Mes chers collègues, il est urgent de mettre en place des solutions concrètes pour renforcer les capacités de nos Sdis. Le financement pérenne de ces services est un impératif absolu pour faire face aux risques actuels et à ceux qui viendront. Gouverner, c'est prévoir : sur des sujets aussi essentiels, il faut le démontrer. (Applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST et RDSE. – M. Pierre Barros applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Nicolas Daragon, ministre délégué auprès du ministre de l'intérieur, chargé de la sécurité du quotidien. Monsieur le sénateur Gillé, des travaux sont menés sur la santé des sapeurs-pompiers. D'une part, le rapport de la sénatrice Poumirol – vous l'avez salué – visait à reconnaître certains cancers comme des maladies professionnelles. D'autre part, un observatoire de la santé a été lancé pour recenser auprès de tous les acteurs leurs difficultés réelles.

Concernant les nouvelles tenues de feu et les cagoules plus protectrices, la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) met en avant un prix de l'ordre non pas de 2 000 euros, mais plutôt de moins de 1 000 euros. Visiblement, ces vêtements seront disponibles l'an prochain. Les équipements seront évalués par la direction générale, mais leur prise en charge restera de la responsabilité des Sdis.

Monsieur le sénateur, vous soulevez à juste titre la question des difficultés de financement. Elle fait partie des sujets que nous aborderons le 11 ou le 12 décembre prochain, en fonction du maintien ou non d'un mouvement de grève annoncé. Nous nous réunirons avec les départements pour étudier toutes les perspectives liées à la taxe spéciale sur les conventions d'assurances, à la taxe de séjour et à la fiscalité.

Le débat ne sera pas limité à certaines thématiques. L'objectif est d'obtenir le meilleur système possible. Il faut permettre à chaque département de garder des forces de secours suffisantes et équipées, mais aussi protéger les sapeurs-pompiers, auxquels nous sommes évidemment tous très attachés.

M. le président. La parole est à M. Pierre-Jean Verzelen. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Pierre-Jean Verzelen. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme un certain nombre d'entre nous dans cet hémicycle, j'ai eu la chance d'exercer la responsabilité de président de Sdis, de rencontrer des gens dévoués et de participer, à leurs côtés, à un modèle de sécurité civile qui fonctionne bien. Je remercie le groupe RDSE d'avoir proposé ce débat.

Pour ma part, j'aborderai trois points.

Premièrement, notre modèle doit être sauvegardé. Le statut de sapeur-pompier volontaire est celui de 80 % des effectifs. L'engagement des volontaires permet d'assurer un maillage territorial efficace et des délais d'intervention rapides. Face à un accident, à un incendie ou à toute autre situation grave, les premières minutes sont déterminantes.

Une épée de Damoclès pèse sur le statut du volontariat à la française. Depuis l'arrêt Matzak de la Cour de justice de l'Union européenne et l'avis rendu par le Comité européen des droits sociaux de février 2024, plane le risque que le sapeur-pompier volontaire soit requalifié en travailleur. Autant vous dire que le modèle s'effondrerait avec la fin du volontariat !

J'ai profité de la campagne des élections européennes pour interpeller les têtes de liste des principaux mouvements politiques, afin de leur demander de saisir la Commission européenne pour apporter enfin des clarifications. J'ai envoyé plusieurs lettres il y a six mois. Je n'ai reçu pour l'instant qu'une seule réponse… pour m'informer que mon courrier était bien arrivé !

Deuxièmement, je souhaite que les Sdis soient mieux compensés pour les services qu'ils assument en lieu et place d'autres services publics.

Les casernes sont le dernier endroit où la lumière est allumée la nuit. Il s'y trouve toujours quelqu'un au bout du fil, des hommes et des femmes capables de se projeter rapidement pour intervenir, tant et si bien que les Sdis assument des missions qui, à l'origine, ne sont pas les leurs.

Concernant les carences ambulancières, le service d'aide médicale urgente (Samu) a pris la mauvaise habitude d'appeler ceux qui décrochent le plus vite et qui coûtent le moins cher, c'est-à-dire les pompiers. Ceux-ci assument maintenant une bonne partie des transports sanitaires. Les Sdis accompagnent, soutiennent et suppléent les services mobiles d'urgence et de réanimation (Smur) pour assurer des transports médicalisés d'urgence vers les hôpitaux dans les meilleures conditions.

