Mme Ghislaine Senée. Cet amendement vise à geler le taux de cotisation patronale sur les traitements des agents publics versée à la CNRACL.
Le Gouvernement a annoncé une série de hausses du taux de 4 points en 2025, 2026 et 2027 ; pour sa part, la commission propose d’augmenter ce taux de 3 points, mais sur quatre années successives. Malheureusement, le résultat reste le même : la charge pour les collectivités va substantiellement s’accroître. Les élus locaux sont unanimes, cette hausse ne sera pas supportable pour les finances publiques locales.
Au regard de l’esprit de responsabilité, maintes fois rappelé lors de la discussion générale par les ministres et les membres de la majorité sénatoriale, cet amendement doit-il être considéré comme irresponsable ? Une chose est certaine : l’ensemble des élus locaux, ainsi que leurs associations, demandent ce gel. Dans ces conditions, je réitère ma question : cet amendement doit-il être considéré comme irresponsable ? Je ne le pense pas ; je pense même que bon nombre de sénateurs et de sénatrices ici présents sont également de cet avis.
C’est notre rôle, au Sénat, de défendre les collectivités locales et de préserver le bon fonctionnement des établissements publics de santé. Aussi, comment pourrions-nous accepter que l’on attaque, une fois encore, la capacité d’autofinancement de nos communes, intercommunalités, départements, régions et, partant, leur capacité d’agir ?
Faut-il rappeler que la CNRACL a contribué à hauteur de 100 milliards d’euros à la solidarité intercaisses, ce qui ne lui a pas permis de constituer des réserves ? Faut-il aussi rappeler qu’outre l’évolution démographique, avec le changement des rapports cotisants-retraités, le déficit de la CNRACL s’explique en partie par le développement du recours aux contractuels, c’est-à-dire des personnels non affiliés à la Caisse, ce qui réduit d’autant le nombre de cotisants.
Un quart des effectifs des fonctions publiques territoriale et hospitalière sont aujourd’hui non titulaires. Cette nouvelle hausse du taux de cotisation patronale va donc accroître ce phénomène. Elle satisfera certes toutes celles et tous ceux qui ne cessent d’attaquer le statut de fonctionnaire, mais elle se fera au grand dam de celles et ceux qui, au contraire, défendent la qualité des services publics.
La hausse des cotisations va finalement aboutir à un transfert de dette de la CNRACL vers les collectivités et les hôpitaux, déjà fortement endettés. Aussi, pour le service public de santé et pour le service public local, il est urgent de geler le taux pour 2025 et de réunir toutes les parties prenantes afin d’étudier leurs propositions pour équilibrer le régime.
Je veux alerter le Sénat : proroger la réforme d’une année ne répond absolument pas à l’urgence. Cela ne fera qu’aggraver et la crise hospitalière et la crise démocratique qui se dessinent pour 2026.
M. le président. La parole est à Mme Annick Jacquemet, pour présenter l’amendement n° 533 rectifié.
Mme Annick Jacquemet. Nous refusons également toute augmentation du taux de cotisation à la CNRACL. Ma collègue a très bien défendu cet amendement. Pour ma part, je me contenterai d’insister sur les difficultés que rencontrent déjà les collectivités pour boucler leur budget.
M. le président. La parole est à Mme Guylène Pantel, pour présenter l’amendement n° 604 rectifié.
Mme Guylène Pantel. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 637 rectifié.
Mme Annie Le Houerou. Cet amendement vise à annuler la hausse de 4 points pendant trois ans ou de 3 points pendant quatre ans – de toute façon, c’est la même chose – du taux de contribution patronale sur les traitements des agents des collectivités territoriales.
Cette mesure constitue une nouvelle atteinte à l’équilibre financier des collectivités territoriales, déjà très fragilisées, qui n’a fait l’objet d’aucune concertation avec lesdites collectivités.
Cette hausse de 4 points représenterait pour les seuls départements une dépense supplémentaire de 400 millions d’euros dès 2025. Cette ponction, même réduite un peu chaque année, est insoutenable, particulièrement dans un contexte de tension budgétaire exacerbée par l’inflation et la crise énergétique, qui limitent déjà les capacités d’action des collectivités.
