Sommaire
Présidence de M. Mathieu Darnaud
Secrétaires :
Mme Sonia de La Provôté, M. Mickaël Vallet.
2. Questions d’actualité au Gouvernement
annonces budgétaires relatives aux collectivités territoriales
Mme Cécile Cukierman ; M. Gabriel Attal, Premier ministre ; Mme Cécile Cukierman.
M. Vincent Capo-Canellas ; M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
violences sexistes et sexuelles au sein des armées
M. Grégory Blanc ; Mme Patricia Mirallès, secrétaire d’État auprès du ministre des armées, chargée des anciens combattants et de la mémoire ; M. Grégory Blanc.
M. Étienne Blanc ; M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice ; M. Étienne Blanc.
baisse des émissions de gaz à effet de serre
Mme Samantha Cazebonne ; M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
stratégie de déploiement des soins palliatifs
Mme Corinne Bourcier ; Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités.
mise en place d’un plan d’urgence pour l’école publique en seine-saint-denis
M. Ahmed Laouedj ; Mme Nicole Belloubet, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
situation des finances publiques (i)
M. Claude Raynal ; M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ; M. Claude Raynal.
situation des finances publiques (ii)
M. Antoine Lefèvre ; M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ; M. Antoine Lefèvre.
M. Franck Montaugé ; M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires ; M. Franck Montaugé.
déplacement de migrants sans domicile fixe de paris vers orléans
M. Hugues Saury ; M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement ; M. Hugues Saury.
sort des petits commissariats vidés pour les jeux olympiques
M. Pierre-Antoine Levi ; M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer ; M. Pierre-Antoine Levi.
financement des associations d’aide aux migrants
Mme Marie-Carole Ciuntu ; M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer ; Mme Marie-Carole Ciuntu.
M. Rémi Cardon ; M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie et de l’énergie ; M. Rémi Cardon.
M. Damien Michallet ; M. Hervé Berville, secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la mer et de la biodiversité.
autoroute a69 et droits de l’homme
M. Philippe Folliot ; M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer ; M. Philippe Folliot.
Suspension et reprise de la séance
3. Mise au point au sujet de votes
5. Saisie et confiscation des avoirs criminels. – Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
Amendement n° 37 de Mme Patricia Schillinger. – Adoption.
Amendement n° 45 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 24 de M. Ian Brossat. – Rejet.
Amendement n° 25 de M. Ian Brossat. – Rejet.
Amendement n° 26 de M. Ian Brossat. – Rejet.
Amendement n° 44 de Mme Patricia Schillinger. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article 1er bis AB (nouveau) – Adoption.
Amendement n° 18 de M. Ian Brossat. – Rejet.
Adoption de l’article.
Articles 1er bis B, 1er bis C et 1er bis D – Adoption.
Amendement n° 21 de M. Ian Brossat. – Rejet.
Amendement n° 19 de M. Ian Brossat. – Rejet.
L’article demeure supprimé.
Amendement n° 20 de M. Ian Brossat. – Rejet.
Amendement n° 46 de la commission. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 39 de Mme Patricia Schillinger. – Rejet.
Article 2 bis (nouveau) – Adoption.
Amendement n° 38 de Mme Patricia Schillinger. – Rejet.
Adoption de l’article.
Adoption de l’article.
Adoption de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.
Suspension et reprise de la séance
6. Rénovation de l’habitat dégradé. – Adoption définitive des conclusions modifiées d’une commission mixte paritaire sur un projet de loi
Mme Amel Gacquerre, rapporteure pour le Sénat de la commission mixte paritaire
Texte élaboré par la commission mixte paritaire
Amendement n° 1 du Gouvernement. – Réservé.
Adoption définitive du projet de loi dans le texte de la commission mixte paritaire, modifié.
Suspension et reprise de la séance
7. Diverses mesures relatives au grand âge et à l’autonomie. – Adoption définitive des conclusions modifiées d’une commission mixte paritaire sur une proposition de loi
M. Jean Sol, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire
Texte élaboré par la commission mixte paritaire
Amendement n° 1 du Gouvernement. – Réservé.
Amendement n° 2 du Gouvernement. – Réservé.
Adoption définitive du projet de loi dans le texte de la commission mixte paritaire, modifié.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Pierre Ouzoulias
8. Homicide routier. – Discussion d’une proposition de loi dans le texte de la commission
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice
M. Francis Szpiner, rapporteur de la commission des lois
Mme Marie-Pierre de La Gontrie
Clôture de la discussion générale.
9. Modification de l’ordre du jour
10. Homicide routier. – Suite de la discussion et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
M. Francis Szpiner, rapporteur
Amendement n° 39 de Mme Marie-Pierre de La Gontrie. – Rejet.
Amendement n° 33 rectifié de M. Laurent Somon. – Retrait.
Amendement n° 17 de M. Guy Benarroche. – Adoption.
Amendement n° 27 de Mme Silvana Silvani. – Devenu sans objet.
Amendement n° 40 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 28 de Mme Silvana Silvani. – Rejet.
Amendement n° 26 de Mme Silvana Silvani. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 24 rectifié de M. Aymeric Durox. – Non soutenu.
Amendement n° 1 de Mme Marie-Claude Lermytte. – Non soutenu.
Amendement n° 2 rectifié de M. Dany Wattebled. – Rejet.
Amendement n° 5 rectifié bis de Mme Alexandra Borchio Fontimp. – Retrait.
Amendements nos 19 rectifié et 20 rectifié de M. Aymeric Durox. – Non soutenus.
Amendements nos 21 rectifié et 22 rectifié de M. Aymeric Durox. – Non soutenus.
Amendement n° 7 rectifié bis de Mme Alexandra Borchio Fontimp. – Retrait.
Amendement n° 23 rectifié de M. Aymeric Durox. – Non soutenu.
Amendement n° 14 de M. Guy Benarroche. – Rejet.
L’article demeure supprimé.
Amendement n° 9 rectifié de Mme Alexandra Borchio Fontimp. – Adoption.
Amendement n° 16 de M. Guy Benarroche. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 15 de M. Guy Benarroche. – Rejet.
Amendement n° 37 de Mme Nadège Havet. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article 1er septies – Adoption.
Amendement n° 8 rectifié de Mme Alexandra Borchio Fontimp. – Retrait.
Article 1er octies – Adoption.
Amendement n° 41 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 25 de Mme Silvana Silvani. – Adoption de l’amendement rétablissant l’article.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie
Adoption de la proposition de loi dans le texte de la commission, modifié.
11. Ordre du jour
compte rendu intégral
Présidence de M. Mathieu Darnaud
vice-président
Secrétaires :
Mme Sonia de La Provôté,
M. Mickaël Vallet.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Questions d’actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat ainsi que sur notre site internet.
Au nom du bureau du Sénat, j’appelle chacun de vous à observer au cours de nos échanges l’une des valeurs essentielles du Sénat : le respect, qu’il s’agisse du respect des uns et des autres ou du respect du temps de parole.
annonces budgétaires relatives aux collectivités territoriales
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)
Mme Cécile Cukierman. Monsieur le Premier ministre, après un projet de loi de finances imposé par 49.3, après l’annonce d’une économie de 10 milliards sur la sphère étatique, sans passage devant le Parlement, le Président de la République, puis votre ministre de l’économie ont dans le viseur les collectivités locales. Certains murmurent même déjà l’arrivée de contrats de Cahors de nouvelle génération !
À l’heure où les maires soumettent au vote leur budget pour 2024, ces annonces inquiètent et sèment le trouble : l’avenir de nos collectivités territoriales semble de plus en plus incertain.
Depuis deux ans, ces dernières ont supporté les hausses du prix de l’énergie, que le filet de sécurité n’a jamais compensées ; la hausse de coût des matériaux, qui a fait s’envoler de plus de 20 % leurs projets initiaux, conçus au service des habitants ; la flambée des taux d’intérêt ; la hausse du point d’indice de leurs agents. Elles ont dû s’y adapter malgré des budgets contraints, aux marges de manœuvre plus que restreintes quant aux recettes, à la différence de l’État.
Monsieur le Premier ministre, quand cesserez-vous de considérer les collectivités territoriales comme des supplétifs, face aux difficultés financières de l’État ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K, ainsi que sur des travées des groupes SER, RDSE et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Gabriel Attal, Premier ministre. Madame la présidente Cécile Cukierman, je suis moi-même élu local depuis dix ans, dans ma commune (Murmures sur les travées du groupe SER.), et pour ma part j’ai toujours refusé d’opposer l’État aux collectivités territoriales.
J’ai toujours refusé de pointer du doigt l’État, en tant qu’élu local, ou les collectivités et les élus locaux, en tant que représentant de l’État, pour au moins deux raisons : tout d’abord, parce que je connais le très grand esprit de responsabilité des élus locaux et, ensuite, parce que nous sommes tous dans le même bateau.
Quand on parle de la dépense publique, c’est bien la dépense de toutes les administrations publiques que l’on regarde. Si l’on veut prévenir une hausse supplémentaire des taux d’intérêt, c’est pour éviter que la charge de la dette ne s’aggrave encore pour l’État ; mais c’est aussi parce que l’on veut protéger les collectivités locales en préservant leurs capacités d’investissement. Si les taux d’intérêt devaient augmenter fortement, leurs projets d’investissement s’en trouveraient évidemment entravés. Nous avons donc collectivement intérêt à faire preuve de sérieux dans nos décisions budgétaires.
Pour ce qui concerne plus précisément l’exécution budgétaire de 2023, il faut regarder factuellement ce que nous dit l’Insee. Le ralentissement économique actuel est aujourd’hui d’ampleur européenne et, fort heureusement, la France est moins touchée que ses voisins. Je vous le rappelle, la prévision de croissance actualisée est revue à la baisse beaucoup plus fortement en Allemagne qu’en France, parce que l’économie française résiste mieux.
Toujours est-il que nous assistons à un ralentissement européen, qui se traduit par une diminution des recettes.
Ce que nous dit l’Insee, c’est que les collectivités territoriales ont connu un fort besoin de financement en 2023, parce que leurs recettes ont chuté, parce que des dépenses ont augmenté plus vite que l’inflation et parce que le point d’indice a été revalorisé.
Je le répète, je crois très profondément à l’esprit de responsabilité collective.
J’ai demandé à mon gouvernement de réunir les associations d’élus pour échanger et travailler avec elles, pour que nous avancions tous ensemble dans un esprit de responsabilité. Le 9 avril prochain, Bruno Le Maire, Thomas Cazenave, Christophe Béchu et Dominique Faure recevront ainsi leurs représentants.
Je ne crois pas qu’il soit judicieux d’agiter des épouvantails…
Mme Cathy Apourceau-Poly. Qui les agite ?
M. Gabriel Attal, Premier ministre. Il n’est pas question de refaire les contrats de Cahors. L’enjeu, c’est de prendre acte collectivement d’une dégradation économique qui a entraîné des difficultés budgétaires au cours de l’année 2023 et d’y répondre collectivement. J’y insiste, je crois à l’esprit de responsabilité de tous.
Madame la présidente Cukierman, à vous entendre, nous considérons les collectivités territoriales comme des « supplétifs ». Je tiens, en réponse, à vous rappeler rapidement quelques faits.
Sur l’initiative du Président de la République, nous avons inversé la courbe de la dotation globale de fonctionnement (DGF). Depuis deux ans, et pour la première fois depuis treize ans, cette dotation augmente de nouveau. (Murmures sur les travées du groupe SER. – M. Pascal Savoldelli s’exclame.)
M. Hervé Gillé. Et l’inflation ?
M. Gabriel Attal, Premier ministre. On peut évidemment en débattre ; certains feront valoir qu’elle aurait dû augmenter davantage. Il n’empêche, je le répète, qu’elle n’avait pas progressé depuis treize ans et que c’est bien sur l’initiative du Président de la République qu’elle a augmenté.
Je vous rappelle aussi que nous avons compensé à l’euro près nos réformes des finances locales. Je vous renvoie aux travaux réalisés, non par le Gouvernement, mais par la Cour des comptes : on a même compensé plus que prévu…
M. Jean-François Husson. On en reparlera !
M. Gabriel Attal, Premier ministre. Au total, à la fin de 2022, quelque 6 milliards d’euros supplémentaires avaient été accordés aux collectivités territoriales.
Enfin, je tiens à vous rappeler les dispositifs mis en œuvre face aux différentes crises survenues : 10 milliards d’euros de soutien ont été déployés lors de la crise sanitaire ; plus de 2 milliards d’euros ont été accordés face à la hausse des factures d’énergie. Nous en avons beaucoup parlé ici et nous y avons travaillé ensemble.
En 2024, l’accompagnement de l’État ne faiblira pas. Ce dernier versera 60 milliards d’euros aux collectivités locales : c’est le deuxième poste de dépenses de l’État après l’éducation nationale.
Évidemment, nous sommes au rendez-vous et nous resterons à leurs côtés. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour la réplique.
Mme Cécile Cukierman. Monsieur le Premier ministre, il ne s’agit pas d’opposer l’État et les collectivités territoriales, mais de reconnaître, factuellement, que le premier et les secondes suivent des logiques comptables totalement différentes.
Je le répète : l’État peut choisir le montant de ses recettes à sa guise. Aujourd’hui, vous procédez à des coupes dans les dépenses de tous vos ministères, vous décidez de rogner sur telle ou telle politique publique, aux dépens de celles et de ceux qui en ont le plus besoin : c’est un choix politique. Mais les collectivités territoriales, qui, en ce moment même, doivent boucler leur budget, sont tenues de répondre aux besoins de leur population en palliant les défaillances de l’État dans ses plus grandes missions régaliennes. C’est bien pourquoi, depuis sept ans, nous assistons à l’explosion des budgets locaux en matière de santé et de sécurité.
Les collectivités territoriales n’ont pas ce choix-là ; aujourd’hui, vous décidez bel et bien d’en faire des supplétifs pour compenser vos difficultés financières ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K, ainsi que sur des travées des groupes SER, RDSE et Les Républicains.)
dérapage des comptes publics
M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Vincent Capo-Canellas. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie et des finances.
L’Insee a dévoilé hier l’ampleur du déficit des finances publiques pour l’année 2023 : 5,5 % du PIB – c’est, selon les dires du Premier président de la Cour des comptes, un dérapage important et vraiment très rare.
M. Olivier Paccaud. Historique !
M. Vincent Capo-Canellas. Monsieur le ministre, quand avez-vous été alerté de ce dérapage du déficit ? Pourquoi ne pas avoir annoncé et pris des mesures correctives ?
En outre, quelle est l’ampleur du correctif à apporter, cette fois, en 2024 ? Vous avez annoncé 10 milliards d’euros de réduction de dépenses par voie réglementaire : nous aurions préféré que le Parlement puisse s’en saisir et les documenter.
Nous entendons maintenant le chiffre de 20 milliards ; et, ce matin, en commission des finances, après un contrôle sur pièces et sur place largement médiatisé par la presse, M. le rapporteur général nous a fait savoir que, selon une note de vos services, il fallait même tabler sur 30 milliards d’euros de réduction des dépenses pour rester dans les clous en 2024. Quel est le bon chiffre ? Quelle est votre appréciation ? Surtout, quels sont les remèdes, selon vous ?
À l’évidence, la croissance ne sera pas suffisante : on peut le regretter, mais c’est ainsi. L’augmentation du taux d’emploi est un objectif que nous approuvons, mais c’est un remède de moyen terme. De même, la réforme de l’assurance chômage, qui semble-t-il est dans les tuyaux – on le verra sans doute ce soir à vingt heures : il serait peut-être bon que des annonces soient aussi faites devant le Parlement… –, n’aura pas d’effet financier à court terme.
Dès lors, que reste-t-il ? L’augmentation des impôts. Selon nous, il existe des marges de manœuvre au titre de la rente inframarginale. On peut aussi envisager des contributions ciblées sur certains secteurs de l’économie qui, d’une certaine manière, ont profité de la crise.
En parallèle, la question du rythme de suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) peut encore être posée. Sur l’ensemble de ces points, nous sommes ouverts à la discussion, mais encore faut-il que le Parlement y soit associé : comment comptez-vous tenir l’objectif d’un déficit à 3 % du PIB en 2027 ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. (Exclamations.)
Mme Françoise Gatel. Quel succès ! (Sourires.)
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Je vois que l’accueil est toujours aussi chaleureux au Sénat ! (Mêmes mouvements.)
Monsieur le sénateur Capo-Canellas, vous m’interrogez sur les prévisions de recettes qui sont l’explication d’un déficit de 5,5 % en 2023. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Nos prévisions n’étaient sans doute pas bonnes. (Exclamations sur les mêmes travées.) Mais – je tiens tout de même à le rappeler – personne ne les a contestées quand elles ont été formulées. (Vives protestations sur les travées des groupes SER, CRCE-K, GEST et Les Républicains. – M. Franck Montaugé lève les bras au ciel.)
Mme Céline Brulin. Si, bien sûr que si !
M. Olivier Paccaud. Vos services ! Vos services !
M. Bruno Le Maire, ministre. Nous avons établi nos prévisions de croissance ainsi que notre projet de budget en août et en septembre 2023 et, lorsque nous avons présenté nos prévisions de recettes, le Premier président de la Cour des comptes, comme c’est l’usage, a présenté la conclusion du Haut Conseil des finances publiques (HCFP). On pouvait lire dans l’avis du 22 septembre 2023 : « Pour 2023, le Haut Conseil estime que les prévisions de prélèvements obligatoires du Gouvernement sont plausibles. »
À mon sens, plutôt que de s’invectiver sur le sujet, mieux vaut comprendre…
M. Olivier Paccaud. Assumer !
M. Bruno Le Maire, ministre. … comment l’inflation, que nous n’avions pas connue depuis les années 1970, a eu un impact sur les prévisions de recettes…
M. Jean-François Husson. Ah, ça y est !
M. Bruno Le Maire, ministre. … pour aboutir au résultat d’aujourd’hui.
Ensuite, le plus important me semble être de regarder comment tenir les comptes publics dans les années qui viennent.
Je confirme ma détermination totale à revenir sous les 3 % de déficit public… (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. François Bonhomme. Encore heureux !
M. Bruno Le Maire, ministre. … à l’horizon de 2027.
Je confirme que, pour parvenir à 3 %, au-delà des 10 milliards d’euros d’économies que nous avons déjà dégagés en 2024, lesquels s’ajoutent aux 8 milliards d’euros que nous avons immédiatement faits à la fin du mois de décembre dernier – le total est donc de 18 milliards d’euros d’économies sur le budget de l’État –, des économies complémentaires seront nécessaires. Il faudra que nous les regardions ensemble. Je ne peux pas les chiffrer aujourd’hui, car nous n’avons pas tous les éléments dont nous avons besoin.
Mme Céline Brulin. Et les recettes ?
M. Bruno Le Maire, ministre. Nous devons, dès 2024, nous engager vers les 3 % de déficit en 2027. Il faudra des économies ; il faudra des réformes de structure ; et il faut avant tout savoir quelle société nous voulons.
Pour notre part, nous voulons une société du travail, ce qui suppose de réformer l’indemnisation du chômage ; une société de la responsabilité – c’est précisément dans cet esprit que nous avons doublé la franchise sur les médicaments – ; et une société de l’innovation et de l’investissement…
M. le président. Il faut conclure.
M. Bruno Le Maire, ministre. … pour maintenir la croissance de notre pays. C’est à cette vision de la société que doivent répondre nos objectifs de finances publiques. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
violences sexistes et sexuelles au sein des armées
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Grégory Blanc. Il y a quelques jours, à Versailles, le Gouvernement nous parlait de droit des femmes. Il y a quelques jours, Le Courrier de l’Ouest puis Le Monde relataient l’histoire de Manon Dubois, Angevine de 23 ans, victime d’une soixantaine de faits d’agressions sexuelles reconnus par son agresseur comme par sa hiérarchie. Pourtant condamné par la justice, lui est toujours dans l’armée ; elle, elle n’y est plus, poussée à la démission par ses supérieurs.
Selon votre ministère, la moitié des femmes militaires quittent nos armées avant la fin de leur carrière, alors même que la « grande muette » peine à recruter.
Les problèmes d’agressions sexuelles ou racistes ne sont pas isolés, mais bien systémiques, comme le souligne la capitaine Saint-Paul.
Madame la secrétaire d’État, mes questions sont précises.
Premièrement, la cellule Thémis ne compte que 4 agents pour 270 000 personnels : comptez-vous la faire évoluer ?
Deuxièmement, l’inscription au casier judiciaire n’empêche pas la poursuite de la carrière. Selon vous, est-il possible qu’un agresseur reconnu demeure dans l’armée de la République ?
Troisièmement et enfin, la Défenseure des droits a adressé plusieurs demandes au ministère des armées : pourquoi restent-elles sans réponse ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER, CRCE-K, RDSE et RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des anciens combattants et de la mémoire.
Mme Patricia Mirallès, secrétaire d’État auprès du ministre des armées, chargée des anciens combattants et de la mémoire. Monsieur le sénateur Grégory Blanc, avant tout, je vous prie d’excuser l’absence de M. le ministre des armées, qui m’a chargée de répondre à votre question.
Sachez que nous nous tenons aux côtés des victimes de violences sexuelles et sexistes. Il ne doit pas y avoir de tabou sur ce sujet, ni dans les armées ni ailleurs.
M. le ministre l’a rappelé : porter l’uniforme de nos armées donne plus de devoirs que de droits. Néanmoins, dans les armées comme ailleurs, des dérives individuelles existent. Elles sont absolument inacceptables et il faut les traiter avec exemplarité.
C’est pourquoi M. le ministre des armées a signé hier une instruction sur la conduite à tenir en cas de signalement. Ce document rappelle les responsabilités de chacun et les outils dont dispose le commandement.
Premièrement, il faut écouter et protéger la victime, en l’informant sans délai des mesures d’accompagnement dont elle peut bénéficier et en s’assurant qu’elle ne soit plus mise en contact avec son agresseur présumé. À ce titre – vous en avez parlé –, il existe une cellule de signalement : la cellule Thémis, qui garantit l’anonymat de ceux qui font appel à elle. J’invite toutes les victimes et tous les témoins à se rapprocher de cette structure.
MM. Hussein Bourgi et Akli Mellouli. Elle ne compte que quatre agents !
Mme Antoinette Guhl. Quatre !
Mme Patricia Mirallès, secrétaire d’État. Deuxièmement, sur les plans disciplinaire et judiciaire, le commandement doit être irréprochable. En cas de suspicion de viol ou d’agression sexuelle, des mesures de suspension conservatoire du mis en cause seront systématiquement prises lorsque les faits ont un caractère suffisant de vraisemblance. Aussi, une enquête disciplinaire doit systématiquement avoir lieu afin d’établir la matérialité des faits. Elle doit déboucher sur des sanctions disciplinaires de la plus grande sévérité.
Troisièmement, que la victime présumée ait porté plainte ou non, le commandement doit systématiquement saisir le procureur de la République au titre de l’article 40 du code de procédure pénale. En effet, l’autorité judiciaire est seule habilitée à établir les faits et à prendre les sanctions pénales qui s’imposent.
Monsieur le sénateur, vous l’aurez compris : pour M. le ministre des armées et pour nous tous, la règle, c’est la tolérance zéro. L’ensemble du Gouvernement est déterminé à agir pour lutter contre les violences faites aux femmes. Nous en faisons une priorité.
M. Hussein Bourgi. Virez les coupables !
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour la réplique.
M. Grégory Blanc. Madame la secrétaire d’État, depuis dix ans, le ministère prend un certain nombre de mesures, mais dans les faits, entre les orientations et leur infusion sur le terrain, il y a un océan.
Jallal Hami et la dénonciation du « racisme systémique » ; désormais, un #MeToo des armées : aujourd’hui plus que jamais, nous avons besoin d’une armée forte, à l’avant-garde de la République et non logée en son arrière-train.
Dites-le à nos généraux. Dites-leur bien d’être rapidement dans le sens de l’Histoire s’ils veulent protéger l’institution : sinon, de toute évidence, le mouvement qui se lève les dépassera, comme il a dépassé les responsables de tant d’autres secteurs. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRC-K, ainsi que sur des travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Étienne Blanc, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Étienne Blanc. Monsieur le garde des sceaux, pouvez-vous me confirmer que, mardi dernier à Marseille, vous avez convoqué des magistrats du siège et du parquet que nous avions entendus dans le cadre de la commission d’enquête sur le narcotrafic, placée sous la présidence de notre collègue Jérôme Durain ?
Pouvez-vous confirmer que vous leur avez reproché d’avoir tenu le propos suivant : « À Marseille, nous sommes en train de perdre la guerre contre le narcotrafic » ? Pouvez-vous confirmer que vous leur avez reproché d’avoir, en tenant ces propos, fait prospérer le Rassemblement national ?
Monsieur le garde des sceaux, pourquoi cette convocation ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur Étienne Blanc, vous avez d’ores et déjà affirmé sur Europe 1 que j’aurais violé la séparation des pouvoirs, alors même que je dois être prochainement entendu devant votre commission d’enquête. De toute évidence, vous avez une vision assez particulière du contradictoire…
Je vous rappelle que cette réunion entre les magistrats marseillais et moi-même s’est tenue à huis clos. Sauf erreur de ma part, vous n’étiez pas présent. On vous a rapporté des propos…
Mme Marie-Arlette Carlotti. Donc, ils sont faux ?
M. Étienne Blanc. Il fallait m’inviter !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Je n’avais aucune raison de vous inviter, monsieur le sénateur !
En outre, vous oubliez un certain nombre de propos, qui conduisent à jeter la suspicion sur des policiers, des agents pénitentiaires, des greffiers, des cabinets d’instruction ou encore des avocats.
Pour ce qui concerne les greffiers et les juges d’instruction, je précise qu’il n’existe aucune procédure. J’ai d’ailleurs dit au magistrat qui a tenu ces propos qu’il avait bien de la chance que les greffiers ne se soient pas mis en grève.
Pour ce qui concerne les avocats, j’ai indiqué à la magistrate qui s’est exprimée que, si elle avait un reproche à formuler à l’un d’entre eux, il lui suffisait de saisir le procureur de la République, puisque c’est, au fond, son travail, pour qu’il en informe l’ordre des avocats. L’ordre des avocats ferait alors le sien.
Les magistrats sont libres de leur parole ; je l’ai d’ailleurs rappelé à mes interlocuteurs.
M. Olivier Paccaud. Ah !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Mais le ministre l’est aussi ! Je suis chargé du bon fonctionnement de la justice et je ne retire rien des propos que j’ai tenus.
Dès le lendemain de cette réunion, certains ont parlé d’une véritable « boucherie ». Je ne suis ni boucher ni charcutier, monsieur le sénateur. (Sourires sur les travées du groupe RDPI.) J’ai tenu les propos qu’un garde des sceaux responsable est en droit de tenir (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe RDSE.), qui plus est après avoir déployé à Marseille des moyens si considérables. Sachez que les renforts que nous avons envoyés dans cette ville équivalent à l’effectif total des magistrats, des greffiers et des contractuels que compte le tribunal de Rouen : ce n’est pas rien !
Oui, j’ai fait valoir que, en affirmant qu’une guerre était perdue, on la perdait : c’est une réalité. J’assume totalement ces propos. (Marques d’impatiences sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Michel Savin frappe son pupitre.)
M. le président. Il faut conclure.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Je vais vous dire un dernier mot… (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Il faut conclure, monsieur le garde des sceaux !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Quand on respecte les magistrats, on ne taille pas dans la fonction publique comme vous l’avez fait, réduisant ainsi leur nombre ! (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI. – M. Bernard Fialaire applaudit également.)
M. François Patriat. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Étienne Blanc, pour la réplique.
M. Étienne Blanc. Monsieur le garde des sceaux, quand le Gouvernement convoque des magistrats du siège, il viole délibérément le principe de séparation des pouvoirs…
M. Étienne Blanc. … protégé par notre Constitution.
Vous avez convoqué des personnes que nous avons entendues dans le cadre d’une commission d’enquête, sous serment, pour leur demander quoi ? De se rétracter ? De se parjurer ?
M. Étienne Blanc. Monsieur le garde des sceaux, cela s’appelle de la subornation de témoins,… (Protestations sur les travées du groupe RDPI.)
M. Étienne Blanc. … car notre commission d’enquête poursuit actuellement ses travaux.
Que nous ont dit ces magistrats ? Qu’à Marseille ils font face à d’énormes difficultés pour juger les trafiquants sévissant dans le cadre des réseaux…
M. Étienne Blanc. … et que la ville subit une vague sans précédent, à laquelle ils ne peuvent faire face. (L’orateur appuie son propos d’un geste de la main.)
M. Albéric de Montgolfier. C’est lui qui a la parole !
M. Étienne Blanc. Mon propos vous déplaît, mais je vous apostrophe et, dois-je vous le rappeler, vous êtes là pour me répondre, comme vous serez là pour répondre à la commission d’enquête !
M. Étienne Blanc. Pis encore, dans les prisons, dont vous avez la responsabilité, les délinquants poursuivent leurs trafics. Depuis leur cellule, ils peuvent même commanditer des crimes.
Voilà ce qui inquiète les Français. Voilà pourquoi le Sénat a créé cette commission d’enquête, qui vous déplaît profondément.
M. le président. Il faut conclure !
M. Étienne Blanc. Vous avez voulu instrumentaliser les témoins, alors que la commission d’enquête est en cours.
M. Xavier Iacovelli. Vous êtes partial !
M. Étienne Blanc. Le Sénat fera son travail jusqu’au bout pour alerter les Français face au narcotrafic, face à ce phénomène qui vous dépasse et qui dépasse le Gouvernement tout entier. Il y va de l’honneur du Sénat ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur des travées du groupe UC. – M. Hussein Bourgi applaudit également.)
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. C’est scandaleux, je n’ai pas encore été entendu ! Un peu de respect !
baisse des émissions de gaz à effet de serre
M. le président. La parole est à Mme Samantha Cazebonne, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme Samantha Cazebonne. Ma question s’adresse à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Monsieur le ministre, dans un rapport paru la semaine dernière, le Centre interprofessionnel technique de la pollution atmosphérique (Citepa) a annoncé que les émissions de gaz à effet de serre françaises avaient baissé de 4,8 % en 2023.
Ce record récompense d’abord les efforts de sobriété de chacun, qu’il s’agisse des particuliers, des entreprises, des collectivités territoriales ou de l’État. Mais les baisses enregistrées sont avant tout le résultat d’une politique et d’objectifs ambitieux de long terme, qui commencent à porter leurs fruits : planification écologique, loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, plan de sobriété, stratégie nationale bas-carbone ou encore plan d’investissement France 2030.
Les résultats de l’an dernier sont même meilleurs que ceux de 2020, l’année du covid. La réduction d’émissions obtenue en 2023 équivaut à la quasi-totalité des baisses enregistrées en France entre 2012 et 2017.
Par comparaison, les émissions de carbone des Français sont désormais inférieures de 7 % à la moyenne mondiale. C’est une très bonne nouvelle pour nos objectifs de décarbonation, que nous devons désormais amplifier.
J’ajoute que cette baisse vaut pour tous les secteurs, qu’il s’agisse de l’énergie, de l’industrie, du bâtiment ou encore de l’alimentation. À ce titre, je suis fière de mener, depuis plusieurs années maintenant, le combat pour favoriser la consommation de protéines végétales, dont la production réduit les émissions de CO2.
Il faut entretenir cette dynamique. Comme l’a rappelé la présidente du Haut Conseil pour le climat, Corinne Le Quéré, cette année 2023 ne doit pas rester une exception.
Monsieur le ministre, quels éléments pouvez-vous nous apporter aujourd’hui pour nous garantir que nous resterons sur la même trajectoire en 2024 ? Quels chantiers doit-on encore mener et quels progrès structurels faut-il amplifier ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Madame la sénatrice Cazebonne, le Citepa, organisme indépendant, a effectivement publié ses chiffres pour l’année 2023.
On observe parfois, dans le débat public, la volonté de ne retenir que les mauvaises nouvelles afin d’occulter les bonnes ; mais cette étude indépendante souligne qu’en 2023 notre pays a suivi le rythme qu’il doit tenir jusqu’à la fin de la décennie au titre des baisses d’émissions.
Notre taux de réduction des émissions, qui s’établit à 4,8 %, a doublé par rapport à l’année précédente. Ce chiffre était de 1 % par an en moyenne entre 2012 et 2017 ; il a été multiplié par deux pendant le premier quinquennat d’Emmanuel Macron et nous l’avons de nouveau doublé l’année dernière.
Il y a une bonne nouvelle dans la bonne nouvelle, que vous avez également rappelée : tous les secteurs affichent une baisse d’émissions, y compris les transports. La réduction y est certes plus modeste que dans d’autres domaines – elle s’établit à 2 %. Mais je vous rappelle qu’en 2022 les niveaux d’émissions dans le secteur des transports étaient supérieurs à ce qu’ils étaient en 1990 : à l’évidence, il fallait avancer de manière ciblée.
Ce résultat, nous le devons à l’action des collectivités territoriales, à l’action des citoyens, à l’action des entreprises, à l’action de tout le monde. L’enjeu, à présent, c’est de poursuivre le travail.
Avec la planification écologique, élaborée hier par Élisabeth Borne et aujourd’hui déployée par Gabriel Attal, l’année 2024 verra se poursuivre l’ensemble de ces efforts.
J’ajoute que, malgré les coupes budgétaires, le budget consacré à la réduction des émissions bénéficie cette année de 7 milliards d’euros supplémentaires par rapport à l’année dernière, à la même époque.
Malgré les baisses décidées, le fonds vert augmente de 5 %. Les crédits dédiés à la rénovation énergétique augmentent quant à eux de 600 millions d’euros. Ce sont là autant de leviers grâce auxquels nous pourrons poursuivre et amplifier cette dynamique, à deux conditions : que tout le monde insiste sur les résultats – c’est important, y compris pour faire reculer l’écoanxiété – ; et que, collectivement, nous fassions de cette année 2023 un tremplin.
M. le président. Il faut conclure.
M. Christophe Béchu, ministre. Dès lors, nous pourrons tenir le rythme ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe INDEP.)
stratégie de déploiement des soins palliatifs
M. le président. La parole est à Mme Corinne Bourcier, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur des travées du groupe UC.)
Mme Corinne Bourcier. Madame la ministre du travail, de la santé et de la solidarité, votre ministre délégué Frédéric Valletoux a rappelé dimanche dernier qu’une stratégie de déploiement des soins palliatifs avait été préparée, afin que les vingt et un départements qui n’en sont toujours pas dotés en bénéficient « avant la fin du débat sur la fin de vie ».
Nous tous ici ne pouvons que saluer une telle annonce. En effet, les équipes de soins palliatifs sont indispensables à la prise en charge de certains malades. Elles accomplissent un travail extraordinaire, non seulement auprès des patients, mais aussi auprès des familles, qui se sentent parfois totalement démunies face à la situation de leur proche.
Je rappelle que les soins palliatifs ne font pas seulement de l’accompagnement de la fin de vie : ils participent aussi beaucoup à la prise en charge de la douleur. C’est absolument fondamental, car cette prise en charge est évidemment en lien étroit avec un éventuel souhait de recourir à l’aide à mourir. Nous ne pouvons donc qu’encourager le déploiement des services de soins palliatifs sur tout le territoire.
Madame la ministre, ma question est double.
La première porte sur le calendrier. Je le répète, on nous a assuré que les départements seraient tous dotés de services de soins palliatifs avant la fin du débat sur la fin de vie ; mais, pour l’heure, seule l’Assemblée nationale sait quand elle examinera le texte de loi annoncé. Notre chambre ignore encore si elle l’étudiera en juin, à la rentrée parlementaire de l’automne ou même plus tard. Quel est le calendrier de déploiement des soins palliatifs ?
La seconde porte sur l’existence du personnel sur lequel vous comptez. La seule unité publique de soins palliatifs des Yvelines a fermé il y a à peine quelques semaines, faute de personnel. Au total, 150 postes sont vacants dans l’ensemble des services existants et un quart des médecins vont quitter leurs fonctions d’ici à cinq ans. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – MM. Olivier Henno et Olivier Bitz applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités. Mesdames, messieurs les sénateurs, madame la sénatrice Corinne Bourcier, vous avez raison : il est nécessaire d’œuvrer à la prise en charge de la douleur, dans une logique de continuum. La douleur peut frapper chacun d’entre nous, à la suite d’une opération, par exemple. C’est pourquoi il est essentiel de la traiter.
Cette démarche est tout le sens du rapport réalisé par le professeur Franck Chauvin et son équipe, visant à doter notre pays d’une stratégie d’accompagnement des soins, tout particulièrement des soins palliatifs.
Évidemment, les choses ne peuvent pas évoluer comme cela, en un rien de temps. C’est la raison pour laquelle le plan que nous préparons a pour objectif de structurer la filière des soins palliatifs. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Belin. Il faut des médecins pour cela !
Mme Catherine Vautrin, ministre. Ma collègue Sylvie Retailleau et moi-même avons commencé à travailler à la mise en place de cette nouvelle filière médicale de soins palliatifs. Cela implique de nommer un certain nombre de professeurs d’université, qui auront à leurs côtés des chefs et des assistants-chefs de clinique.
La question qui se pose aujourd’hui, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est celle de la formation des médecins aux soins palliatifs. Celles et ceux qui sont médecins dans cet hémicycle savent mieux que personne qu’il ne suffit pas de consacrer à ce sujet seulement quelques heures d’études dans un cursus total de dix ans. Si nous voulons structurer la filière des soins palliatifs, il faut pouvoir assurer une formation. Celle-ci doit être initiale et continue et profiter à l’ensemble des soignants – médecins, infirmiers et aides-soignants.
Sachez que nous avons équipé vingt départements d’unités de soins palliatifs (USP), dont la Corrèze il y a quinze jours. Nous travaillons désormais à la mise en place de vingt-trois équipes régionales et d’une USP dans chaque département. Nous veillons également à déployer des unités mobiles de soins palliatifs (UMSP).
Concernant l’USP de l’hôpital de Houdan, un médecin sera nommé en avril et sera secondé dès le mois de septembre. Houdan est un contre-exemple que nous nous dépêchons d’effacer, car notre volonté, bien évidemment, est d’équiper le pays d’unités de soins palliatifs. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP.)
mise en place d’un plan d’urgence pour l’école publique en seine-saint-denis
M. le président. La parole est à M. Ahmed Laouedj, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Ahmed Laouedj. Madame la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, l’école, cette institution qui devrait être le symbole de l’égalité des chances, est aujourd’hui en proie à une crise sans précédent.
Les enseignants, les parents d’élèves et les élus sont tous mobilisés depuis près d’un mois pour réclamer la mise en place d’un plan d’urgence pour l’éducation en Seine-Saint-Denis. Dans ce département, les classes sont surchargées, les enseignants sont épuisés, les locaux se dégradent, les professeurs ne sont pas remplacés.
Face à cette situation, que fait le Gouvernement ? Il y répond par une réforme, le « choc des savoirs », qui va faire de l’école un lieu de tri et d’exclusion, et des économies budgétaires, dans un domaine dont il prétend faire une priorité.
Comment peut-on parler de priorité quand on réduit le budget de l’éducation nationale ? Comment peut-on parler de priorité quand on met en péril le recrutement des enseignants ? Comment peut-on parler de priorité quand on propose une réforme qui risque de creuser les inégalités, d’affaiblir notre système éducatif et de compromettre l’avenir de nos enfants ?
Nous luttons depuis près d’un mois pour que l’éducation soit considérée comme une priorité.
Combien de fois devrons-nous rappeler que l’éducation n’est pas un coût, mais un investissement : un investissement dans l’avenir de nos enfants, un investissement dans l’avenir de notre pays ?
Combien de temps allons-nous devoir encore nous battre pour que chaque enfant, quel que soit son lieu de résidence, ait accès à une éducation de qualité ?
La Seine-Saint-Denis n’est pas le seul département concerné : les syndicats d’enseignants appellent à la grève le mardi 2 avril, preuve que cette crise s’étend à l’échelle nationale !
Madame la ministre, quelle mesure concrète allez-vous prendre pour mettre en place un plan d’urgence pour l’école publique en Seine-Saint-Denis ?
Je vous demande également de bien vouloir recevoir une délégation de sénateurs de Seine-Saint-Denis qui, comme moi, sont préoccupés par l’avenir de nos enfants et croient en l’éducation, en son pouvoir de changer des vies, de transformer des sociétés et de construire un avenir meilleur. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées des groupes GEST et CRCE-K.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Mme Nicole Belloubet, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Laouedj, vous faites bien de dire que l’école est un investissement. C’est la raison pour laquelle je suis très attentive aux préoccupations exprimées tant par les élus que par les personnels de l’éducation nationale en Seine-Saint-Denis.
Preuve de notre attention, ils ont été reçus, ainsi que leurs représentants syndicaux, par le directeur académique des services de l’éducation nationale (Dasen), la rectrice de l’académie de Créteil et les membres de mon propre cabinet. Je recevrai moi-même les députés de Seine-Saint-Denis qui m’ont demandé rendez-vous. Puisque vous me sollicitez personnellement, je peux vous assurer d’ores et déjà que je vous écouterai avec beaucoup d’attention.
Au sujet des locaux, j’ai eu un entretien avec Stéphane Troussel, président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, et Valérie Pécresse, présidente de la région d’Île-de-France, dans le cadre de leurs compétences respectives.
Vous affirmez qu’il reste du chemin à parcourir en Seine-Saint-Denis, mais reconnaissez que beaucoup a déjà été fait. Vous dites que l’école est un investissement. Or l’investissement a été massif au profit de ce département !
M. Fabien Gay. Sérieusement ?
Mme Nicole Belloubet, ministre. Je vous épargnerai le détail de toutes les mesures qui ont été prises. Je rappellerai simplement l’importance de l’éducation prioritaire en Seine-Saint-Denis, qui a permis le dédoublement des classes de grande section, de cours préparatoire (CP) et de cours élémentaire de première année (CE1) – dans l’enseignement primaire, six classes sur dix bénéficient aujourd’hui de ce régime !
Par ailleurs, l’investissement entre 2017 et 2022 de plus de 1 500 postes nous a permis d’assurer, notamment au collège, des taux d’encadrement très inférieurs à la moyenne nationale, soit 23 élèves par division en Seine-Saint-Denis, contre 25 dans le reste du pays.
Je rappelle également la prime de 200 euros qui est octroyée tous les mois aux agents publics de Seine-Saint-Denis, y compris aux professeurs. J’y ajoute la prime de fidélisation, s’élevant à 12 000 euros au bout de cinq ans, qui sera versée dans quelques jours.
Je pourrais aussi vous parler des 2 millions d’euros, fruit du plan « L’État plus fort en Seine-Saint-Denis », qui ont servi notamment à la rénovation des écoles dans le département.
M. le président. Veuillez conclure !
Mme Nicole Belloubet, ministre. Enfin, la carte scolaire a été améliorée.
Bref, la Seine-Saint-Denis est pour nous un sujet de préoccupation, et nous agissons en ce sens ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
situation des finances publiques (i)
M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Fabien Gay applaudit également.)
M. Claude Raynal. Si j’osais, mes chers collègues, je dirais que, depuis 2022, nous vivons une époque formidable. (Exclamations amusées.) Une époque où, par la magie du 49.3, le Parlement peut au mieux soumettre ses propositions, sans pour autant peser en quoi que ce soit sur les équilibres budgétaires présentés par l’exécutif.
Au moins pouvait-on espérer que, en maîtrisant de bout en bout l’exercice budgétaire, le Gouvernement tiendrait les finances du pays, comme il s’y est engagé auprès des Français et de ses partenaires européens.
Aujourd’hui, les faits sont là. En 2023, le déficit attendu était de l’ordre de 4,9 % du PIB ; le déficit réel a finalement atteint 5,5 %. Pour 2024, la croissance était estimée à 1,4 % ; or elle a été revue à 1 % et s’établira probablement à 0,7 %.
La loi de programmation des finances publiques (LPFP) qu’on nous appelait à voter sans délai au mois de décembre se révèle déjà totalement caduque trois mois plus tard. Pour ramener le déficit à 4,4 % du PIB en 2024, l’impasse budgétaire est non plus de 10 milliards d’euros, mais de 30 milliards, ce qui est évidemment inatteignable !
Les trois textes financiers présentés par le Gouvernement, avec une belle assurance, ont des conséquences majeures : un retour à la procédure de déficit excessif, que nous avions quittée grâce au travail de vos prédécesseurs, monsieur le ministre ; un risque amplifié de dégradation de la note de la France, que personne ne souhaite ici ; une révision obligatoire de la loi de programmation, afin de retrouver un peu de crédibilité internationale.
Une époque formidable, disais-je…
Monsieur le ministre, vos coups de rabot n’ont aucun sens. Êtes-vous prêt à rouvrir avec le Parlement le débat sur le budget dans son ensemble, tant sur les dépenses que sur les recettes ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Christian Bilhac applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Si je puis me permettre, celui qui avait réussi à nous faire sortir de la procédure pour déficit public excessif en 2017, c’était en effet mon prédécesseur, c’est-à-dire moi ! (M. Martin Lévrier applaudit. – Rires et exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et Les Républicains.)
M. Fabien Genet. Le déficit, c’est moi ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Le Maire, ministre. Oui, nous avons rétabli les comptes publics en 2017, en 2018 et en 2019 ! Nous sommes ainsi parvenus à ramener le déficit public sous les 3 % : c’est un fait. (Nouvelles exclamations.)
Ensuite, nous avons fait face à deux crises majeures – la crise du covid et la crise inflationniste –, grâce au soutien de beaucoup de sénateurs et de sénatrices ici présents. Aujourd’hui, les comptes publics doivent être de nouveau rétablis. Je le confirme devant vous : mon objectif est de parvenir à ramener le déficit public sous les 3 % en 2027.
M. Jean-François Husson. C’est impossible !
M. Bruno Le Maire, ministre. Cela demandera-t-il des efforts plus importants ? Oui ! Ainsi, nous devrons parvenir à faire en trois ans ce que nous étions supposés faire en quatre ans.
Avons-nous commencé à le faire ? Oui ! Il y a quelques semaines, nous avons engagé 10 milliards d’euros de réduction des dépenses de l’État pour immédiatement corriger ce déficit plus élevé que prévu.
Suis-je ouvert à la discussion ? Évidemment ! Ma porte vous sera ouverte dès demain – je sais que plusieurs d’entre vous participeront à la réunion que je tiendrai au ministère de l’économie et des finances.
Monsieur le sénateur Raynal, je salue votre esprit constructif et républicain. Visiblement, il n’est pas partagé par ceux qui, dans cette assemblée, refusent de participer à la discussion sur la réduction de la dépense publique. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Fabien Gay proteste.)
M. Jean-François Husson. Commencez par venir un peu plus souvent au Sénat ! Un peu de respect !
M. Bruno Le Maire, ministre. Comment parviendrons-nous à atteindre cet objectif ? Par la réduction des dépenses et en maintenant la croissance.
Je le rappelle, notre prévision de croissance pour 2023 a été la plus exacte de toutes celles qui ont été présentées. Nous avions tablé sur un taux de 1 % ; il est finalement de l’ordre de 1 % à 0,9 %.
Certes, nous avons révisé notre prévision de croissance pour 2024, mais c’est le cas dans tous les pays européens. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous avons tous subi le choc géopolitique et le ralentissement de l’économie chinoise. Songez que, au mois de février – soit au même moment que nous –, l’Allemagne a révisé sa croissance de 1,3 % à 0,2 %. Soit 1,1 point de moins !
M. le président. Il faut conclure !
M. Bruno Le Maire, ministre. Au-delà des réductions de dépenses, je suis convaincu que, en 2024, en 2025 et en 2026, nous aurons une croissance solide, c’est-à-dire à la hauteur de la solidité de l’économie française. (Applaudissements sur les travées du groupe RPDI. – Exclamations sur les travées des groupes SER et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour la réplique – il vous reste treize secondes, mon cher collègue.
M. Claude Raynal. Monsieur le ministre, il suffit d’y croire !… (Rires.) À ce niveau de correction budgétaire, on dépasse des questions simplement financières.
Ce dont notre société a besoin avant tout, c’est de discuter des priorités qu’elle doit se fixer. Notre groupe a d’ailleurs demandé au Gouvernement qu’il organise un débat sur ce sujet, dans le cadre de l’article 50-1 de la Constitution.
M. Patrick Kanner. Pas de réponse !
M. Claude Raynal. En effet, nous attendons toujours sa réponse ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains et CRCE-K.)
situation des finances publiques (ii)
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Antoine Lefèvre. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Monsieur le ministre, la rumeur qui bruissait depuis la semaine dernière a donc été confirmée par l’Insee ce mardi, dont les conclusions font froid dans le dos : notre déficit public accuse une dégradation de 0,6 point par rapport à l’objectif que le Gouvernement s’était fixé, atteignant ainsi le creux vertigineux de 5,5 % du PIB pour 2024.
Ces nouvelles prévisions placent la France parmi les pays aux finances publiques les plus dégradées de la zone euro, comme l’a indiqué la Cour des comptes dans son rapport annuel.
Le Sénat avait pourtant tenté de marquer le pas lors de l’examen du projet de loi de finances. Il avait ainsi permis de dégager 7 milliards d’euros d’économies. Hélas ! parmi les nombreuses mesures que nous avions proposées, vous n’en avez retenu aucune !
Comprenez l’agacement qui est le nôtre, monsieur le ministre, lorsque, après cinquante jours à peine d’exécution du budget, vous avez finalement consenti à ôter vos œillères et avez décidé de sabrer par décret 10 milliards d’euros prévus par la loi de finances, tout en évitant soigneusement de consulter le Parlement !
Le rapporteur général de la commission des finances, Jean-François Husson, qui a procédé à un contrôle sur place et sur pièces à votre ministère la semaine dernière, a fait remarquer que ce niveau de déficit n’a jamais été atteint sous la Ve République, hors périodes de crise et de récession.
Monsieur le ministre, vous qui êtes amateur de littérature, et même auteur à vos heures perdues (Exclamations amusées.), je vous invite à méditer sur ces mots de Montaigne : « L’obstination et ardeur d’opinion est la plus sûre preuve de bêtise. »
Le président du Sénat, le rapporteur général du budget, le président de la commission des finances à l’instant même, l’ensemble des groupes politiques de notre assemblée – de la majorité comme des oppositions –, le Haut Conseil des finances publiques, qui, dans son avis, a dénoncé votre prévision de croissance – contrairement à ce que vous venez d’indiquer –, tous ont donné l’alerte. De votre côté, vous claironnez votre volonté de ne pas augmenter les impôts. Combien de temps vous faudra-t-il pour que vous acceptiez de sortir de ce déni mortifère face à notre situation financière, monsieur le ministre ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. « Quand on me contrarie, on éveille mon attention, non pas ma colère », écrivait Montaigne. Vous avez précisément éveillé mon attention, monsieur le sénateur. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Pascal Savoldelli. Il était temps !
M. Bruno Le Maire, ministre. Ce problème national des finances publiques ne remonte pas à un an, mais à des décennies ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) En effet, il y a une propension nationale à la dépense publique, bien partagée sur ces travées.
Le rapporteur général ne cesse de m’adresser des critiques sur les dépenses excessives. Or, au sortir du covid, alors que nous voulions en finir avec les dispositifs exceptionnels, il m’écrivait que telle profession attend du Gouvernement le rétablissement du fonds de solidarité, du chômage partiel et de l’indemnisation des coûts fixes, qui lui avaient permis de résister à la crise.
Des courriers comme celui-là, je n’en reçois pas quelques dizaines, ni des centaines, mais des milliers, et de tous les groupes politiques confondus ! Très peu me proposent des réductions de dépenses. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Husson. Nous vous avons suggéré des milliards d’euros d’économies !
M. Olivier Paccaud. Oui, pendant l’examen du budget !
M. Bruno Le Maire, ministre. Au contraire, on m’invite toujours à dépenser davantage pour mieux protéger les Français !
Puisque vous parlez de « déni », monsieur le sénateur, je vous invite à reconnaître la nécessité de sortir de cette addiction à la dépense publique, qui est la marque caractéristique de la France. (Nouvelles exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Il faut être capable de réduire les dépenses inefficaces et inutiles et de faire des choix de politique publique. C’est la raison pour laquelle je vous invite à participer, demain, à la réunion que je tiendrai avec l’ensemble des groupes politiques.
Je rejoins le président Raynal, qui a complètement raison : ce sont des choix de politique publique qu’il faut faire pour définir le type de société que nous voulons. Or les choix que défend le Gouvernement sont clairs : une société du travail, qui suppose de réformer l’indemnisation du chômage ; une société de la responsabilité, qui commande d’en finir avec la politique du tout-gratuit ; une société de l’innovation, qui renforce la croissance dans notre pays. Voilà ce que je vous propose, monsieur le sénateur ! (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour la réplique.
M. Antoine Lefèvre. Monsieur le ministre, vous avez annoncé que la réduction du déficit s’opérerait en priorité sur la protection sociale et les dépenses des collectivités. Ce sont donc les élus locaux qui, une fois de plus, seront désignés comme les boucs émissaires de votre mauvaise gestion financière du pays.
Je rappellerai à votre mémoire ces mots de Pierre Mendès France : « Les comptes en désordre sont la marque des nations qui s’abandonnent. » (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
planification écologique
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Franck Montaugé. Monsieur le Premier ministre, très peu de temps après votre nomination, vous avez dit vouloir restreindre sensiblement la politique de transition écologique définie par votre prédécesseure, Élisabeth Borne, et par le secrétariat général à la planification écologique (SGPE), dont le travail sérieux a été reconnu.
Cette politique constitue pourtant le cadre fondamental de l’action à mener pour toutes les filières françaises et concerne tous les Français dans leur vie quotidienne. Elle est, en définitive, la carte et la boussole dont la France se dote pour atteindre les objectifs climatiques et environnementaux pris dans les cadres européen et mondial.
L’évaluation conduite par Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz – elle non plus n’est pas contestée – indique que les besoins d’investissement pour financer la transition écologique devront être de l’ordre de 66 milliards d’euros à l’horizon de 2030.
Ma question est simple, monsieur le Premier ministre : comment faites-vous face à ces obligations et à leur financement dans un contexte de dégradation accrue des finances publiques, de dynamique économique atone et de difficultés sociales particulièrement préoccupantes ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Montaugé, comme la plupart de vos collègues, vous avez écouté la déclaration de politique générale du Premier ministre : à aucun moment il n’a tourné la page de la planification écologique et énergétique ; au contraire, il en a repris la responsabilité. (M. le Premier ministre le confirme.) D’ailleurs, il a eu l’occasion, il y a quelques jours, de refaire un point avec l’ensemble des ONG sur nos engagements écologiques.
Au-delà des annonces qui ont été faites, votre question porte sur les moyens que nous y consacrons. Il y a quelques minutes, j’ai rappelé à la sénatrice Cazebonne que l’action entreprise par le Gouvernement a permis, sur la seule année 2023, de réduire les émissions de gaz à effet de serre autant que pendant la période comprise entre 2012 et 2017. (M. Franck Montaugé s’exclame.)
Une partie de ceux qui nous donnent des leçons aujourd’hui faisaient moins bien en termes d’engagement budgétaire et réglementaire lorsqu’ils étaient en responsabilité. Ils continuent toujours, en jouant le même disque rayé, de prétendre que l’inaction climatique serait de notre responsabilité, au mépris de toutes les vérités objectives !
Le rapport coproduit par M. Pisani-Ferry et Mme Mahfouz ne spécifie pas que l’État doit trouver 66 milliards d’euros par an,…
M. Franck Montaugé. La moitié !
M. Christophe Béchu, ministre. … mais que la somme que nous devons dégager pour financer la transition écologique est de l’ordre de 66 milliards d’euros. Il précise également que la part prise par la puissance publique doit s’élever à 30 milliards d’euros et être répartie entre l’État et les collectivités territoriales.
Malgré le contexte budgétaire, nous avons pris l’engagement, pour la seule année 2024, d’augmenter de façon inédite les crédits alloués à la transition écologique. De la fin mars 2023 à la fin mars 2024, ils ont ainsi progressé de 7 milliards d’euros.
Quant aux 2 milliards d’euros du fonds vert, ils ont permis, en l’espace d’un an et demi, un doublement du niveau d’investissement des collectivités territoriales (M. Bruno Belin proteste.), passant de 2 milliards à 4 milliards d’euros.
Voilà la réalité, monsieur le sénateur. Le reste, c’est de la politique ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – MM. Emmanuel Capus et Raphaël Daubet applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour la réplique.
M. Franck Montaugé. Une somme d’approximations et de contre-vérités ne fait pas une vérité, monsieur le ministre.
Vous devez sanctuariser dès maintenant les sommes consacrées à la transition écologique, d’ici à 2030. À défaut, il coûtera beaucoup plus cher à la Nation de réaliser ces investissements plus tard, lesquels auront une efficacité bien moindre. Ce sont les Français qui en paieront directement la note, avec beaucoup de souffrance, comme c’est déjà trop souvent le cas aujourd’hui.
En 2017, vous chantiez les louanges d’un monde nouveau. Sept ans plus tard, vous tournez le dos à l’ambition d’une France résiliente et solidaire pour le monde de demain. (M. le Premier ministre proteste.) Pis encore, vous poursuivez méthodiquement le saccage de l’État providence, alors que rien d’efficace ne se fera sans justice sociale.
Au-delà des éléments de langage insipides dont nous sommes abreuvés ad nauseam (Exclamations sur les travées du groupe RDPI et au banc du Gouvernement.), c’est d’un grand récit mobilisateur et progressiste et d’une vision pour assurer la transition de notre pays vers le monde de demain que les Français ont besoin ! (Mme Audrey Linkenheld renchérit.)
Le Président de la République française est attendu sur ce sujet également. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
déplacement de migrants sans domicile fixe de paris vers orléans
M. le président. La parole est à M. Hugues Saury, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Hugues Saury. Monsieur le ministre de l’intérieur et des outre-mer, à Orléans, la rumeur enfle selon laquelle des sans domicile fixe (SDF), dont beaucoup de migrants, seraient déplacés en province pour faire place nette à Paris en prévision des jeux Olympiques. Ces SDF partiraient régulièrement à bord de bus à destination de Strasbourg, d’Angers et d’Orléans – et sans doute d’autres villes.
Malgré ses demandes répétées auprès de l’État, le maire d’Orléans n’obtient que des réponses évasives. Il est inacceptable qu’un maire apprenne de telles informations par voie de presse !
Le Gouvernement prétend vouloir instaurer des relations de confiance avec les collectivités. Aussi, il est temps d’accorder un minimum de considération aux élus locaux et de les tenir informés de ce type d’opérations. In fine, ce sont, comme toujours, les maires qui devront trouver des solutions.
Dans le cas de la ville d’Orléans, il est avéré que, périodiquement, un car arrive de Paris avec, à son bord, entre 35 et 50 personnes. Ainsi, on compte environ 500 déplacés depuis mai 2023. L’État a conclu un accord avec une association pour la prise en charge de ces derniers. Or, faute de places d’hébergement d’urgence disponibles, ces personnes s’installent dans des hôtels, mais n’y restent environ que trois semaines. Au-delà, certains d’entre elles s’engagent dans une procédure d’asile, tandis que d’autres s’évaporent dans la nature.
Il est inacceptable de traiter ainsi ces hommes et ces femmes, de les faire monter dans un bus – sur quels critères ? – pour les déplacer dans des villes où ils ne connaissent personne et dans lesquelles rien n’est mis en œuvre pour les accueillir. Et pour cause : les élus n’en sont pas informés ! Ce sont là des méthodes contestables.
Monsieur le ministre, confirmez-vous ces faits et comment justifiez-vous un tel dédain envers les élus locaux et la personne humaine de la part de vos services ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du logement.
M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement. Monsieur le sénateur Saury, je vais m’efforcer d’être le plus clair et le plus transparent possible sur l’hébergement d’urgence des sans domicile fixe dans notre pays. Chaque année, l’État y consacre 3 milliards d’euros. C’est un budget en augmentation, car il s’élevait à 1,8 milliard seulement en 2017.
Aujourd’hui, 200 000 places sont consacrées à l’hébergement des SDF à l’échelle nationale, dont 100 000 en Île-de-France. Il se trouve que, malgré tous ces efforts, les places en Île-de-France sont saturées et qu’un certain nombre de SDF contactant le 115 ne parviennent pas à trouver de solution.
C’est pourquoi le Gouvernement, en mars 2023, a fait le choix d’une politique de desserrement. Il a ainsi mis en place dix sas d’accueil régionaux pour y envoyer un certain nombre de SDF, exclusivement sur la base du volontariat. En un an, ce sont 3 800 personnes qui ont accepté d’être déplacées dans ces conditions.
En région Centre-Val de Loire – vous la connaissez aussi bien que moi, monsieur le sénateur –, 519 SDF ont été accueillis à Orléans.
Seules 50 personnes à la fois sont logées dans les sas, pour une durée de trois semaines. Elles se voient ensuite proposer une palette de solutions d’hébergement : intermédiation locative, pension de famille ou résidence sociale.
On déplore une saturation en Île-de-France sur les 100 000 places d’hébergement disponibles. Cette politique de déplacements est totalement décorrélée des jeux Olympiques ; elle se poursuivra d’ailleurs après leur tenue en raison de la très forte pression qui s’exerce dans cette région.
La politique d’accueil temporaire des SDF est conduite en toute transparence avec les élus locaux. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) La préfecture du Loiret a prévenu le maire d’Olivet et celui d’Orléans dès la mise en place de ce sas régional. (M. Hugues Saury le conteste.) Mme la préfète de région s’est même entretenue sur ce sujet avec le maire d’Orléans, le 14 février dernier.
Bref, nous n’avons rien à cacher, monsieur le sénateur. Encore une fois, ces déplacements se font en toute transparence et sur la base du volontariat. Nous devrions nous retrouver tous ensemble pour trouver des solutions efficaces en faveur des personnes qui se retrouvent à la rue en Île-de-France, faute de places d’hébergement disponibles ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Hugues Saury, pour la réplique.
M. Hugues Saury. La coïncidence de ces déplacements avec la tenue des JO est tout de même troublante… Le manque de transparence sur ce sujet ressemble à un aveu d’impuissance. C’est aussi la démonstration que l’afflux de migrants est hors de contrôle et que les désordres qu’il engendre sont proscrits pour les touristes, mais tolérés pour les riverains parisiens.
Cette politique de façade, les villes de province n’en veulent pas, pas plus qu’elles ne souhaitent être les victimes d’une politique migratoire défaillante ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
sort des petits commissariats vidés pour les jeux olympiques
M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Pierre-Antoine Levi. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Alors que la France s’apprête à accueillir les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, un événement d’une ampleur inégalée qui marquera l’histoire de notre pays, une question de sécurité cruciale se pose.
Avec la mobilisation exceptionnelle annoncée de 30 000 policiers et gendarmes chaque jour pour garantir la sécurité de cet événement, notamment à Paris et en Seine-Saint-Denis, on ne peut que se féliciter de l’ampleur des dispositifs prévus pour faire face aux diverses menaces, qu’elles soient terroristes ou d’ordre public. En témoigne le passage récent au niveau « urgence attentat ».
Cette mobilisation sans précédent, équivalant à une opération de sécurité que la France n’a jamais mise en place – selon vos dires, monsieur le ministre –, suscite néanmoins une préoccupation majeure pour les territoires en dehors de la capitale.
Le repositionnement stratégique des forces de l’ordre, incluant la fin de la distinction entre zones de police et de gendarmerie pour la durée des jeux, permettra certes une flexibilité opérationnelle accrue, mais pose la question de l’impact sur la sécurité des villes de province. Ces dernières, en fournissant une part significative de leurs effectifs à la capitale, pourraient se retrouver dans une situation de vulnérabilité face à des événements de criminalité, tels que des émeutes urbaines.
Dans ce contexte, quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de mettre en œuvre pour assurer que la sécurité des villes de province ne soit pas compromise par cette redistribution des forces de l’ordre ?
Comment garantir que la sécurité de l’ensemble du territoire reste une priorité, sans créer de déséquilibre préjudiciable à la tranquillité publique et à la réponse aux urgences locales ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe INDEP.
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer. Monsieur le sénateur Levi, les jeux Olympiques sont le plus grand événement sportif mondial que peut organiser un pays ; l’occasion ne se présente qu’une fois par siècle. Une cérémonie d’ouverture hors d’un stade, quant à elle, se présente une fois tous les 3 500 ans, simplement parce qu’elle n’a encore jamais été organisée : ni pour les jeux Olympiques d’été ni pour une Coupe du monde de football, qui est le deuxième plus grand événement sportif mondial.
C’est la raison pour laquelle le ministre de l’intérieur, depuis la présidence de François Hollande, est chargé de prévoir une organisation exceptionnelle des forces de l’ordre pour garantir la sécurité à Paris et en petite couronne, mais pas seulement. En effet, les jeux Olympiques, c’est aussi la Polynésie française, Châteauroux, Lille, Nantes, Marseille, Lyon et bien d’autres lieux encore.
Au-delà des fan zones, il faudra assurer la sécurité des grands festivals de musique, de l’arrivée du Tour de France, qui aura lieu à Nice cette année, des cérémonies du 14 juillet – notez que le défilé n’aura pas lieu sur l’avenue des Champs-Élysées – et, le même jour, de la finale du championnat d’Europe de football, en espérant que la France y participera.
M. Jean-François Husson. Nous espérons surtout qu’elle la remportera !
M. Gérald Darmanin, ministre. La question est de savoir comment nous organisons cette sécurité. Nous avons ainsi recréé des effectifs de police et de gendarmerie, grâce à votre aide. Nous avons ainsi inauguré onze unités de force mobile (UFM) et recruté 8 000 policiers et gendarmes supplémentaires.
Je voudrais remercier ici les fonctionnaires de police et de gendarmerie qui, entre mi-juin et fin août, ne pourront prendre que dix jours de congé. Entre mi-juillet et début août, nous refuserons même toute demande de congé. Ainsi, 100 % des forces de l’ordre seront mobilisées, soit 250 000 policiers et gendarmes. Le déploiement des agents à Paris et ailleurs sera justement assuré grâce au refus de congés.
Votre département disposera donc, zones de police et de gendarmerie confondues, d’autant d’effectifs pendant les jeux Olympiques que tous les autres jours de l’année. (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, pour la réplique.
M. Pierre-Antoine Levi. Monsieur le ministre, je vous remercie de cette réponse qui rassurera – je l’espère – les élus locaux inquiets à ce sujet.
La réussite des jeux Olympiques est très importante pour notre pays, mais leur préparation et leur encadrement ne doivent pas se faire au détriment de la sécurité de nos concitoyens sur l’ensemble du territoire. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
financement des associations d’aide aux migrants
M. le président. La parole est à Mme Marie-Carole Ciuntu, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marie-Carole Ciuntu. Monsieur le ministre de l’intérieur et des outre-mer, parmi les vingt associations les plus subventionnées par l’État au titre des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration » – 1,4 milliard d’euros par an –, Coallia occupe la première place, avec près de 150 millions d’euros perçus en 2022.
Or Coallia vient de faire l’objet d’un rapport édifiant de la Cour des comptes, lequel fait apparaître que cette association, confrontée à toujours plus de sollicitations de l’État pour répondre aux besoins en hébergement d’urgence, eux-mêmes sans cesse croissants en raison de la pression migratoire, est dans une situation très préoccupante.
En 2017, elle a frôlé le dépôt de bilan. Depuis lors, la Cour des comptes observe que Coallia ne maîtrise pas sa croissance due aux sollicitations grandissantes de l’État. Pis encore, l’association avoue ne plus savoir qui elle accueille dans ses centres et, plus précisément, dans quelles conditions : aucune procédure n’existe pour faire remonter d’éventuels événements graves.
La Cour des comptes en conclut qu’il est urgent pour l’État de se préoccuper de l’avenir de Coallia, laquelle doit mettre un terme aux réponses hétéroclites de court terme dont le coût ne semble pas lui poser question.
Monsieur le ministre, le rapport est accablant sur l’absence de contrôle de la part de l’État. Si le cas de Coallia est emblématique, il n’est pas isolé.
Quand comptez-vous exercer votre contrôle sur les différentes associations subventionnées à un niveau exceptionnellement élevé et intervenant dans le domaine de l’immigration ? N’est-il pas temps de mettre un terme à cette fuite en avant dans laquelle l’État, dépassé par une pression migratoire dont il a pourtant l’entière responsabilité, s’en remet par facilité à des associations ?
Celles-ci y répondent en effet tant bien que mal, voire de manière préoccupante, au coup par coup, dans l’indifférence évidente de leur donneur d’ordre et principal bailleur de fonds : l’État.
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer. Permettez-moi de répondre en lieu et place de Mme Sabrina Agresti-Roubache, absente aujourd’hui, qui a la charge, sous mon autorité, des moyens importants accordés par l’État, mais pas seulement, à des associations chargées de missions de service public pour le compte du ministère chargé du logement et du ministère de l’intérieur. Ce dernier est responsable des demandeurs d’asile, tandis que le premier gère les autres aspects de l’hébergement d’urgence.
Nous avons pris connaissance du rapport de la Cour des comptes et j’ai chargé Mme Agresti-Roubache de recevoir les dirigeants de Coallia à ce sujet. Je tiens à souligner que votre assemblée est pleinement informée de la situation : les rapporteurs de la loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration, Philippe Bonnecarrère et Muriel Jourda – cette dernière appartenant même à votre groupe politique – disposaient de ces informations lors du débat sur ladite loi comme lors de la préparation des rapports pour avis sur le projet de loi de finances pour 2024. Il en était de même du sénateur Meurant, qui était également membre de votre groupe politique.
L’État a donc transmis à plusieurs reprises toutes les informations pertinentes au Parlement, a alerté sur cette situation et a contribué aux travaux de la Cour des comptes, afin d’améliorer la structuration de cette association.
Coallia, comme d’autres associations, réalise un travail admirable pour l’accueil des demandeurs d’asile. C’est d’autant plus vrai que nous devons coopérer à la mise en œuvre du programme Agir – pour Accompagnement global et individualisé des réfugiés –, qui ne se limite pas à l’accueil et à l’hébergement, comme vous semblez trop facilement le suggérer, mais englobe également l’intégration, une mission que Coallia, comme d’autres, remplit très bien.
Nous allons donc aider cette grande association à mieux se structurer, à mettre en œuvre les recommandations de la Cour des comptes et, au besoin, adapter le conventionnement afin de tenir compte des observations du Parlement et des magistrats.
Je constate avec vous, madame la sénatrice, que la loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration offre justement la possibilité de reprendre en main, parfois directement, certains aspects de l’hébergement d’urgence.
L’une des difficultés réside dans la non-application de la circulaire du 12 décembre 2017 relative à l’examen des situations administratives dans l’hébergement d’urgence, dite Collomb-Denormandie, qui vise à distinguer, parmi les personnes hébergées dans ces centres, les demandeurs d’asile, les personnes faisant l’objet d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF), les bénéficiaires de l’asile et les SDF.
Vous n’êtes pas sans savoir qu’une grande confusion règne en raison de la méconnaissance des profils des personnes hébergées dans ces sites. C’est précisément ce que la loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration tend à modifier, et nous nous y attelons. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Carole Ciuntu, pour la réplique.
Mme Marie-Carole Ciuntu. Monsieur le ministre, vous posez une bonne question. À ce niveau de pression migratoire depuis des années, on ne peut faire qu’une chose pour y répondre : prendre appui sur le tissu associatif. Celui-ci peut réaliser, pour partie, un travail admirable, mais cela masque surtout le fait que rien n’est sous contrôle, contrairement à ce que vous indiquez. (M. le ministre le conteste.)
Dès lors, il ne faudra pas s’étonner – la Cour des comptes l’aura dit ! – si l’on entend encore parler de ces associations à propos d’événements tragiques dans notre pays ; la responsabilité en reviendra bien à l’État.
Vous tenez des propos très rassurants, alors que rien n’est sous contrôle. (Marques d’impatience sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
M. le président. Il faut conclure.
Mme Marie-Carole Ciuntu. N’oubliez pas que la Cour des comptes est en train d’auditer le millier d’associations agissant dans les domaines que vous avez évoqués. Nous y reviendrons donc. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
usine metex d’amiens
M. le président. La parole est à M. Rémi Cardon, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Rémi Cardon. Monsieur le ministre, j’étais lundi dernier aux côtés des ouvriers de l’usine MetEx à Amiens et je me pose une question depuis lors : quelle est votre vision de la souveraineté industrielle de notre pays ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’industrie et de l’énergie.
M. Roland Lescure, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie et de l’énergie. Monsieur le sénateur Rémi Cardon, vous étiez aux côtés des salariés de MetEx – dernière entreprise en Europe à fabriquer des acides aminés et de la lysine – en compagnie de certains élus qui me demandent depuis un an de nationaliser tout ce qui bouge. (Sourires sur les travées du groupe RDPI.)
Or ma vision de la souveraineté industrielle n’est pas de nationaliser toutes les industries, dont certaines sont en souffrance, mais bien de les appuyer, dans une logique de développement économique.
L’entreprise que vous évoquez a fait l’objet d’un certain nombre d’aides de l’État : un investissement de Bpifrance, un prêt garanti par l’État (PGE), une subvention dans le cadre de France 2030. On ne peut pas dire que l’État n’a pas été au rendez-vous !
Malgré cela, parce que cette entreprise paie le sucre trop cher, mais aussi pour des raisons de gestion, la performance économique que l’on est en droit d’attendre d’un tel établissement n’a pas été au rendez-vous.
Ses dirigeants ont mis en place la recherche d’un repreneur. Ils ont décidé la semaine dernière de se mettre sous la protection des procédures collectives pour accélérer ce processus. Sur ce dossier, comme sur tous les autres, monsieur le sénateur, je vais agir de la même manière : m’assurer que l’on dispose d’un repreneur solide, sur la base d’un plan d’affaires robuste.
Si tel est le cas, je suis prêt à l’accompagner, comme je l’ai fait pour Carelide, une entreprise de poches pour perfusion, ou pour Valdunes, deux entreprises que vos amis, ceux avec lesquels vous vous trouviez lundi, m’avaient demandé de nationaliser il y a quelques mois.
Nous cherchons des repreneurs de qualité permettant à l’industrie française de se projeter vers l’avant, non pas comme des entreprises nationalisées, ainsi que vos amis le souhaitent, mais comme des entreprises capables de conquérir le monde. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Rémi Cardon, pour la réplique.
M. Rémi Cardon. Monsieur le ministre, vous n’avez pas répondu à ma question, je me propose donc de vous présenter un exposé instructif.
Dans la Somme nous n’avons pas de pétrole, mais nous produisons de la lysine. Celle-ci, issue de l’usine MetEx implantée à Amiens, fait notre fierté.
MetEx est l’unique usine en Europe à fabriquer cet acide aminé, qui sert à la nutrition animale et entre dans la composition de certains médicaments tels que l’Aspégic et l’ibuprofène. En outre, ce produit est élaboré à partir de la richesse de nos sols, non pas du pétrole, mais de la betterave sucrière.
MetEx incarne le modèle typique d’industrie verte que nous nous devons de soutenir pour l’avenir.