Ces interventions sont peu, voire pas du tout compensées par les agences régionales de santé (ARS). Un certain nombre de Sdis ont attaqué des hôpitaux devant le tribunal administratif, mais ils ont tous été déboutés. Chacun comprend que ces réalités pèsent sur l'organisation humaine et sur les finances des services.

Troisièmement, à quelques jours de l'examen du projet de loi de finances par le Sénat, je ne puis éviter le sujet de la TSCA et de la nécessaire augmentation de la part revenant aux conseils départementaux, afin de financer les Sdis.

Les pompiers se mobilisent pour venir en aide aux départements qui leur sont voisins quand ceux-ci sont confrontés à des catastrophes – c'est tout à fait normal – ou pour renforcer les dispositifs de sécurité, comme pour les jeux Olympiques.

L'État s'engage à prendre en charge une partie des coûts liés à ces déplacements. Je ne sais pas pour les autres départements, mais les factures dans l'Aisne ne sont toujours pas payées. Veillons à ne pas répéter les mêmes erreurs que pour les loyers des gendarmeries !

Monsieur le ministre, sur tous ces points, nous attendons avec impatience vos réponses. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du groupe RDSE. – M. Hervé Gillé applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Nicolas Daragon, ministre délégué auprès du ministre de l'intérieur, chargé de la sécurité du quotidien. Tout d'abord, monsieur le sénateur Verzelen, nous sommes particulièrement attachés au modèle, que nous souhaitons sauvegarder, d'une sécurité civile fondée sur le volontariat.

Non, les sapeurs-pompiers volontaires ne sont pas des travailleurs ! Toutefois, certaines situations fragilisent le statut, notamment les gardes postées, très utilisées dans une vingtaine de départements qui ont été identifiés par l'inspection générale de l'administration et par l'inspection générale de la sécurité civile. Des travaux ont d'ailleurs été engagés par le ministère de l'intérieur pour que l'on en revienne à des pratiques plus adaptées.

Le volontariat n'est pas propre à la France. Nous souhaitons travailler sur le sujet en convergence avec d'autres pays européens, étant donné que certains de nos modèles sont comparables.

Vous m'interrogiez ensuite, monsieur le sénateur, sur la compensation des charges indues, notamment par les ARS. Il nous faudra travailler avec le ministère de la santé sur le problème de l'exercice par les sapeurs-pompiers de missions qui ne sont pas en principe les leurs. Nous nous pencherons dans le cadre du Beauvau sur la doctrine d'emploi et sur les missions qui sont dévolues aux Sdis, pour nous recentrer sur les urgences.

Il nous faudra peut-être travailler avec les fédérations d'ambulanciers. L'objectif est que ceux-ci, lorsqu'ils bénéficient de secteurs d'intervention qui leur permettent de vivre, desservent mieux d'autres zones, un peu plus complexes, dans lesquelles ils ne vont pas et où nos sapeurs-pompiers sont donc extrêmement sollicités.

Enfin, la revalorisation de la TSCA fera partie du débat qui aura lieu à la mi-décembre prochain – je risque de répondre à plusieurs reprises de la même manière ! Nous ne sommes fermés à aucune évolution : il suffit d'en débattre, de trancher et de trouver un bon accord avec les fédérations d'élus départementaux et municipaux, qui sont les contributeurs.

M. le président. La parole est à Mme Françoise Dumont. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Olivier Bitz et Michel Masset applaudissent également.)

Mme Françoise Dumont. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce soir, à la demande fort à propos du groupe RDSE, nous parlons de ce serpent de mer qu'est devenue la question du financement de la sécurité civile.

Dans le cadre des auditions que j'ai menées en tant que rapporteure pour avis du budget de la sécurité civile figurant dans le projet de loi de finances 2025, plusieurs pistes se sont dessinées ou affinées.

Une première est la réévaluation de la taxe spéciale sur les conventions d'assurances, dite TSCA. Cette taxe est dynamique, mais elle est répartie selon des critères obsolètes datant de 2003.

