M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Emmanuel Capus. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, Benjamin Franklin disait : « En ce monde, rien n’est certain, à part la mort et les impôts. » (Sourires.) C’est un invariant de nos sociétés, peut-être même une constante anthropologique.

En France, au pays de Descartes, en cette terre de raison, on combine ces deux certitudes : on paie des impôts sur la mort.

Je ne parle pas des droits de succession, qui existent dans la plupart des pays ; je parle d’une autre forme de prélèvement obligatoire : les frais bancaires sur les successions.

C’est l’association UFC-Que Choisir qui a lancé l’alerte en octobre 2021, quelques jours avant la Toussaint, une date choisie.

Son constat était clair. Les frais bancaires prélevés sur les comptes des défunts sont plus élevés en France que chez nos voisins. Au total, ces frais représenteraient 200 millions d’euros par an, soit environ 300 euros par défunt. C’est beaucoup, et même beaucoup trop si l’on compare avec les autres pays européens : en Italie et en Belgique, ces frais sont trois fois moindres ; en Espagne, ils sont quatre fois moins importants ; en Allemagne, ils sont purement et simplement interdits.

Au fond, on peut comprendre pourquoi des frais sont prélevés sur ces comptes : les banques doivent procéder à différentes opérations liées à leur clôture, ce qui peut mobiliser des ressources et donc coûter de l’argent.

On comprend moins bien, en revanche, pourquoi ces opérations seraient à ce point plus coûteuses en France qu’ailleurs.

On peut aussi se demander, et ne pas comprendre, pourquoi une banque ferait payer son décès à un client.

On nous parle souvent des incidences comportementales des frais bancaires : par exemple, prélever des agios inciterait les clients à ne pas avoir un compte à découvert. Mais dans le cas d’un défunt, on voit mal ce qui est attendu de lui…

La question de l’interdiction pure et simple de ces frais se pose donc. Elle a d’ailleurs été posée ! Mais c’est ignorer en partie la réalité : interdire purement et simplement aux banques de prélever des frais sur les comptes des défunts revient en fait à contraindre les banques à reporter les coûts liés à la succession sur les comptes d’autres clients.

C’est pourquoi il nous paraît plus juste d’encadrer ces frais de façon mesurée et raisonnable.

En répartissant de façon plus équitable les coûts entre les clients, on évite de matraquer les petits patrimoines, on empêche le prélèvement de frais trop élevés sur des sommes modestes : 300 euros de frais bancaires pour moins de 5 000 euros d’encours, il faut le dire, c’est une forme de taxe sur le deuil.

C’est ce mécanisme que le Sénat avait adopté, il y a un peu plus d’un an, lorsqu’il avait voté l’excellente proposition de loi tendant à renforcer la protection des épargnants. Ce texte, déposé par notre rapporteur général, Jean-François Husson, et par son prédécesseur, Albéric de Montgolfier, n’a malheureusement pas prospéré.

À l’époque, deux amendements identiques qui visaient à instaurer un tel encadrement avaient été adoptés. L’un était défendu par notre groupe, sur l’initiative de ma collègue Vanina Paoli-Gagin, l’autre par Hervé Maurey, qui est aujourd’hui rapporteur de la proposition de loi. Nous étions donc prêts à légiférer sur la question.

J’en profite pour saluer la détermination du Gouvernement qui, après avoir temporisé, a choisi d’inscrire ce texte d’initiative parlementaire à l’ordre du jour, dans une semaine qui lui est réservée.

En janvier 2023, le ministre qui siégeait au banc, lors de l’examen de la proposition de loi que je viens d’évoquer, avait indiqué qu’il souhaitait éviter une solution législative à un problème qui, somme toute, aurait pu être directement réglé par les banques.

Cette solution n’est pas advenue et vous en avez, monsieur le ministre, tiré toutes les conséquences. Notre groupe se réjouit que la loi évolue bientôt en ce sens. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – MM. Christian Bilhac et Marc Laménie applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le législateur, la mort et les héritiers : voilà un chapitre supplémentaire, alors qu’à ce stade de la discussion, tout a déjà été dit.

