M. le président. La parole est à Mme Corinne Bourcier, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

Mme Corinne Bourcier. Monsieur le président, madame la ministre chargée de la famille et de la petite enfance, mes chers collègues, en juin dernier, un arrêté, validant deux accords de branche, est venu étendre la « prime Ségur » à tous les salariés du secteur social, médico-social et sanitaire associatif.

Il s'agissait d'une demande ancienne de la part des acteurs du secteur, qui dénonçaient une injustice envers les « oubliés du Ségur », la prime ne visant à l'origine que certaines professions uniquement, notamment les soignants.

Avec cet arrêté, les salariés ayant des fonctions administratives ou techniques en bénéficieront désormais. Cette extension de la prime sera financée par l'État, la sécurité sociale et les départements.

Si l'on peut se réjouir pour les professionnels concernés, il n'en va pas de même pour les départements et les associations, dont la situation financière était déjà plus que fragile avant cet arrêté. Ils se retrouvent contraints par cette nouvelle mesure rétroactive, sans avoir été consultés au préalable.

Les dotations insuffisantes, l'explosion du coût des matières premières, les revalorisations salariales, la hausse des prestations sociales qui leur incombent et l'effondrement des droits de mutation concourent à la dégradation des finances du département de Maine-et-Loire et, plus largement, de tous les départements.

Beaucoup d'entre eux sont arrivés au bout de leurs capacités et ne pourront tout simplement pas financer la prime. Bientôt, il leur faudra choisir entre leurs missions, car il leur sera impossible de toutes les honorer. Les départements sont, avec les communes, l'échelon de proximité le plus direct pour les Français ; ils assurent un rôle particulièrement important dans les politiques sociales et de solidarité.

Si l'on souhaite que les enfants et les personnes âgées ou en situation de handicap soient accompagnées dignement, que l'aménagement du territoire soit convenablement assuré ou que la culture continue d'être promue, il est nécessaire d'agir.

Madame la ministre, êtes-vous aujourd'hui en mesure de rassurer les départements quant à la compensation de cette nouvelle charge ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – Mme Marie-Pierre Richer et M. Jean-Gérard Paumier applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la famille et de la petite enfance, que je retrouve avec plaisir ! (Applaudissements nourris sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP. – M. Raphaël Daubet applaudit également.)

Mme Agnès Canayer, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l'autonomie et de l'égalité entre les femmes et les hommes, chargée de la famille et de la petite enfance. Madame la sénatrice Corinne Bourcier, vous mettez en lumière l'accord historique de revalorisation des professionnels du secteur sanitaire, social et médico-social.

Cet accord, qui a été conclu à l'unanimité, permet d'étendre la prime Ségur aux 110 000 professionnels qui n'en bénéficiaient pas jusqu'à présent. Surtout, il engage les partenaires sociaux de la branche dans une dynamique résolue de fusion de l'ensemble des conventions collectives existantes.

Cette future convention collective unique mettra fin à une situation inadaptée où 20 % des salariés de la branche ne bénéficient pas de protection, où aucune garantie de progression des carrières en fonction des mouvements entre établissements n'est prévue aujourd'hui et où prédomine une grande faiblesse des rythmes d'évolution des salaires.

Au-delà de la simple revalorisation immédiate, c'est donc avant tout un enjeu d'attractivité.

Cet accord est le fruit d'un travail concerté depuis plus de deux ans entre le Gouvernement et les départements, comme vous l'avez souligné.

Une enveloppe de 500 millions d'euros a été dégagée, dont 120 millions pour les départements, qui a été revalorisée à 170 millions pour prendre en compte l'inflation.

Comme vous le rappelez, plusieurs types d'établissements relèvent de la tarification et de la responsabilité des départements, que ce soit dans le secteur de la protection de l'enfance ou pour les personnes en situation de handicap.

En ce qui concerne la sécurité sociale, une enveloppe de 300 millions d'euros a déjà été dévolue à la branche autonomie pour l'année 2024. Des travaux ont été engagés par les fédérations d'employeurs et présentés à la Commission nationale d'agrément avec les départements. Malheureusement, ces travaux ont été suspendus par la dissolution.