Une deuxième piste intéressante est la sanctuarisation de l'intégration des véhicules d'incendie et de secours dans les exceptions à l'accise sur les énergies, introduite au Sénat par l'article 50 de la loi n° 2023-580 du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque incendie.

Une troisième piste est la contribution des métropoles et des grandes agglomérations au budget des Sdis, dans un souci évident d'équité entre collectivités. Il conviendrait de rouvrir ce chantier.

Une quatrième piste est l'affectation de nouvelles ressources. Il faut creuser l'idée d'une nouvelle taxe additionnelle à la taxe de séjour, notamment pour les plateformes touristiques.

En effet, à titre personnel et en qualité d'élue d'un département très touristique, il me paraît important que des collectivités qui doublent ou triplent leur population à certaines périodes de l'année puissent augmenter leur taxe de séjour et en attribuer une part aux Sdis concernés. Cette mesure ne serait forcément vertueuse que pour les seuls départements fortement touristiques.

Une cinquième piste est de permettre aux Sdis de facturer leurs prestations, grâce à la téléassistance et à la téléalarme. Toutefois, la jurisprudence va plutôt à l'encontre d'une telle facturation, ce qui n'est pas idéal dans la situation économique actuelle.

Une sixième piste est la revalorisation des carences ambulancières, en se rapprochant du coût réel de la prestation.

Cette question n'a jamais vraiment été résolue. Une telle révision pourrait s'accompagner d'une simplification de la procédure de remboursement. En effet, les ARS versent les sommes dues aux centres hospitaliers universitaires (CHU) ; ensuite, les CHU les reversent aux Sdis. Il faudrait simplifier et prévoir un remboursement direct des ARS aux Sdis, pour éviter les blocages et les redondances de procédures.

Une septième et dernière piste serait d'inviter les assureurs à prendre part de manière plus importante au financement des Sdis. Cette solution aurait du sens au regard de la « valeur du sauvé » : les sapeurs-pompiers protégeant les biens et les personnes, leurs interventions sont autant de compensations à verser en moins aux assurés.

Comment soutenir les Sdis dans leur gestion des nouveaux risques, au regard du financement de leurs missions ? Nous nous sommes posé cette question dans le groupe de travail interne au groupe Les Républicains du Sénat sur la sécurité civile, que j'ai eu l'honneur d'animer pendant dix-huit mois.

Nous avons présenté nos travaux et remis notre rapport, le 30 octobre dernier, au ministre ici présent. Dans ce cadre, nous avons souhaité mettre en avant plusieurs préconisations de bon sens.

D'une part, au regard des moyens routiers, nous avons prôné un regroupement des commandes entre les Sdis. Il faut continuer à encourager ces mutualisations et permettre à ces services de solliciter à cette fin l'appui technique et juridique d'un pôle « innovation, stratégie et commande publique », à créer au sein de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises.

L'objectif est de réduire les coûts d'achat de véhicules et de matériels pour les Sdis, de permettre l'émergence d'une offre française et européenne susceptible de répondre aux besoins de la lutte aérienne contre le feu, ainsi que de limiter la dépendance à l'égard d'un nombre restreint d'acteurs extérieurs.

D'autre part, le groupe de travail a proposé de constituer une cellule « fonds européens » au sein de la DGSCGC. Elle disposerait de moyens humains dotés des expertises juridiques nécessaires pour servir de guichet unique national, destiné à faciliter l'accès aux fonds européens susceptibles d'être sollicités par les acteurs publics de la sécurité civile.

En effet, en France, le recours effectif aux financements européens demeure relativement limité dans ce domaine, contrairement à nos voisins. L'accès à ces subventions est souvent rendu difficile par la complexité des procédures de constitution de dossier, auxquelles le personnel des Sdis n'est pas toujours formé.

Toutes ces pistes sont autant de propositions simples et de bon sens que j'apporte ce soir à notre débat. Les finances des Sdis sont précaires et appellent à une refonte rapide des services : il faut que ces structures, disponibles vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept partout en France, soient sanctuarisées et que leurs missions soient valorisées à leur juste importance. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Nicolas Daragon, ministre délégué auprès du ministre de l'intérieur, chargé de la sécurité du quotidien. Madame la sénatrice Dumont, je vous remercie de la remise de votre très intéressant rapport lors de notre rencontre du 30 octobre dernier. J'y répondrai point par point.