Pourtant, cette entreprise est placée en redressement judiciaire depuis le 20 mars dernier, car elle est confrontée à la flambée du prix du sucre, à l’envolée du coût de l’énergie et au dumping de la Chine, laquelle a inondé l’Europe de son stock d’acides aminés, deux fois moins onéreux et cinq fois plus polluants.
Dans une ville comme Amiens, celle du Président de la République, qui porte encore les stigmates des fermetures de Whirlpool ou de Goodyear, cette situation n’est pas anodine : vous prônez la réindustrialisation du pays et la covid ainsi que les récentes pénuries nous ont rappelé la nécessité de produire nos médicaments en France.
Les 300 ouvriers de MetEx, plongés dans l’incertitude, attendent toujours les décisions qui permettraient la sauvegarde de l’usine, et votre réponse d’aujourd’hui n’apporte aucun éclairage sur ce point.
Monsieur le ministre, pour les ouvriers de MetEx, l’heure n’est plus aux promesses, mais aux actes forts et à l’union sacrée. Cette entreprise représente indéniablement un outil résilient et de souveraineté que l’État ne peut et ne doit pas abandonner. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K.)
dépollution des eaux en isère
M. le président. La parole est à M. Damien Michallet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Damien Michallet. Les « polluants éternels » : tel est le nom qu’il convient de donner à ce poison du siècle que sont les perfluorés, ou PFAS – pour substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées. Ces composés chimiques omniprésents dans la vie de nos concitoyens s’apprêtent à jouer le rôle principal dans le scandale sanitaire de demain.
Les PFAS sont partout, et dans mon département, l’Isère, comme chez mes voisins du Rhône, de la Loire et à de nombreux endroits en France, les alertes se multiplient sur la qualité des eaux de consommation. Les maires se trouvent démunis, ainsi que les services de l’État, je le crains.
Monsieur le ministre, la mise en place d’un plan d’action pour prévenir les rejets de PFAS, en bonne intelligence avec nos industriels, est une bonne chose, mais ce plan ne traite que le problème en amont, car pour l’aval, il est trop tard. Pour nos territoires, il n’est plus temps de se demander comment réduire ces polluants : il faut les détruire.
Tel est le paradoxe de cette affaire : dans les territoires, qui sont les responsables de la production et de la distribution d’eau ? Les communes, les syndicats et les intercommunalités !
Or qui devra financer des plans d’action pour réparer les dégâts, afin de respecter les futures normes européennes à l’horizon 2026 ? Les communes, les syndicats et les intercommunalités !
Plus grave encore, les budgets devant être à l’équilibre, qui paiera, in fine ? Les usagers, évidemment, c’est-à-dire les Français.
Pour la seule communauté d’agglomération de Vienne, en Isère, on évoque un coût initial de plus de 6 millions d’euros, auxquels s’ajouteront chaque année environ 1 million d’euros de frais de fonctionnement.
Pour les collectivités territoriales, vous n’avez qu’un seul mot d’ordre : payez !
Le Gouvernement ne saurait pourtant laisser ce sujet extrêmement complexe à leur seule charge. Monsieur le ministre, nos collectivités ont besoin d’aide. En espérant obtenir une réponse aussi limpide que l’eau que nous souhaitons dans nos territoires, quand et comment envisagez-vous de les accompagner ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de la mer et de la biodiversité.
M. Hervé Berville, secrétaire d’État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la mer et de la biodiversité. Monsieur le sénateur Michallet, je vous remercie de votre question, qui, parce qu’elle touche à la santé de nos concitoyens comme à la qualité des eaux, aborde un sujet essentiel.
Pour répondre très clairement, je tiens à affirmer que l’État, le Gouvernement, se tient aux côtés des collectivités et des communes pour traiter ce problème, aussi bien en amont qu’en aval.
En premier lieu, en anticipation des directives européennes qui nous imposent un certain nombre d’obligations à l’horizon de 2026, l’État, en collaboration avec les collectivités, à la demande de maires engagés sur le sujet, a fait le choix de mener un travail d’identification des sites les plus pollués.
Dès lors qu’un dépassement des seuils est constaté, nous sommes en mesure, en lien avec les préfectures et les agences régionales de santé (ARS), de mettre en œuvre des plans d’action, comme cela a été le cas dans un territoire du département du Rhône.
Nous apportons donc notre soutien aux collectivités afin qu’à chaque dépassement, nous puissions rétablir la situation et trouver des solutions, telles que la mise en œuvre du charbon actif.
En second lieu, nous avons lancé un plan d’action interministériel en janvier 2023 et nous allons poursuivre ce travail. Une campagne est ainsi en cours pour identifier 5 000 sites susceptibles d’être concernés par des rejets de ces polluants éternels. Dès que les résultats seront disponibles, nous les communiquerons en toute transparence, dès cet été, aux collectivités, aux communes et, bien entendu, au Sénat, afin d’être en mesure de déployer les financements nécessaires.
J’en viens à l’invitation que je souhaite vous adresser.
L’Assemblée nationale a examiné en commission une proposition de loi sur les polluants éternels. Se pose une question de financement : l’État doit accompagner les investissements nécessaires pour rétablir la situation en cas de pollution des points de captage.
M. le président. Il faut conclure.
M. Hervé Berville, secrétaire d’État. À cette fin, une redevance est sur la table, qui permettrait de les financer sur le long terme. Nous sommes ouverts à cette perspective et nous poursuivrons ce travail dans le cadre du cheminement législatif de ladite proposition de loi tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat.
Vous le constatez, nous sommes mobilisés sur les questions de financement et d’identification, en toute transparence avec vous. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
autoroute a69 et droits de l’homme
M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Vincent Louault applaudit également.)
M. Philippe Folliot. Monsieur le ministre de l’intérieur et des outre-mer, contrairement à ce que certains activistes tentent de faire croire, l’autoroute Castres-Toulouse n’est pas un projet, mais bel et bien une réalité : elle est déjà à moitié achevée.
Chaque jour, plus de 800 ouvriers, compagnons et ingénieurs travaillent d’arrache-pied pour la réalisation de cette artère vitale tant attendue par toutes les forces vives du sud du Tarn.
Les opposants, de moins en moins nombreux, venant de plus en plus loin et de plus en plus radicalisés, ont perdu tous les recours devant la justice administrative ; nombre d’entre eux ont été lourdement condamnés pour violences par la justice pénale. Ils essaient encore, au travers de sabotages et d’occupations illégales d’arbres, de faire diversion et de retarder le chantier.
Quelle n’a pas été notre surprise de voir l’ONU, par le biais d’un pseudo-expert rapporteur, prendre position sur le maintien de l’ordre autour de ce chantier légal, de cette réalisation démocratiquement décidée, inscrite dans la loi du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités.
Ses conclusions, totalement scandaleuses, uniquement à charge et élaborées sans que les défenseurs du projet, acteurs économiques, élus locaux et parlementaires, aient été auditionnés, nous interpellent. Alors que la France est l’un des principaux contributeurs des Nations unies et qu’elle est un État de droit, une démocratie, quelle est la position du Gouvernement sur ce rapport ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer. Monsieur le sénateur, je souscris pleinement à votre constat : l’autoroute reliant Castres à Toulouse a été décidée par les élus, indépendamment de leur appartenance politique – je tiens d’ailleurs à souligner que la présidente de la région Occitanie elle-même soutient ce projet – et confirmée par plusieurs gouvernements successifs.
Elle a fait l’objet d’innombrables recours devant la justice, qui ont tous approuvé sa réalisation. Des occupations illégales – concernant en particulier le site d’une ancienne ferme – et des tentatives d’occupation ont été menées, notamment par les mouvements Extinction Rebellion (XR) Toulouse, Soulèvements de la Terre ou encore Groupe national de surveillance des arbres (GNSA).
En outre, des violences d’une extrême gravité ont été perpétrées à l’encontre des forces de l’ordre, blessant neuf policiers et gendarmes.
Conformément à l’engagement que j’ai pris dès ma nomination au ministère de l’intérieur et des outre-mer, aucune zone à défendre (ZAD) ne sera plus tolérée sur le territoire national. Les opposants qui se sont installés illégalement ont donc été évacués, vingt et un activistes – un terme que je préfère à celui d’écureuils –…
M. André Reichardt. Très bien !
M. Gérald Darmanin, ministre. … ont été interpellés et font actuellement l’objet de poursuites judiciaires pour violences et outrage envers gendarmes et policiers.
Tous les recours déposés par ces activistes ont en outre été rejetés par la justice.
Il n’appartient pas à une instance internationale, dépourvue de compétence souveraine sur les décisions de la justice française telle qu’elle a été instituée par le peuple français dans sa Constitution et dans son organisation juridique, de remettre en cause le fait qu’aucune ZAD ne saurait plus s’installer sur le territoire national.
Lorsque des projets sont décidés par les élus et l’État, des recours sont naturellement possibles. Dès lors que ceux-ci sont rejetés, il convient d’appliquer les décisions de justice. Les policiers et les gendarmes le font, non pas parce qu’ils soutiendraient tel ou tel projet, mais parce que c’est leur devoir. (Mme Mathilde Ollivier proteste.)
Nous devrions plutôt entendre des condamnations d’une extrême fermeté à l’encontre de ceux qui s’en prennent aux policiers et aux gendarmes, qui sont aussi des pères et des mères de famille, blessés dans ces opérations d’évacuation d’occupation illégale. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Folliot, pour la réplique.
M. Philippe Folliot. Monsieur le ministre, il y a d’un côté les mots et de l’autre les actes. S’agissant des ZAD, il en existe une à Saïx et une deuxième est en train de se constituer.
M. Philippe Folliot. Il est donc important de joindre les actes aux paroles.
Par ailleurs, je déplore que vous n’ayez eu aucun mot pour le maire de Saïx, qui a été agressé, non plus que pour les maires des communes alentour, qui doivent faire face à des dégradations.
Monsieur le ministre, continuez à parler, c’est très bien, mais surtout agissez ! (Applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.
Notre prochaine séance de questions au Gouvernement aura lieu le mercredi 3 avril 2024, à quinze heures.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures trente.)
M. le président. La séance est reprise.
3
Mise au point au sujet de votes
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour une mise au point au sujet de votes.
M. Marc Laménie. Lors du scrutin n° 161 portant sur l’ensemble de la proposition de loi rendant obligatoires les « tests PME » et créant un dispositif « Impact Entreprises », M. Gilbert Bouchet, Mme Laurence Muller-Bronn, M. Damien Michallet et M. Alain Houpert souhaitaient voter pour.
M. le président. Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle figurera dans l’analyse politique du scrutin.
4
Attribution à une commission des prérogatives d’une commission d’enquête pour une mission d’information
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen de la demande de la commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport, tendant à obtenir du Sénat, en application de l’article 5 ter de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, qu’il lui confère, pour une durée de six mois, les prérogatives attribuées aux commissions d’enquête afin de mener une mission d’information relative à l’intervention des fonds d’investissement dans le football professionnel français.
Il a été donné connaissance de cette demande au Sénat lors des séances des 19 et 26 mars dernier.
Je mets aux voix la demande de la commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport.
(La demande de la commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport est adoptée.)
M. le président. En conséquence, la commission de la culture, de l’éducation, de la communication et du sport se voit conférer, pour une durée de six mois, les prérogatives attribuées aux commissions d’enquête pour mener cette mission d’information.
Le Gouvernement sera informé de la décision qui vient d’être prise par le Sénat.
5
Saisie et confiscation des avoirs criminels
Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, en procédure accélérée, de la proposition de loi améliorant l’efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels (proposition n° 169, texte de la commission n° 446, rapport n° 445).
Je rappelle que la discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi améliorant l’efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels
Article 1er
I. – Le livre Ier du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1°A (nouveau) Au deuxième alinéa de l’article 41-4, les mots : « au président de la chambre de l’instruction ou à la chambre de l’instruction » sont remplacés par les mots : « au premier président de la cour d’appel ou au conseiller désigné par lui » ;
1° L’article 41-5 est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) À la troisième phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article 41-5, les mots : « la chambre de l’instruction » sont remplacés par les mots : « le premier président de la cour d’appel ou le conseiller désigné par lui » ; ;
1° bis (nouveau) À la troisième phrase de l’article 41-6, les mots : « le président de la chambre de l’instruction ou la chambre de l’instruction » sont remplacés par les mots : « le premier président de la cour d’appel ou le conseiller désigné par lui » ;
1° ter (nouveau) L’article 99 est ainsi modifié :
a) Aux deuxième et dernier alinéas, les mots : « le président de la chambre de l’instruction ou la chambre de l’instruction » sont remplacés par les mots : « le premier président de la cour d’appel ou le conseiller désigné par lui » ;
b) Au cinquième alinéa, les mots : « au président de la chambre de l’instruction ou à la chambre de l’instruction » sont remplacés par les mots : « au premier président de la cour d’appel ou au conseiller désigné par lui » ;
1° quater (nouveau) Au quatrième alinéa de l’article 99-1, les mots : « soit au premier président de la cour d’appel du ressort ou à un magistrat de cette cour désigné par lui, soit, lorsqu’il s’agit d’une ordonnance du juge d’instruction, à la chambre de l’instruction » sont remplacés par les mots : « au premier président de la cour d’appel ou au conseiller désigné par lui » ;
2° L’article 99-2 est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :
– à la troisième phrase, les mots : « à la chambre de l’instruction » sont remplacés par les mots : « au premier président de la cour d’appel ou au conseiller désigné par lui » ;
– à l’avant-dernière phrase, les mots : « la chambre de l’instruction » sont remplacés par les mots : « le premier président de la cour d’appel ou le conseiller désigné par lui ».
I bis (nouveau). – L’article L. 2222-9 du code général de la propriété des personnes publiques est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les biens visés au premier alinéa n’ont pas été affectés à l’un des services mentionnés au même alinéa, ils peuvent être affectés, dans les mêmes conditions, à l’établissement public national à caractère administratif d’un parc naturel national défini à l’article L. 331-2 du code de l’environnement, au syndicat mixte d’aménagement et de gestion d’un parc naturel régional défini à l’article L. 333-3 du même code ou à des fondations ou des associations reconnues d’utilité publique. »
II. – (Non modifié) La perte de recettes pour l’État résultant du a des 1° et 2° du I du présent article est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
M. le président. L’amendement n° 37, présenté par Mme Schillinger, MM. Mohamed Soilihi, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili, Patient et Patriat, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) À la première phrase du troisième alinéa de l’article 41-5, après le mot : « gendarmerie, », sont insérés les mots : « aux services de l’administration pénitentiaire, aux établissements publics placés sous la tutelle du ministère de la justice » ;
II. – Après l’alinéa 12
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) À la première phrase du troisième alinéa de l’article 99-2, après le mot : « gendarmerie, », sont insérés les mots : « aux services de l’administration pénitentiaire, aux établissements publics placés sous la tutelle du ministère de la justice » ;
III. – Après l’alinéa 15
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…. – À l’article L. 2222-9 du code général de la propriété des personnes publiques, après le mot :« gendarmerie » sont insérés les mots : « , aux services de l’administration pénitentiaire, aux établissements publics placés sous la tutelle du ministère de la justice ».
La parole est à M. Bernard Buis.
M. Bernard Buis. Cet amendement tend à prévoir la possibilité pour les services de l’administration pénitentiaire de se voir affecter les biens meubles saisis.
La direction de l’administration pénitentiaire (DAP) souhaite en effet bénéficier du dispositif d’affectation des biens meubles saisis dans le cadre des enquêtes de police, notamment des drones qui sont utilisés pour effectuer des livraisons illicites en détention.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. C’est une excellente idée, mon cher collègue : avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Il s’agit en effet d’une excellente idée. Même avis.
M. le président. L’amendement n° 45, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 18
Remplacer les mots :
a des 1° et 2° du I
par la référence :
I bis
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.
(L’article 1er est adopté.)
Après l’article 1er
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 1 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel, M. Roux, Mme Girardin, MM. Laouedj et Masset et Mme M. Carrère.
L’amendement n° 6 rectifié ter est présenté par MM. Parigi, J.M. Arnaud, Bonneau, Cambier et Canévet, Mme Gatel, M. Henno, Mme Jacquemet, MM. Kern, Levi et Longeot et Mme Vermeillet.
L’amendement n° 31 rectifié ter est présenté par MM. Brossat et Bacchi, Mmes Cukierman et N. Goulet, M. Wattebled, Mme Gréaume et M. Bocquet.
L’amendement n° 32 rectifié est présenté par M. Durain, Mmes Carlotti, Conconne, Daniel et de La Gontrie, MM. Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 43 est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le cinquième alinéa de l’article 131-21 du code pénal est ainsi modifié :
1° Les mots : « porte également sur les », sont remplacés par les mots : « est obligatoire s’agissant des » ;
2° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer cette peine, en considération des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur. »
La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 1 rectifié.
Mme Nathalie Delattre. Aujourd’hui, notre arsenal pénal sanctionne le fait de ne pas pouvoir justifier de ressources correspondant à son train de vie ou de l’origine d’un bien détenu.
Ces dispositions sont, hélas ! très peu utilisées. Les études sur ce sujet montrent que les enquêteurs et les magistrats sont en effet trop souvent découragés par les difficultés qu’emporte l’enquête patrimoniale. Lorsque je faisais ce constat hier durant la discussion générale, monsieur le garde des sceaux, vous avez du reste manifesté votre accord.
Afin de remédier à cette situation, cet amendement vise à rendre obligatoire, sauf motivation contraire, la confiscation des biens meubles ou immeubles dont l’origine n’a pu être justifiée, en cas de délit ou de crime puni d’au moins cinq ans d’emprisonnement et ayant procuré un profit direct ou indirect à leur auteur.
M. le président. La parole est à M. Paul Toussaint Parigi, pour présenter l’amendement n° 6 rectifié ter.
M. Paul Toussaint Parigi. Aux arguments développés par ma collègue Nathalie Delattre, j’ajoute qu’au moment même où nous convenons tous que la confiscation des avoirs criminels demeure la matrice d’une lutte efficace, ces amendements visent à combler un vide juridique et à faciliter le travail de la justice. Celui-ci est essentiel à la mise en place d’un système qui sanctionne effectivement les montages financiers illicites et les organisations patrimoniales frauduleuses.
M. le président. La parole est à M. Ian Brossat, pour présenter l’amendement n° 31 rectifié ter.
M. Ian Brossat. J’abonderai dans le sens de mes collègues Delattre et Parigi. Cet amendement vise à instaurer l’automaticité des saisies et confiscations des biens dont les personnes condamnées à plus de cinq ans d’emprisonnement ne peuvent pas justifier l’origine.
En rendant automatique une disposition qui est aujourd’hui facultative, nous entendons la rendre plus efficace.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Roiron, pour présenter l’amendement n° 32 rectifié.
M. Pierre-Alain Roiron. Cet amendement vise à rendre automatique la confiscation des biens meubles ou immeubles dont l’origine n’a pas pu être justifiée en cas de délit ou de crime puni d’au moins cinq ans d’emprisonnement et ayant procuré un profit direct ou indirect à leur auteur.
Les auditions qui ont été menées par la commission d’enquête sur l’impact du narcotrafic en France et les mesures à prendre pour y remédier ont confirmé que la confiscation des avoirs criminels constituait un levier important.
Notre volonté de rendre cette confiscation obligatoire en cas de condamnation pénale est d’autant plus justifiée qu’un membre d’un réseau criminel condamné pour racket ou extorsion de fonds, propriétaire d’un commerce ou détenant des participations dans diverses sociétés acquis avec de l’argent sale et disposant d’autres biens, a aujourd’hui la possibilité de conserver tous ces biens et de continuer à en disposer.
Le présent amendement tend par ailleurs à modifier le cinquième alinéa de l’article 1er afin de combler un vide juridique en ce qui concerne la confiscation des biens meubles ou immeubles dans les cas où le condamné n’a pu en justifier l’origine.
Au demeurant, ce dispositif répond aux préconisations de l’article 5 de la directive 2014-42 du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 concernant le gel et la confiscation des instruments et des produits du crime dans l’Union européenne.
M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour présenter l’amendement n° 43.
Mme Mélanie Vogel. Cet amendement, identique aux précédents, vise à rendre automatique, sauf motivation contraire du juge, la confiscation des biens meubles ou immeubles lorsqu’une personne, condamnée pour un délit ou un crime à une peine supérieure ou égale à cinq ans d’emprisonnement, ne peut pas justifier l’origine des fonds qui lui ont permis de se procurer de tels biens. Une personne condamnée pour trafic de drogue ou blanchiment d’argent et possédant une maison devra ainsi prouver que celle-ci a été acquise légalement, avec des fonds traçables.
Comme l’ont indiqué plusieurs de mes collègues, une telle confiscation est aujourd’hui possible, mais les enquêtes patrimoniales étant très complexes, les juges procèdent rarement à ces confiscations. L’automaticité permettra de rendre ces enquêtes obligatoires, et partant, d’éviter que les biens continuent à fructifier et à alimenter trafics et blanchiment d’argent.
Actuellement, en dépit des condamnations, le patrimoine permet parfois une perpétuation des crimes. L’objet de cet amendement est d’éviter de telles situations.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il est aujourd’hui possible, en cas d’infraction punie de plus d’un an d’emprisonnement, de saisir tout ce qui est en lien avec l’infraction, c’est-à-dire l’instrument, l’objet et le produit de l’infraction. Le présent texte rend une telle confiscation obligatoire, ce qui contribue en quelque sorte à « remettre les compteurs à zéro ».
Par ailleurs, lorsque les infractions sont punies de plus de cinq ans d’emprisonnement – c’est le cas visé par ces amendements identiques –, il est possible de confisquer des biens saisis qui sont dépourvus de lien, du moins apparent, avec l’infraction, dès lors que l’auteur de l’infraction ne peut pas justifier du financement de leur acquisition.
Pour certaines infractions particulières, il est également possible de saisir jusqu’à la totalité du patrimoine, sans que les biens constituant celui-ci aient un lien avec l’infraction.
Il ne me paraît pas prudent d’aller au-delà de l’automaticité de la confiscation des biens en lien avec l’infraction qui est prévue par ce texte et qui n’a besoin au fond d’aucune motivation, car une telle confiscation contribue en quelque sorte à effacer l’infraction. En allant plus loin, nous prendrions le risque, mes chers collègues, de porter atteinte au droit de propriété, qui est un droit constitutionnel, dans la mesure où les éléments saisis et confisqués seraient sans lien avec l’infraction.
Je vous propose donc d’en rester à la rédaction actuelle, c’est-à-dire à la possibilité de confisquer des biens saisis sans lien avec l’infraction, sous réserve que cette confiscation, qui porte atteinte au droit de propriété, soit motivée. Je considère qu’en rendant la confiscation obligatoire, nous irions trop loin au regard du droit de propriété inscrit dans la Constitution.
L’avis est défavorable sur ces cinq amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Je suis également défavorable à ces cinq amendements identiques, pour les raisons qui ont été très clairement exposées par Mme le rapporteur.
Je me méfie, par principe, de l’automaticité. Je préfère en effet que le juge ait un droit de regard sur la situation qui lui est soumise. Au-delà de cette prudence principielle, j’estime que le dispositif proposé, dans la mesure où il pourrait porter atteinte au droit de propriété, serait inconstitutionnel.
Ce dispositif pose enfin un certain nombre de difficultés pratiques. Pour confisquer l’ensemble des biens dont l’origine n’est pas justifiée, encore faut-il en effet pouvoir identifier et trier ces derniers.
Autant de raisons qui font que, comme Mme le rapporteur, je suis défavorable à ces cinq amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1 rectifié, 6 rectifié ter, 31 rectifié ter, 32 rectifié et 43.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 36, présenté par Mme Schillinger, MM. Mohamed Soilihi, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili, Patient et Patriat, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch, Théophile et Bitz, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Les deuxième et troisième alinéas des articles 41-5 et 99-2 sont complétés par les mots : « , sauf si le bien a fait l’objet d’une décision de non restitution en application des articles 41-4, 177, 222 et 484 » ;
2° La deuxième phrase du dernier alinéa de l’article 177 et l’article 212 sont complétés par les mots : « , ou lorsque ces biens constituent l’instrument ou le produit direct ou indirect de l’infraction » ;
3° Les derniers alinéas des articles 373-1 et 484-1 sont ainsi modifiés :
a) Les mots : « ne confirment » sont remplacés par les mots : « n’ordonnent » ;
b) Sont ajoutés les mots : « , sauf si le bien a fait l’objet d’une décision de non restitution en application des articles 41-4, 177, 222 et 484 » ;
4° Le second alinéa de l’article 484 est complété par les mots : « , ou lorsque ces biens constituent l’instrument ou le produit direct ou indirect de l’infraction ».
La parole est à M. Bernard Buis.
M. Bernard Buis. Cet amendement tend à étendre et à harmoniser le dispositif de non-restitution des biens saisis. Il s’agit de renforcer la cohérence globale du dispositif et d’affirmer la portée générale de la règle selon laquelle les biens qui constituent l’instrument ou le produit de l’infraction ne sont pas restitués.
La rédaction proposée précise également que le procureur de la République, le juge d’instruction et la juridiction de jugement peuvent refuser la restitution d’un bien saisi constituant l’instrument ou le produit direct ou indirect de l’infraction en l’absence de condamnation pénale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. C’est une bonne idée, mon cher collègue. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 1er.
Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 2 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel, MM. Roux et Daubet, Mme Girardin, MM. Laouedj et Masset et Mme M. Carrère.
L’amendement n° 7 rectifié ter est présenté par MM. Parigi, Bonneau, Cambier, Canévet et Capo-Canellas, Mme Gatel, M. Henno, Mme Jacquemet, MM. Kern, Levi et Longeot et Mme Vermeillet.
L’amendement n° 11 rectifié est présenté par MM. Durain et P. Joly, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 22 est présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase du neuvième alinéa de l’article 706-160 du code de procédure pénale les mots : « peut mettre » sont remplacés par les mots : « met en priorité », les mots : « le cas échéant » sont supprimés et les mots : « , un bien immobilier » sont remplacés par les mots : « et sauf décision motivée de son conseil d’administration, les biens immobiliers ».
La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 2 rectifié.
Mme Nathalie Delattre. Le présent amendement vise à rendre prioritaire l’affectation publique et sociale des biens confisqués.
En Italie, où la confiscation est obligatoire – ce n’est pas un gros mot, mes chers collègues ! – depuis 1982, près de 40 000 biens immeubles ont été confisqués. Ce dispositif fonctionne si bien que, depuis 1996, la réutilisation publique et sociale des biens saisis ou confisqués est devenue systématique. L’exemple italien prouve qu’il est possible d’accroître rapidement le nombre de biens mal acquis affectés à des associations et à des collectivités.
Le présent amendement tend à encourager l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc) à faire de l’usage public ou social la priorité, et de la vente des biens confisqués une solution de repli.
L’Agrasc conserverait naturellement la possibilité de mettre aux enchères des biens pour lesquels l’usage public ou social n’est pas envisageable, ou pour lesquels aucune association ou collectivité ne s’est portée volontaire.
M. le président. La parole est à M. Paul Toussaint Parigi, pour présenter l’amendement n° 7 rectifié ter.
M. Paul Toussaint Parigi. Cet amendement s’inscrit dans la continuité logique du processus législatif engagé en 2021, avec la loi du 8 avril 2021 améliorant l’efficacité de la justice de proximité et de la réponse pénale. En outre, il tend à rapprocher nos procédures du modèle italien pour ce qui est de l’affectation sociale des biens confisqués.
L’adoption d’une telle disposition constituerait un symbole fort de reconquête face au délitement social qu’emportent les activités mafieuses.
M. le président. La parole est à M. Adel Ziane, pour présenter l’amendement n° 11 rectifié.
M. Adel Ziane. Dans la continuité des propos de mes collègues, j’ajouterai que notre amendement, qui vise à rendre prioritaire l’affectation publique et sociale des biens confisqués, nous a été inspiré par les travaux de l’association Crim’Halt.
L’État doit pouvoir démontrer aux citoyens que les fruits du crime organisé leur sont rendus, et que les crimes ne l’emportent pas sur la défense du bien commun.
Dans la continuité logique du processus législatif engagé en 2021, le présent amendement tend donc à encourager l’Agrasc à faire de l’usage public ou social la priorité, et de la vente des biens confisqués une solution de repli.
M. le président. La parole est à M. Ian Brossat, pour présenter l’amendement n° 22.
M. Ian Brossat. Cet amendement, identique aux précédents, vise à rendre prioritaire l’affectation publique et sociale des biens confisqués. Nous en sommes convaincus, l’État doit pouvoir démontrer aux citoyens que les fruits du crime organisé leur sont rendus, et que le crime organisé ne l’emporte pas sur la défense du bien commun.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Nous sommes d’accord sur un point, mes chers collègues : le crime organisé ne peut pas prendre le pas sur le bien commun. Je rappelle du reste, comme cela a été indiqué précédemment, que l’affectation sociale des biens saisis et confisqués est possible depuis 2021. Les membres de la commission des lois se souviennent sans doute du cas d’un bien immobilier confisqué à un marchand de sommeil qui a été remis à une association pour en faire des logements décents.
L’Agrasc, dont la mission est de gérer les biens saisis et confisqués, met en œuvre cette affectation sociale à la vitesse à laquelle elle le peut. Les choses avancent, mais ce n’est pas si simple, d’autant que la disposition ne date que de 2021.
Vous entendez, mes chers collègues, rendre obligatoire, pour l’Agrasc, le fait de rechercher systématiquement un affectataire social. Cela lui rendra la vie impossible !
Si nous sommes d’accord sur l’objectif, je vous propose de laisser l’Agence atteindre celui-ci avec les moyens dont elle dispose, sans rendre prioritaire l’affectation sociale. Les biens n’étant pas toujours en brillant état, il lui sera très difficile de leur trouver un affectataire social.
Ne compliquons pas la gestion conduite par l’Agrasc, qui est en cours d’amélioration, et accordons-lui suffisamment de temps pour se déployer.
L’avis est défavorable sur ces quatre amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Disons-le, parce que c’est une réalité et que nous pouvons en être fiers : sous l’impulsion de sa directrice Vanessa Perrée, l’Agrasc fonctionne parfaitement bien. Les chiffres que nous avons évoqués hier sont de ce point de vue édifiants.
Tout en comprenant le sens de ces amendements identiques, j’estime que le risque serait une embolisation de l’Agrasc. Celle-ci est en plein essor, doit gérer un patrimoine de délinquants de plus en plus important et a encore beaucoup à faire. De grâce, pour faire mieux, ne faisons pas pire !
Je souhaite attirer votre attention, mesdames, messieurs les sénateurs, comme Mme la rapporteure l’a fait avant moi, sur le risque d’embolisation et de complexification d’un organisme qui fonctionne fort bien.
Les réattributions sociales existent. Dans la commune de Coudekerque-Branche, ressort du tribunal judiciaire de Dunkerque, un immeuble qui appartenait à un marchand de sommeil a ainsi été affecté à des familles en difficulté.
Si j’entends donc le sens de ces amendements identiques, j’estime que le risque est de complexifier les procédures, et partant, d’entraver leur efficacité.
Telle est la raison pour laquelle je suis défavorable à ces quatre amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 2 rectifié, 7 rectifié ter, 11 rectifié et 22.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 24, présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au neuvième alinéa de l’article 706-160 du code de procédure pénale, les mots : « à l’article L. 365-2 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 365-2, L. 411-2 et L. 365-4 ».
La parole est à M. Ian Brossat.
M. Ian Brossat. Cet amendement vise à élargir la liste des organismes auprès desquels les biens ayant fait l’objet d’une décision de confiscation définitive par l’Agrasc peuvent être affectés à l’ensemble des organismes HLM, ainsi qu’aux organismes qui effectuent de l’intermédiation locative.
M. le président. L’amendement n° 25, présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase du neuvième alinéa de l’article 706-160 du code de procédure pénale, les mots : « à l’article L. 365-2 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 365-2 et L. 365-4 ».
La parole est à M. Ian Brossat.
M. Ian Brossat. Cet amendement de repli vise à faire évoluer la liste des organismes auprès desquels les biens ayant fait l’objet d’une décision de confiscation définitive par l’Agrasc peuvent être affectés, en y ajoutant uniquement les organismes qui effectuent de l’intermédiation locative.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Aujourd’hui, l’Agrasc peut faire bénéficier des biens confisqués les organismes exerçant des activités de maîtrise d’ouvrage et concourant aux objectifs de la politique d’aide au logement, ce qui me paraît relativement large.
Encore une fois, ces dispositions ne datent que de 2021. Laissons l’Agrasc avancer à son rythme, mes chers collègues ! Nous pourrons par la suite envisager, comme cela a été fait pour la loi du 9 juillet 2010 visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale, qui a été rectifiée, d’apporter des modifications à la loi de 2021. J’estime en effet que, sauf constatation d’un grave dysfonctionnement, ce qui n’est pas le cas, il faut laisser le temps à une législation de se mettre en place avant de la modifier dans les années qui suivent.
L’avis est donc défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 3 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel, M. Roux, Mme Girardin, MM. Laouedj et Masset et Mme M. Carrère.
L’amendement n° 8 rectifié ter est présenté par MM. Parigi, Bonneau, Cambier, Canévet et Capo-Canellas, Mme Gatel, M. Henno, Mme Jacquemet, MM. Kern, Levi et Longeot et Mme Vermeillet.
L’amendement n° 12 rectifié est présenté par MM. Durain et P. Joly, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 23 est présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La première phrase du neuvième alinéa de l’article 706-160 du code de procédure pénale est complétée par les mots : « ainsi que d’entreprises bénéficiant de l’agrément entreprise solidaire d’utilité sociale au sens de l’article L. 3332-17-1 du code du travail ».
La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 3 rectifié.
M. Henri Cabanel. Cet amendement a pour objet de permettre l’attribution par l’Agrasc des biens confisqués à des entreprises solidaires d’utilité sociale (Esus), pour des projets d’économie sociale et solidaire (ESS) et d’entreprenariat social.
Ces entreprises incarnent en effet des valeurs en opposition radicale avec les pratiques des individus dont les biens ont été confisqués. Leur objectif principal est d’utilité sociale, que ce soit en direction de publics ou de territoires vulnérables, en faveur de la préservation et du rétablissement de la cohésion sociale et territoriale, de l’éducation à la citoyenneté par l’éducation populaire, du développement durable et solidaire ou de la solidarité internationale.
Il paraît donc de bon sens d’ouvrir à ces entreprises l’accès aux biens confisqués. Cela contribuera à renforcer l’économie sociale et solidaire et l’entreprenariat social, tout en luttant contre le crime organisé.
M. le président. La parole est à M. Paul Toussaint Parigi, pour présenter l’amendement n° 8 rectifié ter.
M. Paul Toussaint Parigi. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Roiron, pour présenter l’amendement n° 12 rectifié.
M. Pierre-Alain Roiron. Défendu.
M. le président. La parole est à M. Ian Brossat, pour présenter l’amendement n° 23.
M. Ian Brossat. Défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. J’aurais presque envie de dire à mon tour « défendu », monsieur le président ! L’argumentation est en effet toujours la même : par ces amendements, vous proposez d’étendre la liste des affectataires sociaux des biens confisqués, mes chers collègues, quand j’estime qu’il faut laisser le temps aux dispositions votées en 2021 de se mettre en place, avant d’envisager d’éventuelles évolutions.
L’avis est donc logiquement défavorable sur ces quatre amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 3 rectifié, 8 rectifié ter, 12 rectifié et 23.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 5 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel, M. Roux, Mme Girardin, MM. Laouedj et Masset et Mme M. Carrère.
L’amendement n° 10 rectifié ter est présenté par MM. Parigi, J.M. Arnaud, Bonneau, Cambier et Canévet, Mme Gatel, M. Henno, Mme Jacquemet, MM. Kern, Levi et Longeot et Mme Vermeillet.
L’amendement n° 14 rectifié bis est présenté par MM. Durain et P. Joly, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 27 est présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la première phrase du neuvième alinéa de l’article 706-160 du code de procédure pénale, est insérée une phrase ainsi rédigée : « À compter de la réception de la décision de confiscation par l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués, le projet de contrat de mise à disposition doit être proposé dans un délai ne pouvant excéder trois ans. »
La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 5 rectifié.
Mme Nathalie Delattre. Cet amendement a pour objet d’allonger le délai dont dispose l’Agrasc pour mettre à disposition un bien confisqué.
En effet, l’une des difficultés rencontrées par cette agence est que le délai dont elle dispose pour mener la procédure d’affectation des biens confisqués ne peut excéder un an. Or l’Agrasc déplore que deux tiers des biens dont la gestion a été confiée à son département immobilier ne puissent plus faire l’objet d’une affectation sociale, car ils ont rejoint son portefeuille depuis plus d’un an.
Par cet amendement, je vous propose de remédier à ce dysfonctionnement, mes chers collègues.
M. le président. La parole est à M. Paul Toussaint Parigi, pour présenter l’amendement n° 10 rectifié ter.
M. Paul Toussaint Parigi. Cet amendement important vise à faire sauter le principal verrou à l’affectation sociale des biens confisqués.
Même si le présent texte prévoit d’accélérer les procédures et de rendre la décision de confiscation d’un bien immobilier constitutive d’un titre d’expulsion, j’estime qu’accorder davantage de temps à l’Agrasc n’a rien de prématuré.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Roiron, pour présenter l’amendement n° 14 rectifié bis.
M. Pierre-Alain Roiron. Le présent amendement vise à porter le délai susvisé d’un à trois ans.
M. le président. La parole est à M. Ian Brossat, pour présenter l’amendement n° 27.
M. Ian Brossat. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Pour le coup, je vous accorde qu’il convient de remédier à la difficulté que vous pointez, mes chers collègues. L’allongement du délai à trois ans étant toutefois de niveau réglementaire, je me tourne vers M. le garde des sceaux pour lui demander s’il est disposé à allonger ce délai.
En tout état de cause, je demande le retrait de ces quatre amendements identiques, qui, à mon sens, ne peuvent pas être adoptés. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Comme l’a indiqué Mme la rapporteure, ce délai est fixé par un décret qui prévoit que l’Agence dispose d’un an à compter de la réception de la décision de confiscation, ce délai étant porté à trois ans lorsque l’immeuble est occupé au moment de la confiscation. Cette disposition a été modifiée en août 2023.
Si l’Agrasc demande un allongement du délai au-delà de l’exception que je viens d’évoquer, je suis tout à fait disposé à travailler sur cette question afin, le cas échéant, d’envisager cette solution. Mon ministère est du reste en contact tout à fait régulier avec cette agence.
À ce stade, je suis donc défavorable à ces quatre amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 5 rectifié, 10 rectifié ter, 14 rectifié bis et 27.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 42, présenté par Mme Schillinger, MM. Mohamed Soilihi, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili, Patient et Patriat, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Rohfritsch, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au dernier alinéa de l’article 706-160 du code de procédure pénale, les mots : « ainsi qu’aux informations mentionnées à l’article L. 107 B du livre des procédures fiscales » sont remplacés par les mots : « , aux informations mentionnées à l’article L. 107 B du livre des procédures fiscales ainsi qu’aux informations contenues dans le fichier immobilier tenu par les services de la publicité foncière présentant la situation juridique actuelle des immeubles ».
La parole est à M. Bernard Buis.
M. Bernard Buis. Cet amendement vise à permettre à l’Agrasc d’accéder au fichier informatisé des données juridiques immobilières pour les besoins de sa mission de gestion des immeubles saisis et confisqués dans le cadre des procédures pénales.
Les informations rassemblées dans ce fichier étant essentielles pour l’exercice de cette mission par l’Agence, je vous invite à adopter cet amendement, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je crois qu’il s’agit en effet d’une lacune dans la liste des fichiers auxquels peuvent avoir accès les magistrats. L’avis est donc favorable.
En outre – et c’est une curiosité juridique –, les services d’enquête auraient également besoin de bénéficier de l’accès à ce fichier, mais cela relève du réglementaire. Je vous lance donc cet appel, monsieur le garde des sceaux : de la même façon que nous nous apprêtons à le faire pour les magistrats, nous pourrions ouvrir l’accès à ce fichier aux services d’enquête.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Même avis, monsieur le président. De plus, l’appel de Mme la rapporteure a été entendu.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 1er.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 26, présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 706-162 du code de procédure pénale est complétée par une phrase ainsi rédigée : « Ce conseil d’administration est composé de représentants du Parlement, des associations de victimes ainsi que des organisations dont l’un des objets est l’insertion ou le logement des personnes défavorisées ou la défense des personnes en situation d’exclusion. La composition des collèges est précisée par décret. »
La parole est à M. Ian Brossat.
M. Ian Brossat. Cet amendement vise à élargir le conseil d’administration de l’Agrasc en y incluant des représentants du Parlement, des associations de victimes et des organismes dont l’objet est l’insertion ou le logement des personnes défavorisées, ou encore la défense des personnes en situation d’expulsion. Il s’agit en effet d’améliorer les pratiques de mise à disposition des biens confisqués.
M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 4 rectifié est présenté par Mme N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Pantel, MM. Roux, Daubet et Fialaire, Mme Girardin, MM. Laouedj et Masset et Mme M. Carrère.
L’amendement n° 9 rectifié ter est présenté par MM. Parigi, J.M. Arnaud, Bonneau, Cambier et Canévet, Mme Gatel, M. Henno, Mme Jacquemet, MM. Kern, Levi et Longeot et Mme Vermeillet.
L’amendement n° 13 rectifié est présenté par MM. Durain et P. Joly, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 706-162 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Des représentants de la société civile, proposés par le Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées et la chambre française de l’économie sociale et solidaire, occupent au minimum deux postes au sein du conseil d’administration. »
La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 4 rectifié.
M. Henri Cabanel. L’objet de cette proposition de loi est notamment d’améliorer le fonctionnement de l’Agrasc. Dans cette perspective, la nomination de personnes issues de la société civile au sein du conseil d’administration de l’Agence pourrait contribuer à mieux orienter sa stratégie de mise à disposition des biens confisqués à des fins sociales.
Cet amendement vise à ce que ces personnes soient nommées sur proposition de la chambre française de l’économie sociale et solidaire et du Haut Comité pour le droit au logement (HCDL) – anciennement Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées (HCLPD). Ces nominations renforceraient la capacité d’action de l’Agence en faveur du monde de l’entrepreneuriat social et du logement pour les plus démunis.
M. le président. La parole est à M. Paul Toussaint Parigi, pour présenter l’amendement n° 9 rectifié ter.
M. Paul Toussaint Parigi. Il vient d’être très bien défendu.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Roiron, pour présenter l’amendement n° 13 rectifié.
M. Pierre-Alain Roiron. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je suis heureuse de constater que certains parlementaires ont encore du temps pour prendre en charge une nouvelle désignation dans les conseils d’administration…
Boutade mise à part, nous sommes là au cœur d’une mission régalienne, de sorte qu’il faut laisser en l’état le conseil d’administration, ou du moins l’organisme qui gère l’Agrasc, sans y introduire de représentants de la société civile, même si celle-ci pourra éventuellement bénéficier de biens confisqués. Pour l’instant, laissons ces sujets rester d’ordre régalien.
L’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Madame la rapporteure, merci infiniment de défendre les prérogatives du garde des sceaux en rappelant que ces sujets relèvent du régalien. J’y suis particulièrement sensible.
Sans autre commentaire, je suis défavorable à ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 4 rectifié, 9 rectifié ter et 13 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 1er bis AA (nouveau)
Le livre Ier du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° À la fin du deuxième alinéa de l’article 41-4, le mot : « est » est remplacé par les mots : « n’est pas » ;
2° À la dernière phrase du cinquième alinéa de l’article 41-5, le mot : « sont » est remplacé par les mots : « ne sont pas » ;
3° À la dernière phrase du cinquième alinéa de l’article 99, le mot : « est » est remplacé par les mots : « n’est pas » ;
4° Le quatrième alinéa de l’article 99-1 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Par dérogation, ce recours est suspensif. » ;
5° À la dernière phrase du cinquième alinéa de l’article 99-2, le mot : « sont » est remplacé par les mots : « ne sont pas ».
M. le président. L’amendement n° 44, présenté par Mme Schillinger, MM. Mohamed Soilihi, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili, Patient et Patriat, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Rohfritsch, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Buis.
M. Bernard Buis. Cet amendement vise à revenir sur le caractère suspensif du recours formé contre une décision de non-restitution ou de vente avant jugement.
En effet, la destruction comme la vente avant jugement d’un bien saisi dans le cadre d’une enquête pénale entraîne une privation du droit de propriété. Il faut donc prévoir que puisse être contestée devant une juridiction la privation du droit de propriété portant sur un bien saisi. Pour cela, il est essentiel qu’un tel recours présente à la fois un caractère contradictoire et suspensif ; sinon, nous craignons que le dispositif ne soit censuré par le Conseil constitutionnel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Je crains que, sur cet amendement, la belle unité que nous connaissions avec le Gouvernement ne se rompe.
De quoi parlons-nous ? Dès lors que la décision a été prise, en début de procédure, de saisir un bien, celui-ci peut être affecté, vendu ou détruit. Or cette décision peut faire l’objet d’un recours.
Nous avons voté en commission le caractère non suspensif de ce recours, ce qui signifie que l’appel de la décision ne peut pas faire obstacle à son exécution. Par conséquent, rien n’empêche en effet que, nonobstant le recours mis en œuvre, un bien soit détruit ou vendu.
Nous avons voté cette mesure, après avoir entendu en audition un certain nombre de personnes, dont des magistrats, qui nous en ont fait la demande. En effet, comme nous avons déjà eu l’occasion de le dire, il s’agit là du contentieux le plus important dans des litiges où l’enjeu pour les délinquants n’est pas tant d’éviter l’incarcération – ils s’y résignent – que de pouvoir conserver les biens qu’ils ont acquis grâce aux délits et aux crimes qu’ils ont commis.
Les recours freinent considérablement la procédure et nuisent aussi à la valorisation des biens confisqués. En effet, un véhicule immobilisé pendant les deux ans que dure la procédure de recours aura perdu toute sa valeur à la fin de celle-ci. Pour autant, la fin ne justifie pas les moyens et nous devons nous conformer à un certain nombre de principes, à commencer par les principes constitutionnels.
Je fais observer que pour un certain nombre de saisies, qu’il serait un peu trop long d’énumérer, le caractère non suspensif du recours existe déjà.
En outre, lorsqu’un bien est saisi, puis détruit ou vendu, dans le cas où il n’y aurait pas eu de recours, il est tout à fait possible que la procédure aboutisse à ce qu’il ne soit pas confisqué, de sorte qu’il devra être restitué à la personne à qui il a été saisi. Il le sera en valeur, et non pas en nature, s’il a été détruit ou vendu. Cette occurrence est parfaitement prévue dans les procédures.
Par conséquent, rien ne nous empêche à ce stade de prévoir que le recours ne sera pas suspensif d’exécution. D’ailleurs, quand l’exécution est immédiate, par exemple dans le cadre de la saisie d’un compte bancaire, dont la gestion est immédiatement transférée à l’Agrasc, les recours sont beaucoup plus rares. L’effet, immédiat, apparaît comme inéluctable aux délinquants et aux criminels, qui n’ont pas la volonté de s’y opposer.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Madame la rapporteure, nos chemins viennent de se séparer (Exclamations.), et sachez que je le regrette.
Pour moi, l’absence de recours suspensif contre une décision qui prive définitivement la personne de sa propriété heurte frontalement – pour le dire franchement – les exigences constitutionnelles en matière d’atteinte au droit de propriété et au droit à un procès équitable.
J’entends bien que, lorsqu’un véhicule saisi est détruit et que la procédure de recours aboutit, le propriétaire pourra toujours récupérer son bien en valeur, en fonction de l’argus. Mais dans le cas où le bien qui doit être détruit a une valeur particulière pour son propriétaire, il me semble que l’on pourrait laisser s’exercer le caractère suspensif du recours.
Je suis donc favorable à cet amendement et je vous invite tous à envisager l’opportunité de rendre le recours effectif. En effet, si le bien est détruit malgré le recours, à quoi sert celui-ci ? Quant aux exigences constitutionnelles, je sais qu’elles nous tiennent à cœur, à vous comme à moi.
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er bis AA.
(L’article 1er bis AA est adopté.)
Article 1er bis AB (nouveau)
Le livre Ier du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° La première phrase du deuxième alinéa de l’article 41-5 est complétée par les mots : « ou présenterait des frais conservatoires disproportionnés au regard de sa valeur économique, ou lorsque l’entretien du bien requiert une expertise particulière » ;
2° La première phrase du deuxième alinéa de l’article 99-2 est complétée par les mots : « ou présenterait des frais conservatoires disproportionnés au regard de sa valeur économique, ou lorsque l’entretien du bien requiert une expertise particulière » – (Adopté.)
Après l’article 1er bis AB
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 17 est présenté par M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 28 rectifié est présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 1er bis AB
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le livre IV du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° À la première phrase du second alinéa de l’article 706-148, après les mots : « bien saisi, », sont insérés les mots : « à la partie civile, » ;
2° À la première phrase du second alinéa de l’article 706-150, après les mots : « bien saisi, », sont insérés les mots : « à la partie civile, » ;
3° À la première phrase du second alinéa de l’article 706-153, après les mots : « droit saisi, », sont insérés les mots : « à la partie civile, » ;
4° Au deuxième alinéa de l’article 706-158, après les mots : « bien saisi, », sont insérés les mots : « à la partie civile, ».
La parole est à M. Pierre-Alain Roiron, pour présenter l’amendement n° 17.
M. Pierre-Alain Roiron. Outre son caractère dissuasif, la peine de confiscation a une visée réparatrice dès lors qu’elle permet de garantir que le crime ne paie pas et de réparer le préjudice des éventuelles victimes. Pourtant, le code de procédure pénale ne reconnaît aucun droit à la partie civile en matière de saisie spéciale. Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Ian Brossat, pour présenter l’amendement n° 28 rectifié.
M. Ian Brossat. Défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Ces amendements visent à notifier les saisies aux parties civiles.
Vous aurez compris qu’il y a deux façons de s’en prendre aux biens de la délinquance : on commence par les saisir, c’est-à-dire par les rendre indisponibles juridiquement, et l’on finit par les confisquer, c’est-à-dire par transférer leurs droits de propriété à l’État.
La saisie intervient au stade de l’enquête pour des motifs qu’il n’est pas forcément judicieux de communiquer à une partie civile, parce qu’ils relèvent du secret de l’enquête. Quant à la confiscation, elle porte sur des produits qui pourront servir éventuellement d’assiette à l’indemnisation des victimes.
Par conséquent, je suis favorable à la notification de la confiscation aux victimes – elle est déjà mise en œuvre et est parfaitement légitime. En revanche, il me paraît déraisonnable de notifier à la partie civile la saisie d’un bien, dont on ne sait d’ailleurs pas si elle aboutira à sa confiscation, de sorte qu’il ne servira à rien d’en être informé.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. J’ajouterai simplement que je ne vois pas l’intérêt pour une partie civile de contester la saisie d’un bien qui ne lui appartient pas. Je ne comprends pas le sens de cette hypothèse.
Pour les raisons que Mme la rapporteure a exposées, je suis défavorable à ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 17 et 28 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 1er bis A
(Non modifié)
Le premier alinéa de l’article 17 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ils réalisent les enquêtes patrimoniales aux fins d’identification des avoirs criminels. »
M. le président. L’amendement n° 18, présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
…. – Après le premier alinéa du même article 17 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d’État précise les modalités de réalisation de l’enquête patrimoniale et la mise en place de formation en matière d’identification et de saisie des avoirs criminels. »
…. – Le premier alinéa de l’article 14 du code de procédure pénale est complété par les mots : « ainsi que de réaliser les enquêtes patrimoniales aux fins d’identification des avoirs criminels ».
La parole est à M. Ian Brossat.
M. Ian Brossat. Cet amendement vise à systématiser la fiche patrimoniale, dans les missions de police judiciaire, afin de consolider une liste du patrimoine dès l’interpellation des prévenus.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. La rédaction de la commission des lois satisfait votre amendement.
En outre, celui-ci vise à prévoir un décret en Conseil d’État qui fixerait les modalités de réalisation des enquêtes patrimoniales, alors que cela relève du législatif.
Pour ces deux raisons, l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er bis A.
(L’article 1er bis A est adopté.)
Article 1er bis B
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Après le 2° du I de l’article 41-1-2, il est inséré un 3° ainsi rédigé :
« 3° Se dessaisir au profit de l’État de tout ou partie des biens saisis dans le cadre de la procédure. »
2° (nouveau) Après le 2° de l’article 41-1-3, il est inséré un 2° bis ainsi rédigé :
« 2° bis Se dessaisir au profit de l’État de tout ou partie des biens saisis dans le cadre de la procédure ; » – (Adopté.)
Article 1er bis C
I. – Après le dernier alinéa de l’article 131-21 du code pénal, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’elles portent sur des biens qui nécessitent, pour leur conservation ou leur valorisation, des actes d’administration, les décisions de confiscation sont notifiées par tout moyen à l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués mentionnée à l’article 706-159 du code de procédure pénale. »
II. – (Supprimé)
III (nouveau). – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Avant le dernier alinéa de l’article 41-5, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’elles portent sur des biens qui nécessitent, pour leur conservation ou leur valorisation, des actes d’administration, les décisions de saisie sont notifiées par tout moyen à l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués mentionnée à l’article 706-159. » ;
2° Avant le dernier alinéa de l’article 99-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’elles portent sur des biens qui nécessitent, pour leur conservation ou leur valorisation, des actes d’administration, les décisions de saisie sont notifiées par tout moyen à l’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués mentionnée à l’article 706-159. – (Adopté.)
Article 1er bis D
La première phrase du neuvième alinéa de l’article 706-160 du code de procédure pénale est ainsi modifiée :
1° Les mots : « ainsi que » sont remplacés par le signe : « , » ;
2° (Supprimé)
3° Sont ajoutés les mots : « , de collectivités territoriales ainsi que des services judiciaires ou des services de police, des unités de gendarmerie, de l’Office français de la biodiversité ou des services placés sous l’autorité du ministre chargé du budget qui effectuent des missions de police judiciaire » – (Adopté.)
Après l’article 1er bis D
M. le président. L’amendement n° 21, présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 1er bis D
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le huitième alinéa de l’article 706-160 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l’agence procède à la cession des biens immeubles, elle est proposée en priorité dans les conditions prévues à l’article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques, sous réserves de l’article 706-164 du présent code et du premier alinéa du XI de l’article 2 de la loi n° 2021-1031 du 4 août 2021 de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales. »
La parole est à M. Ian Brossat.
M. Ian Brossat. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Cet amendement a pour objet les ventes prioritaires et à perte des biens immeubles, saisis et confisqués, pour la réalisation de programmes de logements sociaux.
J’ai longuement insisté sur le fait qu’il fallait laisser l’Agrasc travailler comme elle le souhaitait. En outre, je ne suis pas certaine que l’État se satisferait d’une vente à perte.
Pour ces raisons, l’avis est défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 21.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 1er bis E
Après la première phrase du troisième alinéa de l’article 707-1 du code de procédure pénale, est insérée une phrase ainsi rédigée : « L’Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués est également compétente pour la gestion des biens non restitués en application de l’avant-dernier alinéa de l’article 41-4 et la mise en œuvre du dernier alinéa du même article. – (Adopté.)
Article 1er bis
(Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 19, présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le deuxième alinéa de l’article 706-161 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Plus particulièrement, elle mène des actions de formation régulière des magistrats et des services de police judiciaire. »
La parole est à M. Ian Brossat.
M. Ian Brossat. Cet amendement vise à rétablir une disposition adoptée à l’Assemblée nationale et supprimée en commission. Celle-ci a pour objet d’encourager la formation des magistrats et des services de police judiciaire sur la question des saisies et des confiscations des avoirs criminels.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Cette disposition prévoyait en particulier que l’Agrasc devait mener des actions de formation régulière des magistrats et des services de police judiciaire. Comme elle n’avait pas de portée normative, il n’est pas certain qu’elle ait sa place dans la loi. C’est pourquoi la commission l’a supprimée.
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Monsieur le sénateur Brossat, les magistrats sont sensibilisés au travail de l’Agrasc. Je souhaite moi-même qu’il y ait davantage de saisies.
Hier, Mme la rapporteure m’a suggéré une excellente idée, toute simple, pragmatique, voire « pratico-pratique », si j’ose dire, qui consiste à demander aux magistrats de bien vouloir ouvrir, dans leur dossier d’instruction, une cote « patrimoine », de même qu’ils ont une cote « personnalité » ou une cote « faits ».
Cette idée a beaucoup de sens, car l’on pourrait ainsi fixer par écrit des informations que l’on éviterait d’oublier. Je vais donc suggérer à mes services de diffuser cette bonne pratique pour laquelle il n’y a pas besoin de texte ni même de circulaire : il suffit de l’inscrire sur le site des bonnes pratiques.
Soyez donc rassurés, mesdames, messieurs les sénateurs, les magistrats sont sensibilisés au fonctionnement de l’Agrasc et à la nécessité de saisir et de confisquer des biens chaque fois que c’est possible, lorsque la culpabilité est avérée.
M. le président. L’article 1er bis demeure donc supprimé.
Article 1er ter
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° (nouveau) À la dernière phrase du deuxième alinéa de l’article 365-1, après le mot : « confiscation », sont insérés les mots : « en valeur » ;
2° À la première phrase de l’article 485-1, après le mot : « confiscation », sont insérés les mots : « en valeur » – (Adopté.)
Après l’article 1er ter
M. le président. L’amendement n° 20, présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 1er ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa de l’article 131-21 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’information du tiers disposant d’un droit de propriété sur le bien sur lequel repose la peine de confiscation. »
La parole est à M. Ian Brossat.
M. Ian Brossat. Défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 46, présenté par Mme M. Jourda, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’article 1er ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Après l’article 283, il est inséré un article 238-… ainsi rédigé :
« Art. 283-…. – Dès que la décision de mise en accusation est devenue définitive ou, en cas d’appel, dès que l’arrêt de désignation de la cour d’assises d’appel a été signifié, le président de la cour d’assises ou le conseiller désigné par lui est compétent pour exercer les missions dévolues respectivement au procureur de la République et au juge d’instruction par les quatre premiers alinéas des articles 41-5 et 99-2.
« Les décisions prises en application du présent article font l’objet d’une ordonnance motivée qui est notifiée par tout moyen au ministère public, aux parties intéressées et, s’ils sont connus, au propriétaire ainsi qu’aux tiers ayant des droits sur le bien. Cette ordonnance est susceptible, dans les dix jours qui suivent sa notification, d’un recours devant le président de la chambre criminelle de la Cour de cassation ou devant un magistrat de la même chambre désigné par lui. Ce délai et l’exercice du recours ne sont pas suspensifs. » ;
2° L’article 388-5 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque l’ordonnance de renvoi du juge d’instruction a été rendue ou lorsque le procureur de la République procède comme il est dit aux articles 390 à 390-2, 394, 397-1 et 397-1-1, le président du tribunal est compétent pour exercer les missions dévolues respectivement au procureur de la République et au juge d’instruction par les quatre premiers alinéas des articles 41-5 et 99-2.
« Les décisions prises en application du présent article font l’objet d’une ordonnance motivée qui est notifiée par tout moyen au ministère public, aux parties intéressées et, s’ils sont connus, au propriétaire ainsi qu’aux tiers ayant des droits sur le bien, qui peuvent la déférer au premier président de la cour d’appel ou au conseiller désigné par lui, sur simple requête déposée au greffe du tribunal, dans les dix jours qui suivent la notification. Ce délai et l’exercice du recours ne sont pas suspensifs. » ;
3° Après l’article 515-1, il est inséré un article 515-… ainsi rédigé :
« Art. 515-…. – Lorsqu’un appel est formé contre un jugement rendu en matière correctionnelle, le premier président de la cour d’appel est compétent pour exercer les missions dévolues au président du tribunal correctionnel par l’avant-dernier alinéa de l’article 388-5.
« Les décisions prises en application du présent article font l’objet d’une ordonnance motivée qui est notifiée par tout moyen au ministère public, aux parties intéressées et, s’ils sont connus, au propriétaire ainsi qu’aux tiers ayant des droits sur le bien. Cette ordonnance est susceptible, dans les dix jours qui suivent sa notification, d’un recours devant le président de la chambre criminelle de la Cour de cassation ou devant un magistrat de la même chambre désigné par lui. Ce délai et l’exercice du recours ne sont pas suspensifs. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Cet amendement vise à combler un vide qui existe encore aujourd’hui, et dont j’espère qu’il n’existera plus demain. En effet, comme vous l’avez compris, la saisie des biens intervient au stade de l’enquête, tout comme la décision de leur affectation. Toutefois, dès lors que la juridiction de jugement est saisie, il n’existe plus de procédure qui puisse permettre, par exemple, de vendre un bien dont il serait justifié de se dessaisir.
C’est pourquoi je vous propose, par cet amendement – monsieur le garde des sceaux, attendez votre tour, car je vous vois faire des gestes cabalistiques ! (M. le garde des sceaux proteste.) –, de mettre en place des procédures intervenant au niveau du tribunal correctionnel, de la cour d’assises en matière criminelle et de la juridiction de jugement en cas d’appel en matière correctionnelle comme criminelle.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Madame la rapporteure, vous avez pris de mauvaises habitudes : ce n’est pas parce que je me suis rallié par deux fois à l’avis de la commission que je suis dans une sorte de garde-à-vous et que je ne peux pas manifester mon scepticisme – non pas ma réprobation, mais mon scepticisme, j’y insiste –, et je vous dirai dans une seconde quelle en est la raison.
Je préfère le maintien de la compétence du Parquet ou du juge des libertés et de la détention (JLD), car elle est plus simple en pratique s’agissant de l’exercice d’une compétence qui n’est subordonnée à aucune demande du propriétaire. En effet, il est illusoire d’envisager qu’un président de cour d’assises se penchera sur un dossier, en amont de l’audience, pour prendre l’initiative sur une décision d’affectation ou de vente des biens meubles saisis dans le cadre de l’information judiciaire. Et je ne suis sans doute pas le seul à être sceptique.
Par ailleurs, l’absence de recours suspensif contre une telle décision, qui prive définitivement la personne de sa propriété, heurterait frontalement les exigences constitutionnelles en matière d’atteinte au droit de propriété et au droit à un procès équitable. Je l’ai déjà dit précédemment, mais je n’ai pas été convaincant – sans doute n’ai-je pas trouvé les bons mots. Toutefois, je persiste à vous dire que je suis, bien évidemment, défavorable à cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 1er ter.
Article 2
(Non modifié)
L’article 706-164 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Après le mot : « confiscation », sont insérés les mots : « ou la non-restitution » ;
b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Dans les mêmes conditions, l’indemnisation ou la réparation peut être payée par prélèvement sur les fonds ou sur la valeur liquidative des biens de son débiteur qui sont devenus la propriété de l’État en application du dernier alinéa de l’article 41-4 et dont l’agence est dépositaire en application des articles 706-160 ou 707-1. » ;
2° Au deuxième alinéa, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « six » – (Adopté.)
Après l’article 2
M. le président. L’amendement n° 41, présenté par Mme Schillinger, MM. Mohamed Soilihi, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili, Patient et Patriat, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Rohfritsch, Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code pénal est ainsi modifié :
1° Après l’article 432-17, il est inséré un article 432-17-… ainsi rédigé :
« Art. 432-17-…. – Dans les cas prévus à l’article 432-11, peut également être prononcée la confiscation de tout ou partie des biens du condamné ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition, quelle qu’en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. » ;
2° Après l’article 433-22, il est inséré un article 433-22-… ainsi rédigé :
« Art. 433-22-…. – Dans les cas prévus à l’article 433-1, peut également être prononcée la confiscation de tout ou partie des biens du condamné ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition, quelle qu’en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. » ;
3° Après l’article 435-15, il est inséré un article 435-… ainsi rédigé :
« Art. 435-…. – Dans les cas prévus aux articles 435-1, 435-3, 435-7 et 435-9, peut également être prononcée la confiscation de tout ou partie des biens du condamné ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont il a la libre disposition, quelle qu’en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis.
La parole est à M. Bernard Buis.
M. Bernard Buis. Le présent amendement vise à étendre le champ d’application de la peine complémentaire de confiscation générale du patrimoine aux infractions de corruption et trafic d’influence. Cela permettra de renforcer l’efficacité de notre arsenal pénal en la matière, tout en maintenant les équilibres fondamentaux de notre droit, qui suppose qu’une telle peine soit justifiée, adaptée et proportionnée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. J’avoue que je me suis interrogée sur cet amendement puisque les infractions citées sont déjà sévèrement punies par une très forte amende, pouvant aller jusqu’à 2 millions d’euros. Nous pouvions ainsi considérer que la punition financière était déjà acquise. Néanmoins, n’étant pas parvenue à lever le doute, je laisse l’hémicycle le faire et je m’en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Cet amendement vise à permettre le prononcé d’une peine complémentaire de confiscation générale du patrimoine dans le cas des infractions de corruption et de trafic d’influence les plus graves.
Je pense que cette mesure est utile et opportune, et j’y suis donc favorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 2.
L’amendement n° 40, présenté par Mme Schillinger, MM. Mohamed Soilihi, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili, Patient et Patriat, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Au deuxième alinéa de l’article 373-1, les mots : « dont elle ordonne la saisie » sont supprimés ;
2° Au deuxième alinéa de l’article 484-1, les mots : « dont il ordonne la saisie » sont supprimés.
M. le président. La parole est à M. Bernard Buis.
M. Bernard Buis. Cet amendement vise à élargir la possibilité pour la juridiction de jugement d’ordonner la remise à l’Agrasc de biens confisqués aux fins de vente, en la prévoyant y compris en cas d’appel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Quelle bonne idée ! Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 2.
L’amendement n° 39, présenté par Mme Schillinger, MM. Mohamed Soilihi, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili, Patient et Patriat, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa de l’article 706-144, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la juridiction de jugement est saisie, le magistrat ayant ordonné la saisie demeure compétent pour statuer sur l’ensemble des requêtes relatives à l’exécution de la saisie du bien. Toutefois, si elle a été ordonnée par le juge d’instruction, le juge des libertés et de la détention est compétent pour statuer sur de telles requêtes. » ;
2° La dernière phrase du premier alinéa de l’article 706-154 est complétée par les mots : « , y compris si la juridiction de jugement est saisie ».
M. le président. La parole est à M. Bernard Buis.
M. Bernard Buis. L’amendement prévoit que le juge des libertés et de la détention est compétent pour l’ensemble des décisions portant sur le sort des biens saisis, à compter de la saisine de la juridiction de jugement et tant qu’elle n’a pas statué au fond. Il s’agit de clarifier les règles de compétence applicables au contentieux des saisies à ce stade de la procédure.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Par cet amendement, vous revenez presque directement sur ce que nous avons voté précédemment et qui avait si fort fâché M. le garde des sceaux, c’est-à-dire la façon dont les biens seront gérés entre la fin de l’enquête, l’instruction et l’audience de jugement.
Il me paraît difficile de voter deux amendements qui sont si peu compatibles. La commission a donc émis, sur ma demande, un avis défavorable sur celui-ci.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Il s’agit, par cet amendement, de prévoir que le juge des libertés et de la détention, ou le procureur, est compétent pour statuer sur le sort des biens saisis après la saisine de la juridiction.
Le Gouvernement y est favorable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 39.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 2 bis (nouveau)
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° L’article 706-148 est ainsi modifié :
a) Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa, lorsqu’il existe des raisons plausibles de soupçonner que la disparition d’un bien est imminente, l’officier de police judiciaire peut être autorisé, par tout moyen, par le procureur de la République ou par le juge d’instruction à procéder, aux frais avancés du Trésor, à la saisie des biens visés au même alinéa. Le juge des libertés et de la détention, saisi par le procureur de la République, ou le juge d’instruction, se prononce par ordonnance motivée sur le maintien ou la mainlevée de la saisie dans un délai de dix jours à compter de sa réalisation. Cette ordonnance est notifiée. » ;
b) Au début du deuxième alinéa, les mots : « La décision prise en application du premier alinéa » sont remplacés par les mots : « Les décisions prises en application des premier et deuxième alinéas » ;
2° Aux premier et dernier alinéas de l’article 706-154, après les mots : « de dépôts », sont insérés les mots : « , de paiement ». (Adopté)
Article 3
Le code pénal est ainsi modifié :
1° L’article 131-21 est ainsi modifié :
a) À la première phrase des deuxième et troisième alinéas et aux sixième et huitième alinéas, les mots : « du dernier » sont remplacés par les mots : « de l’avant-dernier » ;
b) Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Sous les mêmes réserves et sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, la confiscation des biens ayant été saisis au cours de la procédure est obligatoire lorsqu’ils ont servi à commettre l’infraction, lorsqu’ils étaient destinés à la commettre ou lorsqu’ils sont l’objet ou le produit direct ou indirect de l’infraction. Cette confiscation n’a pas à être motivée. Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer la confiscation de tout ou partie des biens visés au présent alinéa, en considération des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur. » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« La décision définitive de confiscation d’un bien immobilier constitue un titre d’expulsion à l’encontre de la personne condamnée et de tout occupant de son chef, à l’exception de l’occupant titulaire d’une convention d’occupation à titre onéreux portant sur tout ou partie du bien confisqué, dès lors que cette convention a été conclue à des fins d’habitation antérieurement à la décision de saisie et qu’elle a été régulièrement exécutée par les deux parties. » ;
2° À l’article 225-25, au 4° de l’article 313-7 et au 8° de l’article 324-7, les mots : « du dernier » sont remplacés par les mots : « de l’avant-dernier ».
M. le président. L’amendement n° 38, présenté par Mme Schillinger, MM. Mohamed Soilihi, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne et Lévrier, Mme Nadille, MM. Omar Oili, Patient et Patriat, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Supprimer les mots :
à titre onéreux
et les mots :
à des fins d’habitation
M. le président. La parole est à M. Bernard Buis.
M. Bernard Buis. Cet amendement vise à redéfinir la portée de la notion de « tout occupant de son chef » en supprimant la distinction opérée entre les titulaires d’un bail d’habitation et, par exemple, les titulaires d’un bail commercial. En effet, celle-ci ne nous paraît pas justifiée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Expliquons-nous sur cet amendement : jusqu’à aujourd’hui, lorsque la confiscation d’un bien immobilier a été prononcée, il convenait pour l’Agrasc d’obtenir un titre d’expulsion pour pouvoir faire partir les occupants. Le texte qui nous a été proposé et sur lequel nous nous sommes mis d’accord en commission prévoit que, désormais, l’acte de confiscation vaut titre d’expulsion de la personne condamnée et de tout occupant de son chef.
Il semble donc que nous soyons en désaccord sur l’interprétation de cette notion de « tout occupant de son chef », celle-ci désignant initialement celui qui tient des droits de la personne condamnée pour occuper le logement, et pas seulement les proches qui occupaient le logement avec cette personne, ou bien d’autres personnes qui s’y trouveraient sans droit ni titre particulier.
À partir de là, nous nous sommes demandé s’il était légitime, quand un bien était confisqué, qu’une personne totalement étrangère à l’infraction soit expulsée. La commission a envisagé le cas, notamment, d’un locataire qui aurait bénéficié d’un bail avant même la saisie et qui ignorerait tout du financement frauduleux de l’immeuble dans lequel il se trouverait : ce locataire doit-il être expulsé, et quel sens cela aurait-il dès lors qu’il est totalement étranger à la commission de l’infraction et qu’il en ignore tout ?
Nous avons estimé, en nous appuyant sur une jurisprudence de la Cour de cassation, que la notion de « tout occupant de son chef » concernait également les titulaires de baux et qu’il fallait protéger ceux qui étaient de bonne foi. C’est pourquoi, en commission, nous avons fait admettre que l’expulsion ne devait pas viser les titulaires de baux avant la saisie.
L’avis est donc défavorable sur cet amendement, qui est contraire à ce qui a été voté en commission.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Les auteurs de l’amendement précisent que la décision de confiscation d’un immeuble ne vaut pas titre d’expulsion à l’égard de tous les titulaires d’un bail. J’ai cru comprendre que vous étiez d’accord avec cela, madame la rapporteure…
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Cela n’a pas grand sens.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Mme Michu loue un appartement dont le propriétaire a commis des actes de délinquance, de sorte que la juridiction de jugement a décidé de confisquer le bien. Faut-il expulser Mme Michu qui occupe de bonne foi cet appartement avec un bail ? Ce serait, me semble-t-il, injuste.
C’est la raison pour laquelle je suis favorable à cet amendement. Madame la rapporteure, j’avais cru comprendre – mais peut-être n’ai-je pas été assez attentif – que vous étiez sur la même ligne que le Gouvernement…
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Oui, monsieur le garde des sceaux, nous sommes sur la même ligne. Mais l’amendement qui est présenté n’exclut pas les baux commerciaux, que nous avons expressément souhaité exclure.
En effet, il arrive que le blanchiment d’argent se fasse au travers d’une activité commerciale. Ne voulant pas que cette activité commerciale puisse perdurer, nous nous sommes contentés d’inclure les baux d’habitation et pas les autres types de baux, notamment commerciaux. Voilà ce qui nous sépare. Même si j’admets que c’est peu, cela reste important.
M. le président. Je mets aux voix l’article 3.
(L’article 3 est adopté.)
Article 4
(Non modifié)
Au premier alinéa du XI de l’article 2 de la loi n° 2021-1031 du 4 août 2021 de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales, les mots : « cession des biens confisqués aux » sont remplacés par les mots : « confiscation des biens des ».
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 15 est présenté par M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 29 rectifié est présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° 33 est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le premier alinéa du XI de l’article 2 de la loi n° 2021-1031 du 4 août 2021 de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales est ainsi modifié :
1° Après la référence : « 314-1 » est inséré la référence : « 321-6 » ;
2° Après les mots : « 435-10 du code pénal » sont insérés les mots : « et aux articles L. 241-3, L 242-6, L. 244-1 et L. 244-5 du code de commerce ».
La parole est à M. Pierre-Alain Roiron, pour présenter l’amendement n° 15.
M. Pierre-Alain Roiron. Cet amendement concerne le mécanisme de restitution des biens mal acquis, adopté de manière transpartisane dans le cadre de la loi du 4 août 2021 de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales, qui souffre de plusieurs lacunes purement techniques et pourrait donc être amélioré.
En effet, ce dispositif ne permet pas de restituer des biens mal acquis confisqués à la suite de condamnation pour abus de bien social et de non-justification de ressources. La proposition de loi que nous examinons est le véhicule juridique idéal pour corriger ces lacunes en renforçant et en améliorant la lisibilité de ce mécanisme.
M. le président. La parole est à M. Ian Brossat, pour présenter l’amendement n° 29 rectifié.
M. Ian Brossat. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour présenter l’amendement n° 33.
Mme Mélanie Vogel. Il est également défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Nous n’avons pas compris le sens de ces amendements identiques. Je rappelle que la notion de biens mal acquis désigne des avoirs ou des biens ayant été détournés du budget d’une organisation internationale, d’un État ou d’une entreprise publique pour une personnalité politiquement exposée et placés à l’étranger à des fins personnelles. En bref, elle s’applique à un gouvernant qui détourne des biens qui devraient revenir à sa population et s’achète quelque chose à l’étranger, en l’occurrence en France.
