M. le président. La parole est à Mme la ministre de la transition écologique, de l’énergie, du climat et de la prévention des risques.

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de lénergie, du climat et de la prévention des risques. Monsieur le sénateur Tissot, vous avez raison de souligner l’ampleur des dégâts qu’a subis votre territoire. J’ai été en contact avec votre collègue député du Rhône Jean-Luc Fugit, qui a vu lui aussi, à Givors, de l’autre côté du Gier, l’impact de ces inondations.

À Rive-de-Gier, le Gier est monté de plus de quatre mètres – je rappelle que son étiage moyen y est de cinquante centimètres. C’est dire l’ampleur de la catastrophe : lors de la précédente inondation, les eaux n’étaient montées, si j’ose dire, que de trois mètres.

Vous avez raison de le souligner, les communes affectées par ce type d’événements climatiques ont besoin de moyens. C’est la raison pour laquelle une dotation de solidarité leur est destinée ; elle sera évidemment déployée, notamment pour couvrir les travaux qui devront être effectués sur les ouvrages non assurables. Catherine Vautrin et moi-même allons à cet effet lancer des missions d’inspection qui permettront d’évaluer les dégâts. Pour l’essentiel, les ouvrages détruits sont des ponts et des chaussées communales ou départementales.

Autre sujet : le fonds Barnier. Nous travaillons actuellement à l’élaboration d’un nouveau plan national d’adaptation au changement climatique ; nous vous présenterons dans les tout prochains jours la vision qu’en la matière nous avons arrêtée.

Par ailleurs, je veux saluer le travail accompli par la sénatrice Lavarde (Bravo ! sur des travées du groupe Les Républicains.), autrice d’un rapport d’information sur le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles (CatNat).

M. Jean-François Husson. Un excellent rapport !

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Les propositions qu’elle a formulées seront prochainement examinées dans cet hémicycle.

M. Jean-François Husson. Il faut les soutenir !

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Enfin, dans le cadre des discussions budgétaires, notre objectif est de trouver les meilleures solutions. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)

Nous le savons tous ici, il faut trouver les moyens de rétablir les comptes publics. Encore convient-il de le faire intelligemment, en faisant en sorte que ceux qui le peuvent participent à l’effort et que ceux qui ont besoin de solidarité continuent d’être soutenus. (Mêmes mouvements.)

Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, la copie sur laquelle nous allons travailler ensemble. (M. François Patriat applaudit.)

Mme Laurence Rossignol. Nous ne sommes pas des renards, inutile de nous enfumer !

nouvelle-calédonie et outre-mer face à l’héritage colonial

M. le président. La parole est à M. Robert Wienie Xowie, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

M. Robert Wienie Xowie. Monsieur le ministre chargé des outre-mer, vous vous êtes récemment rendu en Kanaky-Nouvelle-Calédonie, et je vous en remercie.

Un certain nombre d’annonces ont été faites sur les urgences et la reconstruction ; chacun prendra le soin de les apprécier à leur juste valeur.

Comme préalable à la reconstruction, il faut poser des bases solides. S’agissant de situations qui relèvent de l’urgence économique, sociale et politique, l’État français doit avant tout accepter de tenir un regard décomplexé sur son histoire coloniale. Ensemble, donnons-nous une chance de parvenir à une décolonisation réussie !

Les crises de nos pays sont souvent cycliques et les aspirations de nos peuples à la pleine souveraineté sont indéniables. La véritable reconstruction ne pourra avoir lieu qu’une fois la question du fait colonial assumée et profondément traitée.

Ce qui s’est passé le 13 mai dernier en Kanaky, comme tout ce qui s’est passé d’analogue dans les territoires dits d’outre-mer, interpelle l’État. Nous sommes en 2024, et l’attitude coloniale française persiste : criminalisation des militants, répression, économie sous perfusion.

Ma question est simple, mais déterminante pour la suite : l’avenir de la Kanaky-Nouvelle-Calédonie s’inscrit-il toujours dans le cadre de décolonisation posé par l’accord de Nouméa ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur des travées du groupe GEST.)

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé des outre-mer.

M. François-Noël Buffet, ministre auprès du Premier ministre, chargé des outre-mer. Monsieur le sénateur Xowie, je tiens à vous remercier pour l’action que nous avons menée la semaine dernière en Nouvelle-Calédonie.