La première proposition de ce texte concernait la création d'un « ministère délégué à la protection civile ». Vous avez été exaucée : je suis là ! (Sourires.) En effet, une spécificité de ce gouvernement est de disposer d'un ministère dédié à la sécurité du quotidien, dans lequel est incluse la sécurité civile. Nous aurons donc le bonheur de travailler ensemble sur ce sujet.

La deuxième proposition concernait « la mise en place d'une politique industrielle nationale et européenne de la sécurité civile, en particulier au bénéfice de la composante aérienne de cette dernière. » Il existe un projet européen, à l'état embryonnaire, de construction d'avions bombardiers d'eau pour lequel le Gouvernement a signé une lettre d'intention. Nous sommes attentifs au déploiement de cette coopération, qui nous permettrait d'acquérir des bombardiers fabriqués chez nous, tout en bénéficiant de ce fait de délais de livraison moins longs et d'une maintenance plus facile.

La troisième proposition concernait les « financements européens ». J'ai eu l'occasion d'échanger sur le sujet avec l'association nationale des directeurs de Sdis, cet après-midi, comme j'avais déjà pu échanger avec vous. En vérité, les Sdis ne peuvent parfois pas prétendre à ces financements. Dans d'autres cas, la quantité de collaborateurs ou l'ingénierie au sein de ces services ne détermine pas forcément l'obtention de fonds.

Toutefois, l'Ardèche a pu acquérir en 2022 des tablettes numériques associées aux multiparamètres, financées à 100 % par des fonds européens, pour presque 2 millions d'euros. J'ai eu l'occasion de rendre visite aux sapeurs-pompiers concernés en tant que vice-président délégué aux fonds européens à la région Auvergne-Rhône-Alpes.

Nous pouvons sans doute proposer aux Sdis de mieux les accompagner ou d'éditer à leur intention un guide des bonnes pratiques, afin qu'ils disposent des bons interlocuteurs, notamment au sein des régions et à la Commission européenne.

Pour en venir à votre propos d'aujourd'hui, je suis d'accord avec vous sur la commande publique. Les pactes capacitaires ont permis de réaliser 30 % d'économies sur les achats de camions passés par une commande groupée. Quelque 98 % de ces camions étaient français. Aussi, pour faciliter ces achats groupés, nous accompagnerons les Sdis dans la rédaction de leur cahier des charges.

Par ailleurs, l'exonération de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) à hauteur de 30 millions d'euros, c'est-à-dire de 300 000 euros par Sdis en moyenne, est à la signature : Bruno Retailleau s'en charge en ce moment même.

Quant à la taxe de séjour, elle fera partie des dossiers qui seront étudiés. Pour ma part, il me paraît assez cohérent que ceux qui visitent un territoire contribuent à sa sécurisation, notamment quand elle leur bénéficie directement.

Enfin, je terminerai en évoquant les procédures de remboursement.

M. le président. Il faut conclure, monsieur le ministre délégué.

M. Nicolas Daragon, ministre délégué. Le tarif national d'indemnisation des carences ambulancières est passé de 125 euros en 2022 à 209 euros en 2023. Je serai attentif à la revalorisation régulière de cette somme.

M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, SER et UC. – Mme Françoise Dumont applaudit également.)

Mme Patricia Schillinger. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'actualité nous rappelle, une fois encore, combien les risques naturels et les menaces modernes nécessitent de notre part une vigilance accrue et des moyens renforcés.

Les inondations récentes en Espagne, au bilan dramatique, mais aussi celles qui se sont déroulées en octobre dernier témoignent de la fréquence croissante de ces événements climatiques extrêmes. Je n'oublie pas, bien sûr, la multiplication et l'intensification des feux de forêt, qui inquiètent par leur ampleur et par leur caractère dévastateur. Surtout, ils surgissent désormais en des lieux et en des moments inattendus.

Ces phénomènes, conséquence directe du bouleversement climatique, mobilisent nos services départementaux d'incendie et de secours bien au-delà des périodes habituelles et des amplitudes de risque ordinaires. Ils nous rappellent, certes, combien il est urgent de lutter contre le réchauffement climatique, mais aussi de soutenir ces services essentiels à la sécurité des Français, d'autant que les catastrophes naturelles ne sont qu'une partie des défis actuels auxquels ces services doivent faire face.

