Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Anglars, sur l’article.
M. Jean-Claude Anglars. Mes chers collègues, j’ai lu avec intérêt le compte rendu intégral des débats relatifs à l’examen du projet de loi organique pour la confiance dans la vie politique, qui a eu lieu au Sénat en juillet 2017. À l’époque, je n’étais pas encore sénateur, comme nombre de mes collègues présents aujourd’hui.
À la lumière des débats sur l’adoption du texte il y a six ans, je formulerai deux remarques sur celui que nous examinons en ce jour.
D’abord, les arguments avancés en faveur du maintien de la réserve parlementaire étaient d’une justesse telle que ce qui était craint est advenu. Les dispositifs qui ont remplacé la réserve parlementaire n’ont pas démontré la même efficacité, comme plusieurs collègues l’ont rappelé lors de la discussion générale. De plus, les différents fonds ne permettent pas de financer de manière satisfaisante les plus petits projets. Laissée aux mains d’acteurs déconcentrés, la décision est rendue plus difficile ; nous avons tous à l’esprit la remarque de Daniel Chasseing sur les pratiques ayant cours en Corrèze…
Ensuite, en 2017 les élus du « nouveau monde », forts de leur crédibilité, ont pu croire que la suppression de la réserve était une bonne idée. Toutefois, six ans après, les excès d’un pouvoir technocratique éloigné des réalités du terrain et des collectivités ont surtout profité, sur le plan politique, aux extrêmes, au gré des crises politiques et sociales qui ont émaillé ces années. Six ans après, la suppression de la réserve parlementaire n’a apporté ni regain de confiance dans la vie politique ni amélioration de la démocratie.
L’enjeu de la réserve est celui du microfinancement de la vie locale et de son effet levier, qui est à mettre en regard de la bureaucratisation des fonds et des difficultés rencontrées par certains projets, notamment les plus modestes, parce qu’ils n’entrent pas dans le cadre requis pour bénéficier de financements publics de l’État. En ce sens, la réserve parlementaire est un outil efficace, à la gestion simple et transparente. Aussi, les maires plébiscitent son retour. Il apparaît que la connaissance qu’ont les parlementaires, notamment les sénateurs, du développement local, les rend légitimes à mettre en œuvre un tel outil.
C’est pourquoi j’espère que cette proposition de loi organique prospérera ici et à l’Assemblée nationale.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour explication de vote.
M. Olivier Paccaud. Monsieur le ministre, parler de la réserve parlementaire, c’est évoquer l’ancien monde, vous savez, celui que l’apprenti Jupiter voulait éparpiller aux quatre coins de la République, « façon puzzle », les écuries d’Augias qu’Hercule Macron voulait nettoyer…
M. François Patriat. Pas d’insultes !
M. Bernard Jomier. Hercule, ce n’est pas une insulte…
M. Olivier Paccaud. La réserve parlementaire, emblème du clientélisme, pour reprendre un terme employé, a été le bouc émissaire idéal, guillotiné par la Macronie.
On devait passer de l’ombre à la lumière. Cela ne s’est pas produit…
Comme l’a dit M. Bocquet, c’était l’une des pierres du socle de l’antiparlementarisme, mondain, technocratique, populiste.
Mais la suppression de la réserve parlementaire a-t-elle amélioré le sort des territoires, des associations, des communes ?
M. Olivier Paccaud. Non ! Présidents d’intercommunalité ou maires, tous nous le confirment.
Alors, faut-il rétablir la réserve parlementaire ? Oui, j’y suis pour ma part totalement favorable. Aussi ai-je cosigné le texte de nos amis Vérien et Maurey.
Pourquoi faut-il la rétablir ? Parce que sa suppression a rimé avec baisse des dotations et recentralisation.
M. François Patriat. C’est faux !
M. Olivier Paccaud. Or la baisse des dotations et la recentralisation sont ce qu’il y a de pire pour les territoires et les élus locaux.
La réserve parlementaire, à la fois souple et efficace, était devenue transparente. De plus, elle était versée pour des projets qui ne bénéficiaient d’aucun autre subside, ce qui lui a donné toute son utilité !
