M. le président. La parole est à M. Michaël Weber, auteur de la question n° 088, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de l’énergie, du climat et de la prévention des risques.

M. Michaël Weber. Madame la ministre, ma question porte sur la définition des territoires concernés par la deuxième des bonnes conditions agricoles et environnementales, dite BCAE 2. Ces conditions ont été modifiées en application de la politique agricole commune, mais comme leur définition n’est pas contraignante, les territoires en question peuvent être librement délimités par l’État membre concerné.

Alors que la BCAE 2 tend à une meilleure protection des zones humides et des tourbières, je m’étonne que les zones protégées aient été limitées aux seuls territoires labellisés sites Ramsar.

Le Gouvernement semble avoir choisi de ne nullement tenir compte du Plan national milieux humides, adopté pourtant il y a seulement deux ans.

Une telle manœuvre illustre non seulement le caractère minimal de la définition des zones concernées par la BCAE 2, mais risque aussi d’affecter négativement et durablement le label Ramsar.

À ce sujet, M. Fesneau assurait pourtant, dans son courrier du 5 septembre 2024 adressé aux différents présidents de parcs naturels régionaux, qu’il n’était « pas envisagé que le référentiel Ramsar constitue la seule zone de zonage des BCAE 2 ».

Dès lors, quelles sont les mesures retenues pour atteindre cet objectif ?

J’en conviens, madame la ministre : les zones Ramsar présentent des résultats encourageants en matière de gestion durable et de protection des zones humides remarquables. Néanmoins, le bornage du périmètre des BCAE 2 à ces seules zones et à quelques-unes issues de l’inventaire du réseau partenarial des données sur les zones humides est tout à fait insuffisant, si ce n’est dangereux.

Le système Ramsar fonctionne justement, car il a été imaginé indépendamment de toute mesure extérieure. Pourquoi chercher à abîmer cet outil, dont l’efficacité n’est plus à prouver en refusant un zonage étendu des BCAE 2 ?

Il est urgent d’agir en faveur de ces zones, mais aussi de faciliter le dialogue entre l’administration et les particuliers.

À partir du moment où les zones Ramsar seront liées dans l’esprit de tous, et notamment des agriculteurs concernés, aux BCAE 2, ces dernières y perdront énormément en termes d’image.

Le choix qui a été fait d’une définition minimale du zonage des BCAE 2 n’est donc pas responsable en matière environnementale. Il ne répond pas non plus aux attentes de la profession agricole en termes de dialogue.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Olga Givernet, ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, de lénergie, du climat et de la prévention des risques, chargée de lénergie. Monsieur le sénateur Michaël Weber, la France métropolitaine et les territoires vulnérables accueillent 30 % des espèces rares ou menacées, soit la totalité des amphibiens, la moitié des oiseaux ou encore le tiers des espèces végétales remarquables.

On estime que ces espèces permettent à la société d’économiser 2 000 euros par an et par hectare sur le traitement de l’eau potable.

Environ la moitié des zones humides françaises ont disparu entre 1960 et 1990. Par leur richesse en habitats et en espèces, par leur rôle d’infrastructure naturelle et par la place qu’ils occupent comme support d’activité et cadre de vie de qualité, les milieux humides sont – nous en sommes parfaitement conscients – des espaces à fort enjeu écologique.

En ce qui concerne les conditions à respecter pour les agriculteurs travaillant sur les zones humides ou les tourbières, la programmation 2023-2027 de la politique agricole commune impose, au 1er janvier 2025, la mise en place d’un zonage spécifique.

Pour que les zones concernées soient éligibles aux aides de la PAC, les règles de travail du sol devront y être adaptées. C’est tout l’objet de la BCAE 2, qui doit permettre de mieux protéger les zones humides et les tourbières en zone agricole.

Faute de cartographie disponible pour certaines des zones concernées, il a été procédé dans un premier temps au croisement du zonage Ramsar et de celui des zones humides effectives et des tourbières.