Il faut, premièrement, constater la situation de visu et mobiliser un certain nombre de moyens financiers supplémentaires, afin d’aider nos compatriotes à redresser économiquement et socialement la Nouvelle-Calédonie.

La violence des émeutes du mois de mai dernier a été extrême. Je veux à cet égard m’associer aux propos qu’a tenus le ministre de l’intérieur tout à l’heure : je salue, moi aussi, l’engagement des forces de l’ordre placées sous l’autorité du haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.

J’y insiste, les violences furent extrêmes – je puis moi-même en témoigner.

L’urgence immédiate, c’est la reconstruction rapide. Une mission a été installée à cette fin ; elle se rendra sur place très prochainement pour engager ses premiers travaux.

Il faut, deuxièmement, renouer le dialogue, si tant est qu’il ait été rompu, avec l’ensemble des acteurs politiques du congrès et du gouvernement de Nouvelle-Calédonie. Ce fut chose faite : pendant la durée de mon séjour, j’ai rencontré tout le monde.

Les discussions ont été intenses, mais très libres ; nous avons pu aborder tous les sujets, sans exception.

Désormais, l’objectif est d’engager un processus de discussion en vue de donner à la Nouvelle-Calédonie un projet global qui l’inscrive dans son avenir, car elle en a besoin.

Je veux rappeler à l’ensemble de mes collègues, ou plutôt, pardonnez-moi, à l’ensemble des sénateurs (Sourires.) – de vieux souvenirs remontent ! –,…

M. Loïc Hervé. C’est mignon !

M. François-Noël Buffet, ministre. … que la Nouvelle-Calédonie se trouve à un point de bascule. Il ne faut pas rater ce moment absolument déterminant.

La question que vous posez a évidemment été abordée, monsieur le sénateur. À cet égard, je vous rappelle – je parle sous le contrôle de la commission des lois de la Haute Assemblée, que je sais très pointilleuse – qu’il existe dans la Constitution française un principe d’autodétermination. Incontestablement, nos discussions porteront aussi sur ce sujet-là. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées des groupes UC et INDEP. – M. Saïd Omar Oili applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Robert Wienie Xowie, pour la réplique.

M. Robert Wienie Xowie. Monsieur le ministre, la trajectoire vers la pleine souveraineté est inscrite dans l’accord de Nouméa. Celui-ci indique, au point n° 5, que « [t]ant que les consultations n’auront pas abouti à la nouvelle organisation politique proposée, l’organisation politique mise en place par l’accord de 1998 restera en vigueur, à son dernier stade d’évolution, sans possibilité de retour en arrière, cette “irréversibilité” étant constitutionnellement garantie ».

Or, à la suite des événements récents, aucun accord n’a été trouvé. Il convient donc que les discussions politiques soient centrées sur le processus de décolonisation et la trajectoire vers la pleine souveraineté.

Notre histoire nous oblige à regarder vers l’avant, et plus jamais en arrière.

La 79e session de l’Assemblée générale des Nations unies a réaffirmé la nécessité de poursuivre, dans le cadre de l’accord de Nouméa, l’éradication du colonialisme dans le monde. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K et sur des travées du groupe GEST. – M. Victorin Lurel applaudit également.)

M. Éric Bocquet. Excellent !

surveillance des gardes à vue

M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées des groupes Les Républicains et INDEP.)

M. Pierre-Antoine Levi. Monsieur le ministre de l’intérieur, le récent assassinat d’un chauffeur de VTC à Marseille, commandité depuis la prison d’Aix-Luynes, nous rappelle tragiquement l’importance cruciale de la surveillance dans les lieux de détention.

Aussi, je souhaite appeler votre attention sur les conséquences opérationnelles de la limitation de la vidéosurveillance dans les cellules de garde à vue, entrée en vigueur le 1er octobre 2024.

Cette mesure, découlant de nouvelles normes européennes et concrétisée par un arrêté du 26 septembre 2024 et une instruction de la direction générale de la police nationale (DGPN) en date du 27 septembre 2024, impose aux forces de l’ordre d’effectuer des rondes fréquentes pour surveiller les personnes gardées à vue, la vidéosurveillance devenant l’exception.

Que dire de l’obligation, lorsque la personne gardée à vue est mineure, de requérir un avis médical de non-contre-indication à la vidéosurveillance ?

On se demande comment on a pu en arriver à une telle réglementation, qui soulève de sérieuses inquiétudes quant à son impact sur l’organisation et l’efficacité des services de police.