Peut-être faut-il la renommer et mieux l’encadrer, mais la réserve a une véritable efficacité politique, de justice territoriale et une légitimité démocratique. Car seuls les élus ont la légitimité démocratique accordée par l’élection, et certainement pas les préfets ! (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Folliot, sur l’article.
M. Philippe Folliot. Je salue nos collègues Dominique Vérien et Hervé Maurey, auteurs de cette proposition de loi organique, dont les mesures sont attendues par nombre d’élus locaux, car elles tendent à corriger une injustice.
En 2017, quoique député du groupe de la majorité présidentielle, j’ai dénoncé l’erreur consistant à supprimer cet outil de proximité, que l’on avait su faire évoluer vers plus de transparence. Cet outil était très utile pour nos communes rurales.
Député, j’ai toujours été transparent sur l’attribution de ma réserve. D’ailleurs, avant même que la loi nous y oblige, j’indiquais sur mon site internet comment étaient utilisés ces fonds, de sorte que tout le monde dans ma circonscription pût en prendre connaissance.
Par ailleurs, les élus me disent souvent que la réserve permettait de répondre favorablement et utilement aux besoins de leurs communes pour de petits projets, et cela en toute souplesse et facilité. Idem pour les associations : dans le département dont je suis élu, trois personnes sont actuellement chargées d’affecter le FDVA ; auparavant les parlementaires et leur équipe le faisaient en toute souplesse.
Par exemple, chaque année, en lien avec le comité départemental, nous achetions 10 000 éthylotests pour tous les comités des fêtes de la circonscription et du département ; c’était utile ! Aujourd’hui, il serait totalement impossible de financer une telle action via le FDVA.
Cet exemple pourrait être suivi de beaucoup d’autres.
Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Philippe Folliot. Nous espérons que ce texte sera adopté.
Mme la présidente. Il faut conclure !
M. Philippe Folliot. Cela permettra de répondre aux besoins…
Mme la présidente. Vous n’avez plus la parole, monsieur Folliot !
M. Philippe Folliot. … des collectivités et des associations. (Applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Michel Canévet, sur l’article.
M. Michel Canévet. L’intervention du ministre Philippe Vigier, que j’estime beaucoup par ailleurs, m’amène à clarifier certains points.
Les parlementaires qui siègent dans les commissions d’élus de la DETR – tous n’y sont pas – examinent les dossiers de demande de DETR, mais certains dossiers sont orientés vers la DSIL ou vers le fonds vert. Aussi, dans ces commissions, on n’a qu’une vision très partielle des financements de l’État.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Exact !
M. Michel Canévet. Selon moi, cette méthode manque de pertinence ; il faudrait la revoir.
Précédemment, M. le ministre a évoqué le fonds pour le développement de la vie associative ; excellent sujet, monsieur le ministre ! Voilà un dispositif qu’il ne fallait franchement pas mettre en œuvre ! Mobiliser les services de l’État dans les départements pour instruire des subventions de 100 euros à 1 500 euros par centaines est un non-sens total, monsieur le ministre ! Total !
Le département et les communes le font déjà, on ne peut que déplorer, sur un tel sujet, cette redondance des administrations. Il est temps de simplifier et de clarifier les choses ; l’État n’a pas vocation à distribuer des centaines de subventions de 100 euros à des associations, en mobilisant des tas d’agents, alors que, par ailleurs, nous demandons à ses services de faire preuve d’efficience.
Tel est le message que je voulais faire passer à propos de la réserve parlementaire : celle-ci est octroyée par des élus qui connaissent bien les territoires et qui peuvent aider les petits projets, notamment dans les zones rurales. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Longeot, sur l’article.
M. Jean-François Longeot. Cette initiative, cette proposition de loi organique de nos deux collègues, me paraît très intéressante.
On peut sans doute critiquer nos pratiques passées en matière de réserve parlementaire, car les modalités d’attribution semblaient parfois manquer de clarté. J’étais pour ma part dubitatif à son sujet, mais il m’apparaît maintenant que cette expérience est bénéfique : elle nous a permis d’identifier les lacunes de l’ancienne réserve parlementaire.
J’ajouterai deux remarques.