Le Gouvernement s'est engagé à ce que ce comité se réinstalle comme l'a assuré le ministre Paul Christophe au président de l'Assemblée des départements de France (ADF).

M. le président. Il faut conclure !

Mme Agnès Canayer, ministre déléguée. Ces échanges sont indispensables, et nous y travaillons. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. François Patriat applaudit également.)

transition énergétique et abandon du projet de conversion de la centrale de cordemais

M. le président. La parole est à M. Philippe Grosvalet, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées du groupe SER.)

M. Philippe Grosvalet. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme Agnès Pannier-Runacher.

Quelle différence y a-t-il entre une ministre de la République et la porte-parole du président-directeur général du groupe EDF ? (Sourires.)

M. Jacques Grosperrin. Il fait du Karoutchi !

M. Yannick Jadot. Sors de ce corps, Karoutchi ! (M. Roger Karoutchi apprécie.)

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques. Monsieur le sénateur Grosvalet, je connais votre implication en Loire-Atlantique, en particulier en ce qui concerne la centrale à charbon de Cordemais.

J'imagine que, au travers de votre question un brin provocatrice, c'est sur l'avenir de cette centrale que vous souhaitez m'interroger.

Je vous répondrai très simplement. L'État est actionnaire d'EDF : il fixe le cahier des charges et EDF l'applique. Ce cahier des charges est connu : nous voulons pour Cordemais un projet industriel de reconversion qui soit durable et qui donne à chaque salarié de cette centrale un avenir.

Cette centrale à charbon arrêtera sa production électrique en 2027. Elle sera la dernière à fermer sur le territoire national, car c'est elle qui permettait de sécuriser l'approvisionnement de l'Ouest le temps que Flamanville démarre et monte en puissance, ce qui est désormais le cas. (MM. Thomas Dossus et Yannick Jadot ironisent.)

M. Fabien Gay. Pour sécuriser son directeur !

Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre. Il est évidemment important au regard de notre politique climatique de fermer, comme nous le faisons, les centrales à charbon. Je veux remercier l'ensemble des salariés aujourd'hui au travail : ce sont eux qui ont assuré notre sécurité d'approvisionnement ces dernières années, même si la centrale de Cordemais n'a pas fonctionné cet hiver, ce qui est une bonne chose – cela signifie que notre système énergétique est plus solide.

Par ailleurs, je veux vous rassurer : ce cahier des charges est toujours d'actualité. Nous avons un projet sur la table autour de la relance du nucléaire. C'est un bon projet, mais il convient de s'assurer qu'il est industriel, crédible et qu'il correspond aux attentes des salariés. De plus, ce n'est peut-être pas non plus le seul projet.

En tout état de cause, vous pouvez compter sur moi pour l'investissement, ainsi que sur ma collègue Olga Givernet, qui suit de très près cette situation et travaille aux côtés d'EDF. (M. François Patriat applaudit. – M. Yannick Jadot et Mme Laurence Rossignol s'exclament.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Grosvalet, pour la réplique.

M. Philippe Grosvalet. Madame la ministre, une ministre de la République ne peut pas profiter d'un voyage en Loire-Atlantique pour annoncer aux 350 salariés et à leur famille qu'ils vont perdre leur emploi, sans même prendre le soin de les rencontrer. (Mme la ministre le conteste.) Pis, en évoquant une hypothétique conversion en une usine de tuyaux, vous ajoutez de la confusion à la colère !

Une ministre de la République ne peut pas venir dans le département de Loire-Atlantique annoncer aux élus locaux que le projet qu'ils défendent et soutiennent depuis plus de dix années passe à la trappe. Imaginez le maire de Cordemais ouvrant son journal et y découvrant que le permis de construire qu'il a attribué pour l'implantation d'une usine à pellets restera sans effet !

