chasseing. La réforme des allégements généraux prévue à l'article 6 permettra d'augmenter les recettes publiques de 4 milliards d'euros.

Le Gouvernement entend simplifier un dispositif dans lequel les exonérations s'appliquent jusqu'à 1,6 Smic, se stabilisent jusqu'à 2,5 Smic, diminuent alors et se stabilisent jusqu'à 3,5 Smic, puis disparaissent.

Il prévoit d'augmenter les charges patronales sur les salaires situés entre 1 Smic et 1,3 Smic. Puis, à partir de 2026, dans le cadre d'un dispositif unique, ce qui simplifiera les choses, les cotisations sociales seront dégressives jusqu'à 3 Smic.

Il est vrai que les mécanismes en vigueur ont entraîné, du fait de la hausse du Smic, une augmentation des allégements de cotisations, lesquels ont atteint 80 milliards d'euros, contre 60 milliards en 2021. En outre, la dégressivité rapide des allégements à partir du Smic n'incite pas à la revalorisation des bas salaires.

L'objectif est ici de favoriser la revalorisation des bas salaires. Or la forte diminution des exonérations portant sur ces bas salaires pourrait entraîner, selon l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), la destruction de 50 000 emplois, dont 15 000 en 2025. L'expérience des années 2012-2017 et 2018-2023 en termes de créations d'entreprises nous ont montré qu'il fallait être prudent.

Je suis d'accord avec la rapporteure générale : pour préserver l'emploi, il faut protéger les salaires qui sont proches du Smic, sans remettre en cause l'équilibre général de la mesure.

Mme la présidente. Je suis saisie de dix amendements identiques.

L'amendement n° 111 rectifié bis est présenté par Mme V. Boyer, MM. Panunzi et Bouchet et Mmes Bonfanti-Dossat, Dumont et Petrus.

L'amendement n° 197 est présenté par MM. Hochart, Szczurek et Durox.

L'amendement n° 209 rectifié ter est présenté par MM. Pellevat, Pointereau, Meignen et J.P. Vogel, Mme Belrhiti, MM. Chatillon et Paul, Mmes Perrot et Bellurot et M. Gremillet.

L'amendement n° 246 rectifié sexies est présenté par MM. V. Louault, Chasseing, Capus, Médevielle, Chevalier, Grand, Brault et Rochette, Mme L. Darcos et M. Wattebled.

L'amendement n° 405 rectifié ter est présenté par MM. Iacovelli, Patriat et Rambaud, Mme Phinera-Horth, M. Fouassin, Mme Schillinger, M. Patient, Mmes Nadille et Havet, M. Rohfritsch, Mme Cazebonne, MM. Buval, Lemoyne et Lévrier, Mme Duranton, MM. Buis et Omar Oili et Mme Lermytte.

L'amendement n° 502 rectifié quater est présenté par M. Sautarel, Mme Jacques, MM. P. Vidal, H. Leroy et Genet, Mmes Drexler et Demas, MM. Lefèvre, Mandelli, Anglars, Houpert, Belin, C. Vial, Klinger et Chaize, Mme P. Martin et M. Cuypers.

L'amendement n° 609 rectifié bis est présenté par MM. Masset, Daubet, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guiol, Mmes Jouve et Pantel et M. Roux.

L'amendement n° 800 rectifié bis est présenté par Mmes Micouleau, Aeschlimann et Joseph.

L'amendement n° 919 est présenté par Mme Ramia.

L'amendement n° 1167 rectifié bis est présenté par MM. J.B. Blanc et Reynaud, Mme Ventalon, MM. Khalifé et Cambier, Mmes Gosselin et Noël, M. Daubresse, Mme Guidez, MM. Somon et Courtial, Mme Evren et MM. Dhersin et Haye.

Ces dix amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-Jacques Panunzi, pour présenter l'amendement n° 111 rectifié bis.

M. Jean-Jacques Panunzi. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Joshua Hochart, pour présenter l'amendement n° 197.

M. Joshua Hochart. L'article 6 de ce PLFSS constitue une menace directe pour l'emploi et le tissu économique de notre pays. En augmentant le coût du travail de plus de 5 milliards d'euros via une réforme des allégements de charges patronales, notamment sur les bas salaires, le Gouvernement prend un risque considérable.