Si les causes du déséquilibre du régime de CNRACL sont bien identifiées – les compensations interrégimes, un ratio cotisants-pensionnés défavorable, un recours croissant aux contractuels –, cette hausse brutale de la cotisation vieillesse ne répond à aucune de ces problématiques structurelles. Au contraire, elle aggrave l’injustice en faisant peser sur les collectivités le poids de déficits dont elles ne sont pas responsables.
Les départements sont particulièrement en difficulté aujourd’hui. Or ce sont eux qui assurent les dépenses de cohésion sociale. Il s’agit du cœur de leurs compétences.
Par ailleurs, nous connaissons tous la situation financière extrêmement difficile des établissements hospitaliers. Les déficits, abyssaux, ont été multipliés par trois depuis 2020. Beaucoup d’établissements ne paient plus leurs cotisations Urssaf et demandent à leurs fournisseurs des délais de paiement insoutenables.
Nous parlions tout à l’heure de l’insincérité de la présentation de votre budget. C’en est ici un bon exemple : cette baisse permet au Gouvernement d’afficher une augmentation des dépenses de santé, alors qu’il s’agit d’un tour de passe-passe budgétaire que nous dénonçons avec force.
Mme Émilienne Poumirol. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour présenter l’amendement n° 928.
Mme Céline Brulin. Nous souhaitons nous aussi empêcher l’augmentation du taux de cotisation à la CNRACL.
Tout à l’heure, madame la rapporteure, dans votre intervention en discussion générale, vous avez déclaré que les hôpitaux et les collectivités étaient sans doute parmi les services publics les plus exsangues aujourd’hui. Je ne saurais mieux dire.
À mon sens, cette augmentation du taux est à la fois intenable et injuste.
Intenable, comme de nombreux exemples concernant les collectivités nous l’ont montré. Ce n’est pas à des sénateurs que je vais expliquer les difficultés des communes pour élaborer leur budget en ce moment, tributaires de la longue liste des coups de rabot auxquels elles sont confrontées. Il en va de même pour les établissements hospitaliers : lors de son audition, le directeur du CHU de Saint-Étienne nous expliquait que l’augmentation du taux de cotisation à la CNRACL équivalait à 120 emplois. Quel CHU peut aujourd’hui se priver de 120 emplois ?
Injuste, parce qu’il faut d’abord se rappeler que les employeurs ont payé pendant des années des surcotisations à la CNRACL. Celle-ci est de surcroît venue au secours d’autres régimes pour la modique somme de 100 milliards d’euros en euros constants. Enfin, il avait été question d’une reprise de la dette de la CNRACL – la caisse est en déficit depuis 2020, si ma mémoire est bonne – dans le cadre de la réforme de 2021, ce qui n’a pu se faire en raison de la crise de la covid-19.
Il nous faut trouver des remèdes structurels pour ce régime, qui souffre à la fois d’un ratio démographique défavorable et d’une baisse des emplois de fonctionnaires par rapport aux contractuels. Or une augmentation du taux, que ce soit sur trois ou quatre ans, est tout sauf une mesure structurelle : cela revient à repousser le problème à plus tard en asphyxiant un peu plus les collectivités et les hôpitaux. (Marques d’impatience sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Céline Brulin. Cela n’est pas acceptable !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Les auteurs de ces amendements souhaitent que le taux de cotisation à la CNRACL reste figé à 31,65 % dans les années à venir.
Je rappelle que, selon un rapport récent réalisé conjointement par l’inspection générale des affaires sociales, l’inspection générale des finances (IGF) et l’inspection générale de l’administration (IGA), la CNRACL sera déficitaire de 3,8 milliards d’euros en 2024 et, si rien n’est fait, de 11,1 milliards d’euros en 2030.
En ce qui concerne l’année 2025, la hausse de 4 points initialement prévue aurait rapporté 2,3 milliards d’euros. C’est un élément essentiel de l’effort de redressement des finances sociales. Nous avons souhaité tenir compte des difficultés particulières des collectivités territoriales et des hôpitaux. Aussi, la commission des affaires sociales a proposé d’étaler la hausse de 12 points sur quatre ans au lieu de trois.