Le groupe Union Centriste votera évidemment avec enthousiasme la proposition de loi telle qu’elle résulte des travaux de notre commission des finances. Je ne reviendrai pas sur les détails, si ce n’est pour saluer le travail d’Hervé Maurey.

Monsieur le ministre, je voudrais attirer votre attention sur un problème connexe à celui que nous traitons aujourd’hui.

On a eu beaucoup de mal à obtenir un fichier sur les comptes bancaires et contrats d’assurance vie en déshérence. D’ailleurs, Hervé Maurey a beaucoup contribué à l’élaboration de la législation en la matière.

Cependant, il reste un trou dans le dispositif : les contrats obsèques conclus avec des sociétés de pompes funèbres, confessionnelles ou pas.

Comment les héritiers peuvent-ils savoir que la personne décédée a conclu un tel contrat, s’ils n’ont pas les documents correspondants à disposition ? Entre le décès et les obsèques, les gens n’ont souvent ni le temps ni le courage de fouiller dans les papiers, alors que – je le sais d’expérience – des gens malintentionnés ou oublieux ont tendance à réclamer une deuxième fois des frais d’obsèques qui, pourtant, ont déjà été payés.

Je vous assure que c’est un sujet et, pour le régler, il suffirait, me semble-t-il, de créer, avec les entreprises de pompes funèbres, un fichier ad hoc contenant les informations pertinentes ou d’élargir le dispositif mis en place par l’Association pour la gestion des informations sur le risque en assurance (Agira).

En tout cas, on doit avoir la possibilité de connaître l’existence d’un contrat obsèques de façon à éviter une double peine : d’un côté, la personne décédée ou quelqu’un de sa famille ayant déjà payé les frais ; de l’autre, la société de pompes funèbres les réclamant une nouvelle fois ou la famille s’adressant à une autre société. Je vous en parle, parce que je viens d’expérimenter l’affaire.

Je le répète, si les documents du contrat obsèques ne sont pas visibles, la famille et les héritiers ne savent pas qu’un contrat a été signé, car il n’existe aucun registre pour prévenir que telle et telle personne a d’ores et déjà conclu un contrat et payé pour ses obsèques. Or, profitant de la situation, des gens malintentionnés réclament une seconde fois les frais d’obsèques.

C’est une question qui dépasse le champ de cette proposition de loi, mais cela concerne aussi la protection des consommateurs en cas de décès et c’est un sujet sur lequel il faut travailler. Encore une fois, je crois que ce sujet est assez simple à régler, mais nous devons vraiment améliorer le dispositif.

Le texte que nous examinons aujourd’hui, comme ceux qui ont été votés précédemment, tente de rééquilibrer les choses de façon que le deuil ne soit pas entaché de difficultés supplémentaires. Les familles endeuillées ne doivent pas subir une double peine, que ce soit en ce qui concerne les comptes bancaires – c’est l’objet du texte que nous examinons – ou les contrats obsèques. Ces contrats devraient d’ailleurs faire l’objet d’un petit contrôle de la part de vos services, monsieur le ministre ; c’est la raison pour laquelle je me suis permis d’en parler aujourd’hui.

L’autre sujet que je souhaitais évoquer est la question de l’application dans le temps du texte que nous allons voter aujourd’hui. J’ai déposé un amendement à ce sujet, mais nous en reparlerons tout à l’heure et je sais que le rapporteur va en demander le retrait.

Pour conclure, je veux dire que cette proposition de loi est un très bon texte. Je remercie encore une fois notre rapporteur, Hervé Maurey, de l’avoir portée jusqu’ici, ainsi que les autres collègues qui ont travaillé en ce sens. (M. Christian Bilhac applaudit.)

M. le président. La parole est à Mme Ghislaine Senée.

Mme Ghislaine Senée. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires salue la proposition de loi de notre collègue députée Christine Pires Beaune, que nous examinons aujourd’hui et qui permet d’engager – enfin ! – un encadrement des frais pratiqués par les établissements bancaires sur les successions.

Depuis 2021, l’UFC-Que Choisir a lancé la publication annuelle d’études pour documenter le phénomène. Pour les successions de 20 000 euros, il s’avère que ces frais s’échelonnent entre 80 euros et 527 euros en fonction des établissements bancaires et ils ont connu une croissance de 50 % depuis 2012 et, surtout, de 25 % depuis 2021, soit des niveaux sensiblement supérieurs à l’inflation, alors même qu’il est communément admis que les tarifs imposés sont totalement décorrélés des frais réels engagés par les établissements bancaires.