D'abord, cette mesure n'améliorera en rien le pouvoir d'achat des salariés. Au contraire, elle entraînera un gel des salaires renforçant ce que vous avez appelé la « smicardisation », c'est-à-dire une convergence vers le salaire minimum au détriment des revalorisations salariales.

Ensuite, les entreprises de services, notamment, qui ont prouvé leur rôle moteur en créant plus de 2 millions d'emplois en vingt ans, seront durement touchées. Ces emplois, souvent accessibles sans qualification élevée et répartis sur l'ensemble du territoire, risquent de disparaître. Pour de nombreuses très petites entreprises (TPE) et petites et moyennes entreprises (PME), dans lesquelles la moindre augmentation des salaires et des charges a des conséquences importantes en termes de coûts, cette réforme pourrait tout simplement signifier la fin de leur activité.

Enfin, il ne faut pas sous-estimer l'impact sur le chômage : la hausse des charges pèsera sur la création d'emplois, particulièrement pour les publics les plus vulnérables. Dans un contexte déjà difficile où l'inflation fragilise les entreprises et les ménages, cette réforme pourrait provoquer des fermetures en cascade, aggravant encore la situation économique du pays.

Face à ces dangers, il est de notre devoir commun de demander la suppression de cet article. Protégeons nos entreprises, nos emplois et le pouvoir d'achat des Français au lieu d'imposer des réformes idéologiques qui ne servent qu'à remplir temporairement les caisses de l'État au détriment du long terme.

Mme la présidente. L'amendement n° 209 rectifié ter n'est pas soutenu.

La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l'amendement n° 246 rectifié sexies.

M. Daniel Chasseing. J'ai cosigné cet amendement présenté par Vincent Louault, mais je soutiens à titre personnel – je l'ai dit – la position de la rapporteure générale et je ne souhaite donc pas la suppression de cet article. J'interviens donc ici au nom de mon collègue Louault.

Le présent amendement, travaillé avec la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb) d'Indre-et-Loire, vise à supprimer l'article 6. Celui-ci prévoit de réformer les règles d'allégements généraux de cotisations patronales, ce qui risque d'avoir un impact important sur beaucoup de TPE-PME, qui sont dans l'incapacité d'augmenter les salaires au vu des conséquences qu'aurait une telle augmentation sur les prix de vente. Cela enrayerait toute reprise possible de l'activité des entreprises.

La réintégration de la prime de partage de la valeur (PPV) dans l'assiette du calcul des cotisations sociales serait un autre coup porté aux TPE, car cette prime est aujourd'hui le seul outil de partage de la richesse véritablement accessible aux petites entreprises.

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour présenter l'amendement n° 405 rectifié ter.

M. Xavier Iacovelli. Cet amendement tend à supprimer l'article 6, car il revient sur certaines exonérations de charges patronales appliquées aux salaires les plus modestes. Il prévoit notamment la baisse de quatre points d'exonération au niveau du Smic.

Cette mesure va à l'encontre des politiques de soutien à l'emploi menées depuis 2017, qui ont permis de réduire significativement le coût du travail et de stimuler l'emploi, en particulier pour les petites entreprises.

Ainsi, le taux de chômage – vous l'avez rappelé, madame la ministre – n'a jamais été aussi bas depuis quarante ans. Ces politiques d'exonération ont permis de créer 2,5 millions d'emplois depuis 2017.

La suppression de certaines de ces exonérations, notamment au niveau du Smic, entraînerait une hausse importante du coût du travail. Elle reviendrait à inverser la tendance observée ces dernières années et menacerait directement la compétitivité des entreprises.

On ne peut pas s'y résoudre, parce que cela entraînerait des destructions d'emplois – environ 50 000 – et, en définitive, une baisse de la masse salariale.

Je l'entends, le coût des exonérations de cotisations sociales n'a cessé d'augmenter ces dernières années. Madame la ministre, votre argumentaire était excellent sur ce point, la situation actuelle invite à une réforme. Dans leur rapport, MM. Bozio et Wasmer proposent ainsi des pistes de réforme pour encourager les hausses de salaire à budget constant.

Mes chers collègues, pour préserver les acquis en matière de réduction du chômage et de compétitivité, il me semble plus sage de supprimer l'article 6. L'emploi ne peut pas être une variable d'ajustement budgétaire.