Enfin, une ministre de la République ne peut pas revenir sur la parole donnée. Pis, elle ne peut pas remettre en cause celle du chef de l'État qui s'est engagé en septembre 2023 à convertir notre centrale à charbon en une centrale nous permettant d'aller vers la transition énergétique.

C'est pourquoi, monsieur le Premier ministre, je m'adresse à vous. Comme vous, j'ai présidé un grand département. Nous savons l'un comme l'autre que la transition énergétique et la transition écologique ne se feront pas contre les territoires ni contre leurs habitants.

Monsieur le Premier ministre, je vous demande d'intervenir auprès du président-directeur général d'EDF, M. Luc Rémont, pour lui rappeler simplement ses obligations et ses devoirs ! (Vifs applaudissements sur les travées des groupes RDSE, SER, CRCE-K et GEST, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

rachat du fabricant de doliprane

M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Corinne Féret. Monsieur le ministre de l'économie, ce week-end, dans une tribune, l'ensemble des parlementaires socialistes vous interpellaient pour que vous vous opposiez à la vente par le groupe Sanofi de sa filiale Opella, productrice du Doliprane, à un fonds d'investissement américain.

J'étais moi-même lundi matin sur le site de Lisieux, dans le département du Calvados dont je suis élue, aux côtés des salariés pour vous dire de vive voix mon opposition ferme à cette vente.

Personne n'a oublié que, en 2020, après la première vague de l'épidémie de covid-19, le Président de la République annonçait la relocalisation de la production de paracétamol en France avec un soutien massif de l'État. Quatre ans plus tard, nous apprenons avec stupeur la décision guidée par une logique purement financière de Sanofi, géant pharmaceutique français.

Nous vous demandons solennellement d'empêcher cette vente, qui pose de sérieux enjeux de souveraineté sanitaire et constitue une menace directe pour les 1700 emplois liés à l'activité industrielle et commerciale d'Opella en France.

Comme l'a affirmé le Président de la République lui-même, vous avez les instruments pour empêcher cette vente. Le décret Montebourg permet au Gouvernement d'opposer son veto au rachat de toute entreprise dont les activités sont essentielles pour garantir la protection de la santé publique des Français. Il faut l'utiliser et privilégier les alternatives françaises, au nom du patriotisme économique. Le Doliprane, médicament essentiel pour des millions de Français, ne doit pas changer de nationalité !

À ce propos, vous seriez bien inspiré de prendre connaissance du rapport du Sénat sur la reconstruction de la souveraineté économique de la France de notre collègue Franck Montaugé, ainsi que des travaux relatifs à la pénurie de médicaments auxquels a participé la sénatrice Émilienne Poumirol.

Nous ne croyons pas aux possibles engagements qui seraient pris par Sanofi. Nous avons vu trop d'entreprises ne pas respecter leurs accords passés avec l'État, particulièrement en matière emploi, et préférer payer des amendes, même considérables.

Aujourd'hui, face à la crainte légitime d'une casse sociale à Lisieux, à Compiègne, et d'une délocalisation, dans un contexte marqué par des difficultés croissantes d'approvisionnement de médicaments, ma question est simple. Allez-vous engager votre droit de veto ? Pourquoi ne l'avez-vous toujours pas fait ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST. – Mme Anne-Sophie Romagny applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Antoine Armand, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Madame la sénatrice, nous n'avons pas engagé notre droit de veto tout simplement parce que la procédure n'a pas encore commencé. Sanofi est entré en discussion exclusive, la procédure ne peut pas être enclenchée avant même le dépôt d'un projet de cession !

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Mais allez-vous le faire ?

M. Antoine Armand, ministre. Si je me suis rendu dès lundi dans votre département avec Marc Ferracci, ministre délégué chargé de l'industrie, – vous étiez d'ailleurs à nos côtés avec l'ensemble des élus du territoire – c'est pour marquer notre attachement à la production en France, à la préservation de l'emploi en France, à la localisation du siège dans l'Hexagone, au maintien de la recherche et développement chez nous, ainsi qu'à notre souveraineté sanitaire en général. Nous sommes en effet en train de reconstituer l'ensemble de la chaîne de production du médicament sur le territoire national, du principe actif qui n'était plus produit en France jusqu'au médicament que nous avons pu voir fabriquer dans l'usine de Lisieux.