En outre, ces frais s’appliquent de manière totalement opaque pour les clients, puisque, comme la Banque de France le fait remarquer, les plaquettes tarifaires sont particulièrement lacunaires sur les tarifs en vigueur.

Il aura fallu que nos collègues députés socialistes inscrivent cette proposition de loi à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, dans le cadre de leur niche, pour que le Gouvernement sorte enfin du déni, abandonne le mythe de l’autorégulation du marché bancaire et se résigne à soutenir ce texte préparé de manière transpartisane.

Plusieurs collègues l’ont rappelé, ce texte prévoit la gratuité pour les clôtures de comptes à la suite d’un décès en cas de succession simple, pour les comptes des mineurs et pour ceux dont l’encours est modéré. Notons tout de même que ce dernier cas – un solde total inférieur à 5 000 euros – concernera déjà 30 % de la population française : ce texte constituera donc une vraie avancée.

Rappelons que, pour l’heure, les taxes, qui peuvent s’apparenter à un impôt privé sur les successions, sont librement déterminées par les établissements bancaires et que l’absence de règles autorise les banques à fixer des prélèvements sur les successions variant du simple au quadruple et à des niveaux deux à trois fois supérieurs à ceux qu’on observe dans le reste de l’Union européenne.

L’examen de cette proposition de loi en première lecture au Sénat est donc une bonne nouvelle et son adoption dans quelques minutes une première pierre utile dans la régulation des frais bancaires sur succession et même, j’ose le dire, dans la régulation des frais appliqués par les banques.

Avec de 20 à 25 milliards d’euros de frais bancaires pour l’ensemble des banques, dont de 125 à 200 millions en lien avec des successions, le secteur bancaire reste, à notre sens, beaucoup trop dérégulé et générateur de profits disproportionnés qui continuent d’enrichir une poignée d’actionnaires au détriment des plus précaires, qui vivent, ou plutôt survivent, à découvert et doivent trop souvent s’acquitter de frais prohibitifs – cela concerne 18 % de la population !

J’en termine sur le texte de la commission. Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires était davantage favorable à la proposition de loi telle qu’elle a été adoptée par l’Assemblée nationale, mais il soutiendra le texte modifié par le Sénat aujourd’hui.

Nous émettons une réserve sur le fait d’introduire dès maintenant une limite de 1 % de prélèvement maximal pour la clôture du compte lors des successions dites complexes.

De la même manière que la commission a jugé inopportun le seuil de 5 000 euros pour les successions modestes, la fixation dans la loi du seuil de 1 % pour le niveau maximal de frais applicables sur une clôture de compte présente, selon nous, un risque : ce seuil, assez élevé, pourrait conduire les banques à appliquer, à la suite de l’adoption de ce texte, des tarifs rehaussés par rapport aux niveaux actuels.

Comme le souligne notre collègue Rémi Féraud dans son amendement n° 1 – un amendement que nous soutiendrons –, la voie réglementaire est plus adéquate pour distinguer plus finement les différents cas de figure et permet davantage de souplesse dans l’application de la loi.

Malgré cette réserve, nous voterons ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Somon. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Laurent Somon. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le sujet dont nous débattons aujourd’hui est un serpent de mer. Cela fait plusieurs années que le Sénat l’aborde, plusieurs années que le Gouvernement nous dit qu’il va agir et plusieurs années qu’il ne se passe rien…

Comme sur un grand nombre de sujets, l’exécutif promet, mais n’agit pas. En janvier 2022, Bruno Le Maire promettait une solution rapide. En septembre 2022, il promettait de nouveau une solution – ce devait être pour l’automne. En janvier 2023, la Gouvernement promettait un accord de place sous un mois. Finalement, rien n’a émergé !

Cette proposition de loi issue des travaux de l’Assemblée nationale est donc la bienvenue. Elle s’inspire très largement d’une proposition de loi portée par la majorité sénatoriale en 2022, notamment par notre rapporteur Hervé Maurey, dont je tiens à saluer l’opiniâtreté.