Les biens mal acquis ne constituant pas une infraction à proprement parler, plusieurs infractions support, si je puis dire, sont citées dans la loi du 4 août 2021 pour couvrir ce procédé : abus de confiance, corruption passive, trafic d’influence, prise illégale d’intérêts, favoritisme, détournement de fonds, corruption active, soustraction et détournement de biens publics.
Toutes ces infractions sont des moyens de détourner de l’argent pour mal acquérir des biens. Vous proposez d’y ajouter l’abus de bien social et la non-justification de ressources.
L’infraction d’abus de bien social désigne un détournement de fonds au sein d’une société commerciale. C’est hors sujet : cela n’a rien à voir avec un gouvernant qui détourne les biens de sa population !
De même, la non-justification de ressources, si elle peut être un symptôme lorsqu’une personne se retrouve avec un patrimoine très important sans disposer de ressources particulières, ne saurait constituer une infraction support de la mauvaise acquisition de biens.
Aussi, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 15, 29 rectifié et 33.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 16 est présenté par M. Durain, Mme de La Gontrie, MM. Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
L’amendement n° 30 rectifié est présenté par M. Brossat, Mme Cukierman et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° 34 est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Au premier alinéa du XI de l’article 2 de la loi n° 2021-1031 du 4 août 2021 de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales, après les mots : « dans l’exercice de ses fonctions » sont insérés les mots : « ou par une personne politiquement exposée telle que définie à l’article R. 561-18 du code monétaire et financier ».
La parole est à M. Pierre-Alain Roiron, pour présenter l’amendement n° 16.
M. Pierre-Alain Roiron. Cet amendement vise tout simplement à étendre le champ d’application du dispositif à l’entourage familial des agents publics étrangers, comme le demande Transparency International France.
M. le président. La parole est à M. Ian Brossat, pour présenter l’amendement n° 30 rectifié.
M. Ian Brossat. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour présenter l’amendement n° 34.
Mme Mélanie Vogel. Il est également défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Nous comprenons bien le sens de ces amendements identiques, qui visent les proches des personnes ayant commis les infractions que nous venons de citer. Toutefois, la manière dont ils sont rédigés nous semble poser problème. Qu’en pense le Gouvernement ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Cet amendement vise à étendre le mécanisme de restitution des biens mal acquis aux infractions commises par les personnes politiquement exposées, et non plus seulement par celles qui exercent des fonctions publiques dans l’État concerné.
Je rappelle que le mécanisme de restitution des biens mal acquis, créé par la loi du 4 août 2021, permet de restituer aux populations des biens confisqués par les dirigeants étrangers ayant accaparé à leur profit les richesses de leur pays. Actuellement, le dispositif est applicable aux infractions commises par « une personne dépositaire de l’autorité publique d’un État étranger, chargée d’un mandat électif public dans un État étranger ou d’une mission de service public d’un État étranger, dans l’exercice de ses fonctions ».
Nous ne jugeons pas opportun de compléter cette liste de personnes par celles qui sont politiquement exposées. D’une part, les dirigeants et décideurs publics sont déjà compris dans la liste précitée ; d’autre part, les biens qui seraient confisqués à l’entourage de ces personnes peuvent d’ores et déjà faire l’objet d’une restitution lorsqu’il s’agit du produit de l’infraction commise par les dirigeants.
Enfin, le texte doit naturellement être d’interprétation stricte, ce que ne permet pas cette expression de « personne politiquement exposée ».
Aussi, le Gouvernement demande le retrait de ces amendements identiques ; à défaut, il émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est donc l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Monsieur Roiron, l’amendement n° 16 est-il maintenu ?
M. Pierre-Alain Roiron. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 16 est retiré.
Monsieur Brossat, l’amendement n° 30 rectifié est-il maintenu ?
M. Ian Brossat. Oui, monsieur le président.
M. le président. Madame Vogel, l’amendement n° 34 est-il maintenu ?
Mme Mélanie Vogel. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 30 rectifié et 34.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi améliorant l’efficacité des dispositifs de saisie et de confiscation des avoirs criminels.
(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures trente-cinq, est reprise à dix-sept heures quarante.)
M. le président. La séance est reprise.
6
Rénovation de l’habitat dégradé
Adoption définitive des conclusions modifiées d’une commission mixte paritaire sur un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement (texte de la commission n° 429, rapport n° 428).
La parole est à Mme Amel Gacquerre, rapporteure pour le Sénat de la commission mixte paritaire.
Mme Amel Gacquerre, rapporteure pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, nous arrivons au terme de la procédure d’examen parlementaire du projet de loi relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement, et j’ai plaisir à constater le chemin accompli. Nous avons travaillé dans un esprit pragmatique sur ce projet de loi, que nous avions adopté à l’unanimité lors de sa lecture au Sénat.
Avant d’aborder le fond de ce texte, permettez-moi de rappeler le contexte dans lequel ce projet de loi s’inscrit : à l’heure actuelle, 4 millions de personnes souffrent du mal-logement en France. Or l’accès au logement doit être considéré comme une priorité nationale, car il est au cœur de l’insertion sociale et économique de nos concitoyens. Sans logement, point de vie dans nos villes et dans nos villages !
Je souhaite saluer l’esprit de coconstruction qui a présidé aux travaux de la commission mixte paritaire et qui nous a permis d’aboutir à un texte conservant la plus grande partie des dispositifs introduits par le Sénat.
Nous souhaitions renforcer les outils à disposition des maires pour traiter les petites copropriétés dégradées. Tous les dispositifs que nous avions introduits ont été maintenus, notamment la possibilité d’inclure les monopropriétés dans les opérations de requalification des copropriétés dégradées (Orcod), ou celle d’utiliser les concessions d’aménagement pour des opérations de réhabilitation ponctuelle, sur un immeuble ou un îlot.
De même, l’extension aux copropriétés dégradées du dispositif « Denormandie dans l’ancien » et l’extension des missions de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) pour assister les communes ne disposant pas de services suffisants pour faire face aux enjeux de l’habitat dégradé ont été conservées.
Sont également maintenues les dispenses d’autorisation d’urbanisme pour les constructions temporaires destinées à reloger les habitants lors d’opérations de réhabilitation. La durée de ces dispenses sera adaptée à celle de l’opération. Le maire en fixera la date de fin et elles pourront être renouvelées en fonction du besoin. Il s’agit d’un pas en avant très important pour accélérer la résorption de l’habitat dégradé, les questions de relogement étant, nous le savons, un obstacle parfois insurmontable pour nos élus.
En ce qui concerne le permis de louer, les communes pourront désormais bénéficier du produit des amendes – c’est une bonne chose.
Pour lutter contre les divisions sauvages d’appartements ou de pavillons par des marchands de sommeil, nous avons également ouvert aux maires la possibilité de déroger aux règles de décence au cas par cas, à titre expérimental.
Pour répondre à la préoccupation exprimée dans cet hémicycle concernant les centres historiques, le texte issu de la commission mixte paritaire étend la possibilité pour le maire d’imposer un diagnostic structurel aux zones présentant une concentration d’immeubles anciens.
Mes chers collègues, vous retrouverez également dans ce texte les mesures pour faciliter la réalisation des travaux et la gestion des copropriétés auxquelles nous étions attachés.
La commission mixte paritaire a consacré la création d’un nouveau prêt global et collectif aux copropriétés et a tenu compte de notre préoccupation de faire en sorte que les banques et les cautions s’y engagent véritablement. Pour cela, il fallait que la copropriété ne soit pas une boîte noire financière. Ainsi, les prêteurs et les organismes de garantie pourront donc consulter le fichier de la Banque de France des incidents de paiement et obtenir du syndic des informations complètes pour acquérir une juste vision du risque et de l’état de la copropriété.
Nous avons également validé la création d’un syndic d’intérêt collectif, disposition qui avait été introduite par l’Assemblée nationale. Cette loi permettra ainsi de constituer un vivier de syndics volontaires et compétents, disposant de larges capacités d’action. Il faudra évaluer les résultats de cette mesure, mais il s’agit d’une étape importante.
En matière de lutte contre les marchands de sommeil, nos deux assemblées se sont accordées pour alourdir les peines d’amende et de prison, et pour interdire à ces derniers d’acquérir un bien immobilier dans un cadre juridique sécurisé.
Pour donner aux maires les moyens d’agir, le projet de loi ouvre à ces derniers la possibilité de disposer gratuitement des immeubles confisqués aux marchands de sommeil pour réaliser des logements.
Je suis donc heureuse de pouvoir vous présenter aujourd’hui ce compromis que nous avons pu trouver avec les rapporteurs de l’Assemblée nationale Guillaume Vuilletet et Lionel Royer-Perreaut, dont je tiens à saluer le travail et la volonté de collaborer.
Je tiens également à vous remercier, mes chers collègues, pour vos contributions à nos débats et j’espère que vous approuverez très largement ce projet de loi, car il est très attendu par tous les élus qui veulent agir au plus vite. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDSE, RDPI et Les Républicains. – Mme Viviane Artigalas applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement. Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis très heureux de me retrouver devant vous aujourd’hui, un mois jour pour jour après avoir eu l’honneur de défendre ici le projet de loi relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement, pour examiner les conclusions de la commission mixte paritaire sur ce beau texte.
Je tiens à saluer l’apport des sénateurs, et tout particulièrement l’engagement et le travail de la rapporteure Amel Gacquerre et de la présidente de la commission Dominique Estrosi Sassone, avec qui nous avons eu des échanges nourris et constructifs tout au long de l’examen de ce projet de loi.
Je tiens également à adresser mes sincères remerciements à l’ensemble des partis politiques qui se sont particulièrement investis sur ce texte pour assurer son adoption par le Sénat en première lecture à l’unanimité des votants, comme l’a rappelé Mme la rapporteure.
La commission mixte paritaire a été l’occasion, grâce aux efforts des parlementaires des deux assemblées, de sécuriser, d’enrichir et d’améliorer les dispositions d’un projet de loi utile et nécessaire. Je formule le vœu de retrouver ce même esprit de construction sur les textes que nous aurons à étudier à l’avenir.
En effet, la version du texte qui vous est soumise aujourd’hui est le fruit d’un travail parlementaire ambitieux. D’un texte comprenant initialement dix-sept articles, nous sommes parvenus à un texte riche de plus d’une cinquantaine d’articles, soit autant de mesures pragmatiques et opérationnelles qui amélioreront durablement le traitement de l’habitat dégradé dans notre pays.
Sur ce sujet, mesdames, messieurs les sénateurs, nous partageons le même diagnostic et le même constat : il est tout simplement intolérable que des personnes continuent de vivre dans notre pays dans des conditions d’habitat dégradé, indécent ou indigne. Près de 1,5 million de logements sont dégradés, autant de foyers et de familles connaissant ainsi des situations de vie inacceptables.
Grâce à la mobilisation collective des parlementaires de tous les bords politiques, nous nous donnons avec ce texte les moyens d’agir directement sur cette réalité au travers de solutions concrètes. Tout d’abord, nous aidons les copropriétés à emprunter les sommes nécessaires pour réaliser les travaux de rénovation. Ensuite, nous renforçons les outils à disposition des élus et des opérateurs pour mener de grands projets de réhabilitation. Enfin, nous augmentons les sanctions contre ceux qui tirent profit de la dégradation de l’habitat.
Le travail que nous avons mené poursuit l’effort qui anime le Gouvernement depuis 2017. Mes prédécesseurs ont fait de la lutte contre l’habitat indigne une priorité de leur action : Julien Denormandie a lancé dès 2018 le plan Initiative Copropriétés pour s’attaquer aux cas des grandes copropriétés en difficulté ; Emmanuelle Wargon a parachevé la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi Élan, en réformant et en simplifiant la police de l’habitat indigne ; Olivier Klein a confié une mission à deux maires issus d’horizons différents, Mathieu Hanotin, maire socialiste de Saint-Denis, et Michèle Lutz, maire Les Républicains de Mulhouse, pour explorer les moyens d’améliorer la prise en charge de ces situations difficiles. Leurs travaux ont permis à mon prédécesseur Patrice Vergriete d’élaborer le texte à la fois pragmatique et ambitieux qui vous a été soumis.
Pour mieux traiter les situations de dégradation de l’habitat, il nous faut mieux les anticiper. Ces processus mettant plusieurs années à s’installer, ils doivent être traités plus en amont. Dans notre vie comme dans celle des bâtiments, il vaut toujours mieux agir avant qu’il ne soit trop tard.
Avec ce texte, notre philosophie est simple : mieux vaut prévenir que guérir ou détruire. Dans cette optique, le projet de loi crée notamment, à l’article 3, une nouvelle procédure d’expropriation, qui permettra d’intervenir plus en amont du cycle de dégradation des copropriétés. Je me réjouis que les travaux de nos rapporteurs aient permis de conserver des apports ambitieux à cet article à l’issue de la commission mixte paritaire.
Par ailleurs, l’article 2, qui était particulièrement attendu, permettra aux syndicats de copropriété d’assurer le financement des travaux au moyen d’un emprunt collectif. Il s’agit d’une innovation majeure, qui fera gagner plusieurs mois d’examen de dossiers individuels, au profit d’une approche collective et globale. En effet, le temps est un allié précieux pour éviter une dégradation trop profonde des copropriétés.
La rédaction adoptée en commission mixte paritaire constitue un compromis salutaire entre les positions des deux chambres, qui permettra aux copropriétés d’emprunter en apportant des garanties de solvabilité aux établissements prêteurs et de lever ainsi l’un des principaux freins identifiés à la rénovation des copropriétés.
Au fond, j’aime à croire que ce prêt sera l’innovation financière qui nous manquait pour déployer la transition écologique au sein de chaque copropriété, soit autant de micro-démocraties.
Au travers de ce texte, nous poursuivons également la lutte que nous avons engagée dès 2017 contre les marchands de sommeil. Je le rappelle avec fermeté : dans notre pays, nul n’a le droit de tirer une rente de la vulnérabilité d’autrui. Sur l’initiative des parlementaires, des dispositions importantes ont été ajoutées pour renforcer les sanctions à l’encontre des marchands de sommeil. Ces mesures sont cruciales pour notre dignité collective.
Je me réjouis enfin que la commission mixte paritaire ait conservé les simplifications importantes pour la construction de logements que prévoit l’article 14. Cet article permettra, dans le cadre de projets partenariaux d’aménagement (PPA) et d’opérations d’intérêt national (OIN), de débloquer rapidement les procédures liées aux exigences environnementales et urbanistiques afin de gagner plusieurs mois précieux lors du lancement d’un projet.
La production de logements est la première réponse au mal-logement. C’est selon cette méthode que nous lançons le programme Territoires engagés pour le logement, dont les décrets d’application et les arrêtés ont été publiés la semaine dernière, afin de construire dans les trois années à venir 30 000 logements au sein de vingt-deux territoires particulièrement en difficulté.
Ce projet de loi s’inscrit donc dans la continuité de notre action et fera bénéficier l’ensemble de nos collectivités de procédures d’accélération et de simplification des projets, en tenant compte des spécificités ultramarines. J’en profite pour souligner l’engagement de votre assemblée à cet égard, et tout particulièrement celui du groupe RDPI et du sénateur Thani Mohamed Soilihi, qui nous a permis de renforcer le texte en introduisant, par ses amendements, des mesures majeures pour accélérer le règlement des désordres immobiliers résultant des indivisions successorales dans les territoires ultramarins. Je rappelle que ces territoires sont soumis à de très vives tensions en matière d’accès à l’habitat.
La commission mixte paritaire a également préservé et renforcé une série d’avancées opérationnelles attendues, parfois de très longue date, par les professionnels et les élus des territoires. Le compromis qui a été trouvé répondra à des situations dangereuses et parfois dramatiques.
Ainsi, grâce à ce texte, les maires pourront définir des périmètres devant faire l’objet de diagnostics structurels lorsque des doutes existent quant à la solidité de certains immeubles. Ce faisant, ils pourront prévenir au mieux de potentiels effondrements d’immeubles, notamment dans les centres anciens de villes telles que Toulouse, Bordeaux, Marseille ou encore Lille.
Je tiens à remercier les maires de nous avoir fait part de cette attente et les parlementaires de s’être montrés à notre écoute pour y répondre favorablement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, en adoptant ce projet de loi, nous nous doterons de nouvelles capacités pour lutter contre l’habitat indigne, et ce de manière pragmatique, opérationnelle et transpartisane.
Au travers de ce texte, nous nous attaquons à la question des copropriétés dégradées en ayant un objectif précis en tête : éviter de retirer davantage de logements du marché en assurant aux Français des conditions d’habitat dignes, sécurisées et de qualité. De plus, nous nous donnons des moyens supplémentaires pour traiter plusieurs causes de la crise du logement et de la dégradation de notre parc de logements.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous pouvons être fiers de ce travail collectif car, ensemble, nous sommes parvenus à coconstruire un texte ambitieux pour répondre aux problèmes rencontrés sur le terrain par les élus que vous représentez.
M. le président. Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12 du règlement, le Sénat examinant après l’Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, il se prononce par un seul vote sur l’ensemble du texte en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.
Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
projet de loi visant à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement
Chapitre Ier
Intervention en amont d’une dégradation définitive
Article 1er A
À la première phrase du premier alinéa du I de l’article L. 1231-2 du code général des collectivités territoriales, après le mot : « logement », sont insérés les mots : « , dont la rénovation de l’habitat dégradé ».
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Article 1er bis
Après le mot : « urbaine », la fin du 1° de l’article L. 313-34 du code de la construction et de l’habitation est ainsi rédigée : « , dans le périmètre d’une opération programmée d’amélioration de l’habitat au sens de l’article L. 303-1 ayant pour objet de lutter contre l’habitat indigne, dans un immeuble faisant l’objet d’un arrêté pris en application des articles L. 511-11 ou L. 511-19 ou dans un îlot ou un ensemble cohérent d’îlots comprenant un tel immeuble, dans le périmètre d’une opération de restauration immobilière au sens de l’article L. 313-4 du code de l’urbanisme ou dans un îlot ou un ensemble cohérent d’îlots contenant au moins un immeuble soumis à un plan de sauvegarde tel que prévu à l’article L. 615-1 du présent code ou dans le périmètre d’une opération d’aménagement au sens de l’article L. 300-1 du code de l’urbanisme ayant pour objet de lutter contre l’habitat indigne ; ».
Article 2
I. – La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifiée :
1° L’article 26-4 est ainsi modifié :
a) Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;
b) Au début du deuxième alinéa, est ajoutée la mention : « II. – » et les mots : « premier alinéa » sont remplacés par la référence : « I » ;
b bis A) Le troisième alinéa est supprimé ;
b bis) Au quatrième alinéa, les mots : « premier alinéa » sont remplacés par les mots : « même I » ;
c) Il est ajouté un III ainsi rédigé :
« III. – L’assemblée générale peut voter à la même majorité que celle nécessaire au vote des travaux concernant les parties communes ou des travaux d’intérêt collectif sur parties privatives, prévus aux a à e du II de l’article 24 et au f de l’article 25, la souscription d’un emprunt au nom du syndicat des copropriétaires pour le financement de ces travaux.
« À moins qu’il ne s’y oppose dans les conditions fixées au troisième alinéa du présent III, chaque copropriétaire est réputé avoir accepté de participer à ce mode de financement des travaux.
« Tout copropriétaire peut refuser de participer à l’emprunt sous réserve de notifier au syndic son refus dans le délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal de l’assemblée générale et de verser la totalité de la quote-part du prix des travaux lui revenant dans un délai de six mois à compter de la notification de ce procès-verbal. À défaut, le copropriétaire est tenu par l’emprunt.
« L’établissement prêteur peut consulter le fichier prévu à l’article L. 751 1 du code de la consommation, dans les conditions prévues à l’arrêté mentionné à l’article L. 751 6 du même code. Sur sa demande, le syndic lui fournit les informations relatives au syndicat des copropriétaires nécessaires, suffisantes et proportionnées, afin d’apprécier la capacité du syndicat à remplir ses obligations définies par le contrat de prêt, dans les conditions fixées par décret. ;
2° Au premier alinéa de l’article 26-6, le mot : « à » est remplacé par les mots : « au II de » ;
3° Au premier alinéa de l’article 26-7, à la première occurrence, et à la première phrase de l’article 26-8, le mot : « à » est remplacé par les mots : « aux I et II de » ;
3° bis À la fin du deuxième alinéa du même article 26-7, les mots : « ou une institution mentionnée à l’article L. 518-1 » sont remplacés par les mots : « , le Trésor public, la Caisse des dépôts et consignations ou La Poste, dans les conditions définies à l’article L. 518-25 » ;
4° Après l’article 26-8, sont insérés des articles 26-9 à 26-16 ainsi rédigés :
« Art. 26-9. – Les fonds empruntés au titre du III de l’article 26-4 sont versés par l’établissement prêteur sur un compte bancaire séparé au nom du syndicat et réservé à cet effet ainsi qu’au versement des subventions publiques accordées au syndicat des copropriétaires pour le financement des travaux à réaliser et des sommes mentionnées au premier alinéa de l’article 26-13. Ce compte bancaire ne peut faire l’objet ni d’une convention de fusion, ni d’une compensation avec un autre compte.
« Le paiement des travaux est réalisé sur présentation des factures par le syndic à l’établissement prêteur.
« Aucune mesure conservatoire ni d’exécution forcée ne peut être mise en œuvre sur les sommes portées au crédit du compte bancaire réservé en application du premier alinéa du présent article.
« Art. 26-10. – Seuls les copropriétaires bénéficiant de l’emprunt mentionné au III de l’article 26-4 sont tenus de contribuer chaque mois ou chaque trimestre, en fonction du montant pour lequel ils participent à l’emprunt selon la grille établie pour la répartition des quotes-parts de dépenses selon les principes prévus aux articles 10, 10-1 et 30 :
« 1° À son remboursement, en capital, intérêts et frais éventuels de caution, au syndicat des copropriétaires ;
« 2° Au paiement des frais et des honoraires afférents générés par le montage et par la gestion du prêt.
« Art. 26-11. – La charge de la contribution au remboursement de l’emprunt mentionné au III de l’article 26-4 incombe au propriétaire du lot et est transférée aux propriétaires successifs en cas de mutation. Le propriétaire du lot peut librement verser par anticipation au syndicat des copropriétaires les sommes dont il reste redevable au titre du remboursement de l’emprunt. Dès leur versement, ces sommes sont affectées sans délai par le syndic au remboursement de l’emprunt.
« Art. 26-12. – Le syndicat des copropriétaires est garanti en totalité, sans franchise et sans délai de carence, par un cautionnement solidaire après constat de la défaillance d’un copropriétaire bénéficiant de l’emprunt mentionné au III de l’article 26-4 pour les sommes correspondant à son remboursement ainsi qu’au paiement des accessoires.
« Le cautionnement solidaire ne peut résulter que d’un engagement écrit fourni par une entreprise d’assurance spécialement agréée, par un établissement de crédit, par une société de financement, par le Trésor public, la Caisse des dépôts et consignations ou La Poste, dans les conditions définies à l’article L. 518-25 du code monétaire et financier.
« Au regard de l’hypothèque légale prévue au 3° de l’article 2402 du code civil, les sommes correspondant au remboursement de l’emprunt ainsi qu’au paiement des accessoires sont assimilées au paiement des charges et des travaux. Après mise en œuvre de la caution, celle-ci est subrogée de plein droit dans l’exercice de l’hypothèque légale du syndicat des copropriétaires mentionné au même 3°.
« Art. 26-13. – Les sommes dues par le copropriétaire ayant refusé de participer à l’emprunt mentionné au III de l’article 26-4 qui correspondent au remboursement du capital et des intérêts et au paiement des frais et des honoraires entrent définitivement, dès leur versement, dans le patrimoine du syndicat des copropriétaires. Dès leur versement, elles sont affectées sans délai par le syndic au remboursement anticipé de l’emprunt.
« Elles ne donnent pas lieu à remboursement par le syndicat des copropriétaires à l’occasion de la cession d’un lot. L’acquéreur peut consentir à verser au vendeur un montant équivalent à ces sommes en sus du prix de vente du lot.
« Art. 26-14 et 26-15. – (Supprimés)
« Art. 26-16. – L’article 33 n’est pas applicable aux décisions prises sur le fondement du III de l’article 26-4. »
II. – Le titre III du livre VII du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° Le chapitre unique devient un chapitre Ier ;
2° Il est ajouté un chapitre II ainsi rédigé :
« CHAPITRE II
« Prêt pour travaux consenti aux syndicats de copropriétaires
« Art. L. 732-1. – Le présent chapitre est applicable aux prêts destinés à financer les dépenses relatives à la réparation, à l’amélioration ou à l’entretien d’un immeuble qui sont souscrits par un syndicat de copropriétaires mentionné à l’article 14 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.
« Art. L. 732-2. – Dans le cas de l’emprunt prévu au III de l’article 26-4 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, le prêt est consenti pour une durée fixée par décret en Conseil d’État. Il permet de financer le coût des travaux non couvert par la mobilisation de fonds détenus par le syndicat des copropriétaires ou le coût des travaux éligibles à l’avance remboursable ne portant pas intérêt prévue à l’article 244 quater U du code général des impôts consentie à un syndicat de copropriétaires.
« Art. L. 732-3. – L’emprunt comporte des facilités de remboursement anticipé pour tenir compte du versement des subventions publiques accordées pour la réalisation des travaux votés ou du versement des montants des quotes-parts du coût des travaux des copropriétaires ne souhaitant pas bénéficier du prêt. »
III. – (Supprimé)
IV. – Le chapitre Ier du titre V du livre VII du code de la consommation est ainsi modifié :
1° Au dernier alinéa de l’article L. 751-2, les mots : « à l’article 26-7 » sont remplacés par les mots : « aux articles 26-7 et 26-12 » et les mots : « à l’emprunt mentionné » sont remplacés par les mots : « aux emprunts mentionnés » ;
2° À l’article L. 751-3, au premier alinéa de l’article L. 751-5 et au second alinéa de l’article L. 751-6, les mots : « au premier alinéa de » sont remplacés par le mot : « à ».
Article 2 bis A
I. – La section 4 du chapitre II du titre Ier du livre III du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifiée :
1° À la fin de l’intitulé, le mot : « énergétique » est supprimé ;
2° L’article L. 312-7 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– au premier alinéa, la première occurrence du mot : « énergétique » est supprimée et, à la fin, sont ajoutés les mots : « et de rénovation des copropriétés en difficulté » ;
– au 2°, la référence : « 26-8 » est remplacée par la référence : « 26-13 » ;
b) À la seconde phrase du IV, les mots : « et la condition de ressources » sont remplacés par les mots : « , la condition de ressources ainsi que les catégories de copropriétés en difficulté ».
II. – Au c du 6° de l’article L. 221-7 du code de l’énergie, le mot : « énergétique » est supprimé.
III. – À la première phrase du second alinéa de l’article L. 315-14 du code de la consommation, le mot : « énergétique » est supprimé.
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Article 2 ter
I. – Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° L’article L. 634-1 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa du I, après le mot : « vigueur », sont insérés les mots : « , s’il existe, » ;
b) La première phrase du second alinéa du III est ainsi rédigée : « La durée de la délégation est fixée par l’organe délibérant de l’établissement public mentionné au I. » ;
2° L’article L. 635-1 est ainsi modifié :
a) À la deuxième phrase du premier alinéa du I, après le mot : « vigueur », sont insérés les mots : « , s’il existe, » ;
b) La première phrase du second alinéa du III est ainsi rédigée : « La durée de la délégation est fixée par l’organe délibérant de l’établissement public mentionné au I. » ;
3° à 5° (Supprimés)
II. – (Supprimé)
Article 2 quater
L’article L. 635-3 du code de la construction et de l’habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat ou, à défaut, le maire peut faire procéder à toutes visites qui lui paraissent utiles pour examiner le logement, dans le délai prévu au troisième alinéa de l’article L. 635-4. Lorsque les lieux sont à usage total ou partiel d’habitation, les visites ne peuvent être effectuées qu’entre 6 heures et 21 heures. L’autorisation du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire dans le ressort duquel sont situés ces lieux est nécessaire lorsque l’occupant s’oppose à la visite ou que la personne ayant qualité pour autoriser l’accès au logement ne peut pas être atteinte. »
Article 3
Le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique est ainsi modifié :
1° A À l’article L. 311-8, après la référence : « L. 242-7, », est insérée la référence : « L. 311-8-1, » ;
1° B Après le même article L. 311-8, il est inséré un article L. 311-8-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 311-8-1. – L’occupant qui a payé à l’exproprié des sommes en contrepartie de l’occupation d’un logement frappé par un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité, en violation de l’article L. 521-2 du code de la construction et de l’habitation, peut en demander la restitution devant le juge de l’expropriation dans le cadre de l’instance en fixation de l’indemnité d’expropriation.
« S’il fait droit à cette demande, le juge fixe le montant de la somme due à l’occupant, ordonne sa déduction de l’indemnité d’expropriation fixée au profit de l’exproprié et son versement à l’occupant, par l’expropriant, dans la limite du montant de l’indemnité d’expropriation.
« Le dispositif du jugement mentionne la créance de l’occupant, le montant de l’indemnité d’expropriation et, selon le cas, la somme restant due à l’exproprié après déduction du montant de la créance de l’occupant ou la somme restant due à l’occupant par l’exproprié après cette déduction.
« Cette condamnation vaut restitution au sens du même article L. 521-2. » ;
1° C À l’article L. 311-9, après la référence : « L. 311-8, », est insérée la référence : « L. 311-8-1 » ;
1° D Le chapitre III du titre II du livre III est complété par un article L. 323-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 323-5. – Afin de permettre la saisie des fonds dont la confiscation est prévue par l’article 131-21 du code pénal, l’expropriant débiteur des indemnités fixées en application du présent titre envers une personne mise en cause pour l’une des infractions prévues aux articles 225-14 du code pénal, L. 511-22 et L. 521-4 du code de la construction et de l’habitation informe le procureur de la République du lieu de situation de l’immeuble de la date à laquelle il procédera à leur paiement ou à leur consignation. » ;
1° Le titre Ier du livre V est ainsi modifié :
a) À la fin de l’intitulé, les mots : « insalubres ou menaçant ruine » sont remplacés par le mot : « indignes » ;
b) Le chapitre unique devient le chapitre Ier et il est ajouté un intitulé ainsi rédigé : « Expropriation des immeubles indignes à titre irrémédiable » ;
c) Il est ajouté un chapitre II ainsi rédigé :
« CHAPITRE II
« Expropriation des immeubles indignes à titre remédiable
« Art. L. 512-1. – L’expropriation d’immeubles bâtis ou de parties d’immeubles bâtis, y compris leurs terrains d’assiette, peut être poursuivie au profit de l’État, d’une société de construction dans laquelle l’État détient la majorité du capital, d’une collectivité territoriale, du concessionnaire d’une opération d’aménagement mentionnée à l’article L. 300-4 du code de l’urbanisme ou du titulaire d’un contrat mentionné à l’article L. 300-10 du même code, dans les conditions prévues aux articles L. 512-2 à L. 512– 5 du présent code, lorsque les conditions suivantes sont réunies :
« 1° L’immeuble a fait l’objet, au cours des dix dernières années civiles, d’au moins deux arrêtés de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité, pris en application des articles L. 511-11 ou L. 511-19 du code de la construction et de l’habitation, ayant prescrit des mesures propres à remédier à la situation qui n’ont pas été intégralement exécutées ou à l’exécution desquelles il a dû être procédé d’office en application de l’article L. 511-16 du même code. Lorsque les arrêtés portent sur une partie privative dépendant d’un immeuble soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis, l’expropriation engagée sur le fondement du présent article ne porte que sur le lot de copropriété concerné ;
« 2° Des mesures de remise en état de l’immeuble s’imposent pour prévenir la poursuite de la dégradation de celui-ci. Leur nécessité est attestée par un rapport des services municipaux, intercommunaux ou de l’État compétents ou d’un expert désigné par l’autorité compétente, établi dans les conditions prévues à l’article L. 511-7 dudit code ;
« 3° Lorsque l’immeuble est à usage d’habitation et occupé et que la réalisation des travaux de remise en état ou la préservation de la santé et de la sécurité des occupants justifie une interdiction temporaire d’habiter, un projet de plan de relogement et, le cas échéant, d’hébergement est établi en application des articles L. 314-2 à L. 314-9 du code de l’urbanisme.
« Art. L. 512-2. – Par dérogation aux règles générales du présent code, l’autorité compétente de l’État déclare d’utilité publique l’expropriation des immeubles bâtis ou des parties d’immeubles bâtis, des installations et des terrains après avoir constaté que les conditions fixées à l’article L. 512-1 sont remplies et, s’il y a lieu, prescrit, par arrêté, une interdiction temporaire d’habiter ou d’utiliser.
« Elle désigne la collectivité publique ou l’organisme au profit duquel l’expropriation est poursuivie. En cas d’interdiction temporaire d’habiter les lieux, l’expropriant ainsi désigné est tenu à une obligation de relogement, y compris des propriétaires.
« Par la même décision, elle déclare cessibles les immeubles bâtis et les parties d’immeubles bâtis, les installations et les terrains concernés par l’expropriation et fixe le montant de l’indemnité provisionnelle allouée aux propriétaires ainsi qu’aux titulaires de conventions d’occupation à usage autre que d’habitation, à l’exclusion de toute indemnisation en dédommagement de la suppression d’un commerce portant sur l’utilisation comme habitation de locaux impropres à cet usage. Cette indemnité ne peut être inférieure à l’évaluation réalisée par l’autorité administrative.
« L’autorité compétente de l’État détermine également la date à laquelle il peut être pris possession des immeubles bâtis et parties d’immeubles bâtis, des installations et des terrains expropriés après paiement ou, en cas d’obstacle au paiement, après consignation de l’indemnité provisionnelle. Cette date doit être postérieure d’au moins deux mois à la publication de la déclaration d’utilité publique.
« L’autorité compétente de l’État fixe, le cas échéant, le montant de l’indemnité provisionnelle de privation de jouissance. Lorsque le déménagement n’est pas assuré par l’administration, elle fixe le montant de l’indemnité provisionnelle de déménagement.
« L’accès de l’entité expropriante à l’immeuble est soumis à la procédure prévue à l’article L. 523-3.
« Art. L. 512-3. – Dans le mois qui suit la prise de possession, l’autorité compétente de l’État poursuit la procédure d’expropriation dans les conditions prévues au présent code.
« L’article L. 222-2 est applicable à la procédure prévue au présent chapitre. Par exception au même article L. 222-2, l’ordonnance d’expropriation ou la cession amiable consentie après l’intervention de la décision prévue à l’article L. 512-2 emporte subrogation du bénéficiaire de la déclaration d’utilité publique dans les droits du propriétaire pour la poursuite des baux en cours, sauf dans les cas où la déclaration d’utilité publique a été précédée de la présentation à l’assemblée délibérante de la commune sur le territoire de laquelle est implanté l’immeuble d’un dossier présentant un projet simplifié d’acquisition publique, en vue soit de la construction ou de la réhabilitation aux fins d’habitat, soit de tout objet d’intérêt collectif relevant d’une opération de restauration, de rénovation ou d’aménagement, soit de la création de réserves foncières permettant la réalisation de l’une ou l’autre de ces opérations, rendant impossible la réintégration des occupants, à terme, dans le local évacué.
« Le relogement mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 512-2 s’effectue conformément aux articles L. 423-1 à L. 423-5 du présent code et aux articles L. 314-1 à L. 314-9 du code de l’urbanisme.
« Le refus, par les occupants des immeubles ou parties d’immeubles qui font l’objet de la décision prévue à l’article L. 512-1 du présent code, du relogement qui leur est offert par l’expropriant, dans les conditions prévues, selon les cas, aux articles L. 314-2 ou L. 314-3 du code de l’urbanisme, autorise leur expulsion sans indemnité.
« Art. L. 512-3-1. – L’indemnité d’expropriation est fixée et calculée conformément aux articles L. 242-1 à L. 242-7 et au livre III, sous réserve de l’article L. 512-4.
« Art. L. 512-4. – Pour le calcul de l’indemnité due au propriétaire, la valeur du bien est fixée par référence à des mutations ou à des accords amiables portant sur des biens situés dans le même secteur et se trouvant dans un état de dégradation ou d’insalubrité comparable.
« Lorsque ces références sont en nombre insuffisant et que des opérations sur des biens de meilleure qualité sont retenues pour déterminer la valeur du bien, un abattement est pratiqué sur les montants des opérations retenues.
« Cet abattement est défini en fonction de la dépréciation résultant de la dégradation et de l’insalubrité du bien. Il comprend le montant des travaux ou autres mesures propres à remédier à la situation ayant justifié la prise d’un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité non réalisés prescrits par les arrêtés non exécutés.
« Art. L. 512-5. – Lorsqu’un ou plusieurs arrêtés pris en application des articles L. 511-11 ou L. 511-19 du code de la construction et de l’habitation a prescrit une interdiction temporaire d’habiter ou d’utiliser les lieux expropriés :
« 1° L’indemnité d’expropriation est réduite du montant des frais du relogement ou de l’hébergement des occupants assuré, si le propriétaire n’y a pas procédé, en application de l’article L. 521-3-2 du même code ;
« 1° bis et 2° (Supprimés)
« Art. L. 512-5-1, L. 512-5-2 et L. 512-6. – (Supprimés) » ;
Article 3 bis AA
Le dernier alinéa du I de l’article L. 521-3-1 du code de la construction et de l’habitation est complété par une phrase ainsi rédigée : « Au-delà de trois ans, toute éviction est considérée comme définitive et le II du présent article est applicable. »
Article 3 bis A
I. – L’article L. 615-10 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° À la première phrase du I, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « vingt » ;
2° Il est ajouté un VII ainsi rédigé :
« VII. – Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation, au plus tard six mois avant son terme. »
II (nouveau). – À titre expérimental et pour une durée de dix ans à compter de la promulgation de la présente loi, lorsqu’un immeuble placé sous le régime de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis remplit les conditions justifiant le prononcé du jugement mentionné aux I et III de l’article L. 615-6 du code de la construction et de l’habitation, un opérateur peut, après autorisation de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat, conclure avec le syndicat des copropriétaires une convention en vue de l’acquisition temporaire à titre onéreux du seul terrain d’assiette de la copropriété, ou des seuls parties et équipements communs du ou des immeubles qui la constituent, ou du terrain et des parties et équipements communs, en vue d’en assurer la rénovation.
Les modalités de la cession sont fixées par une convention entre les copropriétaires et l’opérateur, qui :
1° Établit la durée maximale pendant laquelle l’opérateur est investi des droits réels conférés par la propriété du terrain ou des parties communes ;
2° Fixe les conditions de rachat du terrain ou des parties communes par les propriétaires. Le prix de revente ne peut excéder le prix d’acquisition par l’opérateur, tel qu’initialement établi par une évaluation du service des domaines, et actualisé selon des modalités définies par décret en Conseil d’État ;
3° Définit les mesures et travaux de rénovation que l’opérateur s’engage à réaliser, ainsi que, le cas échéant, ses obligations en matière d’entretien ;
4° Détermine un règlement pour l’usage des locaux et des équipements par les copropriétaires ;
5° Fixe la redevance due par les copropriétaires à l’opérateur au titre de l’usage du terrain et des parties et équipements communs de la copropriété et des travaux réalisés aux fins de leur rénovation et de leur conservation, en rapport avec la superficie de leurs parties privatives.
La convention comprend l’état descriptif de division de l’immeuble, qui est mis à jour ou établi s’il n’existe pas.
L’opérateur investi des droits de propriétés assume la responsabilité des dommages causés aux propriétaires de parties privatives ou aux tiers par le vice de construction ou le défaut d’entretien des biens d’intérêt collectif, sans préjudice de toutes actions récursoires.
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation, au plus tard six mois avant son terme.
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Article 3 bis
L’article L. 481-1 du code de l’urbanisme est complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. – Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, lorsque les travaux entrepris et exécutés mentionnés au I du présent article ont produit des installations qui présentent un risque certain pour la sécurité ou pour la santé et lorsque la mise en demeure est restée sans effet au terme du délai imparti, l’autorité compétente peut procéder d’office à la réalisation des mesures prescrites, aux frais de l’intéressé.
« Lorsque ces installations sont occupées, l’occupant défini au premier alinéa de l’article L. 521-1 du code de la construction et de l’habitation bénéficie du régime de protection des occupants défini aux articles L. 521-1 à L. 521-4 du même code.
« S’il n’existe aucun moyen technique permettant de régulariser les travaux entrepris ou exécutés, en conformité avec les règlements, les obligations ou les prescriptions mentionnées au I du présent article, l’autorité compétente peut procéder à la démolition complète des installations qui présentent un risque certain pour la sécurité ou pour la santé, aux frais de l’intéressé, après y avoir été autorisée par un jugement du président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond. »
Article 3 ter A
À la dernière phrase du premier alinéa de l’article L. 651-7 du code de la construction et de l’habitation, après les mots : « leurs agents », sont insérés les mots : « , ainsi que les syndics de copropriété, ».
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Article 3 quater
Le titre II du livre IV du code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Le chapitre VII est complété par un article L. 427-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 427-3. – À Mayotte, un décret en Conseil d’État arrête la liste des constructions nouvelles de logements, dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par les bénéficiaires des subventions et prêts mentionnés à l’article R. 372-3 du code de la construction et de l’habitation, ainsi que par l’établissement mentionné à l’article L. 321-36-1 du présent code et qui, en raison de leurs dimensions, de leur nature ou de leur localisation, ne justifient pas l’exigence d’un permis de construire et font l’objet d’une déclaration préalable. » ;
2° Il est ajouté un chapitre VIII ainsi rédigé :
« CHAPITRE VIII
« Dispositions particulières à la Guyane
« Art. L. 428-1. – En Guyane, un décret en Conseil d’État arrête la liste des constructions nouvelles de logements, dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par les bénéficiaires des subventions et prêts mentionnés à l’article R. 372-3 du code de la construction et de l’habitation, ainsi que par l’établissement mentionné à l’article L. 321-36-1 du présent code et qui, en raison de leurs dimensions, de leur nature ou de leur localisation, ne justifient pas l’exigence d’un permis de construire et font l’objet d’une déclaration préalable. »
Article 4
I. – L’article 29-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée est complété par un V ainsi rédigé :
« V. – Aucune procédure d’exécution, de quelque nature qu’elle soit, sur les sommes versées à la Caisse des dépôts et consignations par l’administrateur judiciaire dans l’exercice de son mandat d’administrateur provisoire au titre des missions accomplies sur le fondement des articles 29-1 à 29-14 n’est recevable. »
II. – Le I est applicable aux procédures d’exécution engagées après l’entrée en vigueur de la présente loi.
Article 5
La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée est ainsi modifiée :
1° L’article 29-1 A est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, après la référence : « 14-2-1 », sont insérés les mots : « ou en l’absence de vote de l’assemblée générale sur l’approbation des comptes depuis au moins deux ans » ;
b) Au deuxième alinéa, après le mot : « comptes, », sont insérés les mots : « en l’absence de syndic ou en l’absence de vote de l’assemblée générale sur l’approbation des comptes depuis au moins deux ans, » ;
1° bis (Supprimé)
2° Le II de l’article 29-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le président du tribunal judiciaire peut imputer tout ou partie des frais de l’administration provisoire au syndic si ce dernier n’a pas saisi sur requête le juge d’une demande de désignation d’un mandataire ad hoc dans les conditions prévues à l’article 29-1 A, après audition du syndic et du conseil syndical, sur le rapport de l’administrateur provisoire. »
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Article 5 bis B
(Supprimé)
Article 5 bis
Après l’article 18-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée, il est inséré un article 18-3 ainsi rédigé :
« Art. 18-3. – I. – L’agrément de syndic d’intérêt collectif atteste de la compétence de son bénéficiaire pour intervenir dans les copropriétés faisant l’objet des procédures prévues aux articles 29-1 A et 29-1.
« Le syndic d’intérêt collectif est présumé compétent pour gérer les copropriétés pour lesquelles un mandataire ad hoc a été désigné sur le fondement de l’article 29-1 A. Il peut également, à la demande d’un administrateur provisoire désigné sur le fondement de l’article 29-1, assister ledit administrateur dans ses fonctions de gestion.
« L’agrément est délivré par le représentant de l’État dans le département pour une durée de cinq ans, au regard notamment de la capacité et des compétences du syndic à accomplir les missions prévues au deuxième alinéa du présent I.
« II. – Le représentant de l’État dans le département transmet la liste des syndics d’intérêt collectif au Conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires.
« III. – Les organismes d’habitations à loyer modéré mentionnés aux deuxième à quatrième alinéas de l’article L. 411-2 du code de la construction et de l’habitation et les sociétés d’économie mixte mentionnées à l’article L. 481-1 du même code peuvent, à leur demande expresse, se voir reconnaître de plein droit la qualité de syndic d’intérêt collectif, sans se soumettre à la procédure d’agrément prévue au dernier alinéa du I du présent article.
« IV. – Un décret détermine les modalités d’application du présent article. »
Article 6
Après l’article L. 300-9 du code de l’urbanisme, il est inséré un article L. 300-10 ainsi rédigé :
« Art. L. 300-10. – Par un contrat conclu dans les mêmes formes que celles prévues aux articles L. 300-4 et L. 300-5, il peut être confié à une personne y ayant vocation la réalisation d’actions nécessaires au traitement d’un immeuble faisant l’objet d’un arrêté pris en application des articles L. 511-11 ou L. 511-19 du code de la construction et de l’habitation ou d’un îlot ou d’un ensemble cohérent d’îlots comprenant au moins un tel immeuble ou à une opération programmée d’amélioration de l’habitat prévue à l’article L. 303-1 du même code, à un plan de sauvegarde prévu à l’article L. 615-1 dudit code ou à une opération de requalification de copropriétés dégradées prévue à l’article L. 741-1 du même code.
« Le contrat prévoit les actions ou les opérations, notamment foncières ou immobilières, à réaliser ainsi que les conditions d’acquisition, de cession et, le cas échéant, de démolition, de construction, de réhabilitation et de gestion des logements, des locaux ou des équipements concernés. »
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Article 7 bis A
Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 634-4, les mots : « représentant de l’État dans le département » sont remplacés par les mots : « maire de la commune exerçant la compétence prévue au I de l’article L. 634-1 ou bénéficiant de la délégation prévue au III du même article L. 634-1 ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale exerçant la compétence prévue au I dudit article L. 634-1 » et, à la fin, les mots : « l’Agence nationale de l’habitat » sont remplacés par les mots : « la commune ou à l’établissement public de coopération intercommunale concerné » ;
2° L’article L. 635-7 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « auprès de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat ou, à défaut, de la commune, le représentant de l’État dans le département » sont remplacés par les mots : « , le maire de la commune exerçant la compétence prévue au I de l’article L. 635-1 ou bénéficiant de la délégation prévue au III du même article L. 635-1 ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale exerçant la compétence prévue au I dudit article L. 635-1 » ;
a bis) Au deuxième alinéa, les mots : « notifiée par le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat ou, à défaut, le maire de la commune, le représentant de l’État dans le département » sont remplacés par les mots : « , le maire de la commune exerçant la compétence prévue au même I ou bénéficiant de la délégation prévue au III du même article L. 635-1 ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale exerçant la compétence prévue au I du même article L. 635-1 » ;
b) À la fin du troisième alinéa, les mots : « l’Agence nationale de l’habitat » sont remplacés par les mots : « la commune ou à l’établissement public de coopération intercommunale concerné ».
Article 7 bis
Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° A L’article L. 314-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cadre des actions et opérations mentionnées à l’article L. 421-5-3, les occupants évincés définitivement peuvent, à titre exceptionnel et sous réserve de leur accord, bénéficier d’un relogement temporaire dans les constructions temporaires et démontables mentionnées au même article L. 421-5-3, pour une durée maximale de deux ans. » ;
1° Après l’article L. 421-5-2, il est inséré un article L. 421-5-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 421-5-3. – I. – Par dérogation aux articles L. 421-1 à L. 421-5, sont dispensées de toute formalité au titre du présent code, pour la durée de l’opération et dans la limite de l’échéance fixée par l’accord mentionné au II du présent article, les constructions temporaires et démontables à usage exclusif de relogement temporaire des occupants délogés à titre définitif ou provisoire, rendu nécessaire par des opérations d’aménagement ayant pour objet la lutte contre l’habitat dégradé ou indigne ou réalisées dans le cadre du nouveau programme national de renouvellement urbain définies à l’article 9-1 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine ou par des actions de lutte contre l’habitat indigne réalisées dans le cadre d’une opération programmée d’amélioration de l’habitat mentionnée à l’article L. 303-1 du code de la construction et de l’habitation ou d’une opération de requalification des copropriétés dégradées mentionnée à l’article L. 741-1 du même code, ainsi que dans le cadre des procédures d’expropriation mentionnées aux articles L. 511-1 et L. 512-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.
« Les constructions mentionnées au premier alinéa du présent I remplissent des conditions minimales de confort et d’habitabilité fixées par décret.
« Le présent article s’applique sans préjudice des articles L. 314-1 à L. 314-9, relatifs à la protection des occupants et, le cas échéant, des articles L. 423-1 à L. 423-5 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, relatifs aux droits de relogement.
« II. – L’implantation des constructions mentionnées au I du présent article est soumise à l’accord préalable du maire de la commune d’implantation de la construction par le maître d’ouvrage, au plus tard un mois avant la date de début d’implantation. Cet accord précise la nature et l’usage du projet de construction ainsi que la date de début d’implantation. Il précise également la date de fin d’implantation. L’accord mentionné à la première phrase du présent II peut être renouvelé dans les mêmes conditions, au plus tard trois mois avant l’expiration de la durée de validité de l’accord en vigueur.
« III. – Avant l’expiration du délai mentionné audit I ou, si elle est antérieure, avant la date fixée au II, le maître d’ouvrage est tenu de remettre les lieux occupés dans leur état initial.
« IV. – Le présent article n’est pas applicable dans les zones où le fait de construire ou d’aménager est interdit par un plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé ou est soumis au respect de conditions de réalisation, d’utilisation ou d’exploitation prescrites par ce plan. » ;
2° À l’article L. 421-8, les mots : « et L. 421-5-2 » sont remplacés par les mots : « , L. 421-5-2 et L. 421-5-3 » ;
3° Au premier alinéa de l’article L. 433-1, les mots : « de l’article L. 421-5 » sont remplacés par les mots : « des articles L. 421-5 et L. 421-5-3 » ;
4° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 480-4, après la référence : « L. 421-5 », sont insérés les mots : « et L. 421-5-3 » ;
5° Au I de l’article L. 481-1, après la référence : « L. 421-5 », sont insérés les mots : « et L. 421-5-3 ».
Article 8
Le III de l’article L. 711-2 du code de la construction et de l’habitation est ainsi rédigé :
« III. – Figurent également au registre les principales données concernant la copropriété devant permettre :
« 1° De connaître la situation financière de la copropriété ;
« 2° De connaître les caractéristiques techniques des immeubles constituant la copropriété, notamment celles prévues dans les diagnostics obligatoires ;
« 3° Aux services de l’État et aux collectivités territoriales de mettre en œuvre les dispositifs de repérage et d’accompagnement des copropriétés en difficulté ;
« 4° D’informer de l’existence d’un dépôt de plainte ou d’une condamnation sur le fondement de l’article 225-14 du code pénal ou de l’article 3-4 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, ou d’un refus d’une autorisation préalable de mise en location d’un logement sur le fondement de l’article L. 635-3 du présent code, si le syndic en a connaissance. »
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Article 8 bis
Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° Après la section 1 du chapitre VI du titre II du livre Ier, est insérée une section 1 bis ainsi rédigée :
« Section 1 bis
« Diagnostic structurel de l’immeuble
« Art. L. 126-6-1. – La commune peut définir des secteurs dans lesquels tout bâtiment d’habitation collectif doit faire l’objet, à l’expiration d’un délai de quinze ans à compter de la réception des travaux de construction du bâtiment et au moins une fois tous les dix ans, d’un diagnostic structurel du bâtiment, incluant une description des désordres observés qui portent atteinte à sa solidité et évaluant les risques qu’ils présentent pour la sécurité des occupants et celle des tiers.
« Peuvent entrer dans le périmètre des secteurs mentionnés au premier alinéa :
« 1° Des zones caractérisées par une proportion importante d’habitat dégradé ;
« 2° Des zones présentant une concentration importante d’habitat ancien, dans lesquelles les bâtiments sont susceptibles de présenter des fragilités structurelles du fait notamment de leur époque de construction, de leurs caractéristiques techniques et architecturales, des matériaux de construction employés ou de l’état des sols.
« Les périmètres des secteurs concernés sont indiqués sur un ou plusieurs documents graphiques annexés au plan local d’urbanisme, au document d’urbanisme en tenant lieu ou à la carte communale.
« Ce diagnostic est élaboré par une personne qui justifie de compétences et de garanties définies par décret en Conseil d’État. Cette personne est tenue de souscrire une assurance permettant de couvrir les conséquences d’un engagement de sa responsabilité en raison de ses interventions.
« Pour les immeubles à destination totale ou partielle d’habitation soumis au statut de la copropriété, l’obligation de réaliser un diagnostic structurel de l’immeuble est satisfaite par l’élaboration du projet de plan pluriannuel de travaux mentionné à l’article 14-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Dans ce cas, la personne ayant élaboré le projet de plan pluriannuel de travaux justifie des compétences et garanties définies par le décret en Conseil d’État mentionné au troisième alinéa du présent article.
« Le propriétaire de l’immeuble ou, dans le cas d’immeubles soumis au statut de la copropriété, le syndic, transmet le diagnostic ou, le cas échéant, le projet de plan pluriannuel de travaux à la commune.
« À défaut de transmission du diagnostic, ou, le cas échéant, du projet de plan pluriannuel de travaux en faisant office, le maire peut, dans le cadre de l’exercice de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installations prévue au titre Ier du livre V du présent code, demander au propriétaire ou au syndic de le lui produire.
« À défaut de transmission dans un délai d’un mois à compter de la notification de la demande, le maire peut faire réaliser d’office le diagnostic en lieu et place du propriétaire ou du syndicat des copropriétaires et à ses frais.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article. » ;
2° Au 2° de l’article L. 731-1, après le mot : « immeuble », sont insérés les mots : « et des équipements communs ».
Article 8 ter
L’article 225-14 du code pénal est ainsi modifié :
1° (Supprimé)
1° bis Le mot : « cinq » est remplacé par le mot : « sept » ;
1° ter Le nombre : « 150 000 » est remplacé par le nombre : « 200 000 » ;
2° (Supprimé)
Article 8 quater A
Les I, II et III de l’article 225-15 du code pénal sont ainsi modifiés :
1° Au 1°, les mots : « Les infractions définies aux articles 225-13 et 225-14 sont punies » sont remplacés par les mots : « L’infraction définie à l’article 225-13 est punie » ;
2° Au 2°, les mots : « L’infraction définie à l’article 225-14-1 est punie » sont remplacés par les mots : « Les infractions définies aux articles 225-14 et 225-14-1 sont punies ».
Article 8 quater B
I. – Le code pénal est ainsi modifié :
1° (Supprimé)
2° À la première phrase du 2° du I de l’article 225-26, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « quinze ».
II. – (Supprimé)
Article 8 quater
Après l’article 3-3 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, il est inséré un article 3-4 ainsi rédigé :
« Art. 3-4. – Le fait, pour un bailleur ou tout intermédiaire, de refuser l’établissement d’un contrat conforme à l’article 3 et la délivrance d’un reçu ou d’une quittance mentionnés à l’article 21 ou de dissimuler ces obligations, est puni d’un an d’emprisonnement et de 20 000 euros d’amende. Les personnes morales déclarées responsables pénalement de ce fait encourent une amende suivant les modalités prévues à l’article 131-38 du code pénal. »
Article 8 quinquies
La première phrase du neuvième alinéa de l’article 706-160 du code de procédure pénale est ainsi modifiée :
1° Les mots : « ainsi que » sont remplacés par le signe : « , » ;
2° La première occurrence du mot : « et » est remplacée par le signe : « , » ;
3° Sont ajoutés les mots : « et de collectivités territoriales ».
Article 8 sexies
I. – Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 126-20, les mots : « les quinze jours » sont remplacés par les mots : « le mois » ;
2° (Supprimé)
II. – À titre expérimental et pour une durée de cinq ans à compter de la promulgation de la présente loi, dans les zones soumises à l’autorisation préalable de mise en location mentionnée à l’article L. 635-1 du code de la construction et de l’habitation, le président de l’établissement public de coopération intercommunale ou, à défaut, le maire de la commune ayant institué ladite autorisation peut rejeter la demande présentée en application de l’article L. 635-4 du même code en vue d’une colocation formalisée par la conclusion de plusieurs contrats entre les locataires et le bailleur lorsqu’un examen préalable des caractéristiques du logement et des contrats établit qu’en l’espèce, nonobstant le respect des normes de décence prévues aux articles 6 et 8-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, les caractéristiques du logement et des baux ne permettront pas de garantir aux occupants des conditions d’existence digne. La décision de rejet de la demande d’autorisation préalable est motivée et, le cas échéant, précise la nature des mesures, travaux ou aménagements prescrits pour satisfaire aux exigences précitées.
Au plus tard six mois avant son terme, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de cette expérimentation.
Article 9
I. – Le I de l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« – d’informer les copropriétaires et les occupants de la copropriété qu’un immeuble fait l’objet d’une procédure relevant de l’exercice de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installations prévue au titre Ier du livre V du code de la construction et de l’habitation. »
II. – L’article L. 271-4 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi modifié :
a) Après le 11°, il est inséré un 12° ainsi rédigé :
« 12° S’ils existent, les arrêtés pris au titre de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installations régie par le titre Ier du livre V du présent code. » ;
b) À l’avant-dernier alinéa, les mots : « et 7° » sont remplacés par les mots : « , 7° et 12° » ;
2° Au deuxième alinéa du II, les mots : « au 5° » sont remplacés par les mots : « au 5° et 12° ».
III. – Le deuxième alinéa de l’article L. 511-10 et la dernière phrase du premier alinéa de l’article L. 511-12 du code de la construction et de l’habitation sont complétés par les mots : « et les occupants ».
Article 9 bis AA
Après le premier alinéa de l’article L. 511-10 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’autorité compétente à l’initiative de la procédure informe concomitamment les occupants de l’engagement de la procédure contradictoire, par courrier ou remise contre signature, ou par affichage sur la façade de l’immeuble. »
Article 9 bis AB
(Supprimé)
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Article 9 bis B
La section 2 du chapitre II de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée est complétée par des articles 29-16 et 29-17 ainsi rédigés :
« Art. 29-16. – Lorsqu’un immeuble fait l’objet d’une procédure relevant de l’exercice de la police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installations prévue au titre Ier du livre V du code de la construction et de l’habitation, le signataire de l’arrêté de police de la sécurité et de la salubrité des immeubles, locaux et installations définie aux articles L. 511-1 à L. 511-3 du même code est destinataire du procès-verbal de l’assemblée générale de copropriété, à laquelle il peut assister ou se faire représenter et formuler des observations sur les questions inscrites à l’ordre du jour.
« Art. 29-17. – (Supprimé) ».
Article 9 bis
I. – La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée est ainsi modifiée :
1° (Supprimé)
2° L’article 18 est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) Après le cinquième alinéa du VIII, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le syndic est tenu de convoquer une assemblée générale dans un délai de deux mois à compter de la première présentation de la lettre recommandée, lorsque le président du conseil syndical en fait la demande. À défaut, le président du conseil syndical est habilité à la convoquer. » ;
3° L’article 42-1 est ainsi rédigé :
« Art. 42-1. – Les notifications et les mises en demeure sont valablement faites par voie électronique.
« Les copropriétaires peuvent à tout moment et par tout moyen demander à recevoir les notifications et mises en demeure par voie postale.
« Le syndic informe les copropriétaires des moyens qui s’offrent à eux pour conserver un mode d’information par voie postale. »
II. – (Supprimé)
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Article 9 ter B
(Supprimé)
Article 9 ter
La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée est ainsi modifiée :
1° et 2° (Supprimés)
2° bis L’article 25-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le projet de résolution a pour objet la réalisation de travaux prévus au f de l’article 25 et qu’il n’a pas recueilli au moins le tiers des voix de tous les copropriétaires, une nouvelle assemblée générale, si elle est convoquée dans un délai de trois mois sur un projet identique, peut statuer à la majorité prévue à l’article 24. » ;
3° Après l’article 25-2, il est inséré un article 25-2-1 ainsi rédigé :
« Art. 25-2-1. – Un ou plusieurs copropriétaires peuvent effectuer, à leurs frais, des travaux d’isolation thermique de la toiture ou du plancher qui affectent les parties communes de l’immeuble, sous réserve que ceux-ci ne portent pas atteinte à la structure de l’immeuble, à ses éléments d’équipements essentiels, à sa sécurité, à sa salubrité, aux modalités de jouissance des parties privatives d’autres copropriétaires ou ne fassent pas l’objet d’une programmation dans le cadre du plan pluriannuel de travaux adopté par le syndicat des copropriétaires.
« À cette fin, le ou les copropriétaires demandeurs notifient au syndic une demande ayant pour objet l’inscription à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale d’un projet de résolution, accompagné d’un descriptif détaillé des travaux envisagés.
« L’assemblée générale peut autoriser la réalisation des travaux à la majorité des voix des copropriétaires prévues aux articles 25 et 25-1 de la présente loi. La convocation d’une éventuelle nouvelle assemblée générale est aux frais des seuls copropriétaires demandeurs.
« Jusqu’à la réception des travaux, le ou les copropriétaires mentionnés au premier alinéa du présent article exercent les pouvoirs et assument la responsabilité dévolue au maître d’ouvrage. »
Article 9 quater
Le 1° du III de l’article L. 511-22 du code de la construction et de l’habitation est complété par les mots : « , ou lorsque la procédure contradictoire prévue à l’article L. 511-10 est engagée ».
Article 9 quinquies
I. – L’article 199 novovicies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au 5° du B du I, les deux occurrences de l’année : « 2026 » sont remplacées par l’année « 2027 » ;
2° Le IV bis est ainsi modifié :
a) À la première phrase, le mot : « exclusivement » est supprimé ;
b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Ladite réduction d’impôt s’applique également aux logements situés dans des copropriétés en difficulté faisant l’objet des procédures prévues à l’article 29-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ou dans des copropriétés incluses dans le périmètre d’une opération de requalification des copropriétés dégradées régie par les articles L. 741-1 et L. 741-2 du code de la construction et de l’habitation. »
II. – Le Gouvernement présente au Parlement, au plus tard le 30 septembre 2027, une évaluation des principales caractéristiques des logements et des contribuables bénéficiaires de la réduction d’impôt mentionnée au I du présent article et le coût de celle-ci.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
Chapitre II
Accélérer les procédures de recyclage et de transformation des copropriétés et les opérations d’aménagement stratégiques
Article 10
Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° A Après l’article L. 303-1, il est inséré un article L. 303-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 303-1-1. – Lorsqu’un immeuble ou un ensemble immobilier soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis est inclus dans le périmètre d’une opération programmée d’amélioration de l’habitat prévue à l’article L. 303-1 et que la poursuite de cette opération, lorsque celle-ci poursuit un objectif de redressement et de transformation des copropriétés dégradées, nécessite de procéder à la division du syndicat des copropriétaires ou à la création de syndicats de copropriétaires secondaires, le représentant de l’État dans le département ou l’une des collectivités territoriales signataires de la convention prévue au même article L. 303-1, avec l’accord du représentant de l’État dans le département, peut demander au syndic d’inscrire à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale le projet de division du syndicat des copropriétaires ou de création de syndicats de copropriétaires secondaires.
« Le premier alinéa du présent article n’est applicable qu’aux opérations prévoyant des dispositifs d’accompagnement social des occupants et des propriétaires, d’intervention immobilière et foncière, incluant des actions d’acquisition, de travaux et de portage de lots de copropriété. L’immeuble concerné doit également présenter un état de dégradation compromettant sa conservation. Cet état est constaté par un rapport d’expert établi aux frais de l’État ou de l’une des collectivités signataires de la convention.
« Lorsque le projet de division du syndicat des copropriétaires ou de création de syndicats de copropriétaires secondaires n’a pas été adopté par l’assemblée des copropriétaires, le syndic en informe les signataires de la convention.
« À réception de cette information, l’une des collectivités territoriales, avec l’accord du représentant de l’État dans le département, ou le représentant de l’État dans le département signataire de la convention peut, après avis des autres signataires, saisir le juge afin qu’il :
« 1° Constate que cette abstention compromet la poursuite de l’opération programmée d’amélioration de l’habitat prévue à l’article L. 303-1 ainsi que la conservation de l’immeuble compris dans son périmètre ;
« 2° Désigne, aux frais du demandeur, un expert chargé de la mission prévue à l’article L. 741-3.
« Le rôle dévolu par le même article L. 741-3 à l’opérateur d’opération de requalification des copropriétés dégradées est alors confié au demandeur, qui peut le déléguer à un opérateur. La division ne peut conduire au partage inégal prévu au V dudit article L. 741-3. » ;
1° Le IV de l’article L. 615-1 est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque la préconisation du plan de sauvegarde de procéder à la division du syndicat des copropriétaires ou à la création de syndicats des copropriétaires secondaires n’a pas été suivie, l’une des collectivités territoriales, avec l’accord du représentant de l’État dans le département ou ce dernier, signataires du plan de sauvegarde, peut, après avis de la commission réunie à nouveau à cet effet, saisir le juge afin qu’il constate que cette abstention compromet la conservation de l’immeuble et qu’il désigne, aux frais de l’État ou de la collectivité territoriale l’ayant saisi, un expert chargé de la mission prévue à l’article L. 741-3. Le rôle dévolu par le même article L. 741-3 à l’opérateur d’opération de requalification des copropriétés dégradées est alors confié au représentant de l’État dans le département ou à la collectivité territoriale ayant saisi le juge, qui peut le déléguer à un opérateur. La division ne peut conduire au partage inégal prévu au V dudit article L. 741-3.
« Lorsque la poursuite du plan de sauvegarde est compromise du fait de l’inclusion de l’immeuble dans le périmètre d’une association syndicale libre régie par l’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires ainsi que, le cas échéant, par le chapitre II du titre II du livre III du code de l’urbanisme, l’une des collectivités territoriales avec l’accord du représentant de l’État dans le département ou ce dernier, signataires du plan de sauvegarde, peut saisir le juge dans les conditions prévues à l’article L. 741-4 du présent code afin qu’il en fasse le constat et qu’il désigne, aux frais de l’État ou de la collectivité territoriale l’ayant saisi, un expert chargé de la mission prévue au même article L. 741-4.
« Le rôle dévolu par ledit article L. 741-4 à l’opérateur d’opération de requalification des copropriétés dégradées est confié au demandeur, qui peut le déléguer à un opérateur. » ;
2° Le chapitre unique du titre IV du livre VII est complété par des articles L. 741-3 et L. 741-4 ainsi rédigés :
« Art. L. 741-3. – I. – Lorsqu’un immeuble ou un ensemble immobilier soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis est inclus dans le périmètre d’une opération de requalification des copropriétés dégradées régie par les articles L. 741-1 ou L. 741-2 et que sa gestion et son fonctionnement normal sont compromis en raison de graves difficultés d’entretien ou d’administration résultant notamment de défaillances récurrentes des copropriétaires ou de complexités juridiques ou techniques, l’opérateur peut saisir le juge afin qu’il constate que ces difficultés menacent la poursuite de l’opération et qu’il désigne un expert chargé, aux frais de l’opérateur, de déterminer les conditions matérielles, juridiques et financières de la division du syndicat de copropriétaires ou de la constitution d’un ou de plusieurs syndicats de copropriétaires secondaires.
« II. – Le syndic et l’opérateur fournissent sans délai à l’expert, et en tout état de cause au plus tard à la date fixée par la décision ordonnant l’expertise, les documents nécessaires à l’accomplissement de sa mission.
« III. – L’expert établit notamment la répartition des parties communes du syndicat des copropriétaires initial, les projets de règlement de copropriété et les états descriptifs de division des nouveaux syndicats des copropriétaires, dresse un état des créances et des dettes dudit syndicat et en établit la répartition selon les principes définis aux 1° et 2° du II de l’article 28 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.
« Dans un délai de trois mois, renouvelable une fois, à compter de sa désignation, l’expert adresse au juge et à l’opérateur un rapport présentant les préconisations faites pour opérer la scission du syndicat ou la création d’un ou de plusieurs syndicats secondaires et, le cas échéant, pour assurer la sécurité et la division de l’immeuble ainsi que le résultat des actions de médiation ou de négociation qu’il a éventuellement menées avec les parties en cause.
« L’opérateur notifie ce rapport au syndic, au conseil syndical lorsqu’il en est constitué un ainsi qu’au représentant de l’État dans le département.
« IV. – Si l’expertise révèle que des travaux préalables sont nécessaires pour réaliser la constitution d’un syndicat des copropriétaires secondaire ou les divisions prévues au présent article, le juge peut autoriser l’opérateur à les réaliser.
« Si la division en volumes s’avère nécessaire, le rapport de l’expert établit que l’immeuble ou l’ensemble immobilier peut être scindé en volumes sans parties communes indivises et fonctionnant de façon autonome.
« V. – Lorsqu’il résulte du rapport de l’expert que la division nécessaire à la réussite des objectifs poursuivis par l’opération en cours générerait un partage inégal des parties communes du syndicat des copropriétaires initial entre les syndicats créés, l’opérateur notifie aux copropriétaires lésés une offre d’indemnité dans les conditions et selon les règles prévues au code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.
« VI. – Au vu des conclusions du rapport de l’expert, et ayant fait le constat que les conditions requises pour l’engagement de la procédure prévue au présent article sont remplies, le juge peut prononcer aux conditions qu’il fixe :
« 1° Soit la constitution d’un ou de plusieurs syndicats secondaires ;
« 2° Soit la division du syndicat.
« Il désigne, pour chaque syndicat des copropriétaires issu des divisions prévues au présent article ou pour chaque syndicat secondaire constitué en application du présent article, la personne chargée de convoquer l’assemblée générale en vue de la désignation d’un syndic.
« Il homologue les nouveaux règlements de copropriété et les états descriptifs de division des syndicats issus de la division ou les modifications du règlement de copropriété résultant de la constitution d’un syndicat secondaire.
« S’il y a lieu, il ordonne la création d’une union ou d’une association syndicale libre des syndicats issus de la division, en vue de la création, de la gestion et de l’entretien des éléments d’équipements communs qui ne peuvent être divisés.
« En cas de désaccord des parties sur le montant de l’indemnité prévue au V, il fixe l’indemnité comme en matière d’expropriation pour cause d’utilité publique.
« La division emporte la dissolution du syndicat initial au jour de son prononcé par le juge.
« Art. L. 741-4. – I. – Lorsqu’un immeuble soumis au statut de la copropriété des immeubles bâtis est inclus dans le périmètre d’une opération de requalification des copropriétés dégradées régie par les articles L. 741-1 ou L. 741-2 et que l’inclusion de l’immeuble dans le périmètre d’une association syndicale libre régie par l’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires ainsi que, le cas échéant, par le chapitre II du titre II du livre III du code de l’urbanisme engendre des difficultés de gestion, de fonctionnement normal ou financières ou des complexités juridiques qui font obstacle à la poursuite de l’opération, l’opérateur peut saisir le juge afin qu’il en fasse le constat et qu’il désigne un expert chargé de déterminer les conditions matérielles, juridiques et financières de la distraction de l’immeuble ou, lorsque l’opération porte sur un ou plusieurs immeubles représentant une part majoritaire du périmètre de l’association, de la dissolution de l’association. L’opérateur notifie ce rapport aux membres de l’association syndicale.
« II. – Au vu des conclusions du rapport de l’expert, et ayant fait le constat que les conditions requises pour l’engagement de la procédure prévue au présent article sont remplies, le juge peut prononcer aux conditions qu’il fixe :
« 1° Soit la distraction de l’immeuble ;
« 2° Soit la dissolution de l’association syndicale.
« III. – En cas de dissolution, les conditions de la dévolution du passif et de l’actif sont déterminées soit par les statuts du syndicat, soit, à défaut, par un liquidateur nommé par le juge. Elles doivent tenir compte des droits des tiers. Dans le cas de la dissolution comme dans celui de la distraction, les propriétaires membres de l’association sont redevables de leur quote-part des dettes de l’association contractées durant leur période d’adhésion jusqu’à leur extinction totale.
« IV. – En cas de distraction, les éventuels frais relatifs à la modification des statuts ou de tout acte nécessaire pour constater les conséquences de cette distraction sont à la charge de l’opérateur. »
Article 11
I. – Le titre II du livre V du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique est ainsi modifié :
1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Procédure de prise de possession anticipée » ;
2° À l’intitulé du chapitre Ier, après le mot : « Travaux », sont insérés les mots : « d’extrême urgence » ;
3° Le second alinéa de l’article L. 522-1 est supprimé ;
4° Il est ajouté un chapitre III ainsi rédigé :
« CHAPITRE III
« Opérations de requalification des copropriétés dégradées
« Art. L. 523-1. – Dans le périmètre d’une opération de requalification des copropriétés dégradées mise en place en application des articles L. 741-1 ou L. 741-2 du code de la construction et de l’habitation, l’État peut, par décret pris sur avis conforme du Conseil d’État, autoriser la prise de possession anticipée de tout ou partie d’un ou de plusieurs immeubles dégradés ou dangereux dont l’acquisition est prévue pour la réalisation d’une opération d’aménagement déclarée d’utilité publique, dès lors que des risques sérieux pour la sécurité des personnes rendent nécessaire ladite prise de possession et qu’un plan de relogement des occupants a été établi.
« Art. L. 523-2. – La prise de possession a lieu dans les conditions prévues au chapitre Ier du présent titre, sous réserve des articles L. 522-3, L. 522-4 et L. 523-3 à L. 523-7.
« Art. L. 523-3. – Par dérogation à l’article L. 521-2, l’accès à l’immeuble des agents du maître de l’ouvrage peut être autorisé par un arrêté du représentant de l’État dans le département indiquant le nom de la commune, la dénomination de l’opération de requalification des copropriétés dégradées et des syndicats de copropriétaires concernés, le numéro des parcelles d’assise des bâtiments dégradés et, le cas échéant, le numéro des lots de copropriété faisant l’objet de la prise de possession ainsi que le nom de leurs propriétaires.
« Un plan désignant les bâtiments ou les parties de bâtiments concernés est annexé à l’arrêté.
« L’arrêté est notifié par le représentant de l’État dans le département au bénéficiaire de la déclaration d’utilité publique et au maire de la commune dans laquelle sont situés les immeubles ou les droits réels immobiliers. Le bénéficiaire de la déclaration d’utilité publique est chargé de la notification aux syndicats de copropriétaires, aux copropriétaires et aux occupants connus. Les modalités d’affichage et de notification de cet arrêté ainsi que les conditions dans lesquelles il est procédé à l’état des lieux et de leur occupation sont précisées par décret en Conseil d’État. Les frais relatifs à l’état des lieux et de l’occupation peuvent être mis à la charge du bénéficiaire de la déclaration d’utilité publique.
« Art. L. 523-4. – Par dérogation à l’article L. 314-7 du code de l’urbanisme, le délai dans lequel l’occupant doit faire connaître son acceptation ou son refus de l’offre de relogement qui lui est due en application de l’article L. 423-2 du présent code est d’un mois, faute de quoi il est réputé l’avoir acceptée.