L'enjeu est clair : maintenir les créations d'emplois, soutenir nos PME et garantir la compétitivité de notre économie. En supprimant le présent article, nous affirmons notre engagement envers une politique économique responsable et sociale.

Mme la présidente. La parole est à Mme Micheline Jacques, pour présenter l'amendement n° 502 rectifié quater.

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Bilhac, pour présenter l'amendement n° 609 rectifié bis.

M. Christian Bilhac. Cet amendement déposé par Michel Masset vise également à supprimer l'article 6. Nous ne pouvons risquer, dans une période incertaine pour l'emploi, de renchérir plus que de raison les cotisations des TPE, qui assurent l'économie de proximité indispensable à la vitalité de nos territoires, en particulier ruraux.

La PPV reste aujourd'hui le seul outil de partage de la richesse véritablement accessible pour les TPE. Son intégration dans l'assiette de calcul des cotisations sociales nous semble constituer une grosse erreur.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour présenter l'amendement n° 800 rectifié bis.

Mme Marie-Do Aeschlimann. L'essentiel a été dit. Plusieurs filières sont concernées, notamment celles de la propreté, de la restauration, de la sécurité ou encore des bâtiments et travaux publics (BTP). Elles constituent l'essentiel de notre tissu économique.

Pour cette raison, l'article 6 devrait être supprimé.

Mme la présidente. La parole est à Mme Salama Ramia, pour présenter l'amendement n° 919.

Mme Salama Ramia. Il est urgent de préserver le dispositif d'exonération de cotisations patronales pour les secteurs qui y sont éligibles. En effet, celui-ci constitue une mesure de soutien de l'économie locale des outre-mer, majoritairement composée de TPE et de PME.

La rédaction actuelle de l'article 6 du PLFSS entraînerait mécaniquement une baisse des allégements généraux pour les entreprises bénéficiant du dispositif instauré par la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, dite Lodéom.

En effet, en l'état du droit, toute modification apportée au régime général des exonérations s'applique de manière automatique aux exonérations spécifiques prévues dans la Lodéom.

Les territoires les plus pauvres et les plus fracturés socialement d'Europe ne peuvent s'affranchir de ces exonérations. Par conséquent, nous proposons de supprimer le présent article.

Mme la présidente. La parole est à Mme Agnès Evren, pour présenter l'amendement n° 1167 rectifié bis.

Mme Agnès Evren. Défendu.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, je vous remercie d'avoir scrupuleusement étudié l'article 6. Au Sénat, nous savons ce que sont les allégements généraux et les exonérations de cotisations patronales.

Déjà, l'année dernière, nous nous étonnions de la progression inexorable du montant de ces exonérations. Or elle s'est poursuivie en 2024. Au total, nous atteignons 80 milliards d'euros, dont 65 milliards de manque à gagner pour la sécurité sociale, ce qui est énorme.

Mme la ministre le confirmera sans doute, le montant des exonérations a suivi une évolution exponentielle ces dernières années : en trois ans, il a augmenté de 20 milliards d'euros. Il y a là de quoi s'étonner et nous devons ralentir cette dynamique. C'est précisément ce que vise cet article.

L'année dernière, nous nous étions questionnés à propos du « toboggan » dessiné par la courbe du barème des exonérations, qui descend jusqu'à 1,6 Smic, avant que les deux bandeaux maladie et famille ne prennent le relais, respectivement jusqu'à 2,5 Smic et 3,5 Smic. Je n'ai pas besoin de vous rappeler ce graphique, que vous connaissez tous par cœur.

Le Gouvernement propose, dans la version initiale de l'article 6, de casser cette dynamique. Nous sommes d'accord sur le principe, parce que nous ne pouvons pas continuer ainsi, même si cela ne doit pas nous exonérer de réfléchir sur la manière de financer la sécurité sociale.

Veuillez m'excuser, madame la présidente, de dépasser le temps de parole qui m'est imparti, mais je dois préciser certains éléments pour répondre aux auteurs des amendements.

On ne peut pas financer la sécurité sociale par autant d'exonérations patronales. Lorsqu'elles s'appliquent à des salaires au-delà de 2,5 Smic, elles me choquent. L'année dernière, je m'étais déjà demandée si, en tant que rapporteure générale, je ne devais pas soutenir des amendements adoptés à l'Assemblée nationale visant à supprimer les bandeaux maladie et famille.