Premièrement, le rétablissement de la réserve parlementaire ne doit pas se faire au détriment de la DETR, qui ne devra pas en être diminuée, au risque de pénaliser les territoires. Dans le département dont je suis élu, nous sommes huit parlementaires ; avec un montant moyen de 150 000 euros, cela fait un total de 1,2 million d’euros. Il ne serait pas judicieux de soustraire ce montant à celui de la DETR.
Deuxièmement, il me semble nécessaire de profiter de ce texte pour étudier la mise en place d’un guichet unique. En effet, entre 2014 et 2017, j’ai pu constater que des maires, notamment des plus petites communes, attributaires tant de la DETR que de la réserve, étaient autorisés à démarrer des travaux au titre de la DETR, mais ne pouvaient ensuite bénéficier de la réserve parlementaire, faute d’avoir reçu l’autorisation spécifique de commencer les travaux à ce titre-là. Un guichet unique simplifierait donc les démarches administratives et la constitution des dossiers, surtout pour les petites communes, qui ne disposent pas toujours de services dédiés. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, sur l’article.
M. Daniel Chasseing. La suppression de la réserve parlementaire est très préjudiciable, notamment aux zones rurales, pour deux raisons principales.
Premièrement, cette aide, souple et rapide, était très adaptée aux petits projets des communes, mais aussi, à la marge, à certaines réalisations plus importantes. Ces crédits étaient totalement transparents et permettaient aux parlementaires de découvrir les chantiers, de se rendre dans les conseils municipaux, d’être au plus près des élus locaux et des maires et ainsi de s’intégrer de façon efficace dans les territoires.
De même, la réserve parlementaire offrait la possibilité aux parlementaires d’assister aux réunions des associations pour apprécier leurs projets et leur développement. Actuellement, nous apprenons le montant affecté aux associations le jour de la réunion et nous n’avons pas le droit de l’évoquer avant que celle-ci soit transmise à la région. C’est absurde et je partage l’avis de Michel Canévet : l’administration ne devrait pas s’occuper de cela…
Deuxièmement, au quotidien, la population perçoit le rôle législatif et de contrôle du parlementaire, mais elle retient surtout son action locale pour fournir des solutions et des aides aux collectivités et aux associations. Le parlementaire n’est plus au plus près du terrain, en raison de la suppression de la réserve parlementaire, et cela peut donc décourager certains électeurs de se rendre aux urnes.
Pour ces deux raisons, je souhaite le retour d’une réserve parlementaire encadrée et transparente, qui est une nécessité pour renforcer le lien entre les parlementaires, les élus locaux et les citoyens. Cette mesure est très attendue. (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP et UC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Ghislaine Senée, sur l’article.
Mme Ghislaine Senée. J’avais déposé un amendement d’appel visant à mettre en place un contrôle citoyen sur l’usage de la réserve parlementaire, par le biais d’un jury composé de citoyens tirés au sort. Cet amendement était gagé, mais il a été déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution, dont je n’ai sans doute pas encore saisi toutes les subtilités…
Pour autant, je souhaite défendre cette idée.
Nous vivons une crise majeure de défiance des Français envers la vie publique, comme en attestent ces trois chiffres provenant d’une étude de février 2023. À la question « Quel sentiment éprouvez-vous quand vous pensez à la politique ? », la première réponse est « De la méfiance », à 37 %, loin devant le deuxième sentiment, qui est « Du dégoût », à 19 %. Sept Français sur dix perçoivent le personnel politique comme « Plutôt corrompu », et près de huit Français sur dix estiment que « Les politiques ne servent que leur propre intérêt ». Un Français sur dix, seulement, n’est pas d’accord avec cette dernière affirmation.
Dans un tel contexte, il nous faut absolument reconquérir la confiance des citoyens, qui se sentent aujourd’hui dépossédés de l’action publique ; pour cela, rien de mieux que de les impliquer. Un jury permettrait de faire revenir des citoyens à l’action publique, de leur présenter des élus et de les aider à découvrir les difficultés locales et concrètes que rencontrent les acteurs du territoire. Il offrirait un outil d’éducation civique susceptible de susciter des vocations associatives ou électorales. Certains élus écologistes, parmi lesquels Ronan Dantec, l’ont mis en place sur leur territoire, avec succès.