La BCAE 2 interdira les nouveaux remblais et réseaux de drainage pour préserver les sols existants, mais elle permettra également le maintien en l’état des réseaux de drainage.

Toutefois, le dispositif n’est pas tout à fait abouti. Alors que les échéances du 1er janvier 2025 puis de 2027 approchent, le zonage envisagé n’est pas satisfaisant dans la mesure où il affectera les démarches territoriales de protection et de valorisation des zones humides. Il a donc vocation à évoluer rapidement. Dès que nous aurons complété notre connaissance des zones humides effectives, il pourra intervenir dans le cadre de la future PAC.

L’objectif est d’aboutir progressivement d’ici à 2027, de concert avec les acteurs locaux, à un inventaire fiabilisé dans l’ensemble du territoire. C’est également le choix qu’ont fait d’autres pays membres de l’Union européenne.

Je vous invite à vous associer à la réflexion, afin d’aboutir à une cartographie plus acceptable.

présence postale menacée dans les territoires ruraux

M. le président. La parole est à Mme Marie Mercier, auteur de la question n° 079, adressée à M. le ministre de la fonction publique, de la simplification et de la transformation de l’action publique.

Mme Marie Mercier. Vous souvenez-vous, monsieur le ministre, de cette très jolie publicité montrant une camionnette jaune, seul signe de présence humaine dans un magnifique paysage de campagne française, qui pouvait être, bien sûr, de Saône-et-Loire. (Sourires.) Elle était accompagnée de cette formule : « La Poste. Ça créée des liens entre nous. »

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous parler de cette éventuelle réduction de 50 millions d’euros, sur les 177 millions d’euros de budget alloués à cette présence postale ?

La Poste s’est engagée auprès de 90 % de la population des zones rurales ou prioritaires à mettre à disposition un point postal dans un rayon de cinq kilomètres ou à moins de vingt minutes de trajet en voiture.

Cet engagement est nécessaire pour le confort de vie de nos administrés. Or la réduction de budget qui est envisagée affecterait inévitablement le fonctionnement des agences postales, des points postaux et des espaces France Services.

Les maires, qui sont conscients des grandes difficultés budgétaires que nous traversons, sont des gens responsables. Ils pourraient éventuellement assumer cette dépense supplémentaire, mais ils s’inquiètent de plus en plus face à ce sentiment d’aggravation des inégalités territoriales et de disparition des services publics que ressent la population dans nos territoires ruraux.

Monsieur le ministre, pouvez-vous vous engager en faveur de cette proximité postale ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Guillaume Kasbarian, ministre de la fonction publique, de la simplification et de la transformation de laction publique. Madame la sénatrice Mercier, étant moi-même habitant d’un village d’Eure-et-Loir, Saint-Martin-de-Nigelles, je suis sensible à vos propos et reste très attaché au maintien des services publics de proximité dans nos territoires.

Je tiens à vous rassurer : ce gouvernement ne souhaite en aucun cas réduire les services publics de proximité. Il est vrai que, depuis plusieurs années, La Poste fait face à de véritables défis de transformation de son modèle économique.

Le sujet n’est d’ailleurs pas nouveau. Lorsque j’étais président de la commission des affaires économiques à l’Assemblée nationale, nous interrogions déjà le PDG de La Poste sur ce modèle, alors en pleine évolution.

Pour autant, le projet de loi de finances pour 2025 ne change pas une virgule, je tiens à le préciser, au montant que l’État verse à La Poste pour la distribution du courrier. L’État poursuit ainsi son engagement, avec plus de 910 millions d’euros de dépenses visant à permettre à La Poste d’assurer sa mission de service public.

Les débats budgétaires, qui ont débuté à l’Assemblée nationale et qui se poursuivront au Sénat, seront l’occasion de poser ces questions et d’échanger avec l’ensemble des parlementaires sur l’attention que nous devons prêter à la présence du service public de proximité dans nos territoires.