Elle a été adoptée à l’unanimité par les députés et a été utilement précisée et complétée par notre commission des finances.

Elle va permettre de supprimer les frais bancaires prélevés sur les successions soit lorsque le défunt était mineur, soit lorsque la succession représente un montant faible, montant fixé par voie réglementaire, soit lorsque la succession est suffisamment simple pour faire l’objet d’une procédure de clôture de compte simplifiée.

Dans les autres cas, des frais pourront être prélevés. Ils seront fixés par décret et ne pourront pas excéder 1 % du montant total figurant sur les comptes du défunt.

Sur ce point, je souhaite vous interroger, monsieur le ministre, pour savoir précisément de quels frais il s’agit. En effet, l’article L. 312–1–7 du code monétaire et financier prévoit que « la clôture de tout compte de dépôt ou compte sur livret est gratuite ».

Dans sa proposition de loi de 2022, notre rapporteur précisait que cet article s’appliquait à la clôture d’un compte du vivant du client. En effet, cet article se rapporte à une sous-section du code monétaire et financier intitulée « Relations des établissements de crédit avec le client » et ne concernerait donc pas l’héritier, qui n’est pas le client de la banque.

Mais, à l’Assemblée nationale, votre collègue du Gouvernement, Olivia Grégoire, a indiqué : « L’encadrement tarifaire recherché concerne les opérations bancaires liées à la succession […] qui précèdent nécessairement l’action de clôture des comptes du défunt, dont la gratuité est garantie […] dans le code monétaire et financier. »

Selon la ministre, la clôture des comptes du défunt est donc gratuite. Seules les opérations préalables seraient concernées. Elle a cité notamment le blocage des comptes, la liquidation des produits d’épargne ou encore la vérification des pièces portées par le successible.

Il me semble donc qu’il y a là une légère différence d’interprétation entre le Gouvernement et notre rapporteur. Monsieur le ministre, merci de bien vouloir éclaircir ce point.

Pour conclure, nous estimons que le point d’équilibre auquel nous sommes parvenus est satisfaisant.

D’un côté, prélever des frais, parfois de l’ordre de plusieurs centaines d’euros, sur le compte d’un défunt quand celui-ci ne va transmettre que 1 000 ou 2 000 euros ou lorsqu’il s’agit du décès d’un enfant apparaît quelque peu déplacé.

Même si une succession entraîne un certain nombre d’opérations pour l’établissement bancaire, il nous semble que celui-ci peut accompagner gratuitement les héritiers les plus défavorisés, des parents endeuillés, ou dans les cas les plus simples.

D’un autre côté, dans les cas plus complexes, il est vrai que les démarches à entreprendre par les banques peuvent être assez lourdes, avec des services parfois non automatisables, et peuvent durer plusieurs mois. Cela entraîne nécessairement un coût en termes de temps passé sur le dossier. Il est donc justifié que des frais soient appliqués, dans une limite définie.

Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains votera cette proposition de loi telle qu’améliorée par notre Haute Assemblée. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi visant à réduire et à encadrer les frais bancaires sur succession

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi visant à réduire et à encadrer les frais bancaires sur succession
Article additionnel après l'article 1er - Amendement n° 4

Article 1er

Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 312-1-4, il est inséré un article L. 312-1-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 312-1-4-1. – Les opérations liées à la clôture des comptes de dépôt, des comptes de paiement, des comptes sur livret et, à l’exception du plan d’épargne en actions, des produits d’épargne générale à régime fiscal spécifique du défunt ne font l’objet d’aucuns frais d’aucune nature par l’établissement teneur desdits comptes et produits dans les cas suivants :

« 1° Lorsque l’héritier justifie de sa qualité d’héritier soit par la production d’un acte de notoriété, soit par la production d’une attestation signée de l’ensemble des héritiers répondant aux conditions du a à d de l’article L. 312-1-4 et que les opérations liées à la clôture ne présentent pas de complexité manifeste ;

« 2° Lorsque le montant total des soldes des comptes et de la valorisation des produits d’épargne du défunt mentionnés au premier alinéa du présent article est inférieur au montant fixé par arrêté du ministre chargé de l’économie mentionné au 2° de l’article L. 312-1-4 ;

« 3° Lorsque le détenteur des comptes et produits d’épargne mentionnés au premier alinéa du présent article est mineur à la date du décès.