Les nouvelles menaces, qu'elles soient terroristes ou qu'elles impliquent des risques d'attaques chimiques et biologiques, exigent également une préparation et des moyens techniques et humains spécifiques. Dans ce contexte, les sapeurs-pompiers sont appelés à être des acteurs de plus en plus polyvalents, capables d'intervenir dans des situations de crise variées et parfois inédites.

À ce stade, je tiens à rendre hommage à nos 240 000 sapeurs-pompiers, dont 80 % sont des volontaires. Ils assurent, bien souvent au péril de leur vie, une mission essentielle. Aussi ai-je une pensée émue pour celles et pour ceux qui, dans l'accomplissement de leur mission, ont perdu la vie ou ont été blessés.

Face aux bouleversements évoqués, la mission des Sdis se transforme, pour répondre à la complexité croissante des interventions et à la diversité des risques.

Cette adaptation nécessaire pèse immanquablement sur leurs dépenses, alors que ces services constituent déjà l'un des postes les plus dynamiques de la dépense publique. En effet, la modernisation des équipements, l'amélioration des conditions de travail et les revalorisations salariales, indispensables pour valoriser un engagement qui ne faiblit jamais, représentent des investissements coûteux.

À l'heure actuelle, ce sont principalement les départements qui supportent cette charge. L'État assure environ un quart des financements des Sdis, tandis que la participation du bloc communal s'est en partie déplacée vers l'intercommunalité.

C'est dans ce contexte que nous débattons aujourd'hui du financement de la sécurité et du soutien à apporter aux Sdis dans leur gestion des nouveaux risques.

Des évolutions notables ont été réalisées. Face à la recrudescence des feux de forêt, le Président de la République a pris l'initiative de renforcer la flotte aérienne, essentielle pour les interventions rapides. Face aux menaces modernes, de nouveaux équipements nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques (NRBC) ont été déployés.

De plus, des efforts importants ont été engagés pour la formation des sapeurs-pompiers et pour le développement de la coopération interservices, qui sont essentiels dans la gestion de crise.

Notre assemblée a également été particulièrement active dans le soutien apporté aux Sdis dans l'exercice de leurs missions.

Rappelons que l'exonération de taxe sur les carburants pour les véhicules des services d'incendie et de secours fait suite à une initiative prise par notre assemblée dans le cadre de la loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque incendie. Cette exonération contribue à alléger les charges pesant sur les Sdis.

Cependant, les défis restent nombreux. La pression budgétaire demeure élevée et la hausse des dépenses s'annonce difficilement tenable sur le long terme.

Dans ce contexte, il est impératif d'explorer de nouvelles pistes pour réformer et soutenir le financement des services départementaux d'incendie et de secours, car les collectivités semblent avoir de plus en plus de difficultés à suivre la dynamique de leurs dépenses. Les départements, principaux contributeurs au financement des Sdis, ne disposent que de faibles marges de manœuvre.

Aussi faut-il réfléchir aux moyens d'accroître les ressources financières des départements destinées au financement des Sdis. J'espère que le Beauvau de la sécurité civile, qui est sur le point d'être relancé, sera l'occasion de s'emparer de cette question cruciale.

Il est par ailleurs indispensable de poursuivre la lutte contre la sursollicitation des Sdis pour les transports sanitaires urgents.

La loi du 25 novembre 2021 visant à consolider notre modèle de sécurité civile et valoriser le volontariat des sapeurs-pompiers et les sapeurs-pompiers professionnels, dite loi Matras, a introduit une évolution salutaire en redéfinissant les carences ambulancières, afin d'éviter que les Sdis ne soient affectés à des missions qui ne relèvent pas de leur cœur d'intervention.

Il faut toutefois aller plus loin et rendre plus dissuasif le coût du recours aux Sdis en cas d'absence de couverture ambulancière, en envisageant par exemple une révision des tarifs de l'indemnité de substitution.

Enfin, à l'heure où le volontariat, pourtant le pilier de notre modèle de sécurité civile, montre des signes de faiblesse, il est impératif de réfléchir aux moyens d'y inciter davantage, afin de pérenniser ce modèle auquel nos concitoyens sont profondément attachés.