Au-delà, permettez-moi d’évoquer, madame la sénatrice, le succès des maisons France Services. Elles ont été lancées en 2019 et nous comptions, au 1er octobre dernier, 2 753 maisons France Services labellisées, dont près d’une cinquantaine, me semble-t-il, dans votre département.

À l’échelon national, plus de 400 d’entre elles sont situées au sein d’un bureau de poste. Cela permet à ces maisons de rester ouvertes plus longtemps, mais aussi de diversifier les activités en toute proximité.

Le taux de satisfaction enregistré – 96 %, un score assez exceptionnel pour un service public – montre que le modèle fonctionne et qu’il répond à des attentes très fortes de nos concitoyens dans les territoires. J’ai pu le vérifier récemment à l’occasion de deux déplacements, dans l’Oise et dans la Sarthe.

Madame la sénatrice, mesdames, messieurs les sénateurs, vous pouvez donc compter sur mon action, ainsi que sur celle du Gouvernement dans son ensemble pour préserver nos services publics, y compris dans le contexte budgétaire actuel que vous connaissez si bien.

M. le président. La parole est à Mme Marie Mercier, pour la réplique.

Mme Marie Mercier. Je ne doutais pas de votre volonté, monsieur le ministre.

Les maisons France Services fonctionnent d’autant mieux qu’elles ont été ouvertes pour compenser des fermetures antérieures.

Permettez-moi de citer cette très belle phrase de notre Premier ministre : « Nos villes moyennes, nos sous-préfectures, nos villages, tous font la République et méritent que des services publics y demeurent ou y reviennent. » Nous sommes tous là pour y veiller. Merci de votre vigilance.

retard dans la mise en œuvre des procédures d’indemnisation forfaitaire au titre de réparation des préjudices subis par les harkis

M. le président. La parole est à M. Christophe Chaillou, auteur de la question n° 041, adressée à M. le ministre des armées et des anciens combattants.

M. Christophe Chaillou. Monsieur le ministre, je souhaite appeler votre attention sur les difficultés résultant du délai de traitement des dossiers de demandes d’indemnisation forfaitaire au titre de la loi n° 2022-229 du 23 février 2022 portant reconnaissance de la Nation envers les harkis.

Cette loi prévoit légitimement la réparation des préjudices subis par les harkis et leurs familles du fait de l’indignité de leurs conditions d’accueil et de vie dans certaines structures sur le territoire français.

En application de cette loi, les harkis ou les personnes rapatriées d’Algérie anciennement de statut civil de droit local et leurs familles ayant séjourné dans une ou plusieurs structures d’accueil entre le 20 mars 1962 et le 31 décembre 1975, peuvent constituer un dossier auprès de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) pour obtenir une indemnité.

Selon le gouvernement de l’époque, plus de 50 000 personnes devaient ainsi pouvoir bénéficier de cette indemnisation.

De nombreux harkis ont manifesté leur volonté de débuter ce processus de réparation : selon le bilan global des indemnisations présenté par la commission nationale indépendante de reconnaissance et de réparation des préjudices subis par les harkis, environ 20 000 dossiers auraient été traités jusqu’en août 2024.

Cependant, de nombreux autres dossiers resteraient en attente – certains depuis plus de deux ans –, entraînant de fait un sentiment d’abandon chez les personnes concernées.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous communiquer le nombre exact de demandes qui sont en attente de traitement ? Le Gouvernement prévoit-il d’allouer à l’ONACVG des moyens supplémentaires afin de permettre l’instruction, dans les meilleurs délais, de l’ensemble des demandes d’indemnisation forfaitaire ?

Il y va en effet de notre responsabilité collective et de celle de la Nation vis-à-vis des harkis.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Louis Thiériot, ministre délégué auprès du ministre des armées et des anciens combattants. Monsieur le sénateur Chaillou, je vous remercie de cette question, qui me donne l’occasion de m’associer à l’hommage national qui doit toujours être rendu aux harkis. La manière dont nous nous en sommes acquittés jusqu’ici ne constitue pas la page la plus glorieuse de notre histoire.