« Dans les autres cas, les opérations liées à la clôture des comptes et des produits d’épargne du défunt mentionnés au même premier alinéa peuvent donner lieu à un prélèvement de frais par l’établissement teneur desdits comptes et produits.

« Un décret, pris après avis du Comité consultatif de la législation et de la réglementation financières, détermine les conditions d’application du 1° et les modalités de plafonnement des frais pouvant être prélevés en application du cinquième alinéa, dans la limite de 1 % du montant total des soldes des comptes et de la valorisation des produits d’épargne du défunt mentionnés au premier alinéa et d’un montant fixé par le même décret. » ;

2° (nouveau) L’article L. 317-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après la référence : « L. 312-1-2, », est insérée la référence : « L. 312-1-4-1, » ;

b) Au deuxième alinéa, après la référence : « L. 312-1-2, », est insérée la référence : « L. 312-1-4-1, ».

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 5, présenté par M. Maurey, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 3 et 7

Après les mots :

desdits comptes et

insérer les mots :

auprès duquel sont ouverts lesdits

II. – Alinéa 8

Après les mots :

alinéa et

insérer les mots :

dans la limite

La parole est à M. le rapporteur.

M. Hervé Maurey, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision rédactionnelle.

Je profite d’avoir la parole pour répondre à M. Féraud, qui a commis, dans son intervention, une erreur de fond sur laquelle je me permets de revenir.

Le texte de la commission ne supprime pas le plafond de 5 000 euros et ne renvoie pas cette question à un décret que le Gouvernement devra prendre. Il renvoie à un arrêté qui existe déjà – il date du 7 mai 2015. Cette procédure présente l’avantage que le montant en question peut être réévalué chaque année : ainsi, comme je l’indiquais tout à l’heure, ce seuil est aujourd’hui de 5 909,95 euros. Nous renvoyons donc non pas à un futur décret, mais à un arrêté qui existe et qui a le mérite de permettre des réévaluations.

Je voudrais également vous dire, monsieur Féraud, que j’avais moi aussi la volonté d’aboutir à un texte conforme pour gagner du temps, mais il est apparu qu’un certain nombre de points méritaient quand même d’être sécurisés et améliorés.

J’ai d’ailleurs été rassuré par le Gouvernement – une fois n’est pas coutume ! – sur le fait que cela n’entraînerait pas un enterrement de première classe, si j’ose dire, puisque le Gouvernement a d’ores et déjà pris des engagements en vue d’une inscription de ce texte à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale pour une nouvelle lecture.

Dès lors que nous avons le soutien du Gouvernement pour cette inscription, nous pouvons avancer. Et il vaut mieux perdre quelques semaines ou mois afin d’avoir un texte bien ficelé.

Voilà ce que je voulais dire à ce stade à M. Féraud, sachant que nous allons examiner tout de suite son amendement sur la limite de 1 % du montant des soldes des comptes.

M. le président. L’amendement n° 1, présenté par MM. Féraud, Cozic, Kanner et Raynal, Mmes Blatrix Contat et Briquet, M. Éblé, Mme Espagnac, MM. Jeansannetas, Lurel et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Supprimer les mots :

, dans la limite de 1 % du montant total des soldes des comptes et de la valorisation des produits d’épargne du défunt mentionnés au premier alinéa et d’un montant fixé par le même décret

La parole est à M. Rémi Féraud.

M. Rémi Féraud. Je remercie le rapporteur pour ses précisions. En effet, les choses sont renvoyées non pas à un décret, mais à un arrêté qui existe déjà. Pour autant, le montant ne sera pas inscrit dans la loi. J’entends vos propos rassurants, monsieur le rapporteur ; nous n’avons d’ailleurs pas déposé d’amendement sur ce point.

L’amendement n° 1 concerne la limite de 1 % du montant total des comptes. Cette limite peut paraître extrêmement basse et protectrice, mais cela peut faire beaucoup dans certains cas très particuliers : il peut arriver que le compte soit largement alimenté au moment du décès, par exemple lorsque la vente d’un bien immobilier précède de peu le décès.