Le Premier ministre a déclaré à Angers, le 15 novembre dernier, qu’il acceptait cette proposition. Celle-ci rapportera, en 2025, 600 millions d’euros de moins que prévu. Dans ces conditions, il ne me paraît pas raisonnable de vouloir aller plus loin en figeant les taux l’année prochaine. Il faut bien trouver des solutions…
J’entends bien que les contractuels, qui ne cotisent pas, posent problème.
Mme Émilienne Poumirol. Il y a de moins en moins de fonctionnaires !
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Il faudra certainement s’intéresser à cette question. Pour autant, la démographie est ce qu’elle est.
Je n’ai pas bien compris la référence à la surcotisation ; je pense que vous voulez plutôt parler de la solidarité qui s’est manifestée entre les différents régimes.
Toujours est-il que si nous laissons les choses en l’état, c’est non pas d’une journée, mais de deux journées de contribution solidarité dont nous aurons besoin. Je comprends bien les difficultés des collectivités territoriales, mais nous ne pouvons faire porter tous les efforts sur d’autres. Ce serait tout aussi compliqué.
La commission est défavorable à ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Je veux vous rappeler l’importance des enjeux financiers.
En 2030, le déficit de la CNRACL sera de 10 milliards d’euros, quand l’ensemble des déficits de la branche vieillesse sera de 14 milliards d’euros. J’y insiste, cette caisse représentera 10 milliards d’euros à elle seule sur les 14 milliards d’euros de déficit total de la branche vieillesse. On voit bien que le système n’est absolument pas soutenable pour les pensionnés eux-mêmes.
Nous avons souhaité lisser la hausse sur trois ans, à la différence du rapport d’inspection, qui proposait des mesures beaucoup plus brutales. La commission, quant à elle, a proposé un lissage sur quatre ans. Le Premier ministre s’est également prononcé dans ce sens, lors des assises des départements, en exprimant sa préférence pour une hausse annuelle des cotisations de 3 points pendant quatre ans au lieu de 4 points pendant trois ans.
Cette augmentation, je le rappelle, est absolument nécessaire pour maintenir la soutenabilité du régime de retraite et assurer le versement des pensions des agents des collectivités locales et des agents hospitaliers, dont la retraite constitue un droit acquis.
C’est pourquoi je suis défavorable à ces amendements identiques.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Par ces amendements, nous vous demandons d’examiner sérieusement les autres solutions, ce que vous n’avez jamais fait.
Les contractuels représentent actuellement 22 % des effectifs, ce qui veut dire que plus d’un agent public sur cinq est un contractuel qui ne cotise pas à ce régime.
J’ai entendu certains dire qu’il faudrait peut-être les faire cotiser… Justement, un amendement allant dans ce sens a été déposé ; j’imagine qu’il recevra un avis favorable de la rapporteure, ce dont je me réjouis.
Il faut mettre en place un système de taxation pour dissuader l’embauche de contractuels. Le coût de ces derniers ne doit pas être inférieur à celui des fonctionnaires.
Au moment de la prime Ségur, le solde de la CNRACL s’est amélioré de 800 millions d’euros. C’est aussi simple que cela ! Pour la même raison, nous déplorons le gel de la valeur du point des années durant. Ce raisonnement peut être calqué sur tout le système de retraite : quand le salaire moyen ne suit pas l’inflation, décroche ou baisse par rapport au PIB, les ressources de la sécurité sociale s’assèchent d’autant.
Je voudrais aussi revenir sur les 100 milliards d’euros de contribution de la CNRACL à la solidarité entre caisses. Rappelons tout de même que le Fonds de réserve pour les retraites (FRR) a été asséché, dilapidé par les récents gouvernements pour rembourser des dettes tout à fait différentes, en l’occurrence celles qui résultaient du covid-19. Je n’ai rien contre la solidarité, mais il me semble que ce fonds aurait pu servir à faire front, à passer ce que l’on appelle la bosse démographique. Mais vous l’avez asséché, et l’on doit maintenant faire face au rapport démographique à l’état pur.