« Art. L. 523-5. – Lorsque des risques pour la sécurité des personnes rendent nécessaires des travaux qui requièrent l’éviction provisoire ou définitive des occupants des logements, ces occupants sont relogés dans les conditions prévues aux articles L. 314-2 ou L. 314-3 du code de l’urbanisme.
« Art. L. 523-6. – L’article L. 521-7 n’est pas applicable aux opérations de requalification des copropriétés dégradées.
« Art. L. 523-7. – Si la prise de possession intervient avant le transfert de propriété, les droits de jouissance et les baux relatifs aux immeubles ou aux droits réels immobiliers libérés en application de la procédure prévue au présent chapitre sont éteints de plein droit à compter du relogement ou du départ volontaire définitif des occupants. »
II. – Le deuxième alinéa de l’article L. 741-1 du code de la construction et de l’habitation est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elles peuvent inclure des monopropriétés. »
Article 12
I. – Le chapitre unique du titre Ier du livre V du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique est ainsi modifié :
1° Le 1° de l’article L. 511-1 et le premier alinéa de l’article L. 511-2 sont complétés par les mots : « ou d’utiliser » ;
2° Au 2° de l’article L. 511-1, après le mot : « habitation », sont insérés les mots : « ou à l’utilisation » ;
3° À l’article L. 511-6, après la première occurrence du mot : « habitation », sont insérés les mots : « ou à l’utilisation ».
II. – L’article L. 511-11 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° L’avant-dernier alinéa est ainsi modifié :
a) Après le mot : « habiter », sont insérés les mots : « ou d’utiliser » ;
b) Les mots : « travaux nécessaires à cette résorption seraient plus coûteux que la » sont remplacés par les mots : « mesures et travaux nécessaires à une remise en état du bien aux normes de salubrité, de sécurité et de décence seraient plus coûteux que sa » ;
2° Le dernier alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après les mots : « dès lors qu’il est sécurisé et ne constitue pas un danger pour la santé ou la sécurité des tiers, » sont supprimés et les mots : « n’est plus » sont remplacés par le mot : « reste » ;
b) À la deuxième phrase, après le mot : « personne, », sont insérés les mots : « les mesures prescrites et ».
II bis. – Au premier alinéa du I de l’article L. 511-15 du code de la construction et de l’habitation, les mots : « et sauf dans le cas mentionné à la première phrase du dernier alinéa de l’article L. 511-11 » sont supprimés.
III. – (Supprimé)
Article 12 bis A
Après l’article L. 151-35 du code de l’urbanisme, il est inséré un article L. 151-35-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 151-35-1. – Nonobstant toute disposition du plan local d’urbanisme, il ne peut être exigé la réalisation de plus d’une aire de stationnement par logement pour une opération de transformation ou d’amélioration d’immeubles faisant l’objet d’un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l’insalubrité pris en application des articles L. 511-11 ou L. 511-19 du code de la construction et de l’habitation ou inclus dans un îlot ou dans un ensemble cohérent d’îlots comprenant un tel immeuble, dès lors que ladite opération a pour objet de faire cesser la situation ayant motivé la prise de l’arrêté. »
Article 12 bis
L’article L. 511-8 du code de la construction et de l’habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les situations d’insécurité mentionnées au 2°, lorsqu’elles concernent le risque incendie, et au 3° de l’article L. 511-2 peuvent être constatées par un rapport des services départementaux d’incendie et de secours remis aux autorités compétentes mentionnées à l’article L. 511-4. »
Article 12 ter
Aux deuxième et troisième alinéas du I de l’article L. 521-2 du code de la construction et de l’habitation, le mot : « logement » est remplacé par les mots : « local ou de l’installation, qu’il ou elle soit à usage d’habitation, professionnel ou commercial ».
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Article 13 bis
(Supprimé)
Article 14
I. – Le code de l’expropriation pour cause d’utilité publique est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 122-1-1, après la première occurrence du mot : « publique », sont insérés les mots : « d’un projet situé dans le périmètre d’une opération d’intérêt national, au sens de l’article L. 102-12 du code de l’urbanisme, ou d’une grande opération d’urbanisme, au sens de l’article L. 312-3 du même code, et répondant aux objectifs de cette opération, » ;
2° Après le premier alinéa de l’article L. 522-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l’exécution des travaux de projets compris dans le périmètre d’une opération d’intérêt national mentionnée à l’article L. 102-12 du code de l’urbanisme ou d’une grande opération d’urbanisme mentionnée à l’article L. 312-3 du même code risque d’être retardée par des difficultés tenant à la prise de possession d’un ou de plusieurs immeubles bâtis ou non bâtis dont l’acquisition est nécessaire à la réalisation de cette opération, et que, pour les immeubles bâtis à usage d’habitation, un projet de plan de relogement a été établi, un décret pris sur avis conforme du Conseil d’État peut, à titre exceptionnel, en autoriser la prise de possession. »
II. – Le chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Le I de l’article L. 123-2 est ainsi modifié :
a) Le 1° est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« – des projets qui sont situés dans le périmètre d’une opération d’intérêt national, au sens de l’article L. 102-12 du code de l’urbanisme, ou d’une grande opération d’urbanisme, au sens de l’article L. 312-3 du même code, et qui répondent aux objectifs de cette opération, lorsqu’une participation du public par voie électronique est organisée en application de l’article L. 123-19-11 du présent code ; »
b) Le 2° est complété par une phrase ainsi rédigée : « Toutefois, lorsqu’une évolution de plan ou de programme est nécessaire pour permettre la réalisation d’un projet qui est situé dans le périmètre d’une opération d’intérêt national ou d’une grande opération d’urbanisme et qui répond aux objectifs de cette opération, cette enquête publique peut être remplacée par une procédure de participation du public par voie électronique en application de l’article L. 123-19-11 ; »
2° La section 5 devient la section 6 et l’article L. 123-19-11 devient l’article L. 123-19-12 ;
3° La section 5 est ainsi rétablie :
« Section 5
« Dispositions particulières aux opérations d’intérêt national et aux grandes opérations d’urbanisme
« Art. L. 123-19-11. – Lorsqu’un projet situé dans le périmètre d’une opération d’intérêt national, au sens de l’article L. 102-12 du code de l’urbanisme, ou d’une grande opération d’urbanisme, au sens de l’article L. 312-3 du même code, et répondant aux objectifs de cette opération ou toute évolution de plan ou de programme rendue nécessaire pour en permettre la réalisation doit faire l’objet d’une enquête publique soumise aux prescriptions du chapitre III du titre II du livre Ier du présent code ou de la procédure de consultation du public prévue à l’article L. 181-10-1, il peut être procédé, par dérogation, à une participation du public par voie électronique dans les conditions définies à l’article L. 123-19.
« Lorsque la réalisation d’un projet ou l’évolution d’un plan ou d’un programme mentionné au premier alinéa du présent article est soumise à l’organisation de plusieurs participations par voie électronique, il peut être procédé à une participation par voie électronique unique ; les autorités compétentes pour prendre la décision s’accordent sur celle qui sera chargée d’ouvrir et d’organiser cette participation. À défaut d’accord, sur la demande du maître d’ouvrage ou de la personne publique responsable, le représentant de l’État, lorsqu’il est compétent pour prendre l’une des décisions d’autorisation ou d’approbation envisagées, peut ouvrir et organiser la participation par voie électronique.
« Dans les mêmes conditions, il peut également être procédé à une participation par voie électronique unique lorsque les participations par voie électronique concernant plusieurs projets ou évolutions de plans ou de programmes peuvent être organisées simultanément et que l’organisation d’une telle participation par voie électronique contribue à améliorer l’information et la participation du public.
« Pour permettre la réalisation d’un projet mentionné au premier alinéa du présent article, lorsqu’il est recouru à une déclaration emportant une mise en compatibilité d’un document de planification ou d’urbanisme ou à une procédure intégrée prévue à l’article L. 300-6-1 du code de l’urbanisme, la participation du public par voie électronique doit porter à la fois sur l’intérêt général de l’opération et sur la mise en compatibilité qui en est la conséquence.
« Le présent article n’est pas applicable à l’enquête préalable à la déclaration d’utilité publique mentionnée au second alinéa de l’article L. 110-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique. »
III. – L’article L. 102-13 du code de l’urbanisme est complété par des 10° et 11° ainsi rédigés :
« 10° La prise de possession d’un ou de plusieurs immeubles bâtis ou non bâtis dont l’acquisition est nécessaire à l’opération peut être autorisée dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article L. 522-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ;
« 11° Les projets répondant aux objectifs de l’opération et les évolutions de plan ou de programme nécessaires pour en permettre la réalisation peuvent faire l’objet de la procédure de participation du public par voie électronique prévue à l’article L. 123-19 du code de l’environnement dans les conditions définies à l’article L. 123-19-11 du même code. »
IV. – Le I de l’article L. 300-6-1 du code de l’urbanisme est complété par des 5° et 6° ainsi rédigés :
« 5° La réalisation d’une opération d’intérêt national prévue à l’article L. 102-12 du présent code ;
« 6° La réalisation d’une opération de requalification des copropriétés dégradées prévue aux articles L. 741-1 et L. 741-2 du code de la construction et de l’habitation. »
IV bis. – L’article L. 312-5 du code de l’urbanisme est complété par des 6° et 7° ainsi rédigés :
« 6° La prise de possession d’un ou de plusieurs immeubles bâtis ou non bâtis dont l’acquisition est nécessaire à l’opération peut être autorisée dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article L. 522-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique ;
« 7° Les projets répondant aux objectifs de l’opération et les évolutions de plan ou programme nécessaires pour en permettre la réalisation peuvent faire l’objet d’une procédure de participation du public par voie électronique prévue à l’article L. 123-19 du code de l’environnement dans les conditions définies à l’article L. 123-19-11 du même code. »
V. – La seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 741-2 du code de la construction et de l’habitation est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « Le décret en Conseil d’État est pris après avis du représentant de l’État dans la région et après consultation de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre compétent en matière d’opérations d’aménagement ou de la métropole de Lyon, des communes, des départements et des régions dont le territoire est inclus en tout ou partie dans le périmètre de l’opération ainsi que, le cas échéant, des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d’habitat concernés. L’avis intervient dans un délai de trois mois à compter de la saisine et est réputé favorable s’il n’est pas intervenu à l’expiration de ce délai. »
VI. – L’article L. 123-19-11 du code de l’environnement, dans sa rédaction résultant du II du présent article, s’applique aux procédures engagées après la publication de la présente loi.
VII. – Dans les périmètres des opérations d’intérêt national mentionnées au X de l’article 44 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, jusqu’à la date fixée par le décret mentionné au même X, le second alinéa du VI de l’article L. 5216-5 du code général des collectivités territoriales n’est pas applicable aux fonds de concours octroyés par une communauté d’agglomération résultant de la transformation d’un ancien syndicat d’agglomération nouvelle pour la réalisation ou le fonctionnement d’équipements rendus nécessaires par les opérations de construction ou d’aménagement.
Article 14 bis
I. – À l’article 750 bis C du code général des impôts, l’année : « 2028 » est remplacée par l’année : « 2038 ».
II. – La loi n° 2018-1244 du 27 décembre 2018 visant à faciliter la sortie de l’indivision successorale et à relancer la politique du logement en outre-mer est ainsi modifiée :
1° A Après le III de l’article 1er, il est inséré un III bis ainsi rédigé :
« III bis. – Pour l’appréciation de l’atteinte du seuil de la moitié des droits indivis mentionné aux I et III, un acte de notoriété peut être dressé selon les modalités fixées aux articles 730-1 à 730-5 du code civil, à la demande d’un ou plusieurs indivisaires, contenant l’affirmation qu’ils sont, seuls ou avec d’autres qu’ils désignent, propriétaires indivis du bien, et dans quelles proportions. » ;
1° À la fin du IV du même article 1er, l’année : « 2028 » est remplacée par l’année : « 2038 » ;
2° Le premier alinéa de l’article 2 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « indivisaires », sont insérés les mots : « qui ne sont pas à l’initiative du projet » ;
b) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Il remet le projet en mains propres contre récépissé aux indivisaires qui sont à l’initiative du projet. » ;
2° bis Après le même article 2, il est inséré un article 2-1 ainsi rédigé :
« Art. 2-1. – Pour l’application dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon de l’article 827 du code civil, le partage judiciaire des successions ouvertes depuis plus de dix ans peut également se faire par souche dès lors que la masse partageable comprend des biens immobiliers dépendant de plusieurs successions et lorsque ces biens :
« 1° Ne peuvent être facilement partagés ou attribués en nature compte tenu du nombre important d’indivisaires ;
« 2° Ne peuvent être facilement partagés ou attribués par tête compte tenu de la complexité manifeste à identifier, localiser ou mettre en cause l’ensemble des indivisaires dans un délai et à un coût raisonnables.
« Dans le cas mentionné au 2° du présent article, la demande de partage par souche doit faire l’objet d’une publicité collective ainsi que d’une information individuelle s’agissant des indivisaires identifiés et localisés dans le temps de la procédure. Toute personne intéressée dispose d’un délai d’un an à compter de l’accomplissement de la dernière des mesures de publicité ou d’information pour intervenir volontairement à l’instance. À l’expiration de ce délai, les interventions volontaires restent possibles si l’intervenant justifie d’un motif légitime, apprécié par le juge, l’ayant empêché d’agir. Le partage par souche pourra avoir lieu si au moins un indivisaire par souche est partie à l’instance. Tous les membres d’une même souche sont considérés comme représentés dans la cause par ceux qui auront été parties à l’instance, sauf s’il est établi que leur défaillance n’est pas de leur fait ou qu’elle est due à une omission volontaire du requérant.
« Le présent article s’applique aux demandes en partage introduites avant le 31 décembre 2038 et postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi n° … du … relative à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement pour le cas mentionné au 1° du présent article ou postérieurement à l’entrée en vigueur des dispositions réglementaires nécessaires à l’application du cas mentionné au 2°. » ;
3° À la première phrase du premier alinéa de l’article 5, le mot : « judiciaire » et les mots : « soit en nature, soit » sont supprimés ;
4° Il est ajouté un article 7 ainsi rédigé :
« Art. 7. – Dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution et dans les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon, par dérogation à l’article 47 de la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006 portant réforme des successions et des libéralités, les articles 771 à 775 du code civil sont applicables, dès l’entrée en vigueur de la loi n° … du … relative à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement, aux successions ouvertes avant le 1er janvier 2007 et non encore partagées à cette date. »
III. – Dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin :
1° Par dérogation à l’article 2272 du code civil, le délai pour acquérir la propriété immobilière est de dix ans, à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi et jusqu’au 31 décembre 2038 ;
2° Par dérogation à l’article 2261 du code civil, la possession par un indivisaire d’un immeuble dépendant d’une succession ouverte avant l’entrée en vigueur de la présente loi et non partagée à cette date est réputée non équivoque à l’égard de ses co-indivisaires, y compris durant la période de possession antérieure à l’entrée en vigueur de la présente loi.
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Chapitre III
Mesures diverses
Article 15
I. – Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° Au 1° de l’article L. 511-2, le mot : « et » est remplacé par le mot : « ou » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 511-17, après la référence : « L. 511-15, », sont insérés les mots : « et, le cas échéant, la rémunération de l’expert nommé par la juridiction administrative en application de l’article L. 511-9, » ;
3° Au 2° du III de l’article L. 511-22, les mots : « interdiction d’habiter » sont remplacés par les mots : « prescription de cessation de mise à disposition du local ou de l’installation à des fins d’habitation ou une interdiction d’habiter, d’utiliser » ;
3° bis Au dernier alinéa de l’article L. 521-1, les mots : « de péril » sont remplacés par les mots : « d’insécurité » ;
3° ter L’article L. 521-2 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du II, les mots : « d’insalubrité ou de péril » sont remplacés par les mots : « de traitement de l’insalubrité ou de mise en sécurité » ;
b) Le III est ainsi modifié :
– à la fin du premier alinéa, les mots : « la déclaration d’insalubrité ou l’arrêté de péril » sont remplacés par les mots : « l’arrêté de traitement de l’insalubrité ou de mise en sécurité » ;
– au début du deuxième alinéa, les mots : « Une déclaration d’insalubrité, un arrêté de péril » sont remplacés par les mots : « Un arrêté de traitement de l’insalubrité, un arrêté de mise en sécurité » ;
3° quater Au début du III de l’article L. 521-3-2, les mots : « Lorsque la déclaration » sont remplacés par les mots : « Lorsqu’un arrêté de traitement de » ;
4° Au premier alinéa du I de l’article L. 551-1, la référence : « III » est remplacée par les mots : « IV et au V ».
II. – Au premier alinéa de l’article 434-41 du code pénal, la référence : « III » est remplacée par la référence : « IV ».
Article 15 bis
I. – La loi n° 2011-725 du 23 juin 2011 portant dispositions particulières relatives aux quartiers d’habitat informel et à la lutte contre l’habitat indigne dans les départements et régions d’outre-mer est ainsi modifiée :
1° Le II de l’article 9 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« II. – L’arrêté du représentant de l’État dans le département est pris sur le rapport de l’agence régionale de santé ou, par application du dernier alinéa de l’article L. 1422-1 du code de la santé publique, du service communal d’hygiène et de santé et après délibération du conseil municipal ou, le cas échéant, de l’organe délibérant de l’établissement public compétent portant sur le projet d’aménagement et d’assainissement mentionné au premier alinéa du I du présent article. Préalablement à son édiction, le représentant de l’État dans le département peut consulter la commission départementale compétente en matière d’environnement, de risques sanitaires et technologiques, à laquelle le maire ou, le cas échéant, le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat est invité à présenter ses observations. » ;
b) Après le mot : « bail », la fin du troisième alinéa est ainsi rédigée : « des motifs qui le conduisent à envisager de mettre en œuvre la police de traitement de l’insalubrité, des mesures qu’il compte prendre ainsi que de la faculté qu’ils ont de présenter leurs observations dans un délai qui ne peut être inférieur à un mois. Lorsqu’il consulte la commission mentionnée au premier alinéa du présent II, il avise également les personnes mentionnées au présent alinéa de la date de réunion de la commission et de la faculté qu’elles ont d’y être entendues, à leur demande. » ;
c) Au début du dernier alinéa, les mots : « Cet avis » sont remplacés par les mots : « L’avis mentionné au premier alinéa du présent II » ;
1° bis Au VII du même article 9, les mots : « 13, 14, 15, 17 et 19 de la loi n° 70-612 du 10 juillet 1970 tendant à faciliter la suppression de l’habitat insalubre » sont remplacés par les mots : « L. 511-1, L. 511-2, L. 511-3, L. 511-4 et L. 511-9 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique » ;
2° Le premier alinéa du II de l’article 10 est ainsi modifié :
a) Au début de la première phrase, les mots : « L’arrêté du représentant de l’État dans le département est pris après avis de » sont remplacés par les mots : « Préalablement à l’édiction de son arrêté, le représentant de l’État dans le département peut consulter » ;
b) Les deuxième et troisième phrases sont remplacées par trois phrases ainsi rédigées : « Le propriétaire du terrain, tel qu’il apparaît au fichier immobilier, la personne qui a mis les locaux concernés à disposition aux fins d’habitation et les occupants sont avisés des motifs qui conduisent le représentant de l’État dans le département à envisager de mettre en œuvre la police de traitement de l’insalubrité, des mesures qu’il compte prendre et de la faculté qu’ils ont de présenter leurs observations dans un délai qui ne peut être inférieur à un mois. Lorsqu’il consulte la commission mentionnée au présent alinéa, il avise également les personnes mentionnées au présent alinéa de la date de réunion de la commission et de la faculté qu’elles ont d’y être entendues, à leur demande. Cet avis est effectué aux personnes mentionnées au présent alinéa, soit personnellement, soit, à défaut de connaître leur adresse actuelle ou de pouvoir les identifier, par affichage à la mairie de la commune ainsi que sur la façade du bâtiment concerné. »
II. – Le premier alinéa de l’article L. 1416-1 du code de la santé publique est complété par les mots : « et des articles 9 et 10 de la loi n° 2011-725 du 23 juin 2011 portant dispositions particulières relatives aux quartiers d’habitat informel et à la lutte contre l’habitat indigne dans les départements et régions d’outre-mer ».
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Article 18
Le deuxième alinéa de l’article L. 256-3 du code de la construction et de l’habitation est complété par une phrase ainsi rédigée : « Peuvent également être opérateurs les organismes mentionnés à l’article L. 411-2 du présent code ou leurs filiales créées en application du 19° de l’article L. 421-1, du soixante-sixième alinéa de l’article L. 422-2 et du vingt-huitième alinéa de l’article L. 422-3. »
Article 19
Le 8° de l’article L. 421-4, le quarante-deuxième alinéa de l’article L. 422-2 et le quarante et unième alinéa de l’article L. 422-3 du code de la construction et de l’habitation sont complétés par les mots : « ou se rapportent à un bail réel solidaire d’activité ».
Article 20
Le 9° de l’article L. 421-4, le quarante-troisième alinéa de l’article L. 422-2 et le quarante-deuxième alinéa de l’article L. 422-3 du code de la construction et de l’habitation sont complétés par les mots : « ainsi que pour conclure des baux réels solidaires d’activité définis à l’article L. 256-1 ».
M. le président. Nous allons maintenant examiner l’amendement déposé par le Gouvernement.
article 8 bis
M. le président. L’amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Remplacer les mots :
troisième alinéa
par les mots :
sixième alinéa
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Guillaume Kasbarian, ministre délégué. Il s’agit d’un amendement de coordination juridique adopté la semaine dernière par l’Assemblée nationale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Amel Gacquerre, rapporteure. Favorable.
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je vais donner la parole, pour explication de vote, à un représentant par groupe.
La parole est à Mme Marianne Margaté, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Mme Marianne Margaté. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, l’accélération et la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé a trouvé de nombreux soutiens dans cet hémicycle, mais également à l’Assemblée nationale, ce dont notre groupe se réjouit.
Il aurait été plus réjouissant encore que, à côté de l’accélération et de la simplification, le Gouvernement ajoute un volet financement qui aurait permis d’aller plus loin en vue de véritablement résoudre la situation des occupants des plus de 1,5 million de logements relevant d’une copropriété en difficulté.
Nous espérons que ce texte répondra au mal-logement dans les centres urbains, mais aussi dans leurs banlieues et les zones périurbaines, où les copropriétés sont soumises à des difficultés similaires, qui sont déjà bien ancrées. Tout notre territoire semble concerné par des poches de mal-logement plus ou moins étendues. Tous types de logements confondus, plus de 12 millions de personnes sont fragilisées par la crise du logement. Il s’agit d’une véritable bombe sociale.
Le montant total des travaux nécessaires pour rénover l’habitat dégradé, prévenir la fragilisation de nouvelles copropriétés et tenir les objectifs de rénovation énergétique serait d’au moins 9 milliards d’euros. Cette somme paraît inaccessible sans intervention publique, dans un contexte d’inflation galopante et de perte de pouvoir d’achat qui n’épargne personne au sein des classes moyennes et populaires, ni les propriétaires ni les locataires.
Les procédures sont simplifiées, mais quelle collectivité aura les moyens de les déclencher ? Des prêts collectifs sont créés, mais quelle copropriété aura les moyens d’emprunter ? Pour les collectivités, nous facilitons les interventions des agents assermentés et étendons la possibilité de recourir au permis de louer, mais où sont les agents publics qui mèneront à bien ces nouvelles missions ? Nous facilitons les expropriations, mais comment assurerons-nous le paiement exigé par la loi ?
L’obligation de résultat qui incombe aux administrations publiques est confrontée aux coupes budgétaires imposées par le Gouvernement. Comme d’autres avant elle, à défaut de financement, cette loi restera une bétonnière qui attend son ciment.
Par ailleurs, les syndics doivent être mieux provisionnés et ils doivent mieux accomplir leur mission d’accompagnement, en toute transparence, pour qu’une confiance réciproque se noue avec les copropriétaires.
De plus, les copropriétaires doivent être en mesure d’assumer les appels de charge, qui sont de plus en plus difficiles à suivre dans ce contexte où tout est toujours plus cher. Cela ne se décrète pas. Un soutien doit leur être apporté pour compenser les manques et des interventions plus rapides doivent être menées pour mieux prévenir les risques.
Ces situations insupportables pour celles et pour ceux qui vivent dans un logement indigne ou dans une copropriété dégradée ne doivent laisser personne indifférent. Pour notre part, nous soutenons les 2,4 millions de demandeurs d’un logement social qui attendent une réponse positive. Nous soutenons les locataires qui paient des loyers exorbitants dans le parc privé et qui sacrifient d’autres dépenses pour éviter l’expulsion, que le Gouvernement et la majorité sénatoriale ont facilitée.
De même, nous soutenons particulièrement les propriétaires occupants, dont 200 000 vivent dans une copropriété dégradée. Je veux le dire clairement : ce n’est pas parce que certains de nos concitoyens choisissent d’acheter leur logement qu’il faut les considérer comme les seuls responsables de leur situation de mal-logement et les abandonner.
À cet égard, ce projet de loi comporte des signes plutôt positifs. À tout le moins, il ouvre la voie à des dispositifs dont il convient désormais de garantir le bon fonctionnement, afin d’assurer à chacun le droit à un logement digne.
Enfin, je souligne le fait que nous renforçons la fermeté à l’égard des marchands de sommeil, même si le chemin est encore long. Personne ne devrait pouvoir s’enrichir sur la misère des autres. Là encore, il conviendra de donner à la justice les moyens de condamner les coupables et de protéger les victimes.
Comme je l’ai souligné, ce texte comporte des manques. Toutefois, pour toutes les améliorations qu’il apporte au droit existant, mon groupe votera pour son adoption, d’autant que je crains qu’il s’agisse, hélas, du dernier texte sur le logement que nous examinerons d’ici à la fin de ce quinquennat.
Monsieur le ministre, j’achèverai mon intervention avec une certaine solennité. Bien qu’il ne soit pas parfait, ce projet de loi répond à un objectif primordial : améliorer le droit au logement. Que comptez-vous améliorer en attaquant la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) et en réduisant le taux obligatoire de logements sociaux ?
Mme Marianne Margaté. Qu’améliorerez-vous en supprimant les aides personnalisées au logement (APL) sans plafonner les loyers ?
Aujourd’hui, nous voterons en faveur de ce texte, qui aidera les copropriétaires en difficulté, mais demain – comme hier –, nous ne soutiendrons aucune politique de régression du droit au logement.
Pour conclure, je remercie la rapporteure de la qualité de son travail et du partenariat qu’elle a su nouer lors de l’examen de ce projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Ahmed Laouedj, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Ahmed Laouedj. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, tout en appelant à un choc d’offre, le Premier ministre a rappelé que pour répondre à l’urgence de la crise du logement, il convenait d’activer à la fois le levier de l’offre et celui de la demande.
Pour autant, le compte n’y est pas. L’année 2023 a été marquée par l’aggravation alarmante de cette crise et par l’explosion de la bombe sociale du logement. Quant à l’année 2024, elle débute d’une façon très inquiétante. La volonté de Gabriel Attal d’intégrer les logements intermédiaires au décompte de la loi SRU revient à détricoter cette dernière, qui est pourtant emblématique de l’ambition républicaine de mixité sociale.
Force est de constater que la plupart des politiques de soutien successives ont eu pour effet collatéral de faire grimper les prix. Un cercle vicieux s’est formé, difficile à briser : les 200 000 places d’hébergement d’urgence sont saturées ; les demandes de logements sociaux ont atteint le chiffre record de 2,6 millions, tandis que leur production s’effondre ; la construction de logements neufs a ralenti, cependant que la location touristique s’est amplifiée et que les taux d’intérêt ont augmenté.
Ce n’est d’ailleurs pas en révisant les critères du diagnostic de performance énergétique afin de remettre 140 000 passoires thermiques sur le marché locatif que l’on résoudra une crise dont les fondations sont aussi complexes que multifactorielles.
Monsieur le ministre, comment se fait-il que, pour répondre à la crise agricole comme à celle du logement, le Gouvernement fasse de la nécessaire transition écologique la principale victime de son action ? Ces politiques court-termistes de la rustine ne peuvent pas, et ne doivent pas, être acceptables sur le long terme.
Aujourd’hui, néanmoins, nous sommes réunis pour traiter l’une des problématiques récurrentes du mal-logement : l’habitat dégradé et indigne.
Lors de mon intervention durant le premier examen de ce projet de loi en séance publique, j’avais rappelé que 40 % des Français habitaient dans un immeuble collectif. La qualité de cet habitat doit donc devenir une priorité de notre action politique, puisque l’habitat dégradé est un phénomène silencieux et massif encore largement méconnu, qui ne concerne pas seulement quelques villes pauvres ou quelques quartiers prioritaires.
Il s’agit non seulement d’un stock de logements à réhabiliter, mais d’un flux qui se renouvelle : de nouveaux logements se dégradent tout en restant habités, parce que d’autres logements abordables manquent et que les personnes exclues sont toujours plus nombreuses.
Pourtant, depuis trente ans, de nombreuses lois relatives à l’habitat dégradé ont été votées. De nouveaux outils ont été institués, mais ils demeurent parfois mal connus, et leur utilisation est rendue de plus en plus complexe du fait de leur cumul.
Ce projet de loi est présenté comme une boîte à outils permettant d’améliorer et de compléter les mécanismes déjà existants. Il poursuivrait une philosophie selon laquelle il faut anticiper, simplifier et raccourcir les délais.
Toutefois, ce texte dont l’objectif est d’améliorer l’efficacité et la rapidité de l’action publique dans la lutte contre l’habitat indigne et dégradé ne constitue pas la grande loi logement que l’on attend. Il s’agit plutôt d’un rendez-vous manqué, que le Gouvernement a reporté au mois de juin prochain. Je l’affirme, nous serons plus qu’attentifs à ce que ce rendez-vous soit honoré.
Néanmoins, nous devons nous retrouver sur l’essentiel, c’est-à-dire sur le fait d’apporter des outils aux maires et de proposer des solutions aux victimes de l’habitat indigne.
En ce sens, le groupe RDSE ne peut que se féliciter des moyens supplémentaires donnés aux maires pour prévenir la dégradation de l’habitat, ainsi que du renforcement de la lutte contre les marchands de sommeil. Je pense notamment au diagnostic structurel de l’immeuble collectif, réalisé tous les dix ans, qui permettra d’anticiper des désordres irrémédiables. Il a été étendu non seulement à l’habitat dégradé, notion dont la définition complexe ne couvre pas toutes les situations, mais aussi aux centres anciens.
De même, je salue le retour de la commune comme échelon de droit commun pour l’instruction du permis de louer, ainsi que la possibilité de mettre gratuitement à la disposition des communes les biens confisqués aux marchands de sommeil pour y réaliser des logements.
Néanmoins, mon groupe regrette que la commission mixte paritaire n’ait pas jugé pertinent de conserver toutes les dispositions introduites en séance publique sur son initiative : d’une part, nous proposions de rendre conformes à un modèle type les avis d’appels de fonds établis par le syndic et adressés aux copropriétaires ; d’autre part, nous étions convenus d’obliger le syndic à donner sans délai au président du conseil syndical, et ce dès la désignation de ce dernier, un accès numérique aux comptes bancaires de la copropriété, afin de permettre leur consultation. Ces dispositions, prolongeant les travaux du Sénat, nous semblaient importantes afin que les copropriétaires soient mieux informés de leurs droits et puissent agir le plus possible en amont de la dégradation du bâti.
Toutefois, parce que ce projet de loi va dans le bon sens, parce que l’intervention plus précoce des pouvoirs publics est synonyme de moindres coûts et d’une meilleure anticipation des relogements, mon groupe votera unanimement en faveur du texte issu des travaux de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Buis, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
M. Bernard Buis. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l’issue d’une navette parlementaire particulièrement constructive, nous voici désormais à la dernière étape de l’examen de ce projet de loi. Certes, ce texte n’a pas la prétention de résoudre toutes les causes de la crise du secteur du logement. Reconnaissons toutefois qu’il apporte sa pierre à l’édifice de deux chantiers titanesques, la rénovation de l’habitat dégradé et les grandes opérations d’aménagement.
Dès le dépôt du projet de loi, l’ambition était de simplifier le quotidien des acteurs et d’accélérer les procédures en question. À ce stade de nos travaux, je suis convaincu que ces objectifs peuvent être atteints, et ce pour plusieurs raisons.
D’abord, de nouvelles prérogatives sont attribuées aux élus locaux. Grâce à ce projet de loi, ceux-ci disposeront demain de nouvelles attributions bienvenues, qui leur permettront d’intervenir le plus possible en amont de la dégradation du bâti afin d’éviter que des constructions ne soient délaissées. L’objectif est clair : plus de prévention, pour moins de dégradations.
Concrètement, les élus pourront agir en cas d’urgence, par exemple « si les travaux entrepris […] ont produit des installations qui présentent un risque certain pour la sécurité ou pour la santé et lorsque la mise en demeure est restée sans effet », dans le but de faire « procéder d’office à la réalisation des mesures prescrites, aux frais de l’intéressé ».
Trop de nos concitoyens subissent des désagréments liés à l’immobilisme des uns ou à l’irresponsabilité des autres.
Les maires pourront également s’appuyer sur un rapport du service départemental d’incendie et de secours (Sdis) pour motiver leurs arrêtés de mise en sécurité.
Les élus, le préfet ou leurs représentants pourront également participer à l’assemblée générale d’une copropriété, étape qui permet bien souvent de recenser les premiers signes de la dégradation du bâti.
Ces mesures utiles permettent de donner plus d’outils aux acteurs de terrains, qui restent les plus compétents pour prendre ces décisions.
Ensuite, mes chers collègues, si nous voulons accélérer et faciliter la rénovation de l’habitat dégradé, encore faut-il simplifier les rapports entre les syndics et les syndicats de copropriétaires.
Pour cette raison, le groupe RDPI avait défendu plusieurs amendements, qui avaient pour objet de développer davantage la dématérialisation de leurs échanges. Ce point sera demain une réalité, à la faveur du retour de l’article 9 bis. La commission mixte paritaire a en effet rétabli le principe selon lequel les notifications et les mises en demeure faites par voie électronique sont valables, tout en laissant au syndic le soin d’informer les copropriétaires « des moyens qui s’offrent à eux pour conserver un mode d’information par voie postale ».
De plus, il faut bien admettre que les copropriétaires demandent davantage d’accompagnement, notamment en matière de rénovation énergétique. Comme de tels travaux sont en général très onéreux, ils nécessitent la plupart du temps l’octroi d’un prêt.
Grâce à l’article 4 du projet de loi, un nouveau type d’emprunt collectif sera créé pour les copropriétés.
Soulignons là aussi les apports de la commission mixte paritaire, qui accorde au prêteur ainsi qu’à la caution la possibilité de consulter le fichier des incidents de paiement de la Banque de France afin de disposer d’informations complémentaires de celles fournies par le syndic. Encore une fois, l’objectif est clair : avoir une vision complète des capacités financières de la copropriété pour s’assurer de sa pérennité.
Enfin, mes chers collègues, au-delà des objectifs de simplification et d’accélération, l’adoption de ce texte permettra également de renforcer notre lutte contre un fléau qui gâche le quotidien de nombreux Français : celui des marchands de sommeil. En 2024, nous ne pouvons plus tolérer de telles pratiques. Les élus locaux, qui le déplorent également, demandent à être associés.
Par conséquent, je salue à ce titre l’article 23, qui permettra aux collectivités de déterminer elles-mêmes le montant des amendes des infractions liées aux permis de louer, mais également de bénéficier de leur produit.
Parce que nous accordons de nouvelles attributions aux élus locaux, parce que nous accompagnons les copropriétaires dans leurs travaux de rénovation, parce que nous renforçons la lutte contre les marchands de sommeil, nous parviendrons bel et bien avec ce projet de loi à simplifier la rénovation des copropriétés dégradées et à accélérer les grandes opérations d’aménagement.
En attendant le prochain projet de loi relatif au logement, nous avons aujourd’hui, mes chers collègues, l’occasion d’envoyer un message clair aux élus locaux et à nos concitoyens.
Fier du fait que la navette parlementaire ait été constructive, et que la version finale du texte contienne treize de nos amendements, le groupe RDPI votera en faveur de ce projet de loi.
M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Mme Viviane Artigalas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à rappeler que le texte que nous examinons est une bonne loi, nécessaire. Il traduit le besoin d’adapter les outils permettant à la puissance publique et aux maires des villes concernées de lutter contre le phénomène de l’habitat indigne, véritable fléau qui gangrène des immeubles et des quartiers.
Nous saluons le travail préparatoire réalisé par Mathieu Hanotin et Michèle Lutz : leurs propositions nous ont accompagnés efficacement dans le cadre de l’examen de ce texte.
La majeure partie de nos suggestions ont été entendues en commission et en séance publique. À cet égard, je tiens à saluer le travail constructif de la rapporteure Amel Gacquerre, qui a pris en considération les positions exprimées sur toutes les travées de cette assemblée. Ce travail collégial a permis de consolider les outils d’accompagnement et de financement dont disposent les copropriétés en difficulté et les élus, tant en métropole qu’en outre-mer.
Les nouveaux moyens d’action accordés aux maires ont été conservés à l’issue de la commission mixte paritaire.
En premier lieu, les missions de l’ANCT ont été étendues à l’habitat dégradé, afin d’aider les maires qui ne disposent pas d’outils d’intervention dans les petites copropriétés.
Par ailleurs, la consolidation du permis de louer accordée par l’article 2 ter A, adopté lors de l’examen du texte en commission au Sénat, a été maintenue. Il en va de même de l’article 2 quater, qui prévoit un meilleur encadrement du droit de visite du maire pour l’instruction des demandes de permis de louer.
Nos amendements qui avaient pour objet le transfert de la compétence pour le recouvrement des amendes relatives aux permis de louer en direction des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), ainsi que la mise à disposition à titre gratuit des biens saisis et confisqués par l’agence de gestion et de recouvrement auprès des collectivités territoriales, ont également été retenus dans la version finale du texte.
Malgré une réécriture plus restrictive du dispositif lors de la commission mixte paritaire, nous sommes satisfaits du compromis trouvé sur les colocations à baux multiples. En effet, les élus pourront refuser le permis de louer lorsqu’il apparaît que les locaux ne permettent pas d’assurer aux habitants des conditions de vie digne.
Nous avons obtenu une avancée majeure concernant la prévention de l’habitat dégradé, y compris dans le bâti ancien, en permettant aux maires de demander la réalisation d’un diagnostic structurel.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Historique ! (Sourires.)
Mme Viviane Artigalas. Nous sommes très satisfaits que les discussions aient abouti sur ce point, car ces centres historiques, qui ne présentent pas toujours de signes extérieurs de dégradation, nécessitent une vigilance accrue et un outil permettant de détecter ce qui demeure souvent invisible.
Enfin, à l’article 18, nous sommes particulièrement satisfaits que les dispositions défendues par notre groupe aient été maintenues par la commission mixte paritaire. Les organismes HLM pourront être opérateurs dans le cadre d’un bail réel solidaire d’activité (BRSA), conformément aux souhaits des élus et des acteurs du logement social, qui sont attentifs à développer la mixité fonctionnelle et sociale dans leurs communes.
Au sujet des financements, l’emprunt global collectif et l’élargissement du champ du fonds de garantie pour la rénovation énergétique permettront d’engager plus facilement des travaux.
Enfin, la commission mixte paritaire a conservé les mesures adoptées par le Sénat afin de renforcer la protection des occupants. En particulier, refuser d’établir un bail écrit ou de remettre une quittance est désormais sanctionné, et en cas de menaces de la part des propriétaires, les mesures de protection des occupants ont été élargies dès le début de la procédure contradictoire.
Tous les ajouts retenus par le Sénat lors de l’examen du texte en séance publique ont donc été conservés en commission mixte paritaire. Mais au-delà de cette légitime satisfaction, des points de vigilance demeurent.
Nous serons très attentifs à la mise en œuvre du droit d’expropriation pour les immeubles indignes à titre remédiable, car nous craignons que les conditions requises pour l’engager ne rendent cette procédure inopérante.
Nous regrettons qu’ait été rejetée notre demande d’expérimentation qui visait à doter les inspecteurs de salubrité et agents de la police municipale de pouvoirs d’enquête judiciaire en matière d’habitat indigne dans les communes volontaires des six territoires d’accélération.
En ce qui concerne l’installation d’hébergement d’urgence, j’ai rappelé notre opposition non pas au recours à des bâtiments modulaires et déplaçables, mais à la dispense de toute règle d’urbanisme.
Enfin, nous manquons de données précises et objectives sur l’état de l’habitat indigne en France. Le suivi que nous proposions en la matière aurait été gage d’une plus grande transparence et d’une meilleure efficacité. Monsieur le ministre, peut-être pourrez-vous tout de même assurer un tel suivi ?
Compte tenu de toutes les avancées que j’ai rappelées, nous voterons en faveur des conclusions de cette commission mixte paritaire. Toutefois, rappelons que face à une crise du logement qui s’aggrave, sortir de l’habitat indigne impose aussi de disposer d’une offre de logements adaptés aux revenus et aux besoins des Français.
Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain demande donc un moratoire immédiat des ponctions faites sur les bailleurs sociaux et le maintien des obligations au titre de la loi SRU. De plus, nous dénonçons les reculs du Gouvernement en matière de décence et de performance énergétique des logements. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et RDSE. – Mme Antoinette Guhl et M. Pierre Jean Rochette applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Dominique Estrosi Sassone. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me réjouis qu’après le travail approfondi de nos rapporteurs, les deux assemblées se soient entendues pour marquer leur détermination à lutter contre l’habitat dégradé. C’est d’autant plus une satisfaction que, comme l’a souligné Amel Gacquerre, rapporteure de la commission des affaires économiques, l’essentiel des apports du Sénat a été conservé.
Contrairement à bien des textes qui viennent des bureaux parisiens, cette loi vient des demandes des maires et des remontées du terrain. En examinant ce projet de loi, la commission des affaires économiques du Sénat a voulu renforcer son caractère pragmatique et opérationnel.
Pour atteindre l’objectif fixé, notre commission s’est saisie du sujet en amont. Nous avons travaillé avec Mathieu Hanotin et Michèle Lutz, les maires de Saint-Denis et de Mulhouse, nous nous sommes déplacés à Saint-Denis, et nous avons aussi consulté les maires sur la plateforme internet du Sénat pour mieux comprendre leurs attentes, leurs aspirations et leurs besoins.
Tout cela a nourri des évolutions concrètes du texte, notamment les dispositions relatives aux permis de louer et de diviser inspirées de la situation à Grigny 2, ou encore celles relatives au contrôle structurel des bâtiments, inspirées de Mulhouse ou de Lille.
Je suis également satisfaite que nous ayons pu éviter de tomber dans le syndic-bashing. Il aurait été erroné de présenter les syndics comme les responsables de la dégradation des copropriétés, alors que la paupérisation de leurs habitants est la cause première de ce phénomène.
Je crois également, comme les rapporteurs de l’Assemblée nationale l’ont souligné, qu’au moment où leur rôle est central au sujet tant de l’habitat dégradé que de la rénovation thermique, les syndics ont plus besoin d’être confortés dans leurs missions que d’être jetés en pâture d’une éventuelle dérégulation.
Justement, en matière de simplification, ce projet de loi permettra de développer l’usage du numérique entre les syndics et les copropriétaires. C’est une très bonne chose, d’autant que l’équilibre trouvé par la commission mixte paritaire laisse la possibilité à tous ceux qui pourraient rencontrer des difficultés de conserver la voie traditionnelle du papier.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, tous ces motifs de satisfaction – je ne reviendrai pas sur chacun, car Mme la rapporteure les a précisément évoqués – n’éclipsent cependant pas la nécessité d’aller plus loin pour traiter la crise du logement que nous traversons.
Tous et toutes, nous sommes toujours et encore interpellés par nos concitoyens sur le besoin de logements. Monsieur le ministre, je vous l’ai déjà indiqué : toute la France doit devenir un territoire d’accélération et de simplification. Je vous donne donc rendez-vous dans cet hémicycle au mois de mai prochain, pour l’examen – enfin ! – de la proposition de loi sur les meublés de tourisme et les locations saisonnières, puis au mois de juin pour l’examen du projet de loi sur le logement.
Face à la crise, nous aurons la responsabilité de voter des mesures ambitieuses et efficaces pour donner un logement à l’ensemble des Français et pour rééquilibrer le marché locatif. Dans cette attente, le groupe Les Républicains votera bien évidemment ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI. – M. Pierre Jean Rochette applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Joshua Hochart, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
M. Joshua Hochart. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’habitat dégradé et plus largement le logement constituent des problématiques parmi les plus préoccupantes dans notre pays.
La notion d’habitat dégradé désigne généralement des conditions de logement en dessous des normes de salubrité, de sécurité et de décence requises. Ces situations se manifestent souvent dans les quartiers urbains défavorisés, transformés en ghettos, entraînant à tout le moins un sentiment d’insécurité, ainsi que l’augmentation des actes de délinquance et de violences.
Dans ces environnements, les logements peuvent présenter diverses formes de dégradation, qui vont de l’insalubrité et de l’insécurité des structures aux problèmes d’humidité, de surpopulation et d’infestations parasitaires. Les multiples conséquences de l’habitat dégradé touchent tous les aspects de la vie quotidienne des habitants.
Sur le plan de la santé, les conditions de vie précaires favorisent la propagation de maladies infectieuses et respiratoires. Santé publique France indiquait dans un rapport publié en novembre 2021 que plus de 130 000 décès étaient associés chaque année à des conditions de logement inadéquates dans toute l’Europe.
D’après Santé publique France toujours, la réhabilitation des 600 000 logements insalubres de France permettrait de réaliser des économies de dépenses de santé à hauteur de 500 millions d’euros par an.
Les quartiers où sont concentrés le plus de logements insalubres sont souvent éloignés de tout. Parfois, cela empêche même les citoyens d’accéder aux services publics, comme une école assez proche du lieu de vie des enfants. Dans mon département, à Lille, le quartier de Moulins est devenu dangereux pour les riverains et le peu de touristes qui y restent.
Du point de vue économique, l’habitat dégradé a un impact négatif sur la valeur immobilière des zones environnantes, ce qui peut entraîner un déclin économique et une désertification commerciale.
De plus, les quartiers comprenant des logements insalubres se trouvent dans de grandes villes où les prix de l’immobilier explosent. Les étudiants et les familles précaires se retrouvent contraints de vivre dans ces logements.
Pour résoudre cette problématique complexe, tout le monde doit engager des efforts concertés pour améliorer les conditions de logement des populations affectées. Cela implique de mettre en œuvre des politiques publiques visant à garantir l’accès à un logement décent pour tous, ainsi que d’intégrer dans des programmes de rénovation urbaine des mesures de développement social et économique.
Ce texte issu des travaux de la commission mixte paritaire va dans le bon sens, mais il ne va pas assez loin selon nous. Il ne répond ni à l’ensemble des problématiques du logement ni aux volontés de la population, des locataires et des propriétaires. C’est pourquoi nous nous abstiendrons.
M. le président. La parole est à M. Pierre Jean Rochette, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Pierre Jean Rochette. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, voici l’occasion de vous parler de ma commune de Boën-sur-Lignon, dont j’ai eu l’honneur d’être maire pendant neuf ans, et du département de la Loire. J’espère que l’exemple que je vais développer ne vous dissuadera pas de nous y rendre visite.
En tant que maire de cette commune, j’ai été confronté à une situation délicate : un locataire en conflit avec son propriétaire avait décidé de se venger en faisant un barbecue dans son appartement et en laissant ouverts les robinets de sa salle de bains jour et nuit pendant plusieurs mois, afin d’inonder tout l’immeuble. La situation m’avait laissé quelque peu pantois, partagé entre l’urgence de la situation et les difficultés pour un maire rural de lancer une procédure d’arrêté de péril, tant celle-ci est lourde et complexe.
Madame la rapporteure, monsieur le ministre, je me réjouis donc qu’au travers de ce texte nous apportions davantage de simplification et de souplesse à cette procédure. Cela soulagera vraiment les maires ruraux, qui bénéficient le moins d’encadrement et d’accompagnement au quotidien.
Nous devons faire la différence en allégeant les procédures et en renforçant le rôle du maire. Il nous faut continuer à simplifier et à faciliter nos règles en matière d’habitat et d’aménagement, pour le bien de tous. Il me semble que c’est ce que nous faisons précisément avec ce projet de loi.
Monsieur le ministre, le logement est un sujet central des prochaines années. Je vous sais engagé, et les étapes suivantes sont décisives. Je vous félicite de ce projet de loi et je vous remercie des débats menés dans les deux chambres parlementaires.
Je salue le travail, important et précis, de la rapporteure, Mme Gacquerre, ainsi que de la présidente de la commission des affaires économiques, Mme Estrosi Sassone. Il me semble qu’il y a un véritable intérêt à travailler ainsi ensemble, à partir du vécu des élus locaux et du terrain.
Je le répète, ce texte est très attendu, notamment par les élus locaux. L’étendue du texte adopté en première lecture dans cet hémicycle le prouve.
De nombreuses avancées issues des travaux du Sénat ont été préservées. En commission mixte paritaire, le texte n’a pas été substantiellement modifié par rapport à la version que nous avions adoptée en séance. Cela montre, si cela était encore nécessaire, son caractère indispensable et consensuel.
Plus globalement, il paraît logique de donner aux élus locaux les outils leur permettant de gérer les situations complexes auxquelles ils sont confrontés. Ces enjeux sont structurants : nous devons trouver les moyens, dans nos territoires ruraux et urbains, de permettre à nos concitoyens d’accéder à des logements dignes sans laisser personne sur le bas-côté.
Une réforme complète du système est attendue. Ce texte n’est qu’une étape, qui ne peut rester la seule. Nous devrons poursuivre nos efforts pour ajuster et moderniser nos outils. Encore une fois, il faut insuffler de la flexibilité et simplifier.
Plusieurs avancées sont à noter. La première est le renforcement des sanctions contre les marchands de sommeil, dont nous devons combattre les agissements inadmissibles, en restant intraitables et vigilants.
Permettez-moi de prendre un autre exemple observé dans ma commune. Alors que des marchands de sommeil parvenaient à y rentabiliser l’achat d’un vieil immeuble en moins de deux ans, nous sommes parvenus à éradiquer la quasi-totalité de leurs agissements grâce à la mise en place du permis de louer.
Ce permis est un outil véritablement au service des élus, et je me réjouis que ce texte allège sa mise en place. Dans ma commune, j’avais eu la chance d’être accompagné par les services de la communauté d’agglomération de Loire Forez, qui avaient bâti le cadre de notre intervention. Mais comme il n’existe pas toujours de programme local de l’habitat (PLH), il peut s’agir d’un point bloquant.
À l’aide de ce projet de loi, nous simplifions la mise en place du permis de louer, en donnant aux maires un outil leur permettant de combattre les marchands de sommeil.
Je me réjouis également de la riche idée consistant à faire retomber le produit des amendes dans la caisse communale.
Nous saluons également la création du prêt collectif dans le but d’effectuer des travaux, ainsi que l’instauration d’un syndic d’intérêt collectif, dont les missions seront déterminantes.
En matière d’habitat dégradé et d’aménagement du territoire, le rôle des maires est déterminant. C’est pourquoi leur donner des marges de manœuvre et des possibilités d’action nous paraît primordial, notamment en ce qui concerne les installations irrégulières et les situations d’insécurité.
Pour conclure, mes chers collègues, nous partageons bien entendu l’esprit de simplification et d’accélération de ce projet de loi, qui a pour but de prévenir et d’éviter le pire.
Le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire nous semble équilibré. Le groupe Les Indépendants votera, bien entendu, en sa faveur. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. le président. La parole est à M. Yves Bleunven, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Yves Bleunven. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous nous retrouvons pour examiner les conclusions de la commission mixte paritaire qui a trouvé un accord sur le projet de loi relatif à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé, le 14 mars dernier.
Le logement traverse une crise inédite. La problématique des copropriétés dégradées s’intensifie de jour en jour, ainsi que l’effondrement d’un immeuble à Toulouse le 8 mars dernier l’illustre malheureusement une nouvelle fois, preuve que l’urgence est indéniable.
Je tiens de nouveau à remercier la rapporteure du texte, notre chère collègue Amel Gacquerre, qui a réalisé un travail impressionnant et salué par tous sur ces travées.
Lors du dépôt du projet de loi sur le bureau de la présidente de l’Assemblée nationale, celui-ci ne comportait que dix-sept articles. Il en compte aujourd’hui une cinquantaine, pour beaucoup d’origine sénatoriale.
Le projet de loi transmis à notre assemblée présentait des lacunes, mais la navette parlementaire a permis d’enrichir le texte. Des manques persistent toujours, mais je relève plusieurs points positifs prometteurs tant pour les collectivités que pour les administrés. Malgré son champ d’action limité, le texte de la commission mixte paritaire contient des mesures attendues permettant d’accélérer et de simplifier la rénovation de l’habitat dégradé.
Tout d’abord, nos maires disposent désormais de meilleures armes législatives : la planification des interventions peut se faire bien en amont de la dégradation du bâti, et le relogement a été facilité.
Ensuite, l’article 2 autorise les syndicats de copropriété à contracter un emprunt collectif afin de financer les travaux jugés essentiels ou ceux de rénovation énergétique. L’exécution de ces travaux sera largement facilitée, ce qui améliorera significativement le cadre de vie des occupants.
Par ailleurs, pour anticiper, prévenir et résoudre les problèmes rencontrés, les pouvoirs publics et les syndics doivent plus que jamais travailler de concert lorsque les propriétaires font défaut.
Le chapitre II prévoit des mesures pour accélérer les procédures de recyclage et de transformation des copropriétés. Ainsi, les pouvoirs du maire se trouvent renforcés par la sécurisation du cadre juridique relatif aux expropriations, qui était nécessaire à la sécurité des citoyens et indispensable au recyclage des habitats urbains.
Il en est de même quant à l’application des mesures de démolition des constructions jugées irrégulières ou présentant des risques pour la sécurité et la santé des résidents.
Ce texte est un premier pas, et pour cette raison nous adopterons les conclusions de la commission mixte paritaire. Mais la suite reste à écrire : il faut désormais accompagner nos maires pour qu’ils s’approprient les outils législatifs, débloquer les moyens nécessaires et faciliter l’accès aux aides à l’investissement.
Le Gouvernement avait promis des mesures structurantes, et je ne peux que regretter la portée restreinte de ce texte.
Monsieur le ministre, la décentralisation annoncée ne suffira pas. Je l’ai déjà dit et je le répète, nous attendons la grande loi sur le logement qui a été annoncée. Le parcours résidentiel étant totalement bloqué, amender et améliorer la loi SRU est une bonne chose, poursuivre la simplification également, mais il nous faut des mesures fortes, à la hauteur de la situation.
Nous connaissons votre feuille de route et nous voyons votre bonne volonté. Vous avez lancé, pas plus tard qu’hier, une mission en faveur du choc d’offre par le soutien à l’investissement, mais nous attendons plus de mesures concrètes. Ne soyons pas effrayés ou intimidés devant l’immensité de la tâche : ayons le courage de mener ce combat, d’engager les moyens nécessaires et d’avoir une politique ambitieuse pour le logement de demain ! (Mme la rapporteure applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Antoinette Guhl, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme Antoinette Guhl. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi représente une réelle avancée dans la lutte contre l’habitat dégradé et dans la protection des occupants vulnérables. Il répond aux attentes des acteurs de terrain, notamment des élus locaux ; d’ailleurs, il s’est inspiré du rapport de Michèle Lutz et de Mathieu Hanotin, qui est présent dans notre tribune et que je salue.
Globalement, le travail parlementaire a nettement renforcé le texte technique qui nous avait été présenté. Je tiens à remercier la présidente de la commission des affaires économiques et à rendre hommage au travail exceptionnel de la rapporteure.
Ce texte comporte des avancées que je tiens à souligner. Je pense par exemple au renforcement des moyens de lutte et de sanctions pénales contre les marchands de sommeil, à l’élargissement de la couverture assurée par le fonds de garantie pour la rénovation énergétique, à l’extension du champ d’intervention de l’association Foncière Logement ou encore à la facilitation des travaux de rénovation énergétique dans les copropriétés, grâce au passage de la règle de l’unanimité à celle de la majorité absolue.
Je regrette vivement, en revanche, que le montant maximal des frais facturés par les syndics pour des opérations de recouvrement ait été supprimé. J’en déduis que le lobby des syndics a gagné et que la société tout entière a perdu.
Je regrette également que la peine des marchands de sommeil passe seulement de cinq à sept ans de prison et de 150 000 à 200 000 euros d’amende – nous demandions plus –, mais soit. Surtout, la mention de l’état de vulnérabilité de la victime comme circonstance aggravante a été supprimée ; pour les écologistes, c’en est une, pourtant.
Enfin, la notification par voie électronique accordée aux syndics en lieu et place du papier constitue aussi un très net recul. Une fois de plus, nous avons cédé au lobby des syndics, et ma voisine de 88 ans ne vous remercie pas…
Vous l’aurez compris, pour les écologistes, si ce texte va globalement dans la bonne direction, il reste des loupés.
Je me réjouis néanmoins que nous poursuivions le travail et les auditions dans le cadre de la commission d’enquête sur la paupérisation des copropriétés, demandée par nos amis communistes.
Autre source de situations indignes dans le logement : les jeux Olympiques. L’édition de 2024 arrive à grands pas et, à Paris, les dérives s’amplifient. L’agence départementale d’information sur le logement observe une hausse de 20 % des résiliations de bail.
Les droits des locataires sont bafoués, sacrifiés sur l’autel de la rentabilité du meublé touristique pour les quelques semaines des Jeux. C’est une pratique illégale et c’est surtout une catastrophe pour le logement de nos concitoyens parisiens ou grands parisiens. Je salue d’ailleurs l’initiative de notre collègue sénateur de Paris, Ian Brossat, qui a déposé une proposition de loi visant à instaurer une trêve olympique des expulsions locatives.
Il faut agir en faveur du logement, monsieur le ministre, et il faut même accélérer. L’accès à un logement digne, à un logement durable, devient de plus en plus difficile. Pour les écologistes, le logement ne doit pas être un produit financier au bénéfice des 10 % des Français les plus riches, qui détiennent 44 % du patrimoine immobilier.
Dans son dernier rapport, Oxfam indique que les 25 % des ménages les plus modestes consacrent au logement une part de leur revenu deux fois plus importante que les 25 % les plus aisés. C’est pour cette raison qu’il ne faut pas revenir sur la loi SRU, monsieur le ministre.
Mme Antoinette Guhl. Les quelque 96 000 logements sociaux financés en 2022 ne sont pas suffisants quand 2,6 millions de ménages sont en attente d’un logement social. Les inégalités sociales et territoriales sont de plus en plus marquées.
Prenons l’exemple de la jeunesse. En France, il y a 233 000 logements dans les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous) pour 3 millions d’étudiants, soit un logement pour seize étudiants. Il est essentiel de répondre à cet enjeu pour nos jeunes, qui, je le rappelle, sont, eux aussi, dans une grande précarité. J’espère que nous aurons l’occasion d’en parler, car ce sujet me tient à cœur.
Mme Antoinette Guhl. J’ajoute que la suppression de 2,14 milliards d’euros d’autorisations d’engagement consacrées au dispositif MaPrimeRénov’ est incompréhensible. Nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour ne pas vous laisser corseter par Bercy… (Sourires.)
Pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, il est urgent que des mesures concrètes soient prises pour répondre à la crise du logement en France. Nous voterons ce texte, mais il est essentiel que celui-ci soit soutenu par des ressources et des compétences, notamment pour les petites collectivités, et nous attendons fermement des mesures ambitieuses et des moyens pour le logement.
« Gouverner, c’est d’abord loger son peuple », disait l’abbé Pierre. Aussi, nous comptons sur vous, monsieur le ministre, et sur le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et CRCE-K. – M. Lucien Stanzione applaudit également.)
M. le président. Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par l’amendement du Gouvernement, l’ensemble du projet de loi, dont la commission a rédigé ainsi l’intitulé : projet de loi visant à l’accélération et à la simplification de la rénovation de l’habitat dégradé et des grandes opérations d’aménagement.
(Le projet de loi est adopté définitivement.) – (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures trente-cinq, est reprise à dix-huit heures quarante.)
M. le président. La séance est reprise.
7
Diverses mesures relatives au grand âge et à l’autonomie
Adoption définitive des conclusions modifiées d’une commission mixte paritaire sur une proposition de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi portant diverses mesures relatives au grand âge et à l’autonomie (texte de la commission n° 412, rapport n° 411).
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean Sol, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire réunie le 12 mars dernier pour examiner la proposition de loi sur le grand âge et l’autonomie est parvenue à établir un texte commun, finalement intitulé : proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir et de l’autonomie.
Le compromis issu de la commission mixte paritaire préserve, pour l’essentiel, l’équilibre du texte adopté par le Sénat, qui avait veillé à recentrer la proposition de loi sur les mesures susceptibles d’avoir un impact réel et positif.
Eu égard aux enjeux liés au vieillissement de la population et aux besoins considérables qui s’annoncent, cette proposition de loi fait figure de texte d’attente. Le vote dans les mêmes termes par les deux assemblées de l’article 2 bis B souligne l’impérieuse nécessité de mettre rapidement à l’ordre du jour un projet de loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge, afin de donner aux acteurs, aux professionnels et aux usagers une lisibilité concrète sur les moyens qui seront mis en œuvre pour une politique de l’autonomie à la hauteur des enjeux.
Il est particulièrement urgent de prendre à bras-le-corps le sujet de l’attractivité des métiers du grand âge et de l’autonomie, notamment ceux de l’aide et de l’accompagnement à domicile, si l’on veut réussir le « virage domiciliaire ». Cela passe notamment par la revalorisation de la rémunération de ces professionnels, mais d’autres leviers devront être actionnés, comme la création d’une spécialisation en gériatrie de l’exercice infirmier en pratique avancée, que j’appelle de mes vœux.
Le texte que nous examinons sans doute pour la dernière fois aujourd’hui contient cependant certaines avancées qui justifient de le soutenir.
Tout d’abord, la création du service public départemental de l’autonomie (SPDA) vise un double objectif de décloisonnement des politiques sanitaires et médico-sociales et de rapprochement des politiques en faveur des personnes âgées et des personnes en situation de handicap. Le texte de la commission mixte paritaire conserve les principaux apports des deux assemblées. Le dispositif proposé présente l’avantage de la souplesse et de l’adaptabilité aux réalités locales, car la réponse aux objectifs du SPDA pourra varier selon les territoires.
Le texte confirme l’inscription territoriale du SPDA, qui sera l’instance de coordination et de planification pluriannuelle des politiques de l’autonomie. La réintroduction à l’article 1er de la conférence nationale de l’autonomie, dans un format moins institutionnel, sur le modèle de la Conférence nationale du handicap, permettra de donner une impulsion à la politique de prévention de la perte d’autonomie sans créer de structure complexifiant le paysage.
Je considère que la logique de parcours doit être un pilier du SPDA, lequel doit s’inscrire dans la perspective du virage domiciliaire et favoriser un continuum des modes d’accompagnement et de soins. Ceux-ci incluent naturellement le maintien à domicile, qui devra être rendu possible dès lors qu’il correspondra au souhait de la personne âgée, mais aussi l’habitat intermédiaire – résidences autonomie, résidences services, habitat inclusif –, l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), qui reste nécessaire et dont la place doit être repensée et mieux valorisée, ainsi que, dans certains cas, l’hospitalisation en unité de soins de longue durée.
La coopération au sein de groupements, que le texte encourage et rend obligatoire pour les établissements et services publics autonomes, et la prise en compte dans ce cadre des personnes en situation de handicap vieillissantes participent également de cette logique de parcours.
En revanche, la commission mixte paritaire est revenue sur la disposition prévoyant un avis du président du conseil départemental sur la nomination des directeurs d’Ehpad publics, considérant qu’elle aurait remis en cause la répartition des compétences avec les maires.
Le développement de la prévention de la perte d’autonomie constitue un autre axe structurant du texte. Dans cette perspective, la généralisation du programme Icope (Integrated Care for Older People, ou soins intégrés aux personnes âgées) constitue une avancée importante. Conformément à la rédaction du Sénat, le texte clarifie l’articulation de ce programme avec le dispositif des rendez-vous de prévention.
Pour ce qui concerne le volet du texte relatif aux conditions d’accueil et de prise en charge des résidents en Ehpad, la commission mixte paritaire n’a retenu que les dispositions apportant de réelles améliorations pour les usagers.
Elle a également confirmé la création d’un droit pour les résidents d’Ehpad d’accueillir leur animal domestique au sein des établissements, en prenant en compte la volonté du Sénat d’encadrer ce droit pour garantir la santé et la sécurité des résidents et du personnel, ainsi que le bien-être des animaux. Un arrêté précisera donc les catégories d’animaux domestiques pouvant être accueillis et les conditions d’hygiène et de sécurité qui devront être respectées.
Introduite par le Sénat, la possibilité ouverte aux Ehpad dont la capacité d’accueil est intérieure à un seuil fixé par décret d’offrir des places d’accueil de jour sans se voir opposer le plancher existant de places offertes a été confirmée par la commission mixte paritaire dans une rédaction de compromis.
En outre, l’accueil de jour pourra être organisé sans que les établissements soient obligés d’y consacrer des locaux spécifiques.
En ce qui concerne le contrôle et l’évaluation des établissements, la commission mixte paritaire a maintenu la suppression d’articles qui étaient déjà satisfaits ou qui n’apportaient pas d’améliorations significatives aux prérogatives de contrôle, déjà robustes et récemment renforcées à la suite du scandale Orpea. La qualité et la sécurité de la prise en charge passent dorénavant par l’allocation des moyens nécessaires au contrôle de l’ensemble des établissements dans la durée.
Ainsi, même s’il ne constitue qu’une étape et n’est nullement un aboutissement, je vous invite, mes chers collègues, à adopter le texte de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargée des personnes âgées et des personnes handicapées. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la transition démographique nous conduit d’ici à 2030 vers une société où les plus de 65 ans seront plus nombreux que les moins de 15 ans. Ce qui est devant nous, c’est une société au visage nouveau : une société de la longévité.
Oui, nous vivons plus longtemps, et cela nous impose de tracer ensemble le cap d’une société préparée à cet immense défi. C’est à cette seule condition que la transition démographique sera une chance pour tous et non un fardeau. En ce sens, le chantier du grand âge est essentiel, je dirais même existentiel, pour notre pays.
J’ai d’emblée évoqué ce sujet comme une question de société qui nous concerne tous, car, au-delà des questions de santé publique et des enjeux évidents de prise en charge de la perte d’autonomie posés par le vieillissement de notre population, les rapports que nous entretenons collectivement avec nos aînés disent beaucoup de l’état d’une société.
En France, la solidarité entre les générations est le fondement même de notre modèle de protection sociale et même, plus généralement, de notre contrat social. C’est quelque chose dont il faut être fier, qu’il faut préserver et renforcer.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes réunis ce soir pour l’ultime étape de la longue navette entre votre hémicycle et celui de l’Assemblée nationale sur ce texte d’initiative parlementaire qui s’inscrit parfaitement dans cette ambition, que vous partagez avec le Gouvernement et que reprend le titre de cette proposition de loi : œuvrer concrètement à la construction d’une véritable société du bien-vieillir et de l’autonomie dans notre pays.
J’aime cette expression de « bien-vieillir », car elle fait écho à la formule du grand biologiste Étienne-Émile Baulieu, qui a beaucoup fait progresser la recherche contre la maladie d’Alzheimer : « Vieillir n’est pas une maladie. » Cette ambition du bien-vieillir, je l’ai toujours faite mienne. Elle s’inscrit comme le fil rouge de l’action que mène le Gouvernement en la matière depuis 2017 et dont le Président de la République a toujours fait une priorité.
En effet, ce chantier, immense et essentiel, du grand âge s’achèvera non pas en un jour, mais au terme d’une action constante et résolue du Gouvernement et des parlementaires, avec les collectivités territoriales et toute la société.
Je sais qu’il reste du travail, beaucoup de travail, et je suis pleinement mobilisée à vos côtés pour en venir à bout. C’est pourquoi le Gouvernement soutient ce texte pour ce qu’il est : une pierre supplémentaire d’un édifice plus large, apportant de nouvelles mesures utiles et concrètes à une action collective et de long terme qui se poursuit.
Cette action résolue du Gouvernement s’est traduite entre autres par la création de la cinquième branche de la sécurité sociale, dédiée à l’autonomie, consacrée par la loi du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l’autonomie.
La mise en œuvre de cette nouvelle branche et le parachèvement de la transformation de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) en une caisse nationale de sécurité sociale constituèrent l’une des réformes les plus importantes de notre système de protection sociale depuis sa création. Son budget, je veux le rappeler, s’élève à 40 milliards d’euros cette année et atteindra 45 milliards d’euros en 2027.
Nous avons également lancé la réforme ambitieuse des services autonomie à domicile (SAD) en fusionnant le soin et l’aide à domicile, afin que chacun puisse être accompagné et soigné chez lui lorsqu’il le souhaite. Ce sont de véritables services intégrés qui mailleront ainsi tout le territoire, pour permettre au plus grand nombre de vieillir chez soi, en toute sécurité.
Je pense aussi à la préfiguration du service public départemental de l’autonomie, porte d’entrée unique pour les personnes vieillissantes ou en situation de handicap, afin de les accompagner, de les orienter et de mieux prévenir la perte d’autonomie. Je souhaite qu’il soit généralisé dès 2025 ; grâce à cette proposition de loi, nous le préfigurons déjà dans 18 départements. Je tiens d’ailleurs à saluer ici l’engagement des départements préfigurateurs qui se sont portés volontaires.
Je tiens également à mentionner le dispositif MaPrimeAdapt’, qui permet de financer, depuis le 1er janvier dernier, la réalisation des travaux d’adaptation du logement pour les personnes âgées ou en situation de handicap, en fonction de leurs besoins spécifiques. Il s’agit d’un dispositif très concret, qui accompagne ce virage domiciliaire indispensable, alors que 90 % des Français expriment le souhait de vieillir chez eux.
Face à la crise de confiance qu’a pu connaître le secteur, nous avons mis en place le plan d’inspection générale des Ehpad, qui a déjà permis de contrôler la moitié des quelque 7 500 établissements pour personnes âgées du pays.
J’ai annoncé lundi dernier, lors de la présentation de la stratégie nationale de lutte contre les maltraitances, que cette démarche d’inspection-contrôle serait non seulement renforcée – l’objectif est d’avoir contrôlé 100 % des établissements avant la fin de l’année –, mais encore élargie aux établissements accueillant des personnes handicapées et systématisée, afin de l’inscrire dans la durée.
Vous pouvez le constater, mesdames, messieurs les sénateurs, notre gouvernement a déjà fait beaucoup, avec vous, en faveur du grand âge. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.) Avec vous, oui, car certaines des mesures figurant dans notre stratégie de lutte contre les maltraitances se trouvent également dans le texte que nous examinons aujourd’hui, permettant d’en assurer une effectivité rapide.
Je me réjouis que la commission mixte paritaire soit parvenue à un accord sur un texte commun. Je tiens à saluer l’engagement des sénateurs membres de cette commission, qui ont su travailler, en mêlant exigence et ouverture au compromis, pour arriver à un texte efficace et respectueux de l’équilibre entre les différents acteurs du grand âge et de l’autonomie, notamment les collectivités départementales.
Je pense bien sûr au président de la commission des affaires sociales, Philippe Mouiller, et aux deux rapporteurs, Mme Jocelyne Guidez et M. Jean Sol ; je salue leur travail constructif et de qualité.
M. Laurent Burgoa. Tout à fait !
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée. Je ne pourrai revenir sur l’ensemble des mesures de ce texte, mais je tiens à en citer quelques-unes, particulièrement emblématiques de l’esprit de cette proposition de loi, qui met en place des changements concrets, ancrés dans la vie quotidienne, et qui répond à des besoins exprimés par les personnes et les acteurs du secteur.
Je pense notamment à la consécration du droit de visite en Ehpad. Je sais que c’est une mesure à laquelle le Sénat, notamment M. Retailleau, qui a beaucoup travaillé cette question, était particulièrement attaché.
Grâce à ce texte, on ne pourra plus, par principe, refuser à une personne âgée de recevoir son parent chez elle, car, oui, pour un résident, l’Ehpad est son lieu de vie, son chez-soi. Je souligne que ce droit inconditionnel de recevoir de la visite est aussi reconnu pour les personnes en fin de vie ou en soins palliatifs.
C’est dans le même esprit que je me réjouis de la place que nous donnons aux animaux de compagnie dans ces établissements. La commission mixte paritaire a confirmé la création d’un droit pour les résidents d’Ehpad d’accueillir leur animal domestique au sein des établissements, en prenant en compte la volonté du Sénat d’encadrer ce droit, afin de garantir la santé et la sécurité des résidents et du personnel, ainsi que le bien-être des animaux.
C’est pourquoi je prends devant vous l’engagement de travailler à un décret d’application équilibré, rédigé après concertation avec les professionnels et les associations, afin que ce droit s’applique dans le respect le plus strict des exigences d’hygiène et de sécurité.
Je pense aussi au meilleur contrôle des antécédents judiciaires et, plus largement, au renforcement de la vigilance, au travers de l’institution du certificat d’honorabilité des agents, bénévoles ou professionnels, intervenant auprès de nos aînés. Je souhaite en particulier saluer le travail de la rapporteure pour avis de la commission des lois, Mme Elsa Schalck, puisque la commission mixte paritaire a également entériné la position du Sénat sur la protection juridique des majeurs.
Je pourrais aussi mentionner le renforcement de l’habitat inclusif ou encore les dispositions concernant la lutte contre les maltraitances, dont certaines font partie de notre stratégie nationale, mais je veux terminer en citant les mesures relatives à l’amélioration des conditions de travail des aides à domicile, au travers notamment de la création d’une carte professionnelle de stationnement – mesure très attendue – ou encore d’une aide financière visant à mieux prendre en charge leurs déplacements, ce qui améliorera leur pouvoir d’achat.
Ainsi, mesdames, messieurs les sénateurs, vous le voyez, grâce à ce texte parlementaire, nous avançons ensemble sur le chemin de la société du bien-vieillir, pour tous : les personnes âgées, leurs familles, mais également ceux qui les accompagnent au quotidien.
Je l’ai mentionné d’emblée, mais je l’affirme de nouveau : personne, ni moi ni le reste des membres du Gouvernement, n’a jamais considéré l’adoption de cette proposition de loi comme valant solde de tout compte. (Marques de satisfaction sur les travées du groupe Les Républicains.) Pour reprendre une formule de M. Mouiller,…
M. Laurent Somon. De l’excellent M. Mouiller ! (Sourires.)
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée. … ce texte « aborde des questions qui se posent avec une intensité croissante avec le vieillissement de la population, sans toutefois les épuiser ». En effet, une fois ce texte adopté, si vous en décidez ainsi, il nous restera à approfondir et à résoudre trois priorités.
Première priorité : le développement de l’habitat intermédiaire, afin de permettre à tous ceux qui ne peuvent plus vivre seuls, mais qui gardent une certaine autonomie d’avoir accès à un accompagnement plus proche ; les départements ont un rôle essentiel à jouer dans ce domaine.