Nous prenons évidemment cette question très au sérieux. À ce jour, nous avons reçu, au titre de la loi de réparation de 2022, non pas 50 000, mais un peu plus de 35 000 demandes de réparation.

Quelque 20 000 d’entre elles ont été traitées et 16 000 ont reçu une réponse favorable, pour une indemnisation moyenne de 8 093 euros par dossier.

Près de 15 000 dossiers sont encore en cours de traitement, dont 9 000 qui résultent des quarante-cinq nouveaux sites déclarés éligibles en 2023.

En 2024, l’ONACVG a quasiment doublé le nombre d’emplois en équivalents temps plein qui sont consacrés à cette mission. En outre, la structure nationale de l’Office a renforcé son soutien aux zones agrégées départementales.

Ayons bien à l’esprit, monsieur le sénateur Chaillou, qu’une difficulté nouvelle se présentera bientôt avec la jurisprudence Tamazount de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), qui nous oblige, pour traiter tout le monde sur un pied d’égalité, à rouvrir un certain nombre de dossiers.

En tout état de cause, cette question demeure une priorité du Gouvernement et de mon ministère. Nous veillerons à ce que tous ceux qui ont fait le choix de porter les armes de la France soient convenablement traités.

M. le président. La parole est à M. Christophe Chaillou, pour la réplique.

M. Christophe Chaillou. Je vous remercie, monsieur le ministre, de ces précisions chiffrées.

Nous avons en effet une responsabilité à assumer et nous serons particulièrement vigilants à ce que, quelle que soit la jurisprudence, les moyens mobilisés permettent d’apporter des réponses adaptées.

M. le président. Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures quarante-deux, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

3

Éloge funèbre de Jean-Pierre Bansard, sénateur représentant les Français établis hors de France

M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, madame, c’est avec une profonde tristesse que nous avons appris, le 16 août dernier, la disparition de notre collègue Jean-Pierre Bansard, sénateur représentant les Français établis hors de France, à l’âge de 84 ans, après plusieurs semaines de lutte contre la maladie. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le ministre auprès du Premier ministre, chargé des outre-mer, se lèvent.)

Nous nous souvenons : il siégeait là-haut, dans notre hémicycle, où jusqu’au bout il a tenu à être présent.

Ses obsèques se sont déroulées le 18 août au cimetière parisien de Bagneux, en présence de son épouse, de ses filles et de son fils, et de ses proches. Plusieurs de nos collègues sont allés lui rendre hommage, dont le premier questeur, Antoine Lefèvre, qui représentait le Sénat, et notre collègue Roger Karoutchi, pour son groupe.

Entrepreneur infatigable enchaînant les succès, Jean-Pierre Bansard s’est investi avec la même énergie au service de l’intérêt général et de ses concitoyens au long d’une vie riche et active.

Né le 15 mai 1940 à Oran, Jean-Pierre Bansard grandit dans une famille installée en métropole en 1962, au lendemain de l’indépendance de l’Algérie. Marqué par cette expérience du déracinement, les contours de son engagement politique se dessinent dès son plus jeune âge, en particulier son engagement pour la communauté juive et pour les Français établis hors de France.

À son arrivée en France, Jean-Pierre Bansard, qui avait quitté les bancs de l’école à tout juste 16 ans, entreprend une ascension sociale fulgurante, fondée sur le travail et sur une énergie à toute épreuve. Il se forme en autodidacte et se fait connaître en exerçant le métier de transitaire sur le Vieux-Port de Marseille.

Doté d’une détermination et d’un sens des affaires hors du commun, il quitte la Méditerranée dès 1963 pour la région parisienne.

Passionné et curieux de tout, il étend ses activités à de nombreux domaines : de la logistique internationale à l’immobilier en passant par la reprise des Puces de Saint-Ouen, Jean-Pierre Bansard fut un touche-à-tout talentueux.