J’y insiste : des solutions, il y en a, qu’il s’agisse des salaires, du recours aux contractuels ou du rétablissement d’un fonds de réserve pour affronter la fameuse bosse…
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Mme la rapporteure disait ne pas comprendre notre référence à une surcotisation, mais c’est en fait tout simple : si le solde de la CNRACL était positif à cette époque, c’est parce que les cotisations étaient plus élevées qu’elles ne l’auraient été si elles n’avaient dû servir qu’à régler les retraites des fonctionnaires. Parallèlement, comme il a été rappelé, la CNRACL, bénéficiaire, a servi de caisse de solidarité pour d’autres caisses, dont les adhérents cotisaient beaucoup moins : il faut quand même s’en souvenir.
Ce qui me choque, dans cette décision, c’est son caractère abrupt : elle a été prise sans aucune concertation avec les collectivités locales, qu’il s’agisse des communes ou des départements, pour lesquels c’est une véritable catastrophe.
Ajoutons enfin, comme Mme Poncet Monge vient de le rappeler, que les 22 % de contractuels représentent autant de cotisations en moins.
L’impression qui se dégage de nos débats depuis tout à l’heure, c’est que l’on a affaire à une politique de marchands de tapis. Cette après-midi, Mme la ministre de la santé nous annonçait que l’augmentation du ticket modérateur, qui devait être de 10 points, ne serait que de 5 points : soyez contents ! L’augmentation des cotisations à la CNRACL devait se faire en trois ans, elle se ferait désormais en quatre ans : soyez contents ! Eh bien, non ! Ce n’est pas une politique que de faire de petites concessions, des semblants de concessions ; ce n’est pas une vraie politique de santé.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Je veux simplement apporter deux éléments d’information pour éclairer le débat.
Premièrement, si nous sommes tous conscients que la CNRACL a connu des excédents importants, il faut en revanche rappeler qu’une bascule s’est produite en 2018 et que, depuis lors, les exercices annuels sont tous déficitaires. On peut discuter des raisons de ce changement, accuser le recours accru aux contractuels, mais ce déficit n’en grossit pas moins. Cela veut dire que, si aucune décision n’est prise, quels que soient les capacités ou les stocks de réserves de la CNRACL, on approchera bientôt d’un résultat relativement nul.
Deuxièmement, le Sénat a voulu porter un regard global sur le sujet des finances des collectivités ; nos collègues membres de la commission des finances pourront nous le confirmer. L’effort demandé aux collectivités, de 5 milliards d’euros à l’origine – nous avons tous considéré que c’était beaucoup trop important, notamment pour celles qui ont peu d’excédents, en particulier les départements – englobe plusieurs dispositifs : nous les avons tous considérés, qu’il s’agisse de l’impact des mesures prises concernant le FCTVA, que nous souhaitons minimiser, ou de celui de l’augmentation des cotisations à la CNRACL.
Le choix de procéder à cette augmentation sur quatre ans plutôt que sur trois n’est pas le résultat d’une négociation de coin de table : simplement, avec la commission des finances, nous avons examiné cet effort de manière globale. Il nous semblait trop important, mais nécessaire à l’équilibre des comptes publics. Ce qui nous importait, en réalité, c’est que la facture globale soit supportable pour les collectivités. C’est pour y parvenir que nous avons fait le choix d’une diminution de leur contribution globale au travers de plusieurs ajustements que nous serons amenés à voter lors de l’examen du projet de loi de finances, dans les semaines qui viennent, notamment pour ce qui concerne le fonctionnement du FCTVA.
Nos choix concernant la CNRACL s’inscrivent dans ce regard global : même s’il s’agit de deux budgets différents, la vision doit être commune, l’un devant renforcer l’autre. Nous avons défini des priorités dans les efforts, ce qui explique notre choix de quatre ans plutôt que trois.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Ce que je vois, depuis tout à l’heure, c’est que, dans ce PLFSS, on fait les poches à tout le monde ! On fait les poches aux travailleurs, on fait les poches aux retraités, on fait les poches maintenant aux collectivités locales ! En somme, vous vous attaquez à tout le monde ! (On le revendique sur des travées du groupe Les Républicains.)