Notre pays est riche de ses 520 000 élus locaux et de ses 925 parlementaires, mais nous ne pourrons pas agir efficacement sans retrouver la confiance de nos concitoyens. Or je crains que cette proposition de loi organique ne provoque l’effet inverse et ne renforce leur défiance envers leurs représentants, qu’ils perçoivent trop souvent comme déconnectés.
Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Maurey, sur l’article.
M. Hervé Maurey. Je souhaite évoquer trois points à la suite de l’intervention de M. le ministre.
Tout d’abord, monsieur le ministre, je ne vous ai pas senti très à l’aise pour exprimer la position du Gouvernement sur ce sujet. Il est vrai que vous vous étiez vous-même prononcé contre la suppression de la réserve parlementaire, la qualifiant de « faute politique » – c’était vrai – et de « sparadrap pour le Gouvernement ». Vous avez, en revanche, omis de nous rappeler que récemment encore, alors que vous étiez député, vous aviez cosigné la proposition de loi organique de M. André Villiers visant à rétablir la pratique de la réserve parlementaire, au profit des petites communes et des associations.
M. Olivier Paccaud. Tout à fait ! C’était il y a moins d’un an !
M. Hervé Maurey. Je comprends donc que vous soyez un peu gêné…
Ensuite, vous affirmez que les élus sont associés à l’attribution de la DETR et du FDVA. Franchement, qui peut soutenir cela dans cet hémicycle ? Ils n’y font que de la figuration. Chaque fois que nous avons tenté, via des amendements, de renforcer leur rôle dans ces commissions, nous nous sommes vu opposer un refus du Gouvernement.
Enfin, vous avez évoqué la nécessité de mener un travail concomitant sur le rétablissement de la réserve et du cumul des mandats. Chiche ! Je vous rappelle que le Sénat a adopté, sur l’initiative du président de notre groupe, Hervé Marseille, la proposition de loi organique favorisant l’implantation locale des parlementaires, laquelle rétablissait le cumul des mandats.
M. Olivier Paccaud. Eh oui…
M. Hervé Maurey. Quand sera-t-elle inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale ? Et quand le Président de la République tiendra-t-il son engagement, pris dans l’Eure lors du premier grand débat, de rétablir en partie le cumul ? J’attends des réponses sur ces points. (MM. Philippe Folliot, Alain Houpert et Olivier Paccaud applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Philippe Vigier, ministre délégué. Je ne peux que répondre à une telle interpellation du sénateur Maurey.
En effet, j’ai dit à l’époque que la suppression de la réserve parlementaire était une bêtise. Je n’ai pas pour habitude de me cacher derrière mon petit doigt. Pour le moment, je suis minoritaire dans ma conviction qu’il convient de l’adapter.
Néanmoins, monsieur le sénateur, je suis moi-même ancien parlementaire et je puis vous certifier que, dans le département dont j’étais élu, les préfets consultent systématiquement les parlementaires pour l’attribution de la DETR et de la DSIL. Et on travaille ensemble, on examine les dossiers. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Somon. Certainement pas pour la DSIL !
M. Philippe Vigier, ministre délégué. Je vous invite donc à faire un travail de pédagogie, vous y arriverez ! Je connais bien Hervé Maurey, je suis persuadé qu’il fait lui-même le tour des communes tous les samedis et qu’il n’a pas besoin de la réserve parlementaire pour garder le lien avec les maires. Ne nous racontons pas d’histoires : la confiance ne naît pas seulement parce que l’on apporte 10 000, 50 000 ou 120 000 euros par an !
Mme Patricia Schillinger. Heureusement !
M. Olivier Paccaud. Personne n’a prétendu cela !
M. Philippe Vigier, ministre délégué. Lorsque l’on a accès à la DETR, à la DSIL ou au fond vert, les montants sont bien plus élevés.
Pour l’attribution du FDVA – un député et un sénateur par département, je le rappelle –, une instruction est partie des services de Dominique Faure vers tous les préfets pour exiger que tous les parlementaires soient invités aux réunions de fin de campagne de ce fonds. Je ne doute pas que, si elle n’était pas appliquée, vous nous le feriez savoir… Surveillez donc le courrier, et si vous ne voyez pas arriver ces invitations, prévenez-nous.