Deuxième priorité : la gouvernance, car il faut clarifier la répartition des compétences entre l’État et les collectivités territoriales.
Troisième priorité, et non des moindres : je n’élude évidemment pas la question centrale du financement (Ah ! sur les travées des groupes Les Républicains et CRCE-K.), afin de décider collectivement qui paie quoi, entre la sécurité sociale et l’État, entre les différentes générations, entre les Français eux-mêmes. C’est un véritable choix de société que nous devons faire ensemble.
Sur ces trois sujets, nous poursuivrons le travail et je souhaite que nous le fassions ensemble, dans le cadre le plus large, le plus ouvert, possible. C’est pourquoi je m’engage ici à ce que nous en débattions avec vous, avec tous les Français, afin de tirer toutes les conséquences nécessaires, y compris, bien entendu, dans la loi. (Mme Corinne Féret s’exclame.)
Vous l’aurez compris, mesdames, messieurs les sénateurs, cette proposition de loi est un pas de plus dans la mise en œuvre d’un modèle social renouvelé, pour une meilleure prise en charge de la dépendance. Ce n’est pas le premier pas, et ce ne sera, bien entendu, pas le dernier,…
M. Laurent Burgoa. Très bien !
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée. … mais c’est tout de même un jalon supplémentaire, qui représente une étape importante, car, oui, les dispositions de ce texte sont attendues par nombre d’acteurs sur le terrain. Elles emportent des changements concrets dans le quotidien de ceux qu’elles visent.
Humaniser les établissements, renforcer le domicile, lutter contre les maltraitances, tout cela est bel et bien indispensable à ce bien-vieillir que nous appelons collectivement de nos vœux et qui m’évoque également cette formule que l’on attribue parfois à André Malraux : il faut ajouter de la vie aux années et non des années à la vie.
Aussi, je vous invite, mesdames, messieurs les sénateurs, à voter largement en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme Guylène Pantel applaudit également.)
M. le président. Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, le Sénat examinant après l’Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, il se prononce par un seul vote sur l’ensemble du texte, en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.
En conséquence, le vote sur les amendements et sur les articles est réservé.
Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir et de l’autonomie
TITRE Ier
RENFORCER LE PILOTAGE DE LA POLITIQUE DE PRÉVENTION DE LA PERTE D’AUTONOMIE ET LUTTER CONTRE L’ISOLEMENT SOCIAL
Article 1er
I. – L’article L. 113-3 du code de l’action sociale et des familles est ainsi rétabli :
« Art. L. 113-3. – I. – Une conférence nationale de l’autonomie est organisée au moins tous les trois ans afin de définir des orientations et de débattre des moyens de la politique de prévention de la perte d’autonomie.
« Cette conférence s’appuie sur les travaux de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie et l’expertise du centre national de ressources probantes mentionné à l’article L. 223-7-1 du code de la sécurité sociale.
« II. – La conférence nationale de l’autonomie est notamment composée de représentants :
« 1° De l’État ;
« 2° Des conseils départementaux ;
« 3° D’organismes de sécurité sociale ;
« 4° D’organismes gestionnaires des établissements ou services sociaux et médico-sociaux accueillant des personnes âgées ;
« 5° D’associations représentatives des personnes âgées ;
« 6° Des professionnels concernés par la prévention et l’accompagnement de la perte d’autonomie.
« III. – Un décret détermine les modalités d’application des I et II du présent article. »
II. – Après l’article L. 223-7 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 223-7-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 223-7-1. – Un centre national de ressources probantes, intégré à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, est chargé :
« 1° De recenser et de promouvoir les actions de prévention de la perte d’autonomie ;
« 2° D’élaborer des référentiels d’actions et de bonnes pratiques. »
Article 1er bis A
I. – Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° A Le deuxième alinéa du I de l’article L. 113-2 est ainsi modifié :
a) Après le mot : « département », sont insérés les mots : « pilote le service public départemental de l’autonomie mentionné à l’article L. 149-5. Il » ;
b) Les mots : « des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie des personnes âgées mentionnée à l’article L. 233-1 » sont remplacés par les mots : « territoriale de l’autonomie mentionnée à l’article L. 149-7 » ;
1° Le chapitre IX du titre IV du livre Ier est ainsi modifié :
a) L’article L. 149-1 est ainsi modifié :
– à la fin du 3°, les mots : « L. 233-1 et L. 233-1-1 » sont remplacés par les mots : « L. 149-10 et L. 149-11 » ;
– au 4°, les mots : « conférence des financeurs mentionnée à l’article L. 233-1 » sont remplacés par les mots : « commission des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie mentionnée à l’article L. 149-10 » ;
b) L’article L. 149-2 est ainsi modifié :
– le 8° est ainsi rédigé :
« 8° Des services de l’État chargés de l’emploi ; »
– à la fin de la dernière phrase de l’avant-dernier alinéa, les mots : « conférence des financeurs prévue à l’article L. 233-1 » sont remplacés par les mots : « commission des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie mentionnée à l’article L. 149-10 » ;
c) Est ajoutée une section 3 ainsi rédigée :
« Section 3
« Service public départemental de l’autonomie
« Art. L. 149-5. – Dans chaque département ou dans chaque collectivité exerçant les compétences des départements, le service public départemental de l’autonomie facilite les démarches des personnes âgées, des personnes handicapées et des proches aidants, en garantissant que les services et les aides dont ils bénéficient sont coordonnés, que la continuité de leur parcours est assurée et que leur maintien à domicile est soutenu, dans le respect de leur volonté et en réponse à leurs besoins.
« À cet effet, ses membres coordonnent leurs actions respectives dans les domaines mentionnés au présent article et se transmettent, dans les conditions fixées à l’article L. 149-9, les informations nécessaires au traitement des demandes des personnes, quel que soit le service sollicité en première intention par ces dernières.
« Le service public départemental de l’autonomie exerce les missions suivantes, dans le respect des compétences respectives de ses membres :
« 1° Réaliser l’accueil, l’information, l’orientation et le suivi dans la durée des personnes âgées, des personnes handicapées et des proches aidants et apporter une réponse complète, coordonnée et individualisée à leurs demandes ainsi qu’à celles des professionnels concernés, afin de favoriser un égal accès au service et une coordination dans l’accompagnement et les actions entreprises ;
« 2° S’assurer de la réalisation, par les services qui en ont la charge, de l’instruction, de l’attribution et de la révision des droits des personnes âgées et handicapées, dans le respect des délais légaux ;
« 3° Assister les professionnels des secteurs social, médico-social et sanitaire intervenant auprès des bénéficiaires du service public départemental de l’autonomie dans l’élaboration de réponses globales et adaptées aux besoins de chaque personne ;
« 4° Diffuser, planifier et réaliser des actions d’information et de sensibilisation aux démarches de prévention individuelle, des offres de prévention collective ainsi que des actions de repérage et une démarche volontaire pour aller vers les personnes fragiles en situation de handicap et les personnes vulnérables âgées, évaluées et fournies par le centre de ressources probantes mentionné à l’article L. 223-7-1 du code de la sécurité sociale.
« Pour l’exercice de ces missions, le service public départemental de l’autonomie respecte un cahier des charges national, fixé par arrêté des ministres chargés de la santé, des personnes âgées et des personnes handicapées après consultation des associations représentatives des usagers de ce service public, qui précise notamment les modalités de participation de ses membres. Ce cahier des charges précise le socle commun des missions assumées par le service public départemental de l’autonomie et définit un référentiel de qualité de service. Il peut faire l’objet d’une adaptation dans les départements et les collectivités d’outre-mer.
« Art. L. 149-6. – Le service public départemental de l’autonomie est piloté par le département ou la collectivité exerçant les compétences des départements. Il est assuré conjointement par :
« 1° Le département, la collectivité exerçant les compétences des départements, les communes, leurs groupements et leurs établissements publics ;
« 2° L’agence régionale de santé ;
« 3° Le rectorat d’académie ;
« 4° Les membres du service public de l’emploi mentionné à l’article L. 5311-2 du code du travail et les organismes de placement spécialisés dans l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap mentionnés à l’article L. 5214-3-1 du même code ;
« 5° Les établissements, les services et les dispositifs mentionnés aux 5°, 6°, 7°, 11°, 14° et 15° du I de l’article L. 312-1 du présent code ainsi qu’aux articles L. 6141-1 et L. 6327-2 du code de la santé publique ;
« 6° Les communautés professionnelles territoriales de santé mentionnées à l’article L. 1434-12 du même code ;
« 7° Les organismes locaux et régionaux de sécurité sociale ;
« 8° La maison départementale des personnes handicapées mentionnée à l’article L. 146-3-1 du présent code ou la maison départementale de l’autonomie mentionnée à l’article L. 149-4 ;
« 9° Les services portant le label “France Services” mentionnés à l’article 27 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
« Art. L. 149-7. – Dans chaque département ou dans chaque collectivité exerçant les compétences des départements, une conférence territoriale de l’autonomie est chargée :
« 1° De coordonner l’action des membres du service public départemental de l’autonomie mentionné à l’article L. 149-5. À cette fin, elle élabore un programme annuel d’actions qui décline, en fonction des besoins du territoire, les moyens et les contributions respectifs des membres. La conférence veille au respect du cahier des charges mentionné au même article L. 149-5 ;
« 2° D’allouer, en tenant compte des orientations définies par la conférence nationale de l’autonomie mentionnée à l’article L. 113-3, des financements pour prévenir la perte d’autonomie et pour soutenir le développement de l’habitat inclusif, dans les conditions prévues aux articles L. 149-8 à L. 149-12.
« Art. L. 149-8. – La conférence territoriale de l’autonomie, qui n’a pas la personnalité morale, est présidée par le président du conseil départemental ou le président de la collectivité exerçant les compétences des départements. La vice-présidence est assurée par le directeur général de l’agence régionale de santé.
« La conférence est composée des représentants des membres du service public départemental de l’autonomie mentionnés aux 1° à 4° de l’article L. 149-6. Toute autre personne physique ou morale concernée par les politiques de prise en charge de la perte d’autonomie peut y participer, sous réserve de l’accord de la majorité des membres de droit.
« Le président de la conférence territoriale de l’autonomie réunit l’ensemble des membres du service public départemental de l’autonomie au moins une fois par an, notamment pour les consulter sur le programme d’actions mentionné à l’article L. 149-7.
« Le président de la conférence territoriale de l’autonomie présente au conseil départemental de la citoyenneté et de l’autonomie mentionné à l’article L. 149-1, chaque année avant le 30 avril, le bilan du programme d’actions de la conférence territoriale de l’autonomie au titre de l’année précédente ainsi que le programme d’actions pour l’année courante.
« Art. L. 149-8-1. – Le conseil départemental ou la collectivité exerçant les compétences des départements et l’agence régionale de santé peuvent définir conjointement plusieurs territoires de l’autonomie de manière à couvrir l’ensemble du territoire du département ou de la collectivité.
« La conférence territoriale de l’autonomie peut créer des commissions compétentes pour chaque territoire de l’autonomie.
« Art. L. 149-9. – Par dérogation à l’article L. 1110-4 du code de la santé publique, les organismes et les services mentionnés à l’article L. 149-6 du présent code partagent les informations strictement nécessaires à l’accomplissement des missions du service public départemental de l’autonomie mentionnées à l’article L. 149-5, dans les conditions fixées par un décret pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés.
« Ce décret précise notamment les catégories de données et les informations qui peuvent faire l’objet de ces échanges, les organismes et les services autorisés à partager ces données ou ces informations et les conditions d’habilitation de leurs agents, ainsi que les droits d’information et d’opposition dont disposent les personnes concernées.
« Art. L. 149-10. – I. – Pour exercer les missions mentionnées au 2° de l’article L. 149-7, la conférence territoriale de l’autonomie se réunit sous la forme d’une commission dénommée “commission des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie” rassemblant de droit les représentants des membres mentionnés aux 1°, 2° et 7° de l’article L. 149-6 ainsi que des représentants :
« 1° De l’Agence nationale de l’habitat dans le département ;
« 2° Des organismes régis par le code de la mutualité ;
« 3° Des fédérations d’institutions de retraite complémentaire mentionnées à l’article L. 922-4 du code de la sécurité sociale ;
« 4° (Supprimé)
« Toute autre personne physique ou morale concernée par les politiques de prévention de la perte d’autonomie, notamment les professionnels de santé spécialisés en gériatrie, peut y participer, sous réserve de l’accord de la majorité des membres de droit.
« La commission est présidée par le président du conseil départemental ou par le président de la collectivité exerçant les compétences des départements. Le directeur général de l’agence régionale de santé ou son représentant en assure la vice-présidence. En cas de partage égal des voix, le président a voix prépondérante.
« II. – Sur la base d’un diagnostic des besoins des personnes âgées de soixante ans et plus résidant sur le territoire et d’un recensement des initiatives locales, la commission établit un plan trisannuel définissant des axes prioritaires de financement. Elle définit chaque année un programme coordonné de financement des actions individuelles et de prévention dans le respect des axes prioritaires définis dans le plan trisannuel. Les financements sont alloués en complément des prestations légales ou réglementaires. Le diagnostic est établi à partir des besoins recensés, notamment, par le schéma relatif aux personnes en perte d’autonomie mentionné à l’article L. 312-5 et par le projet régional de santé mentionné à l’article L. 1434-2 du code de la santé publique.
« Le programme défini par la commission porte sur :
« 1° L’amélioration de l’accès aux équipements et aux aides techniques individuelles favorisant le maintien à domicile par la mise en place de plateformes de location et par la promotion de modes innovants d’achat et de mise à disposition ;
« 2° L’attribution du forfait autonomie mentionné au III de l’article L. 313-12 du présent code ;
« 3° La coordination et le soutien des actions de prévention mises en œuvre par les services autonomie à domicile intervenant auprès des personnes âgées ;
« 4° (Supprimé)
« 5° Le soutien aux actions d’accompagnement des proches aidants des personnes âgées en perte d’autonomie ;
« 6° Le développement d’autres actions collectives de prévention ;
« 7° Le développement d’actions de lutte contre l’isolement des personnes âgées.
« III. – Les concours mentionnés au d du 3° de l’article L. 223-8 du code de la sécurité sociale contribuent au financement des dépenses mentionnées au 1° de l’article L. 149-7 du présent code et des dépenses de fonctionnement de la commission des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie mentionnée au I du présent article. Les dépenses relatives à l’amélioration de l’accès aux équipements et aux aides techniques individuelles ainsi que celles relatives au développement d’autres actions collectives de prévention bénéficient, pour au moins 40 % de leur montant, à des personnes qui ne remplissent pas les conditions de perte d’autonomie mentionnées à l’article L. 232-2. Elles sont gérées par le département ou par la collectivité exerçant les compétences des départements. Le département ou la collectivité exerçant les compétences des départements peut, par convention, déléguer leur gestion à l’un des membres de la commission des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie. Un décret fixe les modalités de cette délégation.
« Les aides individuelles accordées dans le cadre des actions mentionnées au 1° du II du présent article que le département ou la collectivité exerçant les compétences des départements finance par le concours correspondant aux autres actions de prévention mentionnées aux 1°, 3° et 6° du même II bénéficient aux personnes qui remplissent des conditions de ressources variant selon la zone géographique de résidence et définies par décret.
« La règle mentionnée au deuxième alinéa du présent III s’applique également aux financements complémentaires alloués par d’autres membres de la commission des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie.
« IV. – Le président du conseil départemental ou le président de la collectivité exerçant les compétences des départements transmet à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie et aux commissions de coordination des politiques publiques de santé, au plus tard le 30 juin de chaque année, un rapport d’activité et les données nécessaires au suivi de l’activité de la commission des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie mentionnée au I. Ces données, qui comportent des indicateurs présentés par sexe, sont relatives :
« 1° Au nombre et aux types de demandes ;
« 2° Au nombre et aux types d’actions financées par les membres de la commission des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie mentionnée au présent article ainsi qu’à la répartition des dépenses par type d’actions ;
« 3° Au nombre et aux caractéristiques des bénéficiaires des actions.
« Le défaut de transmission de ces informations après mise en demeure par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie fait obstacle à tout nouveau versement au département ou à la collectivité exerçant les compétences des départements à ce titre.
« Art. L. 149-11. – La commission des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie mentionnée à l’article L. 149-10 est également compétente en matière d’habitat inclusif pour les personnes handicapées et les personnes âgées. Elle est alors dénommée “commission des financeurs de l’habitat inclusif pour les personnes handicapées et les personnes âgées”.
« Elle recense les initiatives locales et définit un programme coordonné de financement de l’habitat inclusif, dont le financement est assuré par l’aide à la vie partagée mentionnée à l’article L. 281-2-1, en s’appuyant sur les diagnostics territoriaux existants et partagés entre les acteurs concernés.
« Cette commission comprend, outre les membres mentionnés au I de l’article L. 149-10, des représentants des services départementaux de l’État compétents en matière d’habitat et de cohésion sociale. Toute autre personne physique ou morale concernée par les politiques de l’habitat peut y participer, sous réserve de l’accord de la majorité des membres de droit.
« Le rapport d’activité mentionné au IV du même article L. 149-10 porte également sur l’activité de la commission des financeurs de l’habitat inclusif pour les personnes handicapées et les personnes âgées, selon un modèle défini par arrêté des ministres chargés des personnes âgées, des personnes handicapées et du logement.
« Art. L. 149-12. – Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application de la présente section. » ;
2° Le chapitre III du titre III du livre II est abrogé ;
3° Le livre V est ainsi modifié :
aa) (nouveau) À l’article L. 521-4, les mots : « le chapitre III du titre III du livre II » sont remplacés par les mots : « la section 3 du chapitre IX du titre IV du livre Ier » ;
a) À l’article L. 521-5, les mots : « du chapitre III du titre III du livre II » sont remplacés par les mots : « de la section 3 du chapitre IX du titre IV du livre Ier » et, à la fin, les mots : « des financeurs prévue à l’article L. 233-1 » sont remplacés par les mots : « territoriale de l’autonomie mentionnée à l’article L. 149-7 » ;
b) L’article L. 531-11 est ainsi modifié :
– au début du premier alinéa, les mots : « Le chapitre III du titre III du livre II » sont remplacés par les mots : « La section 3 du chapitre IX du titre IV du livre Ier » ;
– au second alinéa, les mots : « des financeurs mentionnée à l’article L. 233-1 » sont remplacés par les mots : « territoriale de l’autonomie mentionnée à l’article L. 149-7 » ;
c) Au XI de l’article L. 541-4, les mots : « des financeurs prévue à l’article L. 233-1 » sont remplacés par les mots : « territoriale de l’autonomie mentionnée à l’article L. 149-7 » ;
d) Au second alinéa du III de l’article L. 542-3, les mots : « de l’article L. 233-1 » sont remplacés par les mots : « du II de l’article L. 149-10 » ;
e) L’article L. 581-11 est ainsi modifié :
– au premier alinéa, les mots : « le chapitre III du titre III du livre II » sont remplacés par les mots : « la section 3 du chapitre IX du titre IV du livre Ier » ;
– au second alinéa, les mots : « des financeurs prévue à l’article L. 233-1 » sont remplacés par les mots : « territoriale de l’autonomie mentionnée à l’article L. 149-7 ».
II. – Le chapitre 3 bis du titre II du livre II du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la première phrase du 2° de l’article L. 223-5, après le mot : « œuvre », sont insérés les mots : « , en particulier des services publics départementaux de l’autonomie, » ;
2° Au d du 3° de l’article L. 223-8, les mots : « à l’article L. 233-1 » sont remplacés par les mots : « au II de l’article L. 149-10 » et, à la fin, les mots : « conférence des financeurs mentionnée au même article L. 233-1 » sont remplacés par les mots : « commission des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie mentionnée au même article L. 149-10 » ;
3° L’article L. 223-15 est ainsi modifié :
a) Au 3°, les mots : « , 4° et 6° de l’article L. 233-1 » sont remplacés par les mots : « et 5° à 7° du II de l’article L. 149-10 » ;
b) Au 4°, les mots : « conférence des financeurs mentionnée à l’article L. 233-2 » sont remplacés par les mots : « commission des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie mentionnée à l’article L. 149-10 » ;
4° À l’article L. 223-16, les mots : « , 4° et 6° de l’article L. 233-1 » sont remplacés par les mots : « et 5° à 7° du II de l’article L. 149-10 ».
III. – Les I et II du présent article entrent en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 1er janvier 2025.
Articles 1er bis BA, 1er bis B et 1er bis C
(Supprimés)
Article 1er bis D
I. – Le titre VIII du livre II du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Au début de l’intitulé, les mots : « Habitat inclusif pour les personnes handicapées et les » sont remplacés par les mots : « Dispositions communes aux personnes handicapées et aux » ;
1° bis Le chapitre unique devient le chapitre Ier ;
2° Il est ajouté un chapitre II ainsi rédigé :
« CHAPITRE II
« Compensation technique
« Art. L. 282-1. – Dans chaque département, les équipes locales d’accompagnement sur les aides techniques ont pour missions :
« 1° D’accompagner individuellement les personnes âgées et les personnes handicapées dans l’évaluation de leurs besoins, dans le choix et la prise en main des aides techniques et dans la définition des aménagements de logement correspondant à leurs besoins ;
« 2° De soutenir des actions de sensibilisation, l’information et la formation des personnes handicapées, des personnes âgées, des proches aidants et des professionnels qui accompagnent des personnes âgées ou des personnes handicapées à domicile sur les aides techniques.
« Ces équipes sont pluridisciplinaires. Elles sont indépendantes de toute activité commerciale relative aux aides techniques ou à l’adaptation du logement.
« Un décret détermine le cahier des charges national que respectent ces équipes ainsi que leurs modalités d’organisation, leur composition et leurs ressources. »
II. – Le I du présent article entre en vigueur le 1er janvier 2025.
Article 1er bis E
I. – Au premier alinéa de l’article L. 312-4 du code de l’action sociale et des familles, après le mot : « cohérence », sont insérés les mots : « et selon une même temporalité ».
II. – Au III de l’article L. 1434-3 du code de la santé publique, après le mot : « cohérence », sont insérés les mots : « et selon une même temporalité ».
III (nouveau). – Les I et II du présent article entrent en vigueur le premier jour du soixantième mois suivant la promulgation de la présente loi.
Article 1er bis FA
Le titre VIII du livre V du code de l’action sociale et des familles est complété par un chapitre III ainsi rédigé :
« CHAPITRE III
« Dispositions relatives à Saint-Martin
« Art. L. 583-1. – Le conseil départemental de la citoyenneté et de l’autonomie mentionné aux articles L. 149-1 et L. 149-2 est dénommé “conseil territorial de la citoyenneté et de l’autonomie”. Il est présidé par le président du conseil territorial. Il est composé d’un représentant :
« 1° Du conseil territorial ;
« 2° De l’agence régionale de santé ;
« 3° Du recteur d’académie ;
« 4° De la caisse générale de sécurité sociale de Guadeloupe ;
« 5° Des intervenants qui contribuent au maintien du lien social des personnes âgées et des personnes handicapées ;
« 6° Des bailleurs sociaux ;
« 7° Des organisations syndicales représentatives des employeurs et des salariés des établissements et services mentionnés aux 6° et 7° du I de l’article L. 312-1 ;
« 8° Des personnes âgées, des personnes retraitées issues notamment des organisations syndicales représentatives, des personnes handicapées, de leurs familles et de leurs proches aidants.
« Les modalités de désignation des membres et de fonctionnement du conseil territorial de la citoyenneté et de l’autonomie sont fixées par un arrêté du représentant de l’État à Saint-Martin.
« Art. L. 583-2. – Pour l’application à Saint-Martin des articles L. 146-3, L. 146-4 et L. 581-6, un service de la collectivité territoriale peut, dans le cadre d’une convention passée avec l’État, exercer les missions d’une maison départementale des personnes handicapées.
« Ce service peut organiser des actions de coordination avec les autres dispositifs sanitaires et médico-sociaux concernant les personnes handicapées.
« La collectivité territoriale peut conclure une convention avec les organismes de sécurité sociale ainsi qu’avec d’autres personnes morales, notamment celles représentant les organismes gestionnaires d’établissements ou de services destinés aux personnes handicapées, celles assurant une mission de coordination ou celles participant au fonds départemental de compensation du handicap. »
Article 1er bis F
I. – Le titre Ier du livre III du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° A Le 3° de l’article L. 312-7 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les fonctionnaires territoriaux et les agents territoriaux non titulaires exerçant, au sein d’un établissement ou d’un service membre du groupement de coopération sociale ou médico-sociale, une mission transférée au groupement sont de plein droit et sans limitation de durée mis à disposition, à titre individuel, du groupement. Les modalités de cette mise à disposition sont réglées par une convention entre l’établissement, le service d’origine ou la personne physique ou morale gestionnaire, d’une part, et le groupement, d’autre part.
« Par dérogation à l’article L. 512-7 du code général de la fonction publique, les agents hospitaliers d’un établissement mentionné à l’article L. 5 du même code membre d’un groupement de coopération sociale ou médico-sociale qui exercent une mission transférée au groupement sont de plein droit mis à disposition du groupement sur décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination. Les modalités de cette mise à disposition sont réglées par une convention entre l’établissement d’origine et le groupement ; »
1° Après la section 4 du chapitre II, est insérée une section 4 bis ainsi rédigée :
« Section 4 bis
« Coopérations
« Sous-section unique
« Groupement territorial social et médico-social
« Art. L. 312-7-2. – I. – Les établissements publics mentionnés aux I et II de l’article L. 313-12, les accueils de jour autonomes publics et les services à domicile publics mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1, à l’exception de ceux gérés par un centre communal ou intercommunal d’action sociale ou une collectivité territoriale, ont l’obligation d’adhérer :
« 1° À un groupement hospitalier de territoire mentionné à l’article L. 6132-1 du code de la santé publique ;
« 2° Ou à un groupement territorial social et médico-social prévu au présent article.
« Les établissements publics mentionnés au IV ter de l’article L. 313-12, les accueils de jour autonomes publics et les services à domicile publics mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1 gérés par un centre communal ou intercommunal d’action sociale ou par une collectivité territoriale peuvent adhérer à un groupement, après approbation de leur organisme gestionnaire.
« Les établissements publics mentionnés au IV ter de l’article L. 313-12, les accueils de jour autonomes publics et les services à domicile publics mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1 gérés par un établissement public de santé peuvent adhérer à un groupement territorial social et médico-social, après approbation dudit établissement public de santé.
« Les établissements publics autonomes mentionnés aux 2°, 5° et 7° du même I peuvent adhérer au groupement territorial social et médico-social, sous réserve de l’accord du directeur général de l’agence régionale de santé compétent.
« II. – Le groupement territorial social et médico-social est constitué à l’initiative des établissements et des services mentionnés au I du présent article. Le territoire d’implantation choisi par le groupement lui permet d’assurer une réponse de proximité aux besoins des personnes âgées et de mettre en œuvre un parcours coordonné des personnes âgées accompagnées.
« Les établissements publics mentionnés au premier alinéa du présent II peuvent, avec l’accord du directeur général de l’agence régionale de santé, déroger à l’obligation d’adhérer à un groupement s’ils sont issus de la fusion de plusieurs établissements publics ou s’ils présentent une spécificité dans l’offre départementale d’accompagnement des personnes âgées.
« Ces établissements restent soumis à l’obligation de signer une convention mentionnée à l’article L. 312-7-3.
« Le directeur général de l’agence régionale de santé apprécie la conformité de la convention constitutive du groupement avec le projet régional de santé mentionné à l’article L. 1434-1 du code de la santé publique.
« III. – Le groupement territorial social et médico-social prend la forme juridique d’un groupement de coopération sociale ou médico-sociale défini à l’article L. 312-7 du présent code.
« Il a pour objet, d’une part, de mettre en œuvre une stratégie commune d’accompagnement des personnes âgées dans une logique de parcours et, d’autre part, de rationaliser les modes de gestion par une mise en commun de fonctions et d’expertises.
« Dans chaque groupement, les établissements et les services membres élaborent un projet d’accompagnement partagé garantissant l’accès à une offre d’accompagnement coordonnée et la transformation des modes d’accompagnement au bénéfice des personnes âgées. Il comporte une partie relative à l’accompagnement des personnes handicapées vieillissantes.
« Art. L. 312-7-3. – I. – Chaque groupement territorial social et médico-social est partenaire d’un groupement hospitalier de territoire mentionné à l’article L. 6132-1 du code de la santé publique ou d’un établissement de santé.
« Ce partenariat prend la forme de la convention prévue à l’article L. 312-7 du présent code. Cette convention prévoit l’articulation entre le projet d’accompagnement partagé du groupement territorial social et médico-social et le projet médical du groupement hospitalier de territoire ou de l’établissement sanitaire.
« II. – Les établissements et services privés relevant des 6° et 7° du I de l’article L. 312-1 peuvent être partenaires d’un groupement territorial social et médico-social. Ce partenariat prend la forme de la convention prévue à l’article L. 312-7. Cette convention prévoit notamment l’articulation du projet d’accompagnement de ces établissements avec celui du groupement.
« Art. L. 312-7-4. – I. – Le groupement territorial social et médico-social élabore une stratégie commune d’accompagnement des personnes âgées pour assurer la cohérence de leur parcours dans le territoire, pouvant prévoir la détention ou l’exploitation par le groupement d’autorisations dans les conditions prévues au b du 3° de l’article L. 312-7. Ces autorisations déléguées au groupement peuvent être révisées dans les conditions définies à la section 1 du chapitre III du présent titre, après avis conjoint du directeur général de l’agence régionale de santé et du président du conseil départemental, lorsqu’elles portent sur les mêmes catégories d’établissements ou de services définies au I de l’article L. 312-1.
« II. – Le groupement territorial social et médico-social assure pour le compte de ses membres au moins une fonction parmi les suivantes :
« 1° La convergence des systèmes d’information des membres et la mise en place d’un dossier de l’usager permettant une prise en charge coordonnée ;
« 2° La formation continue des personnels ;
« 3° La démarche qualité et la gestion des risques ;
« 4° La gestion des ressources humaines ;
« 5° La gestion des achats ;
« 6° La gestion budgétaire et financière ;
« 7° Les services techniques.
« D’autres fonctions mentionnées dans la convention constitutive peuvent être confiées au groupement, pour le compte de tout ou partie de ses membres.
« Les membres d’un groupement territorial social et médico-social peuvent notamment mutualiser certains marchés et partager des compétences relatives à la passation des marchés publics.
« Le groupement peut assurer les missions mentionnées au 3° de l’article L. 312-7.
« Art. L. 312-7-5. – Le groupement territorial social et médico-social est dirigé par un directeur d’établissement sanitaire, social ou médico-social nommé par le directeur général de l’agence régionale de santé, après avis du président du conseil départemental, sur proposition de l’assemblée générale. À défaut de proposition de l’assemblée générale, le directeur général de l’agence régionale de santé nomme le directeur après le seul avis du président du conseil départemental. Le directeur du groupement peut diriger un ou plusieurs établissements membres du groupement.
« Il coordonne les fonctions exercées par le groupement pour le compte de ses membres et représente le groupement.
« Il élabore le budget du groupement, qui est approuvé par l’assemblée générale.
« Il recrute les agents fonctionnaires et contractuels affectés au groupement.
« L’indemnité du directeur est fixée par l’assemblée générale.
« Art. L. 312-7-6. – I. – Sous réserve de l’accord du directeur général de l’agence régionale de santé et par dérogation aux articles L. 511-5 et L. 511-7 du code monétaire et financier et à l’article L. 1618-2 du code général des collectivités territoriales, les établissements du groupement territorial social et médico-social mentionnés à l’article L. 315-1 du présent code peuvent mettre en commun leurs disponibilités déposées auprès de l’État.
« II. – Le groupement territorial social et médico-social peut :
« 1° Se constituer des fonds propres ;
« 2° Recourir à l’emprunt.
« Par dérogation au I de l’article L. 314-7, sous réserve de l’accord du directeur général de l’agence régionale de santé et, le cas échéant, du président du conseil départemental, le groupement territorial social et médico-social peut présenter un plan pluriannuel d’investissement et son plan de financement pour le compte d’un ou de plusieurs de ses membres. Ces plans sont soumis à l’approbation de l’autorité de tarification compétente, qui peut déroger au délai mentionné au second alinéa du II du même article L. 314-7 lorsque l’instruction de la demande présente une difficulté importante.
« III. – Par dérogation au IV ter de l’article L. 313-12, sous réserve de l’accord du directeur général de l’agence régionale de santé et du président du conseil départemental, le groupement territorial social et médico-social peut conclure un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens unique pour l’ensemble des établissements et des services qui relèvent de son périmètre.
« Lorsque le contrat est conclu au niveau du groupement territorial, il porte sur les fonctions mutualisées, sur les axes stratégiques du projet d’accompagnement partagé sur son territoire et sur les activités gérées par les membres du groupement.
« Art. L. 312-7-7. – Les modalités d’application de la présente sous-section sont déterminées par décret en Conseil d’État. » ;
2° Le I de l’article L. 314-7 est ainsi modifié :
a) Après le 3°, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l’établissement ou le service relève de l’état des prévisions de recettes et de dépenses mentionné à l’article L. 314-7-1, l’approbation des dispositions mentionnées aux 1° et 2° du présent I s’effectue dans le cadre d’un plan global de financement pluriannuel dont le modèle est fixé par arrêté conjoint des ministres chargés des affaires sociales et de la sécurité sociale. » ;
b) L’avant-dernier alinéa est complété par les mots : « , à l’exception des établissements pour personnes âgées dépendantes relevant du 4° du même article L. 342-1 » ;
3° Avant le dernier alinéa de l’article L. 315-14, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le présent article s’applique également aux délibérations des groupements mentionnés au 2° du I de l’article L. 312-7-2. » ;
4° L’article L. 315-16 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après le mot : « médico-sociaux », sont insérés les mots : « et des groupements mentionnés au 2° du I de l’article L. 312-7-2 » ;
b) Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les établissements relèvent d’un groupement territorial social et médico-social, un comptable public unique est désigné. »
II. – L’article L. 5 du code général de la fonction publique est complété par un 7° ainsi rédigé :
« 7° Groupements territoriaux sociaux et médico-sociaux mentionnés à l’article L. 312-7-2 du code de l’action sociale et des familles. »
III. – Les I et II du présent article entrent en vigueur le 1er janvier 2025. Toutefois, une période transitoire de trois ans à compter de cette même date est instaurée afin de permettre la mise en place des groupements territoriaux sociaux et médico-sociaux sur l’ensemble du territoire métropolitain.
Au terme de la première année, le directeur général de l’agence régionale de santé arrête avec les présidents des conseils départementaux de la région la liste des groupements territoriaux sociaux et médico-sociaux.
Les groupements de coopération sociale ou médico-sociale publics mentionnés à l’article L. 312-7 du code de l’action sociale et des familles existants peuvent être transformés en groupements territoriaux sociaux et médico-sociaux, dans les conditions mentionnées à la section 4 bis du chapitre II du titre Ier du livre III du même code.
L’obligation mentionnée au I de l’article L. 312-7-2 dudit code ne s’applique pas aux territoires et collectivités d’outre-mer.
Article 1er bis G
Le chapitre III bis du titre II du livre II du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° La dernière phrase du 2° de l’article L. 223-5 est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « Elle assure, au bénéfice des départements, des maisons départementales des personnes handicapées mentionnées à l’article L. 146-3 du code de l’action sociale et des familles et des maisons départementales de l’autonomie mentionnées à l’article L. 149-4 du même code, une mission nationale d’accompagnement, de conseil et d’audit, en vue de déployer des outils de contrôle interne et de maîtrise des risques, de garantir la qualité du service, notamment celle du service public départemental de l’autonomie mentionné à l’article L. 149-5 dudit code, et de veiller à l’égalité de traitement des demandes de droits et de prestations de soutien à l’autonomie. Elle évalue la contribution des maisons départementales des personnes handicapées et des maisons départementales de l’autonomie aux politiques de l’autonomie des personnes handicapées et des personnes âgées ; » ;
2° Il est ajouté un article L. 223-18 ainsi rédigé :
« Art. L. 223-18. – Pour l’exercice des missions définies à l’article L. 223-5, les départements, les maisons départementales des personnes handicapées et les maisons départementales de l’autonomie communiquent à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie tous les documents et les renseignements utiles à la conduite de ses travaux et autorisent l’organisation de missions sur place.
« Un décret détermine les modalités d’application du présent article. »
Articles 1er bis et 1er ter
(Supprimés)
Article 2
L’article L. 121-6-1 du code de l’action sociale et des familles est ainsi rédigé :
« Art. L. 121-6-1. – I. – Afin de favoriser l’intervention des services sanitaires, des centres communaux et intercommunaux d’action sociale ainsi que des établissements et des services sociaux et médico-sociaux mentionnés aux 6° et 7° du I de l’article L. 312-1, les maires recueillent les éléments relatifs à l’identité, à l’âge et au domicile des personnes âgées et des personnes en situation de handicap qui sollicitent une telle intervention.
« Ils peuvent également procéder à ce recueil à la demande d’un tiers à la condition que la personne concernée, ou son représentant légal, ne s’y soit pas opposée.
« Sauf opposition de la personne concernée ou, le cas échéant, de la personne chargée à son égard d’une mesure de protection juridique avec représentation, les données relatives aux bénéficiaires de l’allocation personnalisée d’autonomie à domicile, de la prestation de compensation du handicap ou de prestations d’action sociale versées au titre de la perte d’autonomie par des organismes d’assurance vieillesse, et strictement nécessaires à l’accomplissement des missions mentionnées au II du présent article, sont transmises aux maires respectivement par le président du conseil départemental et par la caisse d’assurance retraite et de la santé au travail.
« II. – Les maires peuvent transmettre aux services sanitaires, aux centres communaux et intercommunaux d’action sociale ainsi qu’aux établissements et aux services sociaux et médico-sociaux autorisés mentionnés aux 6° et 7° du I de l’article L. 312-1 les données mentionnées au premier alinéa du I du présent article et strictement nécessaires :
« 1° Pour organiser un contact périodique avec les personnes répertoriées lorsque le plan d’alerte et d’urgence prévu à l’article L. 116-3 est mis en œuvre ;
« 2° Pour proposer à ces personnes des actions visant à lutter contre l’isolement social et à repérer les situations de perte d’autonomie ;
« 3° Pour informer les personnes âgées ou les personnes en situation de handicap et leurs proches des dispositifs d’aide et d’accompagnement existants et de leurs droits.
« III. – Les registres nominatifs créés au titre du recueil d’informations mentionné au premier alinéa du I sont tenus dans le respect des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. Ces données nominatives ne peuvent être consultées que par les agents chargés de la mise en œuvre de ce recueil et de celle du plan d’alerte et d’urgence mentionné à l’article L. 116-3 ainsi que les personnes participant à la réalisation des missions mentionnées au II du présent article. La diffusion de ces données à des personnes non autorisées à y accéder ou leur détournement sont passibles des peines prévues aux articles 226-16 à 226-24 du code pénal.
« Ces informations sont recueillies, transmises et utilisées dans des conditions garantissant leur confidentialité et selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. »
Article 2 bis A
I. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° L’article L. 1411-6-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les rendez-vous de prévention proposés aux personnes âgées d’au moins soixante ans contribuent à la mise en œuvre du programme de dépistage précoce et de prévention de la perte d’autonomie mentionné à l’article L. 1411-6-3. Ils donnent lieu à une information sur les conséquences de la grippe en matière de perte d’autonomie. » ;
2° Après le même article L. 1411-6-2, il est inséré un article L. 1411-6-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 1411-6-3. – Un programme de dépistage précoce et de prévention de la perte d’autonomie des personnes âgées d’au moins soixante ans est mis en œuvre en respectant un cahier des charges national défini par voie réglementaire.
« Un décret en Conseil d’État prévoit les modalités de pilotage du programme, définit les acteurs concourant à sa mise en œuvre et précise les conditions dans lesquelles ces derniers coopèrent et collectent, transmettent et utilisent des données nominatives dans des conditions garantissant leur confidentialité. »
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2025.
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Articles 2 bis et 2 ter
(Supprimés)
TITRE II
PROMOUVOIR LA BIENTRAITANCE EN LUTTANT CONTRE LES MALTRAITANCES DES PERSONNES EN SITUATION DE VULNÉRABILITÉ ET GARANTIR LEURS DROITS FONDAMENTAUX
Article 3
I. – Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Au 1° de l’article L. 311-1, après le mot : « médico-sociaux », sont insérés les mots : « , prévention et lutte contre les maltraitances définies à l’article L. 119-1 et les situations d’isolement » ;
2° L’article L. 311-3 est ainsi modifié :
aa) Le premier alinéa est ainsi modifié :
– à la première phrase, les mots : « prise en charge » sont remplacés par les mots : « accueillie et accompagnée » ;
– au début de la seconde phrase, les mots : « Dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, » sont supprimés ;
a) Au 1°, après le mot : « privée », sont insérés les mots : « et familiale » ;
a bis et b) (Supprimés)
3° L’article L. 311-4 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après la dernière occurrence du mot : « personne », sont insérés les mots : « ou à la personne de confiance désignée dans les conditions prévues à l’article L. 311-5-1 » ;
b) À la première phrase du cinquième alinéa, les mots : « hors de la présence de toute autre personne, sauf si la personne accueillie choisit de se faire accompagner par la personne de confiance désignée en application de l’article L. 311-5-1 du présent code » sont remplacés par les mots : « auquel participe la personne de confiance en application de l’article L. 311-5-1 du présent code, sauf si la personne accueillie s’y oppose » ;
4° L’article L. 311-5-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 311-5-1. – Lors de sa prise en charge dans un établissement ou un service social ou médico-social, il est proposé à la personne majeure accueillie de désigner, si elle ne l’a pas déjà fait, une personne de confiance définie à l’article L. 1111-6 du code de la santé publique. » ;
4° bis Après le même article L. 311-5-1, il est inséré un article L. 311-5-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 311-5-2. – Les établissements mentionnés aux 6° et 7° du I de l’article L. 312-1 garantissent le droit des personnes qu’ils accueillent de recevoir chaque jour tout visiteur de leur choix. Sauf si le résident en exprime le souhait, aucune visite ne peut être subordonnée à l’information préalable de l’établissement.
« Le directeur de l’établissement ne peut s’opposer à une visite que si elle constitue une menace pour l’ordre public à l’intérieur ou aux abords de l’établissement ou si le médecin coordonnateur ou, à défaut, tout autre professionnel de santé consulté par le directeur de l’établissement estime qu’elle constitue une menace pour la santé du résident, pour celle des autres résidents ou pour celle des personnes qui y travaillent. Une telle décision, motivée, est notifiée sans délai à la personne sollicitant la visite et au résident. » ;
4° ter Le premier alinéa de l’article L. 311-7 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ce règlement détermine les modalités de respect du droit prévu au premier alinéa de l’article L. 311-5-2. » ;
5° Après le mot : « privée », la fin du troisième alinéa du 3° des articles L. 554-1, L. 564-1 et L. 574-1 est ainsi rédigée : « et familiale, notamment du droit de recevoir ses proches, de son intimité, de sa sécurité et de son droit à aller et venir librement ; ».
II. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° (Supprimé)
1° bis L’article L. 1111-6 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1111-6. – I. – Toute personne majeure peut désigner une personne de confiance qui peut être un parent, un proche ou le médecin traitant et qui sera consultée au cas où elle-même serait hors d’état d’exprimer sa volonté et de recevoir l’information nécessaire à cette fin. La personne de confiance rend compte de la volonté de la personne. Son témoignage prévaut sur tout autre témoignage.
« Si la personne majeure le souhaite, la personne de confiance l’accompagne dans ses démarches, assiste aux entretiens médicaux afin de l’aider dans ses décisions et l’aide à la connaissance et à la compréhension de ses droits si elle rencontre des difficultés.
« La désignation est faite par écrit et cosignée par la personne désignée. Elle est valable sans limitation de durée, à moins que la personne majeure ou la personne de confiance n’en disposent autrement. Elle est révisable et révocable à tout moment.
« Lorsqu’une personne fait l’objet d’une mesure de protection juridique avec représentation relative à la personne, elle peut désigner une personne de confiance avec l’autorisation du juge ou du conseil de famille s’il a été constitué. Dans l’hypothèse où la personne de confiance a été désignée avant la mesure de protection, le conseil de famille, le cas échéant, ou le juge peut confirmer la désignation de cette personne ou la révoquer.
« Lors de toute hospitalisation dans un établissement de santé, dans un hôpital des armées ou à l’Institution nationale des invalides, il est proposé au patient de désigner une personne de confiance dans les conditions prévues au présent article.
« II. – Dans le cadre du suivi de son patient, le médecin traitant s’assure que celui-ci est informé de la possibilité de désigner une personne de confiance et, le cas échéant, l’invite à procéder à une telle désignation. » ;
2° Après l’article L. 1112-2, il est inséré un article L. 1112-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1112-2-1. – Les établissements de santé garantissent le droit des personnes qu’ils accueillent de recevoir chaque jour tout visiteur de leur choix. Sauf si le patient en exprime le souhait, aucune visite ne peut être subordonnée à une information préalable de l’établissement.
« Le directeur de l’établissement ne peut s’opposer à une visite que si elle constitue une menace pour l’ordre public à l’intérieur ou aux abords de l’établissement ou si le médecin responsable de la prise en charge du patient ou, à défaut, tout autre professionnel de santé estime qu’elle constitue un risque pour la santé de la personne hospitalisée, celle des autres patients ou celle des personnes qui y travaillent. Une telle décision, motivée, est notifiée sans délai au patient et à la personne sollicitant la visite. » ;
3° Avant le dernier alinéa de l’article L. 1112-4, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dans ces établissements, la personne en fin de vie ou dont l’état requiert des soins palliatifs ne peut se voir refuser une visite quotidienne de toute personne de son choix et, lorsque son consentement ne peut pas être exprimé, de tout membre de sa famille ou de son entourage et, le cas échéant, de la personne de confiance qu’elle a désignée. Les établissements définissent les conditions qui permettent d’assurer ces visites et garantissent le respect des consignes permettant de protéger la santé du patient ou du résident et de ses visiteurs. » ;
3° bis Le I de l’article L. 1521-2 est ainsi modifié :
a) Au troisième alinéa, la référence : « , L. 1111-6 » est supprimée ;
b) Après le même troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’article L. 1111-6 est applicable dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir et de l’autonomie. » ;
3° ter L’article L. 1541-3 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– au cinquième alinéa, la référence : « , L. 1111-6 » est supprimée ;
– après le même cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’article L. 1111-6 est applicable dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir et de l’autonomie. » ;
b) Au 3° du II, les mots : « troisième alinéa » sont remplacés par les mots : « dernier alinéa du I » ;
c) Au début du IV, les mots : « Le dernier alinéa » sont remplacés par les mots : « L’avant-dernier alinéa du I » ;
4° Le III de l’article L. 3131-1 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les mesures prescrites par le ministre chargé de la santé en application du présent article ayant pour objet ou pour effet de faire obstacle à l’exercice du droit mentionné à l’article L. 1112-2-1 du présent code et à l’article L. 311-5-2 du code de l’action sociale et des familles sont prises après avis motivé du comité prévu à l’article L. 1412-1 du présent code.
« Aucune mesure ne peut avoir pour objet ou pour effet de faire obstacle à l’application de l’article L. 1112-4. »
III. – (Supprimé)
Articles 3 bis A, 3 bis B et 3 bis
(Supprimés)
Article 3 ter
Le livre III du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Après le sixième alinéa de l’article L. 311-4, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La conclusion du contrat de séjour ou l’élaboration du document individuel de prise en charge donne lieu à l’accord de principe ou au refus de la personne accueillie ou de son représentant légal pour le contrôle effectué dans son espace privatif en application de l’article L. 313-13-1 ainsi que pour la collecte, la conservation et le traitement des données personnelles recueillies au cours de sa prise en charge qui s’effectuent dans le respect des droits mentionnés à l’article L. 311-3, à partir d’un système d’information mentionné à l’article L. 312-9, dans des conditions définies par décret. Sur chacun de ces points, l’accord ou le refus est consigné par écrit dans le contrat de séjour ou le document individuel de prise en charge et demeure révocable à tout moment. » ;
1° bis Au début de la seconde phrase de l’article L. 313-13-1, le mot : « Toutefois, » est supprimé ;
2° Après le mot : « occupant », la fin de la même seconde phrase est ainsi rédigée : « et lorsque celui-ci ou son représentant légal a donné son accord écrit, recueilli et consigné dans les conditions mentionnées au septième alinéa de l’article L. 311-4 ou au dernier alinéa de l’article L. 342-1 du présent code ou, à défaut, recueilli le jour du contrôle par un agent habilité et assermenté dans les conditions prévues à l’article L. 331-8-2. » ;
3° Après la première phrase du dernier alinéa de l’article L. 342-1, sont insérées deux phrases ainsi rédigées : « La signature du contrat donne lieu au recueil de l’accord de principe ou du refus de la personne âgée ou de son représentant légal pour le contrôle effectué dans son espace de vie privatif en application de l’article L. 313-13-1 ainsi que pour la collecte, la conservation et le traitement des données personnelles recueillies au cours de sa prise en charge qui s’effectuent dans le respect des droits mentionnés à l’article L. 311-3, à partir d’un système d’information mentionné à l’article L. 312-9, dans des conditions définies par décret. Sur chacun de ces points, l’accord ou le refus est consigné par écrit dans le contrat et demeure révocable à tout moment. »
Article 4
I. – Le chapitre IX du titre Ier du livre Ier du code de l’action sociale et des familles est complété par des articles L. 119-2 et L. 119-3 ainsi rédigés :
« Art. L. 119-2. – Toute personne ayant connaissance de faits constitutifs d’une maltraitance, au sens de l’article L. 119-1, envers une personne majeure en situation de vulnérabilité du fait de son âge ou de son handicap, au sens de l’article L. 114, les signale à la cellule mentionnée à l’article L. 1432-1 du code de la santé publique. Les personnes soumises au secret professionnel peuvent signaler les faits constitutifs d’une maltraitance en application de l’article 226-14 du code pénal.
« Les faits signalés au moyen d’un numéro d’appel national unique font également l’objet, dans le cadre d’un protocole établi entre les gestionnaires du service d’appel téléphonique et l’agence régionale de santé, d’une transmission à la cellule.
« Ladite cellule transmet les signalements sans délai, pour leur évaluation et leur traitement :
« 1° Au directeur de l’agence régionale de santé lorsque le signalement implique un professionnel, un établissement ou un service intervenant au titre d’une activité financée au moins partiellement par l’assurance maladie ;
« 1° bis Au représentant de l’État dans le département lorsque le signalement implique un professionnel, un établissement ou un service intervenant au titre d’une activité autorisée ou agréée par l’État non financée par l’assurance maladie ;
« 2° Au président du conseil départemental lorsque le signalement implique un professionnel, un établissement ou un service intervenant au titre d’une activité financée exclusivement par le conseil départemental ou toute autre personne ne relevant ni du 1° ni du 1° bis du présent article.
« Les autorités mentionnées aux 1°, 1° bis et 2° s’apportent mutuellement concours dans le cadre de protocoles. Le partage des informations relatives à une situation individuelle est limité à ce qui est strictement nécessaire à l’évaluation et au traitement du signalement. Après évaluation, les situations individuelles font, le cas échéant, l’objet d’un signalement à l’autorité judiciaire.
« Les actions mises en œuvre par les autorités mentionnées aux mêmes 1°, 1° bis et 2° pour traiter les signalements sont communiquées à la cellule mentionnée au 4° de l’article L. 1432-1 du code de la santé publique. Cette cellule présente chaque année à la conférence régionale de la santé et de l’autonomie un compte rendu, par département, de l’activité de recueil, d’évaluation et de traitement des signalements de maltraitance.
« Les signalements et les transmissions d’informations mentionnés au présent article, à l’exception des signalements adressés à l’autorité judiciaire, sont centralisés par l’intermédiaire d’un système d’information mis en œuvre par l’État. Ce système d’information facilite le suivi, l’évaluation et le traitement des signalements de maltraitance et permet l’exploitation statistique de ces informations. Un décret pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés détermine les conditions de mise en œuvre de ce système d’information.
« Dans le respect de l’intérêt de la personne majeure en situation de vulnérabilité ainsi que du secret professionnel et dans des conditions déterminées par décret, cette cellule informe les personnes qui lui ont signalé les faits constitutifs de maltraitance des suites qui ont été données à leur signalement. »
« Art. L. 119-3. – (Supprimé) »
II. – Après le 3° de l’article L. 1432-1 du code de la santé publique, il est inséré un 4° ainsi rédigé :
« 4° Une cellule chargée du recueil, du suivi et du traitement des signalements de maltraitance envers les personnes majeures en situation de vulnérabilité du fait de leur âge ou de leur handicap, au sens de l’article L. 114 du code de l’action sociale et des familles, dans les conditions prévues à l’article L. 119-2 du même code. »
III. – L’article 226-14 du code pénal est ainsi modifié :
1° Au 1°, après les mots : « ou administratives », sont insérés les mots : « de maltraitances, » ;
2° À la première phrase du 2°, les mots : « les sévices » sont remplacés par les mots : « ou qui porte à la connaissance de la cellule mentionnée à l’article L. 119-2 du même code les sévices, maltraitances ».
IV (nouveau). – Le douzième alinéa du I de l’article L. 511-33 du code monétaire et financier est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ils peuvent également communiquer ces informations aux autorités mentionnées aux 1°, 1° bis et 2° de l’article L. 119-2 du code de l’action sociale et des familles dans le cadre du dispositif prévu à ce même article, dès lors que ces informations concernent des faits de maltraitances ayant une incidence sur la situation financière d’une personne majeure en situation de vulnérabilité, notamment en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique, et uniquement avec l’accord de la victime. »
Article 4 bis
L’article L. 1411-3 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° La première phrase du premier alinéa est complétée par les mots : « et de lutte contre les maltraitances » ;
2° Le second alinéa est ainsi modifié :
a) Après les mots : « système de santé, », sont insérés les mots : « des personnes accueillies ou accompagnées » ;
b) Après le mot : « prévention, », sont insérés les mots : « des représentants des professionnels des établissements et des services sociaux ou médico-sociaux, des acteurs de la lutte contre les maltraitances, ».
Article 5
Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° L’article L. 471-1 est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
b) Sont ajoutés cinq alinéas ainsi rédigés :
« Ils assurent, dans les limites du mandat qui leur est confié, la protection juridique de la personne et de ses intérêts patrimoniaux.
« Ils exercent leurs missions dans le respect des principes définis à l’article 415 du code civil en recherchant, lorsque cela est possible, le consentement éclairé de la personne protégée.
« Une charte nationale est établie par les organismes représentatifs des mandataires judiciaires à la protection des majeurs et publiée par arrêté du ministre chargé des affaires sociales. Elle fixe les principes éthiques et déontologiques applicables à leur profession.
« La mission d’accompagnement des mandataires judiciaires à la protection des majeurs s’exerce sans préjudice de l’accompagnement social auquel la personne protégée peut avoir droit.
« Les mandataires judiciaires à la protection des majeurs et le personnel d’encadrement des services mentionnés au 14° du I de l’article L. 312-1 du présent code sont tenus de suivre une formation continue, dont la durée, le contenu et les modalités sont fixés par décret. » ;
2° (Supprimé)
Article 5 bis A
I. – L’article L. 133-6 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;
b) Après le mot : « publique », sont insérés les mots : « ou aux 1° et 2° de l’article L. 7231-1 du code du travail » ;
c) Après le mot : « bénévole », sont insérés les mots : « , y exercer une activité ayant le même objet en qualité de salarié employé par un particulier employeur au sens de l’article L. 7221-1 du même code » ;
2° Au neuvième alinéa, le mot : « article » est remplacé par la référence : « I » ;
3° Le dix-septième alinéa est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée la mention : « II. – » ;
b) Les mots : « aux seize premiers alinéas » sont remplacés par les mots : « au I » ;
4° Après le même dix-septième alinéa, sont insérés cinq alinéas ainsi rédigés :
« L’administration chargée de ce contrôle peut délivrer une attestation à la personne qui ne fait pas l’objet d’une inscription entraînant les incapacités mentionnées au I du présent article au moyen d’un système d’information sécurisé permettant, par dérogation au premier alinéa des articles 706-53-11 et 777-3 du code de procédure pénale, la consultation des deux traitements de données mentionnés au premier alinéa du présent II, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« L’attestation mentionnée au deuxième alinéa du présent II fait état de l’absence de condamnation non définitive ou de mise en examen mentionnées au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes.
« L’attestation ainsi délivrée peut être communiquée à l’employeur, au directeur d’un établissement, d’un service ou d’un lieu de vie et d’accueil et à l’autorité délivrant l’agrément. L’administration chargée du contrôle peut également transmettre à cet employeur ou à ce directeur, pour les besoins du contrôle des incapacités à intervalles réguliers, l’information selon laquelle une personne en exercice est frappée par une incapacité mentionnée au I ou fait l’objet d’une mention au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes.
« III. – Lorsque, en application des articles 11-2 ou 706-47-4 du code de procédure pénale ou en application du II du présent article, le directeur d’un établissement, d’un service ou d’un lieu de vie et d’accueil mentionné au I du présent article est informé de la condamnation non définitive ou de la mise en examen d’une personne y travaillant au titre de l’une des infractions mentionnées au même I, il peut, en raison de risques pour la santé ou la sécurité des mineurs ou majeurs en situation de vulnérabilité avec lesquels elle est en contact, prononcer à l’encontre de la personne concernée une mesure de suspension temporaire d’activité jusqu’à la décision définitive de la juridiction compétente.
« Lorsque l’incapacité est avérée et qu’il n’est pas possible de proposer un autre poste de travail n’impliquant aucun contact avec des personnes accueillies ou accompagnées dans l’un des dispositifs mentionnés au I du présent article, il est mis fin au contrat de travail ou aux fonctions de la personne concernée. Le fonctionnaire détaché ou mis à disposition dont l’incapacité est avérée est remis à disposition de son administration d’origine. » ;
5° Au dix-huitième alinéa, les mots : « aux seize premiers alinéas » sont remplacés par les mots : « au I » ;
6° À la fin de la seconde phrase de l’avant-dernier alinéa, les mots : « dix-huitième alinéa du présent article » sont remplacés par les mots : « troisième alinéa du présent III ».
II. – L’article 706-53-7 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Le 3° est ainsi modifié :
a) Les mots : « décisions administratives » sont remplacés par le mot : « procédures » ;
b) Après le mot : « habilitation », la fin est ainsi rédigée : « ou pour le contrôle de l’exercice : » ;
c) Sont ajoutés des a et b ainsi rédigés :
« a) Des activités ou des professions impliquant un contact avec des mineurs ;
« b) Des activités ou des professions, dont la liste est établie par décret en Conseil d’État, impliquant un contact avec des majeurs en situation de vulnérabilité du fait de leur âge ou de leur handicap, au sens de l’article L. 114 du code de l’action sociale et des familles ; »
1° bis Au 4°, après la référence : « 706-53-6 », sont insérés les mots : « du présent code » ;
2° À la fin du septième alinéa, les mots : « par la décision administrative » sont supprimés ;
3° Le dernier alinéa est ainsi modifié :
a) Après le mot : « préfets », sont insérés les mots : « ou des administrations de l’État désignées par décret en Conseil d’État » ;
b) Les mots : « décisions administratives mentionnées » sont remplacés par les mots : « procédures et contrôles mentionnés » ;
c) À la fin, les mots : « concernant des activités ou professions impliquant un contact avec des mineurs ainsi que pour le contrôle de l’exercice de ces activités ou professions » sont supprimés.
Articles 5 bis et 5 ter
(Supprimés)
TITRE II bis
RENFORCER L’AUTONOMIE DES ADULTES VULNÉRABLES EN FAVORISANT L’APPLICATION DU PRINCIPE DE SUBSIDIARITÉ
Articles 5 quater à 5 sexies
(Supprimés)
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Articles 5 octies et 5 nonies
(Supprimés)
Article 5 decies
I. – Le chapitre II du titre XI du livre Ier du code civil est ainsi modifié :
1° La section 1 est complétée par un article 427-1 ainsi rédigé :
« Art. 427-1. – Les informations relatives aux mesures de sauvegarde de justice, de curatelle, de tutelle et d’habilitation familiale ainsi que celles relatives aux mandats de protection future ayant pris effet en application de l’article 481 et aux désignations anticipées prévues à l’article 448 sont inscrites dans un registre national dématérialisé dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État. » ;
2° (Supprimé)
II. – Le 1° du I entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 31 décembre 2026.
TITRE III
GARANTIR À CHACUN DES CONDITIONS D’HABITAT AINSI QUE DES PRESTATIONS DE QUALITÉ ET ACCESSIBLES, GRÂCE À DES PROFESSIONNELS ACCOMPAGNÉS ET SOUTENUS DANS LEURS PRATIQUES
Article 6
I. – Après l’article L. 313-1-3 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un article L. 313-1-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 313-1-4. – Les professionnels intervenant au domicile des personnes âgées et des personnes handicapées disposent d’une carte professionnelle.
« La délivrance de cette carte est soumise à l’obtention préalable d’une certification professionnelle attestant de la qualification et de la compétence des intervenants à domicile ou à la justification de trois années d’exercice professionnel dans des activités d’intervention au domicile des personnes âgées ou des personnes handicapées.
« Un décret définit les catégories de professionnels bénéficiant de la carte professionnelle, les modalités de délivrance et de retrait de cette carte ainsi que les facilités associées à la détention de la carte, notamment pour les déplacements des professionnels au domicile des personnes âgées et des personnes handicapées. »
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2025.
Article 7
La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie verse une aide financière annuelle aux départements et aux collectivités territoriales uniques afin de contribuer :
1° Au soutien à la mobilité, quel que soit le mode de transport, individuel ou collectif, des professionnels de l’ensemble du territoire assurant des prestations d’aide et d’accompagnement dans les services autonomie à domicile mentionnés à l’article L. 313-1-3 du code de l’action sociale et des familles. Une partie de cette contribution peut être affectée par les départements à des aides financières à l’obtention du permis de conduire pour ces professionnels, lorsqu’ils ne peuvent bénéficier d’aucun autre dispositif poursuivant le même objectif ;
2° À l’organisation de temps de dialogue et de partage de bonnes pratiques entre professionnels de l’aide à domicile.
Les départements et les collectivités transmettent annuellement à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie le montant et l’objet des affectations de cette aide financière ainsi qu’une évaluation de son effet sur le soutien au secteur de l’aide à domicile dans le département.
Les modalités du versement de l’aide aux départements et aux collectivités sont fixées par décret. Elles favorisent l’utilisation de véhicules à faibles émissions ou très faibles émissions et tiennent compte des difficultés de continuité territoriale dans les territoires ultramarins et insulaires.
Article 7 bis
(Supprimé)
Article 8
I. – À compter du 1er janvier 2025, une expérimentation visant à modifier les modalités de financement des services autonomie à domicile mentionnés à l’article L. 313-1-3 du code de l’action sociale et des familles, au titre de leur activité d’aide et d’accompagnement, est mise en œuvre par dix départements au plus.
II. – Les départements mentionnés au I du présent article peuvent :
1° Par dérogation aux articles L. 314-2-1 et L. 347-1 du code de l’action sociale et des familles, mettre en place une dotation globale ou forfaitaire, en remplacement total ou partiel des tarifs horaires, dans le cadre d’une convention avec les services concernés. Par dérogation à l’article L. 313-12-2 du même code, les services autonomie à domicile participant à l’expérimentation ne sont pas soumis à l’obligation de conclure un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens jusqu’au 31 décembre 2026 ;
2° Par dérogation aux articles L. 314-2-1 et L. 314-2-2 du même code, allouer tout ou partie de la dotation mentionnée au 3° du I de l’article L. 314-2-1 du même code sous la forme d’une dotation populationnelle dépendant du nombre et des caractéristiques des usagers concernés et pouvant être modulée selon des engagements relatifs à la qualité du service, à la prévention et à l’accompagnement.
Ces expérimentations font l’objet d’une convention entre le président du conseil départemental, le directeur général de l’agence régionale de santé et le directeur de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie. Le directeur de la caisse d’assurance retraite et de santé au travail peut être partie à la convention.
Elles sont engagées pour une durée maximale de deux ans et prennent fin au plus tard le 31 décembre 2026.
Au plus tard six mois avant la fin de l’expérimentation, un comité d’évaluation remet un rapport au Parlement. Ce rapport évalue l’effet des adaptations du financement des services concernés sur la qualité de prise en charge, notamment l’amplitude et la continuité de l’accompagnement, sur le reste à charge des personnes bénéficiaires, sur l’équilibre économique des services et sur la qualité de vie au travail des professionnels.
Les modalités d’application du présent II sont fixées par décret.
III. – Le III de l’article 44 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022 est abrogé.
Article 8 bis
Le C du II de l’article 44 de la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022 est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) (nouveau) À la première phrase, après le mot : « ans », sont insérés les mots : « et six mois » ;
b) La seconde phrase est supprimée ;
2° Après le même premier alinéa, sont insérés neuf alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation à l’article L. 313-2 du code de l’action sociale et des familles, les autorités mentionnées au d de l’article L. 313-3 du même code peuvent délivrer cette autorisation à des services de soins infirmiers à domicile et à des services autonomie à domicile déjà autorisés pour l’activité d’aide et d’accompagnement remplissant les conditions suivantes :
« 1° Avoir, dans le délai mentionné au premier alinéa du présent C et pour une durée maximale de cinq ans, conclu une convention ou constitué un groupement mentionné au 3° de l’article L. 312-7 du code de l’action sociale et des familles afin d’exploiter cette autorisation, dans la perspective de constituer, à l’issue de cette période, un service autonomie à domicile relevant du 1° de l’article L. 313-1-3 du même code doté d’une entité juridique unique ;
« 2° Respecter le cahier des charges mentionné au même article L. 313-1-3, sauf dérogation prévue par décret.
« L’autorisation et la convention précisent la zone d’intervention du service autonomie à domicile, qui doit être identique pour l’activité d’aide et d’accompagnement et l’activité de soins.
« Pendant la durée de l’autorisation, et pour la zone d’intervention définie, cette autorisation remplace l’autorisation des services autonomie à domicile ayant conclu une convention avec les services de soins infirmiers à domicile.
« Au terme de la durée mentionnée au 1° du présent C, l’autorisation devient caduque en l’absence de constitution du service autonomie à domicile doté d’une entité juridique unique. Les services autonomie à domicile ayant conclu la convention ou constitué le groupement avec les services de soins infirmiers à domicile en application du 1° du présent C sont considérés comme autorisés pour l’activité d’aide et d’accompagnement pour laquelle ils étaient autorisés avant la conclusion de ladite convention ou la constitution dudit groupement, pour la durée restant à courir à compter de la date d’autorisation initiale ou de la date de renouvellement de celle-ci.
« En cas de refus de l’autorisation par le président du conseil départemental et le directeur général de l’agence régionale de santé, les services de soins infirmiers à domicile restent régis par les dispositions qui leur étaient applicables à la date mentionnée au A du présent II pour une durée maximale de deux ans à compter de la notification de la décision de rejet de la demande d’autorisation, ou jusqu’à la date d’expiration de leur autorisation si celle-ci intervient pendant cette durée. Pendant cette durée, une autorisation peut leur être délivrée en tant que service autonomie à domicile dans les conditions prévues aux 1° et 2° du présent C.
« Par dérogation à l’article L. 313-2 du code de l’action sociale et des familles, l’absence de réponse dans un délai de six mois à compter du dépôt de la demande d’autorisation présentée en application du présent C vaut acceptation de celle-ci.
« Dans l’attente de leur constitution en services autonomie à domicile, les services de soins infirmiers à domicile restent régis par les dispositions qui leur étaient applicables à la date mentionnée au A du présent II, sous réserve du E. »
Article 8 ter
(Supprimé)
Article 9
Les deuxième et troisième alinéas de l’article L. 132-6 du code de l’action sociale et des familles sont remplacés par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation, sont dispensés de fournir cette aide :
« 1° Les enfants qui ont été retirés de leur milieu familial par décision judiciaire durant une période d’au moins trente-six mois cumulés au cours des dix-huit premières années de leur vie, sous réserve d’une décision contraire du juge aux affaires familiales ;
« 2° Les enfants dont l’un des parents est condamné comme auteur, co-auteur ou complice d’un crime ou d’une agression sexuelle commis sur la personne de l’autre parent, sous réserve d’une décision contraire du juge aux affaires familiales. Cette dispense porte uniquement sur l’aide au parent condamné ;
« 3° Les petits-enfants dans le cadre d’une demande d’aide sociale à l’hébergement pour le compte de l’un de leurs grands-parents.
« Cette dispense s’étend aux descendants des enfants et des petits-enfants mentionnés aux 1° à 3° du présent article. »
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Article 10 bis
I. – Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° A (nouveau) Au 1° de l’article L. 315-12, les mots : « au II de » sont remplacés par le mot : « à » ;
1° Au 4° de l’article L. 342-1, les mots : « au I de » sont remplacés par le mot : « à » ;
2° L’article L. 342-3-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 342-3-1. – Les établissements d’hébergement pour personnes âgées mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1 habilités totalement ou majoritairement au titre de l’aide sociale peuvent opter, après en avoir informé le conseil départemental, pour les dispositions du présent chapitre.
« Dans les établissements optant pour ce régime tarifaire, les tarifs afférents à l’hébergement pouvant être pris en charge par l’aide sociale départementale et opposables aux bénéficiaires de celle-ci ainsi que les prestations garanties auxquelles ils correspondent sont déterminés par le président du conseil départemental dans les conditions prévues au premier alinéa du 3° de l’article L. 314-2.
« Pour un même niveau de garantie, l’écart entre les tarifs fixés par l’établissement et les tarifs mentionnés au deuxième alinéa du présent article ne peut excéder un pourcentage fixé par décret. Le règlement départemental d’aide sociale mentionné à l’article L. 121-3 peut, pour tous les établissements habilités à l’aide sociale ou pour une partie d’entre eux, fixer cet écart à un pourcentage moins élevé afin de maintenir une offre d’hébergement accessible.
« Avant le 31 mars de chaque année, les établissements relevant du présent article transmettent au président du conseil départemental un état des demandes reçues et des admissions prononcées au cours de l’exercice précédent ainsi qu’un état du nombre de bénéficiaires de l’aide sociale accueillis. L’habilitation mentionnée à l’article L. 313-8-1, le contrat pluriannuel mentionné au IV ter de l’article L. 313-12 ou une convention d’aide sociale conclue pour une durée maximale de cinq ans entre le représentant de l’établissement et le président du conseil départemental peuvent fixer à l’établissement des objectifs en matière d’admission de bénéficiaires de l’aide sociale.
« En cas de baisse supérieure à un taux fixé par décret de la part des bénéficiaires de l’aide sociale accueillis dans un établissement ayant opté pour le régime tarifaire défini au présent article, le maintien de ce régime tarifaire est conditionné à la conclusion d’une convention d’aide sociale pour une durée maximale de cinq ans entre le représentant de l’établissement et le président du conseil départemental et fixant des objectifs en matière d’admission de bénéficiaires de l’aide sociale.
« Les tarifs afférents à l’hébergement appliqués aux résidents ne bénéficiant pas de l’aide sociale départementale sont revalorisés chaque année dans la limite du pourcentage prévu à l’article L. 342-3, sous réserve que l’écart entre ces tarifs et les tarifs applicables aux personnes bénéficiaires de l’aide sociale départementale n’excède pas l’écart maximum mentionné au troisième alinéa du présent article. »
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2025.
III. – Les tarifs afférents à l’hébergement applicables aux résidents non bénéficiaires de l’aide sociale à l’hébergement en application de l’article L. 342-3-1 du code de l’action sociale et des familles dans sa rédaction résultant de la présente loi ne sont opposables qu’aux résidents dont l’accueil dans l’établissement concerné intervient à compter de la date mentionnée au II du présent article.
IV. – Les conventions d’aide sociale conclues en application de l’article L. 342-3-1 du code de l’action sociale et des familles dans sa rédaction antérieure à la présente loi prennent fin au plus tard le 1er janvier 2027.
Article 11
Avant la dernière phrase du premier alinéa du 1° du I de l’article L. 314-2 du code de l’action sociale et des familles, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il peut financer des actions de prévention de la perte d’autonomie, notamment des actions de prévention de la dénutrition, des actions en faveur de l’activité physique adaptée, des actions visant à améliorer la qualité des soins et de l’accompagnement des personnes âgées ainsi que des actions de stimulation cognitive. »
Articles 11 bis A à 11 bis D
(Supprimés)
Article 11 bis E
Après l’article L. 311-9 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un article L. 311-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 311-9-1. – Sauf avis contraire du conseil de la vie sociale mentionné à l’article L. 311-6, les établissements mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1 garantissent aux résidents le droit d’accueillir leurs animaux de compagnie, sous réserve de leur capacité à assurer les besoins physiologiques, comportementaux et médicaux de ces animaux et de respecter les conditions d’hygiène et de sécurité définies par arrêté du ministre chargé des personnes âgées. Ce même arrêté détermine les catégories d’animaux qui peuvent être accueillis et peut prévoir des limitations de taille pour chacune de ces catégories. »
Article 11 bis F
I. – À titre expérimental, pour une durée de deux ans à compter du 1er juin 2024, le directeur général de l’agence régionale de santé peut, après consultation du président du conseil départemental, instaurer un quota minimal de chambres réservées à l’accueil de nuit dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes et dans les résidences autonomie.
II. – Les modalités de mise en œuvre de cette expérimentation ainsi que la liste des territoires concernés sont déterminées par décret.
III. – Dans un délai de six mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation, aux fins notamment d’apprécier l’opportunité de son extension à l’ensemble du territoire et de sa pérennisation.
IV. – (Supprimé)
Article 11 bis G
Après le VI de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un VI bis ainsi rédigé :
« VI bis. – Au titre de l’accueil temporaire mentionné au dernier alinéa du I, les établissements relevant du 6° du même I peuvent assurer un accueil de jour au sein des locaux dans lesquels ils assurent un accueil à titre permanent. Lorsque ces établissements disposent d’une capacité d’accueil autorisée inférieure à un seuil fixé par décret, ils peuvent assurer cet accueil de jour pour chacune de leurs places disponibles. »
Article 11 bis
Le V de l’article L. 313-12 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Au début de la deuxième phrase, le mot : « Sous » est remplacé par les mots : « Pour les établissements mentionnés au I, sous » et, après le mot : « encadrement », il est inséré le mot : « médical » ;
b) Au début de la sixième phrase, sont ajoutés les mots : « Pour les établissements mentionnés aux I et IV, » ;
2° Au début de la première phrase du second alinéa, sont ajoutés les mots : « Pour les établissements mentionnés au I, ».