En 1985, il fonde le groupe Cible, dont les succès dans de nombreux secteurs – construction, rénovation, hôtellerie de luxe – reflètent ses multiples talents d’entrepreneur.

Il rachète le célèbre groupe Solex, auquel il donne un second souffle, jusqu’à en faire la première marque de vélomoteur électrique fabriqué en France.

Il se forge à cette époque la conviction que le savoir-faire français doit être protégé et valorisé, ce qu’il continuera de défendre des années plus tard, au Sénat.

Son amour de la culture française le guide dans ses choix stratégiques et le pousse, par exemple, à racheter en 1986 le célèbre restaurant Drouant, où se réunissent les membres de l’académie Goncourt.

Il fait bientôt appel, pour l’épauler dans la gestion de ses affaires, à ses trois filles et à notre collègue Évelyne Renaud-Garabedian, qui restera son associée pendant plus de trente ans et le suivra tout au long de sa vie personnelle et politique, jusqu’à leur entrée commune au Sénat en 2017.

Jean-Pierre Bansard fait partie de ceux qui incarnent cette France des Trente Glorieuses inventive, moderne et ambitieuse.

En parallèle de ses activités de chef d’entreprise, il a su montrer, dans sa vie personnelle, l’étendue de son esprit d’initiative, de son engagement républicain et de sa générosité.

Profondément attaché à la communauté juive, il devient président du consistoire régional de Champagne-Ardenne de l’Union des communautés juives de France en 1991 – Champagne-Ardenne, patrie de Rachi de Troyes, référence du judaïsme dans notre pays – avant de prendre la tête du Consistoire central l’année suivante.

Il n’aura de cesse, tout au long de sa vie, de dénoncer le fléau de l’antisémitisme.

Au lendemain des attaques du 7 octobre 2023 en Israël et face à la prolifération des actes antisémites qui s’ensuivent, il exhorte ainsi publiquement l’État à « faire reculer l’intolérance et la haine pour que triomphent l’universalisme et la laïcité ». Le Sénat, qui a toujours défendu ces valeurs, ne peut que rester fidèle à ce message.

En tant que président du Consistoire central, Jean-Pierre Bansard cultiva sa réputation de patriote et de fervent défenseur des valeurs de la République. Il résumera d’ailleurs ses convictions républicaines en 2004 dans son ouvrage Un judaïsme aux couleurs de la République, qu’il présente comme un « antidote aux communautarismes », et dans lequel il prône la conciliation entre les convictions religieuses et le respect absolu du principe de laïcité. Il y écrit que, en tant que « Français juif engagé », il se sent « en adéquation avec son appartenance pleine et entière à la citoyenneté française ».

Jean-Pierre Bansard fit de ce puissant sentiment d’appartenance à la Nation française le moteur de son engagement public.

Il entre une première fois en politique en étant élu adjoint au maire du XVIIe arrondissement de Paris en 1983.

Ses activités professionnelles internationales l’amènent parallèlement à rencontrer bon nombre de nos concitoyens établis hors de France.

De ses observations de terrain, il acquiert la conviction que la communauté française expatriée est trop livrée à elle-même, insuffisamment représentée et sans réseau de solidarité structuré. Il fonde donc, en 2009, l’Alliance solidaire des Français de l’étranger (ASFE), où il est rejoint par nos collègues Évelyne Renaud-Garabedian, Jean-Luc Ruelle et celle qui lui succède aujourd’hui, Sophie Briante Guillemont.

Il est également nommé, la même année, membre de l’Assemblée des Français de l’étranger par Bernard Kouchner, alors ministre des affaires étrangères et européennes. Il y siégera pendant cinq ans.

Jean-Pierre Bansard a vu dans le mandat parlementaire un moyen de prolonger son engagement au service des Français établis hors de France.

Il fait son entrée au Palais du Luxembourg une première fois en 2017, avant de voir son élection invalidée par le Conseil constitutionnel. Déterminé à représenter les Français établis hors de France, il est réélu en septembre 2021 et se rattache au groupe Les Républicains.