Je souhaite ici évoquer les centres de première intervention non intégrés (Cpini), plus particulièrement l'engagement de leur plus de 9 000 sapeurs-pompiers volontaires. L'efficacité de notre modèle de sécurité civile repose en grande partie sur cet engagement, et il convient de leur témoigner notre reconnaissance.

Pour soutenir cet effort, il conviendrait de sécuriser juridiquement la pratique de certains Sdis ou départements qui prennent en charge l'allocation de vétérance. Ouvrir plus largement cette possibilité permettrait de soulager les communes et, en même temps, de soutenir le volontariat.

Mes chers collègues, face à tous ces défis, nous devons faire les choix stratégiques qui assureront aux Sdis les moyens d'assumer leur mission dans un contexte de risques croissants et complexes. La France dispose d'une sécurité civile qui est d'un haut niveau d'excellence, mais cet atout dépend de notre engagement collectif à pérenniser et à renforcer ce modèle.

Plus que jamais, nous devons engager les réformes nécessaires au soutien et à la valorisation de ces services indispensables à notre sécurité. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées du groupe UC. – Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Nicolas Daragon, ministre délégué auprès du ministre de l'intérieur, chargé de la sécurité du quotidien. Madame la sénatrice Schillinger, sur le sujet des crises climatiques, nous partageons tous évidemment le même diagnostic. Il y a là, d'ailleurs, plus qu'un diagnostic : nous voyons les risques se réaliser, comme en Espagne très récemment.

Pour ce qui est de la France, la dernière crise que nous avons vécue aurait pu se traduire par des décès, mais cela n'a pas été le cas : douze blessés ont été recensés. Cela veut dire que les plans communaux de sauvegarde et l'organisation de la sécurité civile dans notre pays fonctionnent globalement.

Reste que peuvent survenir des crises plus graves – c'est arrivé. C'est pourquoi le Premier ministre, aux côtés d'Agnès Pannier-Runacher, a récemment présenté le plan national d'adaptation au changement climatique. Nous allons amplifier l'effort ainsi engagé, afin d'aboutir le plus rapidement possible.

Pour ce qui est de faire face aux risques complexes, hors feux de forêt, 11 millions d'euros y ont été consacrés dans les pactes capacitaires 2023 et 2024, cette enveloppe permettant notamment de répondre aux défis du changement climatique. Je le disais, un complément de 1 million d'euros va être inscrit au budget, afin de financer en particulier l'achat de pompes de grande capacité mobilisables en cas d'inondations.

Pour ce qui est des nouveaux moyens mis en œuvre pour lutter contre les feux de forêt, je veux évoquer le déploiement des pélicandromes, sujet sur lequel nous avançons petit à petit : nous venons d'inaugurer une nouvelle structure de ce type à Marignane.

Le secours aérien n'est pas en reste : un programme d'acquisition sur six ans de trente-six hélicoptères H145 a été lancé, 100 millions d'euros étant inscrits à cet effet au budget pour 2025, et notre flotte va certainement passer prochainement à quarante hélicoptères.

Enfin, pour ce qui est du financement, j'ai évoqué tout à l'heure un certain nombre de pistes qu'ont mentionnées l'ensemble des sénateurs qui se sont exprimés ce soir à la tribune. Nous y reviendrons au mois de décembre prochain !

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Roux. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mmes Patricia Schillinger et Émilienne Poumirol applaudissent également.)

M. Jean-Yves Roux. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voilà à quelques jours d'une relance du Beauvau de la sécurité civile, prévue le 25 novembre prochain. J'y vois, monsieur le ministre, l'occasion de vous faire part des préoccupations les plus concrètes des territoires ruraux.

Les services d'incendie et de secours, nous le savons, sont confrontés à l'apparition de missions nouvelles qui bousculent les équipes et les équilibres financiers. Cette situation exige une réorientation des investissements et une adaptation des formations. Je pense évidemment au risque climatique : la multiplication des épisodes climatiques violents place nos sapeurs-pompiers sous tension.