Article 11 ter
(Supprimé)
Article 11 quater
L’article L. 230-5 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° A Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Pour les établissements accueillant des personnes âgées mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles, les règles relatives à la quantité et à la qualité nutritionnelle des repas proposés sont fixées par un cahier des charges établi par arrêté des ministres chargés des personnes âgées et de l’alimentation. » ;
1° À l’avant-dernier alinéa, après le mot : « privés, », sont insérés les mots : « des établissements sociaux et médico-sociaux, » ;
2° (Supprimé)
Article 11 quinquies
(Supprimé)
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Article 12
I. – Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° L’article L. 312-8 est ainsi modifié :
a) La deuxième phrase du premier alinéa est supprimée ;
a bis) (Supprimé)
b) Les deuxième et troisième alinéas sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :
« Les organismes pouvant procéder à l’évaluation mentionnée au premier alinéa du présent article sont accrédités par l’instance nationale d’accréditation mentionnée à l’article 137 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie ou par un organisme européen équivalent partie à l’accord multilatéral signé dans le cadre de la coordination européenne des organismes d’accréditation, dans des conditions prévues par décret.
« La Haute Autorité de santé établit le cahier des charges relatif aux exigences spécifiques, complémentaires à la norme d’accréditation, auxquelles sont soumis les organismes chargés des évaluations. L’instance nationale d’accréditation vérifie le respect de la norme d’accréditation et du cahier des charges.
« La Haute Autorité de santé peut informer l’instance nationale d’accréditation ou un organisme européen mentionné au deuxième alinéa du présent article des manquements au cahier des charges mentionné au troisième alinéa dont elle a connaissance. L’instance nationale d’accréditation lui indique les mesures mises en œuvre à la suite de cette information. » ;
c) Après le mot : « réserve », la fin de l’avant-dernier alinéa est ainsi rédigée : « de l’accréditation mentionnée au deuxième alinéa du présent article. » ;
d) Au dernier alinéa, les mots : « les référentiels » sont remplacés par les mots : « le référentiel » et le mot : « desquelles » est remplacé par le mot : « desquels » ;
2° L’article L. 312-8-1 est abrogé ;
3° L’article L. 312-9 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sont également fixées par décret les modalités de publication, par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, d’indicateurs applicables aux établissements et aux services sociaux et médico-sociaux mentionnés aux 6° et 7° du I de l’article L. 312-1, dans un format clair et accessible aux usagers et à leurs familles. Ces indicateurs portent notamment sur l’activité et le fonctionnement de ces établissements et de ces services, y compris en termes budgétaires et de ressources humaines, ainsi que sur l’évaluation de la qualité au sein de ces structures. » ;
4° La seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 313-1 est ainsi modifiée :
a) Le mot : « exclusivement » est remplacé par le mot : « notamment » ;
b) Les mots : « de l’évaluation mentionnée » sont remplacés par les mots : « des évaluations mentionnées » ;
c) Sont ajoutés les mots : « , dans des conditions définies par décret » ;
5° Au premier alinéa de l’article L. 313-5, les mots : « de l’évaluation externe » sont remplacés par les mots : « des évaluations ».
II. – À la deuxième phrase du II de l’article 89 de la loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement, le mot : « cinquième » est remplacé par le mot : « premier ».
Article 12 bis
I. – Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° L’article L. 311-4-1 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa du II est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le sort des arrhes éventuellement versées avant l’entrée en établissement est fixé par décret. » ;
b) Après le même II, il est inséré un II bis ainsi rédigé :
« II bis. – Les règles applicables au dépôt de garantie qui peut être demandé par les établissements d’hébergement mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1 et aux 2° à 4° de l’article L. 342-1 ainsi que les modalités de sa restitution sont définies par décret. » ;
2° Avant le dernier alinéa de l’article L. 314-10-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les modalités de facturation de frais au décès du résident sont précisées par décret. » ;
3° Après l’article L. 314-10-2, sont insérés des articles L. 314-10-3 et L. 314-10-4 ainsi rédigés :
« Art. L. 314-10-3. – Les frais facturés en cas d’absence ou d’hospitalisation sont définis par décret.
« Art. L. 314-10-4. – Les conditions de facturation et les modalités d’établissement des frais mentionnés dans le document individuel de prise en charge ou d’éventuels autres frais par les services proposant de l’aide et de l’accompagnement à domicile relevant des 6° ou 7° du I de l’article L. 312-1 sont précisées par décret. » ;
4° L’article L. 314-14 est ainsi modifié :
a) Au 1°, après le mot : « âgée », sont insérés les mots : « ou d’intervenir au domicile d’un bénéficiaire dans le cadre d’une prestation d’aide et d’accompagnement à domicile » et, après le mot : « charge », sont insérés les mots : « ni remis un livret d’accueil » ;
b) Au 3°, les mots : « du II » sont remplacés par les mots : « des II ou II bis » ;
c) Après le mot : « méconnaissance », la fin du 6° est ainsi rédigée : « des articles L. 314-10-2 ou L. 314-10-3 ; »
d) Après le même 6°, sont insérés des 7° et 8° ainsi rédigés :
« 7° De proposer ou de signer un document individuel de prise en charge ou de facturer des frais en méconnaissance de l’article L. 314-10-4 ;
« 8° De ne pas transmettre à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie les informations prévues à l’article L. 312-9. »
II. – Au 7° de l’article L. 511-7 du code de la consommation, après la référence : « L. 311-4-1, », est insérée la référence : « L. 312-9, » et la référence : « , L. 314-10-2 » est remplacée par les mots : « à L. 314-10-4 ».
Article 12 ter A
Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° L’article L. 313-24-1 est ainsi rétabli :
« Art. L. 313-24-1. – Les agents des agences régionales de santé, de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et des conseils départementaux peuvent se communiquer spontanément les informations et les documents détenus ou recueillis dans l’exercice de leurs missions, sans que les dispositions de l’article 11 du code de procédure pénale ou celles relatives au secret professionnel fassent obstacle à une telle communication. Ils peuvent communiquer les résultats des contrôles effectués et les suites qui leur sont données à l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation aux établissements et services mentionnés aux 6° et 7° du I de l’article L. 312-1 du présent code. » ;
2° Au 2° de l’article L. 314-14, les mots : « dont une des stipulations n’est pas » sont remplacés par le mot : « non » ;
3° L’article L. 347-1 est ainsi modifié :
a) Au deuxième alinéa, après le mot : « contractuelles », sont insérés les mots : « prises en charge par un plan d’aide ou de compensation » ;
b) Le dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le prix résultant de l’application d’un tel pourcentage ne peut être supérieur au montant des tarifs horaires arrêtés par le président du conseil départemental. »
Article 12 ter
(Supprimé)
Article 12 quater
I. – Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° L’article L. 313-1 est ainsi modifié :
a) Au début du premier alinéa, est insérée la mention : « I. – » ;
b) Les deux derniers alinéas sont remplacés par six alinéas ainsi rédigés :
« II. – Au moins deux mois avant sa mise en œuvre, tout changement important dans l’activité, l’installation, l’organisation, la direction ou le fonctionnement d’un établissement, d’un service ou d’un lieu de vie et d’accueil soumis à autorisation est déclaré à l’autorité compétente ayant délivré l’autorisation. Celle-ci peut faire opposition dans un délai de deux mois suivant la déclaration par une décision motivée, s’il apparaît que le changement envisagé méconnaît les dispositions du présent code, ne respecte pas les conditions de l’autorisation mentionnées à l’article L. 313-4 ou présente des risques susceptibles d’affecter la prise en charge des personnes accueillies ou accompagnées ou le respect de leurs droits.
« III. – Au moins deux mois avant sa mise en œuvre, tout changement dans les modalités de contrôle direct ou indirect de la personne morale gestionnaire de l’établissement, du service ou du lieu de vie et d’accueil se traduisant par l’exercice direct ou indirect d’un pouvoir prépondérant de décision ou de gestion par une nouvelle personne morale, est déclaré par cette dernière à l’autorité compétente ayant délivré l’autorisation.
« L’autorité compétente peut faire opposition dans un délai de deux mois suivant la réception de la déclaration par une décision motivée, s’il apparaît que le changement envisagé n’offre pas les garanties nécessaires au respect des conditions de l’autorisation mentionnées à l’article L. 313-4 ou présente des risques susceptibles d’affecter la prise en charge des personnes accueillies ou accompagnées ou le respect de leurs droits. L’autorité compétente examine la déclaration de changement le cas échéant au regard des conditions dans lesquelles la nouvelle personne morale assure déjà le contrôle, direct ou indirect d’une ou plusieurs personnes morales gestionnaires d’établissements, services et lieux de vie et d’accueil.
« Lorsque le changement mentionné aux II et III s’applique à un gestionnaire d’établissements, de services et de lieux de vie et d’accueil situés dans plusieurs départements, il est déclaré à l’autorité compétente dans le ressort territorial du siège de la personne morale gestionnaire.
« Les conditions d’application des II et III, notamment les modalités de l’instruction conjointe de la déclaration, sont fixées par décret.
« IV. – Les I et II du présent article sont applicables aux couples ou aux personnes qui accueillent habituellement de manière temporaire ou permanente, à temps complet ou partiels, à leur domicile, à titre onéreux, plus de personnes âgées ou handicapées adultes. » ;
2° L’article L. 313-22 est ainsi modifié :
a) À la fin du 3°, les mots : « la porter à la connaissance de l’autorité » sont remplacés par les mots : « avoir effectué la déclaration préalable prévue au II de l’article L. 313-1 » ;
b) Après le même 3°, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« 4° Le fait d’apporter les changements mentionnés au III du même article L. 313-1 sans les avoir portés préalablement à la connaissance de l’autorité compétente au moins deux mois avant leur mise en œuvre.
« Le montant de l’amende prévue au premier alinéa du présent article peut être porté, de manière proportionnée à la gravité des faits constatés, jusqu’à 5 % du chiffre d’affaires réalisé, en France et dans le champ d’activité en cause, par le gestionnaire lors du dernier exercice clos. »
II. – Le I est applicable aux changements mentionnés aux II et III de l’article L. 313-1 du code de l’action sociale et des familles, dans sa rédaction résultant de la présente loi, intervenant à compter du premier jour du troisième mois suivant la promulgation de la présente loi.
Article 12 quinquies
(Supprimé)
Article 13
I. – L’article L. 442-8-1-2 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi modifié :
a) Après la référence : « L. 365-4 », la fin est ainsi rédigée : « : » ;
b) Sont ajoutés des 1° et 2° ainsi rédigés :
« 1° Des logements bénéficiant de l’autorisation spécifique prévue au troisième alinéa du III de l’article L. 441-2, en vue de les sous-louer, meublés ou non, à une ou plusieurs personnes en perte d’autonomie en raison de l’âge ou d’un handicap, le cas échéant dans le cadre d’une colocation définie au I de l’article 8-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précitée ;
« 2° Lorsque ces logements sont loués en vue d’y constituer un habitat inclusif défini à l’article L. 281-1 du code de l’action sociale et des familles, des locaux collectifs résidentiels situés dans le même immeuble ou groupe d’immeubles, en vue d’y mettre en œuvre le projet de vie sociale et partagée mentionné au premier alinéa du même article L. 281-1. » ;
2° (Supprimé)
II. – L’article L. 281-1 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° À la deuxième phrase du b, les mots : « la mise à disposition non exclusive de locaux collectifs résidentiels situés dans le même immeuble ou groupe d’immeuble, pour la mise en œuvre du » sont remplacés par les mots : « celle de locaux collectifs résidentiels situés dans le même immeuble ou groupe d’immeuble, dans les conditions définies au I de l’article L. 442-8-1-2 du même code, ou de leur mise à disposition non exclusive, en vue d’y mettre en œuvre le » ;
2° À la fin du dernier alinéa, les mots : « même code » sont remplacés par les mots : « code de la construction et de l’habitation ».
III. – (Supprimé)
Article 13 bis A
Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° L’article L. 281-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l’application des règles de sécurité mentionnées à l’article L. 141-2 du même code, les locaux dans lesquels est établi l’habitat inclusif constituent des bâtiments à usage d’habitation. Des règles spécifiques en matière de sécurité contre les risques d’incendie sont déterminées par voie réglementaire. » ;
2° (Supprimé)
Article 13 bis B
L’article L. 313-12 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Au I, après la référence : « L. 312-1 », sont insérés les mots : « , à l’exclusion de ceux mentionnés au premier alinéa du III du présent article, » ;
2° Le III est ainsi modifié :
a) À la fin du premier alinéa, les mots : « aux seuils mentionnés au I du présent article » sont remplacés par les mots : « à des seuils fixés dans des conditions déterminées par décret » ;
b) À l’avant-dernier alinéa, le mot : « handicapées » est remplacé par les mots : « en situation de handicap ».
Article 13 bis C
Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° L’article L. 442-8-1-2 est ainsi modifié :
a) Le I est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’ils sous-louent des logements en vue d’y constituer un habitat inclusif mentionné audit article L. 281-1, les organismes bénéficiant de l’agrément mentionné au présent I peuvent sous-louer une partie de ces logements à des personnes mentionnées à l’article L. 433-2 du code de l’action sociale et des familles dans le cadre d’un contrat de bail régi par le chapitre II du titre VIII du livre III du code civil. Le cas échéant, les plafonds de ressources mentionnés au dernier alinéa de l’article L. 441-1 du présent code et les montants mentionnés au deuxième alinéa de l’article L. 442-1 qui seraient applicables à ces logements dans le cadre d’une attribution par un organisme d’habitations à loyer modéré s’appliquent. » ;
b) Le II est ainsi modifié :
– à la première phrase, après le mot : « au », sont insérés les mots : « 1° du » ;
– après le mot : « logements », la fin de la seconde phrase est ainsi rédigée : « sont sous-loués dans le cadre d’une colocation prévue au 1° du I du présent article. » ;
c) (Supprimé)
2° (Supprimé)
3° Au dernier alinéa de l’article L. 822-4, les mots : « des dispositions de l’article L. 442-8-1 » sont remplacés par les mots : « des articles L. 442-8-1 et L. 442-8-1-2 ».
Articles 13 bis D et 13 bis
(Supprimés)
Article 13 ter
La seconde phrase du deuxième alinéa de l’article L. 302-10 du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifiée :
1° Les mots : « résultant des sorties des établissements d’hébergement ou services figurant au » sont remplacés par les mots : « des personnes en perte d’autonomie définis par le » ;
2° Sont ajoutés les mots : « ainsi que les objectifs définis par la programmation pluriannuelle de financement de l’habitat inclusif mentionnée à l’article L. 281-2-1 du même code ».
Articles 13 quater, 13 quinquies et 14
(Supprimés)
M. le président. Nous allons maintenant examiner les amendements déposés par le Gouvernement.
article 1er bis a
M. le président. L’amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 82
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
d) Le III de l’article L. 542-3 est ainsi modifié :
- au premier alinéa, les mots : « Le chapitre III du titre III du livre II » sont remplacés par les mots : « La section 3 du chapitre IX du titre IV du livre Ier » ;
- au second alinéa, les mots : « de l’article L. 233-1 » sont remplacés par les mots : « du II de l’article L. 149-10 » ;
La parole est à Mme la ministre déléguée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Sol, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Le vote est réservé sur cet amendement et sur l’article 1er bis A.
article 12 quater
M. le président. L’amendement n° 2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Après la seconde occurrence du mot :
de
insérer le mot :
trois
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Fadila Khattabi, ministre déléguée. Cet amendement vise à corriger un oubli, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean Sol, rapporteur. Avis favorable également.
M. le président. Le vote est réservé sur cet amendement et sur l’article 12 quater.
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements du Gouvernement, je vais donner la parole, pour explication de vote, à un représentant par groupe.
La parole est à Mme Maryse Carrère, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Solanges Nadille applaudit également.)
Mme Maryse Carrère. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, grâce aux progrès de la médecine et à l’amélioration des conditions de vie, la France est confrontée à d’importants changements démographiques : ceux qui ont grandi pendant les Trente Glorieuses arrivent massivement à l’âge où beaucoup deviennent dépendants.
Si l’espérance de vie progresse, cet âge correspond malheureusement trop souvent à des mois passés en mauvaise santé. Selon les estimations du rapport Libault, entre 2,7 et 3,7 millions de personnes deviendront dépendantes dans les années à venir.
Ce mur de la dépendance nous impose de mettre en place une véritable politique pour répondre aux défis du vieillissement de la population. Maintes fois promis et maintes fois reporté, ce chantier hante les gouvernements successifs depuis plus de vingt ans.
Grâce à l’adoption d’un amendement à l’Assemblée nationale, cette réforme devrait prendre la forme d’une loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge, la première, qui devrait être présentée avant la fin de l’année.
Certes, comme l’a rappelé le président du conseil de la CNSA, ce n’est pas tout à fait la grande réforme que nous attendions. Mais cela s’en approche. Votre prédécesseur l’avait affirmé, madame la ministre, devant l’Assemblée nationale : « La loi de programmation que vous, parlementaires, avez demandée […] constitue une fondation essentielle. […] [L]’arbitrage a été rendu, l’engagement est pris. » Cependant vint la diète budgétaire imposée par Bercy…
Madame la ministre, vous nous avez quelque peu rassurés sur ce point. Nous sommes sensibles à la question du financement, qui reste prégnante et ne pourra éternellement être éludée.
Dans cette attente, la proposition de loi que nous nous apprêtons à voter constitue une première étape. Elle comporte des mesures importantes, et les débats, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, ont permis de l’enrichir. Je remercie les deux rapporteurs ici présents de leurs travaux fructueux.
Nous saluons ainsi la création d’un service public départemental de l’autonomie (SPDA), qui permettra aux personnes âgées ou en situation de handicap et à leurs aidants d’avoir facilement accès à l’information et d’être efficacement orientées en fonction des besoins.
Dix-huit départements ont d’ores et déjà été sélectionnés pour l’expérimentation, en vue de la généralisation du dispositif en 2025. La version de compromis adoptée en commission mixte paritaire, qui autorise la définition de territoires de l’autonomie, renforce le rôle du département comme chef de file des politiques de soutien à l’autonomie, tout en tenant compte des spécificités de certains territoires. C’est une très bonne chose.
En matière de prévention de la perte d’autonomie, plusieurs mesures méritent d’être soulignées.
Nous saluons également le versement d’une aide financière annuelle aux départements pour soutenir les aides à la mobilité des intervenants à domicile. Cette aide est d’autant plus précieuse que les déplacements représentent une contrainte majeure, qui nuit à l’attractivité d’un métier pourtant essentiel.
Cette aide facilitera sans nul doute le recrutement et la fidélisation de ces intervenants et leur offrira une juste reconnaissance. Je citerai un exemple : le réseau Aide à domicile en milieu rural (ADMR) des Hautes-Pyrénées a récemment accordé quinze véhicules de fonction à ses salariés grâce au financement de l’État et du département.
Je souhaite dire un mot de la lutte contre la maltraitance des personnes âgées, qu’elle soit organisée, comme l’a révélé le scandale Orpea, ou institutionnelle, par manque de moyens et de personnel.
Comme l’a rappelé la Défenseure des droits, 281 réclamations ont été reçues entre mai 2021 et janvier 2023, confirmant, « le caractère systémique du problème de maltraitance au sein des Ehpad ». Nous saluons la mise en place d’une cellule de recueil et de traitement des alertes à l’échelon du département, ainsi que l’élargissement des compétences de la Conférence nationale de santé (CNS) à la question de la lutte contre la maltraitance.
Faisant écho au rapport intitulé Liens entravés, adieux interdits de novembre dernier, le texte consacre enfin un droit de visite pour les résidents en Ehpad, les personnes hospitalisées et les personnes en fin de vie, pour que les situations inhumaines qui ont eu lieu pendant l’épidémie de covid ne puissent plus jamais se reproduire.
Pour toutes ces raisons, le groupe du RDSE apportera son soutien à cette proposition de loi, conscient toutefois qu’elle n’est pas la grande loi tant attendue.
Nous attendons une loi qui assurera une meilleure collaboration entre tous les acteurs de la prise en charge de l’autonomie, une loi qui garantira une gouvernance claire et lisible pour l’usager, une loi qui assurera une source de financement fiable, juste et pérenne pour les conseils départementaux, une loi, enfin, qui permettra un accompagnement digne de nos personnes âgées, en anticipant les enjeux de l’augmentation importante de leur nombre d’ici à quelques années. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et RDPI. – Mme Annie Le Houerou, M. Daniel Chasseing et Mme Nadia Sollogoub applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Solanges Nadille, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE.)
Mme Solanges Nadille. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous voici réunis, en fin de navette parlementaire, pour achever l’examen d’un texte qui vise à répondre à un enjeu primordial pour l’avenir de notre pays et de nos aînés : la prise en charge du vieillissement de la population, tout en garantissant une vie de qualité et un cadre de vie décent pour tous.
Tel est l’objet de la présente proposition de loi, et je souhaiterais tout d’abord rendre hommage aux députées de la majorité présidentielle qui en sont à l’origine : les rapporteures, Mmes Laurence Cristol et Annie Vidal, ainsi que Mme Astrid Panosyan-Bouvet, qui a coordonné l’écriture du texte.
Ce texte vise trois objectifs : tout d’abord, renforcer le pilotage de la politique de prévention de la perte d’autonomie et de la lutte contre l’isolement social ; ensuite, combattre les maltraitances des personnes en situation de vulnérabilité et garantir leurs droits fondamentaux ; enfin, garantir à chacun des conditions d’habitat dignes, ainsi que des prestations de qualité et accessibles, grâce à des professionnels accompagnés et soutenus dans leurs pratiques.
Je me réjouis que le compromis issu de la commission mixte paritaire préserve l’équilibre du texte que nous avions voté au Sénat.
Différents amendements du groupe RDPI adoptés ici ont été repris dans le texte issu de la commission mixte paritaire, comme sur le service public départemental de l’autonomie : face aux difficultés de pilotage des politiques de l’autonomie, ce service sera le lieu de la coordination et de la planification pluriannuelle des politiques de l’autonomie.
Je souhaiterais aussi rappeler mon amendement sur la prise en compte des spécificités des territoires ultramarins dans les aides à la mobilité, pour faire face aux difficultés de continuité territoriale et ainsi contribuer à redonner de l’attractivité au métier d’aide à domicile sur l’ensemble du territoire national.
Le texte issu de la commission mixte paritaire conserve par ailleurs le caractère inconditionnel du droit de recevoir de la visite en établissement, pour les personnes en fin de vie ou en soins palliatifs.
Nous nous réjouissons enfin des compromis trouvés sur la transformation des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) en services autonomie à domicile (SAD), sur la tarification de l’hébergement en Ehpad, ou encore sur la création d’un droit, pour les résidents en Ehpad, de voir leur animal domestique accueilli au sein des établissements.
Vous le voyez, mes chers collègues, cette proposition de loi comporte de nombreuses mesures qui vont dans le sens d’une meilleure prise en charge du vieillissement et d’une amélioration de la politique de l’autonomie. Ce texte n’est peut-être qu’une brique, mais celle-ci est utile dans nos efforts pour prendre en charge le vieillissement et garantir une vie de qualité à nos aînés, dans un cadre de vie décent. Nous voterons donc pour, sans hésitation.
Madame la ministre, avec cette proposition de loi, les parlementaires ont pris leurs responsabilités. Nous attendons maintenant que le Gouvernement fasse de même, en nous proposant une loi sur le grand âge qui soit ambitieuse. Malgré la situation budgétaire délicate, il faut se retrousser les manches et travailler à des solutions innovantes, par exemple sur le sujet de la gouvernance ou encore sur le financement de la politique de l’autonomie.
Nous devrons également continuer à agir pour redonner de l’attractivité au secteur, qui en manque cruellement depuis des années, et enfin continuer à être vigilants sur le contrôle des Ehpad, pour que les scandales récents ne se reproduisent plus. À ce titre, la mission de contrôle sur la situation des Ehpad, dont je suis corapporteure, rendra ses conclusions à la fin du semestre.
Enfin, madame la ministre, comment conclure sans dire un mot sur l’outre-mer ? Face à un vieillissement de la population encore plus fort et à un parc des Ehpad très vieillissant, il nous faudra des réponses rapides pour que le bien-vieillir soit une réalité partout, dans l’Hexagone comme en outre-mer. Le groupe RDPI, composé pour moitié de sénateurs ultramarins, y veillera. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Corinne Féret. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, j’ai 62 ans et je n’appartiens pas aujourd’hui aux 10 % de la population française âgés de plus de 75 ans ; mais, dans vingt ans, j’aurai rejoint cette tranche d’âge, qui comptera alors onze millions de Français et de Françaises.
Au-delà des chiffres, il convient de nous questionner sur notre capacité à prendre soin de nos aînés, de nos proches ; nous sommes toutes et tous concernés. Nous devons faire face à un véritable défi démographique, social et humain.
Le vieillissement de la société requiert une vision panoramique et des actions d’ampleur dans un grand nombre de domaines. Or cette proposition de loi ne constitue qu’un patchwork de mesures, souvent vagues et bien insuffisantes.
Pour dépasser l’invisibilisation de nos aînés et de ceux qui les accompagnent, aidants familiaux et professionnels, une planification méthodique et le vote de moyens dédiés s’imposent. Gardons tous à l’esprit que le vieillissement ne signifie pas la fin de la vie. Les personnes âgées ont besoin d’un accompagnement adapté, qui fait souvent défaut aujourd’hui.
Oui, les attentes de nos concitoyens et des professionnels du secteur du grand âge sont légitimement fortes. Il est impératif d’y répondre, non pas par une simple proposition de loi, mais bien par un projet de loi de programmation d’ampleur, comprenant une véritable trajectoire financière.
Ce dont ont besoin les personnes vieillissantes et les professionnels qui en prennent soin, ce n’est pas de « diverses mesures relatives au grand âge et à l’autonomie » comme le suggère le titre de cette proposition de loi, telle qu’elle a été adoptée en première lecture au Sénat. Ils ont besoin que le Gouvernement honore les engagements pris, que la grande loi sur le grand âge, promise par le Président Emmanuel Macron il y a six ans – bientôt sept ! – soit enfin discutée et votée.
Sans cesse ajournée, elle ne figure pas parmi les textes dont le Gouvernement prévoit l’inscription à l’ordre du jour prioritaire jusqu’à la fin de la session ordinaire. Faut-il définitivement en conclure, madame la ministre, que ce gouvernement ne présentera aucun texte d’ampleur sur le grand âge ? Nous attendons une réponse claire.
Depuis plusieurs semaines, nous regrettons que le Gouvernement se mure dans le silence. Il nous paraît inconcevable et surtout irresponsable que le Premier ministre Gabriel Attal ne reprenne pas l’engagement clair de sa prédécesseure, Mme Élisabeth Borne, qui s’était engagée à faire adopter une vraie loi Grand Âge d’ici à la fin de l’année 2024, c’est-à-dire aujourd’hui !
Nous appelons donc le Premier ministre à confirmer les engagements pris devant la représentation nationale, et vous, madame la ministre, à lancer rapidement un travail de coconstruction avec les acteurs du secteur, que Mme Aurore Bergé, alors ministre des solidarités et des familles, avait évoqué. Que de temps perdu, alors qu’il y a urgence à agir et à former, à innover et à trouver de nouvelles sources de financement !
Environ 70 % des établissements accueillant des personnes âgées rencontrent des difficultés de recrutement, et huit Ehpad publics sur dix sont en déficit. Que leur répondez-vous ? Là encore, sans réponse de votre part, madame la ministre, parler du bien-vieillir n’a aucun sens.
Qu’en est-il du droit à vieillir dignement ? Il est nécessaire de donner une suite législative à cette proposition, qui ne peut en aucun cas se limiter au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) de l’automne prochain. C’est une loi de programmation pluriannuelle, sur cinq ans, dont nous avons besoin.
Malgré toutes vos promesses, vous n’arrivez même pas à mobiliser les moyens humains nécessaires pour accompagner le grand âge à domicile ou dans les établissements dédiés. Le Président de la République, lors de sa campagne électorale, s’était engagé à créer 50 000 postes dans les Ehpad.
Cet objectif est insuffisant. De plus, vous n’avez voté la création que de 3 000 postes dans le PLFSS pour 2023 et 6 000 postes dans le PLFSS pour 2024 ! Pis, vous avez même repoussé l’échéance, en évoquant désormais l’horizon de l’année 2030. Ces recrutements sont précisément l’enjeu d’une loi de programmation, avec des financements associés. Il n’est pas sérieux de multiplier ainsi les promesses non tenues et de repousser continuellement des mesures vitales pour tant de nos concitoyens.
Logiquement, les sénateurs du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain ont donc décidé de s’abstenir sur ce texte, tristement conscients que tout ce que l’on avait promis aux Français il y a encore quelques semaines ne tient plus.
Madame la ministre, les propos que vous venez de tenir ne nous rassurent pas. Vous n’avez donné aucune précision sur le calendrier. J’entends votre intention de soumettre la question au débat et d’associer les Français à cette grande réflexion, mais quand ? Quand ? Cela fait six ou sept ans que nous attendons, six ou sept ans que l’on nous promet cette loi, et rien ne vient.
Au risque de me répéter, je réitère donc ma question : à quand la grande loi sur le grand âge ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Milon. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en dépit de l’écart important entre les textes de l’Assemblée nationale et du Sénat, la commission mixte paritaire est parvenue à un accord sur un texte commun.
Nous nous félicitons, madame la ministre, que le texte issu de la commission mixte paritaire retienne la grande majorité des apports du Sénat. À ce titre, nous tenons à saluer la qualité du travail et la persévérance des trois rapporteurs, Mme Jocelyne Guidez, Mme Elsa Schalck et M. Jean Sol.
Le texte consacre certaines avancées : le service public départemental de l’autonomie, avec notamment la possibilité de définir des territoires de l’autonomie à l’échelon infradépartemental ; la généralisation du programme Icope en matière de prévention ; l’inscription du droit de visite inconditionnel en Ehpad et pour les personnes en fin de vie ou en soins palliatifs ; la création, au 31 décembre 2026, d’un registre général des mesures de protection juridique, regroupant les mesures judiciaires et les mandats de protection future ; l’instauration d’une carte professionnelle pour les personnels du secteur du domicile après trois années d’exercice professionnel ; la possibilité donnée aux Ehpad habilités à l’aide sociale de moduler leurs tarifs ; la création d’une cellule, sous l’autorité conjointe du conseil départemental et de l’agence régionale de santé (ARS), qui inclura également les centres Allô Maltraitance (Alma), déjà dotés d’un savoir-faire dans le recueil et l’évaluation de ces situations ; la garantie du droit des résidents d’accueillir leur animal domestique en Ehpad, sous réserve qu’ils soient capables de s’en occuper ; enfin, le soutien au développement de l’habitat inclusif.
J’en viens à la réforme qui prévoit le regroupement de l’ensemble des services à domicile existants en une unique catégorie dénommée services autonomie à domicile. Depuis sa création prévue dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, sa mise en pratique se révèle difficile, notamment pour les Ssiad. Le Sénat a souligné ces difficultés.
La commission mixte paritaire s’est accordée sur deux points pour renforcer l’accompagnement des Ssiad déjà prévu par le Sénat : d’une part, elle leur a donné un délai supplémentaire de six mois pour déposer une demande d’autorisation en SAD, reportant l’échéance au 31 décembre 2025 ; d’autre part, elle a prévu l’extension de trois à cinq ans de la durée pendant laquelle un Ssiad peut conclure une convention ou former un groupement avec un service proposant des prestations d’aide et d’accompagnement, à défaut de présenter une demande d’autorisation.
Madame la ministre, nous ne sommes pas opposés à cette réforme, mais force est de constater que sa mise en place est chaotique. Il est donc indispensable de bien accompagner les Ssiad, pour ne pas mettre en péril leur intervention auprès des personnes âgées et des personnes en situation de handicap.
Une fois dressée la liste de ces mesures, nous pouvons affirmer qu’elles ne constituent qu’une réponse partielle aux enjeux du vieillissement de la population.
Nous attendons désormais l’examen d’un projet de loi, d’une loi-cadre ou d’une loi de programmation – les termes ne sont pas importants ; ce qui est essentiel, c’est de débattre, rapidement, pour affecter de nouveaux moyens financiers à la branche autonomie.
À l’heure où une large majorité d’Ehpad connaît de graves difficultés financières – en 2023, trois Ehpad publics sur quatre sont en déficit selon la Fédération hospitalière de France (FHF) –, le Gouvernement ne peut se limiter au déblocage de fonds d’urgence exceptionnels. Les 100 millions d’euros alloués à ce titre l’an dernier sont d’ores et déjà consommés. Ce ne sont pas de crédits d’urgence que les acteurs de l’autonomie ont besoin, mais bien de financements pérennes.
De plus, le virage domiciliaire ne peut rester qu’un slogan.
Le constat est connu, les projections concernant l’augmentation du nombre de personnes dépendantes sont réalisées, encore récemment par la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), qui compte sur un million et demi de bénéficiaires de l’activité physique adaptée (APA) sur les trois millions de personnes âgées qui seront dépendantes en 2030.
Il est donc urgent de rassurer l’ensemble des directeurs d’établissement et l’ensemble des structures intervenant à domicile, et de répondre aux attentes de nos concitoyens. Madame la ministre, quel calendrier envisagez-vous ?
Pour conclure sur une note positive, je vous confirme le vote du groupe Les Républicains en faveur du texte de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI. – Mmes Nadia Sollogoub et Cathy Apourceau-Poly applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Joshua Hochart, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
M. Joshua Hochart. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous voilà réunis aujourd’hui pour prendre position sur une proposition de loi au sujet de laquelle la ministre Aurore Berger avait annoncé : « Notre ambition est là : faire de la vieillesse une véritable question de société et construire un pacte renouvelé entre générations. »
Comme souvent en Macronie, nous ne pouvons qu’adhérer aux annonces, mais les actions et les faits sont toujours têtus. Un tel texte aurait dû conduire à un consensus, s’il avait été construit dans un esprit d’écoute et de travail en commun.
À ce texte composé d’une quinzaine d’articles lors de son dépôt, les parlementaires ont intégré une cinquantaine d’articles additionnels. Ces différents ajouts montrent une appétence de la représentation nationale pour ce sujet, qui est un enjeu essentiel pour notre vie en société.
Comme souvent en Macronie, on fait des promesses. Le Président de la République avait annoncé en 2018 une grande loi pour répondre aux défis du vieillissement… À quand la loi Grand Âge, ambitieuse, nécessaire, attendue, tant promise ?
Comme souvent en Macronie, ce texte manque d’une vision globale. Le Gouvernement n’a pas su s’emparer d’un sujet si important et qui soulève, au-delà d’enjeux concrets et pragmatiques, un enjeu moral.
Comment voulons-nous écouter, accompagner et soutenir nos aînés, qui sont le maillon fort de notre société et ont souvent contribué à sa richesse, qui sont porteurs des valeurs que nous défendons, comme la famille et le travail ? Ils méritent une reconnaissance nationale par un accompagnement digne et humaniste pendant ce chapitre qui conclut leur parcours de vie.
La commission des affaires sociales du Sénat, dans sa sagesse, a bien souligné que la proposition de loi n’entraînera pas de bouleversement des politiques de soutien à l’autonomie.
Après un travail de mise en commun et de discussions constructives pendant la commission mixte paritaire, quelques mesures pertinentes sont ressorties et vont dans le bon sens. En effet, la sanctuarisation du droit de visite est une belle avancée. Rappelons que, pendant la crise de la covid, nombre de nos concitoyens ont conclu leur vie sans pouvoir être accompagnés par leurs proches, un traumatisme que notre société ne doit plus jamais subir.
Je pense aussi à la suppression de l’article 1er bis, qui permet de maintenir l’avis du maire sur la nomination des directeurs d’Ehpad. Rappelons ici que les maires connaissent leur territoire et leurs concitoyens. Il est donc essentiel et légitime qu’ils puissent avoir un droit de regard et de parole lors d’une telle décision.
Le Rassemblement national souhaite, comme d’autres partis politiques, qu’un véritable projet de loi soit proposé à la représentation nationale, avec une mise en avant des professionnels du secteur, non pas avec une carte professionnelle, relevant plutôt du symbole, mais avec un réel statut, une réelle formation continue et une rémunération digne ; avec une reconnaissance du proche aidant dans le processus de soins et de maintien à domicile ; avec une réforme des Ehpad ou une remise à plat des fonctionnements et des financements.
En effet, force est de le constater, face aux situations financières difficiles de nombreux établissements, face à l’épuisement des professionnels, face aux actes de maltraitance qui se multiplient, l’Ehpad d’aujourd’hui ne répond plus de manière efficiente aux enjeux qui lui sont imposés, malgré une volonté sans faille du secteur. Nous devons collectivement remettre l’humain au centre de tous les défis.
Même si cette proposition de loi n’est pas la grande loi tant attendue, tant promise, elle apporte de petites avancées. Nous votons donc pour ce texte.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Bourcier, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et RDPI.)
Mme Corinne Bourcier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, quasiment un an, c’est long… C’est le temps qu’il aura fallu à cette proposition de loi pour être examinée par le Parlement, depuis les premières séances à l’Assemblée nationale jusqu’à aujourd’hui. Comme elle contient tout de même quelques mesures importantes, j’espère que les décrets d’application seront pris plus rapidement que de coutume.
Notre groupe se réjouit que le contenu du texte, à l’issue de la réunion de la commission mixte paritaire, soit le reflet du travail important et de qualité réalisé au Sénat, en commission comme en séance. La proposition de loi, telle qu’elle nous était parvenue, contenait soixante-cinq articles, dont beaucoup ne relevaient pas du domaine législatif.
Nous sommes satisfaits du maintien de la plupart des choix de notre chambre dans la version finale du texte, même si ce dernier ne provoquera pas de grand chambardement dans le domaine du grand âge – telle n’était pas non plus sa prétention.
Pour ma part, je me réjouis du rétablissement de la conférence nationale de l’autonomie. Je pense que cela permettra de mettre ce sujet au centre des préoccupations, c’est-à-dire au niveau qu’il mérite.
La mise en place du fameux service départemental de l’autonomie est une évidence pour faciliter la coordination des acteurs et rendre plus simple et efficace le parcours des personnes âgées en situation de handicap et de leurs proches.
Les établissements pourront désormais utiliser leur forfait soins pour mener des actions de prévention contre la dépendance. Cela paraît évident et, pourtant, ils n’étaient jusqu’à maintenant pas autorisés à le faire.
Au-delà de son aspect pratique dans le budget des établissements, je me réjouis de cette mesure, car elle démontre une évolution dans la façon de considérer ce qu’est le soin : en quelque sorte, elle reconnaît que la prévention est du soin à part entière.
Nous avons largement discuté, dans cet hémicycle, des difficultés des différents types de services à domicile – Ssiad, services d’aide et d’accompagnement à domicile (Saad) et services polyvalents d’aide et de soins à domicile (Spasad). Concernant leur fusion, je regrette beaucoup que la proposition de M. Daniel Chasseing et de Mme Corinne Imbert visant à la rendre facultative n’ait pas été conservée, même si elle a été légèrement assouplie.
Mme Frédérique Puissat. On est d’accord !
Mme Corinne Bourcier. Nous saluons l’aide financière en faveur de la mobilité des intervenants à domicile, y compris pour l’obtention du permis de conduire, ainsi que l’instauration d’une carte professionnelle, qui, comme je l’avais proposé, a été étendue à tous les professionnels intervenant à domicile. Il s’agira d’avancées très concrètes pour les professionnels concernés.
Par ailleurs, je suis largement favorable à ce qu’un Ehpad puisse accueillir un animal de compagnie, de façon permanente ou lors d’activités de médiation animale. Les bienfaits des animaux sont connus et reconnus.
Néanmoins, la vie en Ehpad est une vie en collectivité. Je reste convaincue que promettre aux personnes âgées qu’elles pourront garder leur animal de compagnie en entrant en Ehpad est une fausse promesse, car une telle mesure sera inapplicable sur le terrain.
Le texte contient enfin quelques mesures pour lutter contre la maltraitance, comme la création d’une cellule départementale dédiée aux signalements ou encore la garantie d’un droit de visite pour les personnes accueillies en établissement.
J’avais eu l’occasion de le dire lors des explications de vote sur ce texte, en première lecture : selon moi, le meilleur moyen de lutter contre la maltraitance, c’est d’avoir du personnel en nombre suffisant, correctement formé et rémunéré. Cela ne veut pas dire que d’autres mesures ne sont pas importantes pour lutter contre la maltraitance, mais le personnel reste la condition préalable et indispensable.
Pour les quelques améliorations concrètes que ce texte propose et que notre groupe souhaite soutenir, nous voterons pour cette proposition de loi.
Cependant, il est vrai que le texte n’apporte pas de nouvelles perspectives financières. Or celles-ci sont indispensables si nous voulons que nos aînés soient dignement traités en établissement, et si nous voulons réussir le virage domiciliaire et respecter ainsi le souhait des 85 % de Français qui veulent vieillir chez eux.
Madame la ministre, nous attendons donc toujours un projet de loi, avec des orientations chiffrées, comme l’a promis Mme la ministre Vautrin devant notre commission. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – Mme Frédérique Puissat applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme Frédérique Puissat et M. Laurent Burgoa applaudissent également.)
Mme Jocelyne Guidez. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce texte, dont j’ai eu l’honneur d’être rapporteure aux côtés de M. Jean Sol, n’est peut-être pas la grande loi attendue sur le grand âge et l’autonomie, mais il nous permet d’avancer sur des sujets de préoccupation pour les Français.
Je concentrerai mon propos sur les dispositions que j’ai plus particulièrement suivies en tant que rapporteure.
Tout d’abord, le texte de la commission mixte paritaire consacre le droit du patient ou du résident de recevoir de la visite, en maintenant le régime proposé par le Sénat pour les établissements de santé et les établissements médico-sociaux.
Le texte inscrit dans la loi le droit inconditionnel, même en cas de crise sanitaire, reconnu aux personnes en fin de vie ou en soins palliatifs de recevoir de la visite, tout en précisant que l’établissement doit garantir les consignes de protection sanitaire. En outre, il étend ce droit inconditionnel à tout visiteur choisi par le patient ou résident et, si son consentement ne peut être exprimé, à tout membre de sa famille, de ses proches ou à la personne de confiance désignée.
À l’article 4, qui prévoit un nouveau circuit de recueil et de traitement des cas de maltraitance commis sur des majeurs vulnérables, la commission mixte paritaire a adopté une rédaction de compromis prévoyant une cellule de recueil et de suivi des signalements pilotée par l’agence régionale de santé, selon la configuration prévue par l’Assemblée nationale. Ce dispositif s’accompagnera du déploiement d’un nouveau système d’information mis en œuvre par l’État.
En revanche, deux apports du Sénat sont maintenus. D’une part, le numéro national d’appel, le 39 77, conserverait une base légale. D’autre part, le signalement des cas de maltraitance par les personnes astreintes au secret professionnel resterait une faculté, qu’ils apprécieraient en conscience.
En matière de contrôle des antécédents judiciaires des personnes intervenant auprès des mineurs ou des majeurs en situation de vulnérabilité, le texte de la commission mixte paritaire entérine la rédaction adoptée par le Sénat.
Le texte étend toutefois le périmètre de l’attestation transmise à l’employeur aux condamnations non définitives et aux mises en examen dont est frappé, le cas échéant, le professionnel ou la personne bénévole concernée.
Enfin, nous nous sommes entendus pour maintenir la suppression de la plupart des articles relatifs à la protection des majeurs, suivant en cela l’avis de notre collègue Elsa Schalck, au nom de la commission des lois.
J’en viens à la partie du texte concernant les services à domicile.
Les deux assemblées ont approuvé la création d’une carte professionnelle pour les intervenants à domicile. La majorité d’entre eux ne disposant d’aucun titre ou diplôme, le Sénat a prévu d’autoriser la délivrance de cette carte aux personnes justifiant de deux années d’exercice professionnel. Par cohérence avec le cahier des charges des autorisations et des agréments, la CMP a rehaussé cette condition d’ancienneté à trois ans.
Comme l’avait souhaité le Sénat, une partie de la contribution de la CNSA aux départements au titre de la mobilité des aides à domicile pourra être affectée à des aides financières à l’obtention du permis de conduire, sous réserve que les professionnels ne puissent bénéficier d’aucun autre dispositif visant le même objectif.
Le regroupement des catégories existantes de services à domicile en une unique catégorie dénommée « services autonomie à domicile » implique une transformation qui se révèle difficile en pratique, notamment pour les services de soins infirmiers à domicile ; ceux-ci disposent d’un délai de deux ans pour s’adjoindre une activité d’aide, fusionner ou se regrouper avec un SAD existant.
L’article 8 bis vise à répondre à ces difficultés et aux inquiétudes qu’elles suscitent en permettant aux Ssiad de conventionner avec un SAD pendant une durée de trois ans sans demander de nouvelle autorisation. Il prévoit, en outre, un délai supplémentaire pour les Ssiad essuyant un refus d’autorisation, que le Sénat a fixé à deux ans.
Le Sénat avait également adopté un article 8 ter ayant pour objectif de rendre facultative l’application de la réforme par les Ssiad.
Après de longues discussions sur ce sujet complexe, nous avons estimé que la mise en œuvre de cette réforme, que nous avons votée dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, est désormais trop avancée pour permettre tout retour en arrière.
En contrepartie de la suppression de l’article 8 ter, la CMP a introduit à l’article 8 bis des assouplissements supplémentaires en faveur des Ssiad : la durée pendant laquelle ils pourront se maintenir dans le cadre d’une convention ou d’un groupement, à défaut de présenter une demande d’autorisation en SAD, est allongée à cinq ans, et la date butoir pour déposer cette demande d’autorisation est repoussée de six mois, soit au 31 décembre 2025.
Ce compromis, doublé d’un engagement du Gouvernement de mieux accompagner les Ssiad dans cette transformation, me semble de nature à sécuriser le sort de ces services.
L’article 10 bis permettra aux Ehpad majoritairement habilités à l’aide sociale de fixer des tarifs différenciés entre les personnes bénéficiaires de l’aide sociale et les autres, dans la limite d’un écart fixé au niveau national par décret et à condition de maintenir une part suffisante de bénéficiaires de l’aide sociale parmi les résidents. Les départements auront toujours la possibilité de fixer des conditions plus strictes que le cadre national.
Je me réjouis enfin que nous soyons parvenus à trouver un accord sur la base du texte adopté par le Sénat pour ce qui concerne les articles dédiés à l’habitat inclusif et aux résidences autonomie.
Mes chers collègues, je vous invite à mon tour à adopter le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme Anne Souyris. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le journal Libération résumait parfaitement ce matin les enjeux du texte qui nous réunit : « Un dernier vote au Sénat qui peinera à masquer les inquiétudes des parlementaires sur l’avenir du secteur de l’autonomie, en l’absence de promesse gouvernementale pour une prochaine loi sur le grand âge. »
« Inquiétudes », le mot est faible : dans nos territoires, nous voyons l’état du secteur de l’autonomie… il est terrifiant ! Les travaux que je mène avec nos collègues Chantal Deseyne et Solanges Nadille dans le cadre de la mission d’information sur la situation des Ehpad laissent entrevoir une situation catastrophique pour le secteur – et je pèse mes mots. Je crains que les conclusions de cette mission, que nous rendrons à l’automne, ne soient pas heureuses.
Il y a de quoi être inquiet en écoutant les acteurs de terrain, qui soulignent tous un manque criant de personnel dans les établissements et un défaut de formation des professionnels, ce qui entraîne de facto une maltraitance des patients et des aidants.
Ils déplorent que la promesse de création de 50 000 postes supplémentaires pour 2027, puis 2030, ne soit pas encore concrétisée, alors même que ce nombre est tout à fait insuffisant au regard des manques actuels. En outre, une grande partie des Ehpad publics et associatifs rencontrent des difficultés financières et sont notamment exposés à des risques de rupture de trésorerie, voire de cessation de paiements – je n’invente rien.
Quand le Gouvernement promet au Parlement la présentation d’un projet de loi sur le grand âge au premier semestre, mais que rien n’est inscrit à l’ordre du jour ; quand le Parlement demande, dans le texte qui nous est soumis, l’adoption d’une loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge avant le 31 décembre 2024, mais que le Gouvernement n’offre aucune réponse aux interrogations de nos collègues députés quant au calendrier et à l’engagement d’une concertation ; quand tous les acteurs réclament urgemment une loi Grand Âge et qu’elle ne vient pas, nous ne pouvons qu’alerter et nous répéter.
Madame la ministre, mes chers collègues, nous ne pouvons nous satisfaire de cette proposition de loi.
Cela dit, le présent texte ne comporte aucune mauvaise mesure. Je salue d’ailleurs la suppression de l’article 8 ter, qui rendait facultative l’application de la réforme par les services de soins infirmiers à domicile. En contrepartie, un accompagnement de ces structures est mis en place pour une période transitoire.
Ce texte comporte des propositions intéressantes : droit sanctuarisé de visite dans les Ehpad, possibilité d’accueillir des animaux en établissement, instauration d’un droit de visite pour les proches, création d’une carte professionnelle pour les aidants.
Toutefois, le compte n’y est pas. Aucune mesure significative n’est prise pour rendre les Ehpad vivables ou améliorer la prise en charge dans le secteur de l’autonomie, faute de moyens supplémentaires – il est vrai qu’il ne s’agit pas d’un projet de loi…
Aussi, la question reste entière : madame la ministre, allez-vous enfin présenter ce projet de loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge ?
Face à la situation d’urgence extrême de l’autonomie, nous devons agir rapidement et structurellement. J’y insiste, nous devons avancer d’ici à la fin de l’année, au risque de condamner les plus précaires – et bientôt nous-mêmes.
Cette proposition de loi, malgré les maigres avancées qu’elle comporte, ne permet pas de mener cette réforme absolument nécessaire. Pour ces raisons, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires s’abstiendra. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour le groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire est donc parvenue à un accord au rabais, sur un texte sans envergure, dont le financement est insignifiant.
Cette proposition de loi comporte certes quelques mesures positives, comme la dotation de 100 millions d’euros pour aider les départements à financer la mobilité des intervenants à domicile. Je pense également à la sanctuarisation d’un droit de visite pour les résidents des Ehpad et à la possibilité d’accueillir un animal de compagnie.
Toutefois, ces dispositions sont bien loin de compenser les reculs et les manques de ce texte.
La commission mixte paritaire a supprimé de cette proposition de loi l’obligation de réserver une part des bénéfices des Ehpad privés lucratifs à l’amélioration des conditions de vie. Elle a également supprimé l’obligation faite aux Ehpad de se conformer aux injonctions de l’ARS en cas de constatation de manquements graves à la qualité et à la sécurité des soins.
Malgré l’ampleur des révélations du livre Les Fossoyeurs, vous préférez protéger les directions des Ehpad maltraitants, plutôt que les résidents.
Alors que le Président de la République avait annoncé la création de 50 000 postes, seulement 3 000 ont été ouverts en 2023 et 6 000 en 2024.
L’objectif de 50 000 postes a donc été repoussé de 2027 à 2030, alors même que les besoins sont estimés par l’association des directeurs d’Ehpad à 200 000 emplois supplémentaires. Tant que les gouvernants refuseront d’investir dans le secteur médico-social, le personnel continuera de subir la maltraitance institutionnelle et les résidents des conditions dégradées de prise en charge.
Il y a pourtant urgence : selon la Fédération hospitalière de France, le nombre d’Ehpad en déficit est passé de 45 % à 85 % entre 2019 et 2022 et le coût unitaire d’un lit a bondi de presque 10 %, pour atteindre un déficit unitaire moyen de 3 200 euros.
La principale mesure du texte consistait en la promesse de l’inscription à l’ordre du jour parlementaire d’un projet de loi de programmation avant la fin de l’année. Nous attendons du Gouvernement qu’il tienne cette promesse, mais surtout qu’il propose des mesures de financement à la hauteur des besoins.
Nous connaissons les ordres de grandeur que suppose un tel projet : il faudrait 10 milliards d’euros, soit l’équivalent du plan d’austérité de Bruno Le Maire pour 2024.
Nous avons quelque peine à croire que le Gouvernement, qui annonce 30 milliards d’euros d’économies l’an prochain et qui souhaite réduire les dépenses des personnes en affection de longue durée, propose une loi de programmation de financement du secteur du grand âge et de l’autonomie…
Depuis 2017, nous sommes dans l’attente impatiente d’une loi sur le grand âge pour financer l’adaptation de la société au vieillissement. Il suffirait pourtant de mettre à contribution les plus hauts revenus et les revenus financiers ou de revenir sur les 88 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales accordées chaque année aux entreprises.
En somme, cette proposition de loi n’est qu’un « coup de com’ » du Gouvernement pour donner l’illusion d’avancer sur ce dossier.
Rien sur la revalorisation des métiers de l’aide à domicile, rien sur la revalorisation des salaires des personnels, rien sur la revalorisation des frais kilométriques des aides à domicile qui utilisent leur véhicule personnel !
Ce n’est pas en appliquant les méthodes du secteur privé lucratif que nous allons améliorer la situation des Ehpad publics et privés non lucratifs : la possibilité de fixer des tarifs différenciés selon les revenus des résidents ne va pas améliorer le taux d’encadrement ni la qualité de l’accueil ; au contraire, cela risque de réduire encore le nombre des places réservées à l’aide sociale.
L’affaire Orpea a pourtant mis en lumière les dysfonctionnements du secteur privé lucratif, avec des montages financiers ayant pour seul objectif la recherche d’une rentabilité maximale, au mépris des êtres humains.
Madame la ministre, à quand cette loi Grand Âge et autonomie demandée par toutes et tous ? Peut-être attendez-vous un 31 février pour l’inscrire à l’ordre du jour ? (Sourires sur les travées du groupe CRCE-K.) Nous nous inquiétons que vous ne preniez au sérieux ni l’attente des résidents, ni celle des familles, ni celle des personnels, qui réclament tous cette loi, et à cor et à cri.
Pour l’ensemble de ces raisons, notre groupe votera contre les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées des groupes CRCE-K et GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER.)
M. le président. Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements du Gouvernement, l’ensemble de la proposition de loi, dont la commission a ainsi rédigé l’intitulé : proposition de loi portant mesures pour bâtir la société du bien-vieillir et de l’autonomie.
(La proposition de loi est adoptée définitivement.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quinze.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures quinze, sous la présidence de M. Pierre Ouzoulias.)
PRÉSIDENCE DE M. Pierre Ouzoulias
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
8
Homicide routier
Discussion d’une proposition de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, créant l’homicide routier et visant à lutter contre la violence routière (proposition n° 308, texte de la commission n° 443, rapport n° 442).
Discussion générale
M. le président. Dans la discussion générale, la parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, nous avons tous été bouleversés par les drames qu’a connus notre pays, drames causés par des conducteurs en excès de vitesse, sous alcool ou sous stupéfiants. Nous connaissons tous des parents dévastés, des familles endeuillées et révoltées.
J’entends les critiques visant une justice qui prend le temps d’investiguer et d’instruire, alors que les victimes appellent de leurs vœux un procès rapide. Nous savons que la justice, par son langage, ajoute parfois aux malheurs des victimes et de leurs familles. La présente proposition de loi nourrit l’ambition de répondre à ces critiques.
Il est en effet de notre devoir de nous assurer que notre droit prenne pleinement en compte toutes les situations.
Il est de notre devoir que notre droit s’adapte aux nouveaux comportements, qui transforment nos routes en voies périlleuses.
Il est aussi de notre devoir que notre droit n’aggrave pas, par ses mots, la souffrance des victimes.
C’est pourquoi la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui n’est pas que symbolique. Elle propose de nommer juridiquement, avec justesse, des comportements inacceptables, qui favorisent la survenance de drames sur nos routes.
Cette proposition de loi n’est pas qu’une œuvre sémantique. Bien évidemment, les mots ont un sens. Mais, en droit, les mots emportent des conséquences sur le déroulement des enquêtes, sur les audiences, sur la prise en charge des victimes. Les mots consacrés par la loi obligent la justice.
La qualification pénale d’homicide ou de blessures involontaires n’est pas appropriée lorsque le conducteur s’est délibérément mis dans un état ou une situation faisant encourir un risque avéré aux usagers de la route.
L’acte n’est pas totalement accidentel lorsqu’une personne conduit sous l’emprise d’alcool ou de stupéfiants. Il n’y a rien d’involontaire à consommer des stupéfiants ou à s’enivrer. Il n’y a rien d’involontaire à prendre la fuite après avoir commis un accident.
À travers le nouveau qualificatif consacré par cette proposition de loi, le caractère inacceptable du délit est ainsi pris en compte.
Par ailleurs, ce texte accroît la répression. De nombreuses mesures visent à renforcer les sanctions en matière routière. Au demeurant, cette proposition de loi s’inscrit dans le prolongement des annonces formulées par le Gouvernement le 17 juillet 2023, à l’occasion du comité interministériel de la sécurité routière.
Il est vrai que la loi du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière avait déjà consacré des textes d’incriminations spécifiques.
À ce titre, l’article 221-6-1 de notre code pénal dispose que « lorsque la maladresse, l’imprudence, l’inattention, la négligence ou le manquement à une obligation législative ou réglementaire de prudence ou de sécurité […] est commis par le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, l’homicide involontaire est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende ».
Les peines peuvent être portées à dix ans d’emprisonnement et à 150 000 euros d’amende si l’homicide a été commis avec au moins deux circonstances aggravantes.
L’article 1er de la proposition de loi a été profondément remanié par la commission des lois de votre assemblée. Si je salue la créativité et l’inventivité de votre rapporteur,… (Sourires.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. On peut dire ça comme ça !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. … je ne suis pas favorable à la nouvelle architecture qui en résulte.
Vous proposez de consacrer une nouvelle forme d’atteinte aux personnes, dès lors qu’elle est causée par un auteur qui n’est pas un conducteur. Ainsi seraient créés un délit d’homicide par mise en danger et un délit de blessures par mise en danger.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est génial ! (Sourires sur les travées du groupe SER.)
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Ces deux délits s’ajouteraient alors non seulement aux délits d’homicide et de blessures involontaires, mais également aux délits d’homicide routier et de blessures routières. Pourquoi faire simple, quand on peut faire très compliqué…
Tout d’abord, ces nouvelles incriminations liées à la mise en danger d’autrui, telles que vous proposez de les définir, ne semblent pas répondre aux exigences de précision et de lisibilité de la loi pénale.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Exactement !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Lorsqu’une victime est décédée, lorsqu’une victime est blessée, la mise en danger est avérée, indépendamment de la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence.
Au demeurant, l’article 1er de la proposition de loi, dans la rédaction issue des travaux de votre commission, emporterait une complexification de notre droit.
En effet, coexisteraient alors : une section 1 relative aux atteintes volontaires à la vie ; une section 2 relative aux atteintes involontaires à la vie ; une section 2 bis relative aux atteintes à la vie par mise en danger ; une section 2 ter relative à l’homicide routier ; une section 2 quater relative aux blessures routières ; enfin, une section 2 quinquies relative à l’homicide résultant de l’agression commise par un chien.
L’équilibre actuel de notre code pénal en serait à l’évidence fragilisé.
À cet écueil, s’ajoute l’édification d’une frontière dangereusement poreuse entre les infractions non intentionnelles et les infractions volontaires. La qualification de l’infraction soumise aux magistrats deviendrait trop complexe. Dès lors, l’exigence constitutionnelle de clarté de l’incrimination pénale ne me semble pas respectée.
Pour toutes ces raisons, je suis favorable au rétablissement de l’article 1er, tel qu’il a été voté par l’Assemblée nationale.
Serait ainsi créé dans le code pénal un chapitre intitulé « Des homicides et blessures routiers », dans lequel seront introduits quatre nouveaux articles. L’homicide involontaire et les blessures involontaires par conducteur, dès lors qu’ils sont aggravés, seraient désormais caractérisés comme étant un homicide routier ou des blessures routières. Les circonstances aggravantes, déjà prévues par le code pénal, demeurent.
D’autres circonstances aggravantes méritent cependant d’être ajoutées, car elles traduisent des comportements malheureusement trop fréquents de la part des conducteurs ; car elles font désormais partie intégrante du quotidien des enquêteurs, des magistrats et des victimes ; car il nous faut être en prise directe avec la réalité, avec le quotidien de nos routes.
Le conducteur téléphonant au volant, celui qui se livre à un rodéo urbain et qui provoque la mort d’un usager de la route ou lui inflige des blessures, doit être poursuivi pour homicide routier ou blessures routières.
Celui qui consomme du protoxyde d’azote, celui qui suit un traitement médicamenteux interdisant toute conduite, ceux-là mêmes qui prennent malgré tout le volant et qui blessent ou tuent, ceux-là mêmes doivent être poursuivis pour homicide routier ou blessures routières.
Les peines principales encourues pour les faits d’homicide routier ou de blessures routières restent identiques à celles qui sont actuellement prévues pour homicide ou blessures involontaires aggravés.
Concernant la répression de l’homicide routier, un amendement du rapporteur en commission a visé à rétablir l’article 132-19-1 du code pénal relatif aux peines planchers – les bonnes vieilles peines planchers ! (Sourires sur les travées des groupes RDPI et SER.)
Vous le savez, je suis totalement défavorable à un tel rétablissement.
Premièrement, les peines planchers n’ont pas démontré leur efficacité. Elles n’ont pas entraîné une baisse de la délinquance entre 2007 et 2014, cette période bénie à vos yeux, mesdames, messieurs les sénateurs du groupe Les Républicains.
Deuxièmement, le taux de prononcé des peines planchers n’a cessé de diminuer entre 2007 et 2011, passant de 50 % en 2007 à 37 % en 2011, les tribunaux ayant dérogé aux peines planchers, qui leur apparaissaient manifestement disproportionnées.
Troisièmement, les peines planchers n’ont eu aucun effet sur le nombre de peines d’emprisonnement prononcées et sur leur quantum. Durant les années d’application des peines planchers, soit entre 2008 et 2013, le quantum moyen de la peine d’emprisonnement ferme était de sept mois. Dès l’abrogation des peines planchers, entre 2014 et 2019, le quantum moyen était de huit mois. En 2022, il était de dix mois.
Enfin, le rétablissement de peines planchers va aggraver les délais de traitement des dossiers en matière pénale. En effet, ce dispositif suppose un temps d’audience prolongé, afin que le ministère public et les parties échangent leurs arguments sur l’application, ou non, de la peine plancher, et un temps de motivation supplémentaire pour le juge.
Je le dis sans polémique, mais de manière claire : je préfère l’efficacité à la démagogie, et je sais que le Sénat aussi !
Je souscris à une répression ferme, fondée sur des peines principales et des peines complémentaires efficaces, prévenant toute réitération. À ce titre, la proposition de loi prévoit d’insérer un nouvel article 221-21 comprenant des peines complémentaires encourues ou obligatoires en cas de condamnation pour homicide routier et blessures routières.
En particulier, il est prévu d’élargir la peine complémentaire de confiscation et d’immobilisation du véhicule ayant servi à la commission de l’infraction. Le véhicule conduit, qu’il soit ou non la propriété du conducteur ayant causé le drame, pourra être saisi, puis confisqué.
En outre, les dispositions actuellement applicables en matière d’annulation du permis de conduire de plein droit sont étendues à toute condamnation pour homicide routier ou blessure routière ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à trois mois.
De telles propositions visent un objectif louable. Elles permettent de nommer et d’acter la gravité de certains comportements qui sont à l’origine, hélas ! de nombreux accidents.
Afin de lutter davantage contre les comportements dangereux au volant et de renforcer la répression à l’égard des auteurs d’infractions routières, le texte répond à ces deux objectifs : l’excès de vitesse de 50 kilomètres par heure devient un délit ; les règles en matière de récidive sont renforcées ; les peines d’emprisonnement encourues pour la conduite sous l’empire d’un état alcoolique ou sous l’emprise de stupéfiants sont aggravées.
En conclusion, la loi doit responsabiliser, donc réprimer les auteurs de comportements volontairement dangereux. La loi doit répondre aux évolutions de notre délinquance routière – le protoxyde d’azote et de nombreuses substances psychoactives sont trop régulièrement consommés par des conducteurs. En conséquence, la loi doit nommer avec précision de tels délits.
L’homicide routier ou les blessures routières sont ainsi les qualifications appropriées dans le cas d’accidents provoqués par le conducteur d’un véhicule ayant commis une faute grave. Il y va tout simplement du bon sens ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et RDSE, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Francis Szpiner, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, nous ne parlons pas de quelque chose d’anodin. Le nombre de morts sur les routes – 3 267 en 2022 – montre qu’il s’agit d’un sujet grave.
Depuis des années, un certain nombre de familles de victimes sont choquées que celui qui a pris délibérément le volant, sous l’emprise de la drogue ou de l’alcool, ou qui conduit à grande vitesse, sachant que ce sont là les principales causes des accidents mortels, soit considéré comme étant à l’origine d’un homicide involontaire. Il leur est insupportable que de tels accidents soient envisagés comme étant dus à la fatalité.
Vous l’avez rappelé, monsieur le garde des sceaux, le comité interministériel a souhaité en juillet 2023 que, sur le plan législatif, soit retenue la qualification d’homicide routier, destinée à « renforcer la valeur symbolique de l’infraction d’homicide dit involontaire commis à l’occasion de la conduite d’un véhicule terrestre à moteur et permettre une meilleure acceptation sociale d’une telle qualification ».
Je ne conteste pas que la loi puisse avoir une portée symbolique. Le symbole n’est pas rien dans une société : c’est un marqueur, c’est le signe de l’importance que nous attachons aux choses. Les mots traduisent effectivement une attente, une colère sociale, qui est légitime.
La proposition de loi qui a été adoptée par l’Assemblée nationale était de bon augure. Elle correspond à ce que souhaitait le Gouvernement.
En ce qui concerne l’article 1er, j’ai été très sensible, monsieur le garde des sceaux, à vos arguments sur ma créativité, mais j’avoue que je ne les méritais pas. Car, en la matière, je n’ai fait preuve d’aucune imagination : j’ai recopié servilement ce qui figure dans le code pénal. C’est donc aux auteurs de ces articles, dont certains ont pris la plume il y a plus de vingt ans, que vous devez rendre hommage aujourd’hui, et non à moi !
L’article 1er de la proposition de loi est le plus important. Puisque nous parlons de symbole, puisque nous abordons la perception qu’ont les victimes de ce traitement judiciaire, il m’est apparu choquant que nous divisions les familles en deux catégories : celles qui auraient perdu leur enfant, leurs proches, leur famille à la suite d’un accident qui entrerait dans la catégorie « moins grave », parce qu’involontaire ; et celles qui seraient victimes d’un manquement délibéré.
Or il me semble que l’on ne peut pas séparer les victimes : toutes doivent entrer dans la catégorie des homicides routiers. Il ne saurait y avoir des victimes de première classe et des victimes de seconde classe : puisque nous sommes dans la symbolique, les personnes qui décèdent sur la route sont toutes victimes d’un homicide routier.
M. Francis Szpiner, rapporteur. Les auteurs de la proposition de loi ont voulu mettre en avant le caractère délibéré des comportements qui ont permis ce drame.
Certaines circonstances, vous l’avez rappelé, monsieur le garde des sceaux, ont été ajoutées à la liste des cas figurant déjà dans le code pénal. La commission des lois a souscrit aux évolutions proposées – je pense à l’abaissement de la vitesse de 50 à 30 kilomètres par heure. Mais nous avons souhaité aller plus loin.
La mise en danger de la personne d’autrui n’est pas une invention. Indépendamment de tout dommage, elle a été prise en compte au sein de l’article 121-3 du code pénal dès 1994. En 1996, le manquement aux obligations de sécurité constituait déjà une infraction. En 2000, le manquement délibéré à une obligation de prudence et de sécurité a même été considéré comme susceptible de constituer un délit, voire un crime.
Dès lors, la commission a voulu inscrire dans le code pénal deux notions qui marquent l’aboutissement de la prise en compte des manquements de l’auteur de l’infraction non intentionnelle : les atteintes à la vie par mise en danger ; et les atteintes à l’intégrité physique ou psychique des personnes mises en danger.
Ces infractions font apparaître le manquement délibéré à l’obligation de prudence comme une catégorie particulière d’homicide ou d’atteinte à la personne. Elles demeurent néanmoins non intentionnelles et délictuelles, ce qui nous amène au problème des peines.
Contrairement à ce que vous pensez, monsieur le garde des sceaux, je n’ai pas la nostalgie de la période que vous avez évoquée. Je ne suis pas animé par une croyance métaphysique en la peine plancher. J’essaie simplement de faire en sorte que la loi ait un sens.
En effet, après que l’homicide routier a été reconnu, que se passe-t-il concrètement pour le délinquant ?
Mme Frédérique Puissat. Rien !
M. Francis Szpiner, rapporteur. Eh bien, il ne se passe rien : les peines sont exactement les mêmes !
Certes, vous prévoyez de saisir la voiture. Mais quid si l’auteur de l’infraction n’est pas le propriétaire du véhicule et que ce dernier n’était pas au courant ? Je vous souhaite bonne chance devant le Conseil constitutionnel, car il s’agit d’une atteinte au droit de propriété. Quoi qu’il en soit, rien n’est changé au niveau des peines. Il existait donc plusieurs hypothèses.
Premièrement, ces manquements délibérés, cette volonté de prendre le volant sachant que l’on peut tuer, ne pourraient-ils entrer dans la catégorie criminelle ? Après tout, la notion de coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner existe bien dans le code pénal. Elle est passible de la cour criminelle et d’une peine de quinze ans de réclusion, voire plus en fonction de circonstances aggravantes.
Ce choix ne nous a pas paru le bon, car il soulevait le débat de l’intentionnalité. Par ailleurs, passer par les cours criminelles et les cours d’assises aurait engorgé complètement le système, et justice n’aurait pas été faite aux victimes pendant plusieurs années. Nous avons donc écarté cette solution.
Deuxièmement, nous aurions pu faire comme vous, c’est-à-dire laisser les peines en l’état et ne toucher à rien.
M. Francis Szpiner, rapporteur. La question qui s’est posée à nous n’est pas celle, théologique, de la peine plancher. Nous nous sommes demandé comment le juge allait appréhender le fait que, désormais, ce comportement était considéré comme extrêmement grave. C’est à partir de là que le juge doit se poser la question de la détention.
Je rappelle que la moyenne des peines dans ce type d’affaires est de seize mois. La peine minimale que nous proposons oblige donc le juge à se demander si celui qui a commis cet acte affreux doit ou non aller en prison. Nous laissons la liberté de cette décision au juge ; vous avez vous-même rappelé les taux : seulement un tiers des peines planchers sont prononcées, et les chiffres sont en diminution…
Monsieur le garde des sceaux, vous nous dites que la motivation qui pèse sur le juge et le débat des parties allongeront les procès. Mais une ou deux heures de plus, qu’est-ce que cela représente par rapport aux enjeux ?
La seule question qui doit se poser à nous est la suivante : voulons-nous, oui ou non, comme de nombreuses associations le réclament, que cette question soit posée ?
J’entends déjà certains répondre que le juge, maintenant que le délit a changé de nom, comprendra bien qu’il convient à présent d’instaurer une plus grande répression. J’ai beaucoup d’estime pour la magistrature,…
M. Francis Szpiner, rapporteur. … mais je pense que le législateur fait toujours œuvre utile lorsque, de temps en temps, il trace la voie à suivre.
En ce qui concerne l’efficacité, j’ai lu évidemment la dernière étude publiée. Elle ne corrobore pas tout à fait vos propos, monsieur le garde des sceaux, puisqu’elle reconnaît tout de même que la peine plancher a un effet positif en matière de récidive.
Or, malheureusement, la délinquance routière est souvent le fait de récidivistes. Ce n’est donc pas une question politique, dans le mauvais sens du terme, ou partisane : nous souhaitons simplement offrir aux victimes la certitude que le juge se posera bien la question de l’incarcération des auteurs de ces actes, avec la possibilité pour lui de l’écarter.
Il me paraît donc logique d’inscrire ces infractions dans les parties appropriées du code pénal, avec les atteintes aux personnes, les atteintes à la vie et les blessures. J’avoue que je n’ai pas bien compris vos critiques sur cette réécriture. En quoi vous semble-t-elle si compliquée ?
Je passe rapidement sur les autres articles du texte qui ont été ajoutés par la commission des lois de l’Assemblée nationale et qui tendent à réprimer davantage la conduite sans permis.
La loi, même si elle est symbolique, n’a pas vocation à satisfaire uniquement une opinion, sans apporter de plus-value. Or c’est ce que vous proposez ici : vous changez un mot, mais la situation reste la même.
Ce texte de loi doit permettre, comme le Sénat vous le proposera au travers de nombreux amendements, un meilleur accompagnement des victimes. Une fois que le tribunal a rendu sa décision, le drame continue pour les survivants, avec son lot de peine au quotidien. Nous devons aussi faire comprendre à chacun que, même si, juridiquement, nous ne retenons pas la qualification criminelle, ce type de comportements sur la route est bien criminel.
En Afrique du Sud, on voit sur le bord des routes des panneaux où il est écrit : If you drink and drive, you’re a killer, autrement dit : « Celui qui boit est un tueur. » Il est important de sensibiliser les gens. La peur du gendarme m’apparaît malheureusement nécessaire, et la sanction du juge ne me semble pas non plus totalement inutile ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme Nadège Havet. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la proposition de loi dont nous entamons l’examen concerne un sujet extrêmement grave, qui affecte chaque année des milliers de nos concitoyens. Elle traite des violences routières et vise précisément à lutter contre ce fléau.
Les chiffres sont alarmants. En 2023, pas moins de 3 402 personnes ont perdu la vie sur nos routes, et rien qu’en février 2024, quelque 224 tragédies supplémentaires sont venues s’ajouter à ce bilan déjà sinistre. La route ne se contente pas de prendre des vies, elle en brise aussi de façon irrémédiable. Il en va ainsi de celles des 232 000 blessés, dont 16 000 graves, recensés rien qu’en 2023.
Il est nécessaire de rappeler que, à ces chiffres, correspondent autant de familles déchirées et de destins brisés. Il faut aussi souligner que, aux souffrances des victimes, s’ajoutent l’effroi, la douleur et la sidération qui marquent leurs proches.
À leur peine, viennent s’ajouter l’incompréhension et le sentiment amer d’injustice quand on range ces drames sous la qualification d’homicides involontaires, alors même qu’ils sont le résultat du comportement irresponsable de conducteurs qui, délibérément, ont décidé de faire reposer sur autrui le poids de leur insouciance fautive. Il était donc urgent de répondre au sentiment des victimes et de leur famille, que l’emploi de l’adjectif « involontaire » pouvait heurter en venant leur infliger une forme de double peine.
Le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale faisait écho au combat mené par les associations de victimes. J’ai pour elles une pensée compatissante, et je tiens surtout à leur témoigner ma reconnaissance pour leur engagement.
Conformément aux recommandations du comité interministériel de la sécurité routière, l’objectif principal est de faire la distinction entre un « homicide volontaire » et un homicide qualifié de « routier », selon l’existence, ou non, de circonstances aggravantes.
Sans circonstance aggravante, c’est la qualification d’homicide involontaire et d’atteinte involontaire qui sera retenue, tandis que, en présence d’une ou de plusieurs circonstances aggravantes, ce sera celle d’homicide routier et de blessures routières.
Cette évolution sémantique répond à une attente forte et légitime. En effet, si pour les juristes la qualification d’homicide involontaire peut faire sens, elle perd toute pertinence et se révèle même insultante pour les victimes et leur famille lorsque c’est tout à fait sciemment que des conducteurs prennent le volant sous l’emprise de l’alcool ou des stupéfiants.