Pour cela, plus que des engagements, il faut des clauses afin de nous assurer que ces engagements seront tenus. Vous l'avez souligné, votre territoire a connu des précédents où les accords n'étaient pas respectés. Nous menons en moment des discussions pour obtenir des garanties.

Vous avez parlé des sanctions, je les ai évoquées en accord avec le Premier ministre. Vous auriez pu aussi aborder la question de l'actionnariat et de la participation à la gouvernance, donc à la stratégie directe de l'entreprise. Quel meilleur moyen de signaler l'importance que nous accordons à ce dossier ?

Pour le reste, je le redis ici devant vous et je vous le garantis : rien n'est exclu et rien n'est interdit pour s'assurer de la production du Doliprane en France. (M. François Patriat applaudit.)

situation de sanofi

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)

M. Pascal Savoldelli. Cela vient d'être dit, Sanofi veut vendre sa filiale Opella, productrice de notre Doliprane, à un fonds américain. Pourquoi ? Tout simplement parce que s'enrichir prime malheureusement sur tout !

Pour Sanofi, les milliards passent avant l'emploi, avant la souveraineté sanitaire et avant la santé de nos concitoyens.

Cette vente est scandaleuse, monsieur le ministre ! Elle représente 1 700 emplois sacrifiés en France et 11 000 dans le monde. Mais ce n'est pas tout. Sanofi, avec l'aval de l'État, abandonne aussi la recherche en oncologie !

Monsieur le ministre, vous avez parlé tout à l'heure, en réponse à ma collègue, de garanties pour l'emploi, de clauses, d'engagements tenus. Mais venez avec moi à Vitry, à Gentilly, ou à Montpellier : des centaines de postes sont déjà en voie d'être supprimés au moment où nous avons besoin de progrès contre le cancer !

À cela s'ajoute le risque de pénuries de médicaments déjà préoccupantes, comme l'avait conclu ma collègue Laurence Cohen dans le rapport rendu au nom de sa commission d'enquête sur la pénurie de médicaments.

Pendant que Sanofi démantèle ses centres de recherche, que fait-il ? Il distribue 4,4 milliards d'euros à ses actionnaires après avoir encaissé en dix ans 1 milliard d'euros de crédit d'impôt recherche financés par l'argent des Français !

Ces sommes seraient plus utiles à créer un pôle public du médicament. Or que fait le Gouvernement ? Il continue de couvrir Sanofi alors que le Président de la République nous promettait la relocalisation et la production de médicaments, dont le paracétamol. Où sont passées ces belles promesses de souveraineté ? L'État doit a minima, monsieur le ministre, bloquer la prise de contrôle par une entreprise américaine. Sanofi doit respecter une mission d'intérêt public.

Ma question est simple et s'adresse aussi au Premier ministre : quand allez-vous conditionner les aides publiques à la protection des emplois, au maintien de la recherche et à la défense de notre souveraineté sanitaire ? (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K, SER et GEST.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Antoine Armand, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le sénateur, regardons les choses en face. (Exclamations sur les travées des groupes CRCE-K et SER.)

Si nous voulons avoir de l'emploi et de l'investissement en France – non pas uniquement dans le Doliprane et dans les génériques, mais aussi dans l'ensemble des technologies d'avenir –, si nous voulons vraiment que la France soit à la pointe de la recherche,…

M. Pascal Savoldelli. Et la recherche contre le cancer ?

M. Antoine Armand, ministre. …de l'industrie, qu'elle soit souveraine sur l'ensemble des technologies sanitaires, croyez-vous que nous puissions nous passer des financements publics et privés ?

Croyez-vous franchement que nous puissions envoyer le signal à l'ensemble des écosystèmes nationaux, européens et internationaux que nous ne souhaitons pas de financement pour soutenir nos investissements et notre recherche ?