Dans l’ensemble des commissariats de France, cette nouvelle obligation mobilise des effectifs considérables, au détriment de la présence sur le terrain. Elle constitue aussi un recul pour les conditions de travail des policiers et représente un risque pour leur sécurité.

À titre d’exemple, dans mon département, au commissariat de Montauban, cette mesure nécessite au minimum, pour assurer la surveillance des cellules, la mobilisation de deux fonctionnaires supplémentaires, qui se trouvent ainsi retirés de la voie publique.

Cette réorganisation contrainte se traduit concrètement par la suppression d’un équipage de police secours, ce qui réduit significativement la capacité d’intervention et la présence policière dans l’espace public.

Monsieur le ministre, envisagez-vous une réévaluation du dispositif pour mieux concilier la protection des droits des personnes gardées à vue et les impératifs opérationnels des forces de l’ordre ?

En cas de maintien de ce dispositif, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre pour garantir une présence suffisante des policiers sur le terrain et faire en sorte qu’ainsi ceux-ci puissent assurer la sécurité de nos concitoyens, ce qui est leur mission principale ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées des groupes Les Républicains et INDEP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Bruno Retailleau, ministre de lintérieur. Monsieur le sénateur, cher Pierre-Antoine Levi, je partage totalement votre analyse. Je serai très clair et direct : le Sénat et l’Assemblée nationale ont voté la loi du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure. Cette loi prévoyait textuellement, concrètement, précisément, la possibilité d’utiliser des caméras de surveillance, notamment dans les cellules de garde à vue. C’était une bonne mesure, à laquelle la plupart des parlementaires, sénateurs comme députés, avaient souscrit.

Or le Conseil d’État a encadré de façon draconienne l’utilisation de la vidéosurveillance,…

M. Bruno Retailleau, ministre. … ce qui revient à lui opposer des obstacles quasi insurmontables.

Revenons sur les deux mesures que vous avez évoquées, monsieur le sénateur. On ne peut utiliser des caméras de surveillance qu’à la double condition qu’il soit procédé à un enregistrement, d’une part, et que, d’autre part, le recours à cette pratique soit dûment motivé par un risque d’évasion ou de suicide ou par des menaces contre autrui.

Quelle est la conséquence de telles mesures ? Tout d’abord, leur mise en œuvre suppose d’équiper l’ensemble de nos caméras d’enregistreurs dont elles sont pour l’instant dépourvues, soit quelques dizaines de millions d’euros d’investissements.

Ensuite – vous l’avez très bien expliqué à propos du commissariat de Montauban –, ces mesures impliquent de soustraire de la voie publique 16 % des forces de l’ordre pour qu’elles effectuent des rondes dans les cellules de garde à vue. Voilà comment le problème se pose !

Si nos policiers sont découragés, c’est qu’ils se trouvent pris en étau : ils subissent un effet de ciseau entre l’augmentation de la violence et de la délinquance, d’un côté, et la complexification des procédures, de l’autre.

Je ne renoncerai pas l’objectif de simplification, mais ma tâche, en ce domaine, s’apparente à celle de Sisyphe. Nos policiers doivent pouvoir lutter contre la délinquance sans crouler sous la paperasserie. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)

M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, pour la réplique.

M. Pierre-Antoine Levi. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Les fonctionnaires de police sont très mal à l’aise et surtout très tristes devant cette mesure. Ils attendent de leur ministre et du Parlement l’aménagement et la simplification de cette procédure qui est totalement inadaptée à leur travail. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées des groupes Les Républicains et INDEP.)

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Souhaits de bienvenue à une délégation parlementaire

M. le président. Monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous avons l’honneur d’accueillir aujourd’hui, dans notre tribune d’honneur, deux membres du Sénat de la République démocratique du Congo, Mmes Madeleine Nikomba Sabangu et Cathy Botema Mboyo. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le Premier ministre et Mmes et MM. les membres du Gouvernement, se lèvent et applaudissent.)

Elles sont accueillies par le groupe d’amitié France-Afrique centrale, présidé par notre collègue Guillaume Chevrollier (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.), dont une délégation a été chaleureusement reçue au Parlement de Kinshasa en juillet dernier.

Nous leur souhaitons un fructueux séjour au Sénat et en France. (Applaudissements.)