Il y a quand même un petit souci : vous vous attaquez à tous ceux qui sont fragilisés dans notre société, y compris les communes et les départements, mais qu’en est-il des riches ? Ça ne vous dit rien ? Tout ce qu’on pourrait prendre de ce côté-là, toutes ces exonérations de cotisations, ça ne vous parle pas ? C’est à cela qu’il faudrait s’attaquer, ne croyez-vous pas ? Ou bien pensez-vous qu’il faille continuer ainsi ?
Pour ma part, madame la ministre, je vous demande solennellement de bien vouloir, pour une fois, écouter les maires, les présidents d’intercommunalités, les présidents de région. L’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) vous demande justement de surseoir à votre décision concernant la CNRACL.
Vous frappez déjà les collectivités par le fonds de précaution. Je suis élue d’un département où nombre de communes ont été inondées et ont un mal fou à se relever ; aujourd’hui, les communautés d’agglomération qui les aident vont être victimes de vos décisions concernant le fonds de compensation, et voilà qu’en plus de cela vous leur mettez la CNRACL sur le dos !
Madame la ministre, vous mettez tout le monde en difficulté et n’écoutez personne, pas même l’AMF. Il est quand même incroyable de constater que, même quand c’est l’association des maires qui vous demande de surseoir à cette décision, vous faites la sourde oreille. Mais qui allez-vous écouter ? Qui entendez-vous encore ? Soyons un peu sérieux : il faut se ressaisir, il est encore temps.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 518 rectifié, 533 rectifié, 604 rectifié, 637 rectifié et 928.
J’ai été saisi de trois demandes de scrutin public émanant, la première, du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, la deuxième, du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires et, la troisième, du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 45 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Pour l’adoption | 127 |
Contre | 212 |
Le Sénat n’a pas adopté.
L’amendement n° 375, présenté par MM. Szczurek, Durox et Hochart, est ainsi libellé :
Après l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 1434-4 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un médecin retraité désirant reprendre une activité afin de répondre aux besoins des services hospitaliers en manque de personnel ou des zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins définies par l’agence régionale de santé au sens du présent article, est exonéré de cotisation retraite au titre de l’exercice de cette activité, sans affection des autres cotisations sociales éventuellement dues. »
II. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration de la taxe visée à l’article 235 ter ZD du code général des impôts.
La parole est à M. Aymeric Durox.
M. Aymeric Durox. Cet amendement vise à instaurer un dispositif d’exonération de cotisation de retraite permettant d’inciter les médecins retraités à reprendre une activité professionnelle, dans le but de pallier le manque de professionnels de santé dans les zones médicalement sous-dotées, aussi appelées déserts médicaux.
La situation est catastrophique du fait des politiques déconnectées menées depuis des décennies. Adopter cet amendement permettrait d’améliorer quelque peu l’accès des Français aux soins.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 disposait, en son article 13, que les médecins libéraux retraités reprenant leur activité dans le cadre du cumul emploi-retraite seraient exonérés de cotisations vieillesse pour la seule année 2023, à la condition que leurs revenus n’excèdent pas un plafond fixé par décret à 80 000 euros annuels.
Le Gouvernement a déposé sur le présent texte un amendement n° 1341 visant à reconduire cette mesure, au titre de l’année 2025, pour les seuls médecins libéraux exerçant leur activité en situation de cumul emploi-retraite dans des zones caractérisées par une offre de soins insuffisante, telle que définie par l’agence régionale de santé. Ils seraient ainsi exonérés des cotisations d’assurance vieillesse dues pour les revenus d’activité perçus en 2025 au titre de leur régime de base, de leur régime complémentaire et de leurs prestations complémentaires de vieillesse. En revanche, contrairement à la mesure de 2023, cette exonération ne leur ouvrirait aucun droit à retraite de base en vue d’une seconde pension.