Ensuite, tous les dossiers de FDVA sont désormais envoyés quinze jours à l’avance aux parlementaires. J’ai constaté avec mon successeur à l’Assemblée nationale que tel avait bien été le cas dans notre département. J’imagine qu’il en ira de même partout.
Enfin, les planchers des FDVA ont été revus. Ils sont restés à 5 000 euros en Île-de-France, eu égard au nombre d’organismes contributeurs, et à la puissance particulière de la région et de ses départements ; ailleurs, ils sont passés à 500 euros, ce qui permet d’intervenir rapidement.
En 2018, le FDVA a démarré avec 28 millions d’euros, il est doté de 70 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2024. L’effort est donc considérable.
En outre, 82 % des associations financées sont de petites structures, qui reçoivent des dotations deux fois et demie plus importantes qu’avant la suppression de la réserve. Elles sont donc mieux financées. (M. Jean-Marc Boyer s’exclame.) Ma ligne est, certes, minoritaire au sein du Gouvernement, mais elle aura peut-être contribué à faire bouger les choses.
Sur le cumul des mandats, j’ai entendu le sénateur Féraud expliquer que tout était de la faute du « nouveau monde ». Pourtant, la loi NOTRe, qui date de 2015, a donné naissance à des monstres territoriaux ; je suis bien placé pour le savoir : mon canton fait 82 kilomètres de long ! La proximité de terrain n’est donc plus au rendez-vous. Des politiques menées par les uns et par les autres ont donc donné lieu à des anomalies,…
M. Olivier Paccaud. Il suffit alors de les corriger !
M. Philippe Vigier, ministre délégué. … mais je n’ai pas remarqué dans son propos une seule critique de la loi NOTRe, censée renforcer la proximité. Il ne me semble pourtant pas que celle-ci ait contribué à mobiliser les électeurs dans les territoires. Je ne suis d’ailleurs pas persuadé que la réserve parlementaire serve à cela non plus.
J’ai entendu une autre affirmation étonnante : la réserve aurait constitué le lien entre un parlementaire et un maire. C’est la première fois que j’entends cela ! Mes échanges avec les maires ne tournent pas qu’autour des subventions (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) ; nous parlons de leurs difficultés, de leurs projets, de leurs dossiers avec la région et le département, d’aménagement du territoire, mais ils ne sont pas là pour me faire les poches !
Bref, ce projet n’est pas mûr, c’est ainsi ; il aboutira peut-être un jour.
Soulignons tout de même que la DETR a augmenté de 200 millions d’euros entre 2016 et 2018, passant de 816 millions d’euros à 1,058 milliard d’euros. Elle est, certes, restée stable depuis lors, mais elle a connu 20 % de hausse en deux ans, c’est rare ! D’autant que cela est intervenu après cinq années de baisse continue, entre 2012 et 2017, qui s’est soldée par 13,5 milliards d’euros en moins pour les collectivités. N’hésitons pas à le rappeler, car l’histoire est fugace. J’avais pu constater à l’époque les conséquences de cette baisse de 13,5 milliards dans le budget de la commune dont j’étais maire…
Par conséquent, soyons honnêtes et additionnons toutes les dotations, qui sont en outre fongibles, les instructions en ce sens ont été données aux préfets. À la DETR et la DSIL s’ajoute le fonds vert, qui atteindra 2,5 milliards d’euros en 2024, soit 500 millions d’euros de plus qu’en 2023. L’effort est significatif.
Ce débat est louable, il est normal que le Parlement s’en saisisse ; pour autant, le Gouvernement ne peut vous suivre aujourd’hui sur cette proposition ; poursuivons les discussions. (M. François Patriat applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur. Soyons brefs, car un deuxième texte doit être examiné dans le cadre de cette niche.
Nous comprenons l’inconfort de votre position sur ce sujet, monsieur le ministre. Si nous examinons aujourd’hui la proposition de loi organique de M. Maurey et de Mme Vérien, et si tant d’orateurs ont indiqué combien celle-ci était intéressante, c’est parce que, pour la répartition de la DETR et de la DSIL, les parlementaires ont le sentiment de n’être associés qu’à la marge, de façon quelque peu forcée.