M. Vincent Éblé. Le libéralisme absolu comme méthode d'attraction !

M. Antoine Armand, ministre. Ce n'est pas notre conviction, ce n'est pas ce qui a été fait par le passé et ce n'est pas non plus la volonté de ce gouvernement, sous l'autorité du Premier ministre.

Il n'empêche, monsieur le sénateur, que vous avez pointé du doigt une question extrêmement juste, qui mérite d'être examinée avec la plus grande attention, à savoir celle des aides et des financements publics.

Je le redis ici, en accord avec le Premier ministre, nous allons mener un travail pour connaître l'ensemble des soutiens publics dont Sanofi a bénéficié – et pas seulement le crédit d'impôt que vous avez mentionné.

Par ailleurs, nous allons examiner l'ensemble des dispositifs d'emploi qui sont en cours d'évolution dans notre pays.

Vous avez raison, il s'agit là d'engagement, d'éthique, ainsi que de souveraineté industrielle et technologique.

Pour le reste, sans me répéter, le maintien de l'emploi est la priorité absolue et ne sera pas négociable. Il ne s'agira pas de se contenter d'un accord en passant. Il ne s'agira pas de se contenter de mots. Nous aurons des accords formalisés – si le projet aboutit –, avec des garanties pour éviter toute forme de mésentente et de défaut d'engagement.

M. Pascal Savoldelli. On ira ensemble !

M. Antoine Armand, ministre. À vos côtés comme aux côtés de l'ensemble des sénateurs, ce gouvernement prend l'engagement de maintenir le Doliprane en France. (M. François Patriat applaudit.)

feuille de route du gouvernement sur les crèches

M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Frédérique Puissat. Ma question s'adresse à Mme la ministre chargée de la famille et de la petite enfance.

Madame la ministre, le Sénat n'est pas adepte de la caricature. Il n'est pas non plus toujours adepte des travaux des journalistes d'investigation, qui ont tendance à caricaturer et à jeter l'opprobre sur des pans économiques entiers de la société.

Pour autant, vous le savez, le Sénat se saisit de toutes les questions sociales. Nous avons auditionné en commission il y a quinze jours Victor Castanet, journaliste d'investigation, qui après avoir produit un ouvrage sur la gestion des Ehpad par les groupes privés a aujourd'hui publié un livre sur la gestion des établissements d'accueil des jeunes enfants à caractère privé.

À la suite de cette audition, que vous avez suivie à distance, madame la ministre, le président de la commission des affaires sociales, Philippe Mouiller, a souhaité mettre en place une mission flash pour étudier les importants dysfonctionnements relatés dans cet ouvrage. Cette mission pourrait, le cas échéant, se transformer en commission d'enquête. Madame la ministre, qu'avez-vous entrepris de votre côté ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la famille et de la petite enfance.

Mme Agnès Canayer, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités, de l'autonomie et de l'égalité entre les femmes et les hommes, chargée de la famille et de la petite enfance. Madame la sénatrice Frédérique Puissat, les témoignages dont vous faites part viennent conforter des rapports qui ont été rendus sur la qualité de l'accueil dans les structures de la petite enfance par l'inspection générale des affaires sociales (Igas).

Je veux être très claire aujourd'hui : nous nous engageons à ce que cette qualité d'accueil soit assurée dans tous les établissements de France.

Il est important que les parents soient sécurisés. Chaque matin, quand ils confient leur enfant à une crèche ou à une assistante maternelle, ils doivent pouvoir repartir l'esprit tranquille. Quand un enfant est confié à une structure de la petite enfance, il doit pouvoir y trouver les conditions de son épanouissement, de son éveil et de son développement.

Je voudrais rendre hommage, ici, à tous les professionnels qui travaillent chaque jour dans ces structures de la petite enfance pour accompagner les enfants et améliorer les pratiques quotidiennes.

Néanmoins, nous devons aller plus loin. C'est la raison pour laquelle il convient de renforcer les contrôles de ces structures grâce à une meilleure coordination de l'ensemble des actions conduites par les caisses d'allocations familiales (CAF), la protection maternelle et infantile (PMI), l'Igas et les préfectures. Il importe, notamment, que chaque structure fasse l'objet d'un contrôle dans un délai de cinq ans.