En plus de cette modification importante, le texte initial comportait l’ajout de circonstances aggravantes permettant de qualifier l’homicide routier ou les blessures routières. Ces deux nouvelles qualifications étaient susceptibles d’une condamnation aux mêmes peines complémentaires que pour les homicides ou atteintes involontaires. Certaines d’entre elles voyaient toutefois leur champ d’application et leur durée élargie.
Je tiens à saluer le travail des députés, plus particulièrement celui de la rapporteur, Mme Anne Brugnera, dont les travaux ont permis l’adoption de dispositions visant précisément à mieux lutter contre les comportements dangereux au volant et à renforcer la répression à l’égard des auteurs d’infractions routières.
Ainsi, les excès de vitesse de 50 kilomètres par heure et plus sont constitutifs de délits ! les règles en matière de récidive ont été renforcées et la suspension administrative du permis de conduire devient systématique à l’encontre d’un conducteur sous l’emprise de stupéfiants ou d’alcool.
Si la commission des lois au Sénat souscrit à la volonté de créer un homicide routier, elle a toutefois souhaité aller au-delà du dispositif initial proposé par l’Assemblée nationale.
Sur l’initiative de son rapporteur, notre collègue Francis Szpiner, dont je salue le travail, elle a fait le choix de systématiser la nouvelle qualification d’homicide routier à tous les homicides ou blessures commis à l’occasion de la conduite d’un véhicule, que le conducteur ait eu un comportement à risque ou non. Cette rédaction de l’article 1er conduit à faire disparaître les infractions « involontaires » pour les accidents de la route, même en cas de simple maladresse ou d’imprudence.
Or le groupe RDPI estime que c’est justement cette distinction entre l’homicide involontaire et l’homicide routier qui fait la pertinence de ce texte, car elle met efficacement la lumière sur les situations où le conducteur a délibérément aggravé le risque d’accident. Nous soutiendrons donc en séance un amendement dont les dispositions vont dans le sens du rétablissement de la rédaction initiale.
Autre modification apportée en commission au Sénat, l’instauration d’une peine plancher pour les homicides routiers par mise en danger. Ici encore, nous comprenons la volonté de renforcer la lutte contre les violences routières et de mieux sanctionner les comportements fautifs et à risque.
Toutefois, nous craignons que, par cette mesure, nous n’ouvrions un débat autour du sujet sensible des peines planchers, débat qui serait, in fine, préjudiciable à l’adoption effective du texte. Nous n’imaginons pas une seconde que cela puisse être le souhait de M. le rapporteur, tant le sujet des violences routières et la lutte contre ce fléau sont des questions qui nous rassemblent tous bien au-delà de nos appartenances politiques.
Sur le fond, s’il est vrai que le juge, en l’espèce, garde une marge de manœuvre, puisqu’il conserve la faculté de déroger au prononcé d’une peine plancher, il ne peut le faire qu’à condition de motiver spécialement sa décision. Cette mesure risque ainsi de compliquer et de freiner l’action du juge dans un domaine où il convient, au contraire, que celui-ci jouisse d’une certaine souplesse. Le groupe RDPI défendra donc un amendement visant à revenir sur ces peines.
En conclusion, nous notons que l’objectif de ce texte fait largement consensus dans les rangs de notre assemblée et que nous avons tous à cœur de mieux lutter contre les violences routières. Nous craignons toutefois que le mieux puisse être l’ennemi du bien. Aussi nous inscrivons-nous en faux par rapport à certaines positions de la commission, qui risquent de compliquer le parcours législatif du texte.
Nous en appelons à la responsabilité de chacun, pour que, dans le respect et l’intérêt supérieur des victimes et de leur famille, nous trouvions les voies du compromis nécessaire à l’adoption de ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et UC.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Maryse Carrère applaudit également.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, nous connaissons l’importance du débat, nous connaissons les drames, nous savons que, en 2023, 3 400 personnes sont décédées dans un accident de voiture, de moto ou de mobylette. Tout ce qui peut être fait pour lutter contre ces drames doit être fait.
Un quart de ces accidents sont causés par l’excès de vitesse, un quart par l’état d’ivresse ou l’usage de stupéfiants et un troisième quart par la fatigue ; le dernier quart est lié à des motifs divers. In fine, environ la moitié des accidents mortels s’expliquent donc par des comportements absolument inacceptables.
Cette proposition de loi transpartisane présentée à l’Assemblée nationale a pour objectif de résoudre la difficulté de la qualification d’homicide involontaire. C’est le principe de base de ce texte : il s’agit de considérer qu’il y a bien eu une intention ou un comportement coupable – c’est cela d’ailleurs qui rend insupportable le qualificatif d’involontaire –, puisque le conducteur a estimé qu’il était en mesure de prendre le volant.
Le caractère insupportable de cette dénomination nous conduit peut-être à nous focaliser excessivement sur la qualification juridique, mais la douleur est bien réelle pour les familles qui ont perdu un proche. C’est le cas de la famille du jeune Antoine Alléno, tué par un chauffard sous l’emprise de l’alcool. C’est le cas aussi dans l’affaire Palmade : personne ne comprend très bien qu’il s’agisse d’un homicide involontaire, dans la mesure où certains protagonistes avaient bel et bien consommé des substances psychoactives.
Notre démarche doit être à la fois efficace et symbolique. Certes, nous ne sommes pas là pour créer des symboles ; notre rôle est d’écrire la loi. Mais le symbole aussi a son importance. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que nous légiférerions dans un tel contexte…
Le symbole consiste à décider de qualifier désormais tout accident mortel comme étant un homicide routier, dès lors que la personne n’était incontestablement pas en situation de conduire son véhicule.
C’est là que réside l’écart avec la proposition de M. le rapporteur, qui prévoit de qualifier d’homicide routier l’intégralité des accidents mortels, dès lors qu’ils sont commis à l’occasion de la conduite d’un véhicule terrestre à moteur, et cela quel que soit le comportement du conducteur lui-même. Une telle différence d’appréciation n’est pas neutre.
C’est ainsi qu’une sorte de confusion juridique s’installe entre les homicides que l’on pourrait qualifier de réellement involontaires et ceux qui sont aujourd’hui qualifiés ainsi parce que la personne n’avait pas l’intention de donner la mort, alors même que son comportement au volant montre à l’évidence qu’elle n’était pas en état de conduire normalement. C’est à ces derniers cas de figure qu’il faut, selon nous, réserver le qualificatif d’homicide routier.
À défaut, monsieur le rapporteur, nous irions à contresens de l’objectif initial du texte, qui est bien de stigmatiser et de punir de manière plus forte ceux qui ont conduit dans un état ne le permettant pas. Vous introduisez une confusion juridique en créant une troisième sorte d’infraction : il y aurait les homicides involontaires, les homicides volontaires et les homicides routiers. On voit bien la difficulté…
M. le garde des sceaux a qualifié de créativité l’inventivité du rapporteur, parce qu’il a voulu se montrer généreux.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Nous défendrons, pour notre part, un amendement visant à présenter les choses plus simplement.
Nous proposerons que l’homicide, qui n’est plus qualifié de volontaire ou d’involontaire, soit considéré avec une circonstance aggravante – ivresse, consommation de stupéfiants, etc. – comme un homicide routier. Avec deux circonstances aggravantes, le quantum de peine sera plus important. Il ne saurait donc y avoir une seule dénomination pour toutes sortes d’homicides, y compris ceux qui sont réellement involontaires.
Comme l’occasion était belle, M. le rapporteur a souhaité, par un amendement distinct, visant à témoigner tout de même de sa prudence législative, réintroduire les peines planchers. Je ne rouvrirai pas ici le débat sur ces peines ; le garde des sceaux en a expliqué les limites.
Quoi qu’il en soit, les introduire dans ce texte est une curiosité. En effet, indépendamment de ce que l’on en pense – pour ma part, je n’y suis pas favorable –, ces peines n’existeraient que pour une seule infraction : celle-ci. Or il s’agit bien d’un délit.
Pourquoi les prévoir pour ce seul cas de figure et non pour des crimes ou d’autres délits parfois plus graves ? Il y a là une incohérence juridique totale, d’autant que vous englobez également les homicides involontaires réellement involontaires. Nous souhaitions donc la suppression de cet article, ce qui a finalement été décidé ce matin en commission.
Au total, plusieurs dispositions intéressantes ont été proposées concernant les victimes. En effet, on a parlé de la qualification, mais on a moins parlé des victimes. Ces propositions n’ont pas toutes été retenues par la commission, mais nous devrions nous pencher sur certaines d’entre elles.
Elles alourdissent peut-être la procédure, mais le rapporteur n’étant pas freiné par cet inconvénient, il devrait considérer d’un œil favorable la meilleure information des parties civiles sur le déroulé des procédures, car celles-ci s’en plaignent souvent, allant même jusqu’à penser qu’il ne se passe rien et que la justice ne s’occupe pas d’elles ! Nous y reviendrons.
Alors que nous partageons totalement l’objectif de ce texte, nous souhaitons, par ces deux amendements, avoir une appréciation plus précise et plus fine de l’ensemble de l’organisation juridique. Nous espérons que, dans le débat qui va s’ouvrir, vous entendrez nos propositions, mes chers collègues.
Nous aviserons ensuite concernant notre vote, que je ne précise pas pour ne pas amoindrir par avance le suspense… (Applaudissements sur les travées des groupes SER, GEST et RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Alexandra Borchio Fontimp. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la double peine : voilà ce que ressentent les familles endeuillées lorsque le chauffard qui a mortellement percuté un être qui leur est cher n’effectue aucun jour d’enfermement.
Ce n’est pas un cas exceptionnel. C’est plutôt courant, et cela même quand le meurtrier a 2 grammes d’alcool dans le sang.
C’est l’histoire qu’a vécue Guillaume, 21 ans, mortellement fauché, en 2017, à Amiens. Une triste réalité à laquelle ont été confrontés mes collègues sénateurs de la Somme, Laurent Somon et Stéphane Demilly, avec lesquels j’avais déposé une proposition de loi, afin que plus aucune famille n’ait à subir cette humiliation, celle de voir celui qui a tué leur proche n’être jamais privé d’un seul jour de liberté.
Je pourrais m’arrêter là, car je suis convaincue que personne, dans cette assemblée, ne peut cautionner cet état de fait. Avant d’être législateurs, nous sommes parents, enfants, frères et sœurs. En nous mettant à la place de ces familles, nous imaginons la douleur profonde, la colère légitime et l’indignation générale qu’elles éprouvent chaque jour.
Avec mes collègues Laurent Somon et Stéphane Demilly, nous avions donc déposé une proposition de loi en octobre 2022, bien avant l’affaire médiatique d’un célèbre humoriste français, qui a poussé le Gouvernement à réellement traiter la question des violences routières. Nos travaux visaient à améliorer l’effectivité des peines.
Un homicide involontaire commis par un conducteur avec une circonstance aggravante est puni par une peine allant jusqu’à sept ans d’emprisonnement, mais le chauffard qui a tué Guillaume a passé un total de zéro jour en prison !
Des victimes comme Guillaume, il y en a partout en France. À Antibes, dans mon département des Alpes-Maritimes, les parents de Noé pleurent chaque jour la disparition de leur fils qui, mortellement fauché à l’âge de 17 ans par un chauffard ivre et sous l’empire de stupéfiants ; un chauffard qui a récidivé, d’ailleurs, puisqu’en septembre dernier il a été contrôlé au volant d’une voiture alors qu’il n’avait plus le droit de conduire, et ce, encore une fois, sous l’empire de drogues ! Et pourtant, il est aujourd’hui libre. Et c’est libre, probablement, qu’il comparaîtra à son procès dans quelques mois.
Cette personne a pris volontairement le volant, alors qu’elle était sous l’empire de l’alcool et de stupéfiants. Elle savait qu’elle pouvait blesser ou tuer, mais elle n’en avait que faire. Pourquoi ? Sûrement parce qu’elle savait qu’elle ne risquait, en fin de compte, pas grand-chose !
C’est cela, la double peine pour les familles victimes d’un homicide routier.
Nous sommes donc réunis pour dire : « Plus jamais ! » Surtout, nous devons nous assurer que la même impunité ne se reproduise plus.
Ce texte est ainsi l’occasion de mettre fin au mépris de ces délinquants routiers qui passent entre les mailles d’un filet juridique fragile et totalement inadapté à la réalité de ces drames.
L’expression d’« homicide involontaire » est insupportable. C’est pourquoi je soutiens pleinement la création d’un délit d’« homicide routier », votée à l’Assemblée nationale. Ce changement sémantique est un premier pas attendu par les familles des victimes.
Toutefois, à mon grand regret, le texte initial ne comportait rien sur l’effectivité des peines prononcées.
En 2022, sur 192 personnes condamnées pour homicide routier sous l’empire d’alcool ou de stupéfiants, seules 7 ont été placées en détention à la suite de l’audience. Ce sont les chiffres du ministère de la justice.
Le cœur de notre réponse, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, ce doit être une plus grande fermeté dans l’application des peines et une meilleure prise en charge des victimes.
Comment est-il encore possible que les victimes ne soient pas tenues au courant de la date de l’audience, ce qui leur permettrait de décider si elles prendront la parole pendant les débats ? Comment expliquer que les parties civiles ne sont pas informées des modalités d’exécution de la peine ?
En remédiant à ces manquements, on prendrait des mesures de bon sens, qui auraient pour vertu d’accroître le sentiment de justice en témoignant d’une plus grande fermeté envers les auteurs et d’une plus grande considération à l’égard des victimes. On peut imaginer qu’il ne s’agit souvent que de mieux appliquer des mesures existantes.
Aussi utile que perfectible, ce texte a fait l’objet d’un travail rigoureux plus encore que créatif en commission des lois. Je félicite notre rapporteur, Francis Szpiner, qui a eu le courage de proposer des réponses à des sujets presque tabous.
Dans notre proposition de loi, Laurent Somon, Stéphane Demilly et moi-même souhaitions que soient limités les aménagements de peine pour l’auteur d’un homicide routier définitivement condamné, le juge ne pouvant y déroger que sous certaines conditions.
À ce titre, je soutiens le dispositif, introduit dans le texte par le rapporteur, visant à fixer une peine minimale à laquelle les magistrats pourront déroger par motivation spéciale. C’est une mesure forte, attendue par de nombreuses familles de victimes.
Ensuite, parce que la répression n’aurait aucun sens sans une véritable politique de prévention et de sensibilisation, je présenterai des amendements visant à mieux prévenir les violences routières et à renforcer l’accompagnement des parties civiles.
Cette proposition de loi est indéniablement une nouvelle pierre apportée à la construction d’un cadre juridique réellement protecteur et pleinement réaliste.
Des avancées sont attendues. Il nous faut donc, ensemble, parfaire ce texte et nous montrer à la hauteur. Pour Noé, pour Antoine, pour Guillaume, pour leurs familles et pour toutes les victimes de comportements intolérables et d’actes meurtriers sur les routes, les sénateurs du groupe Les Républicains répondront présents. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Corinne Bourcier.
Mme Corinne Bourcier. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la voiture est essentielle à la mobilité de nos concitoyens dans bon nombre de nos territoires, mais on doit pouvoir se déplacer sans risquer sa vie. Chaque année, 3 000 Français meurent sur la route. C’est inacceptable !
Les causes des accidents sont multiples : la fatigue, de mauvaises conditions météorologiques, ou encore une faible visibilité. L’État réalise de nombreux contrôles pour assurer la sécurité des automobilistes.
Certaines causes, évitables, sont particulièrement intolérables. La consommation d’alcool, de drogues, l’usage du téléphone ou encore les excès de vitesse sont autant de mises en danger condamnables. S’agissant de l’utilisation du téléphone portable, la voiture ne doit pas devenir un bureau ambulant.
Malgré les contrôles, malgré les radars automatiques, malgré les actions de prévention, certains de nos concitoyens continuent d’adopter des comportements dangereux, qui ont trop souvent des conséquences tragiques.
Les auteurs de la proposition de loi dont nous débattons aujourd’hui jugent nécessaire de renforcer l’approche répressive de notre arsenal juridique.
Au-delà de l’alourdissement des sanctions, le texte vise à distinguer de l’homicide involontaire celui qui est commis sur la route dans des circonstances d’imprudence d’une particulière gravité.
Il est en effet incompréhensible, pour les familles de victimes, d’entendre parler d’homicide involontaire lorsque celui qui a tué avait pris le volant en étant ivre ou drogué.
En commission, le rapporteur a constaté que les circonstances particulièrement graves dans lesquelles l’homicide est commis ne permettent pas d’alourdir encore les peines encourues, sauf à faire de cette infraction un crime.
Notre rapporteur a ensuite introduit des peines planchers d’emprisonnement pour le délit d’homicide routier.
Nous comprenons bien entendu sa démarche, la peine d’emprisonnement punissant ce délit ayant déjà été portée au maximum de ce que permet notre droit.
Sans être particulièrement partisans des peines planchers, nous n’y sommes pas opposés. Il ne nous semble cependant pas opportun de réintroduire dans notre droit ce dispositif à l’occasion de cette proposition de loi.
Le texte vise en outre à renforcer la répression d’une multitude de délits routiers. Il élargit la notion de récidive afin de sanctionner plus sévèrement les auteurs réguliers d’infractions routières.
Les excès de vitesse figurent parmi les infractions les plus fréquentes. Ils sont responsables de plus d’un quart des morts sur les routes.
Il est envisagé, dans cette proposition de loi, de punir les excès de vitesse supérieurs à 50 kilomètres par heure non plus comme des contraventions, mais comme des délits. Notre groupe ne peut que soutenir cette disposition.
Nous soutenons également le renforcement des sanctions encourues par les automobilistes qui prennent le volant en état d’ivresse ou sous l’empire de stupéfiants.
L’actualité fait trop souvent état d’accidents mortels commis par des individus suffisamment irresponsables pour prendre le volant après avoir consommé de l’alcool ou des drogues, qui ensemble sont responsables de 41 % de la mortalité sur la route. Il est urgent d’y remédier.
Le texte alourdit les peines encourues pour la conduite sous l’effet de l’alcool ou de drogues. Il aggrave encore les peines encourues par ceux qui cumulent ces deux états. Nos concitoyens attendent en la matière la plus stricte fermeté.
Pour renforcer encore l’effet de ces sanctions, le texte prévoit de rendre systématiques l’immobilisation et la mise en fourrière du véhicule conduit en état d’ivresse ou sous l’empire de stupéfiants.
Nous ne devons négliger aucun moyen pour améliorer la sécurité de nos routes. La proposition de loi sur laquelle nous sommes amenés à nous prononcer contient des dispositions intéressantes, allant vers plus de fermeté.
D’autres dispositions nous paraissent plus discutables, aussi notre groupe sera-t-il particulièrement attentif aux débats.
M. le président. La parole est à Mme Olivia Richard. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Olivia Richard. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, il aura fallu que des personnalités publiques soient impliquées dans de graves accidents de la route pour que nous débattions de ce sujet. Cela même doit nous interroger.
En 2022, 3 550 personnes ont perdu la vie sur nos routes. Près de 25 % d’entre elles ont été tuées dans un accident impliquant un conducteur sous la double influence de l’alcool et de stupéfiants. En 2023, 232 000 personnes ont été blessées en France métropolitaine ; 16 000 d’entre elles, grièvement.
Face à ces chiffres dramatiques, nos collègues députés ont entendu répondre aux préconisations de portée législative du comité interministériel de la sécurité routière. Sa dixième recommandation était de « créer une qualification d’homicide routier » destinée à « renforcer la valeur symbolique de l’infraction d’homicide dit involontaire ». L’objectif est de « permettre une meilleure acceptation sociale d’une telle qualification ».
Comment des parents, en effet, peuvent-ils entendre que l’accident qui a causé la mort de leur enfant est involontaire, lorsque le conducteur qui l’a provoqué a pris le volant ivre ou sous l’influence de drogues, ou lorsqu’il roulait plus de 30 kilomètres par heure au-delà de la vitesse autorisée ? C’est inaudible, c’est inacceptable !
Permettez-moi de saluer les travaux antérieurs de certains de nos collègues dans le domaine plus large de la sécurité routière, que ce texte laisse sur leur faim.
Il est de notre responsabilité de nous assurer que notre droit est le plus efficace possible pour décourager les comportements irresponsables qui arrachent à son père un fils de 24 ans ou qui tuent un fœtus dans le ventre de sa mère.
Aujourd’hui, l’homicide involontaire et les atteintes involontaires à l’intégrité de la personne sont les seules qualifications inscrites dans notre code pénal pour de tels faits. Les peines qui les punissent varient en fonction de l’existence de circonstances aggravantes.
Or les deux tiers des atteintes involontaires et plus de la moitié des homicides involontaires sont commis avec une ou plusieurs circonstances aggravantes.
Nous devons reconnaître le caractère délibéré des violences routières. Celui qui boit sait qu’il boit. Celui qui se drogue sait qu’il se drogue. Celui qui roule trop vite sait qu’il roule trop vite.
C’est pourquoi je salue la création des infractions d’homicide routier et de blessures routières.
Si l’objet de ce texte n’est pas de dénaturer le caractère involontaire de ces infractions au sens juridique du terme, nous devons tenir compte de la réalité : il est insupportable pour les victimes de devoir accepter de façon inconditionnelle l’adjectif « involontaire ».
Le texte reprend donc la distinction entre l’homicide routier et les blessures routières ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure ou inférieure à trois mois.
Par ce texte, nous consacrons l’inscription dans le code pénal de la « violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement ».
La différence de nature entre un homicide involontaire et un homicide routier découlera de plusieurs circonstances aggravantes, telles que l’état d’ivresse, la conduite sans permis ou encore le dépassement de vitesse égal ou supérieur à 30 kilomètres par heure, contre 50 kilomètres par heure auparavant.
Parmi les nouvelles circonstances aggravantes figurait, dans le texte transmis par l’Assemblée nationale, la consommation de substances psychoactives. Je salue l’initiative de notre rapporteur, Francis Szpiner, qui a voulu la supprimer. En effet, comme l’indique le Conseil d’État dans son avis, un conducteur peut ne pas être conscient du risque qu’entraîne la consommation d’un produit psychoactif. Pour rappel, le tabac est considéré comme une substance psychoactive, au même titre qu’un grand nombre de médicaments utilisés au quotidien.
Par ailleurs, nous nous félicitons de l’assimilation de la récidive de plusieurs infractions à un état alcoolique ou à l’usage de stupéfiants. Celui qui, malgré les restrictions apportées à son droit de conduire, prend le volant régulièrement et défie ainsi l’autorité de l’État doit être puni. Indéniablement, il met les autres en danger. Les accidents de la route ne se produisent pas : ils sont causés.
Nous saluons donc l’alourdissement des sanctions qui pourront être prises à l’égard des personnes conduisant sous l’empire de stupéfiants ou de l’alcool. Parallèlement, par souci de cohérence, leur permis sera automatiquement suspendu.
Reste la question posée par l’article 1er ter A, introduit en commission, qui crée une peine minimale obligatoire de deux ans de prison dans les cas d’homicide routier par mise en danger. Autrement dit, il s’agit de réintroduire dans notre droit les peines planchers.
Si le groupe Union Centriste n’a pas déposé d’amendement sur cet article, ses membres sont tout de même très réticents à l’idée de réintroduire cette notion dans notre droit pénal à l’occasion de l’examen de cette proposition de loi.
Sur le fond, ils ne sont convaincus ni de la nécessité d’un tel dispositif ni de son efficacité. Sur la forme, cette initiative ne leur paraît pas plus opportune.
Ce texte, depuis son origine, est le fruit d’une démarche transpartisane. Dans la période actuelle, c’est suffisamment rare pour être salué. La réintroduction d’un marqueur politique comme les peines planchers serait de nature à mettre en péril l’aboutissement de la navette parlementaire dans un délai raisonnable. En effet, la procédure accélérée n’a pas été engagée sur ce texte. Il est pourtant très attendu.
Pour l’ensemble de ces raisons, nous soutiendrons les amendements visant à supprimer l’article 1er ter A, mais nous voterons naturellement pour l’ensemble de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Laurent Somon applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Guy Benarroche. « Certains usagers, par les risques qu’ils acceptent de faire courir, par l’insouciance que traduit leur attitude sur la route, se conduisent en véritables “asociaux”.
« J’ai rappelé l’an dernier aux parquets, par circulaires, l’impérieuse obligation de requérir afin que soient réprimées énergiquement et rapidement les infractions les plus graves, telles que la conduite sous l’emprise d’un état alcoolique, la violation des signaux d’arrêt impératif ou l’excès de vitesse manifeste. Cette politique judiciaire sera poursuivie avec fermeté. »
Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, tels étaient les mots qu’en avril 1985 Robert Badinter, dont nous saluons tous ici le parcours politique et la finesse de l’analyse juridique, employait pour évoquer les irresponsables au volant, qui tuent et blessent sur nos routes.
Pour réprimer ces faits inacceptables, il n’a pourtant nullement éprouvé le besoin de revenir sur la distinction établie, pour les blessures infligées ou la mort provoquée, entre actes volontaires et involontaires.
Nous entendons et comprenons la demande des familles meurtries. Pour autant, aussi légitime que soit leur douleur dans le processus judiciaire, lorsque l’homicide qui les touche est qualifié d’involontaire, il nous faut, comme toujours, légiférer avec le recul nécessaire pour garantir un ordre juridique consistant.
Jusqu’à récemment, notre législation distinguait entre atteintes volontaires et involontaires. Cette distinction reposait sur l’un des éléments constitutifs du délit, à savoir l’intentionnalité.
Les travaux qui ont précédé notre examen de cette proposition de loi l’expriment sans équivoque : il s’agit de faire apparaître les conséquences de l’acte plus que l’intention de l’auteur. C’est un réel changement de paradigme dans la qualification d’une infraction pénale.
La création de nouvelles divisions du code pénal, après ses articles 221-6 et 222-19-2, poursuivrait le glissement récemment engagé par l’adoption de loi du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure. Il y aurait donc six types d’atteintes aux personnes : les atteintes volontaires, les atteintes à la vie résultant d’une intoxication volontaire, les atteintes involontaires et, si ce texte devait être adopté, les atteintes à la vie par mise en danger, les homicides routiers et les blessures routières.
Nous avions déjà regretté l’intégration dans le code pénal du principe de « folie volontaire », à savoir la consommation volontaire de substances psychoactives « de façon illicite ou manifestement excessive, […] en ayant connaissance du fait que cette consommation est susceptible de la conduire à mettre délibérément autrui en danger ».
Mais, à l’époque, le choix d’un projet de loi comme véhicule législatif avait au moins eu le mérite de permettre la présentation d’une étude d’impact. L’avis du Conseil d’État était clair : la multiplication de nouvelles incriminations autonomes représente une complexification du droit, résultant de « réponses législatives à des événements particuliers ».
Avec la rédaction actuelle, comment poursuivre une personne ayant volontairement conduit son véhicule dans l’intention préméditée de donner la mort ?
La notion de discernement est-elle un concept définitivement révolu ?
Notre compassion infinie face à des situations dramatiques ne doit pas nous aveugler dans l’écriture du droit, en particulier si cela complexifie le travail de nos juges.
Parmi les principes de droit pénal auxquels nous sommes attachés, on compte l’intentionnalité du délit, mais aussi la personnalisation de la peine.
Nous ne pouvons donc cautionner l’inscription dans ce texte de sanctions planchers ou automatiques, car c’est au juge de juger.
Nous refusons également, encore et toujours, la création d’une nouvelle amende forfaitaire ; la Défenseure des droits recommande d’ailleurs de supprimer cette sanction au regard, notamment, du risque d’arbitraire et des problèmes rencontrés dans l’exercice du droit de recours.
Outre la modification des infractions et des peines associées, ce texte s’attaque aussi à la lutte contre la violence routière, qui est d’autant plus inacceptable que chaque mort est évitable. Mais les actions concrètes de prévention routière sont les grandes absentes de ce texte.
« Mais au-delà de ces chiffres – est-il besoin de le rappeler devant la Haute Assemblée ? – il y a – ce qui est plus important encore – la souffrance des femmes et des hommes meurtris dans leur corps, la douleur et l’angoisse des proches, des époux, des parents, des enfants. […] Face à une telle situation, il faut évidemment réagir et lutter, et en premier lieu développer, on le concevra, la prévention routière. » Ces mots sont, de nouveau, ceux de Robert Badinter en 1985.
Or cette proposition de loi, où l’on ne trouve comme solution que le renforcement de l’arsenal pénal, ne couvre pas le champ des campagnes de prévention et de l’amélioration de l’éducation routière, qui restent des éléments clés dans la lutte contre la violence routière et leurs auteurs.
Nous sommes bien conscients des difficultés à satisfaire le besoin de justice et de réparation des familles de victimes, et sensibles à leur souffrance. Mais loin d’apporter des réponses à celles-ci, ou des moyens de prévenir d’autres drames, cette proposition de loi risque d’engendrer une incertitude juridique majeure qui ne servira personne.
Nous ne pouvons voter ce texte tel qu’il nous est soumis. Notre position reflétera notre compréhension de la douleur des familles et notre volonté d’apporter une solution à la fois ferme et cohérente. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, j’ai d’abord une pensée pour toutes les personnes qui ont perdu un proche dans un accident de la route et pour toutes les victimes dont la vie a été détruite dans ces circonstances dramatiques.
Aucune loi ne pourra, hélas ! les ramener à la vie ou apaiser la douleur de ceux qui restent.
Nous sommes sans doute nombreux à connaître, dans notre entourage, une personne qui a perdu la vie dans un accident de la route. Et pour cause : en 2022, 3 550 personnes ont perdu la vie sur les routes en France – ces chiffres sont en hausse. Dans mon département de Meurthe-et-Moselle, il y a eu 601 accidents sur les routes en 2023, dont 32 ont été mortels.
La grande majorité de ces accidents est causée par des facteurs comportementaux, avec en tête la vitesse et la consommation d’alcool et de stupéfiants. Il est donc nécessaire d’agir.
Ces causes constituent, dans le code pénal en vigueur, des circonstances aggravantes de délits involontaires punis par des peines de prison déjà importantes : sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende pour un homicide, cinq ans de prison et 75 000 euros d’amende pour une atteinte involontaire à l’intégrité de la personne avec une incapacité totale de travail (ITT) de plus de trois mois, et trois ans de prison et 45 000 euros d’amende si l’ITT de moins de trois mois.
Cette proposition de loi alourdit ces peines, qui passeraient de sept à dix ans de prison pour l’homicide routier, de cinq à sept ans pour les atteintes involontaires à l’intégrité de la personne avec une ITT de plus de trois mois et de trois à cinq ans pour les ITT inférieures à trois mois.
La proposition de loi a même été complétée en commission par l’introduction de peines planchers. Nous avons déposé un amendement visant à supprimer du texte ce mécanisme contraire au principe constitutionnel de l’individualisation des peines.
Sans étude d’impact et sans analyse complémentaire, il est difficile de s’assurer qu’un tel alourdissement des peines permettra d’atteindre l’objectif de cette proposition de loi, à savoir la facilitation de la lutte contre la violence routière.
Peut-on s’assurer qu’un chauffard limitera sa vitesse, ou qu’une personne en état d’ivresse s’abstiendra de prendre la route si ces peines sont alourdies ? Hélas, la loi ne peut raisonner un individu dangereux ou irresponsable.
Je m’étonne surtout d’une réelle carence de cette proposition de loi : elle ne contient aucune mesure de prévention. C’est pourtant la clé de voûte de la lutte contre la violence routière.
L’efficacité de la prévention et de la sécurité routière n’est plus à démontrer. Elle a permis, depuis les années 1970, de faire chuter le nombre de morts sur les routes. Alors pourquoi est-elle la grande oubliée de cette proposition de loi ?
Nous avions déposé un amendement visant à développer la prévention dès l’âge de 16 ans, lors de la Journée défense et citoyenneté (JDC). Il a été déclaré irrecevable, c’est dommage.
M. Laurent Somon. En effet !
Mme Silvana Silvani. De plus, le texte ne contient pas un mot sur la lutte contre la consommation d’alcool au volant, qui est pourtant responsable de 30 % des accidents de la route et des drames qui en découlent.
Nous avions également déposé un amendement sur ce point. Il a, lui aussi, a été déclaré irrecevable.
Il apparaît donc que la présente proposition de loi, si elle vise à lutter contre la violence routière, se cantonne pourtant à un alourdissement des sanctions, sans volet de prévention.
Malgré ces regrets, nous ne nous opposerons pas à ce texte, puisque nous souhaitons renforcer la lutte contre la violence routière.
Il sera pourtant nécessaire de prendre des mesures préventives pour protéger nos vies et celles de nos proches sur les routes, en sensibilisant chacun, dès le plus jeune âge, aux dangers de la vitesse et de la consommation d’alcool et de stupéfiants et en lançant des campagnes de prévention importantes, sur tout le territoire, afin de toucher tous les conducteurs.
Mais il nous faudra aussi nous interroger sur l’opportunité de construire et de vendre des voitures toujours plus puissantes et plus rapides alors que la vitesse, limitée en droit sur nos routes, est la première cause de mortalité routière. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)
M. le président. La parole est à M. Michel Masset. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Bernard Buis applaudit également.)
M. Michel Masset. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, le texte que nous étudions affecte un grand nombre de nos concitoyens. La mort tragique d’une personne dans un accident impliquant un véhicule ne saurait plus être réduite à un fait divers.
Nous savons – les statistiques le confirment – que trois facteurs augmentent particulièrement le risque d’accident : la vitesse, l’alcool et les stupéfiants.
Ces trois éléments sont d’ores et déjà réprimés par notre droit pénal, puisqu’ils constituent des infractions en propre, mais également des circonstances aggravantes dans la caractérisation des infractions d’homicide et d’atteinte à l’intégrité physique de la personne.
Il nous est ici proposé de créer de nouvelles infractions routières pour éviter que celles-ci puissent être qualifiées d’involontaires.
Tant pour les auteurs de la proposition de loi que pour le comité interministériel de la sécurité routière, la principale mesure proposée est symbolique.
Dans son équilibre initial, cette proposition de loi ne remettait pas systématiquement en cause le caractère involontaire de l’homicide, mais soulignait la faute de l’auteur par une distinction entre infractions.
En effet, notre société ne supporte plus qu’un chauffard qui s’est lui-même placé dans une situation qui augmente dramatiquement les risques pour autrui soit condamné pour une atteinte ou un homicide dits « involontaires ».
C’est bien dans cet esprit que le texte a été adopté, à l’unanimité, par l’Assemblée nationale.
Lorsque nous créons de nouvelles qualifications pénales, nous devons nous prémunir de deux effets pernicieux. D’une part, il faut bien se garder de rendre floues les frontières établies, en l’espèce, entre l’intentionnalité et la non-intentionnalité de l’atteinte aux personnes. D’autre part, ne perdons pas de vue que la fonction première du droit pénal est de réparer les dommages causés à la société et de sanctionner les atteintes inacceptables.
Au regard de cela, le texte adopté par l’Assemblée nous semblait opérer une juste conciliation entre la nécessité de moderniser le droit pénal, notamment pour mieux répondre aux attentes des victimes, et la préservation de ses grands principes.
Cette version de la proposition de loi conservait, dans une certaine mesure, un caractère supplétif à l’infraction d’homicide routier, pour sanctionner d’abord la faute intentionnelle qui a pu conduire à l’atteinte à la vie ou à l’intégrité physique. Elle répondait aux attentes des victimes, sans entrer dans une dérive.
Hélas ! le texte adopté par notre commission des lois ne donne pas le même sentiment.
Notre rapporteur, dont il faut souligner le sérieux et la qualité des travaux, a proposé d’élargir le dispositif à tous les homicides commis lors d’un accident routier, avec ou sans circonstance aggravante. Certes, nous comprenons cette démarche, mais elle risque de dénaturer le dispositif au point de lui faire manquer sa cible. Le symbole n’est plus là et ceux qui se mettent en mesure de tuer relèvent de nouveau de la même infraction que les autres.
Pour pallier cette difficulté, il est proposé de réintroduire dans notre droit des peines planchers. J’évoque ici l’article 1er ter A, issu d’un amendement de notre rapporteur.
Chacun le sait, les peines planchers vont à l’encontre de principes fondamentaux qui guident le droit pénal français. C’est notamment le principe à valeur constitutionnelle d’individualisation de la peine qui est en jeu.
Notre rapporteur, en juriste averti, a certes introduit un garde-fou constitutionnel en prévoyant d’ores et déjà qu’il serait possible de déroger à la peine plancher. Ce nouvel ajout devient ainsi, lui aussi, un simple symbole, et l’introduire à l’égard d’une seule infraction, au détour d’un amendement, me paraît discutable.
Les sénateurs du RDSE, en accord avec leurs principes, détermineront leur position une fois achevé l’examen des amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Laurent Somon. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Somon. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, en préambule, je tiens à saluer le travail accompli sur ce texte par nos collègues députés et notamment par Mme Anne Brugnera, rapporteure de ce texte à l’Assemblée nationale.
Martin Luther King, en son temps, déclarait avec ferveur : « J’ai fait un rêve. » Pour ma part, je vous dis avec autant de détermination : « J’ai fait une promesse. »
Si ces deux assertions peuvent sembler éloignées de prime abord, vous comprendrez combien elles se rejoignent dans le texte dont nous débattons ce soir : la proposition de loi créant l’homicide routier et visant à lutter contre la violence routière.
Cette promesse est celle que j’ai faite à Yann Desjardins, dont le fils Guillaume a été fauché en septembre 2017 par un chauffard alcoolisé alors qu’il circulait à vélo. Lui-même malade d’une leucémie, et dans l’attente d’une greffe d’organe que devait lui donner son fils décédé, cet homme, emporté à son tour par la mort, menait un combat acharné pour obtenir la création d’un délit d’homicide routier. Il souhaitait que le chauffard à l’origine de la mort de son fils, condamné à porter un bracelet électronique, aille véritablement derrière les barreaux. Il remuait ciel et terre pour cette cause.
Cette promesse est celle que j’ai faite à Thibaut, le frère de Guillaume, qui poursuit ce combat pour que la justice entende le besoin d’une qualification d’homicide routier débarrassée de l’insupportable adjectif « involontaire ».
Cette promesse est celle que j’ai faite avec les associations de familles de victimes, qui se battent au quotidien au côté des familles. Je veux ici leur rendre hommage et les remercier de leurs contributions et propositions : il faut considérer les familles avec empathie et sollicitude, les accompagner et les informer, que ce soit lors de la survenue des faits, dans les heures qui suivent, pendant l’enquête ou durant la procédure judiciaire ; il faut, enfin, que les condamnations prononcées lors des jugements connaissent des suites effectives.
Pourquoi avoir tant attendu pour apprécier, aujourd’hui seulement, cette qualification d’homicide routier, hier systématiquement refusée par le ministère ?
Mme Corinne Imbert. Tout à fait !
M. Laurent Somon. J’espère qu’il n’a pas fallu des circonstances opportunes ou particulières affectant des personnalités, qu’elles soient responsables ou victimes…
Mme Pascale Gruny. Très bien !
M. Laurent Somon. Force est de constater que cette évolution est survenue après le drame de Villiers-en-Bière. Quoi qu’il en soit, félicitons-nous que le comité interministériel de la sécurité routière de juillet 2023, présidé par Élisabeth Borne, alors Première ministre, se soit enfin prononcé en ce sens. Il s’est en effet déclaré favorable à une nouvelle qualification de ces accidents routiers entraînant la mort ou de graves blessures.
Monsieur le garde des sceaux, vous avez affirmé devant l’Assemblée nationale : « En droit, les mots consacrés par la loi ont encore plus de poids, surtout quand il s’agit de qualifier des actes qui ont causé la perte d’un être cher. » Vous ajoutiez : « En droit, les mots emportent aussi des conséquences sur le déroulement des enquêtes et lors de l’audience. » Vous l’avez redit au début de cette discussion générale.
Nous faisons nôtre cette analyse, même si le texte de l’Assemblée nationale en assure une traduction insuffisante, qu’il s’agisse de l’écoute, de l’accompagnement ou de l’information des familles tout au long de l’enquête et de la procédure.
Vous auriez pu préciser, à l’instar de M. le rapporteur, qu’en droit les mots emportent aussi des conséquences sur les sanctions proposées et décidées par le juge.
M. Laurent Somon. Pour ce qui concerne la qualification, les peines encourues et complémentaires proposées, je remercie la commission des lois et son rapporteur, Francis Szpiner, de son travail fouillé. De même, je salue ses fructueux efforts de clarification sémantique : le texte qu’il nous soumet écarte désormais toute interprétation confuse tout en fixant des peines proportionnées.
Avec mes collègues Alexandra Borchio Fontimp et Jean Sol, nous défendrons un certain nombre d’amendements visant à renforcer le soutien que méritent les familles. Vous-même avez insisté sur cette exigence, monsieur le garde des sceaux : selon vos propres termes, il faut « faire en sorte que les mots du droit n’aggravent pas la souffrance des victimes ».
La procédure ne doit donc pas exclure le besoin d’expression et d’information des familles ; la sanction ne doit pas aggraver le sentiment d’injustice, en creusant un gouffre entre la souffrance ad vitam æternam des familles et la peine effective purgée par le chauffard responsable. N’oublions pas que seulement 10 % des condamnations de prison ferme sont effectuées !
Oui, j’ai fait une promesse : celle de répondre par ce texte, dûment amendé, aux justes attentes des familles de victimes d’accidents routiers.
J’ai promis de faire en sorte que la prévention soit au cœur d’une loi respectant l’équilibre entre, d’une part, la prise en compte de la douleur, qui suppose un accompagnement digne de ce nom et une procédure conduite dans un temps raisonnable, et, de l’autre, de justes sanctions, dont l’énoncé soit dissuasif et connu et dont l’effectivité, proportionnée à la douleur des familles, soit préventive et réparatrice.
Bien sûr, in fine, je garde un certain nombre de regrets. Comme l’a relevé Mme Silvani, cette proposition de loi ne consacre pas un mot à la prévention ou à l’éducation.
Je regrette aussi que le texte relatif à la sécurité routière sur lequel avait planché le comité interministériel soit resté dans les tiroirs ; cette proposition de loi demeure par conséquent parcellaire. J’espère au moins – j’y insiste – qu’il ne s’agit pas d’un texte de circonstance…
Aucune mesure de prévention n’est prévue pour lutter contre les addictions ou contre la consommation d’alcool ; on ne prévoit pas davantage de campagne contre les violences routières dans les médias.
Mes chers collègues, je resterai fidèle à ma promesse lors de l’examen des amendements ; mais je fais aussi le rêve qu’au terme de nos débats nous parvenions, par une justice responsable et humaine, à apaiser les douleurs et à convaincre du rôle éducatif et préventif des sanctions et des mesures de prévention.
J’ai fait un rêve et une promesse : plus de sécurité routière, moins d’insécurité pénale ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La discussion générale est close.
9
Modification de l’ordre du jour
M. le président. Mes chers collègues, par lettre en date de ce jour, le Gouvernement demande que la lecture des conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à adapter le droit de la responsabilité civile aux enjeux actuels, prévue en troisième point de l’ordre du jour de l’après-midi du mardi 2 avril prochain, soit reportée au mercredi 3 avril à seize heures trente, après les questions d’actualité au Gouvernement.
Acte est donné de cette demande ; en conséquence, le délai limite pour l’inscription des orateurs serait reporté au mardi 2 avril à quinze heures.
10
Homicide routier
Suite de la discussion et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. Nous reprenons l’examen de la proposition de loi créant l’homicide routier et visant à lutter contre la violence routière.
Nous en sommes parvenus à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi créant l’homicide routier et visant à lutter contre la violence routière
Article 1er
Le code pénal est ainsi modifié :
1° et 2° (Supprimés)
3° (nouveau) Le chapitre Ier du titre II du livre II est ainsi modifié :
a) Le second alinéa de l’article 221-6 est supprimé ;
b) Après le même article 221-6, est insérée une section 2 bis dont l’intitulé est ainsi rédigé : « Des atteintes à la vie par mise en danger » et comprenant l’article 221-6-1 ;
c) Le même article 221-6-1 est ainsi rédigé :
« Art. 221-6-1. – Le fait de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, la mort d’autrui constitue un homicide par mise en danger d’autrui puni de cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende. » ;
d) Après ledit article 221-6-1, est insérée une section 2 ter ainsi rédigée :
« Section 2 ter : De l’homicide routier
« Art. 221-6-1-1. – Le fait, pour le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, la mort d’autrui constitue un homicide routier puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende.
« Art. 221-6-1-2. – Le fait, pour le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, la mort d’autrui constitue un homicide routier par mise en danger puni de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende.
« Est également qualifié d’homicide routier par mise en danger et puni des mêmes peines le fait, par le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues au même article 121-3, la mort d’autrui dans l’une des circonstances suivantes :
« 1° Le conducteur se trouvait en état d’ivresse manifeste, était sous l’empire d’un état alcoolique caractérisé par une concentration d’alcool dans le sang ou dans l’air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues au même code destinées à établir l’existence d’un état alcoolique ;
« 2° Il résulte d’une analyse sanguine ou salivaire que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues audit code destinées à établir s’il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;
« 3° Le conducteur n’était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;
« 4° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 30 kilomètres à l’heure ;
« 5° Le conducteur, sachant qu’il vient de causer ou d’occasionner un accident, ne s’est pas arrêté et a tenté ainsi d’échapper à la responsabilité pénale ou civile qu’il peut encourir ou n’a pas porté secours ou prêté assistance à une personne en danger.
« Les peines sont portées à dix ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende lorsque l’homicide routier par mise en danger a été commis avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° à 5° du présent article. » ;
e) Après le même article 221-6-1, est insérée une section 2 quater dont l’intitulé est ainsi rédigé : « De l’homicide résultant de l’agression commise par un chien » et comprenant l’article 221-6-2 ;
f) Après le même article 221-6-2, est insérée une section 2 quinquies dont l’intitulé est ainsi rédigé : « Dispositions diverses » et comprenant l’article 221-7 ;
g) Le même article 221-7 est ainsi modifié :
– au premier alinéa, les mots : « à l’article 221-6 » sont remplacés par les mots : « aux articles 221-6 et 221-6-1 » ;
– au dernier alinéa, les mots : « au second alinéa de l’article 221-6 » sont remplacés par les mots : « à l’article 221-6-1 » ;
4° (nouveau) Le chapitre II du même titre II est ainsi modifié :
a) Le second alinéa de l’article 222-19 est supprimé ;
b) Les articles 222-19-1 et 222-19-2 sont abrogés ;
c) Après l’article 222-19-2, est insérée une section 2 bis dont l’intitulé est ainsi rédigé : « Des atteintes à l’intégrité de la personne par mise en danger » et comprenant les articles 222-20 et 222-20-1 ;
d) Les mêmes articles 222-20 et 222-20-1 sont ainsi rédigés :
« Art. 222-20. – Le fait de causer à autrui, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement constitue des blessures ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à trois mois par mise en danger d’autrui punies de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
« Art. 222-20-1. – Le fait de causer à autrui, par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, une incapacité totale de travail d’une durée inférieure ou égale à trois mois est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. » ;
e) Après l’article 222-20-1, est insérée une section 2 ter dont l’intitulé est ainsi rédigé : « Des blessures résultant de l’agression commise par un chien » et comportant l’article 222-20-2 ;
f) Après le même article 222-20-2, est insérée une section 2 quater ainsi rédigée :
« Section 2 quater : Des blessures routières
« Art. 222-20-3. – Le fait de causer à autrui, pour le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévu à l’article 222-19, une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois constitue des blessures routières punies de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
« Art. 222-20-4. – Lorsque la maladresse, l’imprudence, l’inattention, la négligence ou le manquement à une obligation législative ou réglementaire de prudence ou de sécurité prévu à l’article 222-19 est commis par le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, les blessures routières ayant entraîné une incapacité totale de travail d’une durée inférieure ou égale à trois mois sont punies de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.
« Art. 222-20-5. – Le fait, pour le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement constitue des blessures routières par mise en danger ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à trois mois punies de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende.
« Est également qualifié de blessures routières par mise en danger ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à trois mois punies des mêmes peines le fait, pour le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues au même article 121-3, des blessures ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à trois mois dans l’une des circonstances suivantes :
« 1° Le conducteur se trouvait en état d’ivresse manifeste, était sous l’empire d’un état alcoolique caractérisé par une concentration d’alcool dans le sang ou dans l’air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues au même code et destinées à établir l’existence d’un état alcoolique ;
« 2° Il résulte d’une analyse sanguine ou salivaire que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues audit code destinées à établir s’il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;
« 3° Le conducteur n’était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;
« 4° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 30 kilomètres à l’heure ;
« 5° Le conducteur, sachant qu’il vient de causer ou d’occasionner un accident, ne s’est pas arrêté et a tenté ainsi d’échapper à la responsabilité pénale ou civile qu’il peut encourir ou n’a pas porté secours ou prêté assistance à une personne en danger.
« Les peines sont portées à sept ans d’emprisonnement et à 100 000 euros d’amende lorsque les blessures routières ont été commises avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° à 5° du présent article ou lorsque les blessures routières définies au deuxième alinéa ont été commises avec deux ou plusieurs des circonstances mentionnées aux 1° à 5°.
« Art. 222-20-6. – Le fait, pour le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, une incapacité totale de travail d’une durée inférieure ou égale à trois mois par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement constitue des blessures routières par mise en danger ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure ou égale à trois mois punies de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
« Est également qualifié de blessures routières ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure ou égale à trois mois punies des mêmes peines le fait, pour le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues au même article 121-3, des blessures ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure ou égale à trois mois dans l’une des circonstances suivantes :
« 1° Le conducteur se trouvait en état d’ivresse manifeste, était sous l’empire d’un état alcoolique caractérisé par une concentration d’alcool dans le sang ou dans l’air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues au même code destinées à établir l’existence d’un état alcoolique ;
« 2° Il résulte d’une analyse sanguine ou salivaire que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues audit code destinées à établir s’il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;
« 3° Le conducteur n’était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;
« 4° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 30 kilomètres à l’heure ;
« 5° Le conducteur, sachant qu’il vient de causer ou d’occasionner un accident, ne s’est pas arrêté et a tenté ainsi d’échapper à la responsabilité pénale ou civile qu’il peut encourir ou n’a pas porté secours ou prêté assistance à une personne en danger.
« Les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende lorsque les blessures routières ont été commises avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° à 5° du présent article ou lorsque les blessures routières définies au deuxième alinéa ont été commises avec deux ou plusieurs des circonstances mentionnées aux 1° à 5°. » ;
g) Après ledit article 222-20-2, est insérée une section 2 quinquies dont l’intitulé est ainsi rédigé : « Dispositions diverses » et comprenant l’article 222-21 ;
h) Le même article 222-21 est ainsi modifié :
– au premier alinéa, les mots : « la présente section » sont remplacés par les mots : « les sections 2 à 2 quater du présent chapitre » ;
– au dernier alinéa, les mots : « au deuxième alinéa de l’article 222-19 » sont remplacés par les mots : « à l’article 220-20 » ;
5° (nouveau) Le I de l’article 221-8 est ainsi modifié :
a) Après la seconde occurrence du mot « professionnelle », la fin du 3° est supprimée ;
b) Les 7° à 11° sont abrogés ;
c) Le dernier alinéa est supprimé ;
6° (nouveau) L’article 221-11 est ainsi rétabli :
« Art. 221-11. – I. – Les personnes physiques coupables des délits prévus à l’article 221-6-1-2 encourent également les peines complémentaires suivantes :
« 1° L’interdiction, suivant les modalités prévues à l’article 131-27, d’exercer une fonction publique ou d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise ;
« 2° La suspension, pour une durée de cinq ans au plus, du permis de conduire ;
« 3° L’annulation du permis de conduire, avec l’interdiction de solliciter la délivrance d’un nouveau permis pendant dix ans au plus ;
« 4° L’interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n’est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
« 5° L’interdiction, pendant une durée de cinq ans au plus, de conduire un véhicule qui ne soit pas équipé par un professionnel agréé ou par construction d’un dispositif d’anti-démarrage par éthylotest électronique, homologué dans les conditions prévues à l’article L. 234-17 du code de la route. Lorsque cette interdiction est prononcée en même temps que la peine d’annulation ou de suspension du permis de conduire, elle s’applique, pour la durée fixée par la juridiction, à l’issue de l’exécution de cette peine ;
« 6° La confiscation du véhicule dont le condamné s’est servi pour commettre l’infraction, s’il en est le propriétaire ou si le propriétaire du véhicule l’a laissé à la disposition du condamné en ayant connaissance du fait que ce dernier :
« a) Se trouvait en état d’ivresse manifeste ;
« b) Avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants ;
« c) Avait volontairement consommé, de façon détournée ou manifestement excessive, une ou plusieurs substances psychoactives figurant sur une liste dressée dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État ;
« d) N’était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou avait vu son permis être annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;
« 7° La confiscation d’un ou de plusieurs véhicules appartenant au condamné ;
« 8° L’immobilisation, pendant une durée d’un an au plus, du véhicule dont le condamné s’est servi pour commettre l’infraction, s’il en est le propriétaire ou si le véhicule a été laissé à sa libre disposition dans les conditions prévues au 6° du présent I ;
« 9° La peine complémentaire d’affichage ou de diffusion de la décision prévue à l’article 131-35.
« II. – Toute condamnation pour les délits prévus à l’article 221-6-1-2 donne lieu de plein droit à l’annulation du permis de conduire, avec l’interdiction de solliciter un nouveau permis pendant une durée comprise entre cinq et dix ans. En cas de récidive, la durée de l’interdiction est portée de plein droit à dix ans et le tribunal peut, par décision spécialement motivée, prévoir que cette interdiction est définitive.
« III. – Le prononcé des peines complémentaires suivantes est obligatoire :
« 1° Dans les cas prévus au 3° et au dernier alinéa de l’article 221-6-1-2, les peines complémentaires prévues aux 6° et 7° du I du présent article ;
« 2° Dans les cas prévus au 1° de l’article 221-6-1-2, la peine complémentaire prévue au 5° du I du présent article ;
« 3° Dans les cas prévus aux 1°, 2° et 4° de l’article 221-6-1-2, en cas de récidive ou si la personne a déjà été définitivement condamnée pour un des délits prévus aux articles L. 221-2, L. 224-16, L. 234-1, L. 234-8, L. 235-1, L. 235-3 ou L. 413-1 du code de la route ou pour la contravention mentionnée au même article L. 413-1, les peines complémentaires prévues aux 6° et 7° du I du présent article.
« Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer ces peines, en considération des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur. » ;
7° (nouveau) Le I de l’article 222-44 est ainsi modifié :
a) Après la seconde occurrence du mot : « professionnelle », la fin du 3° est supprimée ;
b) Les 8°, 10°, 13° et 14° sont abrogés ;
c) Le dernier alinéa est supprimé ;
8° (nouveau) Après l’article 222-44-1, il est inséré un article 222-44-2 ainsi rédigé :
« Art. 221-44-2. – I. – Les personnes physiques coupables des délits prévus aux articles 222-20-5 et 222-20-6 encourent également les peines complémentaires suivantes :
« 1° L’interdiction, suivant les modalités prévues à l’article 131-27, d’exercer une fonction publique ou d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise ;
« 2° La suspension, pour une durée de cinq ans au plus, du permis de conduire ;
« 3° L’annulation du permis de conduire, avec l’interdiction de solliciter la délivrance d’un nouveau permis pendant dix ans au plus ;
« 4° L’interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n’est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
« 5° L’interdiction, pendant une durée de cinq ans au plus, de conduire un véhicule qui ne soit pas équipé par un professionnel agréé ou par construction d’un dispositif d’anti-démarrage par éthylotest électronique, homologué dans les conditions prévues à l’article L. 234-17 du code de la route. Lorsque cette interdiction est prononcée en même temps que la peine d’annulation ou de suspension du permis de conduire, elle s’applique, pour la durée fixée par la juridiction, à l’issue de l’exécution de cette peine ;
« 6° La confiscation du véhicule dont le condamné s’est servi pour commettre l’infraction, s’il en est le propriétaire ou si le propriétaire du véhicule l’a laissé à la disposition du condamné en ayant connaissance du fait que ce dernier :
« a) Se trouvait en état d’ivresse manifeste ;
« b) Avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants ;
« c) Avait volontairement consommé, de façon détournée ou manifestement excessive, une ou plusieurs substances psychoactives figurant sur une liste dressée dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État ;
« d) N’était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou avait vu son permis être annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;
« 7° L’immobilisation, pendant une durée d’un an au plus, du véhicule dont le condamné s’est servi pour commettre l’infraction, s’il en est le propriétaire ou si le véhicule a été laissé à sa libre disposition dans les conditions prévues au 6° du présent I ;
« 8° La peine complémentaire d’affichage ou de diffusion de la décision prévue à l’article 131-35.
« II. – Toute condamnation pour les délits prévus à l’article 222-20-5 donne lieu de plein droit à l’annulation du permis de conduire, avec l’interdiction de solliciter un nouveau permis pendant une durée comprise entre cinq et dix ans. En cas de récidive, la durée de l’interdiction est portée de plein droit à dix ans et le tribunal peut, par décision spécialement motivée, prévoir que cette interdiction est définitive.
« III. – Le prononcé des peines complémentaires suivantes est obligatoire :
« 1° Dans les cas prévus au 3° et au dernier alinéa des articles 222-20-5 et 222-20-6, les peines complémentaires prévues au 6° du I du présent article et au 5° de l’article 222-44 ;
« 2° Dans les cas prévus aux 1° des articles 222-20-5 et 222-20-6, la peine complémentaire prévue au 5° du I du présent article ;
« 3° Dans les cas prévus aux 1°, 2° et 4° des articles 222-20-5 et 222-20-6, en cas de récidive ou si la personne a déjà été définitivement condamnée pour un des délits prévus aux articles L. 221-2, L. 224-16, L. 234-1, L. 234-8, L. 235-1, L. 235-3 ou L. 413-1 du code de la route ou pour la contravention mentionnée au même article L. 413-1, les peines complémentaires prévues au 6° du I du présent article et au 5° de l’article 222-44.
« Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer ces peines, en considération des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur. »
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Szpiner, rapporteur. J’avoue être un peu perplexe. On se demande parfois si les uns et les autres lisent les textes qui leur sont soumis…
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Vous voulez dire « nos collègues » !
M. Francis Szpiner, rapporteur. Je tiens donc à rappeler la rédaction que nous proposons d’inscrire au sein du code pénal, dans un nouvel article 221-6-1-1 ouvrant une section intitulée « De l’homicide routier » : « Le fait, pour le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, de causer, selon les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, la mort d’autrui constitue un homicide routier puni de cinq ans d’emprisonnement. »
La notion d’homicide involontaire, reposant sur les manquements énumérés, demeure donc bien dans les éléments constitutifs du délit d’homicide routier. Mme de La Gontrie évoquait tout à l’heure ces manquements ; nous parlons de personnes qui, en particulier, n’ont ni bu ni pris de drogue.
Parallèlement, l’ancien homicide involontaire aggravé devient l’homicide routier par mise en danger, caractérisé par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité.
J’ai lu dans l’exposé des motifs d’un amendement déposé sur l’initiative du groupe RDPI qu’une telle rédaction serait constitutionnellement suspecte. Or elle ne fait que reprendre une disposition figurant depuis vingt ans dans le code pénal…
Je maintiens que, si l’homicide routier est un tout, on peut clairement en distinguer deux sortes : l’homicide routier simple, qui correspond par ses éléments constitutifs à un homicide involontaire, et l’homicide routier par mise en danger, qui n’est autre que l’ancien homicide involontaire aggravé. Il n’y a là rien de nouveau, mais cette approche garantit une unité.
Les associations et les familles de victimes insistent avec force sur ce point : dans de telles situations, on ne doit pas faire de distinction entre les familles.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 39, présenté par Mme de La Gontrie, MM. Durain, Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mme Linkenheld, M. Roiron, Mme Narassiguin et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le dernier alinéa de l’article 221-6-1 du code pénal est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« L’homicide involontaire mentionné au présent article est qualifié d’homicide routier :
« - lorsqu’il a été commis avec une seule des circonstances mentionnées aux 1° et suivants du présent article, cet homicide routier est puni de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende.
« - lorsqu’il a été commis avec deux ou plus des circonstances aggravantes sus-mentionnées, il est puni de dix ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende. »
La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Les explications très fouillées de M. le rapporteur nous rappellent qu’il est parfois nécessaire de faire simple. (M. Olivier Rietmann s’exclame.)
Pour notre part, nous proposons, dans cet esprit, de qualifier d’homicides routiers ceux qui, jusqu’à présent, en droit pénal, étaient considérés comme des homicides involontaires avec au moins une circonstance aggravante ; ces délits seraient plus sévèrement punis en présence d’au moins deux circonstances aggravantes. Ces dispositions sont simples ; elles tiennent en cinq lignes et non en huit pages, comme celles que propose M. le rapporteur.
Le texte de la commission qualifie les homicides en fonction de la violation de lois et règlements ; mais cet ensemble, dont il mentionne quelques exemples, va bien au-delà de l’homicide routier ! Il englobe notamment les droits du travail et de l’urbanisme. Il dépasse donc largement le champ du présent texte.
Un toilettage du code pénal est peut-être bienvenu : nous n’avions pas compris que tel était l’objet de cette proposition de loi, mais sans doute avons-nous péché par manque d’ambition… (Sourires sur les travées du groupe SER.)
Plus sérieusement, lorsque l’homicide routier aura été commis avec une seule circonstance aggravante, nous proposons une peine de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende : ce n’est pas rien. Et, lorsqu’il aura été commis avec deux circonstances aggravantes ou plus, nous proposons dix ans de prison et 150 000 euros d’amende.
J’y insiste, ces dispositions ont le mérite d’être claires : j’ai pu les exposer en moins d’une minute. Celles qu’a retenues M. le rapporteur exigeraient au moins un quart d’heure…
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 3 rectifié est présenté par M. Masset, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Daubet et Fialaire, Mme Girardin, M. Gold, Mme Guillotin, MM. Guiol et Laouedj, Mme Pantel et M. Roux.
L’amendement n° 32 rectifié est présenté par Mme Schillinger, MM. Mohamed Soilihi, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lemoyne, Lévrier, Omar Oili, Patient et Patriat, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
Le code pénal est ainsi modifié :
1° Les deuxième à dernier alinéas des articles 221-6-1, 222-19-1 et 222-20-1 sont supprimés ;
2° Après le chapitre Ier bis du titre II du livre II, il est inséré un chapitre Ier ter ainsi rédigé :
« Chapitre Ier ter
« Des homicides et blessures routiers
« Art. 221-18. – Le fait, pour le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, de causer, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, la mort d’autrui sans intention de la donner constitue un homicide routier puni de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende lorsque :
« 1° Le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement autre que celles mentionnées ci-après ;
« 2° Le conducteur se trouvait en état d’ivresse manifeste, était sous l’empire d’un état alcoolique caractérisé par une concentration d’alcool dans le sang ou dans l’air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le même code destinées à établir l’existence d’un état alcoolique ;
« 3° Il résulte d’une analyse sanguine ou salivaire que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants ou il a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par ledit code destinées à établir s’il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;
« 3° bis Le conducteur a volontairement consommé, de façon détournée ou manifestement excessive, une ou plusieurs substances psychoactives figurant sur une liste dressée dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État ;
« 4° Le conducteur n’était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;
« 5° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 30 kilomètres à l’heure ;
« 6° Le conducteur, sachant qu’il vient de causer ou d’occasionner un accident, ne s’est pas arrêté et a tenté ainsi d’échapper à la responsabilité pénale ou civile qu’il peut encourir ou n’a pas porté secours ou prêté assistance à une personne en danger ;
« 7° Le conducteur a contrevenu aux dispositions du code de la route réglementant l’usage du téléphone portable tenu en main ou le port à l’oreille d’un dispositif susceptible d’émettre du son ;
« 8° Le conducteur a omis d’obtempérer à une sommation de s’arrêter émanant d’un fonctionnaire ou d’un agent chargé de constater les infractions et muni des insignes extérieurs et apparents de sa qualité ;
« 9° Le conducteur a contrevenu à l’article L. 236-1 du code de la route.
« Les peines sont portées à dix ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende lorsque l’homicide routier a été commis avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° à 9° du présent article.
« Art. 221-19. – Le fait, pour le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, de causer à autrui, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, sans intention de nuire, une incapacité totale de travail pendant plus de trois mois, constitue des blessures routières ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à trois mois punies de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende lorsque :
« 1° Le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement autre que celles mentionnées ci-après ;
« 2° Le conducteur se trouvait en état d’ivresse manifeste, était sous l’empire d’un état alcoolique caractérisé par une concentration d’alcool dans le sang ou dans l’air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le même code et destinées à établir l’existence d’un état alcoolique ;
« 3° Il résulte d’une analyse sanguine ou salivaire que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants ou il a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par ledit code destinées à établir s’il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;
« 3° bis Le conducteur a volontairement consommé, de façon détournée ou manifestement excessive, une ou plusieurs substances psychoactives figurant sur une liste dressée dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État ;
« 4° Le conducteur n’était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;
« 5° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 30 kilomètres à l’heure ;
« 6° Le conducteur, sachant qu’il vient de causer ou d’occasionner un accident, ne s’est pas arrêté et a tenté ainsi d’échapper à la responsabilité pénale ou civile qu’il peut encourir ou n’a pas porté secours ou prêté assistance à une personne en danger ;
« 7° Le conducteur a contrevenu aux dispositions du code de la route réglementant l’usage du téléphone portable tenu en main ou le port à l’oreille d’un dispositif susceptible d’émettre du son ;
« 8° Le conducteur a omis d’obtempérer à une sommation de s’arrêter émanant d’un fonctionnaire ou d’un agent chargé de constater les infractions et muni des insignes extérieurs et apparents de sa qualité ;
« 9° Le conducteur a contrevenu à l’article L. 236-1 du code de la route.
« Les peines sont portées à sept ans d’emprisonnement et à 100 000 euros d’amende lorsque les blessures routières ont été commises avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° à 9° du présent article.
« Art. 221-20. – Le fait, pour le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, de causer à autrui, dans les conditions et selon les distinctions prévues à l’article 121-3, sans intention de nuire, une incapacité totale de travail pendant une durée inférieure ou égale à trois mois constitue des blessures routières ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure ou égale à trois mois punies de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende lorsque :
« 1° Le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement autre que celles mentionnées ci-après ;
« 2° Le conducteur se trouvait en état d’ivresse manifeste, était sous l’empire d’un état alcoolique caractérisé par une concentration d’alcool dans le sang ou dans l’air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du code de la route ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le même code destinées à établir l’existence d’un état alcoolique ;
« 3° Il résulte d’une analyse sanguine ou salivaire que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants ou il a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par ledit code destinées à établir s’il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;
« 3° bis Le conducteur a volontairement consommé, de façon détournée ou manifestement excessive, une ou plusieurs substances psychoactives figurant sur une liste dressée dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État ;
« 4° Le conducteur n’était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;
« 5° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 30 kilomètres à l’heure ;
« 6° Le conducteur, sachant qu’il vient de causer ou d’occasionner un accident, ne s’est pas arrêté et a tenté ainsi d’échapper à la responsabilité pénale ou civile qu’il peut encourir ou n’a pas porté secours ou prêté assistance à une personne en danger ;
« 7° Le conducteur a contrevenu aux dispositions du code de la route réglementant l’usage du téléphone portable tenu en main ou le port à l’oreille d’un dispositif susceptible d’émettre du son ;
« 8° (Supprimé)
« 9° Le conducteur a contrevenu à l’article L. 236-1 du code de la route.
« Les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende lorsque les blessures routières ont été commises avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° à 9° du présent article.
« Art. 221-21. – I. – Les personnes physiques coupables des délits prévus au présent chapitre encourent également les peines complémentaires suivantes :
« 1° L’interdiction, suivant les modalités prévues à l’article 131-27, d’exercer une fonction publique ou d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise ;
« 2° La suspension, pour une durée de dix ans au plus, du permis de conduire ;
« 3° L’annulation du permis de conduire, avec l’interdiction de solliciter la délivrance d’un nouveau permis pendant dix ans au plus ;
« 4° L’interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n’est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
« 5° L’interdiction, pendant une durée de cinq ans au plus, de conduire un véhicule qui ne soit pas équipé par un professionnel agréé ou par construction d’un dispositif d’anti-démarrage par éthylotest électronique, homologué dans les conditions prévues à l’article L. 234-17 du code de la route. Lorsque cette interdiction est prononcée en même temps que la peine d’annulation ou de suspension du permis de conduire, elle s’applique, pour la durée fixée par la juridiction, à l’issue de l’exécution de cette peine ;
« 6° La confiscation du véhicule dont le condamné s’est servi pour commettre l’infraction, s’il en est le propriétaire ou si le propriétaire du véhicule l’a laissé à la disposition du condamné en ayant connaissance du fait que ce dernier :
« a) Se trouvait en état d’ivresse manifeste ;
« b) Avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants ;
« c) Avait volontairement consommé, de façon détournée ou manifestement excessive, une ou plusieurs substances psychoactives figurant sur une liste dressée dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État ;
« d) N’était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou avait vu son permis être annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;
« 7° La confiscation d’un ou de plusieurs véhicules appartenant au condamné ;
« 8° L’immobilisation, pendant une durée d’un an au plus, du véhicule dont le condamné s’est servi pour commettre l’infraction, s’il en est le propriétaire ou si le véhicule a été laissé à sa libre disposition dans les conditions prévues au 6° du présent I ;
« 9° L’interdiction de détenir ou de porter, pour une durée de cinq ans au plus, une arme soumise à autorisation ;
« 10° La confiscation d’une ou de plusieurs armes dont le condamné est propriétaire ou dont il a la libre disposition ;
« 11° Le retrait du permis de chasser, avec l’interdiction de solliciter la délivrance d’un nouveau permis pendant cinq ans au plus ;
« 12° à 14° (Supprimés)
« 15° La peine complémentaire d’affichage ou de diffusion de la décision prévue à l’article 131-35.
« I bis. – Toute condamnation pour les délits prévus aux articles 221-18 et 221-19 donne lieu de plein droit à l’annulation du permis de conduire, avec l’interdiction de solliciter un nouveau permis pendant une durée comprise entre cinq et dix ans. En cas de récidive, la durée de l’interdiction est portée de plein droit à dix ans et le tribunal peut, par décision spécialement motivée, prévoir que cette interdiction est définitive.
« II. – Le prononcé des peines complémentaires suivantes est obligatoire :
« 1° (Supprimé)
« 2° Dans les cas prévus au 4° et au dernier alinéa des articles 221-18, 221-19 et 221-20, les peines complémentaires prévues aux 6° et 7° du I du présent article ;
« 3° Dans les cas prévus au 2° des articles 221-18, 221-19 et 221-20, la peine complémentaire prévue au 5° du I du présent article ;
« 4° Dans les cas prévus aux 2° , 3° et 5° des articles 221-18, 221-19 et 221-20, en cas de récidive ou si la personne a déjà été définitivement condamnée pour un des délits prévus aux articles L. 221-2, L. 224-16, L. 234-1, L. 234-8, L. 235-1, L. 235-3 ou L. 413-1 du code de la route ou pour la contravention mentionnée au même article L. 413-1, les peines complémentaires prévues aux 6° et 7° du I du présent article.
« Toutefois, la juridiction peut, par une décision spécialement motivée, décider de ne pas prononcer ces peines, en considération des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur. »
La parole est à M. Michel Masset, pour présenter l’amendement n° 3 rectifié.
M. Michel Masset. Défendu !
M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet, pour présenter l’amendement n° 32 rectifié.
Mme Nadège Havet. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Szpiner, rapporteur. Nous sommes, selon moi, face à un problème de lecture et de compréhension. Je rappelle que, de manière générale, l’homicide involontaire est puni par le code pénal de trois ans d’emprisonnement ; pour ce qui concerne les accidents de la route, cette peine est portée à cinq ans. Depuis longtemps, le code pénal opère donc une distinction entre l’homicide involontaire considéré à titre général et celui qui a lieu sur la route.
Pour des raisons d’unité et de cohérence, la commission est défavorable à ces trois amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement est favorable au rétablissement de l’article 1er dans sa version adoptée par l’Assemblée nationale.
Madame de La Gontrie, j’entends votre volonté de simplifier : cet article est devenu une véritable usine à gaz…
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Absolument !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Plusieurs orateurs ont évoqué le chagrin des victimes. À l’évidence, personne n’en a le monopole et, en la matière, on ne peut pas faire de catégories. En revanche, il faut distinguer un certain nombre de situations.
Quand une personne est fauchée en traversant une rue en dehors d’un passage piéton, sa famille et ses proches éprouvent un chagrin immense, incommensurable. Mais quand, par le comportement qu’il a adopté avant de prendre le volant de son véhicule, l’auteur de l’homicide s’est placé dans des conditions telles qu’elles devaient aboutir au malheur – je pense notamment à la consommation de produits stupéfiants ou d’alcool –, s’y ajoute un terrible sentiment d’incompréhension.
Dire les choses : voilà ce qui nous anime. Tout le monde connaît la formule de Camus : « Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur de ce monde. »
J’en viens à présent aux peines : cinq, sept ou dix ans d’emprisonnement, ce n’est pas rien. Je rappelle aux férus de la répression que la Cour des comptes…
M. Laurent Somon. Ne soyez pas caricatural !
M. Laurent Somon. Parce que vous me regardez : vous vous tournez vers nous !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Alors, je vais me tourner vers Mme de La Gontrie… (Mme Marie-Pierre de La Gontrie et M. Antoine Lefèvre sourient.)
M. Olivier Rietmann. « Férus de la répression »…
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Monsieur le sénateur, en l’occurrence, je ne vous regardais pas… Souffrez de m’écouter un instant !
Je vous l’avoue, je suis un peu fatigué d’entendre dénoncer le prétendu laxisme de la justice. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Je ne vous demande pas de lire mes propres écrits, qui peuvent vous sembler suspects – je l’entends. Je vous renvoie aux conclusions de la Cour des comptes, lesquelles insistent sur la surpopulation carcérale et sur la sévérité accrue de la justice de notre pays : ces considérations méritent à tout le moins réflexion.
En l’occurrence, on n’est pas dans le duel politicien ou dans la polémique. Tous les chiffres le démontrent : en correctionnelle comme aux assises, où les juges ne sont autres que nos compatriotes, la justice est de plus en plus sévère. C’est une réalité statistique.
Bien sûr, le Sénat est une assemblée sage,…
M. Antoine Lefèvre. Eh oui !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. … mais, vous le savez très bien, l’extrême droite se nourrit perpétuellement de ces discours. Elle en fait même son miel. Dès lors, vous comprendrez ma lassitude, d’autant que les associations ne demandent pas d’aggravation des peines : elles veulent que l’on dise les choses comme elles sont. Faisons-le !
Les peines planchers appellent un grand débat d’idées. Elles méritent mieux qu’un amendement discuté à vingt-deux heures quarante-cinq… Pour ma part, j’estime qu’elles ne sont pas efficaces. Vous avez le droit de penser le contraire : les avis peuvent diverger, c’est le propre de la démocratie.