Aujourd'hui, il me semble que cette réforme est la bienvenue. Le rapport Bozio-Wasmer, désormais fameux, est formidable sur ce point. Mes chers collègues, je vous invite d'ailleurs à le lire, si ce n'est déjà fait, car il est très intéressant.

Madame la ministre, il faudrait que vous demandiez plus souvent…

Mme Céline Brulin. Des rapports ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Non, pas des rapports, mais des expertises.

Mme Céline Brulin. Me voilà rassurée ! (Sourires.)

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. En comparaison avec la version initiale du Gouvernement, nous mettons l'accent sur la préservation de l'emploi.

J'entends la sénatrice Aeschlimann plaider pour protéger les secteurs de la propreté, du gardiennage ou encore du BTP, où de nombreux salaires sont proches du Smic. Je tiens le même discours : ces emplois ne sont pas délocalisables et, au-delà des aides spécifiques pour les aides à domicile, ils sont concernés par les allégements généraux. Il faut donc les protéger.

Le Gouvernement proposait initialement de baisser les exonérations de cotisations patronales sur les petits salaires de deux points en 2025, puis d'en faire autant en 2026.

J'ai proposé de faire autrement, car le Gouvernement n'a pas su me confirmer précisément le nombre d'emplois que cette mesure ferait perdre.

Or la situation économique de la France est difficile. Les premiers à devoir partir d'une entreprise, ce sont souvent ceux dont les salaires sont proches du Smic. J'ai donc proposé de ne pas réduire les allégements généraux pour les salaires au Smic et proches du Smic.

Vous le voyez, madame la sénatrice Aeschlimann, l'amendement que j'ai proposé protège les secteurs que vous mentionnez. Par conséquent, je vous invite à retirer votre amendement.

Le Gouvernement a été attentif à l'impact de la réforme des allégements généraux sur le dispositif TO-DE. La version initiale du PLFSS visait à pérenniser ce dispositif, mais sans prendre en compte l'impact de la révision des allégements généraux. Le Gouvernement, percevant très bien ce problème, a déposé à l'Assemblée nationale un amendement visant à le corriger.

Il fallait en faire de même en ce qui concerne les territoires ultramarins et le dispositif de la Lodéom, ce qui n'a pas été fait à l'Assemblée nationale. J'ai donc déposé un amendement qui vise à s'en tenir à un statu quo pour l'année 2025. Les entreprises concernées seraient de toute façon protégées, outre-mer comme en métropole, par le maintien des allégements sur les petits salaires que je propose.

Je l'ai dit à Mme la ministre, il faut travailler avec tous les acteurs économiques d'outre-mer pour décomplexifier le dispositif de la Lodéom qui est, aujourd'hui, totalement incompréhensible. Je crois que nous sommes d'accord, madame la ministre, sur le fait qu'il faut le remettre à plat et le rendre plus clair.

J'ai donc proposé de ne pas supprimer les allégements généraux au niveau du Smic. En contrepartie, je propose qu'en 2025 le bandeau maladie ne couvre que les salaires inférieurs à 2,1 Smic au lieu du seuil de 2,2 Smic prévu par le Gouvernement et que le bandeau famille s'arrête à 3,1 Smic et non à 3,2 Smic.

Je le rappelle, le rapport Bozio-Wasmer visait à remplacer l'effet « toboggan » suivi de l'effet « bandeau » par une courbe à pente douce. La pente de la courbe proposée par le Gouvernement est un peu plus abrupte que celle préconisée par ces deux économistes et celle que je propose l'est encore plus, mais il me semble important de répondre au besoin de rendement visé par cet article. Je propose donc de prévoir que le point de sortie des allégements généraux soit situé à 2,05 Smic en 2026.

Je suis sensible à l'argument avancé par Xavier Iacovelli, qui a mentionné l'importance de préserver les emplois industriels. Toutefois, d'autres mécanismes permettent d'aider ce secteur – avantages fiscaux sur la recherche, accompagnement de projets innovants…

Je le redis, la courbe des allégements de cotisations doit être plus cohérente avec les besoins de financement de la sécurité sociale. Or, par toutes ces exonérations, autant de fruits du travail ne rentrent pas dans ses caisses, alors même que notre modèle est construit sur ce type de ressources. De plus, nous n'avons pas le temps de remettre à plat les principes mêmes de ce financement.