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Questions d’actualité au Gouvernement (suite)

M. le président. Nous reprenons les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

narcotrafic et menaces sur les forces de l’ordre à marseille

M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Valérie Boyer. Monsieur le ministre de l’intérieur, en 2021, le président Macron a lancé, à grand renfort de communication, son plan « Marseille en grand ». L’objectif était de faire de Marseille un véritable laboratoire de son action.

L’espérance était grande, les mots étaient forts, mais les actes se sont révélés faibles.

La Cour des comptes vient de nous le rappeler cruellement, l’expérience marseillaise a malheureusement échoué, notamment en matière de sécurité : les Marseillais le constatent quotidiennement !

En mars dernier, le chef de l’État a lancé la première opération « place nette XXL » à la cité de la Castellane ; pourtant, deux policiers y ont été violemment agressés ce week-end pendant l’interpellation d’un dealer.

Permettez-moi de les assurer de notre solidarité et de leur souhaiter un prompt rétablissement.

Nous le savons, il existe en France des territoires où la police n’est plus respectée comme l’incarnation de la loi et de l’ordre, mais où elle est considérée comme appartenant à une bande rivale. Cette bande, c’est la France, et le policier y est attaqué comme son représentant.

Dans de trop nombreuses villes de notre pays se sont formées non pas des zones de non-droit, mais des zones « d’un autre droit », où la voyoucratie et la pègre, alimentées par les trafiquants d’êtres humains, l’immigration de masse et l’islamisme, décident de qui vient et qui reste en France, bref, édictent leurs propres règles. (Exclamations sur les travées des groupes SER et GEST.)

Chaque jour, l’actualité révèle son lot d’assassinats, de règlements de compte, de victimes collatérales et de guets-apens contre la police dans l’ensemble de notre pays – nous le déplorions hier encore, à Grenoble, à Paris et dans les outre-mer.

À Marseille, malgré les annonces fracassantes liées au plan « Marseille en grand », la Cour des comptes nous apprend que les effectifs de police ont baissé de 4,5 % depuis l’élection d’Emmanuel Macron, soit 185 policiers de moins. Encore faut-il y ajouter un manque de places de prison et une réponse pénale inadaptée et insuffisante.

Immigration incontrôlée, islamisme radical et narcotrafic : les Français n’en peuvent plus !

M. Guy Benarroche. Ça n’a rien à voir !

Mme Valérie Boyer. Vous avez fait de la lutte contre le trafic d’êtres humains et l’immigration illégale votre priorité : les Français vous remercient, monsieur le ministre. Vous voulez lutter contre les narcotrafics, en faire une grande cause nationale : les Français vous remercient encore.

Vous le savez, fort de ses propositions, le Sénat vous accompagnera et sera au rendez-vous. (Protestations sur les travées du groupe SER.)

Monsieur le ministre, comment allez-vous protéger les Français ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Bruno Retailleau, ministre de lintérieur. Madame la sénatrice Valérie Boyer, nous avons bien sûr reçu ce rapport de la Cour des comptes, qui constituera un socle pour notre action. Nous allons l’expertiser afin de réenvisager un dispositif pour Marseille. D’ailleurs, dans quelques jours, le garde des sceaux et moi-même nous rendrons sur place.

Je me suis entretenu avec les policiers que vous avez évoqués, dont l’un a été grièvement blessé à l’arcade sourcilière ; je veux, moi aussi, leur rendre hommage.

Il faut des renforts, c’est évident. Une promotion s’apprête à sortir des écoles de police. Aussi ai-je décidé d’envoyer très rapidement 75 gardiens de la paix en renfort à Marseille ; ils viendront s’ajouter aux renforts déjà décidés par mon prédécesseur en septembre 2022 et à la compagnie républicaine de sécurité récemment implantée dans la ville, la CRS-81.

Cela étant, tout n’est pas une affaire d’effectifs. Il faut changer notre stratégie vis-à-vis des réseaux de narcotrafiquants et de trafiquants d’êtres humains. Aujourd’hui, ces réseaux sont en train de fusionner : ce sont les mêmes qui opèrent.

Dans quelques semaines, nous allons présenter une nouvelle stratégie qui reposera sur deux dimensions. Premièrement – je vais sans doute choquer quelques personnes ici –, nous agirons sur la consommation de stupéfiants, car il n’y a pas d’offre quand il n’y a pas de demande. (Exclamations sur des travées des groupes SER et GEST.) Il faut sortir de cette consommation que l’on juge récréative, voire un peu romantique ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP. – M. Stéphane Ravier sexclame.)