Quoi qu’il en soit, en toute rigueur, un juge ne devrait pas pouvoir déroger à de vraies peines planchers ; c’est bien pourquoi elles sont inconstitutionnelles. Le juge n’est donc pas tenu d’appliquer ce que vous appelez des peines planchers, et vous le savez bien.
Ce dispositif est constitutionnel. Il a d’ailleurs été mis en œuvre ; vous le savez également, il n’a pas été efficace. Franchement, se verrait-on appliquer des peines planchers pour une infraction au code pénal, dans ces conditions-là ?
Mesdames, messieurs les membres de la majorité sénatoriale, c’est à vous que je m’adresse : ces dispositions constituent un marqueur politique extrêmement fort, qui plus est sur un texte qui se veut consensuel. Il s’agit d’abord de répondre au chagrin des familles. Peut-on vraiment faire de la « poloche » là-dessus ? Je vous pose la question.
L’impératif m’est défendu en ces lieux et vous voterez bien sûr ce que vous voudrez, en votre âme et conscience. Mais j’estime que ce débat vaut mieux.
Je n’aime pas les peines planchers, je l’ai toujours dit ; cela étant, je ne suis pas venu ici faire de l’idéologie ou du dogmatisme. Je dis simplement que le chagrin de ces personnes mérite des discussions d’une autre portée.
« Victoire, on a rétabli quelques peines planchers dans le code pénal ! » Avec de tels buts, le débat s’enlise, voire s’enterre. Je le répète, ce texte a été considéré comme consensuel et même transpartisan à l’Assemblée nationale, où siègent aussi des élus Les Républicains, que je sache… Nous ne sommes pas face à un clivage entre gauche et droite : un délit est mal qualifié, et nous devons nous efforcer de corriger les textes, tous ensemble.
J’en reviens à l’amendement n° 39, présenté par Mme de La Gontrie dans un esprit de clarification. Étant donné que je souhaite le rétablissement de l’article 1er dans la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale, je ne puis qu’émettre un avis défavorable, même si cette version vaut mieux que le texte de la commission.
Par cohérence, je suis favorable aux amendements identiques nos 3 rectifié et 32 rectifié, qui visent précisément à rétablir le texte de l’Assemblée nationale.
M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour explication de vote.
M. Laurent Somon. Monsieur le garde des sceaux, le 17 juillet dernier, à l’issue du comité interministériel de la sécurité routière, Mme Élisabeth Borne déclarait : « Nous allons créer une qualification spécifique d’homicide routier. Tout conducteur qui tue une personne sur la route et serait poursuivi aujourd’hui pour homicide involontaire sera poursuivi demain pour homicide routier. Cette dénomination s’appliquera, que le conducteur ait consommé ou non de l’alcool ou des stupéfiants. »
M. Francis Szpiner, rapporteur. Voilà !
M. Laurent Somon. C’est ce qu’expliquait la cheffe du Gouvernement lors d’un point presse.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Mais, depuis, il y a eu les débats de l’Assemblée nationale !
M. Laurent Somon. Monsieur le garde des sceaux, sur ce sujet, il n’y a pas de totem ; nous ne sommes pas mus par une volonté de répression.
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Je m’exprimais sur les peines planchers, pas sur le reste…
M. Laurent Somon. Vous m’avez tout de même interpellé sur ce sujet et je me dois donc d’y revenir : il ne s’agit pas de faire de l’incarcération l’alpha et l’oméga de la sanction. Je l’ai dit à la tribune : il faut surtout que la sanction soit comprise. Le coupable doit mesurer les dégâts, les blessures qu’il a infligés à d’innocentes victimes et à leur famille.
Or, en l’état actuel du droit, une personne qui a tué sur la route après avoir consommé de l’alcool ou de la drogue peut, dès sa condamnation, rentrer chez lui grâce à un aménagement de peine. Dans le cas que j’ai cité, il ne subit pas la moindre privation de liberté ; il est en outre dispensé de toute amende. Le soir qui suit le jugement, il retrouve ses enfants ; il s’installe avec eux sur son canapé pour regarder la télévision. Pensons un instant à ce que vit au même moment la famille endeuillée…
Dans ces conditions, comment le coupable peut-il mesurer les conséquences matérielles et surtout humaines de ses actes ? (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Mes chers collègues, je ne vous étonnerai pas en vous disant que les membres du groupe socialiste voteront l’amendement n° 39. S’il n’est pas adopté, nous voterons les amendements identiques nos 3 rectifié et 32 rectifié, même si leur rédaction est à nos yeux moins satisfaisante.
Je tiens aussi à relever un désaccord entre M. le rapporteur et nous, sans doute plus significatif qu’il n’y paraît.
Tous les deuils se valent, mais tous les actes répréhensibles ne se valent pas…
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. On ne peut pas considérer que quelqu’un qui, au volant de son véhicule, tue involontairement a le même degré de responsabilité et, partant, encourt le même degré de sanction que quelqu’un dont l’acte présente des circonstances aggravantes.
M. Olivier Rietmann. Mais c’est bien ce que dit M. Somon !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Monsieur le rapporteur, tous les responsables n’ont pas le même degré de culpabilité. Voilà pourquoi notre amendement tend à distinguer les homicides routiers avec circonstances aggravantes des homicides involontaires.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 3 rectifié et 32 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 33 rectifié, présenté par M. Somon, Mmes Borchio Fontimp et Estrosi Sassone, MM. Mandelli, Bazin et Burgoa, Mme Belrhiti, MM. Paccaud et Khalifé, Mme Muller-Bronn, M. Reynaud, Mme Lassarade, M. Genet, Mme Gruny, MM. Belin, J. M. Boyer, Sido et Pernot, Mmes Deseyne, Lopez, Dumont et Imbert, MM. Karoutchi, Savin et Saury et Mme Josende, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 18
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. 221-6-1-…. - Par dérogation à l’article 132-25 du présent code et aux articles 723-1, 723-15 et 747-1 du code de procédure pénale, une peine d’emprisonnement prononcée en application des articles 221-6-1-1 ou 221-6-1-2 ne peut être exécutée pendant tout ou partie des six premiers mois sous le régime de la détention à domicile sous surveillance électronique, de la semi-liberté ou du placement à l’extérieur que si la personne condamnée était mineure au moment des faits. » ;
La parole est à M. Laurent Somon.
M. Laurent Somon. Ces dispositions sont issues de la proposition de loi que j’ai déposée avec Alexandra Borchio Fontimp, Jean Sol et de nombreux autres collègues, membres en particulier du groupe Union Centriste.
Lorsqu’un accident de la route a provoqué la mort d’autrui, nous proposons d’introduire une exception au principe énoncé à l’article 132-25 du code pénal, selon lequel les peines d’emprisonnement d’une durée inférieure ou égale à six mois font l’objet en principe d’un aménagement ab initio, prenant la forme d’une détention à domicile sous surveillance électronique, d’un placement à l’extérieur ou d’une semi-liberté.
Pour que la peine soit réellement compréhensible et plus dissuasive, l’auteur d’un accident mortel doit passer au moins six mois en prison ou, en tout cas, dans un lieu de privation de liberté ; il pourrait en sortir pour travailler dans la journée, pour y revenir le soir au plus tôt. On ne peut pas faire comme si rien ne s’était passé, qui plus est en cas de circonstances aggravantes.
En ce sens, notre amendement vise à tirer les conséquences de la création de l’homicide routier, nouvelle qualification des homicides involontaires résultant d’un accident de la route en présence de certaines circonstances aggravantes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Szpiner, rapporteur. Mon cher collègue, dès lors que la commission a introduit la notion de peine plancher – je sais que ce point est largement contesté –, votre amendement me semble satisfait : j’en sollicite donc le retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. J’ai déjà exprimé mon opinion sur un tel refus de tout aménagement de peine.
Monsieur le sénateur, j’ai entendu ce que vous disiez à propos du chagrin des familles, mais le code pénal, pardonnez-moi de vous le dire ainsi, ce n’est pas que cela.
Vous risquez de transformer un texte consensuel en texte d’exception : non seulement vous réintroduisez les peines planchers, mais vous souhaitez proscrire tout aménagement de peine. Or les aménagements sont faits pour tous ceux qui ont été condamnés et sont laissés à l’appréciation du magistrat.
C’est moi – je vous le rappelle – qui ai supprimé les réductions de peine automatiques : ces mesures viennent désormais récompenser des efforts de réinsertion ou de bons comportements en détention.
Votre majorité avait permis, en son temps, un aménagement de peine à partir de deux ans de prison ferme. Pour ma part, j’ai réduit cette durée à un an.
Pour ce qui est de la sévérité, je me suis montré très clair et j’assume totalement les propos que j’ai tenus. Cela étant dit, à mon sens, on ne peut instaurer un dispositif à ce point dérogatoire.
Je suis donc évidemment défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Mon cher collègue, j’ai relu avec attention le dispositif de votre amendement, n’étant pas sûre de l’avoir bien compris. Vous parlez de la nécessité d’une privation de liberté tout en évoquant la détention à domicile ou encore la semi-liberté : j’y vois comme une contradiction.
En outre, vous ne prévoyez cette possibilité que si le coupable est un mineur ; c’est en tout cas ce que je lis : la peine « ne peut être exécutée » sous ces régimes « que si la personne condamnée était mineure au moment des faits ».
M. Olivier Rietmann. Il s’agit de semi-liberté !
M. Laurent Somon. Je retire mon amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 33 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 17, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 18
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cadre des procédures engagées sur les fondements de la qualification d’homicide routier, les parties civiles sont informées des actes de procédure, notamment lorsque la personne condamnée a interjeté appel ou lorsqu’elle s’est pourvue en cassation. » ;
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Cet amendement, déposé à la suite de demandes adressées par des associations de familles de victimes, vise tout simplement à améliorer l’information des parties civiles dans le cadre des procédures engagées sur les fondements de la nouvelle qualification d’homicide routier.
M. le président. L’amendement n° 27, présenté par Mmes Silvani et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 80
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …. – Dans le cadre des procédures engagées sur les fondements de la qualification d’homicide routier, les parties civiles sont informées des actes de procédure, notamment lorsque la personne condamnée a interjeté appel ou lorsqu’elle s’est pourvue en cassation. » ;
II. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« …. – Dans le cadre des procédures engagées sur les fondements de la qualification de blessures routières par mise en danger, les parties civiles sont informées des actes de procédure, notamment lorsque la personne condamnée a interjeté appel ou lorsqu’elle s’est pourvue en cassation. »
La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. Cet amendement vise à imposer une meilleure information des parties civiles dans le cadre des procédures relatives aux délits routiers.
Les parties civiles doivent être systématiquement informées des appels formés et des pourvois en cassation. Il est primordial de garantir leur prise de parole, que seule cette bonne information est à même d’assurer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Szpiner, rapporteur. L’information des victimes est évidemment nécessaire ; mais, dès lors que l’on se constitue partie civile, on est censé être assisté d’un avocat, et c’est le rôle de celui-ci de tenir son client informé du déroulement de la procédure. En général, le juge d’instruction notifie les différents éléments aux parties tout au long de l’information judiciaire.
En conséquence, la commission est défavorable aux amendements nos 17 et 27.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Nous sommes ici au cœur des contradictions de M. le rapporteur.
Nous parlons beaucoup des victimes, mais concrètement que fait-on pour elles ? En l’occurrence, ces amendements visent à garantir qu’elles seront tenues informées de la procédure. Beaucoup d’entre elles déclarent qu’elles ne sont mises au courant de rien après avoir porté plainte.
Ces dispositions sont les bienvenues : je le dis d’autant plus objectivement qu’elles n’émanent pas du groupe socialiste.
Par ailleurs, l’argument du rapporteur, repris par le garde des sceaux, me semble tout de même très étrange. À ce que je sache, une partie civile n’a pas l’obligation d’être représentée par un avocat en matière délictuelle – en matière criminelle, les choses sont un peu différentes –, d’autant que cela coûte de l’argent. D’où tirez-vous que les parties civiles dans un procès de ce type sont nécessairement représentées par un avocat ? Ce n’est pas vrai !
En outre, pensez-vous réellement qu’un avocat passe son temps à consulter le dossier pour vérifier si, par hasard, il n’y trouverait pas un nouvel acte de procédure ? C’est une plaisanterie !
Tout à l’heure, le rapporteur a affirmé que certaines de ses propositions – les peines planchers, en l’occurrence – risqueraient d’alourdir le travail des magistrats, mais que le jeu en valait la chandelle. Il ne peut donc pas nous opposer ici un tel argument.
Je le redis, il est essentiel que les victimes puissent être informées : cet amendement nous offre justement une bonne occasion de nous en assurer.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Szpiner, rapporteur. Certes, la représentation par un avocat n’est pas obligatoire en matière délictuelle. Mais il reste tout de même le juge, qui envoie dans de telles circonstances aux victimes un avis de fin d’information, ou tout autre élément pertinent. Je ne vois pas comment le dispositif ici proposé pourrait se traduire concrètement. Peut-être, mes chers collègues, pourriez-vous nous soumettre une rédaction appropriée et nous expliquer comment vous envisagez de mettre tout cela en œuvre.
À défaut d’une telle explication, je réitère mon avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. En conséquence, l’amendement n° 27 n’a plus d’objet.
L’amendement n° 40, présenté par M. Szpiner, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 26
Rédiger ainsi cet alinéa :
b) L’article 222-19-1 est abrogé.
II. – Alinéa 34
Remplacer la référence :
222-19
par la référence :
222-20
III. – Alinéa 35
Remplacer la référence :
222-19
par la référence :
222-20-1
IV. – Alinéas 79 et 103
Supprimer les mots :
ou pour la contravention mentionnée au même article L. 413-1
La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Szpiner, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Il est défavorable, mais simplement par cohérence ! (Sourires.)
M. le président. L’amendement n° 28, présenté par Mmes Silvani et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 80
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …. – Lorsqu’une condamnation est prononcée sur le fondement de la qualification d’homicide routier, l’autorité judiciaire veille à l’information et à la garantie des droits des victimes au cours de la procédure pénale, y compris au cours de l’exécution des peines. » ;
II. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« …. – Lorsqu’une condamnation est prononcée sur le fondement de la qualification de blessures routières par mise en danger, l’autorité judiciaire veille à l’information et à la garantie des droits des victimes au cours de la procédure pénale, y compris au cours de l’exécution des peines. »
La parole est à Mme Marianne Margaté.
Mme Marianne Margaté. Cet amendement, comme les précédents, a trait à l’information des parties civiles. Plus précisément, il vise à ce que l’autorité judiciaire veille à l’information et à la garantie des droits des victimes au cours de la procédure pénale, y compris au cours de l’exécution des peines.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Szpiner, rapporteur. Par cohérence avec l’avis que j’ai rendu sur les amendements nos 17 et 27, je suis défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 26, présenté par Mmes Silvani et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 80
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …. – Lorsque la qualification d’homicide routier est retenue, l’audience de jugement a lieu dans un délai compris entre douze et dix-huit mois suivant l’engagement des poursuites sur ce fondement. » ;
II. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« …. – Lorsque la qualification de blessure routière par mise en danger est retenue, l’audience de jugement a lieu dans un délai compris entre douze et dix-huit mois suivant l’engagement des poursuites sur ce fondement. »
La parole est à Mme Silvana Silvani.
Mme Silvana Silvani. Cet amendement a pour objet de prévoir un délai d’audiencement compris entre douze et dix-huit mois lorsque des poursuites sont engagées sur la base des infractions visées par la présente proposition de loi.
Les délais sont souvent trop longs entre la commission des faits et le jugement ; c’est intolérable pour les victimes et leurs proches. Par ailleurs, avec de tels délais, le sens de la peine tend à disparaître. D’où notre proposition de les réduire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Szpiner, rapporteur. Un délai dont l’irrespect ne peut faire l’objet de sanctions n’a aucun sens. De surcroît, sa durée, comprise entre douze et dix-huit mois, risque de retarder les procédures.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.
(L’article 1er est adopté.)
Après l’article 1er
M. le président. Les amendements nos 24 rectifié et 1 ne sont pas soutenus.
L’amendement n° 2 rectifié, présenté par M. Wattebled, Mme Lermytte, M. A. Marc, Mme L. Darcos, MM. Chasseing, Grand et Brault, Mme Bourcier, M. Houpert, Mme Romagny, MM. Folliot et Maurey et Mmes F. Gerbaud, Nédélec, Saint-Pé et Jacquemet, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de la justice pénale des mineurs est complété par un article L. 121-… ainsi rédigé :
« Art. L. 121-…. – Il n’est pas fait application des règles d’atténuation des peines mentionnées aux articles L. 121-5 et L. 121-6 lorsqu’un mineur âgé de plus de dix-sept ans est poursuivi pour une infraction prévue aux articles 221-6-1-1, 221-6-1-2, 222-20, 222-20-1 et 221-20-6 du code pénal. »
La parole est à Mme Corinne Bourcier.
Mme Corinne Bourcier. Par un décret en date du 20 décembre 2023, le Gouvernement a souhaité abaisser à 17 ans l’âge à partir duquel il sera possible de passer le permis de conduire. Cette mesure, mise en œuvre par voie réglementaire, modifie l’article R. 221-5 du code de la route, qui dispose que les personnes qui souhaitent obtenir le permis B doivent être âgées d’au moins 18 ans.
S’il est maintenant possible d’obtenir le permis de conduire plus jeune, il convient d’assumer toutes les responsabilités qui peuvent en découler. Aussi convient-il, dans cette proposition de loi, d’abaisser l’âge de la majorité pénale pour les violences routières, afin que ces jeunes conducteurs soient punis comme les adultes.
À cette fin, le présent amendement vise à créer une exception à l’excuse de minorité pour les délits d’homicide routier et de blessures routières.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Szpiner, rapporteur. Premièrement, le juge a toujours la faculté d’écarter l’excuse de minorité, comme il peut d’ailleurs écarter les peines planchers…
Deuxièmement, je ne vois pas comment nous pourrions abaisser la majorité pénale pour les infractions routières, et pas pour d’autres.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. L’argument marche aussi contre les peines planchers !
M. Francis Szpiner, rapporteur. En conséquence, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Le parallèle que vous faites entre l’excuse de minorité et les peines planchers est audacieux, monsieur le rapporteur – ce soir, vous avez toutes les audaces ! (Sourires.)
M. Francis Szpiner, rapporteur. La flatterie n’arrangera rien ! (Nouveaux sourires.)
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Plus sérieusement, je veux rappeler que, par une décision du Conseil constitutionnel du 29 août 2002, l’atténuation de la responsabilité pénale des mineurs a été mise au rang des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ; on ne saurait y déroger pour une catégorie particulière d’infractions, au risque de porter atteinte au principe d’égalité.
Le Gouvernement est donc totalement défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Nous ne sommes pas favorables à cet amendement, car il repose sur une confusion des concepts.
La majorité est une chose, le droit de passer l’examen du permis de conduire en est une autre. Je rappelle que ce texte a vocation à s’appliquer à tous les accidents impliquant un véhicule terrestre à moteur, y compris les motos et les scooters. Or il est possible de passer son permis de conduire pour les motos à partir de 16 ans. On voit bien que le dispositif ne fonctionne pas !
De deux choses l’une : soit on maintient la majorité pénale à 18 ans pour les infractions routières, soit on va bien plus loin encore ! Mais ce qui nous est proposé n’a pas de sens : il n’est pas possible d’objectiver le choix de fixer la majorité pénale à 17 ans en la matière, car ce n’est pas adapté aux infractions visées par le présent texte.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 5 rectifié bis, présenté par Mme Borchio Fontimp, MM. Somon et Sol, Mme Demas, M. Tabarot, Mme Garnier, M. Genet, Mme Pluchet, M. Brisson, Mme Aeschlimann, MM. Bacci, Bazin et Belin, Mmes Belrhiti et Berthet, MM. J.B. Blanc, Bruyen et Burgoa, Mme Chain-Larché, M. Chaize, Mmes Dumont, Evren, Gosselin, Imbert et Josende, M. Laménie, Mme Lopez, M. Milon, Mme Noël, MM. Pellevat, Rapin, Reynaud, Saury, Savin et Sido, Mmes Valente Le Hir et Billon, M. Courtial, Mme Jacquemet et M. Laugier, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Après l’article 79, il est inséré un article 79-1 ainsi rédigé :
« Art. 79-1. – L’instruction préparatoire est obligatoire pour les délits d’homicide routier et de blessures routières mentionnés aux articles 221-18 à 221-20 du code pénal lorsque les faits ont entraîné la mort d’autrui ou une incapacité totale de travail supérieure à trois mois. » ;
2° L’article 180 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les infractions mentionnées à l’article 79-1 font l’objet d’une audience sur le fond avant l’expiration d’un délai de six mois à compter de la date soit de l’ordonnance de renvoi soit, en cas d’appel, de l’arrêt de renvoi non frappé de pourvoi, de l’arrêt déclarant l’appel irrecevable, de l’ordonnance de non-admission rendue en application du dernier alinéa de l’article 186 ou de l’arrêt de la chambre criminelle rejetant le pourvoi.
« Toutefois, si l’audience sur le fond ne peut se tenir avant l’expiration de ce délai, le procureur de la République en informe les parties en mentionnant les raisons de fait ou de droit faisant obstacle au jugement de l’affaire, et précisant la date d’audience retenue. »
La parole est à Mme Alexandra Borchio Fontimp.
Mme Alexandra Borchio Fontimp. « La patience, c’est notre grande vertu, c’est notre drame aussi. Un jour nous ne serons plus patients. » Ces paroles de Léo Ferré sont en parfait accord avec les demandes exprimées par les parties civiles. En effet, comment être patient face à l’horreur ? Comment attendre plusieurs années avant que justice ne soit rendue à celui qui a été tué ?
Bien entendu, la justice doit faire son travail ; cela demande du temps, d’autant que la liberté et l’honneur d’une personne sont en jeu. Toutefois, à ce jour, les délais d’audiencement dépassent l’entendement et sont tout bonnement inacceptables.
Sans mettre en cause le travail des magistrats, dont nous savons l’attachement à soulager la douleur des familles et des proches des victimes, ces années d’attente épuisent. Pire, elles font naître ou renforcent la méfiance envers l’institution judiciaire.
Vous l’aurez compris, cet amendement vise à raccourcir ces délais dans le seul objectif d’assurer une réponse pénale plus rapide aux délits routiers.
M. le président. Les amendements nos 19 rectifié et 20 rectifié ne sont pas soutenus.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 5 rectifié bis ?
M. Francis Szpiner, rapporteur. Je comprends tout à fait votre demande, ma chère collègue, mais l’adoption de cet amendement conduirait à priver les victimes de la possibilité d’une enquête préliminaire, qui trouve parfois une conclusion beaucoup plus rapide que l’instruction préparatoire.
C’est pourquoi je vous invite à le retirer ; à défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Parfois, les affaires sont résolues grâce à une enquête préliminaire. Pour le coup, votre proposition aurait pour effet d’allonger artificiellement le délai de jugement, que vous souhaitez à l’inverse réduire ; cela ne serait pas compris par les victimes ou leur famille. Quand on peut faire court, il faut faire court !
Par ailleurs, si l’instruction, obligatoire en matière criminelle, est facultative en matière délictuelle, il n’en reste pas moins que, dans tous les dossiers complexes, le procureur requiert l’ouverture d’une information judiciaire.
En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Madame Borchio Fontimp, l’amendement n° 5 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 5 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 6 rectifié bis, présenté par Mme Borchio Fontimp, MM. Somon et Sol, Mme Demas, M. Tabarot, Mme Garnier, M. Genet, Mme Pluchet, M. Brisson, Mme Aeschlimann, MM. Bacci, Bazin et Belin, Mme Belrhiti, MM. J.B. Blanc, Bruyen et Burgoa, Mme Chain-Larché, M. Chaize, Mmes Dumont, Evren, Gosselin, Imbert et Josende, M. Laménie, Mme Lopez, M. Milon, Mme Noël, MM. Pellevat, Rapin, Reynaud, Saury, Savin et Sido, Mmes Valente Le Hir et Billon, MM. Courtial et Folliot, Mme Jacquemet, M. Laugier et Mme Romagny, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa de l’article 502 est complété par une phrase ainsi rédigée : « En l’absence d’appel sur l’action civile, la partie civile est avisée par le parquet de la déclaration d’appel portant sur l’action publique. » ;
2° L’article 512 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Même en l’absence d’appel sur les intérêts civils, la partie civile est avisée par le parquet de la date de l’audience. Lorsque la partie civile ne comprend pas la langue française, elle a droit, à sa demande, à une traduction de l’avis d’audience. À titre exceptionnel, il peut en être effectué une traduction orale ou un résumé oral. » ;
3° Le dernier alinéa de l’article 513 est complété par une phrase ainsi rédigée : « La partie civile peut demander à prendre la parole même en l’absence d’appel sur les intérêts civils. »
La parole est à Mme Alexandra Borchio Fontimp.
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Prévention, répression et accompagnement : voilà les maîtres mots qui doivent guider nos débats de ce soir. J’évoquerai la prévention dans quelques instants et nous aurons certainement de nombreux échanges sur la répression au cours de cette séance, mais l’accompagnement ne peut et ne doit pas être le parent pauvre de ce texte, parce qu’accompagner les parties civiles, c’est les aider à reprendre confiance en la justice ; c’est aussi rendre toutes ses lettres de noblesse à l’institution judiciaire.
Je défends donc un amendement de bon sens, une mesure très attendue par les familles des victimes. Nous proposons que, en l’absence d’appel sur l’action civile, la partie civile soit avisée par le parquet de la déclaration d’appel portant sur l’action publique. Les victimes ou leurs proches pourront ainsi demander à prendre la parole, même en l’absence d’appel sur les intérêts civils.
Accompagner les parties civiles, c’est leur offrir de la transparence, mais aussi l’occasion de s’exprimer, pour mieux faire leur deuil.
Cet amendement tend donc à imposer que les parties civiles soient informées de la date d’audience, notamment celle de l’appel.
M. le président. Les amendements nos 21 rectifié et 22 rectifié ne sont pas soutenus.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 6 rectifié bis ?
M. Francis Szpiner, rapporteur. Je comprends tout à fait la motivation qui sous-tend cet amendement, ma chère collègue. En conséquence, je m’en remets à la sagesse de notre assemblée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Je comprends, moi aussi, cet amendement. Vous souhaitez, madame la sénatrice, que les parties civiles soient informées : c’est bien la moindre des choses ! Toutefois, les dispositions des articles 512 et 391 du code de procédure pénale, prises ensemble, imposent au parquet d’aviser toute personne ayant porté plainte de la date de l’audience.
Votre amendement étant ainsi satisfait, je vous demande de bien vouloir le retirer ; à défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Francis Szpiner, rapporteur. Je ne suis pas tout à fait d’accord avec ce que vient de dire le garde des sceaux. L’avis d’audience est communiqué aux parties. Or, lorsqu’il n’y a pas appel sur les intérêts civils, les parties civiles ne sont plus parties en cause d’appel. (M. le garde des sceaux s’exclame.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Absolument !
M. Francis Szpiner, rapporteur. Dès lors, il est essentiel d’informer la partie civile de la déclaration d’appel portant sur l’action publique. Certes, elle n’est plus partie au procès, mais elle a sans doute intérêt à savoir où en est la procédure.
Voilà pourquoi j’ai émis un avis de sagesse.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 1er.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 7 rectifié bis, présenté par Mme Borchio Fontimp, MM. Somon et Sol, Mme Demas, M. Tabarot, Mme Garnier, M. Genet, Mme Pluchet, M. Brisson, Mme Aeschlimann, MM. Bacci, Bazin et Belin, Mmes Belrhiti et Berthet, MM. J.B. Blanc et Burgoa, Mme Chain-Larché, M. Chaize, Mmes Dumont, Evren, Gosselin, Imbert et Josende, M. Laménie, Mme Lopez, M. Milon, Mme Noël, MM. Pellevat, Rapin, Reynaud, Saury, Savin et Sido, Mmes Valente Le Hir et Billon, MM. Courtial et Folliot, Mme Jacquemet, M. Laugier et Mme Romagny, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 712-16-3 du code de procédure pénale, il est inséré un article 712-16-… ainsi rédigé :
« Art. 712-16-…. – Sans préjudice des dispositions de l’article 712-16-2, lorsqu’une personne a été condamnée à une peine privative de liberté, et si la victime ou la partie civile en a formé la demande, le juge de l’application des peines ou le service pénitentiaire d’insertion et de probation informe cette dernière, directement ou par l’intermédiaire de son avocat, des modalités d’exécution de la peine. »
La parole est à Mme Alexandra Borchio Fontimp.
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Dans la continuité de mes deux amendements précédents, qui visaient déjà à assurer une meilleure prise en charge des victimes, celui-ci a pour objet d’informer la victime ou la partie civile des modalités d’exécution de la peine de l’auteur condamné, dès lors qu’elle en a formulé la demande.
Bien que le droit soit la clé de voûte d’une société pleinement respectueuse des droits et libertés de chacun, beaucoup de nos concitoyens ne comprennent pas qu’une telle mesure n’existe pas. Il est tout à fait incompréhensible que les victimes et leurs proches ne soient pas tenus au courant de ces modalités, tant les conséquences sur leur vie de l’acte de la personne condamnée ont été importantes et, malheureusement, très souvent désastreuses.
Initialement, nous souhaitions limiter cette possibilité aux violences routières puisque ce texte porte sur ce seul sujet, mais, d’un point de vue juridique et humain, nous avons jugé impossible de hiérarchiser la douleur des victimes. Qui plus est, cela aurait fait naître une inégalité de traitement difficile à justifier.
Dès lors, l’application de la mesure proposée ne serait pas circonscrite aux violences routières, mais s’étendrait à toutes les victimes et parties civiles.
M. le président. L’amendement n° 23 rectifié n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 7 rectifié bis ?
M. Francis Szpiner, rapporteur. Sauf erreur de ma part, les dispositions de la loi du 15 août 2014 relative à l’individualisation des peines et renforçant l’efficacité des sanctions pénales sont de nature à satisfaire cet amendement.
Je vous invite donc à le retirer, ma chère collègue, faute de quoi l’avis de la commission serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Borchio Fontimp, l’amendement n° 7 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 7 rectifié bis est retiré.
Article 1er bis
(Non modifié)
Le début de la première phrase du second alinéa de l’article 132-16-2 du code pénal est ainsi rédigé : « Les délits prévus aux articles L. 221-2, L. 223-5, L. 224-16, L. 224-17, L. 233-1, L. 233-1-1, L. 234-1, L. 234-8, L. 234-16, L. 235-1, L. 235-3 et L. 413-1 du code de la route ainsi qu’à l’article 434-41 du présent code sont… (le reste sans changement). – (Adopté.)
Article 1er ter A (nouveau)
L’article 132-19-1 du code pénal est ainsi rétabli :
« Art. 132-19-1. – Pour le délit prévu à l’article 221-6-1-1, la peine d’emprisonnement ne peut être inférieure à deux ans.
« Toutefois, la juridiction peut prononcer, par une décision spécialement motivée, hors cas de récidive légale, une peine inférieure à ces seuils ou une peine autre que l’emprisonnement en considération des circonstances de l’infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties d’insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci. »
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 4 rectifié est présenté par M. Masset, Mmes M. Carrère et N. Delattre, MM. Bilhac, Cabanel, Daubet et Fialaire, Mme Girardin, M. Gold, Mme Guillotin, MM. Guiol et Laouedj, Mme Pantel et M. Roux.
L’amendement n° 13 est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.
L’amendement n° 18 rectifié bis est présenté par Mme Schillinger, MM. Mohamed Soilihi, Bitz, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Duranton, M. Fouassin, Mme Havet, MM. Haye, Iacovelli, Kulimoetoke, Lévrier, Omar Oili, Patient et Patriat, Mme Phinera-Horth et MM. Rambaud, Rohfritsch et Théophile.
L’amendement n° 29 est présenté par Mmes Silvani et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
L’amendement n° 38 rectifié est présenté par Mme de La Gontrie, MM. Durain, Bourgi et Chaillou, Mme Harribey, M. Kerrouche, Mmes Linkenheld et Narassiguin, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Michel Masset, pour présenter l’amendement n° 4 rectifié.
M. Michel Masset. Cet amendement vise à supprimer l’article 1er ter A instaurant des peines planchers pour les homicides routiers. Les peines planchers contournent les protections constitutionnelles et constituent une incohérence juridique et pénale.
En premier lieu, elles contreviennent fondamentalement à l’individualisation de la peine, principe à valeur constitutionnelle de notre droit pénal. C’est précisément la raison pour laquelle les professionnels du droit s’étaient levés en masse contre les peines planchers lors de leur introduction en 2007, et ce jusqu’à leur éviction du droit positif en 2014.
Le présent article prévoit les conditions dans lesquelles le juge peut déroger à l’individualisation des peines, mais il ne s’agit que de conditions formelles. Seront ainsi mises en œuvre des peines planchers de façade, dont les juges ne s’en saisiront peut-être pas.
En second lieu, comme cela a déjà été souligné, les peines planchers sont incohérentes avec notre politique pénale. En l’état actuel du droit, la gradation prévue du régime des peines se révèle non seulement incompatible avec les places disponibles dans nos prisons, mais aussi inefficace.
De fait, l’appréciation souveraine et individualisée des peines par le juge demeure la manière la plus convaincante – si ce n’est la seule – de rendre la justice pénale dans un État de droit.
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l’amendement n° 13.
M. Guy Benarroche. De multiples raisons justifient la suppression de ces peines planchers, introduites dans le texte en commission.
Premièrement, les délinquants de la route seraient tous soumis au même régime de peine, dont le seuil serait établi à deux ans d’emprisonnement, sans que le juge puisse effectuer d’appréciation in concreto. Cela est contraire au principe, désormais de valeur constitutionnelle, de personnalisation et d’individualisation des peines dont découlent les articles 132-1 et suivants du code pénal.
Deuxièmement, comme le garde des sceaux l’a rappelé tout à l’heure, l’efficacité des peines planchers n’a jamais été démontrée : elles n’ont pas d’effet dissuasif sur le passage à l’acte et n’empêchent pas la récidive.
Troisièmement, les peines plancher privent les magistrats de leur capacité de jugement. Elles révèlent ainsi une volonté de contrôler le pouvoir judiciaire par le biais de circulaires adressées au parquet, au mépris des principes d’indépendance de la justice.
Enfin, comme l’a dit notre collègue Marie-Pierre de La Gontrie, il serait totalement incongru de rétablir une peine plancher pour la seule catégorie des délits routiers.
Nous pouvons toujours débattre une nouvelle fois des peines planchers, même si, contrairement à ce qu’a affirmé le garde des sceaux, je pense que cette discussion est close : jusqu’à présent, tout a démontré que les peines planchers n’avaient pas de sens. À la limite, nous aurions pu en discuter à l’occasion d’un autre texte. Mais réintroduire les peines planchers pour les seuls homicides routiers, dans le cadre de cette proposition de loi, me semble tout à fait incongru !
M. le président. La parole est à Mme Nadège Havet, pour présenter l’amendement n° 18 rectifié bis.
Mme Nadège Havet. Mes collègues ayant brillamment exposé les arguments qui le justifient, je considère que mon amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour présenter l’amendement n° 29.
Mme Silvana Silvani. Cet amendement vise, lui aussi, à supprimer l’article 1er ter A, ajouté en commission.
Aucune étude n’a prouvé l’efficacité des peines planchers dans la lutte contre la récidive. Au contraire, leur introduction en 2007 a été un échec en termes de dissuasion. Voici ce que nous apprennent les statistiques du ministère de la justice : en 2005, 2,6 % des condamnés pour crimes et 6,6 % des condamnés pour délits étaient récidivistes ; or, trois ans après l’entrée en vigueur de la loi instituant les peines planchers, ces proportions s’élevaient respectivement à 5,6 % et 11 %.
C’est la raison pour laquelle ces peines ont été supprimées en 2014. Alors, pourquoi les réintroduire uniquement pour les délits routiers ?
Notons de surcroît que le présent article est contraire au principe d’individualisation des peines. Or, dans un État de droit, les magistrats sont libres de prendre leurs décisions en leur âme et conscience au regard de chaque situation qu’ils ont à juger.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour présenter l’amendement n° 38 rectifié.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est le cinquième amendement tendant à supprimer l’article 1er ter A. Le rapporteur aura sans doute l’occasion de le rappeler : ce matin, la commission des lois a émis un avis favorable sur cette série d’amendements identiques.
Sans verser dans un purisme excessif, on ne peut pas introduire une disposition aussi symbolique et forte dans notre droit uniquement pour une certaine catégorie de délits, et pas pour les crimes. Encore une fois, cette mesure n’a aucun sens !
Je comprends bien le symbole que l’on veut utiliser, mais, si jamais l’on admettait leur utilité, il ne serait pas responsable de rétablir les peines planchers pour les seuls délits routiers et non pour les crimes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Szpiner, rapporteur. La commission a changé d’avis en l’espace d’une semaine : après avoir approuvé les peines planchers, elle les a désavouées ! Elle est donc favorable aux amendements de suppression qui viennent d’être présentés. (Ah ! sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE-K.)
M. Francis Szpiner, rapporteur. Après avoir exprimé l’avis de la commission, j’ai le droit de donner mon avis personnel. Je suis stupéfait de tout ce qu’on peut entendre ici. De quoi parlons-nous exactement ? Il s’agit de prendre en considération le degré de gravité accru que nous entendons donner aux infractions dans ce texte. En la matière, nous sommes limités par l’échelle des peines. Dès lors, l’on demande au juge – excusez du scandale ! – de songer à envoyer réellement quelqu’un en prison, sans pour autant lui ôter la faculté de ne pas le faire : il tiendra toujours compte de la situation de l’individu qui comparaît devant lui. Cela n’a rien d’anticonstitutionnel : la liberté du juge et la personnalisation de la peine sont sauvegardées.
On m’a souvent demandé pourquoi nous souhaitions rétablir ces peines planchers pour ces seules infractions. Voyez-vous, mes chers collègues, pour toutes les infractions, le juge peut édicter des peines principales ou complémentaires, voire des peines d’inéligibilité. L’attitude de certains individus sur la route est inadmissible et fait d’eux moralement des meurtriers, mais nous ne pouvons pas juridiquement les qualifier ainsi, faute d’intention homicide.
Il est inutile de modifier la loi sans rien changer aux peines, mais le faire serait impossible, car le code pénal prévoit déjà cinq ans, sept ans et dix ans d’emprisonnement pour ces délits. Dès lors, si nous rétablissons en la matière les peines planchers, ce n’est pas pour une raison idéologique, c’est simplement pour dire au juge qu’il doit se poser la question de la détention,…
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Il se la pose de toute façon !
M. Francis Szpiner, rapporteur. … à laquelle il est libre de répondre comme il veut.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Ce doit être assez schizophrénique de porter à la fois la voix de la commission et la sienne, surtout lorsque celles-ci sont dissonantes… (Sourires.)
M. François-Noël Buffet, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale. C’est la vie !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Concernant les peines planchers, je vous ai déjà tout dit et je ne me répéterai pas. Monsieur le rapporteur, pensez-vous franchement que le juge a besoin des peines plancher pour se montrer plus sévère, d’autant qu’il peut y déroger ? Votre démarche n’a pas de sens !
M. Francis Szpiner, rapporteur. Bien sûr que si !
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Je ne vous ai pas interrompu, ni quand vous représentiez la commission ni quand vous vous représentiez vous-même. (Rires. – M. Olivier Bitz applaudit.) De grâce, laissez-moi, d’une seule voix, vous répondre !
Vous êtes avocat, monsieur le rapporteur, comme je l’ai été. Songez à la latitude dont disposent les magistrats pénalistes, qui peuvent prononcer jusqu’à dix ans d’emprisonnement. Quant à la récidive, elle a pour effet de doubler le maximum des peines encourues. (Mme Marie-Pierre de La Gontrie le conteste.)
Le juge sévère sera toujours sévère, le juge très sévère sera toujours très sévère ; quant au juge qui ne l’est pas, il ne veut pas des peines planchers ! Vous le savez, n’est-ce pas ? (M. le rapporteur opine.) Bref, rétablir ces peines ne sert pas à grand-chose, mais vous n’êtes pas tenu de me croire…
Ce n’est pas à cette heure-ci que nous allons, par raccroc, réintroduire dans notre droit les peines planchers, d’autant qu’elles font l’objet d’une certaine politisation, comme tout le monde le sait.
Si les peines planchers fonctionnaient, je les soutiendrais sans hésiter ! Je ne suis pas un idéologue, les statistiques démontrent leur inefficacité, je désapprouve donc leur réintroduction.
En outre, ce n’est pas le débat que l’on devrait avoir sur ce texte. À l’Assemblée nationale, nous avons déjà eu un long débat sur l’opportunité de rétablir les peines planchers pour un certain nombre d’infractions.
Je le redis, l’argument selon lequel les peines planchers permettent au juge de se souvenir qu’il peut être sévère n’est pas recevable. Le juge sait parfaitement ce qu’il a à faire : quand il veut être sévère, il peut l’être ! Et les infractions dont nous discutons ce soir lui donnent largement matière à se montrer sévère.
En somme, c’est bien pour des raisons toutes pratiques et non par principe que je suis, bien évidemment, favorable à ces amendements de suppression.
M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour explication de vote.
M. Laurent Somon. Je souhaiterais dépassionner ce débat sur les peines planchers. Tout d’abord, le terme est très inapproprié : au Canada, en Italie, ou encore au Pays de Galles, ces peines sont dénommées autrement et elles ne créent pas la même polémique ; par ailleurs, elles sont ciblées et ne concernent pas l’ensemble des crimes et délits.
L’idée est non pas d’appliquer une peine plancher de façon systématique, mais de définir une peine minimale sur laquelle le juge peut s’appuyer – parce qu’elle prévue par la loi –, tout en conservant la faculté d’y déroger et de l’aménager.
Par conséquent, il aurait l’obligation d’informer les parties civiles de la raison pour laquelle il n’applique pas cette peine minimale. C’est précisément cela que demandent les familles des victimes.
Revenons au cas que j’ai évoqué dans la discussion générale. La presse régionale avait annoncé que la personne jugée coupable était condamnée à trois ans de prison, mais personne n’a eu connaissance de l’appel qui a été interjeté : tout le monde pensait que la justice avait été rendue de façon définitive. Or l’appel a rabaissé la peine à deux ans, dont un an ferme, ce qui, à cette époque, donnait lieu à un aménagement de peine automatique. Ni la famille ni le public n’ont su qu’en fin de compte le condamné a simplement eu à porter un bracelet électronique.
Or, pour que le travail de la justice soit compris et accepté, il faut que celui-ci soit connu. Sur un sujet aussi grave, sensible et humain, il me semble que le juge devrait, à tout le moins, expliquer aux familles pourquoi il n’a pas appliqué la peine minimale prévue par la loi.
Mme Frédérique Puissat. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Laurent Burgoa, pour explication de vote.
M. Laurent Burgoa. Je rejoins totalement les propos de mon collègue Laurent Somon.
Permettez-moi d’ajouter, monsieur le garde des sceaux, avec tout le respect que j’ai pour votre fonction et pour votre personne, que je trouve intellectuellement honnête la position de M. le rapporteur.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Laquelle ? (Sourires sur les travées du groupe SER.)
M. Laurent Burgoa. Il a fait part de la position de la commission, d’un côté, et, de l’autre, il a également exprimé son avis personnel. C’est, à mon sens, faire preuve d’une grande honnêteté intellectuelle.
Pardonnez-moi cette petite pique, bien normale entre amateurs de tauromachie ! (Sourires.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 4 rectifié, 13, 18 rectifié bis, 29 et 38 rectifié.
J’ai été saisi de quatre demandes de scrutin public émanant, la première, du groupe Les Républicains, la deuxième, du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, la troisième, du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants et la quatrième du groupe Union Centriste.
Je rappelle que l’avis de la commission est favorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 167 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 338 |
Pour l’adoption | 204 |
Contre | 134 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l’article 1er ter A est supprimé.
Article 1er ter
Le I de l’article 222-44 du code pénal est ainsi modifié :
1° Au 3°, après la première occurrence du mot : « professionnelle », sont insérés les mots : « ; dans les cas prévus à la section 1 du présent chapitre, seule la durée de l’annulation du permis de conduire peut être prononcée dans les conditions prévues au 4° du présent article » ;
2° Le 4° est complété par les mots : « ; dans les cas prévus à la section 1 du présent chapitre, la durée de l’interdiction est de dix ans au plus » – (Adopté.)
Article 1er quater
(Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 14, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le code pénitentiaire est ainsi modifié :
1° Le chapitre Ier du titre II du livre IV est complété par un article L. 421-… ainsi rédigé :
« Art. L. 421-…. – Lorsque la personne a été condamnée pour un des délits prévus aux sections 2 ter et 2 quater du chapitre Ier ter du titre II du livre II du code pénal, le service pénitentiaire d’insertion et de probation met en place des actions visant à prévenir le risque spécifique de récidive des violences routières et, le cas échéant, des actions visant à prévenir la consommation de stupéfiants ou de substances psychotropes. » ;
2° La dernière ligne du tableau du second alinéa des articles L. 755-1, L. 765-1 et L. 775-1, dans leur rédaction résultant de la loi n° 2023-1196 du 18 décembre 2023 pour le plein emploi, est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :
«
L. 413-1 à L. 421-1 |
Résultant de l’ordonnance n° 2022-1336 du 19 octobre 2022 |
L. 421-2 |
Résultant de la loi n° … du … créant l’homicide routier et visant à lutter contre la violence routière |
L. 423-1 à L. 424-5 |
Résultant de l’ordonnance n° 2022-1336 du 19 octobre 2022 |
».
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Le présent amendement vise à rétablir un article qui nous est cher, mais qui a été supprimé par la commission.
Ce faisant, celle-ci a retiré du texte la possibilité, dans le cadre de la préparation à la sortie de détention des personnes détenues, d’offrir un accompagnement spécifique, par le service pénitentiaire d’insertion et de probation (Spip), aux personnes condamnées pour homicide routier ou blessures routières.
Il faut savoir ce que l’on veut : si notre objectif est de sensibiliser les auteurs de tels actes et de faire baisser la récidive, il nous paraît essentiel de prévoir une prise en charge spécifique des principaux facteurs d’accidents routiers dans le cadre de l’accompagnement vers la réinsertion des personnes détenues condamnées pour ce type d’infractions.
Le texte étant par ailleurs – nous avons été nombreux à le relever, jusqu’au rapporteur – complètement dépourvu de mesures de prévention, alors que celle-ci et la sensibilisation constituent un axe majeur de la lutte contre les infractions routières, je ne comprends pas pourquoi M. le rapporteur, suivi par la commission, a décidé de supprimer cet article qui avait été voté par l’Assemblée nationale. Nous demandons donc son rétablissement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Szpiner, rapporteur. Sur le fond, je suis d’accord avec vous, mon cher collègue, mais il se trouve que ces mesures relèvent du domaine réglementaire et non de celui de la loi.
C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, l’article 1er quater demeure supprimé.
Article 1er quinquies
(Non modifié)
I. – Le code de la route est ainsi modifié :
1° L’article L. 121-6 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « de contravention » sont remplacés par les mots : « d’infraction » ;
b) Le dernier alinéa est complété par les mots : « ou, lorsque l’infraction mentionnée au premier alinéa est un délit, de l’amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe » ;
1° bis La deuxième ligne du tableau du second alinéa du I de l’article L. 143-1 est ainsi rédigée :
« |
Article L. 121-6 |
La loi n° … du … créant l’homicide routier et visant à lutter contre la violence routière |
» ; |
2° L’article L. 413-1 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi rédigé :
« I. – Le fait, pour tout conducteur d’un véhicule à moteur, de dépasser de 50 kilomètres à l’heure ou plus la vitesse maximale autorisée est puni de trois mois d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende. » ;
b) Le II est ainsi modifié :
– à la première phrase du 1°, le mot : « obligatoire » est supprimé ;
– le début de la seconde phrase du même 1° est ainsi rédigé : « La confiscation est obligatoire en cas de récidive ; la juridiction… (le reste sans changement) ; »
– il est ajouté un 5° ainsi rédigé :
« 5° L’annulation du permis de conduire, avec l’interdiction de solliciter la délivrance d’un nouveau permis pendant trois ans au plus. » ;
c) Il est ajouté un IV ainsi rédigé :
« IV. – Dans les conditions prévues aux articles 495-17 à 495-25 du code de procédure pénale, l’action publique peut être éteinte, y compris en cas de récidive, par le versement d’une amende forfaitaire d’un montant de 300 euros. Le montant de l’amende forfaitaire minorée est de 250 euros et le montant de l’amende forfaitaire majorée de 600 euros. »
II. – Le présent article entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 31 décembre 2025.
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.
M. Marc Laménie. Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, cet article 1er quinquies vise à renforcer le volet relatif à la sécurité routière de cette proposition de loi, qui recouvre un vaste domaine ; je tiens à rendre hommage au travail de la commission des lois et de son rapporteur sur ces sujets sensibles, dont l’aspect humain est crucial.
Malheureusement, même si le nombre de personnes tuées et blessées sur la route a diminué au fil des années, les chiffres restent beaucoup trop élevés ; nous avons souvent un sentiment très douloureux face aux victimes innocentes et à la douleur des familles. Ces questions sont donc particulièrement importantes.
L’article 1er quinquies délictualise l’infraction de dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à cinquante kilomètres par heure, c’est-à-dire les délits de grande vitesse, qui se produisent malgré tout ce que mettent en œuvre les forces de sécurité pour lutter contre les chauffards.
Bien qu’il contienne également des dispositions concernant des contraventions, cet article vise avant tout à réprimer plus sévèrement ces excès de vitesse et à renforcer la répression des comportements les plus dangereux sur la route.
Par conséquent, je le soutiendrai.
M. le président. L’amendement n° 9 rectifié, présenté par Mme Borchio Fontimp, M. Somon, Mme Demas, M. Tabarot, Mme Garnier, M. Genet, Mme Pluchet, M. Brisson, Mme Aeschlimann, MM. Bacci, Bazin et Belin, Mmes Belrhiti et Berthet, MM. J.B. Blanc, Bruyen et Burgoa, Mme Chain-Larché, M. Chaize, Mmes Dumont, Evren, Gosselin, Imbert et Josende, M. Laménie, Mme Lopez, M. Milon, Mme Noël, MM. Pellevat, Rapin, Reynaud, Saury, Savin et Sido, Mmes Valente Le Hir et Billon, MM. Courtial et Folliot, Mme Jacquemet et M. Laugier, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
…° Après le même article L. 121-6, il est inséré un article L. 121-… ainsi rédigé :
« Art. L. 121-…. – En cas de condamnation pour un délit commis lors de la conduite d’un véhicule terrestre à moteur pour lequel est encourue la peine complémentaire d’obligation d’accomplir un stage de sensibilisation à la sécurité routière, le prononcé de cette peine est obligatoire sauf décision contraire de la juridiction spécialement motivée en considération des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur.
« Le premier alinéa est applicable en cas de condamnation pour une contravention de la cinquième classe dont la récidive constitue un délit. » ;
…° Le deuxième alinéa de l’article L. 412-2 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il encourt également la peine complémentaire d’obligation d’accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière. » ;
La parole est à Mme Alexandra Borchio Fontimp.
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Prévention et répression sont les deux piliers d’une politique publique efficiente et efficace. C’était l’objet de la proposition de loi que j’avais déposée avec mes collègues Laurent Somon et Jean Sol.
L’accomplissement d’un stage de sensibilisation à la sécurité routière contraint la personne condamnée à prendre pleinement conscience de la dangerosité de son comportement et la conduit à modifier ses agissements pour ne plus reproduire les erreurs qui entraînent parfois, hélas ! le décès de la victime.
Cette peine complémentaire peut déjà être prononcée ; nous demandons qu’elle soit rendue obligatoire. Afin de ne pas entraver l’appréciation du juge, il est cependant prévu que celui-ci puisse y déroger, mais il devra motiver spécialement sa décision. Cela aura pour vertu de permettre aux parties civiles de mieux comprendre le verdict, et ainsi de lutter contre le sentiment d’injustice trop souvent souligné par les victimes et leurs proches.
Reconnaître l’homicide routier, c’est bien ; prévenir les comportements pour éviter qu’ils ne surviennent, c’est mieux. Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Szpiner, rapporteur. Il s’agit d’une peine complémentaire utile. L’avis de la commission est donc favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Le dispositif du permis à points est avant tout un outil de dissuasion, de prévention et de responsabilisation à l’attention de l’ensemble des usagers de la route.
Il est à l’origine de l’amélioration des comportements d’un grand nombre de conducteurs, particuliers comme professionnels, vers une conduite apaisée et plus respectueuse des règles du code de la route.
C’est dans cet esprit que ce code rend le stage de sensibilisation à la sécurité routière obligatoire lorsque le titulaire du permis de conduire a commis une infraction ayant donné lieu à un retrait de points égal ou supérieur au quart du nombre maximum de points, soit trois, et qu’il se trouve dans la période du délai probatoire défini à l’article L. 223-1 du même code.
Étendre cette mesure à tous les conducteurs qui auraient perdu la moitié de leurs points, en substituant le stage à l’amende correspondante, constituerait, de notre point de vue, un mauvais signal, dans la mesure où cela préserverait le droit à conduire et les finances des conducteurs les plus « infractionnistes », si vous me permettez l’expression.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. Si j’ai bien compris, si cet amendement était adopté, un jeune conducteur ne disposant que de six points sur son permis serait obligé de passer par un stage dès lors qu’il commettrait une infraction lui coûtant trois points. Une telle mesure me paraît tout à fait disproportionnée.
M. le président. L’amendement n° 16, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Alinéas 15 et 16
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. L’article 1er quinquies délictualise l’infraction de dépassement de la vitesse maximale autorisée d’au moins cinquante kilomètres par heure L’article rend ce délit de grand excès de vitesse éligible à la procédure de l’amende forfaitaire délictuelle (AFD).
Les AFD comportent un risque d’arbitraire et d’inégalité devant la justice, les agents verbalisateurs étant seuls à s’assurer que les conditions pour verbaliser sont remplies et à apprécier l’opportunité de le faire. Elles présentent donc un fort risque de discrimination et de rupture du principe d’égalité devant la justice, ainsi que de rupture d’équité entre les justiciables dans la constatation et la poursuite des infractions pénales.
Le Gouvernement ne doit pas oublier que l’appréciation de l’opportunité des poursuites en matière pénale revient au procureur, selon les dispositions de l’article 40-1 du code de procédure pénale.
En outre, des syndicats et des associations de professionnels de la justice s’inquiètent des difficultés à porter recours contre ces amendes. Le recours n’est pas suspensif et les forces de l’ordre ne préviennent pas systématiquement les intéressés qu’ils peuvent contester ces amendes devant le tribunal de police.
Pour l’ensemble de ces raisons, notre groupe s’oppose à l’application de l’AFD aux délits routiers.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Szpiner, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er quinquies, modifié.
(L’article 1er quinquies est adopté.)
Article 1er sexies
(Non modifié)
L’article L. 224-2 du code de la route est ainsi modifié :
1° Au début, il est ajouté un I A ainsi rédigé :
« I A. – Le représentant de l’État dans le département doit, dans un délai de soixante-douze heures à compter de la rétention du permis de conduire prévue à l’article L. 224-1, ou dans un délai de cent vingt heures pour les infractions pour lesquelles les vérifications prévues aux articles L. 234-4 à L. 234-6 et L. 235-2 ont été effectuées, prononcer la suspension du permis de conduire lorsque :
« 1° L’état alcoolique est établi au moyen d’un appareil homologué, conformément au 1° du I de l’article L. 224-1, lorsque les vérifications mentionnées aux articles L. 234-4 et L. 234-5 apportent la preuve de cet état ou lorsque le conducteur ou l’accompagnateur de l’élève conducteur a refusé de se soumettre aux épreuves et aux vérifications destinées à établir la preuve de l’état alcoolique ;
« 2° Il est fait application de l’article L. 235-2 si les analyses ou les examens médicaux, cliniques et biologiques établissent que le conducteur conduisait après avoir fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants ou lorsque le conducteur ou l’accompagnateur de l’élève conducteur a refusé de se soumettre aux épreuves et aux vérifications prévues au même article L. 235-2. » ;
2° Les 1° et 2° du I sont abrogés ;
3° Le II est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les cas prévus au I du présent article, les durées prévues au premier alinéa du présent II sont portées au double lorsque le conducteur est un professionnel chargé du transport de personnes. » ;
4° Au III, les mots : « du I » sont remplacés par les mots : « des I A et I ».
M. le président. L’amendement n° 15, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. L’article 1er sexies impose au préfet de suspendre le permis de conduire de l’auteur d’une infraction routière. Actuellement, il s’agit d’une faculté donnée au préfet lorsqu’une infraction est commise dans son département.
Prévoir l’automaticité d’une telle mesure de sûreté constitue de nouveau une mesure disproportionnée, qui empêche le préfet d’apprécier la situation au cas par cas, alors que celui-ci est garant de l’ordre public et de la sécurité dans son territoire.
En préemptant les décisions des préfets en matière de sécurité, le législateur nous semble outrepasser ses pouvoirs.
Le présent amendement vise donc à supprimer cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Szpiner, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 37, présenté par Mme Havet et M. Canévet, est ainsi libellé :
Alinéas 7 et 8
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Nadège Havet.
Mme Nadège Havet. Cet amendement vise à supprimer le doublement de la durée maximale des suspensions administratives du permis de conduire pour les conducteurs professionnels chargés du transport de personnes.
Une telle mesure pourrait être considérée comme discriminatoire, d’autant plus qu’elle s’appliquerait sans distinction entre les infractions commises sur un temps de conduite professionnelle et les autres.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Szpiner, rapporteur. La commission est très défavorable à cet amendement. Il n’y a rien de discriminatoire à demander aux professionnels de la route d’être beaucoup plus vigilants que les autres conducteurs !
De plus, je suis surpris que l’on puisse soutenir qu’un homicide routier commis en dehors des horaires de travail serait moins grave et devrait donc entrer dans le droit commun.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er sexies.
(L’article 1er sexies est adopté.)
Article 1er septies
(Non modifié)
Le code de la route est ainsi modifié :
1° Au I de l’article L. 234-1, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois » et le montant : « 4 500 euros » est remplacé par le montant : « 9 000 euros » ;
2° Aux 1° et 2° du I de l’article L. 234-2, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « cinq » ;
3° L’article L. 235-1 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– à la première phrase, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois » et le montant : « 4 500 euros » est remplacé par le montant : « 9 000 euros » ;
– à la seconde phrase, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « cinq » et le montant : « 9 000 euros » est remplacé par le montant : « 15 000 euros » ;
b) Le II est ainsi modifié :
– aux 1° et 2°, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « cinq » ;
– le 8° est complété par deux phrases ainsi rédigées : « La confiscation est obligatoire pour toute personne coupable du délit prévu à la seconde phrase du I. La juridiction peut toutefois ne pas prononcer cette peine, par une décision spécialement motivée. » ;
c) Le IV est ainsi modifié :
– le début est ainsi rédigé : « IV. – Le délit prévu à la première phrase du I du présent article donne lieu… (le reste sans changement). » ;
– il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’article L. 223-2, le délit prévu à la seconde phrase du I du présent article donne lieu de plein droit à la réduction des trois quarts du nombre maximal de points du permis de conduire. » ;
4° Au troisième alinéa des articles L. 243-1, L. 244-1 et L. 245-1, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois » et le montant : « 4 500 euros » est remplacé par le montant : « 9 000 euros » – (Adopté.)
Après l’article 1er septies
M. le président. L’amendement n° 8 rectifié, présenté par Mme Borchio Fontimp, M. Somon, Mme Demas, M. Tabarot, Mme Garnier, M. Genet, Mme Pluchet, M. Brisson, Mme Aeschlimann, MM. Bacci, Bazin et Belin, Mmes Belrhiti et Berthet, MM. J.B. Blanc, Bruyen et Burgoa, Mme Chain-Larché, M. Chaize, Mmes Dumont, Evren, Gosselin, Imbert et Josende, M. Laménie, Mme Lopez, M. Milon, Mme Noël, MM. Pellevat, Rapin, Reynaud, Saury, Savin et Sido, Mmes Valente Le Hir et Billon, MM. Courtial et Folliot, Mme Jacquemet, M. Laugier et Mme Romagny, est ainsi libellé :
Après l’article 1er septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le chapitre V du titre III du livre II du code de la route, il est inséré un chapitre V bis ainsi rédigé :
« Chapitre V bis
« Conduite sous l’empire d’effets psychoactifs obtenus à partir d’un usage détourné d’un produit de consommation courante
« Art. L. 235-5-1. – Le fait de conduire un véhicule ou d’accompagner un élève conducteur en se trouvant sous l’empire manifeste d’effets psychoactifs obtenus à partir d’un usage détourné ou manifestement excessif d’un produit de consommation courante est puni d’une contravention de la cinquième classe. En cas de récidive, la peine est portée à 7 500 euros d’amende et la condamnation donne lieu de plein droit à la réduction de la moitié du nombre maximal de points du permis de conduire.
« La personne se trouvant en état de récidive encourt également les peines complémentaires suivantes :
« 1° La suspension pour une durée de trois ans au plus du permis de conduire ; cette suspension ne peut pas être limitée à la conduite en dehors de l’activité professionnelle ; elle ne peut être assortie du sursis, même partiellement ;
« 2° La peine de travail d’intérêt général selon les modalités prévues à l’article 131-8 du code pénal et selon les conditions prévues aux articles 131-22 à 131-24 du même code et à l’article L. 122-1 du code de la justice pénale des mineurs ;
« 3° La peine de jours-amende dans les conditions fixées aux articles 131-5 et 131-25 du code pénal ;
« 4° L’interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n’est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
« 5° L’obligation d’accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière. »
La parole est à Mme Alexandra Borchio Fontimp.
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Le présent amendement vise à introduire dans le texte une mesure supplémentaire qui s’impose au regard des nombreux échanges que nous avons eus avec les associations de lutte contre les violences routières. Cet amendement, comme d’autres que j’ai défendus ce soir, est issu des travaux que j’ai menés avec Laurent Somon et Jean Sol.
L’alcool fait des ravages, de même que la consommation de cannabis et de cocaïne, mais d’autres substances tendent à se développer très rapidement. C’est le cas, par exemple, du protoxyde d’azote – plus connu sous le nom de gaz hilarant –, dont certains de nos concitoyens, particulièrement les plus jeunes, semblent banaliser la consommation. Son usage détourné est en recrudescence chez les collégiens, les lycéens et les étudiants, selon une récente enquête de l’agence régionale de santé.
Entre vide juridique et difficulté pratique, cet enjeu de santé et de sécurité publiques ne peut échapper plus longtemps à la vigilance du législateur, bien que la faisabilité pratique d’une telle disposition pose question – je le reconnais.
Il demeure important de prévoir d’ores et déjà une mesure d’encadrement de tels comportements, dont les prémices existent déjà. La science évolue et le droit doit anticiper : il faut maintenant aller plus loin.
Cet amendement vise donc à sanctionner la conduite sous l’empire d’effets psychoactifs obtenus à partir de l’usage détourné d’un produit de consommation courante, et ce même en l’absence de tout accident.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Szpiner, rapporteur. Bien que je comprenne tout à fait la philosophie qui inspire cet amendement, son dispositif me paraît particulièrement difficile à mettre en œuvre en l’état : il faudrait prouver ce qu’est l’usage détourné ou manifestement excessif du produit de consommation courante.
En revanche, ce sujet mérite d’être abordé : il est vrai que, ce soir, nous ne discutons que d’un des aspects du sujet. Nous avons tous été d’accord pour considérer que le problème de la sécurité routière englobait beaucoup d’autres questions.
Ce point particulier me semble devoir être traité dans le cadre d’une réflexion globale sur la prévention, mais il est excessif de l’introduire dans ce texte.
Par conséquent, je demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Il serait intéressant que nous puissions aller plus loin d’un point de vue scientifique ; en cela, je vous rejoins totalement, madame la sénatrice.
Je citerai toutefois deux exemples des difficultés auxquelles nous serions confrontés si cet amendement était adopté.
Tout d’abord, la liste des produits dont on souhaite sanctionner la consommation est large et difficile à déterminer à cet instant.
Ensuite, certains produits sont toxiques – nous le savons –, mais leur détection dans l’organisme est techniquement impossible en l’état. C’est d’ailleurs le cas du protoxyde d’azote.
Dans ces conditions, je suis défavorable à cet amendement, même si j’en comprends évidemment le sens.
M. le président. Madame Alexandra Borchio Fontimp, l’amendement n° 8 rectifié est-il maintenu ?
Mme Alexandra Borchio Fontimp. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 8 rectifié est retiré.
Article 1er octies
(Non modifié)
Le code de la route est ainsi modifié :
1° Le I de l’article L. 325-1-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Si les deux conditions prévues aux 3° et 4° sont remplies, l’immobilisation et la mise en fourrière sont de plein droit. » ;
2° La seconde ligne du tableau du second alinéa de l’article L. 344-1-1 est ainsi rédigée :
« |
Art. L. 325-1-2 |
La loi n° … du … créant l’homicide routier et visant à lutter contre la violence routière |
» |
– (Adopté.)
Article 2
I. – Au neuvième alinéa de l’article 1018 A du code général des impôts, les mots : « du 3° des articles 221-6-1, 222-19-1, 222-20- 1 » sont remplacés par les mots : « des articles 221-6-1-2, 222-20- 5 ou 222-20- 6 ».
II. – Le code pénal est ainsi modifié :
1° À l’avant-dernier alinéa de l’article 131-22, après la référence : « 221-6-1, », sont insérées les références : « 221-6-1-2, 222-20- 5, 222-20- 6, » ;
2° Au premier alinéa de l’article 132-16-2, après la référence : « 222-20- 1 », sont insérés les mots : « et d’homicide routier ou de blessures routières prévus aux articles 221-6-1-2, 222-20- 5, 222-20- 6 » ;
2° bis Le I de l’article 221-8 est ainsi modifié :
a) Après la seconde occurrence du mot : « professionnelle », la fin du 3° est supprimée ;
b) Le second alinéa du 10° est supprimé ;
c) Le 11° est abrogé ;
d) Le dernier alinéa est supprimé ;
2° ter Le I de l’article 222-44 est ainsi modifié :
a) Après la seconde occurrence du mot : « professionnelle ; », la fin du 3° est supprimée ;
b) Les deux dernières phrases du 13° sont supprimées ;
c) Le 14° est abrogé ;
d) Le dernier alinéa est supprimé ;
3° Au second alinéa de l’article 434-10, après la référence : « 221-6-1, », sont insérées les références : « 221-6-1-2, 222-20- 5, 222-20- 6 ».
III. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Au cinquième alinéa du 1° de l’article 398-1, après le mot : « articles », sont insérées les références : « 222-20- 5, 222-20- 6, » ;
2° Au premier alinéa de l’article 706-176, après la référence : « 221-6-1, », sont insérées les références : « 221-6-1-2, 222-20- 5, 222-20- 6, ».
IV. – Le code de la route est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 123-2, après le mot : « pénal », sont insérés les mots : « ou des délits d’homicide routier ou de blessures routières prévus aux articles 221-6-1-2, 222-20- 5 et 222-20- 6 du même code » ;
2° À l’article L. 224-14, après la référence : « 221-6-1, », sont insérées les références : « 221-6-1-2, 222-20- 5, 222-20- 6, » ;
3° À l’article L. 232-3, après la référence : « 221-6-1, », sont insérées les références : « 221-6-1-2, 222-20- 5, 222-20- 6, ».
V. – Au 3° de l’article L. 4271-4 du code des transports, après la référence : « 221-6-1, », sont insérées les références : « 221-6-1-2, 222-20- 5, 222-20- 6, ».
M. le président. L’amendement n° 41, présenté par M. Szpiner, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 3, 4, 15 et 20 à 23
Compléter ces alinéas par les mots :
et la référence : « 222-19-1 » est supprimée ;
II. – Alinéas 5 à 14
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
…° Au 8° de l’article 222-44, les mots : « les articles 222-19-1 et 222-20-1 » sont remplacés par les mots : « l’article 222-20-1 » ;
III. – Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
….- Le code du travail est ainsi modifié :
1° À l’article L. 4741-2, les références : « 221-6, 222-19 et 222-20 » sont remplacées par les références : « 221-6, 221-6-1, 221-6-1-1, 221-6-1-2, 222-19, 222-20, 222-20-1, 222-20-3 à 222-20-6 » ;
2° À l’article L. 4741-11, après la référence : « 221-6 », est insérée la référence : « 221-6-1 ».
….- À l’article L. 1114-2 du code de la santé publique, les références : « 221-6,222-19 et 222-20 » sont remplacées par les références : « 221-6, 221-6-1, 221-6-1-1, 221-6-1-2, 222-19, 222-20, 222-20-1, 222-20-3 à 222-20-6 ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 2, modifié.
(L’article 2 est adopté.)
Article 3
(Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 25, présenté par Mmes Silvani et Cukierman, M. Brossat et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le chapitre II du titre III du livre II du code de la route est complété par un article L. 232-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 232-4. – En cas d’homicide routier ou de blessures routières par mise en danger, lorsque les circonstances de l’accident ou de l’infraction laissent présumer que l’état du conducteur peut être incompatible avec le maintien du permis de conduire, le conducteur doit se soumettre à un examen médical. Cet examen, réalisé à ses frais, se tient dans un délai de 72 heures à compter de l’accident routier et doit déterminer son aptitude à la conduite. Il est réalisé par un médecin agréé consultant hors commission médicale.
« Les officiers et les agents de police judiciaire retiennent à titre conservatoire le permis de conduire du conducteur jusqu’à la réalisation de l’examen prévu au premier alinéa. L’article L. 224-4 est applicable.
« Le médecin ayant réalisé l’examen prévu au premier alinéa du présent article transmet au représentant de l’État dans le département de résidence du conducteur un avis médical déterminant l’aptitude à la conduite de celui-ci. Si l’avis médical conclut à l’inaptitude à la conduite, le représentant de l’État peut prononcer la suspension du permis de conduire du conducteur concerné. La durée de la suspension du permis de conduire ne peut excéder un an. À défaut de décision de suspension dans le délai prévu au même premier alinéa, le permis de conduire est remis à la disposition de l’intéressé, sans préjudice de l’application ultérieure des articles L. 224-7 à L. 224-9.
« Le fait de ne pas se soumettre à l’examen médical prévu au premier alinéa du présent article est puni des peines prévues à l’article L. 224-16.
« Le fait pour toute personne, malgré la notification qui lui a été faite d’une décision prononçant à son encontre la suspension du permis de conduire prévue au présent article, de conduire un véhicule à moteur pour la conduite duquel une telle pièce est nécessaire est puni des peines prévues à l’article L. 224-16. »
La parole est à Mme Marianne Margaté.
Mme Marianne Margaté. Cet amendement a pour objet de réintroduire les dispositions qui figuraient à l’article 3 du texte issu de l’Assemblée nationale, lequel article a été supprimé en commission.
Cet article instaurait un examen médical obligatoire en cas d’accident de la route ayant causé un homicide routier ou des blessures routières entraînant une ITT supérieure à trois mois.
Cet amendement vise donc à éviter que certains individus ne continuent à conduire dans l’attente de la décision de justice, en rendant obligatoire la réalisation d’un examen médical permettant d’évaluer l’aptitude à la conduite du conducteur impliqué dans un accident.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Francis Szpiner, rapporteur. Il nous faudra réfléchir à un dispositif d’ensemble de contrôle des conducteurs, comprenant des examens médicaux à intervalles réguliers, même en dehors de tout accident.
Certains sénateurs se sont indignés tout à l’heure du fait que l’on oblige le préfet à suspendre le permis de conduire, mais, en général, après la survenance d’un accident routier, les personnes concernées ne peuvent pas reprendre le volant. Une telle mesure peut d’ailleurs être prononcée dans le cadre d’un contrôle judiciaire.
Par conséquent, l’avis de la commission est défavorable sur cet amendement.
Pour autant, je souhaite que cette proposition incite le Gouvernement à travailler rapidement à un texte relatif à des examens médicaux pour les conducteurs de tout âge, même en l’absence d’accident.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Le Gouvernement va y réfléchir, mais il est dès à présent favorable à cet amendement visant à rétablir l’article 3, supprimé en commission, qui avait pour objet la prévention des accidents liés à une inaptitude médicale de certains conducteurs.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Nous n’allons pas nous engager trop loin dans ce débat à cette heure tardive, mais la question de la capacité physique d’une personne à conduire est intéressante. Je ne propose certes pas d’ouvrir maintenant le débat sur la nécessité d’un examen médical pour les personnes très âgées, mais il nous faudra bien le faire un jour !
En revanche, il me semble parfaitement normal que quelqu’un dont le comportement a provoqué un accident grave tel que ceux dont nous avons parlé tout à l’heure fasse l’objet d’un examen médical.
Je ne sais pas s’il faut creuser davantage le sujet, mais j’estime qu’il convient à tout le moins d’adopter cet amendement. Pour le reste, il y aura une navette et une commission mixte paritaire. Nous devons poursuivre dans cette voie.
Par conséquent, nous voterons cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 25.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l’amendement.)
M. le président. En conséquence, l’article 3 est rétabli dans cette rédaction.
Article 4
(Non modifié)
I. – Après le mot : « loi », la fin de l’article 711-1 du code pénal est ainsi rédigée : « n° … du … créant l’homicide routier et visant à lutter contre la violence routière en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna. »
II. – Le début du premier alinéa de l’article 804 du code de procédure pénale est ainsi rédigé : « Le présent article est applicable, dans sa rédaction résultant de la loi n … du … créant l’homicide routier et visant à lutter contre la violence routière, en Nouvelle-Calédonie… (le reste sans changement). – (Adopté.)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Marie-Pierre de La Gontrie, pour explication de vote.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Je n’avais pas précisé la position du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain dans mon intervention au sein de la discussion générale.
Notre ligne rouge eût été le maintien des peines planchers ; il se trouve que le Sénat, dans sa grande sagesse, a suivi la tout aussi grande sagesse de la commission des lois et n’a pas retenu cette mesure.
Sur le reste, nos critiques demeurent entières. Sans doute des progrès peuvent-ils encore être faits dans la rédaction du texte ; nous formons le vœu que la commission mixte paritaire y parvienne.
Pour autant, dans la mesure où nous partageons l’objectif de cette proposition de loi, laquelle, sans être parfaite, est tout de même positive, nous la voterons.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission modifié, l’ensemble de la proposition de loi créant l’homicide routier et visant à lutter contre la violence routière.
(La proposition de loi est adoptée.)
11
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 2 avril 2024 :
À quatorze heures trente :
Explications de vote des groupes puis scrutin public solennel sur le projet de loi constitutionnelle portant modification du corps électoral pour les élections au congrès et aux assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie (texte n° 291, 2023-2024) ;
Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique (texte de la commission n° 470, 2023-2024) ;
Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à adapter le droit de la responsabilité civile aux enjeux actuels (texte de la commission n° 467, 2023-2024) ;
Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à soutenir l’engagement bénévole et à simplifier la vie associative ;
Nouvelle lecture du projet de loi visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires et à améliorer l’accompagnement des victimes (texte n° 455, 2023-2024).
Le soir :
Débat sur la situation de l’hôpital.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt-trois heures cinquante-cinq.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
FRANÇOIS WICKER