Pour toutes ces raisons, la commission demande le retrait de ces amendements ; à défaut, l'avis sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. J'espère que nous aurons ce débat – cela n'a pas été possible à l'Assemblée nationale – et que nous aurons l'occasion, après l'examen des amendements de suppression, d'avancer sur ce sujet. Je le sais, le Sénat est une institution dans laquelle on apprécie les débats posés, objectivés et sereins.

La politique de réduction du coût du travail a eu des effets très positifs. Pour cette raison, elle est partagée depuis trente ans par la gauche et la droite. Dans les années 1990, on a commencé par réduire le coût du travail non qualifié. Dans les années 2010, le rapport Gallois a donné l'alerte sur le problème de la compétitivité de notre économie, en particulier dans l'industrie et pour les emplois qualifiés, par rapport à celle de pays voisins, comme l'Angleterre ou l'Allemagne, pays qui est parvenu à mieux préserver son secteur industriel.

Toutefois, depuis quelques années, à la faveur notamment de l'indexation du Smic sur l'inflation, les mécanismes d'augmentation des allégements généraux ont des effets considérables.

Le montant de ces allégements atteint aujourd'hui 78 milliards d'euros, soit plus que le budget de l'éducation nationale. En trois ans, il a augmenté de 20 milliards d'euros, l'équivalent de la mission « Travail et emploi » !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. C'est aussi l'équivalent du déficit de la sécurité sociale !

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Cela vous donne une idée des montants concernés.

Tout l'intérêt du rapport Bozio-Wasmer est de rappeler la constitution, par des effets de seuil, de trappes à bas salaires. Le salaire médian en France, de 1,6 Smic, est situé au beau milieu de ces différents allégements.

S'il est nécessaire de repenser tout ce dispositif, il faut cependant le faire avec beaucoup de vigilance.

En septembre 2023, lorsque le rapport Bozio-Wasmer a été commandé, la situation de l'emploi n'était pas la même et le durcissement du contexte commercial n'était pas encore d'actualité.

Les données du problème ont changé : nous sommes passées de la préservation du pouvoir d'achat et de la désmicardisation à des questions qui concernent plutôt, désormais, la sauvegarde de l'emploi. Mesdames, messieurs les sénateurs, je sais que vous constatez cette évolution du contexte dans vos départements.

Il faut faire très attention aux paramètres de la réforme des allégements généraux, car derrière il y a la question du coût du travail.

C'est pourquoi j'aimerais que la discussion sur l'article 6 puisse avoir lieu. Je vous invite donc, mesdames, messieurs les sénateurs, à retirer vos amendements de suppression.

Nous pourrons ainsi examiner les propositions de la rapporteure générale visant à neutraliser la réforme pour les salaires au niveau du Smic – j'ai moi aussi entendu les inquiétudes des fédérations des secteurs de la propreté et du bâtiment sur ce point – et à placer, en 2025, le point de sortie des allégements à 3,1 Smic et non à 3,5 Smic comme aujourd'hui.

Par ailleurs, de la même manière que pour les autres sujets relatifs aux outre-mer, je vous propose de débattre de l'articulation de la réforme avec les exonérations spécifiques de la Lodéom.

Madame la rapporteure générale a fait des propositions extrêmement intéressantes pour limiter les effets de bord, voire les neutraliser, notamment au niveau des bas salaires. Elle propose aussi de limiter les effets sur la compétitivité des emplois industriels.

Supprimer d'entrée l'article 6 ne contribuerait pas à avancer sur cette question très importante : le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour explication de vote.

Mme Frédérique Puissat. L'article 6 est particulièrement important dans l'équilibre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025.

Lors des auditions préparatoires que la commission des affaires sociales a menées, les représentants de la Cour des comptes ont lancé une alerte extrêmement forte quant à la situation des comptes de la sécurité sociale. Nous n'avons pas le choix : nous devons amorcer des économies et – malheureusement ! – le faire au plus vite.

Ma collègue Corinne Bourcier et moi-même avons pointé l'évolution exponentielle des exonérations dans notre rapport d'information sur les négociations salariales. Nous aurions aimé que la question de la réforme de ces exonérations soit mise entre les mains des partenaires sociaux. Ce n'est qu'à cette condition que nous arriverons à nous sortir de cette situation, tout en limitant les conséquences négatives. Malheureusement, je le redis, nous n'avons pas le temps !