Au bout d’un joint ou d’un rail de coke, il y a des trafiquants, des proxénètes, des criminels, ceux-là mêmes qui, tout récemment, n’ont pas eu peur de larder de cinquante coups de couteau et de brûler vif un jeune adolescent de quinze ans !

Il faut que chacun soit responsabilisé !

Un sénateur du groupe SER. Quelle politique nationale ?

M. Bruno Retailleau, ministre. Deuxièmement, comme je l’ai déjà annoncé, nous allons bâtir en la matière une stratégie analogue à celle que nous avions définie voilà une dizaine d’années en matière de lutte antiterroriste, et l’ériger en grande cause nationale. Et je ne doute pas que, dans cette perspective, nous réutiliserons les travaux conduits au Sénat par Étienne Blanc et Jérôme Durain, respectivement rapporteur et président de la commission d’enquête sur l’impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier – je les salue. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)

situation des collectivités territoriales

M. le président. La parole est à Mme Karine Daniel, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Karine Daniel. Ma question s’adresse à la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation.

À l’heure des discussions budgétaires, alors que la France connaît un déficit record, chacun doit fournir des efforts ; toutefois, celui qui est demandé aux collectivités territoriales est disproportionné. Communes, métropoles, départements et régions sont unanimes pour contester le projet de budget pour 2025 : il est délétère pour les collectivités, que vous êtes censée défendre. Alors qu’elles représentent moins de 9 % de l’endettement public, elles devraient fournir 15 % de l’effort de redressement, d’après nos projections.

Quelles réponses le Gouvernement compte-t-il apporter aux collectivités qui se mobilisent et nous interpellent ? L’effort que vous leur demandez est injuste et insoutenable !

Quels services publics locaux seront sacrifiés, et sur quels territoires ? (Bravo ! et applaudissement sur les travées du groupe SER. – M. Pierre Ouzoulias applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la mer et de la pêche.

M. Fabrice Loher, ministre délégué auprès de la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation, chargé de la mer et de la pêche. Madame la sénatrice Daniel, je vous prie de bien vouloir excuser la ministre Catherine Vautrin pour son absence.

Vous interrogez le Gouvernement sur la situation de nos finances publiques et sur la part demandée aux collectivités dans le projet de loi de finances pour 2025. Comme vous le savez, la situation budgétaire de notre pays exige un effort de redressement extrêmement important.

Mme Audrey Linkenheld. À qui la faute ?

M. Fabrice Loher, ministre délégué. Il y va de la souveraineté et de la crédibilité nationales.

Dans ce contexte, les collectivités territoriales sont appelées à contribuer à l’effort national, aux côtés de l’État : il est prévu, dans le projet de budget, qu’elles y participent à hauteur de 5 milliards d’euros.

Avant toute chose, je tiens à redire devant la chambre des collectivités territoriales que nos élus locaux ne sont pas les responsables de la situation budgétaire que nous connaissons. (Applaudissements sur des travées des groupes Les Républicains et UC. – Exclamations sur les travées des groupes SER et GEST.)

M. Mickaël Vallet. C’est la faute de Le Maire !

M. Fabrice Loher, ministre délégué. Ils sont, dans leur immense majorité, de bons gestionnaires.

Reste que, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances, nous devons déterminer leur juste part. Le choix du Gouvernement s’est porté sur trois principales mesures dont nous allons débattre dans les prochains jours.

Tout d’abord, première mesure, nous envisageons un mécanisme de reprise sur recettes pour les collectivités dont les dépenses de fonctionnement dépassent 40 millions d’euros. Les sommes seront reversées aux collectivités en 2026, selon des modalités qui feront l’objet d’échanges avec les parlementaires, les associations d’élus et le Comité des finances locales (CFL).

Ensuite, deuxième mesure, nous prévoyons une « année blanche de TVA » via un écrêtement de la totalité de la dynamique de cette fiscalité transférée, qui sera reconduite en 2025 à son niveau de 2024. Les montants de TVA versés aux collectivités locales resteront donc stables.

Enfin, troisième mesure, nous proposons la réduction d’environ 1,8 point du taux applicable aux attributions du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), ainsi que le recentrage de son assiette.