Son expertise professionnelle l’amène naturellement à siéger au sein de la commission des affaires économiques. Se remémorant avec émotion ses premiers pas au Sénat, il déclare alors : « La première fois que j’ai fait mon entrée dans l’Hémicycle, j’avais des frissons et des larmes aux yeux. »

Avec Évelyne Renaud-Garabedian, il n’eut de cesse de défendre les intérêts des Français établis hors de France et la promotion du savoir-faire français à l’international.

Ensemble, ils furent à l’origine de la proposition de loi visant à reconnaître et à soutenir les entrepreneurs français à l’étranger, qui fut adoptée en première lecture par le Sénat le 30 mai 2023 et qui prévoit la création d’un label « Made by French ». Cette proposition de loi a été récemment redéposée sur le bureau de l’Assemblée nationale.

Nous garderons de notre collègue le souvenir d’un homme au parcours exceptionnel, qui se targuait d’être « le moins diplômé » des sénateurs et qui voyait dans l’exercice de son mandat parlementaire la consécration d’une vie d’engagements personnels et politiques. Ses activités lui ont valu, d’ailleurs, la reconnaissance de la Nation.

J’exprime notre sympathie à ses collègues sénateurs représentant les Français établis hors de France et aux membres de la commission des affaires économiques, mais aussi à vous, madame, son épouse, à ses filles, à son fils, à ses petits-enfants ici présents, ainsi qu’à tous ses proches qui l’ont accompagné dans ce parcours de vie hors du commun.

Madame, vous nous avez conviés, la semaine passée, à un moment émouvant devant ses proches, ses amis et sa famille, le grand rabbin de France et le président du Consistoire central.

Jean-Pierre Bansard restera dans nos mémoires.

M. François-Noël Buffet, ministre auprès du Premier ministre, chargé des outre-mer. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, au moment où la Haute Assemblée rend hommage à l’un des siens, disparu le 16 août dernier, entouré de tout l’amour de ses proches, le Gouvernement souhaite redire sa sympathie et adresser ses condoléances à sa famille.

Le président du Sénat a rappelé le parcours de Jean-Pierre Bansard. Je n’oublie pas que voilà quelque temps encore, j’étais l’un de ses collègues, siégeant sur les mêmes travées et dans le même groupe, celui des Républicains, auprès duquel il était rattaché.

Le Gouvernement salue l’engagement de l’homme, de l’homme d’entreprise, de celui qui a développé des projets, qui a pris des risques et qui a réussi singulièrement, comme cela a été rappelé, dans le domaine industriel et à la tête de la société Solex.

Pendant cette période, il a été accompagné de Mme la sénatrice Renaud-Garabedian, qui fut également ma collègue.

Il a ensuite activement défendu l’ensemble des Français établis hors de France, sa vie l’ayant conduit à côtoyer de nombreuses personnes hors du territoire hexagonal.

Sa passion de la France a fait de lui un interlocuteur privilégié, au point de lui permettre d’intégrer le Sénat voilà quelques années.

Le Gouvernement salue également l’engagement de l’homme dans ses convictions personnelles et dans sa volonté permanente, reconnue par ses pairs, de défendre les valeurs du judaïsme.

Comme l’ensemble de ses collègues du Sénat, en particulier les membres de la commission des affaires économiques dans laquelle il était engagé, je dois encore saluer tout le travail qu’il a réalisé.

Au nom du Gouvernement, je vous adresse, madame, ainsi qu’à ses enfants, nos plus sincères condoléances.

M. le président. Je vous invite à partager un moment de recueillement à la mémoire de Jean-Pierre Bansard. (Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le ministre, observent une minute de silence.)

Conformément à notre tradition, en signe d’hommage à Jean-Pierre Bansard, nous allons suspendre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à quatorze heures quarante-cinq, est reprise à quinze heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.