Nous étions très inquiets quand nous avons découvert l'article 6. Plusieurs d'entre nous se sont demandé si la jauge était bien placée, s'il n'était pas possible de revoir cette réforme, etc.

Je remercie la rapporteure générale d'avoir reçu des représentants du secteur de la propreté et des branches conventionnées et de nous faire des propositions aussi substantielles. J'espère que nous les discuterons, car elles permettent de faire des économies, certes non de quatre milliards d'euros, mais de trois milliards d'euros.

Mes chers collègues, si nous supprimons l'article 6, nous perdons quatre milliards d'euros de recettes, qu'il faudra trouver ailleurs. Nous suivrons donc la proposition de la rapporteure générale, en espérant que demain les partenaires sociaux pourront apporter des solutions encore meilleures. Pour cela, il nous faut du temps et, pour l'instant, l'urgence nous commande d'agir. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Je partage ce qui vient d'être dit : supprimer l'article 6 reviendrait à ne pas ouvrir le débat, dont nous nous réjouissons tous et que nous attendons depuis longtemps, sur l'efficacité des exonérations de cotisations.

La question n'est pas seulement celle de préserver les exonérations au niveau du Smic, ainsi que la rapporteure générale le propose.

Ma proposition de situer le point de sortie à 2 Smic me semble aussi excellente ! (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.) Selon nombre d'économistes, il s'agit de la limite au-delà de laquelle ces exonérations n'ont pas d'effet sur l'emploi ou la compétitivité. Un tel point de sortie vise aussi à préserver l'emploi.

J'ajoute qu'il ne faudrait pas se cacher derrière la défense de l'industrie de la propreté – un sujet par ailleurs important et que nous prenons aussi en compte dans nos propositions – pour demander la suppression de l'article 6.

À ce titre, je m'étonne de la position de certains soutiens du Gouvernement, qui ne veulent débattre ni des 80 milliards d'euros que coûtent ces exonérations ni de leur augmentation de 20 milliards d'euros ces dernières années.

Nous devons avoir ce débat. Nos propositions sont différentes, mais aucune ne touche au Smic, car rappelons-nous quand même que 17 % de la population active est au Smic. Un jour, nous devrons d'ailleurs nous interroger sur la déflation salariale qui a conduit à un tel pourcentage, ainsi que sur ses conséquences pour notre compétitivité et le positionnement de notre industrie et de nos services dans la compétition internationale.

Ne supprimons pas l'article 6 ! Ou alors, dites clairement que vous ne voulez pas débattre du bien-fondé des exonérations de cotisations.

Mme la présidente. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. Madame la rapporteure générale, j'aimerais être rassuré : les paramètres de la Lodéom seront-ils sanctuarisés ?

Une révision du régime des allégements généraux a des effets mécaniques sur le dispositif de la Lodéom. Même si l'on parvient à cantonner ces effets, l'intégration de la prime de partage de la valeur dans les revenus pris en compte pour la détermination du seuil des allégements généraux aura des conséquences sur le calcul de l'assiette de cotisation des entreprises.

Je comprends la nécessité de cette révision, mais il faut prendre le temps de bien faire. Pourriez-vous, madame la rapporteure générale, m'éclairer davantage sur la sanctuarisation de la Lodéom et me confirmer clairement que la révision du régime des allégements généraux n'aura pas d'effets indésirables outre-mer ?

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Fouassin, pour explication de vote.

M. Stéphane Fouassin. Dans le sens des propos du sénateur Lurel, serait-il possible d'envisager un moratoire pour les départements et régions d'outre-mer ? Ces territoires connaissent des crises profondes et ils en traverseront certainement d'autres. Il est important que nos entreprises, qui sont déjà très fragiles, ne ferment pas à cause de cette réforme.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Pour des amendements à 4 milliards d'euros, je me lève ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Céline Brulin s'exclame.)

Dans cet hémicycle, nous sommes nombreux à vouloir fixer un cap de réduction du déficit global de la sécurité sociale. Beaucoup d'amendements ont été déposés afin de trouver des solutions pour financer la sécurité sociale – elles varient naturellement d'un côté ou de l'autre. Mais les amendements que nous examinons pèsent quatre milliards d'euros !