Nous devons aussi nous assurer que les professionnels ont les qualités pour pouvoir exercer leurs missions fondamentales. Nous devons également travailler à l'attractivité des métiers de la petite enfance, ce qui garantira l'épanouissement des enfants dans les structures d'accueil.

Enfin, nous devons, sous l'égide de la politique conduite par le Premier ministre, nous engager dans la voie du développement du service public de la petite enfance à partir de 2025 afin de définir une offre de qualité et suffisante sur tous les territoires, en coordination avec les maires. Ma boussole est de sécuriser les parents et de protéger les enfants. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour la réplique.

Mme Frédérique Puissat. Contrôler, proposer, protéger : ce sont les missions que le président Philippe Mouiller nous a assignées. Je ne doute pas que nos propositions rencontreront les vôtres, dans l'intérêt des familles de notre pays. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

octobre rose

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Nicole Bonnefoy. En ce mois d'octobre rose, je souhaite vous interpeller en tant que femme, citoyenne et sénatrice sur l'inégalité d'accès à la prévention et au traitement du cancer du sein, le cancer féminin le plus fréquent – 61 000 cas par an.

Comme l'indiquent les rubans accrochés à nos vestes, le dépistage systématique permet de répondre à un enjeu majeur pour la santé des femmes. Si la campagne de sensibilisation est importante, encore faudrait-il pouvoir accéder à ce dépistage.

Les derniers chiffres de Santé publique France révèlent que moins d'une femme sur deux y participe. En cause, la faiblesse actuelle de notre offre de soins dans des territoires qui sont en voie d'extinction médicale.

En Charente, département dont je suis élue, mais aussi ailleurs, les délais de rendez-vous pour une mammographie excèdent souvent les six mois : ce n'est pas acceptable !

De surcroît, en Nouvelle-Aquitaine, il est prévu une diminution de près de 30 % du budget alloué au centre de coordination des dépistages des cancers. On ne peut pas faire des économies aussi mal ciblées.

En milieu rural, l'offre en radiologie n'est pas en mesure de faire face à la demande. Seules les capitales régionales ou Paris délivrent des rendez-vous rapides pour celles qui, bien sûr, ont les moyens de se déplacer. Quand une femme a une ordonnance pour une mammographie, il faut impérativement établir le principe d'un rendez-vous en urgence sous trois jours au maximum, ce qui n'est vraiment pas le cas aujourd'hui.

Madame la ministre, pouvez-vous nous dire concrètement ce que vous entendez faire pour améliorer la prise en charge des dizaines de milliers de femmes confrontées à cette épreuve terrible du cancer du sein ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la santé et de l'accès aux soins.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre de la santé et de l'accès aux soins. Madame la sénatrice Bonnefoy, cela fait trente ans que le mois d'octobre est consacré au cancer du sein, à sa prévention et à son dépistage. Cela fait aussi vingt ans que le programme national de dépistage organisé a été mis en place.

Je suis d'accord avec vous, ce dépistage est essentiel : plus il est précoce, plus la prise en charge est facilitée et plus le taux de guérison est élevé. Comme vous, je constate un recul de l'accès à ce dépistage. Est-ce lié à l'absence d'infrastructures dans certains territoires ou à la faiblesse du renouvellement de notre message, qu'il va nous falloir porter encore plus vigoureusement ?

Quoi qu'il en soit, il serait intéressant de voir au niveau des communautés de santé de chaque territoire si les mammographies de dépistage du cancer du sein ne pourraient pas être prioritaires. Mais tout ne doit pas être décidé d'en haut, les choix doivent s'opérer en fonction des capacités de chacun, des appareillages disponibles dans chaque territoire et bien sûr du nombre de radiologues.

L'accès aux soins fait partie de l'intitulé de mon ministère. Je veillerai donc à ce que le dépistage soit rendu possible partout, pour toutes les femmes.