Je vous proposerai, mes chers collègues, d’adopter cet amendement du Gouvernement ; je suis en conséquence défavorable à celui-ci, qui vise à instaurer une exonération pérenne.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Le Gouvernement partage votre volonté de lutter contre les déserts médicaux, monsieur le sénateur. Par conséquent, afin d’inciter les médecins libéraux retraités à reprendre une activité, il est favorable à l’élargissement aux médecins en cumul emploi-retraite de l’accès au régime simplifié des professions médicales, et ce sur tout le territoire.
Ce dispositif permet de simplifier considérablement les démarches et de réduire les prélèvements sociaux dus par le médecin en cumul emploi-retraite. Il répond aussi, en ce sens, au besoin de flexibilité des médecins libéraux à la retraite qui voudraient poursuivre ou reprendre leur activité. Il a fait l’objet d’un amendement adopté en séance publique à l’Assemblée nationale et devenu l’article 3 ter du présent projet de loi.
Cet élargissement du régime simplifié ne pourra cependant être pleinement mis en œuvre qu’à compter de 2026, en raison d’un certain nombre de contraintes techniques. En attendant, au vu de l’urgence de la situation dans les déserts médicaux, il apparaît pertinent de favoriser le maintien en activité des médecins libéraux retraités qui souhaitent exercer dans des zones d’intervention prioritaires, à savoir les zones sous-denses, dans lesquelles, comme vous le soulignez, les besoins sont plus importants.
Le Gouvernement propose donc que ces médecins soient exonérés temporairement des cotisations d’assurance vieillesse de base et complémentaires dues sur les revenus d’activité de 2025, dans la limite d’un plafond. Tel est le sens de l’amendement n° 1341, qui vous sera soumis dans quelques instants et au profit duquel je vous invite à retirer votre amendement.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. Nous serons très certainement amenés à reparler du cumul emploi-retraite pour les médecins. Si je ne me trompe, quelque 15 000 médecins continuent aujourd’hui de travailler après leur retraite et font tenir notre système de santé face au problème des déserts médicaux.
Je veux simplement faire remarquer que le Gouvernement, encore une fois, ne trouve rien d’autre à nous proposer qu’une exonération de cotisations sociales. C’est toujours cette approche que vous privilégiez. Pour notre part, nous préférerions que le médecin en cumul emploi-retraite cotise, et que ces cotisations lui ouvrent des droits supplémentaires, ce qui est normal dans la mesure où il travaille plus longtemps. L’exonération n’est pas, selon nous, la bonne réponse.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. Je voudrais abonder dans le sens de Mme Poumirol : il faudrait tout de même changer quelque peu de méthode.
Si j’ai bien suivi les dernières évolutions du droit, aujourd’hui, en cas de cumul emploi-retraite, on peut en quelque sorte liquider une seconde fois ses droits à la retraite, ce qui n’était pas le cas auparavant ; alors, on cotisait sans prestations, à fonds perdu. Ce problème a été résolu, d’une manière à laquelle je suis assez favorable, en liant cotisations et prestations : désormais, si l’on continue son activité après la liquidation de sa retraite, on pourra, quand on l’arrêtera définitivement, bénéficier d’une revalorisation de ses droits, notamment pour ce qui est de la retraite complémentaire. C’est une bonne chose, c’est acquis.
Mais ce que l’on propose à présent, c’est tout à fait paradoxal : plutôt que de cotiser sans avoir de droits, comme auparavant, ou de cotiser en ayant des droits, comme aujourd’hui, on voudrait que ces personnes ne cotisent pas, mais aient des droits. C’est ce qu’on appelle un dispositif asymétrique, qui plombe la sécurité sociale. On en trouve un exemple similaire avec les exonérations de cotisations sur les heures supplémentaires : cela ne sert à rien, cela n’a aucun effet sur l’emploi, cela ne fait que générer de purs effets d’aubaine, et les personnes auxquelles s’appliquent ces exonérations n’en bénéficient pas moins des droits afférents à ces dernières, notamment en matière d’assurance maladie. Ces dispositifs asymétriques, similaires à ce qui est demandé dans cet amendement, c’est vraiment la mort de la sécurité sociale !