Mme Frédérique Puissat. Quand même !

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Que tous ceux qui ont déposé un amendement de suppression se rendent compte que leur adoption déséquilibrerait l'ensemble de notre travail sur ce texte. Je peux éventuellement les comprendre, si leur logique est strictement politique, mais je ne le peux pas, si on a pour objectif la survie de la sécurité sociale.

Aujourd'hui, l'ampleur prise par les exonérations ne nous permet pas de rester inactifs. Il faut faire bouger les lignes : la sécurité sociale en a besoin. Il s'agit d'un point essentiel de l'équilibre de son financement.

Nous sommes conscients de la situation économique actuelle. Le rapport Bozio-Wasmer a été rédigé dans une période un peu différente et l'objectif était alors de proposer une réforme à enveloppe constante.

Aujourd'hui, il est clair que nous devons poursuivre un double objectif : faire des économies pour financer la sécurité sociale, mais sans détériorer l'emploi. La rapporteure générale a fait un travail admirable de ce point de vue, en évaluant de la manière la plus précise possible l'impact de la réforme en matière d'emploi.

Nous examinerons tout à l'heure l'amendement de la rapporteure générale : s'il a pour conséquence d'amoindrir l'effort d'1 milliard d'euros, c'est parce que nous voulons que cette réforme n'ait pas ou quasiment pas d'impact sur l'emploi.

Il faut faire les choses dans l'ordre.

Tout d'abord, nous devons lancer le débat et commencer l'étude de l'article 6. Qui prendra la responsabilité de dégrader les comptes de la sécurité sociale de quatre milliards d'euros par un seul amendement ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

Ensuite, nous affinerons cette réforme pour prendre en compte son impact sur l'emploi. Nous sommes regardés par les médias, nous avons une responsabilité collective à assumer. (Applaudissements sur les mêmes travées.)

Mme la présidente. Madame Ramia, l'amendement n° 919 est-il maintenu ?

Mme Salama Ramia. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 919 est retiré.

Madame Jacques, l'amendement n° 502 rectifié quater est-il maintenu ?

Mme Micheline Jacques. Devant les excellents arguments du président de la commission, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 502 rectifié quater est retiré.

Madame Aeschlimann, l'amendement n° 800 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Marie-Do Aeschlimann. Naturellement, nous nous levons tous pour un amendement à quatre milliards d'euros !

L'examen de ces amendements a eu le mérite de poser le débat. Au Sénat, nous savons débattre et nous écouter.

Nous avons mis sur la table les difficultés qui tiennent à des singularités territoriales et à des particularités économiques et sectorielles.

Mais le problème tient aussi à la manière de procéder. Il y a quelques mois, le Sénat a examiné la proposition de loi visant à rendre obligatoires les « tests PME », qui prévoit qu'aucune mesure concernant les entreprises ne serait prise sans évaluation ou étude d'impact.

Nous en avons tous conscience, la situation est très grave et nous devons faire des économies. Toutefois, la suppression des allégements généraux ne suffira pas pour permettre aux entreprises de recommencer à recruter. (M. Victorin Lurel acquiesce.)

Nous devons avoir une discussion de fond sur le financement de notre protection sociale, mais aussi sur la manière de réactiver la compétitivité et de réarmer l'emploi.

Je retire l'amendement n° 800 rectifié bis et je veux remercier la rapporteure générale et le président de la commission de leur pédagogie et de l'intelligence avec laquelle ils nous ont expliqué pourquoi retirer nos amendements. (Mme Jocelyne Guidez applaudit.)

Mme la présidente. L'amendement n° 800 rectifié bis est retiré.

Monsieur Khalifé, l'amendement n° 1167 rectifié bis est-il maintenu ?

M. Khalifé Khalifé. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 1167 rectifié bis est retiré.

Madame Petrus, l'amendement n° 111 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Annick Petrus. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 111 rectifié bis est retiré.

Mme Catherine Conconne. Madame la présidente, certaines questions n'ont pas reçu de réponse !

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 197, 246 rectifié sexies, 405 rectifié ter et 609 rectifié bis.