M. Rachid Temal. Comment ?

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Vous avez évoqué le centre de coordination des dépistages des cancers de Nouvelle-Aquitaine, que je connais bien. Il réalise un très bon travail, notamment en matière de dépistage sur des publics éloignés de l'accès aux soins – je pense, en particulier, aux personnes handicapées. La diminution des budgets qui lui sont alloués ne s'accompagnera pas d'une baisse de l'activité de dépistage. Elle est uniquement liée au transfert de certaines missions à l'assurance maladie, dont l'envoi de courriers. (Exclamations sur les travées des groupes SER et CRCE-K.)

M. Hervé Gillé. Cela ne représente pas un tiers du budget…

M. Mickaël Vallet. On vous parle d'une baisse de 30 % !

M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour la réplique.

Mme Nicole Bonnefoy. Il y a une vraie détresse des femmes, qu'il faut entendre. Les déserts gynécologiques sont en augmentation constante – la Cour des comptes s'en alarme. En dix ans, nous avons perdu la moitié des effectifs de gynécologues. L'urgence est là !

Après un septennat largement décevant en matière de lutte contre les déserts médicaux, le port du ruban rose ne suffira pas à vous dédouaner de vos responsabilités.

C'est donc avec force que nous vous demandons l'égalité d'accès aux soins pour toutes et pour tous. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

violences à cavaillon

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Jean-Baptiste Blanc. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur. J'y associe Alain Milon et notre collègue vauclusien Lucien Stanzione.

Dans la nuit du 8 octobre, la ville Cavaillon a été le théâtre d'un acte de représailles d'une violence inouïe : quatre véhicules de police, dont trois sérigraphiés, qui ont été incendiés en plein cœur de ville, devant le commissariat.

Cet acte criminel fait suite aux récentes opérations antidrogue, dites « place nette », menées avec détermination. Le message envoyé par ces criminels est clair : ils sont prêts à tout pour riposter. Notre réponse doit l'être tout autant : nous ne reculerons pas face à la menace.

Ces représailles démontrent que les actions menées portent leurs fruits et touchent les réseaux criminels là où ça fait mal. Les dernières opérations ont conduit à vingt-cinq interpellations. Par ailleurs, 6 kilos de cocaïne, 15 kilos de cannabis, 10 armes et 20 000 euros en argent liquide ont été saisis.

Il est donc crucial, monsieur le ministre, de maintenir cette pression continue, implacable et déterminée.

Je tiens à saluer l'engagement sans faille des forces de l'ordre, des élus locaux, du maire de Cavaillon, Gérard Daudet, de la police nationale et municipale, ainsi que des services de l'État. Je veux aussi vous remercier, monsieur le ministre, d'avoir demandé à Nicolas Daragon de venir sur place, dès le lendemain. Sa présence a marqué un soutien fort, apprécié par les élus et les Cavaillonnais. Néanmoins, ce combat ne pourra être gagné que si nous donnons aux services de l'ordre tous les moyens nécessaires.

Monsieur le ministre, êtes-vous prêt à renforcer, de manière pérenne, les effectifs de la police nationale à Cavaillon en accordant dix policiers supplémentaires et en réintégrant l'escadron de gendarmerie mobile déployé dans le cadre du plan national de sécurisation renforcée, qui nous avait été retiré pour les jeux Olympiques ?

Êtes-vous prêt, par ailleurs, à renforcer la brigade d'intervention d'Avignon qui est passée de dix-neuf à neuf agents, et qui ne peut plus soutenir efficacement les circonscriptions de Cavaillon, de Carpentras et d'Orange ? Il est nécessaire d'y affecter au moins dix gardiens de la paix supplémentaires pour sécuriser les points de deal, éviter qu'ils ne se recréent dès le lendemain ailleurs et appuyer ainsi les opérations.

Face à la violence et à l'impunité, seule une réponse forte, continue et résolue peut ramener la paix durablement à Cavaillon comme ailleurs. Dans cette guerre, votre soutien est essentiel. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)