Dans le rapport d'information sur la prévention des inondations que, avec mon collègue Jean-François Rapin, je viens de présenter, nous relevons qu'entre novembre 2023 et juin 2024 des communes ont été reconnues en état de catastrophe naturelle en raison d'inondations dans 53 % des départements, correspondant à autant de Sdis.

Nous avons ainsi dressé le constat que les services de secours ont été confrontés à leurs limites durant cette crise : le manque d'équipements de pompage lourds et de capacités héliportées a en particulier été déploré. En un mot, un renforcement capacitaire est indispensable.

Je souhaite donc vivement, monsieur le ministre, que vous accueilliez favorablement les amendements tendant à améliorer la préparation des équipes que nous nous apprêtons à présenter lors de l'examen du projet de loi de finances, d'autant plus que, fait nouveau et insupportable, les opérateurs nationaux d'assurance refusent d'assurer certains Sdis, ou n'acceptent de le faire qu'à la condition d'une augmentation des primes de l'ordre de 60 %.

M. Jean-Yves Roux. Le défi qu'ont à affronter les SDIS dans nos territoires ruraux est aussi celui de la prise en charge subie du surcoût lié aux défaillances des services d'urgence hospitaliers, en particulier à la fermeture desdits services la nuit comme le jour : dans les Alpes-de-Haute-Provence, ce surcoût était de 150 000 euros en 2023 et le chiffre prévisionnel pour 2024 atteint 250 000 euros…

Ces surcoûts ne sont que trop peu compensés, et le recouvrement des factures est insuffisant. Voilà la réalité !

J'en viens au troisième point d'incertitude qui pèse considérablement sur le financement des Sdis ruraux : la part dans les effectifs des pompiers volontaires et les difficultés de recrutement. Dans mon département, le fonctionnement du service repose à 96 % sur l'engagement de sapeurs-pompiers volontaires. L'épée de Damoclès d'une possible requalification du statut fait craindre le risque d'un effondrement. Nous devons lever ces incertitudes le plus rapidement possible.

Mes chers collègues, nos Sdis sont arrivés à un point de rupture, et ce d'autant que les collectivités locales, départements en tête, contributrices à hauteur de 5,6 milliards d'euros, sont exsangues.

Or la sécurité civile ne saurait être une variable d'ajustement budgétaire ; le drame de Valence est là pour nous le rappeler. Face aux mutations en cours, des décisions budgétaires s'imposent, tant conjoncturelles que structurelles, afin de redonner aux Sdis des marges de manœuvre adéquates à la réalité de leurs missions – j'associe à mon propos notre collègue Raphaël Daubet, sénateur du Lot, avec qui j'ai partagé quelques constats communs.

Dans le cadre de l'examen du projet de budget pour 2025, monsieur le ministre, je plaide pour un engagement de l'État en ce sens ou, à tout le moins, pour un moratoire qui aiderait les départements à passer ce cap.

Concrètement, pour le département des Alpes-de-Haute-Provence, le projet d'augmentation de quatre points de la cotisation employeur à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) représente 180 000 euros de dépenses en plus, quand la perte annoncée de deux points du taux du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) signifie 230 000 euros de recettes en moins. Le bilan est simple : un endettement accru et l'impossibilité de renouveler le matériel. Est-ce bien prudent ? Est-ce juste ?

Ce n'est pas nouveau, mais cela devient urgent : des mesures structurelles de bon sens s'imposent, au premier rang desquelles la mutualisation et – son corollaire – la péréquation.

Deuxième piste d'action : la rationalisation de la commande publique et une exigeante simplification administrative et normative.

Troisième proposition – tout le monde en a parlé : à défaut d'autres solutions, l'augmentation de la fraction de taxe spéciale sur les conventions d'assurances (TSCA) dévolue aux SDIS me paraît inévitable.

Au total, nous avons plus que jamais besoin d'un contrat d'objectifs et de performance clair, posant les bases d'un partenariat de sécurité civile entre l'État, les départements et les autres collectivités concernées.

Je conclurai mon propos par ce point, monsieur le ministre : dans mon département des Alpes-de-Haute-Provence, petit département de 160 000 habitants, nous avons mis en place au collège des classes de jeunes sapeurs-pompiers volontaires, ainsi que, depuis 2023, un bac professionnel de sécurité civile.