J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant des groupes Les Républicains et Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)

Mme la présidente. Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 48 :

Nombre de votants 322
Nombre de suffrages exprimés 318
Pour l'adoption 31
Contre 287

Le Sénat n'a pas adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

L'amendement n° 428 rectifié quater, présenté par M. Fouassin, Mme Schillinger, MM. Patient et Buis, Mme Nadille, M. Buval et Mme Ramia, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3, au début

Insérer les mots :

Sans préjudice des dispositions des articles L. 752-3-2 et L. 752-3-3 du code de la sécurité sociale,

II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Stéphane Fouassin.

M. Stéphane Fouassin. Cet amendement simple et de bon sens est essentiel : il vise à préserver un dispositif indispensable à nos territoires ultramarins, comme je l'indiquais il y a quelques minutes.

Pourquoi est-il crucial ? Nous proposons, par l'insertion d'une précision juridique, de maintenir l'exonération de cotisations sociales dont bénéficient spécifiquement les outre-mer, conformément aux articles L. 752-3-2 et L. 752-3-3 du code de la sécurité sociale. Ces exonérations sont non pas un privilège, mais un outil vital pour soutenir le tissu économique et social de territoires confrontés à des réalités structurelles bien différentes de celles de l'Hexagone.

Notre objectif est clair : éviter que ces dispositifs spécifiques soient fragilisés par la réforme des allégements généraux prévue à l'article 6. En intégrant à ce dernier notre précision, nous garantissons la sécurité juridique et l'efficacité des exonérations spécifiques aux outre-mer. Il s'agit d'une proposition équilibrée et responsable.

Nous avons également veillé à la soutenabilité financière de la mesure. La perte de recettes pour la sécurité sociale sera intégralement compensée par une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs. Ce choix est pragmatique et juste et ne met pas en péril les comptes sociaux.

Mes chers collègues, cet amendement est une nécessité. Il vise à protéger les outre-mer d'une instabilité juridique qui pourrait avoir des conséquences économiques graves. Il garantit que la solidarité nationale, avec cohérence, reste adaptée aux besoins de ces territoires spécifiques et il le fait dans un cadre fiscal équitable, sans peser sur les finances publiques. Je vous invite donc à le soutenir pour sécuriser un dispositif essentiel et tenir nos engagements envers nos compatriotes ultramarins.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Nous avons déjà commencé à parler de la situation des outre-mer et je comprenais tout à fait la position de nos collègues ultramarins qui, persuadés que l'article 6 aurait des répercussions majeures sur les allégements très légitimes dont leurs territoires bénéficient, défendaient sa suppression.

Monsieur le sénateur, l'amendement que vous proposez ne permet pas d'atteindre, d'un strict point de vue juridique, votre objectif. Sincèrement, il est trop fragile de ce point de vue.

Je vous appelle donc à soutenir l'amendement n° 124, que je défendrai au nom de la commission des affaires sociales. Nous y avons longuement travaillé et je pense qu'il répond mieux à votre préoccupation.

C'est pourquoi la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Les dispositifs spécifiques seront nécessairement affectés par la révision des allégements généraux.

C'est pour cette raison que nous demandons au Parlement de nous autoriser à prendre une ordonnance en la matière pour nous assurer d'une bonne articulation de l'ensemble de ces mesures et je peux vous assurer que nous travaillerons en étroite collaboration avec les parlementaires pour préparer cette ordonnance. Nous verrons aussi tout à l'heure le sort qui sera réservé à l'amendement n° 124 de la commission.

Par ailleurs, un rapport de l'Igas et de l'IGF, qui sera remis dans les prochaines semaines, a été présenté aux délégations aux outre-mer du Sénat et de l'Assemblée nationale : il conclut à une très grande complexité du dispositif actuel, à un manque de cohérence sectorielle et à une efficacité qui gagnerait à être améliorée. L'ordonnance sera aussi l'occasion de travailler pour améliorer les choses.

Pour ces raisons, je vous demande de retirer cet amendement. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. Monsieur Fouassin, l'amendement n° 428 rectifié quater est-il maintenu ?

M. Stéphane Fouassin. Non, je le retire, madame la présidente. Nous reparlerons tout à l'heure de ce sujet à l'occasion de l'examen de l'amendement n° 124.

Mme la présidente. L'amendement n° 428 rectifié quater est retiré.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de Mme Sylvie Robert.)

(À suivre)