Le fait que cette limite soit accompagnée d’un montant maximum – celui-ci devra être fixé de manière réglementaire – est plutôt rassurant, j’en conviens.

Mais, au fond, quel besoin dans ce cas de fixer cette limite de 1 % ? Mon amendement est aussi un amendement d’appel pour avoir davantage d’explications sur cette limite retenue par le rapporteur.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 1 ?

M. Hervé Maurey, rapporteur. Sans suspense, l’avis est évidemment défavorable, puisque cela tend à supprimer ce que la commission a décidé d’adopter.

Comme je l’ai dit dans la discussion générale, nous avons travaillé en parfaite coopération avec Mme Pires Beaune et je salue de nouveau le fait que, tout au long du processus à l’Assemblée nationale, elle n’a pas manqué de rappeler le travail du Sénat – c’est suffisamment rare pour être souligné et pour qu’elle en soit remerciée.

Pourtant, c’est sur ce point qu’il existe une légère divergence entre Mme Pires Beaune et le Sénat.

Alors, pourquoi ce 1 % ? Encore une fois, ce n’est pas un plafond qui va s’imposer directement aux banques et elles n’auront pas nécessairement la possibilité d’aller jusque-là. C’est un plafond que l’on propose – je ne veux pas dire qu’on l’impose… – au pouvoir réglementaire, parce que nous voulons être certains que le barème que le Gouvernement va fixer ne permettra dans aucun cas d’avoir des montants de frais supérieurs à 1 % du solde du compte.

C’est donc en fait davantage pour encadrer les travaux du Gouvernement. Il ne s’agit pas de se méfier de lui, mais au contraire de l’aider, car, ainsi, il ne pourra pas céder aux pressions de certains qui voudraient que, dans tel ou tel cas, on ait des frais qui aillent au-delà de 1 %. Le Gouvernement peut donc nous remercier et je suis certain qu’il ne manquera pas de le faire. (Sourires.)

Ensuite, comme vous l’avez vous-même rappelé, monsieur Féraud, nous avons ajouté un plafond en valeur absolue qui sera fixé par décret.

Ainsi, l’exemple que vous prenez et que j’ai aussi entendu dans la bouche de Mme Pires Beaune – quelqu’un qui a vendu sa maison pour payer son Ehpad, qui a provisoirement 200 000 euros sur son compte au moment du décès et qui aurait alors 2 000 euros de frais bancaires au moment de la succession – ne me semble pas pertinent, parce que le barème que le Gouvernement va adopter prendra cela en considération – je pense que le ministre va aussi vous rassurer sur ce point. Il me semble que le barème fixera un plafonnement en valeur absolue au-delà d’une certaine somme.

Par conséquent, je crois qu’il n’y a vraiment pas matière à s’inquiéter. Au contraire, le dispositif proposé – une limite de 1 % et un plafond en valeur absolue fixé par décret – est tout à fait sécurisant pour les héritiers.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué. Avant de donner l’avis du Gouvernement, je voudrais répondre, si vous le permettez, monsieur le président, à la question posée par M. Somon sur le débat juridique relatif au champ des frais concernés. Cette question est tranchée par cette proposition de loi, notamment le fait que cela s’applique bien aux héritiers. C’est tout l’intérêt de cette proposition de loi et je crois que cela clarifie le débat juridique qui a existé – vous avez raison de le rappeler. Ce texte permet de définir le champ concerné.

L’avis est favorable sur l’amendement rédactionnel n° 5.

En ce qui concerne l’amendement n° 1 du sénateur Féraud, le texte actuel prévoit, comme le rapporteur l’a indiqué, qu’un décret encadrera les tarifs lorsque le solde du compte dépasse 5 000 euros. De manière générale, je pense qu’il faut laisser de la souplesse au pouvoir réglementaire et qu’on ne doit pas mettre trop d’éléments dans la loi, car cela peut parfois entraîner des complexités supplémentaires.

Je suis plutôt d’avis, je le redis, de laisser de la souplesse, mais j’ai aussi noté le débat entre vous et entre le Sénat et l’Assemblée nationale. C’est la raison pour laquelle je m’en remets à la sagesse du Sénat sur cet amendement.