Lorsque l’on n’a pas instruit la demande, que l’on n’a pas proposé les dossiers, que l’on est simplement convoqué sur un ordre du jour préétabli et que la décision finale revient au préfet, on a le sentiment de faire de la figuration. On peut le faire de manière intelligente et appliquée, en présentant des suggestions au préfet, mais ce n’est pas la même chose que d’identifier sur le terrain un besoin échappant aux radars des dispositifs habituels, et de décider d’y répondre directement. C’est cet objectif que nous visons avec la réserve parlementaire.
Vous évoquiez les instructions données aux préfets. Il arrive que, sur des dossiers importants, nous parvenions à demander aux préfets une répartition prévisionnelle de la DSIL, mais ce n’est pas naturel pour eux et rien ne les oblige à nous la fournir. Nous serions ravis que vous leur adressiez des instructions en ce sens.
Sur les questions de montants, tout dépend des années de référence. En 2016, la DETR était à 815 millions d’euros, en 2017, à 996 millions. Je ne suis pas sûr que l’on ait compensé les effets de la suppression de la réserve, même en passant ensuite à presque 1,05 milliard d’euros, d’autant que le ciblage reste incertain. En effet, le montant n’est pas seul en cause : l’éligibilité des petits projets, pour les petites communes, est un sujet épineux, qui nous a conduits à plafonner les montants à 20 000 euros dans cette proposition de loi organique. Pour ces petites demandes, les démarches administratives peuvent rebuter, elles sont plus aisées si elles ont de grandes chances d’aboutir. La réserve parlementaire répond à ce problème.
À présent, revenons-en, si vous le voulez bien, mes chers collègues, au contenu du texte.
Mme la présidente. L’amendement n° 15, présenté par M. Capo-Canellas, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéas 6 à 8
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
2° À la première phrase du premier alinéa de l’article 11, après le mot : « imprévisibles », sont insérés les mots : « et sur la dotation pour projets d’intérêt local » ;
La parole est à M. le rapporteur.
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel tendant à corriger un problème légistique.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 11 rectifié, présenté par M. Maurey et Mme Vérien, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 10
Remplacer les mots :
la liste
par les mots :
une liste
II. – Après l’alinéa 21
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« III. – Après l’entrée en vigueur de la loi de finances, les commissions chargées des finances de chaque assemblée peuvent adresser au Gouvernement des listes complémentaires de projets d’intérêt local que les députés et les sénateurs lui proposent de soutenir par des subventions pour l’année en cours. » ;
La parole est à M. Hervé Maurey.
M. Hervé Maurey. Cet amendement vise à renforcer la souplesse du dispositif proposé dans le texte de la commission, et je salue la qualité du travail réalisé par le rapporteur.
La rédaction de la commission prévoit que la liste des projets d’intérêt local est transmise « pour l’exercice suivant ». Je souhaite compléter ce dispositif en précisant que des listes complémentaires de projets pourront être transmises en cours d’exercice. En effet, si nous sommes obligés de donner la totalité de la liste des projets avant le début de l’exercice budgétaire, nous perdons une grande partie de la souplesse qui faisait l’intérêt et la richesse de la réserve parlementaire.
M. Olivier Paccaud. Exact !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur. La commission est naturellement à l’écoute de l’excellent coauteur de cette proposition de loi organique et nous partageons sa volonté de conserver de la souplesse dans le dispositif.
Sur la rédaction même, nous avons eu différents échanges et nous avions à l’esprit une formulation proche de cet amendement. Celui-ci vise à permettre aux commissions des finances d’établir des listes complémentaires de projets en cours d’exercice, ce que nous pouvons entendre.
La préoccupation de la commission des finances était d’éviter que cela conduise à trop de lourdeur dans la pratique. Le texte, tel qu’il est rédigé, n’interdit pas la préparation de plusieurs séries de propositions de projets d’intérêt local, car une liste peut être présentée en plusieurs temps.
C’est donc une question d’appréciation : vous souhaitez aller vers plus de précision, mais il s’agit d’une proposition de loi organique. La commission s’interroge sur la pertinence d’une telle précision, mais s’en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
Il reviendra in fine au Gouvernement de discuter avec les commissions des finances des modalités de mise en œuvre de la mesure, dans un cadre conventionnel.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?