Il appartient désormais aux parlementaires de débattre de cette juste part demandée à nos collectivités territoriales, ainsi que des justes contreparties qui leur seront accordées. Le Premier ministre, Catherine Vautrin et moi-même ne doutons pas que le Sénat prendra toute sa part de ce travail. Du reste, mesdames, messieurs les sénateurs, nous nous tenons à votre disposition pour échanger sur vos propositions d’amélioration du projet de loi de finances qui vous sera transmis prochainement.

Mme Audrey Linkenheld. Il n’y aura donc pas de 49.3 ?

M. le président. La parole est à Mme Karine Daniel, pour la réplique.

Mme Karine Daniel. Monsieur le ministre, il faut dire la vérité aux adjoints aux finances et aux vice-présidents des collectivités qui construisent les budgets actuellement : ce ne sont pas 5 milliards d’euros d’efforts qui seront demandés aux collectivités. Si l’on compte les effets indirects, les effets induits et les effets de non-compensation de l’inflation, le total se situera plutôt, selon nos estimations, quelque part entre 8,5 milliards et 10 milliards d’euros ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE-K.)

À cela s’ajoutera l’effet récessif, dont vous n’avez pas parlé, qui se répercutera dans les budgets des collectivités pour 2026 et pour 2027.

Les charges qui incombent aux collectivités locales augmentent avec les transferts. Or cette augmentation n’est pas compensée par l’État, si bien que toutes les collectivités subiront un effet de ciseau.

J’ai une pensée particulière pour les départements, qui assument de très fortes dépenses sociales contraintes : l’effet de ciseau que je viens de décrire les frappe tout spécialement, les mettant dans une impasse.

Les petites communes seront elles aussi concernées, car elles contractualisent avec les départements et les régions. L’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF), Départements de France, Régions de France et France urbaine sont à nos côtés pour vous interpeller.

Les collectivités locales n’ont pas à être sacrifiées sur l’autel de la mauvaise gestion des macronistes. À gauche, nous défendons des propositions équilibrées et de bon sens pour les collectivités ; j’espère que nous serons nombreux à les défendre lors de l’examen du projet de budget. (Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE-K.)

crise du logement

M. le président. La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Marc-Philippe Daubresse. Madame la ministre du logement et de la rénovation urbaine, vous qui siégiez au Sénat, vous m’avez forcément entendu tirer la sonnette d’alarme, depuis trois ans, sur la politique funeste menée par le précédent gouvernement : celui-ci n’a pas empêché la crise du logement et l’a même accélérée.

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Pourquoi donc le soutenir maintenant ?

M. Marc-Philippe Daubresse. Quelque 264 000 logements neufs auront été commencés en 2024, contre 486 000 en 2008, après le plan Borloo.

Deux tiers de cette chute touchent les primo-accédants ; le tiers restant affecte les locataires sociaux. Il s’agit d’une catastrophe à la fois pour eux et pour les entreprises qui font ou vont faire faillite.

C’est aussi une catastrophe pour le Gouvernement : la Fédération française du bâtiment (FFB) vient d’estimer à 12 milliards d’euros les pertes de recettes de TVA depuis 2022.

Le Premier ministre a pris la mesure de cette catastrophe, puisqu’il a décidé de mettre le logement au premier rang de ses priorités. Nous le remercions de vous avoir nommée, madame la ministre ; nous connaissons votre compétence et votre pugnacité : nous sommes confiants.

Reste qu’une crise de la demande précède cette crise de l’offre. Il faut la résoudre, en desserrant d’urgence les contraintes bêtement décidées depuis 2019 par le gouverneur de la Banque de France. Il faut aussi aller plus loin en jouant sur d’autres mesures – nous comptons sur vous, madame la ministre.

Je pense à la reprise du dispositif dit Balladur, mis en œuvre avec succès dans le passé, qui consiste à exonérer de droits de succession la première transmission de logements nouvellement construits, garantissant à l’État des rentrées rapides de TVA.

Je songe également à l’utilisation du foncier commercial disponible. On estime à 4 millions de mètres carrés, pour la seule Île-de-France, la surface de foncier commercial vacant ; voilà qui permettrait de construire des dizaines de milliers de logements, à condition d’expérimenter de nouvelles procédures.

Enfin, le Sénat attend une simplification du ZAN (zéro artificialisation nette). Ça suffit, les bêtises : allégeons ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC et sur des travées du groupe INDEP. – Mme Mireille Jouve applaudit également. – Exclamations sur les travées du groupe GEST.)

Le temps, c’est de l’argent : nous comptons sur vous, madame la ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)